FRANCE
Catholique
www.france-
83ème année - Hebdomadaire n°3074 - 1er juin 2007 2,90 e
3:HIKLMI=YUW^U[:?d@a@i@r@k;
M 01284
- 3087 -
F: 2,90 E
ISSN 0015-9506
Alexis II
enjeux d’une visite en France
pages 8 à 12
Des prêtres
pour le Brésil
pages 18 à 20
Enfance
et sainte
pages 22-23 et 30 à 32
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Catholique
83e année - Hebdomadaire n°3087 - 5 octobre 2007 www.france-catholique.fr 2,90e
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BRÈVES
2 FRANCECatholique n°3087 5 o c t o b r e 2007
MONDE
DaRfOuR : Alors que Nicolas Sarkozy prési-
dait le 25 septembre à New York une session
du Conseil de sécurité consacrée à l’Afrique,
la diplomatie française plaidait pour l’envoi
au Tchad et en Centrafrique d’une force
eu ropéenne de 4 000 hommes dans le but
de stabiliser la région du Darfour : une
solution approuvant ce déploiement a été
votée à l’unanimité par le Conseil.
SahEl : Après plusieurs mois de sécheresse,
les vagues de pluies torrentielles n’ont pas
cessé depuis le mois de juin ; 22 pays sont
atteints, du Kenya au Sénégal ; un million
et demi de personnes sont affectées et plus
de 300 ont été tuées. L’Union européenne a
accordé une aide de deux millions d’euros
le 28 septembre.
BiRMaNiE : Un émissaire de l’ONU est
arrivé le 29 septembre à Rangoun ; il a
rencontré le 30 septembre l’opposante An
San Suu Kyi.
algéRiE : La société Sonatrach a annoncé,
le 26 septembre, la découverte d’un nou-
veau gisement de pétrole au Sahara, le 16e
depuis le début de l’année, à 3 600 mètres
de profondeur.
EtatS-uNiS : Lors de la conférence sur
le réchauffement climatique organisée à
Washington, G. Bush a manifesté le 28
septembre son opposition à la mise en place
de quotas mondiaux limitant les émissions
de gaz à effet de serre ; il craint que la lutte
contre le réchauffement n’entrave la crois-
sance économique.
ukRaiNE : Aux élections législatives du
30 septembre imposées par la dissolution
du Parlement en avril dernier, les par-
tis de Ioula Timochenko et du président
Ioutchenko, pro-occidentaux, ont remporté
plus de voix que le parti pro-russe ; Ioula
Timochenko pourrait former le nouveau
gouvernement.
afghaNiStaN : Le président Karzaï a pro-
posé le 30 septembre au mollah Omar de
négocier avec les talibans ; cette offre a
été rejetée.
BElgiquE : Le démocrate-chrétien flamand
Yves Leterne a été appelé par le roi des
Belges Albert II, le 30 septembre, à former
un gouvernement.
PROchE-ORiENt : Le Premier ministre israé-
lien et le président palestinien devaient se
rencontrer le 2 octobre à Jérusalem pour
tenter d’élaborer une déclaration commune
avant une conférence internationale prévue
en novembre prochain aux Etats-Unis.
fRaNcE
fiNaNcES : Le projet de loi de financement
de la Sécurité sociale pour 2008, présenté le
24 septembre, vise à ramener le déficit du
régime général de 13 milliards d’euros à 9
milliards en 2008, en particulier grâce à la
mise en place de franchises médicales et à
la taxation des préretraites.
POlitiquE : Ségolène Royal a indiqué le 28
septembre qu’elle pourrait briguer la tête
du parti socialiste lors du congrès de 2008.
Pour sa part, Laurent Fabius a réuni ses par-
tisans le 29 septembre à Sciences po.
Les parlementaires UMP réunis le 28 sep-
tembre à Strasbourg ont réclamé moins
d’ou verture et plus de réformes ; le Premier
ministre a précisé que la maîtrise des
comptes publics sera la nouvelle étape de
son action.
EMPlOi : Le nombre de demandeurs d’em-
ploi a augmenté de 11 800 au mois d’août ;
l’INSEE a confirmé le 28 septembre la
faible croissance du deuxième trimestre
à 0,3% et le recul du moral des ménages
entre juillet et septembre. La réforme des
heures supplémentaires détaxées est entrée
en vigueur le 1er octobre.
BuDgEt : Présenté en Conseil des ministres
le 26 septembre, le budget de l’État 2008
devrait se traduire par un déficit de 41,7
milliards d’euros ; 22 900 fonctionnaires
partant en retraite ne seront pas rempla-
cés.
