PRÉSERVATION DE LA FERTILITÉ POUR DÉPLÉTION ANTICIPÉE DES GAMÈTES HADY EL HACHEM, MD Médecine de la reproduction, département d’obstétriquegynécologie, CHUM - clinique ovo CORALIE BEAUCHAMP, MD ovo fertilité, clinique ovo KAREN BUZAGLO, MD ovo fertilité, clinique ovo MARIE-ALEXIA ALLARD, PhD Psychologue - clinique ovo LOUISE LAPENSÉE, MD Médecine de la reproduction, département d’obstétriquegynécologie, CHUM - clinique ovo CLINIQUE OVO I 8000 BOUL . DÉCARIE , MONTRÉAL QC H 4 P 2 S 4 I 514.798.2000 I CLINIQUEOVO . COM 2 • • Cryopréservation ovocytaire DÉFINITION Les chances de grossesse et de naissances vivantes (NV) diminuent significativement avec l’âge. La préservation de la fertilité (PF) pour déplétion Anticipée des Gamètes (AGE) (1) désigne la congélation des ovocytes d’une femme à un jeune âge dans le but de prévenir le déclin physiologique de la fertilité lié à l`âge. Ces ovocytes congelés pourront être utilisés ultérieurement, s’il y a besoin, quand le projet parental devient envisageable. En effet, beaucoup de femmes ont actuellement tendance à reporter leur projet familial jusqu’à ce que leur situation soit la plus adéquate, que ce soit pour des raisons personnelles, professionnelles, relationnelles ou financières. En 2010, l'âge moyen des mères à la naissance de leur enfant était de 29,6 ans au Canada (comparé à 26,7 ans en 1975), et plus de la moitié (51,2 %) de toutes les mères accouchées en 2010 avaient plus de 30 ans (une proportion deux fois et demi plus élevée qu'en 1975) (2). Malheureusement, les chances de grossesse et de naissances vivantes (NV) diminuent significativement avec l’âge, et ceci pour différentes raisons. DÉCLIN DE LA FERTILITÉ LIÉ À L’ÂGE La fertilité féminine diminue progressivement avec l’âge à cause d’une diminution quantitative et qualitative de la réserve ovarienne. La fertilité naturelle de la femme diminue progressivement avec l’âge, et ceci à cause d’une diminution quantitative et qualitative de la réserve ovarienne (3). En effet, le nombre d’ovocytes présent chez une femme décroit continuellement au cours de la vie, et passe ainsi de 1 à 2 millions à la naissance, à environ 500 000 à la puberté, 25 000 à l’âge de 37 ans et 1 000 à l’âge de 52 ans, l’âge moyen de la ménopause au Canada (2). Cet épuisement du stock folliculaire s’accompagne en parallèle d’un déclin de la fertilité (figure 1). Les études montrent que la fertilité féminine atteint un pic entre 20 et 24 ans, et diminue légèrement jusqu’à 30 à 32 ans, avant de décroître significativement et progressivement. En effet, elle chute de 4 à 8 % entre 25 et 29 ans, de 15 à 19% entre 30 et 34 ans, de 26 à 46% entre 35 et 39 ans, et de 95% entre 40 et 45 ans (4). Cryopréservation ovocytaire • • 3 FIGURE 1 : DÉPLÉTION DU STOCK FOLLICULAIRE ET DÉCLIN CONSÉQUENT DE LA FERTILITÉ AVEC L’ÂGE Source : Adapté de Broekmans et al., Endocrine Reviews 2009 (3) AUGMENTATION DU RISQUE D’ANOMALIES CHROMOSOMIQUES ET DE FAUSSES COUCHES Le taux d’aneuploïdies et de fausses couches augmente significativement avec l’âge maternel. Parallèlement au déclin de la fertilité, le taux d’aneuploïdies et de fausses couches augmente significativement avec l’âge maternel, la trisomie autosomale étant l’anomalie la plus fréquemment retrouvée (tableau 1). En effet, le taux de fausses-couches est relativement stable avant l’âge de 30 ans (7 à 15%), augmente légèrement entre 30 et 34 ans (8 à 21%), puis significativement entre 35 et 39 ans (17 à 28%), pour atteindre des taux assez élevés entre 40 et 45 ans (34 à 52%) et dépasser les 90% après 45 ans (Figure 2) (5). 