Cartographie 2015
Risques et tendances n°16 – Juillet 2015 3
Autorité des marchés financiers
ÉDITORIAL
L’AMF publie la neuvième édition de sa cartographie des risques
qui reste fidèle à son ambition originelle d’apporter au régulateur et
aux acteurs du marché financier une vision globale et structurée de
l’environnement dans lequel ils interviennent. Cette nouvelle édition
arrive à une période charnière de l’agenda réglementaire. Les
réformes engagées post-crise en Europe sont désormais largement
traduites en droit, et en cours d’entrée en vigueur. Prises dans leur
ensemble, les nouvelles dispositions réglementaires étendent le
champ de la supervision, mettent en œuvre des exigences rehaussées de transparence,
renforcent la protection des investisseurs, encadrent l’activité des intermédiaires financiers,
et contribuent à une plus grande stabilité financière.
Il s’agit maintenant de tirer un premier bilan de ces évolutions réglementaires, d’analyser
leurs interactions, et de dresser la liste des chantiers qui demeurent à engager ou à finaliser
pour garantir une meilleure prise en compte des risques financiers. Parmi ceux-ci, une
meilleure appréhension des risques portés par la finance parallèle ou la sécurisation des
opérations des chambres de compensation, dont le rôle sur les marchés de dérivés est
désormais crucial, figurent d’ores et déjà en bonne place sur l’agenda des régulateurs.
Alors que nous dressons ce tableau des risques, le contexte macro-économique appelle
une vigilance particulière. L’activité de la zone euro a, ces derniers mois, bénéficié du
soutien de facteurs externes qui pourraient n’être que temporaires, notamment la baisse du
cours de l’euro et du prix du baril de pétrole. La situation des pays émergents, dont certains
sont en ralentissement voire en récession, continue à peser sur l’activité internationale. En
ce qui concerne les facteurs internes, le soutien aux économies européennes provient tant
de la politique budgétaire, moins restrictive, que de la politique monétaire.
Les mesures non-conventionnelles mises en place en début d’année 2015 par la Banque
centrale européenne, avec des taux d’intérêt encore plus bas, soutiennent les marchés.
Cependant la capacité des marchés à assurer la liquidité de certains instruments financiers,
notamment obligataires, le possible accroissement de la volatilité liée à une variation brutale
des anticipations ou à des événements politiques tels que ceux en cours en Grèce sont des
facteurs d’incertitude.
Pour en revenir à l’environnement de taux d’intérêt bas, il pourrait, s’il persiste trop
longtemps, pénaliser le modèle économique des banques et des assureurs. Il favoriserait
aussi une recherche de rendement passant par des prises de risque excessives, posant
ainsi la question de l’appréciation des risques par les investisseurs. Or, les marchés
financiers doivent contribuer à orienter efficacement l’allocation de l’épargne en donnant
durablement un prix au risque, ce qui paraît difficile quand les politiques monétaires
brouillent la lecture des primes correspondantes.
A moyen terme, une normalisation des taux d’intérêt en zone euro, si elle est trop brutale ou
mal anticipée, pourrait entraîner une correction importante du prix des actifs, entraîner une
volatilité accrue sur les marchés et peser sur le bilan des institutions financières.
A plus long terme, c’est le financement de notre économie qui mérite notre attention, alors
que se dessine un modèle davantage désintermédié. Le projet européen d’une Union des
marchés de capitaux (UMC) devra répondre ainsi à la nécessité d’examiner de nouveaux
outils, comme la titrisation simple, transparente et standardisée, et à favoriser une meilleure
allocation des ressources en donnant aux marchés un rôle accru dans le financement de
l’économie aux côtés du financement bancaire traditionnel.
Gérard Rameix,
Président de l’Autorité des marchés financiers