Institut d'Etudes Politiques de Lyon Université Lumière Lyon 2 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Mémoire pour le Master professionnel Management du secteur public : collectivités et partenaires Soutenu par Blandine BREVET Le 6 septembre 2007 MEMBRES DU JURY : Olivier NYS Directeur général adjoint à la Ville de Lyon Président du Jury André PEZZIARDI Magistrat à la Chambre Régionale des Comptes de Lorraine Directeur du mémoire Damien SIWERTZ Directeur du service des finances de la Ville de Saint-Priest Maître de stage Table des matières Remerciements . . Introduction . . Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière . . 4 5 A. Des règles de la comptabilité locale offrant des sécurités de gestion . . 8 9 9 B. Le recours aux autorisations pluriannuelles et l’amélioration de la visibilité financière à moyen terme . . 15 II. L’élaboration d’un plan financier à partir d’une analyse financière établie par exploitation de l’information comptable . . 19 I. Des outils de stratégie préventive pour préserver l’équilibre des finances locales . . A. La pratique comptable comme condition de mise en œuvre de l’analyse financière . . B. Des agrégats de l’analyse financière au plan financier . . Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire . . I. Les insuffisances du cadre budgétaire et comptable face à un besoin nouveau d’efficacité . . A. Le développement du contrôle de gestion ou le souci de l’efficacité . . B. Les limites du cadre budgétaire et comptable en matière d’aide à l’évaluation . . II. Un processus de rationalisation de la décision budgétaire en mouvement : entre expérimentation et coercition… . . A. Les initiatives locales visant à rationaliser les choix budgétaires . . B. L’institution d’une démarche LOLF : enjeux et modalités d’application . . Conclusion . . Bibliographie . . Ouvrages . . Articles et contributions . . Publications et rapports officiels . . Sites internet . . Liste des annexes . . Annexe n°1 : méthode d’observation des situations financières dégradées de la comptabilité publique . . Annexe n°2 : les ratios de l’article L. 2313-1 du CGCT . . Annexe n°3 : présentation des soldes intermédiaires de gestion issus du PCG . . Annexe n°4 : présentation d’un tableau de financement issu du PCG . . Annexe n°5 : approche comparée de l’utilisation des tableaux de SIG par une entreprise et par une collectivité territoriale . . 20 24 30 31 31 35 38 39 42 48 49 49 49 50 51 52 52 52 52 52 Annexe n°6 : présentation de quatre scénarios de stratégie financière . . 52 53 Annexe n°7 : exemple d'adaptation de la fonctionnelle officielle mis en place dans une commune de 50 000 habitants . . 53 Annexe n°8 : exemple de segmentation par politique publique d’un conseil général .. Résumé . . 53 54 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Remerciements J’adresse tout d’abord mes remerciements à M. André PEZZIARDI qui, avec disponibilité et attention, m’a guidé dans mon travail et m’a livré des conseils indispensables à sa réalisation. Je remercie également M. Damien SIWERTZ, directeur du service des finances de la Ville de Saint-Priest, pour avoir bien voulu m’accueillir en tant que stagiaire et m’avoir fait profiter de son expérience tout au long du stage. J’exprime aussi ma reconnaissance à M. Oliver NYS, pour s’être intéressé à mon mémoire en ayant accepté de faire partie des membres du jury lors de la soutenance. Enfin, je n’oublie pas non plus la sympathie et la bonne volonté avec laquelle l’ensemble des agents du service des finances a répondu à chacune de mes sollicitations. 4 Brevet Blandine - 2007 Introduction Introduction 1 « Faites-nous de bonne politique et je vous ferai de bonnes finances. » Le baron Louis, ministre des Finances d’une période troublée, donnait ainsi la priorité à la volonté politique, à la clarté de la décision et à l’efficacité de l’action. Le bon équilibre des finances de l’Etat, affirmait-il alors, en découlerait naturellement. Telles sont les finances publiques, aujourd’hui comme hier, dans tous les pays du monde et à tous les échelons, pour une commune comme pour l’Etat : leur acceptabilité dépend avant tout de la confiance que le citoyen- électeur- contribuable accorde à ses gouvernants locaux et nationaux. Ce constat relève, en effet, de l’évidence pour les acteurs de la gestion locale qui, sous la pression directe de leur électorat, sont tenus de veiller à maintenir la crédibilité de leur action. « Les citoyens , affirmait en 1789 la Déclaration des Droits de l’Hommes et du Citoyen, en son article 14, ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi. » Deux siècles plus tard, si ces derniers chargent toujours leurs représentants élus de fixer, en leurs noms, le niveau de fiscalité locale, ils disposent d’autres moyens pour apprécier, à posteriori, si la pression fiscale qui pèse sur eux est bien justifiée. L’élu a beau démontrer, dans un bulletin d’informations, que les impôts sont d’une modération inégalée, il se trouve toujours, désormais, un organe de presse pour mettre en lumière le chiffre caché qui prouve le contraire. Affichées par la presse quotidienne locale dans les comptes-rendus des séances du conseil municipal, et par les magazines économiques dans leurs hit-parades des villes surimposées ou surendettées, les finances locales sont en effet définitivement sorties de leur sérail. Mieux informé, le citoyen est devenu un contribuable plus exigeant, plus tatillon, ne tolérant l’accroissement de la pression fiscale qu’à la condition qu’il ait le sentiment d’une juste utilisation de sa contribution. L’action publique doit, ainsi, faire face à une demande de plus en plus pressante de performance, de transparence et de qualité. Si le constat de cette exigence semble désormais acquis, sa traduction dans la culture administrative et politique est encore en construction, comme le montre la mise en place, au niveau de l’Etat, de la Loi Organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, plus communément dénommée « LOLF ». Ce processus de modernisation de la gestion publique, qui a, d’ores et déjà, investi le secteur local, est, au demeurant, appelé à s’intensifier dans un contexte financier de plus en plus contraint. « Plus sensible aux évolutions économiques, le système financier local est devenu plus fragile. Les dépenses “obligatoires” des collectivités locales, notamment celles des départements, augmentent quand la conjoncture économique se dégrade, les recettes indirectes évoluent de manière moins favorable, les ajustements nécessaires obèrent leur capacité d’investissement, tendent à augmenter la fiscalité directe. » Un rapport du Conseil 1 Déclaration du Baron Joseph Dominique Louis, discours prononcé au cours d'un Conseil des Ministres en 1830 Brevet Blandine - 2007 5 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… 2 économique et social synthétise, en ces termes, les changements intervenus depuis la décentralisation. Ainsi, le contexte dans lequel les exécutifs locaux doivent bâtir, chaque année, leur budget a été fortement bouleversé, ces derniers étant forcés de tenir compte d’événements défavorables comme les transferts de charge issus de la décentralisation, la progression tendancielle des besoins sociaux, le désengagement financier de l’Etat, ou encore la volatilité des recettes, étroitement liée à la morosité de la conjoncture économique et sociale actuelle. La tâche à laquelle sont désormais confrontées les collectivités locales, indépendamment de leur statut et de leur taille n’est pas facile : c’est précisément au moment où leur vulnérabilité s’accroît, financièrement parlant, qu’il leur appartient de projeter l’image d’une solidité sans faille vis-à-vis de l’extérieur et d’une volonté gestionnaire affirmée, faute de quoi, le risque existe d’un désaveu politique par sanction de l’électeur. La mise au point d’une stratégie de performance financière devient, alors, une nécessité, pour faire savoir hors les murs que la collectivité prendra les décisions indispensables d’une part, au maintien de l’équilibre de ses finances, et d’autre part, pour garantir la qualité de service. Pour que la performance financière réelle concorde avec la performance perçue par l’usager- électeur, il faut, en effet, aller au-delà d’une simple transposition du concept de performance financière utilisé en gestion privée. Cette approche adoptée par de nombreux auteurs et consistant à se fonder sur des considérations de santé financière pour attester de la performance financière d’une entité locale, est, certes, recevable : on peut, tout à fait, considéré comme Alain GUENGANT que « l’obligation d’équilibre budgétaire équivaut à imposer un minimum de 3 performance financière pour couvrir le service de la dette ». Mais, cette acception donnée au concept de performance financière s’avère insuffisante si l’on se place du côté de l’usager-électeur, toujours soucieux de la gestion des deniers publics. Une situation financière saine peut, en effet, être due à une politique sous optimale d’investissement, une pression fiscale trop élevée ou encore un périmètre des services publics trop restreint. Si l’on s’en tient au sens donné au concept dans la logique de gestion privée, il y a lieu de constater, dans cette hypothèse, la performance financière de la collectivité. Or, pour l’usager- électeur, qui attache tout autant d’importance à la question de l’utilisation de sa contribution, il en va différemment. Pour ce dernier, une entité publique qui se veut performante financièrement doit être capable de garantir, en sus de l’équilibre financier, l’efficacité des décisions prises avec l’argent du contribuable. René DEMEESTERE, dans son ouvrage « Le contrôle de gestion dans le secteur public », a chercher à appréhender le concept et a retenu une définition qui s’inscrit dans cette logique: il évoque ainsi les notions de « santé financière » et de « qualité de 4 gestion » pour définir le concept de performance financière . Il y a donc matière à penser que, lorsque, en tant que responsable local, on fixe, pour sa collectivité, un objectif de performance financière, on ne doit pas uniquement s’en tenir à la définition d’une stratégie de saine santé financière, il faut se montrer plus exigent encore et œuvrer pour garantir des choix budgétaires rationalisés. 2 Conseil économique et social, « Le bilan et les perspectives financières de la décentralisation », Avis adopté par le Conseil économique et social au cours de la séance du 6 juillet 1994, sur le rapport de Monsieur Marc DIDIERJEAN 3 GUENGANT (A.), « L’analyse financière des communes », Economica, 1998, 110 pages, p. 91 4 6 DEMEESTERE (R.), « Le contrôle de gestion dans le secteur public », LGDJ, 2002, 196 pages, p. 86 Brevet Blandine - 2007 Introduction La collectivité doit alors se donner les moyens de ses objectifs. La réussite d’une telle démarche suppose, en effet, qu’elle puisse bénéficier de solides fondamentaux financiers. Il y a donc lieu de s’interroger sur la qualité et la pertinence des instruments issus de la comptabilité des collectivités territoriales face à cette ambition de performance financière. La notion de comptabilité locale doit être, ici, entendue, dans une acception large, le terme étant employé pour désigner, dans sa globalité, le système d’information financière des entités locales. Ce dernier comprend un certain nombre de normes - des principes budgétaires anciens, des instructions comptables récemment rénovées - mais aussi, un ensemble de pratiques par lesquelles les collectivités tendent à traduire la réalité de leurs finances. Les données budgétaires et comptables, ainsi recensées, concourent à améliorer l’information des décideurs locaux. Il y a donc, en la matière un fort enjeu de pilotage des finances publiques. A la lumière des profondes mutations de l’environnement local incitant les collectivités à l’effort de performance financière, quelle utilisation peut-il être fait du système d’information financière ? Pour quels usages ? Comment optimiser les apports de la comptabilité à la formalisation d’un système opérant de gestion financière? Il s’agit, alors, de démontrer pourquoi et comment le secteur public local doit s’engager dans la voie de la modernisation de son système d’information financière pour relever le défi de la performance financière. En effet, si les collectivités peuvent désormais compter sur un cadre budgétaire et comptable adapté à leur ambition de saine santé financière, il semble qu’il leur soit indispensable, pour atteindre l’objectif global de performance financière, d’optimiser ce dernier par une démarche de contrôle de gestion, garantissant la mise en œuvre de décisions budgétaires rationalisées. La présente étude a été réalisée dans le cadre d’un stage de 4 mois au service des Finances de la mairie de Saint-Priest. Entre autres missions, ce stage visait essentiellement à la réalisation de retraitements d’analyse financière. La confiance dont j’ai pu bénéficier pour mener à bien ces missions et la richesse des entretiens réalisés dans ce cadre ont pleinement fertilisé le terrain sur lequel j’ai conduit mes recherches, mes analyses et mes réflexions pour ce mémoire. Brevet Blandine - 2007 7 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière Si, au sens de la définition apportée par René DEMEESTERE, sens qui trouve par ailleurs une légitimité auprès des usagers- électeurs, une saine santé financière ne suffit pas à faire d’une collectivité une entité financièrement performante, elle n’en demeure pas moins indispensable. Le maintien de l’équilibre financier constitue en effet une première condition pour accéder à la performance financière. Pour Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, le « bon équilibre financier » est celui qui « permet (…) de maintenir à la fois la solvabilité et la crédibilité financière. C’est-à-dire qu’il est conditionné par les 5 objectifs que se fixe, au départ, la collectivité, au regard de ce double enjeu ». Le bon équilibre financier permet, donc, à la collectivité de garder toute liberté, à l’horizon qu’elle s’est fixée pour réaliser