qualité de vie au travail et qualité des soins dans les

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Qualité de vie au travail et qualité des soins dans les établissements de santé
Séminaire du 21 octobre 2010
Contexte
La HAS est chargée de la certification des établissements de santé publics et privés
(hôpitaux et cliniques), c’est-à-dire d’un mécanisme d’évaluation externe de la qualité de ces
établissements.
Le dispositif de certification est structuré autour d’un manuel de certification comportant un
ensemble d’exigences et d’une procédure de certification qui comporte plusieurs étapes :
une auto-évaluation par les professionnels de l’établissement, une visite par des
professionnels de santé experts-visiteurs, un rapport comportant d’éventuelles
recommandations et dont la diffusion est publique, un mécanisme de suivi. Une visite de
certification a lieu tous les quatre ans pour chaque établissement de santé.
Des exigences relatives à la mise en place par les établissements de démarches sur la
qualité de vie au travail ont été introduites dans la dernière version du manuel de certification
dite V2010. Elles complètent les exigences déjà présentes dans les manuels antérieurs sur
la santé et la sécurité au travail.
Le thème de la qualité de vie au travail a été retenu car :
ƒ
le secteur hospitalier n’est pas épargné par les phénomènes globaux d’intensification
du travail et d’augmentation des pathologies associées aux contextes professionnels.
La littérature scientifique mais aussi des études plus empiriques1 font apparaître
l’existence d’un cercle « vertueux » liant qualité de vie au travail/conditions de travail
et qualité des soins/bientraitance des patients.
ƒ
Une enquête auprès des professionnels a montré que le thème des conditions de
travail fait l’objet d’une attente forte de leur part vis-à-vis de la certification des
établissements de santé.
ƒ
Au-delà de la mise en place du dispositif de certification, la HAS en assure le
« portage ». C’est-à-dire qu’en appui des exigences présentes dans le manuel de
certification, elle met en œuvre des actions de communication et d’accompagnement
permettant de renforcer l’appropriation par les professionnels et les experts-visiteurs
des attentes de la HAS. Il peut s’agir de réaliser une sensibilisation ou une
information dans des congrès ou dans des formations, d’établir des guides
méthodologiques, de mettre en place un partage d’expériences, de contribuer à
l’accompagnement en région des établissements.
Compte tenu de l’importance et de la relative nouveauté de ce thème, la HAS souhaite
assurer le « portage » de la thématique « qualité de vie au travail ».
Ces raisons ont conduit la HAS à organiser ce séminaire.
1
Rapport sur la maltraitance ordinaire publié par la HAS en janvier 2010 – http : //www.has-sante.fr.
Eléments de problématique
Qualité de vie et santé au travail : diagnostic et action des pouvoirs publics, des acteurs
sociaux et des entreprises
Le travail a profondément changé en trente ans dans tous les domaines d’activité avec un
accroissement de son intensité, de l’individualisation, de la flexibilité. Cette évolution a pour
conséquence un risque majeur sur la santé et la qualité de vie au travail sur lequel il est
indispensable d’agir2.
Cette question s’est imposée dans le champ politique ces derniers mois du fait notamment
de la recrudescence des suicides au travail, de la prise de conscience du phénomène de
stress et de pathologies du travail. De nombreuses démarches sont en cours : action du
Ministère du travail, de l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail
(ANACT), travaux de l’Assemblée Nationale et du Sénat, accord cadre pour les trois
fonctions publiques…
Cette question est également prégnante dans le domaine de la santé. Les établissements de
santé sont particulièrement touchés par les situations de burn-out3. Le ministère de la santé
promeut les démarches d’amélioration de la qualité de vie au travail et sur la santé au travail.
Il est chargé de décliner dans la fonction publique hospitalière l’accord cadre national sur les
conditions de travail. Les professionnels et acteurs du secteur se saisissent de cette
question (exemple : études multiples, sur le turnover et les abandons de carrière (PresstNext4 et SESMAT), sur les liens entre démarche participative et qualité de vie (GRASSPHO5,
AFSOS), sur les contraintes organisationnelles et psychologiques pesant sur les soignants
(ORSOSA6), mise en place d’un observatoire de la souffrance au travail par un syndicat
d’anesthésistes, actions de formation par l’ANFH7, projets de certaines directions de soins,
démarche des hôpitaux attractifs8 ou magnétiques.