ENViRONNEMENt : Les groupes de travail
chargés de préparer le « Grenelle de l’en-
vironnement » ont présenté le 27 sep-
tembre leurs propositions au ministre J.L.
Borloo ; celles-ci comportent notamment
la construction de logements « autosuffi-
sants » en énergie, la réduction de 10 km/h
de la vitesse maximale sur les routes et
autoroutes, le transport des camions par le
train et la taxation du transport aérien.
ciRculatiON uRBaiNE : L’opération Vélib’
est victime de son succès ; selon la pré-
fecture de Paris, 29 « vélibiens » ont été
impliqués dans un accident de la circulation
depuis la mise en place de cette opération ;
trois cyclistes ont été tués à Paris depuis
le mois de janvier 2007, contre aucun en
2006.
Plusieurs milliers de chauffeurs de taxi ont
manifesté le 26 septembre dans les grandes
villes pour protester contre la suppression
de la détaxe du carburant dès 2008 et la
remise en cause éventuelle de leur statut.
iMMigRatiON : La commission des lois du
Sénat a supprimé du projet de loi sur la
maîtrise de l’immigration, le 26 septembre,
le recours éventuel aux tests ADN pour
le regroupement familial ; l’amendement
devrait être remanié pour pouvoir être
adopté.
Une étude de « Médecins du monde »
conteste l’idée répandue selon laquelle
les immigrants viendraient en Europe
pour se faire soigner ; le Samu social de
Paris constate cependant une hausse des
demandes de séjour pour soins.
JuSticE : La cour d’appel de Versailles a
confirmé le 26 septembre la mise en exa-
men d’André Santini, secrétaire d’Etat à
la Fonction publique, pour des infractions
financières présumées lors d'un projet de
création d'une Fondation d’art contempo-
rain Jean Hamon à Issy-les-Moulineaux.
La brigade financière de Paris a été char-
gée le 26 septembre d’enquêter sur le
prélèvement, en espèces, de 5,6 millions
d’euros des comptes bancaires de l’Union
des industries de la métallurgie entre 2000
et 2007 . Ces sommes auraient pu servir à
subventionner de manière occulte certains
organismes syndicaux.
SécuRité : Alors que se déroulait à Marseille
le procès des incendiaires d’un bus dans
lequel une jeune femme avait été très gra-
vement brûlée, un autre incendie volontaire
s’est produit le 27 septembre à Châlons-
sur-Saône ; les 40 passagers ont pu sortir
avant l’embrasement du véhicule. Deux
incendiaires mineurs du bus de Marseille
ont été condamnés à huit ans de prison le
28 septembre.
ENtREPRiSES : Le groupe aéronautique
EADS privilégie des cessions en bloc pour
la reprise des sites industriels d’Airbus,
a indiqué son président Louis Gallois, le
27 septembre. Afin de sortir du face-à-
face franco-allemand à la tête d’EADS, la
création d’un conseil d’administration plus
international a été annoncée le lendemain ;
l’homme d’affaires indien Lakshimi Mittal
pourrait en faire partie.
PatRiMOiNE : Consacré à la fois à l’art
religieux et à l’art contemporain, le musée
Paul-Delouvrier situé dans la cathédrale
d’Evry a été inauguré le 30 septembre.
DiSPaRitiON : L’alpiniste René Demaison
est mort le 28 septembre à l’âge de 77 ans ;
il totalisait près de 1 000 ascensions, dont
114 premières dans les Alpes, l’Himalaya et
les Andes.
J.L.
(voir aussi en page 7)
SOMMAIRE
ACTUALITÉ
4 INTERNATIONAL Le défi birman
Yves La Marck
5 BUDGET Situation critique ?
Alice Tulle
6 AVORTEMENT Limiter les risques
Tugdual Derville
7 POLITIQUE Le coup de crayon
Emmanuel Chaunu
DOSSIER
8 ORTHODOXIE Bienvenue au
patriarche Alexis II de Moscou
Hyacinthe Destivelle / Marc Fromager
10 Doctrine sociale de l'Eglise russe
M.F.