ses projets tout en pouvant envisager dans un avenir plus lointain encore, d’en mettre de nouveau en chantier. Le défi à relever, alors, est commun à l’ensemble des collectivités : il leur faut garantir le bon équilibre entre la maîtrise des dépenses, l'engagement dans la création de ressources nouvelles, et le recours modéré et équilibré à l'emprunt et à la fiscalité. De telles problématiques ne peuvent être conciliées qu’à la condition d’une stratégie financière bien définie. Sa mise au point fait, alors, reposer la décision financière sur deux piliers : il s’agit d’une part, de l’anticipation du risque financier et d’autre part, de la définition du champ d’actions possible, en fonction de la survenance de tel ou tel risque, combinée à la mise en œuvre de tel ou tel choix. Nous parlerons ici du risque financier pour désigner un ensemble de risques : il est impossible de prétendre dresser, dans l’absolu, un inventaire à peu près exhaustif des risques dont toute collectivité doit prendre la mesure. Tout au plus peut-on avancer quelques exemples de catégories de risques. On peut citer, ainsi, les risques liés à une modification des relations financières entre l’Etat et le secteur local – l’éventualité d’un tel cas n’est pas à exclure, dans les prochaines années, si l’on se réfère aux récents travaux de la Cour des comptes portant sur la situation et les perspectives 6 des finances publiques - ou encore les risques liés au options de développement retenues comme l’aménagement de nouveaux quartiers. La mise au point d’une stratégie de saine santé financière, répondant au besoin de performance financière des collectivités, implique, donc, avant tout sur une anticipation du risque financier. Cet exercice s’impose en effet comme un préalable nécessaire à 5 LAURENT (P.) et BOYER (B.), « La stratégie financière des collectivités locales », LGDJ, 1995, 193 pages, p.53 6 Cour des Comptes, Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2006, 127 pages, p.78, document consulté sur 8 http://www.ccomptes.fr Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière la détermination du champ d’actions possible de la collectivité en matière financière : c’est seulement à partir de l’analyse des comptes et de l’environnement juridico-financier d’une collectivité que l’on peut définir un plan financier répondant à ses besoins. Pour le gestionnaire local, anticiper le risque financier, c’est en effet mettre au point un cadrage stratégique financier pour sa collectivité. C'est, plus concrètement, mettre en oeuvre une analyse financière permettant d’opérer un choix de positionnement vis-à-vis du risque, et ce dans la perspective de préserver le bon équilibre financier de la collectivité. C’est justement, parce qu’il permet aux collectivités de maintenir cet équilibre sur une trajectoire durable et supportable que le cadre budgétaire et comptable des collectivités peut être considéré comme un support adapté à leur stratégie de saine santé financière. En incitant les responsables locaux à focaliser leur attention sur l’impératif d’équilibre financier et en leur donnant les moyens nécessaires à son maintien sur longue période, ce dernier fournit des outils de stratégie préventive pour la gestion des finances locales. Aussi présente-t-il, en tant que support normatif de comptabilité, une utilité incontestable dans la construction d’une analyse financière préalable à l’élaboration d’un plan financier. I. Des outils de stratégie préventive pour préserver l’équilibre des finances locales La prévention de tout risque de dégradation financière, au sein du secteur local, apparaît, comme l’une des préoccupations majeures de l’Etat à l’égard de ses démembrements territoriaux. Avec les affaires « Angoulême » et « Briançon », ce dernier a, en effet, pris conscience des conséquences que peuvent avoir de graves crises financières, affectant le secteur local, sur le budget de la nation. C’est pourquoi, il s’attache, depuis quelques années, à détecter et à prévenir, à temps, les cas de dérive. En sus de la mise en place d’un système de suivi régulier des finances locales, conçu pour servir d’alerte en cas de 7 crise constatée , l’Etat a instauré des règles comptables et budgétaires visant à protéger les budgets locaux de risques potentiels démesurés par rapport aux capacités financières de chaque collectivité. Ainsi, les règles issues de la comptabilité locale apportent aux collectivités des garanties à une gestion financière équilibrée. Aussi, l’utilisation d’outils de programmation pluriannuelle, améliorant la visibilité financière, peut-elle contribuer à maintenir cet équilibre sur longue période. A. Des règles de la comptabilité locale offrant des sécurités de gestion Qu’il s’agisse des principes régissant l’organisation des budgets locaux ou encore des instructions budgétaires et comptables imposées aux collectivités territoriales, toutes les règles de comptabilité locale sont gouvernées par un impératif, celui de l’équilibre financier. L’équilibre recherché n’est pas, bien entendu, l’équilibre strict des comptes locaux, mais correspond, plus exactement, à un déficit mesuré. C’est, au demeurant, sur ce point précis que porte l’un des aspect du contrôle budgétaire réalisé par le représentant de l’Etat et 7 Cf. annexe n°1 sur la méthode d’observation des situations financières dégradées de la comptabilité publique Brevet Blandine - 2007 9 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… 8 par les Chambres Régionale des Comptes. Si un déficit important apparaît au niveau du compte administratif, une procédure de contrôle visant à rétablir l’équilibre est enclenchée par le préfet. On le voit l’équilibre financier est une notion à laquelle les gestionnaires locaux doivent apporter toute leur attention. Pour ce faire, ils disposent d’un certain nombre de normes de sécurité issues du cadre budgétaire et comptable des collectivités. Ainsi, pour une juste appréciation de l’équilibre financier, les responsables locaux peuvent se fier aux principes de gestion orthodoxe inspirés de la comptabilité des entreprises. En outre, pour préserver l’équilibre financier de leur collectivité, ces derniers peuvent prendre appui sur les principes régissant la réalisation et le contrôle de l’équilibre des budgets locaux. 1. Des principes de gestion orthodoxe issus du PCG pour une information financière plus fiable Les collectivités territoriales, dans la première moitié des années 1980, avec notamment, les difficultés financières rencontrées par des communes comme Angoulême ou Briançon ont été confrontés à des problématiques de sincérité des comptes. Ces incidents, largement médiatisés, ont contribué à accélérer les mouvements de réformes des systèmes 9 comptables locaux M11/M12, M51 , ces derniers ayant montré leurs limites. Le processus de rénovation des comptabilités du secteur public local s’étend sur 10 une période assez large , puisque entre les premiers travaux relatifs à l’élaboration de 11 l’instruction M14, au tout début des années 90 et l’actuelle phase d’appropriation des 12 mesures introduites en M14 à compter de l’exercice 2006 , près d’une quinzaine d’années se sont écoulées. Malgré les évolutions développées dans l’intervalle, l’économie générale des réformes budgétaires et comptables demeure identique, que ce soit dans le cadre de la M14, applicable aux communes et aux EPCI, de la M52, applicable aux départements ou encore de la M71, applicable aux régions. Sur le coup du traumatisme de l’ « après Angoulême », l’Etat privilégie la mise en place de dispositifs permettant d’assurer une meilleure lisibilité des comptes des collectivités. Symbolique, l’adoption de nouvelles normes budgétaires est présentée comme une démarche de mise en conformité des nomenclatures existantes avec les dispositions de l’article 52 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général de la comptabilité publique qui précise que les comptabilités publiques s’inspirent du plan comptable général.L’axe principal des travaux est donc le passage des normes du plan comptable 8 En application de l’article L1612-14 du Code Général des Collectivités Territoriales, les CRC sont saisies par le préfet lorsque le déficit constaté est supérieur ou égal à 5% des recettes de fonctionnement, pour les collectivités de plus de 20000 habitants et 10% pour les autres collectivités 9 L’instruction budgétaire et comptable M11 était applicable aux communes de moins de 10000 habitants, la M12 à celles de plus de 10000 habitants et la M51, aux départements et aux régions 10 Pour une présentation de l’évolution historique de la comptabilité locale : Cf. Direction Générale des Collectivités Territoriales, « La comptabilité M14 des communes », Guide pratique de l’élu, n°33,2006, 31 pages, p. 2-3-4 11 La loi du 22 juin 1994 portant dispositions budgétaires et comptables relatives aux collectivités locales a donné naissance à une instruction M14 applicable aux communes. Cette dernière a bénéficié d’une mise en œuvre progressive : elle a fait l’objet d’une expérimentation minutieuse de 1993 jusqu’à sa généralisation en 1997 12 10 En vertu d’une ordonnance du 26 août 2005 relative à la simplification et à l’amélioration des règles budgétaires et comptables Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière général (PCG) de 1947/57, qui s’appliquait dans le cadre des anciennes instructions au PCG de 1982. En conséquence, les nouvelles instructions budgétaires et comptables seront fortement empreintes de préceptes comptables. Les principes de prudence et de sincérité ont, en effet, acquis autant de force que dans la comptabilité d’entreprise, alors même que l’aspect fiscal, contrainte majeure aboutissant à une rigueur obligée, n’existe évidement pas dans le secteur public local. De ce fait, comme l’a fait remarquer Paul HERNU, la transposition des principes de prudence et d’indépendance des exercices issus du PCG de 1982 a enrichi l’information 13 financière des collectivités . Les nouvelles instructions rendent, en effet, « plus claire et plus significative l’appréciation des faits en comptabilité », ce qui permet d’éviter le risque de transfert, sur l’avenir, d’incertitudes présentes, susceptibles de grever le patrimoine ou l’équilibre de gestion de la collectivité. La transposition du principe de prudence oblige ainsi les collectivités de plus de 3500 habitants à la constatation d’amortissements et de provisions. L’amortissement est une technique comptable qui permet, chaque année, de constater la dépréciation des biens et de dégager des ressources pour les renouveler. Ce procédé permet donc de faire apparaître à l’actif du bilan la valeur réelle des immobilisations et d’étaler dans le temps la charge relative à leur remplacement. La notion de prudence trouve également sa traduction dans l’obligation de provisionner pour constater une dépréciation ou un risque ou bien pour étaler une charge. En vue d’éviter une surcharge budgétaire trop importante, les instructions comptables limitent le champ des amortissements et des provisions obligatoires. En sus des biens meubles, seuls sont amortissables les immeubles productifs de revenus. Les provisions ne doivent être obligatoirement constituées que dans trois cas : pour couvrir des risques inhérents à des contentieux, dès l’ouverture d’une procédure collective pour les garanties d’emprunt, les prêts et créances, les avances de trésorerie et les participation en capital accordées par la commune à l’organisme faisant l’objet de la procédure collective, et lorsque 14 des restes à recouvrer sur compte de tiers sont compromis . Malgré un champ d’application très restreint, ces techniques comptables présentent une réelle utilité dans la mesure où elles obligent les collectivités à anticiper, dans leur budget, des sorties de liquidité susceptibles d’affecter leur équilibre financier. Plus spécifiquement, l’inscription comptable des amortissements contraint, en outre, l’ordonnateur à prêter son attention sur l’évolution de la situation de son patrimoine. Cette règle d’amortissement budgétaire obligatoire induit donc une amélioration de la vision patrimoniale des comptes des collectivités. Ainsi, comme le font remarquer Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT, « il apparaît que quelques années après la mise en place de la M14, les communes et les EPCI disposent d’une connaissance de leur patrimoine plus 13 HERNU (P.), « Les incidences de la M14 sur l'analyse financière communale », La Gazette des communes n°1422 du 29 septembre 1997 14 En application de l’ordonnance du 26 août 2005 relative à la simplification et à l’amélioration des règles budgétaires et comptables. Ce texte, applicable depuis 2006, a profondément modifié le régime des provisions. Les provisions réglementées ont, ainsi été supprimées au profit d’un régime de provisionnement basé sur l’existence de risques réellement encourus par la collectivité. En outre, les collectivités ont désormais le choix entre un régime de provisions semi budgétaires de droit commun et un régime optionnel de provisions budgétaires. Dans le premier cas, la non budgétisation de la recette en section d’investissement permet une mise en réserve de la dotation qui demeure ainsi disponible jusqu’à l’exercice de sa reprise. Brevet Blandine - 2007 11 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… complète, et en tout état de cause meilleure, que celle dont l’état dispose sur son propre parc immobilier et mobilier 15 ». Par ailleurs, la transposition du principe d’indépendance des exercices en comptabilité locale nécessite, pour les collectivités de plus de 3500 habitants, le rattachement des charges et des produits de fonctionnement à l’exercice auxquelles ces opérations se rapportent. Ainsi, en application de ce principe, doivent être intégrés au compte de résultat toutes les charges correspondant à des services faits et tous les produits correspondant à des droits acquis, nés au cours d’un exercice, mais qui n’ont pu être comptabilisés. Les opérations de réimputation par l’intermédiaire de compte de charges à payer, de produits à recevoir, ou de charges ou de produits constatés d’avance, permettent de mesurer au plus près l’importance des charges et des produits de fonctionnement de chaque exercice, en fonction de la réalité des prestations exécutées. Ce mécanisme conduit en conséquence à une réelle amélioration de la sincérité des comptes. La notion de sincérité trouve également sa traduction en comptabilité locale dans l’obligation de retracer en annexe du budget les engagements hors bilan de la collectivité. Les engagements hors bilan représentent « tous les droits et obligations autres que ceux qui doivent être exprimés au bilan ou au compte de résultat ou qui n'y sont traduits que de façon incomplète, et dont les effets sur le montant ou la composition du patrimoine sont subordonnés 16 à la réalisation de conditions ou d'opérations ultérieures ». L’état des engagements hors bilan complète donc l’information financière contenu dans le budget, et permet plus concrètement d’apprécier les risques pris par les collectivités. Inspiré des grands principes du PCG de 1982, le cadre comptable des collectivités locales propose une image financière plus fidèle des comptes locaux et offre, de ce fait, une matière première plus fiable pour identifier les risques pesant sur les budgets locaux. Les outils M11 et M12 n’étaient pas adaptés à cette nécessité. En l’absence de pratiques d’amortissement, de provision et de rattachement des charges et des produits à l’exercice, la comptabilité ne donnait pas une estimation exacte de la situation financière des collectivités. Le caractère indispensable de la réforme comptable ne signifiait cependant pas un alignement total sur la comptabilité d’entreprise. Les cadres comptables locaux ne se bornent pas à mettre en place des plans de comptes conformes au PCG : ils intègrent les spécificités du secteur local, et plus précisément les règles prudentielles auxquelles les collectivités sont soumises en matière d’organisation budgétaire. 