2
Gollac M. L'intensité du travail : Formes et effets. Rev Econ 2005 ; 56(2) : 195-216. http : //www.ceerecherche.fr/fr/doctrav/intensite_travail_trajectoire_doc93.pdf ;
Volkoff S. L’ergonomie et les chiffres de la santé au travail : ressources, tensions et pièges. Octarès Editions, 2005 ;
Davezies P. 30e Congrès national de médecine et santé au travail. Stress, pouvoir d'agir et santé mentale. Arch Mal
Prof Environ 2008 ; 69(2) : 195-203.
Clot Y. Le travail à cœur : pour en finir avec les risques psychosociaux. Paris : Edition la Découverte ; 2010.
3
Jean E Wallace, Jane B Lemaire, William A Ghali, Physician wellness: a missing quality indicator, The Lancet,
Volume 374, Issue 9702, 14 November 2009-20 November 2009, Pages 1714-1721,
Aiken LH, Clarke SP, Sloane DM, Sochalski J, Silber JH. Hospital nurse staffing and patient
mortality, nurse burnout, and job dissatisfaction. JAMA 2002 ; 288(16) : 1987-93.
4
Estryn - Béhar M. Santé et satisfaction des soignants au travail en France et en Europe. Rennes : EHESP ; 2008.
5
Colombat P, Nallet G, Jaulmes D, Ceccaldi J, Gardembas-Pain M, Bauchetet-Delan C, et al. De la démarche
palliative aux soins de supports ou du groupe de réflexion sur l'accompagnement et les soins palliatifs en hématologie
(GRASPH) au groupe de réflexion sur l'accompagnement et les soins de support pour les patients en hématologie et oncologie
(GRASSPHO). Oncologie 2008 ; 10(2) : 96-101.
Pronost AM, Le Gouge A, Leboul D, Gardenbas-Pain M, Berthou C, Giraudeau B, et al. Effet des caractéristiques des
services en oncohématologie développant la démarche palliative et des caractéristiques sociodémographiques des soignants
sur les indicateurs de santé : soutien social, stress perçu, stratégie de coping, qualité de vie au travail. Oncologie 2008 ; 10(2) :
125-34.
6
Trichard, Vignaud M-C, Herin F, Gabinski P, Broessel N,. Druet-Cabanac P-M, Caroly S, Lang T, De Gaudemaris R,
Sobaszek A. Contraintes psychologiques et organisationnelles chez les soignants (CPO) : présentation de l’étude ORSOSA.
Arch Mal Prof. 2009;70:28-35.
7
8
Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier
Stordeur S. Les magnet hospitals, du soutien organisationnel à la qualité des soins. Soins Cadres 2005 ; 10(2 n°
Spécial) : 2-5.
Des moyens d’action sont identifiés pour agir sur ce phénomène. Il peut s’agir de politiques
nationales ou régionales du travail et de politiques d’entreprise mettant en œuvre un
management participatif associant les acteurs, assurant une reconnaissance des personnes,
étudiant les conditions de réalisation du travail réel pour l’améliorer. Cette dernière approche
doit viser notamment la mise en place de collaborations dans les entreprises et éviter
l’isolement des salariés.
Le lien entre qualité de vie au travail et qualité du travail
Les développements de la HAS sur la maltraitance/bientraitance des patients et de leurs
proches dans les établissements de santé ainsi que des études internationales récentes sur
les soins et organisations « centrées patient »9 ont mis en lumière les liens étroits et
complexes entre conditions de travail/qualité de vie au travail et bientraitance.
Les professionnels interrogés dans le cadre de l’élaboration du rapport sur la maltraitance
« ordinaire » dans les établissements de santé et ceux qui ont eu l’occasion d’y réagir ont
souligné que les services « bientraitants » avec les patients sont aussi très souvent des
services où les professionnels aiment travailler, et que les problèmes de management, de
(dé)-valorisation des personnels favorisent le développement de la maltraitance sous toutes
ses formes.
Par ailleurs la littérature internationale montre qu’il existe un lien entre les conditions de
travail et des dimensions de la qualité des soins (satisfaction du patient, erreurs
médicales…)10.
D’une manière plus générale, la littérature suggère l’existence de liens complexes entre le
climat organisationnel et/ou certains types de management et d’autres éléments tels que la
satisfaction au travail ou la sécurité des soins11.
Le débat sur démarche qualité et souffrance au travail
Plusieurs auteurs (Dejours12, Gollac13) citent la démarche qualité parmi les causes
d’accroissement de la souffrance au travail. Le mécanisme en cause est que la démarche
qualité ajoute des exigences qualitatives à des exigences quantitatives, accroît les
« prescriptions » sur le travail, génère un écart entre le travail prescrit et le travail réel et in
fine place les opérateurs dans une situation intenable dans laquelle pèse une exigence de
« zéro défaut » ou de « qualité totale » inatteignable.
