Les principaux comportements macro-économiques Université de Rennes 1 – Faculté de Droit et de Science Politique Antenne de Saint-Brieuc Consommation et épargne L’analyse keynésienne et ses développements DEUX CONCEPTS FONDAMENTAUX CHEZ KEYNES : - La propension moyenne à consommer PMC = C / Y : Part du revenu (Y) en moyenne consacré à la consommation (C) - La propension marginale à consommer PmC = (Ct – Ct-1) / (Yt – Yt-1) : Variation de la consommation (Ct – Ct-1) consécutif à une variation (faible) du revenu : (Yt – Yt-1). Fonction de Consommation Keynésienne C C=Y C = C0 + c Y PIB et Consommation Finale des Ménages en France PIB 1800 Consommation 1600 1400 1200 1000 800 600 400 200 2004 2002 2000 1998 1996 1994 1992 1990 1988 1986 1984 1982 1980 0 1 Propensions moyenne et marginale à consommer en France 2 PMC PmC 1,5 1 0,5 20 02 20 00 19 98 19 96 19 94 19 92 19 90 19 88 19 86 19 84 19 82 19 80 0 -0,5 Cependant, on ne retrouve pas dans les données les arguments de la loi psychologique de Keynes : - La propension marginale à consommer oscille autour de 1 - La propension moyenne à consommer est constante (0,6) L’analyse de Milton Friedman et l’hypothèse du revenu permanent M. FRIEDMAN : Une théorie de la fonction de consommation (1957) Le revenu de toute la période semble fortement relié à la consommation de toute la période. Les ménages décident de consommer en fonction de ce qu’ils imaginent être leur revenu tout au long de leur vie. Le consommateur va chercher : C 0 , C1 ,..., Ct , Ct +1 ,....C ∞ en fonction d’une contrainte budgétaire qui elle-même est inter-temporelle (CBI) Pour simplifier on considère seulement le cas de deux périodes 1 et 2 et l’on définit les relations comptables suivantes : C1 = Y1 − S C 2 = Y2 + (1 + i ) S Ces deux relations peuvent être regroupées dans une relation exprimant la CBI C2 Y = Y1 + 2 1+ i 1+ i Le terme de gauche représente la valeur actualisée de la consommation, c’est-à-dire la valeur de l’ensemble des consommations à la période 1 plus la valeur à la période 1 des consommations de la période 2. C1 + Le terme de droite représente la valeur actualisée du flux de revenu du consommateur. 2 Comment interpréter l’actualisation ? Si demain vous gagner un revenu Y2, le montant maximal que vous pouvez emprunter aujourd’hui est : X = Y2 / (1+i) où (i) est le taux d’intérêt de votre emprunt. A la période 2, la banque vous demande de rembourser cette somme X, augmentée des intérêts i.X, soit au total (1+i)X. Immédiatement vous voyer que ce remboursement correspond exactement au revenu Y2.(c’est-à-dire que l’on vérifie bienY2 = (1+i)X). FRIEDMAN définit alors le revenu permanent Yp comme étant équivalent à un flux périodique de revenu qui donnerait la même valeur actualisée que les revenus futurs anticipés. Yp Y2 1+ i 1+ i Ce n’est pas le revenu courant qui détermine le plus la consommation mais la richesse totale que l’agent anticipe qu’il percevra tout au long de sa vie. Yp + = Y1 + Les agents qui anticipent que leur revenu vont progresser s’endettent à la période 1 (S est négatif) puis rembourse à la période 2 et il est alors possible d’avoir C1 = C2 alors que Y1 < Y2 L’investissement et l’accumulation du capital Le rôle de la demande et le principe de l’accélérateur PIB et Formation Brute de Capital Fixe : un premier repérage en France 1800 PIB 1600 FBCF 1400 1200 1000 800 600 400 200 04 02 20 00 20 98 20 96 19 94 19 92 19 19 90 88 19 86 19 84 19 82 19 19 19 80 0 3 Pas de liens évidents Taux de croissance du PIB et de la Formation Brute de Capital Fixe c rois s anc e d u P IB c rois s anc e d e l'in ves t is s em en t 20 15 10 5 2003 2001 1999 1997 1995 1993 1991 1989 1987 1985 1983 1981 0 -5 Deux remarques L’investissement connaît des variations plus importantes que le revenu. Les variations de l’investissement semblent précéder celle du revenu. On définit une fonction de production macro-économique du type : Y = f ( K , L) (1) Nous ne nous intéressons pas à la forme de la fonction f, ni au « facteur travail ». Il est très facile d’écrire l’équation