2. Des principes d’organisation budgétaire protégeant les collectivités contre d’éventuelles dérives Si, comme l’atteste la prégnance des principes du PCG en comptabilité locale, des passerelles ont pu s’établir entre les modes d’organisation comptable du secteur privé et ceux des entités publiques, il reste néanmoins des différences significatives entre ces deux mondes. Ces dernières portent aussi bien sur le plan des objectifs que sur celui des barrières juridiques. Tandis que la recherche du surplus ou de profit constitue l’essence même de 15 FIEVET (F) et LAURENT (P), « Faut-il une LOLF pour les collectivités locales ? », RFFP n°95- septembre 2006, 17 pages, p. 131 16 Définition retenue par le Ministère de l’Economie et des Finances et extraite d’un document de présentation des plans de comptes locaux, consulté sur www.minefi.gouv.fr 12 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière l’activité de l’entreprise, la collectivité locale fonctionne selon des règles dictées par son statut et visant à contrôler l’utilisation des deniers publics. Parmi les principes qui régissent l’élaboration et le contrôle des budgets locaux, certains d’entre eux ont des répercussions importantes sur le mode de raisonnement financier. Ainsi, les gestionnaires locaux, soumis aux principes de transparence et d’équilibre budgétaire se voient contraints à une certaine prudence. * Un principe de transparence financière pour une meilleure lisibilité des choix budgétaires A force de s’accumuler, les reproches d’opacité, faits aux gestionnaires locaux par des élus d’oppositions ou des citoyens en mal d’information, ont fini par provoquer la réaction du législateur. Ce dernier, désireux de mettre fin aux plaintes concernant la difficulté, pour un néophyte, de comprendre des documents budgétaires illisibles, a finalement voté la loi du 6 février 1992 et son article 13, concernant précisément le principe de transparence financière des collectivités territoriales. Ce dernier a été codifié à l’article L.2313-1 du Code Général des Collectivités Territoriales. De cet article découle l’obligation imposée, depuis lors, aux communes, à leurs groupements, aux départements et aux régions, de mieux rendre compte au citoyen de l’utilisation qui est faite de ses impôts. Pour l’aider à porter un jugement sur la manière dont sa collectivité est gérée, on lui fournit, selon la taille de cette dernière, six ou onze ratios 17 synthétiques dont il peut suivre l’évolution dans le temps et comparer la valeur avec des moyennes régionales ou nationales, ainsi qu’un ensemble de documents récapitulant des informations financières non contenues dans le budget ou le compte administratif stricto sensu, comme par exemple l’encours des emprunts garantis par la collectivités au bénéfice de tiers. Cette transparence imposée par l’Etat à un secteur local pas toujours désireux de faire naturellement la lumière sur ses options de gestion permet à un observateur extérieur, grâce aux données fournies de se forger une première appréciation de la stratégie financière mise en œuvre par la collectivité. Ainsi, comme le font remarquer Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, « la constitution, au fil des ans, d’une série historique concernant la pression fiscale, les dépenses d’équipement ou l’endettement, est possible sans avoir à rechercher, dans les documents budgétaires, des éléments chiffrés introuvables 18 pour les non spécialistes ». Aussi, l’image prospective de ce que sera, demain, la situation financière de la commune devient-elle, en partie, lisible, dans la mesure où sont affichées les données relatives à certains engagements qui devront être honorés dans l’avenir. Non seulement, un tel rendu d’information facilite l’exercice de la démocratie locale, mais il fournit, également aux responsables locaux des outils d’analyse et de gestion propres. Une information plus complète et plus accessible leur permet, en effet, de détecter, aisément, le risque d’insolvabilité auquel la collectivité peut être confrontée. Parce qu’elle améliore la lisibilité des choix budgétaires, la transparence financière peut être considérée comme un principe protégeant la collectivité de possibles incidents de gestion : le gestionnaire local est mieux armé pour parer à l’éventualité d’une crise, ses 17 18 Cf. annexe n°2 sur les ratios de l’article L. 2313-1 du CGCT LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit. , p. 59 Brevet Blandine - 2007 13 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… choix de gestion s’avèrent d’autant plus mesurés qu’il sait que chacun d’eux seront rendus publics. Dans un esprit tout aussi protecteur, la règle de l’équilibre budgétaire conduit, également, les responsables locaux à adopter une vision plus rigoureuse de la gestion financière. * La règle de l’équilibre du budget ou la contrainte financière renforcée Le principe d’équilibre, appliqué strictement au niveau local, constitue la contrepartie de l'autonomie budgétaire accordée aux collectivités. Conformément à la loi du 2 mars 1982, ces dernières peuvent, en effet, déterminer librement leur budget pour l’année, à condition de le voter en équilibre réel. La même loi a établi les modalités éventuelles d’intervention du représentant de l’Etat et de la Chambre Régionale des Comptes, en cas de non respect de la règle. C’est l’article L. 1612-4 du Code Général des Collectivités Territoriales, ex article 8 de la loi du 2 mars 1982, qui définit précisément la notion de l’équilibre réel. « Le budget de la commune , énonce-t-il, est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère, et lorsque le prélèvement sur les recettes de la section de fonctionnement au profit de la section d’investissement, ajouté aux recettes propres de cette section, à l’exclusion du produit des emprunts, et éventuellement aux dotations des comptes d’amortissement et de provision, fournit des ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d’emprunt à échoir au cours de l’exercice. » Ces critères de l’équilibre budgétaire, imposés au secteur local, ont un impact fondamental en matière de décision financière : à la différence de l’Etat, les collectivités territoriales ne peuvent céder à la facilité de l’emprunt, la règle de l’équilibre budgétaire leur interdit la souscription de nouveaux emprunts pour faire face aux échéances induites par leur endettement passé. Toutefois, pendant longtemps, la règle de l’équilibre n’a pu être considérée comme un gage de solvabilité. Sa portée en la matière est apparue bien après 1982 avec la mise en œuvre des réformes de la comptabilité locale. C’est, en effet, lorsque les mesures visant à accroître la sincérité des budgets locaux ont été adoptées que l’efficacité de la règle de l’équilibre budgétaire a été consolidée. Auparavant, la législation comportait de nombreuses failles dans lesquelles se sont engouffrées les collectivités en état précaire. Ces dernières ont en effet développé un certain nombre de pratiques leur permettant de présenter, dans leur état, un budget respectant la contrainte de l’équilibre. Celles-ci ont tout simplement « joué la montre », en occultant pendant un certain laps de temps leur situation financière dégradée. Parmi ces pratiques, on peut citer entre autres : - la cavalerie budgétaire, qui consiste à « engager » des dépenses non budgétées sur un exercice et à ne les mandater que sur le suivant. - le jeu, pour les emprunts, de différé d’amortissement permettant de réduire les 19 annuités proches . La réforme de la comptabilité locale, portée par la loi du 22 juin 1994, édifie des barrières nouvelles à l’égard de telles pratiques : Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER citeront, à 19 14 Pour un développement sur ces pratiques : cf. LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit. , p. 79 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière cet égard, la règle du rattachement des charges à l’exercice, mesure de prévention contre « les factures dans le tiroir », et l’inscription d’une provision spéciale pour différé d’emprunt, contre les différés motivés par le seul but de faire fondre l’annuité. En outre, il convient d’évoquer les nouvelles garanties offertes par l’arrêté du 26 février 1996, pris en application de l’article L. 3341-1 du Code Général des Collectivités Territoriales, imposant aux collectivités la tenue d’une comptabilité des dépenses engagées. Ce dernier prévoit la possibilité pour les autorités chargées du contrôle budgétaire, de demander la production des états de dépenses engagées arrêtés en cours d’exercice, et non plus seulement à la clôture de celui-ci. Le représentant de l’Etat, ainsi que la Chambre Régionale des Comptes peuvent désormais exercer un réel suivi des dépenses engagées sur un exercice. Ainsi, les règles plus contraignantes de la M14 et de la comptabilité d’engagement ont dissuadé les collectivités en situation financière difficile de « jouer la montre » en jonglant avec le principe d’équilibre budgétaire. Le législateur a donc pris les mesures nécessaires pour éviter qu’une dynamique de surendettement ne s’installe, de façon occulte, dans les comptes des collectivités. Les règles de transparence et d’équilibre budgétaire, prescrites par le législateur aux entités du secteur public local imposent donc, clairement, aux collectivités un positionnement mesuré face au risque de déséquilibre financier. Dans la mesure où elles tendent à focaliser l’attention des gestionnaires locaux sur l’impératif d’équilibre financier, ces règles d’organisation budgétaire comme les principes comptables exposés, précédemment, doivent être considérées comme offrant de réelles garanties à une gestion équilibrée. Si l’équilibre financier passe par une inscription et une exécution dans le budget local, il apparaît que sa stabilité dans le temps nécessite l’utilisation d’outils de programmation pluriannuelle. B. Le recours aux autorisations pluriannuelles et l’amélioration de la visibilité financière à moyen terme L’équilibre financier résulte de la maîtrise des marges de manœuvre budgétaires définies annuellement et à moyen terme. Annuellement, d’une part, l’équilibre financier repose, comme nous l’avons vu, sur les conditions de la gestion du cycle budgétaire. A moyen terme, d’autre part, la préservation de l’équilibre financier doit pouvoir s’appuyer sur un bon déroulement des cycles budgétaires, apprécié à travers l’équilibre pluriannuel des budgets prévisionnels. Un raisonnement sur longue période permet de prévoir et d’anticiper les effets à venir des décisions prises aujourd’hui, il offre ainsi une bonne visibilité financière nécessaire à la prévention du risque de déséquilibre financier. Si la loi impose aux collectivités locales de délibérer annuellement sur les propositions de dépenses et de recettes, elle ne leur interdit pas, en revanche, de travailler simultanément, dans certains cas, avec un horizon pluriannuel. La procédure des autorisations de programmes et des crédits de paiement (AP/CP) est reconnue officiellement depuis la loi du 6 février 1992 pour les communes et les départements, les régions ayant bénéficié de textes antérieurs. La procédure des autorisations d’engagements et des crédits de paiement (AE/CP), quant à elle, a été créée par la loi du 19 février 2003 Brevet Blandine - 2007 15 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… portant réforme des règles budgétaires et comptables applicables aux départements. Elle 20 est applicable aux régions par renvoi d’article et a été étendue récemment aux communes . Concernant le champ d'application des AP et des AE, les premières peuvent concerner, si la collectivité le souhaite, l'ensemble des dépenses d'investissement. Cela permet d'appréhender ces dépenses selon le même mode de comptabilisation. En revanche ce n'est pas le cas des secondes. En effet, l'article L. 3312-4 du CGCT applicable aux départements et aux régions par renvoi de l'article L. 4311-3 du même code, limite l'utilisation des AE « aux seules dépenses résultant de conventions, de délibérations ou de décisions au titre desquelles le département s'engage, au-delà d'un exercice budgétaire, dans le cadre de l'exercice de ses compétences, à verser une subvention, une participation ou une rémunération à un tiers, à l'exclusion des frais de personnel ». À titre d'exemple, la région Centre comptabilise, depuis 2003, sous forme d'AE certaines dépenses comme les actions de formation professionnelle, certaines aides en matière économique et de recherche ainsi 21 que dans le domaine de l'enseignement supérieur . De plus, l'article L. 2311-3 applicable aux communes, modifié par l'ordonnance n° 2005-1027 du 26 août 2005 a imposé une exclusion supplémentaire pour les subventions versées aux organismes privés. Les conditions cumulées pour rendre éligibles les dépenses de fonctionnement à l'institution d'AE aboutissent à ce que seule une partie de la section du budget considérée est affectée par ce mode de gestion pluriannuel. Après avoir défini le mécanisme des « autorisations pluriannuelles », terme utilisé par Eric PORTAL dans un article portant sur l’utilisation des instruments financiers à vocation 22 pluriannuelle par les collectivités , il convient d’expliquer en quoi il améliore la visibilité financière des responsables locaux. 