4 • • Cryopréservation ovocytaire TABLEAU 1 : RISQUE D’ANOMALIES CHROMOSOMIQUES EN GÉNÉRAL, ET DE TRISOMIE 21 EN PARTICULIER, SELON L’ÂGE MATERNEL Âge maternel à l’accouchement (années) Risque de trisomie 21 (syndrome de Down) Risque d’anomalies chromosomiques (toutes confondues) 20 1/1667 1/526 25 1/1200 1/476 30 1/952 1/385 35 1/378 1/192 40 1/106 1/66 45 1/30 1/21 Source : Adapté de Heffner LJ (5) 500 100 Fertilité 450 90 400 80 350 70 300 60 250 50 200 40 30 150 100 Fausses couches 20 10 50 Taux de fausses couches Taux de fertilité (par 1000 femmes mariées) FIGURE 2 : LA BAISSE DE LA FERTILITÉ NATURELLE AVEC L’ÂGE S’ACCOMPAGNE D’UNE AUGMENTATION SIGNIFICATIVE DU TAUX DE FAUSSES COUCHES 0 0 20-24 25-29 30-34 35-39 40-44 ≥45 Âge maternel (années) Source : Adapté de Heffnet LJ (5) Ainsi la diminution de la réserve ovarienne d’une part et l’augmentation du risque d’anomalies chromosomiques d’autre part - les deux directement corrélés à l’âge maternel – entraînent une diminution significative des chances d’une femme d’être enceinte et de mener sa grossesse à terme. Cryopréservation ovocytaire • 5 • DIMINUTION DE L’EFFICACITÉ DES TECHNIQUES DE PROCRÉATION MÉDICALEMENT ASSISTÉE (PMA) Les taux de naissances vivantes obtenus par les différentes techniques de fécondation in vitro (FIV) diminuent significativement avec l’âge. Si les techniques de PMA peuvent être la solution dans les cas d’infertilité secondaires à d’autres causes (facteur tubaire ou masculin par exemple), elles sont nettement moins efficaces pour contrecarrer l’effet de l’âge et du vieillissement ovarien. En effet, les taux de grossesses et de naissances vivantes obtenus par les différentes techniques de fécondation in vitro (FIV) diminuent significativement avec l’âge (Tableau 2). Le taux de NV par cycle de FIV passe ainsi de 40% chez les femmes de moins que 35 ans à 11,7% chez les femmes de 41 ans. TABLEAU 2 : TAUX DE GROSSESSES, DE NV ET D’ANNULATION OBTENUS AVEC DES CYCLES DE FIV SELON L’ÂGE MATERNEL TYPE DE CYCLE Embryons frais - Cycles autologues ÂGE DES FEMMES (ANNÉES) <35 35-37 38-40 41-42 43-44 >44 Pourcentage de cycles donnant 46,6 une grossesse 37,8 29,6 19,6 9,6 4,6 Pourcentage de cycles donnant 40,5 une naissance vivante 31,3 22,2 11,7 4,5 1,8 Pourcentage d'annulation 9,0 12,4 15,5 20,5 22,4 6,1 Source : Adapté de CDC 2013 (7). En parallèle, l’augmentation significative du taux de fausses couches est également observée pour les grossesses obtenues par FIV. Il passe de 13% chez les femmes de moins que 35 ans à 54% chez les femmes de plus que 44 ans (7). Par ailleurs, les résultats obtenus avec le don d’ovocyte confirment que les taux de grossesse et de NV ne dépendent pas de l’âge de la patiente au moment du transfert d’embryon, mais de l`âge ovocytaire au moment du prélèvement, avec un taux moyen de grossesse par transfert d’embryon frais de 56,4%, quelque soit l’âge de la receveuse, quand les ovocytes proviennent de jeunes donneuses (Figure 3). 6 • • Cryopréservation ovocytaire FIGURE 3 : EFFET DE L’ÂGE MATERNEL SUR LE TAUX DE NV EN FIV Pourcentage de transferts d'embryons issus de cycles autologues (courbe jaune) et de cycles de don d’ovules (courbe rouge) menant à une naissance vivante, selon l'âge maternel. Source : Adapté de 7. National Center of Chronic Disease Prevention and Health Promotion (Division of Reproductive Health) La courbe rouge montre un taux de NV avec don d’ovocytes relativement stable quelque soit l’âge de la receveuse, alors que la courbe jaune montre la diminution nette de ce taux avec l’âge chez les femmes utilisant leurs propres ovocytes. PRÉSERVATION DE LA FERTILITÉ (PF) La cryopréservation des ovules à un jeune âge permet de prévenir le déclin inéluctable de la fertilité lié à l’âge. Un rapport récent de l’ESHRE (European Society of Human Reproduction