ESPRIT
14 MOIRE DES JOURS Un honneur
Robert Masson
15 ECCLÉSIA KTO
17 LECTURES Origines du ministère ordonné
Michel Gitton
18 ÉGLISE Avec des séminaristes brésiliens
Père de Laubier
21 ÉGLISE Equateur : l'Evangile de la Vie
Marc Fromager
22 ESPRIT Enfance et sainteté
Johanne Marchal
MAGAZINE
24 B.D. L'Aventurier de Dieu, 19/36
Dominique Bar, Guy Lehideux
25 IDÉES Œcuménisme et intégrisme
Gérard Leclerc
28 COURRIER Œcuménisme, contraception...
29 EXPOSITIONS Daniel de Spirt
Pierre François
30
EXPOSITIONS
L'enfant, le jeu et Dieu
Désiré Sozet
33 CINÉMA "Un secret", "L'ennemi intime";
"Resident Evil", "Le dernier voyage du juge Feng"
M.-Ch. Renaud d’André/ M.-L. Roussel
34 THÉÂTRE "Giacomo, l'enfant de la cité"
Pierre François
35 TÉLÉVISION "La chute","Windtalkers",
"Démocratie... pour tous ?"
Marie-Christine Renaud d’André
36 TÉLÉVISION Votre début de soirée
M.-Ch. R. d’A.
38 BLOC-NOTES Vie associative et d’Église
Brigitte Pondaven
EDITORIAL
FRANCECatholique n°3087 5 o c t o b r e 2007 3
IL
Y A quarante cinq ans, le 11 Octobre 1962, s'ouvrait solennelle-
ment dans la Basilique Saint Pierre de Rome, le second concile de
Vatican. L'événement tant de fois commenté a-t-il besoin d'être
encore commémoré, a fortiori à l'occasion d'un anniversaire qui ne
justifie pas une solennisation ? Résolument oui, car un concile de
cette dimension, est par définition proprement inépuisable. On en
veut pour preuve les récentes discussions autour du Motu Proprio
sur la liturgie. Certains ont exprimé la crainte d'un retour en arrière par
rapport aux acquis du renouveau de l'Eglise. D'autres mettent en avant les
doutes que leur inspirent certaines audaces à propos de la liberté religieuse
et du dialogue interreligieux. A quoi il convient de répondre qu'un concile
est toujours à la fois une grâce et une épreuve. C'était un thème favori
du cardinal Joseph Ratzinger qu'il illustrait de nombreux exemples tirés
de l'Histoire. La réforme de toute institution se paie de troubles auxquels
l'Eglise ne saurait échapper. Par ailleurs, Vatican II s'est trouvé impliqué dans
un processus de crise de civilisation, issu des
années soixante, dont le monde occidental ne
s'est pas encore sorti et dont l'actuelle globa-
lisation prolonge indéfiniment les effets.
Contre une appréciation pessimiste, nous
sommes enclins à affirmer qu'il est heureux
que Vatican II ait eu lieu alors que cette crise
se déclenchait dans les pays occidentaux. Sans
l'enseignement conciliaire et les mises au point
auxquelles il a donné lieu, l'Eglise et les chré-
tiens auraient été infiniment plus désarmés
pour se situer dans cette dépression cultu-
relle. Les principaux documents conciliaires ont
permis un aggiornamento doctrinal et pastoral,
qui était tout autre chose qu'un facile alignement sur les idéologies du
moment. Sans doute y a-t-il, notamment pour la constitution Gaudium
et Spes, quelques éléments contingents à dépasser, mais c'est pour mieux
saisir l'essentiel qui est considérable. Grâce à cette constitution, l'Eglise est
en mesure de formuler un jugement autorisur les grands sujets débattus
dans notre monde actuel. Ayant retrouvé sa pleine indépendance spirituelle,
elle est à même de s'exprimer comme ont pu le faire les derniers papes,
singulièrement Jean-Paul II et Benoît XVI, pour la défense et l'illustration
d'une culture de vie.
Sans doute y a-t-il des leçons à retenir, notamment quant à l'information
sur le déroulement du concile et quant à l'orchestration de son enseigne-
ment. Vatican II s'est déroulé au moment même où naissait la civilisation
contemporaine des moyens modernes de communication. Le concile a été à
la fois bénéficiaire et victime d'un mode inédit de transmission, justi ciable
de ce que Régis Debray appelle la médiologie, c'est-à-dire la discipline
apte à analyser l'idéologie et les procédures de cette communication.
La prolifération des images qui coïncide avec la simplification binaire
des commentaires, l'instrumentalisation spectaculaire des thématiques,
constituent désormais un domaine d'investigation en soi. La perception et
la réception de l'événement conciliaire ont été sensiblement modifiées par
les impératifs de séduction de l'instrument de résonnance que constitue
le complexe médiatique. Aujourd'hui encore, nous avons à nous livrer à une
élucidation qui nous restitue la vérité et la profondeur d'un enseignement,
bien au-delà de ses interprétations superficielles et polémiques.