1. Définition des « autorisations pluriannuelles » Pour Eric PORTAL, selon que l'on se situe en gestion traditionnelle des dépenses ou que l'on utilise des autorisations pluriannuelles, il y a « budgétisation d'une capacité d'engagement annuelle », dans le premier cas ou « existence d'une capacité pluriannuelle d'engagement 23 extrabudgétaire », dans le second . Pour bien comprendre la distinction opérée, il est nécessaire de savoir ce que recouvrent les principes de l’engagement comptable obligatoire et de l’annualité budgétaire. Le principe du caractère obligatoire de l’engagement comptable est défini, on la vu, par l’article L.3341-1 du Code Général des Collectivités Territoriales. Cet article stipule que « l'engagement juridique est l'acte par lequel la collectivité crée ou constate à son encontre une obligation de laquelle résultera une charge. Il doit rester dans les limites des autorisations budgétaires. Le contrôle de la disponibilité des crédits est opéré lors de l'engagement comptable, qui est préalable à l'engagement juridique ». La comptabilisation obligatoire des engagements permet ainsi d'anticiper ce qui devra être payé à terme et de déterminer la marge de manœuvre de la collectivité pour engager de nouvelles dépenses. 20 Conformément aux dispositions de l’ordonnance du 26 août 2005 relative à la simplification et à l’amélioration des règles budgétaires et comptables. 21 Cf. Rapport BUSSEREAU sur la mise en œuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances en application de la loi de finances pour 2003, juin 2004, 49 pages, p. 27 22 PORTAL (E), « Les instruments financiers à vocation pluriannuelle : les autorisation de programme et les autorisations d’engagement », RFFP, n°95- Septembre 2006, 14 pages 23 16 Précité, p.117 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière Par ailleurs, l'engagement comptable doit être considéré par rapport au principe d'annualité budgétaire. Ce dernier, prévu à l’article L. 1612-1 du Code Général des Collectivités Territoriales prescrit que l'autorisation budgétaire est établie chaque année pour une durée d'un an. En théorie, il est donc impossible d'utiliser par anticipation au cours d'une année, les crédits ouverts au titre de l'année suivante. De même, l'utilisation de crédits de l'exercice budgétaire antérieur au cours de l'exercice suivant semble proscrite. Deux types d'exceptions existent cependant. Il s'agit des reports de crédits d'une année sur l'autre et des autorisations pluriannuelles. C'est, en effet, l'existence de ce principe et de ses exceptions qui autorise les responsables locaux à opérer différentes combinaisons avec le caractère obligatoire de l'engagement comptable. Ainsi, en gestion traditionnelle, les dépenses, en investissement comme en 24 fonctionnement, sont engagées sur des crédits inscrits au budget . Seule une partie de ceux-ci sont consommés pendant l'année d'engagement. Les crédits qui, engagés, n'ont pu être mandatés sur l'exercice budgétaire sont reportés. S'ils ne sont pas engagés, ils sont annulés en fin d’année. Ainsi, la capacité d'engagement sur le crédit budgétaire inscrit n'est qu'annuelle. Les reports de crédits d'une année sur l'autre n’ont d'autre utilité que de solder les engagements juridiques pris antérieurement. La possibilité de faire appel aux autorisations pluriannuelles modifie complètement la perspective. Le mécanisme consiste à inscrire dans le budget, sous forme d’autorisations de programmes (AP) ou d’autorisations d'engagement (AE) et dès le début de la mise en œuvre d’une décision, la totalité des dépenses qui devront être assumées par la collectivité pour la mener à son terme. Ensuite, sont votés au fil des exercices, les crédits de paiement 25 (CP) qui couvrent exactement les besoins d’engagement de dépense de l’année . Or, la capacité d'engagement, liée à l’autorisation, est, quant à elle, sortie de l'équilibre budgétaire. Elle devient pluriannuelle dans la mesure où elle n'est plus alors contrainte par l'annualité de l'autorisation. Ne participant pas à l'équilibre budgétaire, la dépense peut être décidée et théoriquement engagée sur une AP ou une AE déjà ancienne. C'est la possibilité d'engager une dépense sur le fondement d'une autorisation pluriannuelle votée depuis plusieurs années qui constitue la capacité d'engagement pluriannuelle. Le mécanisme se distingue donc, par définition, du modèle traditionnel de gestion des dépenses. Il se présente, en outre, comme nettement plus opérant, dans la perspective de préservation des équilibres financiers à moyen terme, dans le sens où il permet aux gestionnaires locaux de conduire l’action locale en bénéficiant d’une meilleure visibilité financière. 2. Les autorisations pluriannuelles, des outils de pilotage La procédure des AP/AE/CP offre, aux gestionnaires locaux, la possibilité de mettre en place un pilotage très fin à échéance infra annuelle. Grâce à ce mécanisme, ils disposent en effet d'une bonne visibilité financière. À ce titre, trois caractéristiques permettent de décrire la procédure des autorisations pluriannuelles. Il réduit à peu de choses les reports de crédits de paiement, s’intègre dans une logique d'objectif plus que de moyen et représente, pour le responsable local, une capacité d'anticipation. Notons cependant déjà que ces 24 Pour une présentation de cette approche, cf. COUARIEU (J.), « La gestion financière de votre commune », Éditions Le Moniteur, 1980, p.190 25 Pour un exposé du mécanisme des autorisations pluriannuelles : cf. HUET (G) et KLOPPFER (M), « Enjeux de la gestion pluriannuelle : autorisation de programme et nouvelles autorisation d’engagement », La lettre du financier, juin 2003, fiche technique, 12 pages, p.1 Brevet Blandine - 2007 17 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… caractéristiques sont sensiblement atténuées pour les AE, compte tenu notamment de leur champ d'application limité, pondérant ainsi, pour la section de fonctionnement, le jugement que l'on peut avoir sur leur intérêt en tant qu'outil de pilotage. Ainsi, comme le font remarquer Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, la mise en place d’une telle procédure « évite le surdimensionnement dans l’ouverture des crédits annuels relatifs aux décisions envisagées dans un cadre pluriannuel, et les reports 26 inévitables qui s’en suivent, source d’opacité budgétaire ». Dans la gestion traditionnelle des dépenses, c'est le même crédit, qui lorsqu'il est engagé mais non mandaté constitue un reste à réaliser et est reporté d'un exercice sur l'autre. En revanche, lorsqu'une collectivité territoriale utilise la procédure des autorisations pluriannuelles, il y a une distinction entre la capacité d'engagement et la capacité de paiement : la capacité d'engagement est sortie de l'équilibre budgétaire, la capacité de paiement, quant à elle, y participe. Compte tenu du mode de raisonnement qui a présidé à leur inscription, la logique veut que les CP soient consommés à un niveau proche de 100 %. Ainsi, au total, la notion de reports de CP est-elle réduite à peu de chose. Cela participe à la clarification des comptes budgétaires, par opposition aux budgets gérés de manière traditionnelle qui comportent souvent d'importants volumes de crédits reportés d'une année sur l'autre. Les collectivités disposent ainsi d’une meilleure visibilité financière. Par ailleurs, comme l’a démontré Eric PORTAL, dans un article portant sur la 27 planification stratégique locale , les autorisations de programme « s'intègrent dans une logique d'objectif et non de moyens » et cela en raison de leur « caractère extrabudgétaire ». Ne dépendant pas de la structure du budget, la détermination des AP est laissée à la disposition des collectivités territoriales. Ainsi, la collectivité, qui n’est pas tenue pas la présentation budgétaire, peut définir le programme et l’ensemble des opérations qui le composent, en fonction de ses objectifs et des politiques publiques mises en œuvre pour y répondre. Le programme peut même résulter d'une démarche stratégique au cours de laquelle la collectivité s'est posée la question de savoir quelles politiques mettre en œuvre, dans quels objectifs et en faveur de qui. Il peut être décomposé en opérations. La logique privilégie alors l'objectif à réaliser et favorise une programmation longue du développement local. Sous cet aspect, le mécanisme des AP/AE/CP se révèle incontestablement comme un véritable outil de pilotage. Enfin, la possibilité de comptabiliser, d'une part, les affectations comptables et, d'autre part, les engagements comptables offre aux gestionnaires locaux une connaissance fine du statut de chaque autorisation pluriannuelle. Il en résulte, ainsi, une nouvelle capacité d'anticipation, que Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, comme Eric PORTAL ont cherché à mettre en exergue. Ainsi, les premiers constatent qu’avec ce mécanisme, il est possible, dès le départ, d’apprécier le poids qu’une opération peut faire peser sur les budgets 28 futurs, et ce « sans se bercer de l’illusion d’une absence de contrainte financière ». C’est effectivement, dès le début de la mise en œuvre d’une décision d’affectation, que les gestionnaires locaux prennent connaissance de la totalité des dépenses qui devront être assumées par leur collectivité au titre de l’opération pluriannuelle envisagée. 26 27 LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit., p.81 A ce titre, cf. PORTAL (E.) « La planification stratégique locale : pratique et enjeux », RFFP n°85, février 2004, 16 pages, p. 107 28 18 LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit., p.81 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière Le second, quant à lui, met en lumière le fait qu’un pilotage est possible en cours de réalisation de l’opération pluriannuelle. Le mécanisme permet, selon ces propres termes, 29 « de situer le budget en cours d'exécution dans un continuum pluriannuel ». Les responsables locaux peuvent répondre en temps réel à la question de savoir si l'autorisation est disponible, partiellement ou totalement, si elle est affectée, si elle est engagée. Ils peuvent, ainsi, identifier où se situent les marges de manœuvre qu'il est possible d'utiliser si des aléas économiques, financiers ou techniques font qu'il est impératif de repousser des opérations de dépenses dans le temps. Sous cet aspect, le mécanisme des AP/AE/CP se révèle incontestablement comme un véritable outil de pilotage. Avec l’introduction des outils de programmation pluriannuelle, le législateur a donné la possibilité aux collectivités d’apprécier, dans une optique de préservation des équilibres financiers à moyen terme, l’équilibre durable de leur budget. Ces outils s’inscrivent dans un dispositif visant à protéger les collectivités locales du risque de dégradation financière. Comme les règles de la comptabilité locale énoncées précédemment, ils constituent des outils de stratégie préventive instaurés par l’Etat pour préserver l’équilibre des finances locales. Cependant, la prévention du déséquilibre financier, par la mise en œuvre des outils réglementaires régissant la gestion budgétaire et comptable locale ne peut tenir lieu, à elle seule, de stratégie de saine santé financière. Une telle stratégie suppose de la part de chaque collectivité un effort technique. Au-delà du respect de simples principes préventifs, chaque collectivité doit mettre au point son propre plan financier pluriannuel, celui qui va lui permettre d’atteindre les objectifs qu’elle s’est fixé sans que soient compromises ses futures capacités financières. Elle doit, en d’autres termes, définir son champ d’actions possibles et calibrer les conséquences financières de ses choix passés et envisagés. Ainsi, dans la perspective d’une saine santé financière, une analyse financière fondée sur le concept de marge de manœuvre s’avère indispensable. Pour ce faire, les collectivités peuvent trouver, en leur système comptable, un appui technique incontestable. Ce sont précisément les instructions budgétaires et comptables des collectivités qui présentent en la matière de réels apports. II. L’élaboration d’un plan financier à partir d’une analyse financière établie par exploitation de l’information comptable Apparaissant comme une étape technique de préparation à la prise de décision politique, l’étude des chiffres constitue un moment indispensable dans une démarche globale de stratégie financière. Selon, Jean BOUINOT, « l'analyse financière d’une collectivité locale consiste à examiner l’évolution de sa situation au cours des années passées pour disposer 30 d’une base raisonnée de prévision et de planification de sa situation future ». C’est, donc, à partir de l’évaluation des héritages laissés par les décisions antérieures, que les gestionnaires locaux cherchent à arrêter une stratégie pour le futur. 