and Embryology) a montré qu’en Europe, plus que 50% des cycles de FIV sont effectués chez des femmes âgées de 35 et plus (8). Par ailleurs, le nombre de femmes ayant recours au don d’ovocytes a doublé entre 2005 et 2009 en Europe, et plus de 50% des receveuses ont 40 ans et plus (8). Si ces chiffres confirment la tendance actuelle des femmes à reporter leur projet parental, ils soulignent en plus les difficultés qu’elles ont à concevoir après l’âge de 35 ans. Actuellement, la seule méthode préventive disponible face au déclin inéluctable de la fertilité, à l’inefficacité relative des techniques de PMA chez les femmes âgées, et au recours accru au don d’ovocytes, est la préservation des ovules à un jeune âge. Cryopréservation ovocytaire • • 7 TECHNIQUE Une stimulation ovarienne par des gonadotrophines exogènes est requise, et les ovocytes prélevés sont cryopréservés par la méthode de vitrification. La femme doit suivre un cycle de stimulation ovarienne par des gonadotrophines exogènes. Le type et les doses de gonadotrophines sont ajustés selon l’âge et la réserve ovarienne de la femme. La stimulation dure en moyenne 10 à 14 jours, et les follicules matures sont ponctionnés sous guidage échographique par voie endovaginale, sous anesthésie locale avec légère sédation. Les ovules matures sont congelés par la méthode de vitrification pour une future utilisation. VITRIFICATION OVOCYTAIRE Si la première naissance vivante avec un ovocyte congelé a été publiée en 1986 (9), la congélation ovocytaire a pendant longtemps été associée à un faible taux de réussite. Mais le développement de la technique de vitrification a permis une amélioration significative des résultats précédemment obtenus avec la congélation lente. En effet, selon différentes études utilisant le système de vitrification ouvert, le taux de survie des ovocytes est de 85% à 97%, alors que les taux de fécondation, d’implantation et de grossesses cliniques sont comparables au taux obtenus avec les ovocytes frais (10, 11). Enfin, la technique de vitrification ovocytaire n’est plus considérée expérimentale par l’ASRM (American society of Reproductive Medicine) depuis 2012 (12) et par la CFAS (Canadian Fertility and Andrology Society) depuis 2014 (13). Selon les différentes études internationales, le taux de naissances vivantes est de 4 à 6% par ovocyte vitrifié chez les femmes de moins de 36 ans (10-12). En d’autres termes, une naissance vivante pourrait être attendue si 20 à 25 ovocytes sont vitrifiés. Cependant, ces résultats si encourageants doivent être interprétés avec précaution. Les études ne sont pas encore assez nombreuses, et celles disponibles proviennent de quelques centres de référence mondiaux qui ont plusieurs années d’expérience dans le domaine de la vitrification ovocytaire. Or, les taux de réussite dépendent avant tout du laboratoire prenant en charge les ovocytes, et sont influencés par plusieurs facteurs: la technique et le protocole de vitrification, le matériel utilisé, et surtout l’expérience de l’équipe. Les résultats publiés ne sont donc pas extrapolables à tous les laboratoires, et chaque 8 • • Cryopréservation ovocytaire centre devrait publier ses propres bilans avec la technique. Par ailleurs, ces résultats sont obtenus avec des ovocytes provenant de jeunes donneuses de moins de 36 ans et congelés pendant une courte durée. Ils ne sont donc pas nécessairement applicables à une population de femmes plus âgées qui désirent vitrifier leur ovocytes pour une plus longue durée. Il existe à l’heure actuelle très peu de données sur les taux de succès et de grossesses obtenus avec la vitrification ovocytaire dans le cadre de la PF vu que cette pratique est assez