Cette analyse rejoint d’autres analyses précédemment appréhendées par la HAS,
notamment celle des experts en sécurité et des ergonomes sur les limites de la démarche
qualité pour gérer les risques, la démarche qualité conduisant souvent à la mise en place de
procédures formelles avec écart entre le travail prescrit et le travail réel.
9
V S Raleigh, D Hussey, I Seccombe, et al. “Do associations between staff and inpatient feedback have the potential
for improving patient experience? An analysis of surveys in NHS acute trusts in England”, Qual Saf Health Care 2009 18: 347354
10
Notamment : Stone P.W., et al. “Nurse working condition and patient safety outcomes”. Med Care 45 : 571-578, Jun.
2007 ; Vahey D.C., et al. “Nurse burnout and patient satisfaction”. Med care 42 (Suppl.2) : I157-I166, Feb. 2004; West MA,
Guthrie, JP, Dawson, JF, Borrill, CS, Carter, M. (2006). “Reducing patient mortality in hospitals : The role of human resource
management”. Journal of Organizational Behaviour, 2006; 27:983-1002.
11
Notamment : Hoff T., Jameson L., Hannan E. Flink E. (2004). “A review of the literature examining linkages between
organizational factors, medical errors and patient safety”. Shortell SM, Zimmerman JE, Rousseau DM, et al. “The Performance
of intensive care units : does good management make a difference ?” Med Care. 1994 ; 32 : 508-528.
12
Dejours C. Le facteur humain. Paris : PUF ; 2005.
13
Gollac M. L'intensité du travail : Formes et effets. Rev Econ 2005 ; 56(2) : 195-216
Les approches théoriques de la qualité et l’existence d’expériences pertinentes
d’amélioration continue de la qualité14 incitent à considérer que la mise en place de ces
démarches sur un mode participatif permet à la fois d’améliorer la qualité et la sécurité des
soins et d’agir de façon bénéfique sur la qualité de vie et la santé au travail.
La HAS est en charge de promouvoir la mise en place de démarches d’amélioration de la
qualité et d’évaluer leur mise en œuvre ; elle est très attentive à cette question et souhaite
l’approfondir en aval du séminaire afin de guider les établissements vers les approches les
plus adaptées en matière de démarche d’amélioration.
Les objectifs du séminaire et ses suites
L’objectif du séminaire est de partager l’analyse des enjeux et d'identifier les voies pour y
répondre, à partir des expertises et expériences liées à la qualité de vie au travail dans
l’ensemble des domaines d’activité et plus spécifiquement en établissements de santé, avec
les différentes parties intéressées (ministères de la santé et du travail, représentants des
établissements de santé, assurance maladie et financeurs, ordres professionnels, etc.)
Le séminaire est une étape dans la promotion par la HAS du thème qualité de vie au travail
et de son « portage » auprès des professionnels et des établissements de santé.
Plusieurs actions sont d’ores et déjà prévues en aval du séminaire, notamment :
ƒ
La publication des actes du séminaire : il s'agit d'un séminaire fermé réservé aux
« institutionnels » mais les actes qui en sont issus seront mis en ligne sur le site
Internet de la HAS permettant à l’ensemble des professionnels de prendre
connaissance des interventions et des débats.
ƒ
La mise en ligne, sur le site Internet de la HAS, d’informations sur la qualité de vie au
travail disponibles grâce au travail de préparation du séminaire.
ƒ
La mise en place de travaux visant à guider les établissements dans une démarche
sur la qualité de vie et santé au travail et les experts-visiteurs dans leur mission
d’analyse des actions des établissements sur le terrain.
ƒ
La coordination de la démarche avec les actions de développement d’indicateurs sur
le sujet.
ƒ
La réflexion sur les conditions de mise en œuvre des démarches qualité afin de
s’assurer de leurs bénéfices et sur la qualité des soins et sur la qualité de vie au
travail
ƒ
La poursuite d’une sensibilisation et d’une communication sur le sujet qui conduira à
inscrire ce sujet comme thème des actions de communication mises en place par la
HAS.
De plus, la HAS souhaite agir en synergie avec l’ensemble des acteurs concernés par cette
thématique pour la faire progresser. Ce séminaire est une opportunité pour identifier les
voies selon lesquelles une action coordonnée entre les structures concernées pourrait
s’organiser.
14
Notamment ceux promus par l’Institute for Healthcare Improvement (IHI) ou les Safer patient initiatives du NHS
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