29 PORTAL (E), « Les instruments financiers à vocation pluriannuelle : les autorisation de programme et les autorisations d’engagement », Op. Cit., p. 120 30 BOUINOT (J), « Analyse financière : fondements et méthodes », Juris-classeurs, 1994, 28 pages, Fascicule 2020 Brevet Blandine - 2007 19 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… L’analyse financière comporte ainsi deux volets séparés : l’analyse rétrospective et l’analyse prospective. L’une, évidemment, ne va pas sans l’autre. Si l’on regarde vers l’arrière, c’est pour tirer une leçon des choix de gestion passés, et pour savoir quel est le socle sur lequel on peut préparer l’avenir. Quand à la prospective, elle s’appuie forcément sur une rétrospective, puisque les hypothèses du futur sont en bonne partie conditionnées par la situation héritée du passé. En raison de leur interdépendance, les agrégats utilisés sont identiques : leur évolution sur les exercices précédents est mise en valeur par l’analyse rétrospective, ces mêmes agrégats sont projetés dans l’avenir en fonction de différentes hypothèses dans le cadre d’une analyse prospective. C’est précisément sur le traitement de ces agrégats que porte l’intérêt des instructions budgétaires et comptables des collectivités. La maîtrise de tels outils de classification apparaît, en effet, indispensable à la construction d’une analyse financière dans la mesure où ils organisent l’information comptable de telle sorte que celle-ci peut être facilement exploitée. C’est seulement après avoir calculé ces agrégats et réunit l’information comptable qui s’y rattache que l’étape même d’analyse, nécessaire à l’élaboration du plan financier, peut être abordée. A. La pratique comptable comme condition de mise en œuvre de l’analyse financière L’analyse financière repose sur l'exploitation des documents comptables, en l'occurrence le compte administratif établi par l'ordonnateur ou le compte de gestion confectionné par le comptable. La fiabilité du diagnostic dépend par conséquent de la qualité des informations comptables. Sur ce point, et comme nous l’avons évoqué dans la section précédente, les nouvelles instructions budgétaires et comptables, inspirées des principes du PCG applicables aux entreprises, marquent un réel progrès. A l’exigence de qualité, s’ajoute par ailleurs la nécessité d’une synthèse quantitative des informations. La comptabilité propose une description détaillée de la mobilisation et de l’affectation des ressources. Or la masse des flux recensés, en particulier au niveau le plus fin de la nomenclature, ne permet pas commodément d’appréhender la situation financière de la collectivité. L’information comptable doit, par conséquent, être concentrée en soldes représentatifs. Des retraitements de comptes, sous forme de tableaux financiers, sont en effet nécessaires. Parce qu’elles imposent une présentation normalisée aux documents de base utilisés pour élaborer les supports d’analyse, les instructions budgétaires et comptables des collectivités offrent de grandes facilités pour procéder à de tels retraitements: leur intérêt réside, en effet, dans la possibilité pour les gestionnaires locaux de calculer rapidement ces agrégats, car les valeurs nécessaires au raisonnement mathématique apparaissent par simple lecture des documents comptables. La difficulté de l’exercice réside dans le fait qu’il n’existe pas de méthode unique de calcul des agrégats d’analyse financière. L'élaboration des tableaux découle d'un protocole guidé par les besoins d’informations de la collectivité. Deux traitements sont possibles, le premier, selon la méthode inspirée du PCG, dans une optique d’amortissement des immobilisations ; le second, selon la méthode des « trois épargnes », dans une optique d’amortissement de la dette. En tout état de cause, l’information comptable présentée dans le respect du plan de comptes de la collectivité peut être commodément exploitée qu’il s’agisse de mettre en perspective les dimensions financières ou économiques de l’analyse. 20 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière En vue de rendre compte de manière explicite des conditions d’exploitation de l’information comptable en analyse financière, il convient de fixer un périmètre à la démonstration. Ainsi, pour illustrer notre propos, nous étudierons les différents agrégats utilisés par les communes dans le cadre d’une analyse financière en M14. Nous présenterons successivement ceux relevant de la méthode inspirée du PCG, puis ceux dictés par la méthode des « trois épargnes ». 1. Exploitation de l’information comptable nécessaire au calcul des agrégats selon la méthode inspirée du PCG Le PCG propose trois tableaux emboîtés d’analyse financière. Point de départ de la présentation, le tableau des soldes intermédiaires de gestion (SIG) décrit la formation du 31 résultat de l’exercice. Pour, l’essentiel, il correspond au cycle d’exploitation . Relié au précédent par la capacité d’autofinancement, le tableau de financement décrit la variation annuelle du bilan et donc le cycle de l’investissement. Enfin, point final de l’enchaînement, le tableau des flux de trésorerie décompose la variation du fonds de roulement, c'est-à-dire 32 le solde du tableau de financement . 33 Selon une démonstration réalisée par Alain GUENGANT et Yann LE MEUR , il semble que la méthode d’analyse retenue par le PCG s’applique dans ses grandes lignes aux communes. La réalisation d’un diagnostic local implique en effet, également, d’examiner la formation puis l’affectation de l’épargne, le financement des investissements et enfin la composition du solde global de l’exercice. Pour réaliser ce diagnostic, les données prises en compte sont les mouvements budgétaires. La distinction entre opérations réelles et opérations d'ordre n'est pas utilisée. A la différence de la comptabilité communale, la comptabilité d’entreprise n’isole pas systématiquement les mouvements réels des mouvements d'ordre. Seuls les premiers affectent le fonds de roulement, c'est-à-dire la trésorerie ou le solde des créances et des dettes, donc le besoin en fonds de roulement. En revanche, les seconds constituent des écritures comptables sans impact sur le fonds de roulement. Leur fonction est notamment de permettre une transcription des dépenses et recettes en charges et produits. La comptabilité M14, dérivée du PCG de 1982, semble donc, autoriser, en théorie, une application immédiate aux communes des tableaux financiers conçus initialement pour les entreprises. Alain GUENGANT, dans un ouvrage portant sur l’analyse financière des communes, considère, ainsi, que le tableau des flux de trésorerie est directement transposable aux 34 localités, car il ne présente « aucune particularité institutionnelle ». En conséquence, il peut s’appliquer sans modification de forme à la fois aux organismes marchands et non marchands. A la différence du tableau des flux de trésorerie, les deux autres tableaux tels que présentés par le PCG, exigent, selon lui, une adaptation afin d’orienter la méthode en fonction des spécificités des budgets locaux. 31 32 Cf. annexe n°3 : pour une présentation des soldes intermédiaires de gestion Cf. annexe n°4 : pour une présentation du tableau de financement faisant apparaître la variation du fond de roulement 33 GUENGANT (A.) et LE MEUR (Y.), « Quels tableaux financiers pour les communes ? », article publié dans Les cahiers du management territorial, décembre 2000, janvier et février 2001, 19 pages, p.2 à 7 34 GUENGANT (A.), « L’analyse financière des communes », Economica, 1998, 110 pages, p.43 Brevet Blandine - 2007 21 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Ainsi, des ajustements peuvent être opérés au niveau du tableau de financement, correspondant à la section d'investissement du compte administratif communal. Le tableau de financement d’une commune doit, dans l'optique du PCG, utilement posséder en entrée la capacité d'autofinancement corrigée de l'amortissement de la dette, pour tenir compte de l'obligation d'amortissement réel des emprunts. Pour les communes, et contrairement aux entreprises, la capacité d'autofinancement (les recettes réelles de fonctionnements diminuées des dépenses réelles de fonctionnement) ne constitue pas une ressource libre d'emploi, mais au contraire une recette grevée d'une affectation spéciale. En application du principe d'équilibre réel du budget, l'épargne doit en priorité couvrir l'amortissement des emprunts. Seule par conséquent, la capacité d'autofinancement amputée du remboursement de la dette demeure disponible pour financer les investissements non financiers, en complément des autres recettes affectées, à l'exemple des subventions d'équipement, des aliénations ou encore des nouveaux emprunts. De la même façon, une transposition immédiate de la méthode des SIG est exclue, car une collectivité locale a pour mission première d’exercer un service public et le tableau des SIG, tel qu’il est conçu par le PCG 1982, ne présentera guère d’intérêt pour une entité qui intervient dans un secteur non marchand. Le tableau est, en effet, initialement conçu pour une application dans le secteur marchand : la ventilation part de la valorisation de la production et de la valeur ajoutée pour aboutir, après réintégration des résultats financier et exceptionnel, au calcul du résultat de l'exercice. Lors de l'application de la démarche aux collectivités locales, les analystes proposent 35 deux ajustements . Le premier porte sur le vocabulaire : le terme « fonctionnement » remplace celui d’ «exploitation ». Le second concerne l'amorçage du processus de ventilation des soldes. La décomposition ignore alors l’étape de l’évaluation de la production et du calcul de la valeur ajoutée. La répartition passe directement des recettes budgétaires de fonctionnement à l’excédent brut de fonctionnement. L’absence de référence à la production et à la valeur ajoutée débouche ainsi sur une présentation simplifiée du tableau des soldes intermédiaires de gestion. La différence entre les recettes et les dépenses représente l’excédent brut de fonctionnement. La décomposition descendante des soldes retrouve ensuite l’enchaînement retenu pour les entreprises. Le document, joint en annexe n° 5, concernant les soldes intermédiaires de fonctionnement utilisés par les collectivité présente, par nature de compte, l’information comptable nécessaire à leur calcul. L’excédent brut de fonctionnement complété des transferts de charges et minoré de la dotation aux amortissements et provisions, nette des reprises, forme le résultat de fonctionnement. Le résultat de fonctionnement, appelé encore résultat courant non financier, additionné du résultat financier et du résultat exceptionnel correspond au résultat de l’exercice, terme du processus descendant de ventilation des soldes. Par ailleurs, en amorçant une recomposition ascendante, le résultat de l’exercice complété de la dotation aux amortissements et aux provisions mesure la capacité d’autofinancement. La capacité d’autofinancement peut encore être calculée directement à partir des recettes et des dépenses budgétaires de fonctionnement. Ainsi, le calcul des agrégats proposés par le PCG de 1982 ne soulève pas de difficultés, aux communes, sur le plan technique. La présentation normalisée de leurs documents comptables simplifie le travail d’exploitation des informations nécessaires à l’analyse financière. Le même constat peut être également établi s’agissant des traitements comptables opérés selon la méthode des « trois épargnes ». 35 Cf. annexe n° 5 pour une approche comparée de l’utilisation des tableaux de SIG par une entreprise et par une collectivité territoriales 22 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière 2. Exploitation de l’information comptable nécessaire au calcul des agrégats selon la méthode des « trois épargnes » Comme l’ont fait remarquer Alain GUENGANT et Yann LE MEUR, la méthode des « trois 36 épargnes » accorde une place centrale au remboursement de la dette . De ce fait, la formation et l’affectation prioritaire de l’épargne au règlement du service de la dette sont décrites dans un premier tableau, celui des soldes de fonctionnement. Ensuite, l’épargne résiduelle éventuellement disponible pour financer l'investissement, en complément des autres ressources d’équipement définitives ou temporaires, est replacée dans un tableau de financement. Au plan technique, cette méthode se réfère uniquement aux opérations réelles, même si des opérations d’ordre sont utilisées pour opérer divers reclassements comptables. De ce fait, la démarche exige de nombreux retraitements. Cependant, elle ne demeure pas plus complexe que la précédente, puisque là aussi, la simple exploitation de l’information comptable fournit une chaîne complète et cohérente d’analyse. Nous évoquerons successivement le contenu des tableaux financiers proposés par la méthode des « trois épargnes ». * Le tableau des soldes de fonctionnement La première étape de la construction du tableau de fonctionnement consiste à calculer les produits et les charges de l'exercice à partir des recettes et des dépenses de l’année, lues directement dans la balance générale, et après déduction de certaines opérations dont les montants sont puisées dans les développements par nature de la section de fonctionnement. Les produits et les charges de fonctionnement correctement évalués, la deuxième étape de la construction du tableau de fonctionnement consiste à calculer les trois épargnes par enchaînement de soldes successifs. La commune possède en effet, non pas une, mais plusieurs épargnes, suivant, d'une part le champ des charges et des produits de fonctionnement retenus et, d'autre part, les prélèvements opérés par le remboursement des emprunts. L'analyse financière locale distingue traditionnellement trois épargnes : 37 l'épargne de gestion, l'épargne brute et l'épargne nette . L'épargne de gestion, évaluée avant comptabilisation des frais et des produits financiers, correspond à la différence entre les produits et les charges de fonctionnement hors mouvements financiers. Toutefois, pour neutraliser les fluctuations liées aux opérations exceptionnelles, une définition plus étroite de l'épargne