D.R.
par Gérard LECLERC
Écoutez la chronique
de Gérard Leclerc,
chaque semaine sur :
45 ans après
ACTUALITE
L
e m y a n m a r e s t s a n s d ou t e
le pays du monde où il y
a le plus de moines par
tête d’habitant. Il y a
cependant encore plus
de soldats que de moines dans
cette ancienne portion de l’Em-
pire des Indes britanniques, qui a
subi l’une des pires occupations
japonaises avant de gagner son
indépendance en même temps
que l’Inde. Les moines sont un
facteur capital de la vie de la
population très majoritairement
bouddhiste dit du Petit Véhicule
qui l’apparente à la Thaïlande
et au Sri Lanka. Ce ne sont pas
des ermites coupés du monde,
reclus dans leurs la maseries
comme dans d’autres versions
du Bouddhisme. Ce sont des
moines qui, comme en Inde,
vivent de la mendiciau long
de leurs pérégrinations. Ils
sont donc en phase avec les
préoccupations les plus quoti-
diennes du petit peuple.
Sinon, comment expli-
quer que ce soit ce clergé
de marcheurs aux pieds
nus qui ait choisi de protes-
ter contre l’augmentation du
prix des carburants ? On n’est
pas à un paradoxe près dans
ces pays qui sont si loin de nous.
La hausse du baril de pétrole se
répercute dans le monde entier,
provoquant une crise univer-
selle. Pourquoi le Myanmar
serait-il la première victime de
manifestations populaires qui
sont attendues dans la plupart
des pays de la planète ?
Le mouvement des moines
ocre et safran n’est ni violent ni
politique. Il ne débouche pas sur
une résistance armée. Ici, pas
de maquis trotskistes comme
au Népal ou au Bihar. Pas de
logorrhée idéologique. Ils ne
se réclament pas d’un parti ni
ne prétendent en créer. Quel
que soit le prestige de la prix
Nobel de la Paix 1991, Aung San
Suu Kyi, qualifiée de « Mandela
asiatique », et l’activisme du
gou vernement en exil à Londres,
présidé par son cousin Sein
Win, issu des seules élections
quait connues le pays, en 1990,
totalement oublié jusqu’à hier,
leur parti, la Ligue Nationale
pour la Démocratie, n’a plus,
au jourd’hui, les moyens ni de
sus citer les protestations, ni de
les encadrer. Le pouvoir mili-
taire s’est arrangé pour le vider
de toute substance. Les moines
occupent donc un vide béant.
Leur faiblesse fait certes leur
force. Mais cela reste une force
négative. Faute de relais, elle ne
semble pas être en mesure de
renverser la junte. Elle n’est pas
candidate au pouvoir. Elle n’est
que contestation. Lécrasement
des manifestations laisserait des
martyrs - 3 000 en 1988 - mais
le cours des choses n’en serait
pas changé pour autant. L’armée
a eu tôt fait de récupérer le
pou voir. Elle y est intéressée ;
le monde des pagodes, lui, vit
d’autres réalités. Cette coexis-
tence des deux « esprits » que
l’on retrouve en Thaïlande et au
Sri Lanka, le militaire et le bonze,
semble une clé de ces régimes
dont nous, Occidentaux, ne
connaissons pas le maniement.
Que faudrait-il pour faire
évoluer les choses ? LASEAN,
organisation régionale, n’a
jamais osé condamner vraiment
lun des siens, pas plus que ses
pairs africains ne veulent
exclure Mu gabe. La Chine
et la Russie ont opposé leur
veto au Conseil de Sécurité
des Nations Unies contre
l’imposition de sanc-
tions internationales.
États-Unis et Union
Européenne peuvent
par ler haut et fort, ils
ne sont pas dans le
jeu. Les sanctions
ne font qu’iso-
ler davan-
tage le pays.
Louver ture
internatio-
nale na
pour le
moment été
qu’une source de revenus pour
la corruption à haut niveau.
Lévolution d’un système
aussi figé est venue, finale-
ment, de lintérieur, du tréfonds
de l’identité. C’est sur ce terrain
que se jouera son destin. Il ne
faut pas renoncer à l’espoir, car
les Birmans eux-mêmes nous
montrent la voie. n
INTERNATIONAL
La Chine et la Russie ont opposé leur veto
au Conseil de Sécurité des Nations Unies
4 FRANCECatholique n°3087 5 o c t o b r e 2007
par Yves LA MARCK
Le défi birman
Les moines bouddhistes de Birmanie sont sortis de leurs
pagodes pour protester contre la vie chère. Ils ne peuvent pas
faire tomber le régime militaire le plus fermé du monde.