récente. Il faudra attendre quelques années pour que les patientes qui ont pris la décision de vitrifier leurs ovocytes reviennent pour les utiliser, mais les premiers résultats rapportés sont assez encourageants, avec un taux de grossesses cliniques de 30,7% par cycle de transfert d’embryon frais, 33,3% par transfert d’embryon congelé, et un taux de grossesses cumulé de 70,9% (14). Finalement, les données disponibles sur les enfants nés avec des ovocytes congelés, et plus spécifiquement vitrifiés, sont rassurantes. En effet, une revue de plus que 900 enfants nés d’ovocytes congelés ne montre pas d’augmentation du risque de malformations congénitales (15), alors qu’une revue de 200 enfants nés d’ovules vitrifiés montre que le poids de naissance des enfants et l’incidence des anomalies congénitales est comparable à la population générale (16). Cependant, il n’existe toujours pas de données sur le développement à long terme de ces enfants. LA PRÉSERVATION DE LA FERTILITÉ. POUR QUI ? La PF par congélation ovocytaire doit être obligatoirement discutée et proposée aux patientes en âge de procréation diagnostiquées d’un cancer (sein, lymphome, leucémie…), avant tout traitement gonadotoxique (chimiothérapie, radiothérapie, immunothérapie ou chirurgie). Elle doit être aussi proposée aux femmes ayant d’autres pathologies bénignes. Le tableau 3 résume les principales indications de PF. Cryopréservation ovocytaire • TABLEAU 3 : LES DIFFÉRENTES INDICATIONS DE PRÉSERVATION DE LA FERTILITÉ Pathologies malignes Cancer du sein Cancers hématologiques (lymphomes, leucémies…) Cancers gynécologiques Cancers non gynécologiques Etc. Traitement gonadotoxique (Chimiothérapie, radiothérapie, transplantation de moelle osseuse…) Maladies auto-immunes Lupus érythémateux disséminé Polyarthrite rhumatoïde Maladie de Behçet Etc. Maladies hématologiques Drépanocytose Thalassémie majeure Anémie aplasique Etc. Ovariectomie uni / bilatérale Tumeurs ovariennes bénignes (Kystes, tératomes…) Endométriose sévère Patientes porteuses de la mutation BRCA-1 ou BRCA-2 Etc. Risque d'insuffisance ovarienne prématurée Histoire familiale Syndrome de Turner Mutation FMR-1 Mutation FoxL2 Etc. • 9 10 • • Cryopréservation ovocytaire LA PRÉSERVATION DE FERTILITÉ POUR AGE : POUR ET CONTRE Il existe plusieurs arguments en faveur et contre l’autoconservation d’ovocytes. Le désir tardif d’enfant est devenu un phénomène courant dans notre société. Les femmes ont de plus en plus tendance à s’engager dans leur carrière et peuvent avoir du mal à combiner maternité et plan de vie professionnel, alors que plusieurs couples souhaitent atteindre un certain équilibre économique et social avant de réaliser un projet d’enfant. Et depuis que l’autoconservation des ovocytes à un jeune âge est disponible, le débat s’étend sur les avantages et les inconvénients d’une telle pratique qui pourrait avoir des répercussions majeures à l’échelle de la société. Plusieurs arguments sont en faveur de l’autoconservation d’ovocytes. D’abord, cette technique permet à une femme qui n’aurait pas eu l’opportunité de réaliser son désir d’enfant à un plus jeune âge, d’utiliser ses propres ovocytes congelés à un moment adéquat et d’obtenir une grossesse avec un taux de réussite proche de celui observé à son âge lors de la préservation. Ceci permettra également de réduire le recours au don d’ovules, diminuant ainsi les risques associés aux grossesses obtenues avec don (hypertension artérielle gravidique et pré-éclampsie) et les problèmes de filiation, avec l’avantage de garder le lien génétique entre la femme et l’enfant à naître. Par ailleurs, l’autoconservation d’ovules offrira une certaine sécurité pour les jeunes femmes qui