de gestion peut être utilisée, sous le nom d'épargne courante ou encore d'excédent brut courant. L'excédent brut courant correspond à la différence entre les produits courants et les charges courantes. L'excédent brut courant, complété du résultat exceptionnel, représente l'épargne de gestion. Le premier emploi de l'épargne de gestion est d'assurer le règlement des intérêts. L'épargne de gestion diminuée des frais financiers dus, nets des produits financiers, est égale à l'épargne brute. Le deuxième emploi correspond au remboursement du capital des emprunts inscrit en dépenses de la section d'investissement. L'épargne brute amputée de l'amortissement de la dette, hors réaménagement financé par emprunt, est appelée épargne nette. L'épargne nette représente la ressource disponible, après financement des dépenses 36 GUENGANT (A.) et LE MEUR (Y.), Op. Cit. p. 8 à 18 37 Pour une présentation plus approfondie sur la formation des trois épargnes : cf. GUENGANT (A.), « L’analyse financière des communes », Economica, 1998, 110 pages, p. 29 à 35 Brevet Blandine - 2007 23 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… courantes, paiement des intérêts de la dette et remboursement du capital, susceptible d'être réinvestie dans les équipements et/ou dans le fonds de roulement. * Le tableau de financement Le tableau de financement de l'investissement retrace l'utilisation de l'épargne nette, en complément des autres ressources affectées. Au niveau de la section d'investissement, le calcul des soldes vise ainsi à déterminer la demande d'emprunts pour une épargne nette donnée et un programme d'investissement également donné ou plus exactement ajusté aux possibilités financières de la collectivité. Le résultat final de la section d'investissement, et donc global via l'épargne brute de la section de fonctionnement, correspond à la variation du fonds de roulement, c'est à dire à la différence algébrique entre le fonds de roulement de clôture et le fonds de roulement reporté de l'exercice. Les agrégats et les soldes examinés jusqu’à présent constituaient tous des flux, c'est-à-dire des mouvements financiers sur une période donnée, en l’occurrence l’année. En revanche, le fonds de roulement représente un stock défini à une date donnée. Il se compose de deux éléments, d’une part, la trésorerie, c'est-à-dire l’encaisse déposée obligatoirement au Trésor et d’autre part le solde des créances et des dettes courantes non bancaires, appelé besoin en fonds de roulement. Le compte administratif fournit le montant du fonds de roulement initial et final. En revanche, seul le compte de gestion permet de décomposer le fonds de roulement entre les disponibilités déposées au Trésor, les concours bancaires courants et le besoin en fonds de roulement. Celui–ci doit en effet être ventilé finement pour appréhender la variation annuelle du besoin en fonds de roulement. Le suivi des restes à recouvrer est nécessaire pour cerner avec précision la situation financière de la collectivité. Le compte administratif recense en effet des droits constatés, les opérations de dépense étant enregistrées au moment où leur réalité juridique apparaît, c'est à dire, à la réception de la facture, le plus souvent. Or, des créances détenues par la localité peuvent être irrécouvrables. Les recettes réelles de fonctionnement sont par conséquent susceptibles d’être gonflées de créances douteuses. Certes, le risque de recouvrement est nul pour les dotations et les impôts directs locaux. Mais, il ne l’est pas pour les ventes de produits et les prestations de services. De même, l’évaluation des restes à payer fournit de précieuses indications sur l’apparition de d’un risque possible de défaillance de paiement. En conséquence, la consultation du compte de gestion est indispensable pour apprécier la solvabilité immédiate de la collectivité et détecter ainsi l’émergence d’éventuelles difficultés de règlement. Ainsi, qu’il s’agisse d’apporter à l’analyse une dimension financière, par application de la méthode des « trois épargnes » ou une dimension économique, par application de la méthode inspirée du PCG, le constat à formuler est le même : utiliser la matière comptable apparaît comme une condition de mise en œuvre de l’analyse financière. Les cadres comptables locaux présentent une utilité incontestable dans la préparation de l’analyse financière, puisqu’ils fournissent une présentation structurée à la base documentaire, et facilitent, ainsi le travail d’exploitation de l’information comptable. Les retraitements réalisés ont donc permis de dégager des agrégats de gestion pertinents sur lesquels vont porter les analyses rétrospectives et prospectives. B. Des agrégats de l’analyse financière au plan financier 24 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière Pour apprécier l’équilibre financier d’une collectivité locale, et son évolution sur longue période, l’information comptable utilisée doit être, notamment, concentrée en soldes représentatifs. Or, comme nous l’avons évoqué précédemment, il existe deux méthodes permettant de calculer des soldes représentatifs, suivant que l’on souhaite donner à l’analyse une dimension financière ou économique. Chaque collectivité choisit en conséquence la méthode qui lui correspond le mieux, sachant que des parallèles peuvent être réalisés entre les différents agrégats : c’est le cas de l’épargne brute et de la capacité d’autofinancement, deux sommes en principe identiques. Ainsi, il n’est pas rare que ces dernières, par souci de vérification, présentent en parallèle les différents calculs dans leur analyse financière. Aussi, pour conforter l’appréciation initiale donnée par ces méthodes très abouties d’analyse financière, les entités locales ont-elles parfois recours à d’autres indicateurs 38 synthétiques de l’équilibre financier . Ces ratios dit « de structure financière », calculés par les collectivités en sus des ratios obligatoires de la loi du 6 février 1992 lorsqu’elles le jugent opportun, font appel à des notions financières comme l’autofinancement ou les recettes « réelles ». A titre d’exemple, il est possible de citer le ratio « encours de dettes/épargne brute », qui permet d’apprécier si l’endettement de la collectivité est correctement calibré par rapport à sa capacité d’épargne. Ce ratio est exprimé sous forme d’un nombre d’années : s’il est égal à cinq, cela signifie qu’il faudrait à la collectivité cinq ans pour rembourser la totalité de sa dette, à condition de consacrer à cela la totalité de son épargne, et ce, sous 39 réserve que cette dernière reste inchangée sur la période . Quelque soit la méthode ou la gamme d’indicateurs retenue par les collectivités pour construire une analyse financière, l’objectif poursuivi est de mesurer les conséquences financières des choix passés ou envisagés. Pour cela, il faut aborder l’étape même d’analyse : c'est-à-dire étudier l’évolution des grands soldes financiers sur la période antérieure et projeter ces derniers dans l’avenir, pour prévoir et planifier, en envisageant différentes hypothèses, la situation future de la collectivité. Une fois réalisé le travail de préparation et déterminé les agrégats d’analyse utilisés, l’étape de la rétrospective ne comporte pas de difficulté particulière. Celle-ci vise à dresser un état des lieux à un instant « t » sur une période plus ou moins longue : ce peut être par exemple cinq ans dans le cas d’une commune qui souhaite réaliser un bilan de mandat. L’objectif est, en effet, d’identifier les faits isolés, comme l’investissement exceptionnel ou les réaménagements de dette, pour relativiser leur impact dans la formation de l’équilibre final. Ces derniers ne seront par ailleurs pas pris en compte lors de la phase de projection. L’étape de la prospective constitue, quant à elle une entreprise délicate car les collectivités ne maîtrisent pas complètement tous les paramètres qui entrent en ligne de compte pour élaborer un budget. La difficulté majeure de cet exercice de projection, réside dans la détermination des leviers d’actions, qui par la volonté des élus, sont potentiellement à même d’influer sur le niveau des équilibres futurs, évalué à un horizon de trois à cinq 38 Pour une présentation des ratios de base utilisés par les collectivités : cf. LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit., p.104 à 110 et BOUINOT (C.), LARPIN (F.), THEVENOT (M.), « L'analyse financière en M14 : une nouvelle pratique : du bilan au tableau de situation financière, du compte administratif aux soldes intermédiaires de gestion, du compte de gestion au tableau de flux, du rétrospectif au prospectif », 2e éd. Economica, 2000, p. 206 à 212 39 Le niveau d’alerte ne peut se définir de manière absolue : tout dépend en réalité du type et de la durée de vie moyenne des investissements réalisée par la collectivité considérée. Pour les communes, Jean BOUINOT avance le chiffre de quinze ans, Michel KLOPFER, fixe une limite à 10 ans Brevet Blandine - 2007 25 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… 40 ans . Par la suite, il s’agit de tester, sous la forme de scénarios, la sensibilité des équilibres financiers à des variations plus ou moins prononcées de chacun de ses leviers d’action. 1. L’identification des leviers d’actions Après avoir dressé un état des lieux des résultats, en terme financier, de la politique poursuivie sur la période précédente, il reste à déterminer les facteurs de liberté dont dispose la collectivité pour concilier sur la période à venir, ses ambitions de dépenses avec le maintien d’un équilibre financier satisfaisant. Autrement dit, il faut identifier les leviers avec lesquelles les gestionnaires vont pouvoir s’appuyer pour se donner des marges de manoeuvre supplémentaires. Le premier poste sur lequel travaillent généralement les collectivités est celui du service de la dette : comme l’ont fait remarquer Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, « les frais financiers ne sont plus considérés comme des dépenses à inscrire automatiquement 41 en section de fonctionnement, pour le montant prévu dans le contrat de prêt ». Ils sont désormais perçus comme une somme qu’il est possible de réduire par une gestion active. Des emprunts anciens souscrits dans des conditions de taux extrêmement défavorables, sont en effet susceptibles d’être renégociés. Aussi, un arbitrage entre taux fixes et taux variables, en fonction de leurs évolutions respectives permet-il d’économiser sur les intérêts. L’analyse de l’état de la dette annexé au budget ainsi que l’étude des contrats de prêts souscrits par la collectivité apparaissent alors primordiales pour déterminer les orientations stratégiques auxquelles il peut être souhaitable de procéder. De même, la consultation des états fiscaux adressés chaque année par l’administration des impôts à la collectivité peut donner une photographie utile pour travailler sur la 42 matière imposable . La possibilité pour une collectivité d’accroître ses bases fiscales se décline sur plusieurs échéances. A court terme, tout d’abord, il convient de s’interroger sur l’opportunité de maintenir ou non en l’état les exonérations et abattements consentis à telle ou telle catégorie de contribuables. A plus long terme, un travail sur le recensement des contributions nouvelles peut éviter un manque à gagner imputable au retard des services fiscaux ou à l’évasion fiscale locale. A très long terme, enfin, les choix de développement de la collectivité peuvent influer sur l’évolution relative des différentes bases d’impôts : le fait de privilégier le logement intermédiaire plutôt que le logement social a des conséquence sur la richesse fiscale locale. Des gains peuvent être également attendus d’une gestion attentive du patrimoine, tant mobilier qu’immobilier. Une collectivité pourrait par exemple céder des bâtiments municipaux ou des immeubles qui n’ont plus d’utilité. De telles mesures assurent une rentrée d’argent non reproductible, mais qui peut être bienvenue si la collectivité se voit imposée une certaine rigueur de gestion. Un travail sur les produits locaux constitués par les produits d’exploitation ou les produits des domaines offre aussi, la possibilité de gains supplémentaires relativement facile à dégager. Il est possible de s’interroger sur le suivi des régularisations de charges et loyers perçus auprès des occupants d’immeubles appartenant à la collectivité. Aussi, peut– 40 Il s’agit de la durée optimale de planification financière mise en exergue par Michel KLOPFER, ce dernier considérant qu’au- delà, les prévisions n’ont plus grand sens 41 42 LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit., p. 24 Pour une présentation de l’action envisageable sur les bases d’imposition : Cf. KLOPFER (M.), « La gestion financière des collectivités territoriales », Le Moniteur, 2005, 823 pages, chapitre 9, p. 136 à 143 26 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière il être envisagé de réfléchir quant à l’opportunité de maintenir des péréquations tarifaires entre catégories d’usagers (résidents ou non résidents, familles nombreuses et personnes âgées). Il peut également être souhaitable d’engager une réflexion sur le montant des dépenses, même si les économies sont souvent difficiles à réaliser. Les opérations d’urbanisme, et d’une façon générale tous les grands chantiers d’équipement figurent au nombre des coups partis, pour lesquels, une fois les premières dépenses engagées, il est très difficile d’envisager une remise en cause politique : on n’arrête pas du jour au lendemain, la construction d’une piscine ou d’un cinéma, sous prétexte que le budget, finalement ne peut absorber le total des dépenses à engager. Tout au plus peut-on pour les programmes d’investissement divisés en plusieurs tranches, décider à moindre coût politique de différer la énième phase de réalisation. Au stade des études préalable, on peut, par contre, réviser le programme à la baisse. Comme le fait constater Alain GUENGANT, « l’objet de la démarche (prospective) n’est-il pas d’éclairer les choix d’investissement en avenir incertain et donc de réviser, si