(
ACTUALITE
par Alice TULLE
Passées les vacances,
il était banal de
crire un François
Fillon écrasé par le
tourbillon d’initiati-
ves présidentielles. Il a cepen-
dant concent l'attention sur
lui, lors d’une visite en Corse, le
21 sep tembre. On se souvient
que, face à des de mandeurs de
subventions, il avait soupiré quil
se trouvait « à la tête d’un État
qui est en situation de faillite ».
On avait cru à un coup de co lère,
mais le Pre mier ministre avait
confirmé son diagnostic le lundi
suivant en déclarant à la radio
que le mot faillite n’était qu’une
« image » mais que nous étions
« devant l’échec d’un système »
et que cette situation n’était
plus « supportable ».
Torrent de protestations à
gauche ! Dominique de Villepin
s’était senti visé et avait répliq
avec hauteur qu’il avait « laissé
l’État dans une situation bien
meilleure qu’au jourd’hui ». Bête
noire de l’Élysée en raison de sa
politique de l’euro fort, Jean-
Claude Trichet avait, lui, appuyé
le Premier ministre en af firmant
que « les finances publiques
françaises sont en très grande
difficulté ».
Ce diagnostic est-il fondé ?
Même un libéral comme Jean-
Claude Gréau, en principe favo-
rable à l’équilibre budgétaire,
soutient qu’il n’y a pas péril en
la demeure : « si la France est en
faillite, la moitié de la planète
est dans la même situation !
Les dettes publiques japonaise,
ita lienne, belge, néerlandaise et
même allemande sont propor-
tionnellement plus importantes
que latre ». (1)
De fait, notre situation finan-
cière est moins catastrophique
qu’il n’y paraît. Du lundi 24, date
des dernières clarations de
François Fillon, au mercredi 26
septembre, date de la présen-
tation du projet de budget en
Conseil des mi nistres, nous
sommes passés de l’alarmisme
à une très tranquille présen-
tation des comptes publics : le
gouvernement prévoit un taux
de croissance compris entre 2
et 2,5 % l’année prochaine, une
augmentation du pouvoir d’achat
de 2,5% , une hausse très modé-
rée des prix à la consommation
(1,6%) et un déficit budgétaire
de 41, 721 milliards d’euros soit
une réduction très modeste du
quilibre puisqu’on passerait
de 2,4% en 2007 à – 2,3% en
2008. Pour atteindre cet objec-
tif, le gouvernement a décidé de
ré duire le nombre des fonction-
naires : un départ à la retraite
sur trois ne sera pas remplacé,
soit la suppression de 22 900
postes. Par ailleurs, le niveau des
dépenses publiques ne devrait
pas augmenter plus vite que l’in-
flation. Officiellement, on conti-
nue de penser que les réductions
d’impôts votées cet été elles
pèsent lourdement sur le budget
– auront des conséquences très
positives sur la croissance, ce
qui permettra une amélioration
progressive des rentrées d’ar-
gent.
Dès lors, pourquoi l'accès de
pessimisme de François Fillon ? Il
est permis de prendre au sérieux
deux hypothèses :
Il peut y avoir un véritable
débat entre Nicolas Sarkozy, qui
continue à croire qu’un « choc
de croissance » se produira,
comme un électrochoc, dans
les prochains mois, et François
Fillon qui serait partisan dune
politique de rigueur budgétaire.
Il n’est pas impossible non
plus que lÉlysée et Matignon
aient pris ensemble la décision
de préparer l’opinion à une poli-
tique de rigueur qui serait mise
en œuvre après les élections
mu nicipales de mars 2008. La
gauche pointe cette menace,
mais l’hypothèse circule égale-
ment dans les cercles gouver-
nementaux.
En fait, les décisions seront
prises en fonction des consé-
quences effectives de la crise
financière américaine et du
ni veau de l’euro qui, pour l’heure,
continue de monter et de pénali-
ser l’industrie française. n
(1) cf. notre entretien avec
Jean-Luc Gréau : « La France
est-elle menacée de faillite ? »
France Catholique n° 3084,
14 septembre 2007.
Situation critique ?
BUDGET
FRANCECatholique n°3087 5 o c t o b r e 2007 5
Nous sommes passés de l'alarmisme
à une tranquille présentation des comptes
Le Premier ministre ayant lancé, quelques jours avant de
présenter son Budget, que « l’État est en situation de faillite »,
faut-il s'attendre à des révisions douloureuses ?
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