d’accumulation du capital : K t = (1 − δ ) K t −1 + I t (2) Le stock de capital physique l’année t, correspond au stock de l’année précédente (mais qui s’est déprécié au taux δ , et au nouveau capital acquis cette année, ce qui est précisément la définition de l’investissement I. La relation 1 décrit une relation (probablement pas proportionnelle, mais ce n’est pas l’important) entre le niveau du capital et le niveau de la production Y = f (K ) . Pour faire varier Y il faut aussi faire varier K : ∆Y = f ' (∆K ) , et l’on sait que I t ≡ K t − K t −1 ≡ ∆K t , Tant et si bien que l’on ne doit pas s’attendre à une relation entre les niveaux de l’investissement et du revenu mais entre le niveau de l’investissement et le taux de croissance du revenu. I = g (∆Y ) Autrement dit : lorsque la croissance (de l’activité, du revenu) est plus forte, le montant de l’investissement est plus fort et un simple ralentissement de la croissance suffit à réduire le montant de l’investissement. Cette relation est décrite comme le principe de l’accélérateur simple. Est-ce que cette explication est bien corroborée par la réalité ? réponse NON on observe plutôt (si elle existe !) une relation négative entre le niveau de l’investissement et le taux de croissance du PIB. 4 12000 niveau du PIB 10000 8000 6000 4000 2000 0 0 500 1000 1500 2000 2500 niveau de FBCF Le principe de l’accélérateur multiple 10000 2000 niveau de FBCF 2500 niveau du PIB 12000 8000 6000 4000 1500 1000 2000 500 0 -30 -20 -10 0 10 20 30 40 50 0 -30 -20 -10 variation de FBCF 0 10 20 30 40 50 croissance du PIB Le niveau de l’investissement dépend positivement du niveau de la demande La variation de l’investissement dépend négativement du capital accumulé (ici approché par le revenu) Les rôles du secteur public Les dépenses publiques et les prélèvements Aperçu statistique sur la période 1998-2005 Dépenses Consommation des Investissement des Dépenses de transferts et APU APU subventions Allemagne 19.07 1.71 24.57 2.92 Danemark 26.14 1.75 25.72 1.76 France 23.63 3.11 24.86 2.75 Royaume-Uni 19.42 1.45 18.12 2.17 Japon 16.80 4.86 13.26 1.45 Suède 27.50 3.10 26.64 0.78 États-Unis 14.91 3.17 15.74 2.33 Service de la dette Prélèvements 5 Prélèvements directs Prélèvements directs Prélèvements sociaux Prélèvements indirects sur les ménages sur les sociétés Allemagne 10.07 1.08 21.57 11.94 Danemark 26.93 3.03 6.78 17.63 France 9.15 2.63 22.70 15.42 Royaume-Uni 12.62 3.45 9.77 13.35 Japon 5.21 3.03 11.56 8.38 Suède 17.48 2.82 20.02 17.07 États-Unis 10.92 2.27 11.90 7.24 Sources : Perspectives économiques de l’OCDE, 2005. Données moyennes exprimées en pourcentages du PIB. Les multiplicateurs budgétaires Dans l’économie fermée Dans la première partie nous avons vu que les dépenses publiques constituaient une part importante de la demande agrégée : Y =C +I +G (1) On appelle k le multiplicateur de la dépense publique, il exprime la variation du revenu Y produite par une augmentation de la dépense publique G. k= ∆Y ∆G (2) A partir de (1) nous pouvons encore écrire : G = Y − C − I , d’où : k= or : ∆Y (∆Y ) / ∆Y = ∆Y − ∆C − ∆I (∆Y − ∆C − ∆I ) / ∆Y ∆Y ∆C ∆I =1 =c =0 ∆Y ∆Y ∆Y avec c qui représente la propension marginale à consommer On suppose –dans un premier temps- que l’investissement est autonome et ne varie pas en fonction de la variation du revenu. Il vient alors : k= 1 1− c (3) Il s’agit de la forme la plus simple du multiplicateur keynésien de la dépense publique. Il indique qu’une variation de 1% de la dépense publique entraîne une variation de k% du revenu et k>1. Introduisons les prélèvements Les ménages allouent leur revenu Y entre consommation C et épargne, S mais en réalité ils n’allouent que le revenu disponible après impôts T de sorte que : Y −T = C + S (4) On peut écrire des équations de comportement très simples : 6 T = T0 + tY C = C 0 + c(Y − T ) I = Io d’où l’on sort : Y = C 0 + c(Y − T0 − tY ) + I 0 + G soit : Y − cY + ctY = C 0 − cT0 + I 0 + G [1 − c(1 − t )]Y = C 0 − cT0 + I 0 + G soit encore : et enfin en supposant : ∆G > 0, ∆T0 = ∆C 0 = ∆I 0 = 0 (c’est-à-dire toute chose égale par ailleurs) k= ∆Y 1 = ∆G 1 − c(1 − t ) (5) La pression fiscale (proportionnelle) réduit l’effet multiplicateur. On remarque aussi que si ∆T0 > 0, ∆G = ∆C 0 = ∆I 0 = 0 , on obtient le multiplicateur de la pression fiscale : k'= ∆Y −c = ∆T0 1 − c(1 − t ) (6) Dans une économie mondialisée, ouverte sur l’extérieur Y +M =C +I +G+ X avec les comportements suivants : T = T0 + tY C = C 0 + c(Y − T ) I = Io (à commenter) X = X0 M = M 0 + mY en suivant le même raisonnement on obtient : k= ∆Y 1 = ∆G 1 − c(1 − t ) + m Evolutions françaises (1) 4 5 3 4 3 2 1 2 -1 19 81 19 83 19 85 19 87 19 89 19 91 19 93 19 95 19 97 19 99 20 01 20 03 -1 - 01 99 97 95 03 20 20 19 19 91 93 19 19 87 85 89 19 19 19 83 -3 0 -2 19 -2 1 19 19 81 0 -4 -5 -6 -7 croissance réelle balance commerciale solde budgétaire croissance réelle des dépenses publiques En France, les dépenses publiques « suivent » l’évolution de la croissance 7 - Le pic des dépenses en 1993 ne permet pas d’éviter la récession. - depuis 1992 le solde commercial de la France s’améliore et est resté positif depuis 1993. Les épisodes d’expansion budgétaire (ie de baisse du solde budgétaire) en 1990-1993 et en 2001-2003 n’ont pas inversé la tendance Evolutions françaises (3) dette publique 70 60 50 40 30 20 10 19 81 19 83 19 85 19 87 19 89 19 91 19 93 19 95 19 97 19 99 20 01 20 03 0 - Par contre le ratio d’endettement public est multiplié par 3 en 20 ans. Dettes et déficits Débats sur l’équivalence ricardienne Le principe du déficit est de reporter la charge des dépenses dans le futur, replaçons nous dans le cadre simple à deux périodes pour représenter cette dynamique/ La contrainte budgétaire des ménages s’écrit : C1 + C2 Y − T2 = Y1 − T1 + 2 1+ i 1+ i (1) ce qui s’interprète de la manière suivante : la valeur actualisée des consommations courantes et futures est égale à la valeur actualisée des revenus disponibles. De la même manière le gouvernement qui crée un déficit ne vérifiera sa contrainte budgétaire que sur plusieurs années de sorte que G1 + G2 T = T1 + 2 1+ i 1+ i (2) Selon cette contrainte, lorsque le gouvernement augmente G1, il devra augmenter T1 ou alors il fait un déficit en t=1 mais doit augmenter T2 pour rembourser l’emprunt. A partir du moment où les agents perçoivent cette contrainte, leur contrainte budgétaire peut être réécrite de la manière suivante : C1 + C2 Y − G2 = Y1 − G1 + 2 1+ i 1+ i (3) Dans ce cas l’augmentation de G que se soit aujourd’hui (en t=1) ou celle que l’on anticipe pour demain (t=2) réduit le revenu actualisé (ie le revenu permanent) et donc la consommation :C1 et/ou C2 diminue(ent) !!! Soit l’exact contraire de la théorie keynésienne de l’effet multiplicateur !!! 8 Le lissage fiscal de Barro France ÉTATS UNIS 6 8 4 6 2 4 2 19 81 19 83 19 85 19 87 19 89 19 91 19 93 19 95 19 97 19 99 20 01 20 03 0 0 01 03 20 97 95 93 99 20 19 19 19 89 87 85 83 91 19 19 19 19 -4 19 19 -2 19 81 -2 -4 -6 -6 -8 -8 croissance du PIB réel croissance du PIB réel solde budgétaire solde budgétaire - La dégradation du déficit budgétaire est nettement plus longue que celle de la croissance - La perte de croissance en 1992 s’accompagne d’un accroissement ponctuel du déficit budgétaire américain. Durant les 2 administrations Clinton (1993-2001) les USA connaissent une croissance forte et stable (autour de 4%) qui s’accompagne d’un retour graduel à l’équilibre budgétaire. L’évolution du ratio dette / PIB Par définition nous pouvons écrire : Bt = (1 + r ) Bt −1 + Gt − Tt (1) Nota : G ne comprend pas les paiements des intérêts de la dette (rBt-1), d’où G-T qui représente le déficit primaire Divisons le tout par Y pour obtenir les ratios : Bt B G − Tt = (1 + r ) t −1 + t Yt Yt Yt (2) et supposons que la croissance nominale de l’économie soit égale à g tq Yt = (1+g) Yt-1., d’où : Bt (1 + r ) Bt −1 Gt − Tt = + Yt (1 + g ) Yt −1 Yt La croissance de la dette dépend : (2) (i) de la dette accumulée dans le passé (ii) des taux d’intérêt (iii) de la croissance de l économie (iv) des déficits primaires réalisés. 9