nécessaire la volume 43 ou l’échéancier des projets ! » De même, les économies de dépenses qui remettent en cause le fonctionnement existant de la collectivité sont très difficiles à concrétiser, et notamment lorsqu’elles exigent, de la part des services, des gains de productivité à effectifs constants ou décroissants. Elles sont cependant indispensables quand le freinage de l’investissement ne suffit pas à rétablir durablement les équilibres. Ainsi, constate Benoît QUIGNON, « l’étude des plans de redressement de certaines collectivités montre que l’endettement accumulé et la faiblesse de la capacité d’autofinancement conduisent à maintenir le niveau d’emprunt 44 alors même que les programmes de travaux sont réduits .» Ainsi, dans certaines circonstances, et notamment lorsque le stock de dette est conséquent et que la baisse des programme d’équipement ne suffit pas, il est nécessaire d’envisager une remise en cause de l’organisation pour reconstituer son épargne disponible. Enfin, l’augmentation du niveau de la fiscalité permet assurément de dégager des 45 marges de manœuvre supplémentaires . Il s’agit de la principale variable sur laquelle sont à peu près libre de jouer les élus. Hormis les collectivités qui dépassant les taux plafonds légaux fixés annuellement, se verraient contrainte dans leur liberté fiscale, rien n’empêche les élus d’augmenter, quand il le faut la fiscalité directe ou indirecte. La seule limite, en la matière, est le degré d’acceptation de la part des contribuables, de hausses soutenues ou répétées de la fiscalité. Une fois définies les hypothèses d’évolution envisageables ou souhaitées pour les différentes manettes sur lesquelles la collectivité peut agir, la combinaison des paramètres, par le jeu alternatifs ou simultané des leviers d’action, permet d’élaborer plusieurs scénarios possibles pour les finances futures de la collectivité. Il convient alors d’apprécier par comparaison des « résultats » obtenus, lequel de ces scénarios débouche sur l’équilibre financier le plus sain, c’est-à-dire celui qui préserve la capacité d’investissement future de la collectivité. 2. Des scénarios au plan définitif 43 44 45 GUENGANT (A.), Op. Cit., p. 95 QUIGNON (B.), « La maîtrise des coûts », actes des Rencontres financières des décideurs locaux, novembre 1994 Pour une présentation de l’action envisageable sur les taux de la fiscalité: Cf. KLOPFER (M.), Op. Cit., p. 133 à 135 Brevet Blandine - 2007 27 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Le premier réflexe consiste, en général, à bâtir un scénario dit « au fil de l’eau », c'està-dire à prolonger à l’identique les tendances observées sur le passé : même évolution des dépenses de gestion, même enveloppe moyenne d’investissement, même rythme de progression de la fiscalité locale, etc. Comme le font remarquer Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, les résultats du scénario « fil de l’eau » sont de plus en plus souvent décevants en raison de la conjoncture : « le ralentissement de la progression des bases fiscales, conjugué à celui des dotations de l’Etat, n’autorise plus une gestion laxiste sans conséquence sur l’état de l’équilibre financier 46 47 ». Dans le pire des cas, le fil de l’eau peut se muer en « enchaînement fatal »: l’absence de maîtrise des dépenses d’exploitation, jointe au ralentissement des recettes de fonctionnement, induit une dégradation de l’épargne de gestion. Faute d’une prise de conscience rapide, et la collectivité continuant d’investir, donc d’accroître son endettement et ses frais financiers, l’épargne brute diminue sensiblement, et le ratio dette/épargne finit par exploser, signe d’une situation tendue que même un étalement de l’investissement ne suffit plus à renverser. Pour éviter la réalisation de ce scénario « catastrophe », il convient donc de faire jouer les différents leviers d’action, au premier rang desquels figurent la fiscalité, les dépenses de gestion et le volume d’investissement. Les choses immédiatement se compliquent : un étalement de l’investissement permet de revoir à la baisse le total des dépenses et celui des emprunts. Mais, il provoque également le report d’encaissement de certaines recettes d’investissement, ce qui a aussi des conséquences sur l’équilibre financier global. Les hypothèses, on le voit, rétroagissent les unes sur les autres et la prospective, à ce stade là, devient un exercice relativement complexe. En testant ainsi les différentes hypothèses d’évolutions envisageables pour les manettes dont dispose la collectivité, on aboutit finalement, par ajustements successifs, au scénario qui concilie le mieux possible la volonté des élus et la préservation de l’équilibre à terme. Ce scénario devient le plan pluriannuel de la collectivité, plan qui prévoit sur plusieurs exercices, la progression relative des différents postes budgétaires de recettes et de dépenses. 48 Michel KLOPFER recense, à ce titre, trois grands types de stratégie : 1. La stratégie d’équilibre : celle-ci exploite au mieux l’arbitrage entre fiscalité et endettement, l’objectif de capacité de désendettement étant fixé légèrement en dessous de la durée considérée comme limite (entre 10 et 15 ans, voir supra). 2. La stratégie de précaution : la collectivité souhaite conserver une situation de solvabilité bien supérieure à la moyenne, soit pour se prémunir contre des aléas, soit pour engager ultérieurement un programme ambitieux d’investissement. 3. La stratégie de risque : la collectivité laisse dégrader sa solvabilité bien au-delà des normes limites, car elle estime posséder de réelles marges d’action, soit sur ses taux d’imposition, soit sur son patrimoine privé et privilégie une utilisation ultérieure de ces leviers. 46 47 LAURENT (P.) et BOYER (B.), Op. Cit., p. 116 Cf. annexe n°6 pour l’exemple chiffré concernant le scénario de « l’enchaînement fatal ». Précisons que trois autres scénarios caricaturaux sont également présentés, et ce afin d’illustrer les effets de choix de gestion diamétralement opposés sur l’équilibre financier à terme. 48 28 Cf. KLOPFER (M.), Op. Cit., p. 239 Brevet Blandine - 2007 Partie I. Le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales, support adéquat d’une stratégie de saine santé financière Sur le plan pratique, le support de la stratégie se présente sous la forme d’un grand tableau de chiffres, généralement sur tableur informatique, alignant ligne après ligne de recettes et de dépenses, et autant de colonnes que d’années sur lesquelles porte la prévision. Les points de repère utilisés par les responsables financiers pour détecter les risques de dérives sont, on l’a vu, des indicateurs chiffrés (agrégats et ratios) mis en exergue par l’analyse financière et construits à partir de l’exploitation de l’information comptable. Ainsi, le cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales se révèle être un support adapté à une stratégie de saine santé financière, dans la mesure où il contribue à la détection et la prévention des risques financiers que ces dernières sont susceptibles d'encourir. Néanmoins, ce dispositif réglementaire semble présenter des insuffisances dans la perspective d’une recherche de « performance financière », notion entendue, ici, en tant qu’objectif global. Laissant, en effet, peu de place à l’évaluation de l’efficacité de l’action publique, celui-ci doit être complétée par la mise en oeuvre d’une démarche de contrôle de gestion. Brevet Blandine - 2007 29 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire Selon l’acception que nous avons donné au concept de « performance financière », nous devons retenir qu’une entité publique qui se veut performante financièrement doit être capable de garantir, en sus de l’équilibre financier, l’efficacité des décisions qu’elle prend avec l’argent du contribuable. La performance financière d’une collectivité se mesure, alors, non seulement par sa capacité à maintenir ou restaurer sa santé financière, mais aussi par sa capacité à rationaliser ses choix budgétaires. Notre propos, dans ce mémoire, n’est pas d’exposer la méthode de la RCB (Rationalisation des Choix Budgétaires) mise en place, en France, dans les années 1960. Nous ne reprendrons, ici, que l’expression sans attacher plus d’importance à la philosophie qui s’y rapporte. L’enjeu de la rationalisation des choix budgétaires réside, donc, par définition, dans l’optimisation de l’action publique, optimisation répondant à cette demande complexe d’un citoyen plus exigeant, mieux informé et en attente d’efficacité. Face à cet enjeu, les responsables publics doivent être à même de proposer de véritables visions stratégiques à l’implémentation de politiques publiques, ils doivent, ainsi être capables d’objectiver l’affectation des ressources. Or, dans un contexte de contrainte financière, la capacité à opérer des choix stratégiques se révèle être indissociable d'une maîtrise de ces ressources, et, par extension, de leur correcte évaluation. Réalisée en amont de la préparation budgétaire et tout au long de l’exécution des politiques, cette dernière s’inscrit pleinement dans la perspective d’une amélioration de la décision publique. Elle se compose de diagnostics, préalables à la prise de décision, portant sur l'usage raisonnable des moyens, leur adéquation aux objectifs des politiques et leur relation avec les résultats. Cette analyse implique, donc, de disposer d’une information financière représentative des politiques implémentées. En conséquence, il y a lieu de considérer que la réussite d’une telle démarche, nécessaire à l’optimisation de l’action publique, repose sur la qualité et la pertinence des instruments financiers de la gestion publique en matière d’aide à l’évaluation. Le législateur a clairement pris conscience de l’attention qu’il fallait apporter à ce dernier point et a instauré, en ce sens, un nouveau cadre juridique à la constitution financière de l’Etat. Appliqué depuis 2006, en vertu de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, celui-ci vise deux objectifs principaux : d’une part, celui de transformer la culture des moyens en une culture des résultats par une recherche de la performance et d’autre part, celui de renforcer la transparence des informations budgétaires. Ces problématiques, axées sur une meilleure gestion de la dépense publique, intéressent également, et ce, depuis quelques années déjà, les collectivités territoriales. 30 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire Ainsi, manifestent-elles un besoin d’efficacité que le cadre budgétaire et comptable local, peu pertinent dans le domaine de l’aide à l’évaluation, ne parvient à satisfaire. Certaines collectivités ont, de ce fait, développé leurs propres instruments financiers de gestion, dans la perspective d’une optimisation des décisions, devançant, ainsi, les questions quand à l’applicabilité des principes « lolfiens » au secteur local. I. Les insuffisances du cadre budgétaire et comptable face à un besoin nouveau d’efficacité Bien avant que la LOLF ne généralise les notions d'efficacité et de performance, et ne construise les outils appropriés à leur mise en œuvre au niveau étatique, les collectivités territoriales ont pris la mesure de ces enjeux. Depuis quelques années déjà, une intense activité est menée en leur sein, afin d'améliorer la gestion. Ce mouvement de modernisation est passé par l’adoption d’une démarche nouvelle, mais aussi, par l’utilisation d’instruments financiers permettant de mesurer l’efficacité de l’action publique. Il existe, en comptabilité locale, des outils qui orientent les données budgétaires et comptables dans le sens d’une structuration par politiques publiques, telle qu’elle existe dans la LOLF. La présentation fonctionnelle introduite par la réforme des instructions locales est de ceux-là. Or, ces outils semblent présenter quelques insuffisances pour aider réellement en matière d’évaluation. Après s’être interrogé sur ce qui a pu motiver ce besoin nouveau d’efficacité, il convient d’appréhender les limites du cadre institutionnel comme dispositif d’appui à la satisfaction de ce besoin. A. Le développement du contrôle de gestion ou le souci de l’efficacité A côté de la pression exercée par le citoyen soucieux de la bonne utilisation de sa contribution, évoquée précédemment, d’autres éléments, liés au fonctionnement interne du secteur public local et à son évolution, expliquent l’intérêt grandissant qu’elles ont pu manifester pour les questions concernant l’efficacité de leur action. Ainsi, un changement de perspective a motivé les collectivités à adopter une démarche nouvelle visant à rendre la gestion plus efficace. Aussi, l’examen de la gestion effectué par les Chambres Régionales des Comptes incite-t-il les collectivités à améliorer l’efficacité de la dépense publique. 1. Une démarche de contrôle de gestion adoptée en réponse à un changement de perspective Selon Jacques MARSAUD, « depuis quelques années, on assiste dans les collectivités territoriales à une certaine évolution de la gestion dont les caractéristiques et la tendance 49 par rapport à la période passée peuvent laisser penser à une réorientation » . En effet, il semble que la séparation entre le public et le privé ne soit plus aussi stricte : le secteur public local a évolué en s'inspirant de démarches significatives dans la politique de développement de l'entreprise privée, et en les adaptant à ses propres spécificités. 