désirent s’engager à fond dans leur carrière à un âge où elles n’ont pas encore de partenaire stable ou ne peuvent pas s’engager dans un projet familial. Dans cette perspective, l’autoconservation d’ovules pourrait être considérée comme une activité médicale préventive contre une des conséquences du vieillissement physique, le déclin de la fertilité. Elle devrait être tolérée comme d’autres méthodes préventives répondant au principe éthique de ‘bienfaisance’ et déjà approuvées par la société, comme celles contre l’ostéoporose ou l’Alzheimer par exemple. Le corps médical se doit d’informer les femmes concernant l’impact de l’âge sur la fertilité et la disponibilité de cette méthode de PF, répondant ainsi au principe de ‘respect de la dignité et de l'autonomie’ de l’éthique médicale. De plus, étant donné que les risques liés au traitement (stimulation ovarienne et ponction) chez les patientes jeunes sont très faibles, de moins de 1% (17), inférieurs même aux risques associés à la grossesse en général, l’autoconservation d’ovules respecte clairement le principe de ‘non malfaisance’ de l’éthique médicale. Cette méthode répond de même au principe éthique de ‘justice’: L’âge de reproduction des femmes est relativement court comparé à celui des hommes, ce qui impose une certaine pression aux jeunes femmes qui n’ont pas de partenaire stable ou qui Cryopréservation ovocytaire • • 11 poursuivent leur carrière pendant cette courte fenêtre. La préservation d’ovocytes permet de diminuer cette pression tout en donnant le potentiel à ces femmes de concilier carrière et projet familial. Finalement, dans le cas où la femme devient enceinte sans avoir recours aux techniques de PMA, elle pourra choisir d’offrir ses ovules vitrifiés à un programme de don d’ovules, si son projet familial est terminé. Cependant, plusieurs éléments doivent être discutés en parallèle à la préservation ovocytaire. Les femmes doivent être informées des risques associés aux grossesses tardives, autant maternels (hypertension, diabète, mortalité maternelle) que fœtaux (prématurité, mort in utero). Ces risques augmentent proportionnellement avec l’âge et sont surtout marqués après l’âge de 50 ans (18). Ils sont bien connus depuis que la pratique du don d’ovules a significativement augmenté le nombre de grossesses tardives. Quand aux enfants nés de mères âgées, il n’existe toujours pas d’études sur leur développement au long terme. Par ailleurs, deux problèmes majeurs vont de pair avec l’autoconservation d’ovules : L’âge et le coût. Quel est l’âge idéal pour préserver les ovules? Les études montrent que plus l’autoconservation est faite tôt, plus elle est efficace, mais malheureusement moins elle est justifiée. À quel âge une femme serait considérée trop jeune ou même trop vieille pour préserver ses ovules ? De même, quelle est la limite d’âge pour utiliser ses ovules ? La limite d’âge maximale acceptée dans la pratique de don d’ovules pourrait être appliquée à l’utilisation des ovules cryopréservés, celle-ci étant de 52 ans au Canada. Il n’existe actuellement pas de consensus international pour l’âge de préservation et d’utilisation, et les pratiques diffèrent selon les centres et les pays. Par ailleurs, le coût de l’autoconservation et la prise en charge dépolarisent toujours les opinions. Si elle n’est pas prise en charge par la collectivité, ne mènerait-elle pas à un déséquilibre et une injustice sociale, vu que seules les femmes ayant un certain statut socioéconomique pourraient se le permettre? Ne serait-il pas plus efficace, en terme de grossesse, d’utiliser des ovocytes conservés à un jeune âge que d’essayer d’être enceinte à 40 ans, spontanément ou avec les techniques de PMA? Les études coût-efficacité sont divergentes pour le moment, et les pratiques diffèrent énormément selon les pays. 12 • • Cryopréservation ovocytaire CONSENTEMENT ÉCLAIRÉ Avant de proposer la PF pour AGE à une femme, plusieurs éléments doivent être discutés en détail et un consentement éclairé signé. La patiente doit d’abord être informée que les meilleures chances d’avoir un enfant viennent avec la conception naturelle à un âge relativement jeune. Les limites actuelles de la technique d’autoconservation ovocytaire doivent être bien développées: La vitrification ovocytaire ne permet pas de garantir une grossesse ni une naissance vivante, et les résultats de l’autoconservation dépendent de l’âge auquel la vitrification a été réalisée. Les risques, complications et effets secondaires des traitements et des grossesses à un âge avancé doivent être expliqués, ainsi que les propres résultats du centre en termes de vitrification, survie, fécondation et grossesses. Par ailleurs, la patiente doit être informée que la vitrification ovocytaire est une technique assez récente, et que même si le suivi à court terme des enfants nés avec cette technique est rassurant, il n’y pas toujours pas de données sur le développement à long terme de ces enfants. Finalement, les autres techniques de préservation de fertilité, notamment la cryopréservation de tissu ovarien et d’embryons, doivent aussi être discutés et proposés selon le cas. CONCLUSION Le désir tardif d’enfant est un phénomène courant dans notre société. Le rôle du corps médical est de continuer à propager le message que la fertilité diminue nettement avec l’âge, et que les meilleures chances pour une femme d’avoir un enfant, c’est de le concevoir spontanément à un jeune âge. La PF pour AGE offre une option aux femmes et couples qui sont incapables de réaliser ce projet familial à un âge relativement jeune. Les femmes doivent être informées des avantages et des limites de cette technique et des diverses conséquences qu’elle aura sur le couple, les enfants et la société en général. La fertilité naturelle de la femme diminue progressivement avec l’âge, et ceci à cause d’une diminution quantitative et qualitative de la réserve ovarienne. 14 • • Cryopréservation ovocytaire RÉFÉRENCES 1 Stoop D, van der Veen F, Deneyer M, Nekkebroeck J, Tournaye H. Oocyte banking for anticipated gamete exhaustion (AGE) is a preventive intervention, neither social nor nonmedical. Reprod Biomed Online. 2014 May;28(5):548-51. 2 Emploi et développement social Canada : http://www4.rhdcc.gc.ca/[email protected]?iid=75. Accessed December 7 2014 3 Broekmans FJ, Soules MR, Fauser BC. Ovarian aging: mechanisms and clinical consequences. Endocr Rev. 2009 Aug;30(5):465-93. 4 Speroff. Chapitre 27. Page 5 5 Heffner LJ. Advanced maternal age--how old is too old? N Engl J Med. 2004 Nov 4; 351(19):1927-9. 6 Centers for Disease Control and Prevention, American Society for Reproductive Medicine Society for Assisted Reproductive Technology. 2012 national summary. Available at: http://nccd.cdc.gov/DRH_ART/Apps/NationalSummaryReport.aspx. Accessed December 07, 2014. 7 Centers for Disease Control and Prevention, American Society for Reproductive Medicine Society for Assisted Reproductive Technology. 2011 Assisted Reproductive Technology National Summary Report. Section 4: ART Cycles Using Donor Eggs. Available at http://www.cdc.gov/art/ART2011/section4.htm. Accessed December 7 2014. 8 Kupka MS, Ferraretti AP, de Mouzon J, Erb K, D'Hooghe T, Castilla JA, Calhaz-Jorge C, De Geyter C, Goossens V. European IVF-Monitoring Consortium, for the European Society of Human Reproduction and Embryology. 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