49 MARSAUD (J.): « Recul, redéploiement ou déploiement du management dans les communes, Le cas de la ville de Saint Denis » (P.M.P.) septembre 1995, pages 225 à 248 Brevet Blandine - 2007 31 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Cela s’est traduit par un changement de perspective ayant conduit les collectivités à adopter une démarche managériale de contrôle de gestion visant à rendre la gestion plus efficace. Dans ce paragraphe, le contrôle de gestion est abordé à travers sa finalité : il est appréhendé, selon une approche retenue par Cédric GRAIL, Vincent LESCAILLEZ, et 50 Philippe MENUT, comme « une démarche managériale au service de la performance ». Pendant de nombreuses années, la notion de management, issue de l’idéologie du secteur privé, était perçue comme hostile au secteur public. Si, communément, l’on tend à considérer l’organisation privée comme tournée vers l’objectif de rentabilité, on attache au secteur public une idée d’intérêt général. Cette approche s’est longtemps traduite par une opposition franche entre secteur privé et secteur public : à la différence du secteur privé qui devait rechercher l'efficacité de ses choix pour atteindre cet objectif de rentabilité, le secteur public, quant à lui, devait affecter ses choix dans une optique de satisfaction de l'intérêt général et, de par ce biais, n’était pas sensé rechercher une gestion qualitative en priorité. L’émergence du management public en collectivité a changé la donne, même si le changement de perspective a été graduel. En effet, le concept de management public a été progressivement enrichi. Les « pères fondateurs » du management public comme FAYOL ou WEBER ont, dès le début du vingtième siècle, tracé une frontière entre le secteur public et le secteur privé. Dans le même esprit, LYNN opère la distinction : « le management public est orienté vers l’intérêt public tel qu’il est déterminé dans les forums politiques », par opposition au « management privé » qui, lui est tourné « vers la performance économique telle qu'elle est déterminée 51 sur les marchés ». Si l’on s’en tient à cette première définition, le management public vise seulement l’intérêt public de la dépense. Or, il serait erroné de faire abstraction de la performance économique ou de l'efficacité de la dépense, en gestion publique. Dans les faits, il apparaît que l’émergence du management public dans le secteur local se soit traduite, notamment, par l’adoption d’une démarche de contrôle de gestion visant à rendre la gestion plus efficace. Les idées clés qui ont primé alors résidaient, effectivement, tout autant dans le sentiment d'objectivation de l'affectation des ressources que dans le besoin de mesure qui découle globalement de l'action publique. Dans la mesure où il constitue, comme l’ont fait remarquer Jacques VIEILLEVILLE et Marc BREYTON, « une procédure d’alerte capable de détecter, en temps réel, des dérives 52 et de renseigner sur leurs évolutions » , le contrôle de gestion se révèle, en effet, utile à une collectivité qui désire connaître les coûts, la fréquentation de ses équipements, le service rendu… C’est donc bien la quête de performance économique qui a motivé les acteurs de la gestion publique locale à développer leur propre contrôle de gestion interne. Les premières tentatives d'introduction des concepts du contrôle de gestion voient le jour dans les années 1980 lorsque les collectivités locales acquièrent de nouvelles compétences avec la décentralisation. Les lois de 1982 vont alors modifier profondément la gestion des services : hausse des effectifs, extension de la demande sociale et donc des réponses publiques…Face à la complexité croissante et l’augmentation du champ de 50 GRAIL (C.), LESCAILLEZ (V.), et MENUT (P.), étude sur l’amélioration des performances des collectivités territoriales, parue dans les Cahier détaché de la Gazette des Communes, n°2, juillet 2007, p. 223 51 52 32 LYNN, Revue Politique et Management Public, 1981, p.114 VIEILLEVILLE (J.) et BREYTON (M.), « Prévention des risques de gestion», Guide de l’élu local,Dalloz, 1995, 419 pages Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire la sphère publique locale, il apparaît indispensable aux entités locales de clarifier leurs objectifs et de s’organiser pour en piloter la réalisation. Les fondements théoriques de cette première époque du contrôle de gestion se définissent, alors, par analogie au secteur privé. Dans les entreprises privées, il joue, déjà depuis de nombreuses années, une fonction clé qui comprend plusieurs grands rôles principaux: - la mise en tension de l'organisation par une mesure des éléments quantitatifs mais pas forcément monétaires de la production de l'entreprise; - la définition d'agrégats objectivés par la direction générale sur la production, la vente, les résultats financiers (marges intermédiaires, résultats ...) ; - la définition de référentiels communs à toute l'entreprise permettant le dialogue entre les différents services et entre les différents niveaux de la hiérarchie ; - la mise à la disposition des responsables de l'entreprise de données financières moins fiables que celles fournies par la comptabilité mais dans un délai nettement plus rapide et permettant de prendre des décisions correctives. Sur les bases apportées par la fonction « contrôle de gestion » dans le secteur privé se sont développées à partir des années 1980 des réflexions au sein de collectivités de tailles différentes. Ainsi, l’adoption d’une démarche de contrôle de gestion par les collectivités correspond à un changement de perspective : l’extension significative du champ de compétence des collectivités avec la décentralisation rend nécessaire la recherche d’efficacité. Aussi, les multiples recommandations émises par les Chambres Régionales des Comptes dans le cadre des procédures d’examen de gestion ont-elles incité les responsables locaux à améliorer l’efficacité de la dépense publique. 2. L’examen de la gestion des Chambres Régionales des Comptes : un regard porteur d’efficacité Les Chambres Régionales des Comptes (CRC) par la mise en œuvre des procédures d’examen de la gestion des collectivités territoriales, ont contribué de manière déterminante à ce que ces dernières assimilent les exigences de régularité et d’économie que le législateur a formulées. Au cours des années quatre-vingt-dix, après quelques années de découverte de l’étendue de leurs nouvelles responsabilités, les responsables territoriaux, ont parfaitement compris, la direction dans laquelle il fallait avancer pour prévenir les mises en cause. La définition de l’examen de gestion s’inspire de la trilogie des « 3 E » appliquée par 53 bon nombre d’institutions d’audit ou de contrôle des comptes publics . Cette règle oriente, ainsi, la gestion publique vers les concepts suivants : - économie, en tant que mesure des moyens utilisés dans le but de réduire les dépenses publiques ; - efficacité, en tant que mesure des résultats atteints dans l’optique de la recherche de la performance de gestion ; 53 POTIER (V.), 25 ans d’activité des Chambres régionales des comptes, La Gazette des communes, Cahier détaché N°2,14 mai 2007, 41pages, p. 6 Brevet Blandine - 2007 33 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… - efficience, en tant que mesure du rapport entre les moyens utilisés et les résultats obtenus ou mesure de l’optimisation des deniers publics. Lors de l'examen de la gestion d'une collectivité, les magistrats des Chambres Régionales des Comptes veillent à regarder l'utilité publique de la dépense. En effet, l'article 87 alinéa 2 de la loi du 2 Mars 1982 reprend les pouvoirs conférés à la Cour des comptes par l'article 9 de la loi du 22 Juin 1967 relative à la Cour des comptes en tant que « elle s'assure du bon emploi des crédits, fonds et valeurs ». Le bon emploi des crédits induit une absence de gaspillage des deniers publics. Ainsi, force est de constater que la chambre régionale des comptes doit veiller lors de son contrôle à ce que l'utilisation des deniers publics soit conforme avec l'intérêt communal. Cette notion a été explicitée par Jacques VIEILLEVILLE et Marc BREYTON considérant que « la notion d'intérêt communal a pris un relief particulier depuis la décentralisation qui a vu le nombre d'élus engager toutes sortes de dépenses somptuaires ou inutiles, parfois à des fins purement personnelles confondant la caisse publique avec leurs propres intérêts 54 » . A titre d'exemple, la chambre régionale des comptes du Nord Pas de Calais a constaté le 21 Septembre 1993, à propos de la commune d'Outreau, que « l'achat d'un véhicule 205 GTI équipée d'un toit ouvrant, pneus thermo- gomme, peinture métallisée et d'un coût supérieur à 100 000 Francs n'était pas, forcément, conforme à «l'objet social» d'un centre 55 communal d'action sociale » . Cet exemple illustre le gaspillage des deniers publics. L’examen de la gestion des collectivités peut également conduire les CRC à apprécier la qualité des politiques publiques engagées. Au sens de la loi du 21 décembre 2001, la mesure de la qualité des politiques publiques passe par la définition d'objectifs et corrélativement par la comparaison avec les résultats obtenus. Dans ce texte, le législateur précise en effet que « l’examen de la gestion porte sur la régularité des actes de gestion, sur l’économie des moyens mis en oeuvre et sur l’évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par l’assemblée délibérante ou par l’organe délibérant.. L’opportunité de ces objectifs ne peut faire l’objet d’observations .» Ce modèle d'évaluation des politiques publiques, qui exclut tout contrôle d’opportunité est relativement bien accepté par les collectivités, dans la mesure où il répond au besoin de transparence et d’efficacité des électeurs- contribuables. Ainsi, le contrôle effectué par la CRC Ile-de-France sur le syndicat des eaux de cette région a permis à quatre millions d'habitants d'économiser 50 centimes par mètre cube d'eau consommé. Le contrôle de la chambre a en effet débouché sur la renégociation du contrat liant le syndicat à son prestataire de services avec, à la clef, 133 millions de francs 56 d'économies, répercutées en partie sur la facture des abonnés . L'intervention de la chambre régionale des Pays de Loire sur la politique culturelle de 57 la ville de Nantes participait du même processus . Et il est ici intéressant de voir sur quels critères les magistrats ont effectué leurs interventions. Ils ont d'abord défini quatre familles de paramètres suivants : évolution sur plusieurs exercices de la part du secteur culturel 54 55 VIEILLEVILLE J. et BREYTON M., Op. Cit., p. 201 CUVILLIER (L), « L’évaluation de l’efficacité de la dépense publique dans le contrôle de le gestion opéré par les Chambres régionales des Comptes », Mémoire de DEA de droit public, dirigé par le professeur Xavier VANDERDRIESSCHE, annales de l’école doctorale n°74, p. 33 56 BOYER (B.) « Économie, efficacité et efficience le nouveau credo des chambres régionales des comptes » , La Gazette des Communes, n° 1482 du 21 décembre 1998, p. 6. 57 34 POTIER (V.) et BŒUF (J-L.), « Un contrôle d'opportunité? », La gazette des communes, n°1532, 10 janvier 2000, p.8 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire dans le budget de la ville en tentant d'expliquer les tendances constatées ; les priorités de l'intervention culturelle; le financement de la dépense culturelle et le régime tarifaire ; le coût à l'usager. La chambre a, ensuite, procédé à, l'examen des missions et objectifs annoncés ; des charges et des produits budgétaires ; de la fréquentation ; de la tarification du service et des ressources annexes ; des relations avec des équipements culturels complémentaires ; de l'accueil des journalistes, pour l'opéra, et les catalogues d'exposition, pour le musée ; du degré de respect des imputations budgétaires ; du détail des dépenses de personnel. Ainsi, l’examen de gestion effectué par les CRC contribue à renforcer l’intérêt des responsables locaux pour les questions liées à l’efficacité de la dépense publique et les incite à développer une démarche de contrôle préventif de gestion. Concernant la méthode, la contrôle interne s’apparente, comme l’a précisé Danièle LAMARQUE, à une « évaluation (réalisée) au quotidien (qui) impose la gestion par objectifs, fait de l’analyse des résultats le préalable nécessaire à l’allocation des moyens et introduit le questionnement sur la causalité 58 ». Cette évaluation repose, ainsi, sur la règle des 3 E, évoquée précédemment, et le triptyque qui s’y rattache: objectifs/moyens/résultats. Elle présuppose, en conséquence, leur connaissance : l'identification des ressources affectées à une action n'est possible que si leur comptabilisation est exhaustive et homogène, si elle permet leur valorisation et leur affectation aux actions concernées, et si elle intègre toutes les composantes du coût de leur mise en œuvre. Or cette comptabilisation est imparfaite à plus d'un titre. B. Les limites du cadre budgétaire et comptable en matière d’aide à l’évaluation Basée sur la technique d’évaluation, la démarche de contrôle de gestion nécessite en premier lieu l'élaboration d'un système d'information permettant de retranscrire les données financières en correspondance avec les actions menées par la collectivité. Dans un second temps, il convient de faire «parler» l'information financière ainsi présentée en lui affectant des indicateurs de mesure. Or, la mobilisation d'une information financière exhaustive et fiable au service d’un contrôle interne de gestion se heurte à des obstacles liés aux caractéristiques mêmes de la comptabilité locale. Les principales limites de la comptabilité locale en matière d'aide à l'évaluation, peuvent, à cet égard, être illustrées par la façon dont a été conçue la présentation fonctionnelle, ainsi que par l'absence d'intégration d'outils de mesure de la performance. 1. Une présentation fonctionnelle sous contrainte La présentation fonctionnelle introduite par la réforme des instructions locales, censée garantir un meilleur suivi des politiques publiques, présente, en réalité, des défauts de conception qui l’éloigne de son objectif. Traditionnellement, une comptabilité générale est présentée par nature, les recettes et les dépenses étant regroupées selon leur identité : immobilisation, emprunts et dettes, charges et produits, etc. ce mode de classement, en permettant une description complète du patrimoine apporte certes une information homogène et normalisée qui favorise l’analyse et les comparaisons. Mais, la présentation par nature a l’inconvénient de ne pas renseigner ni sur les politiques poursuivies, ni sur l’utilisation faite des ressources mises à disposition. 58 LAMARQUE (D.), « La performance dans les collectivités territoriales », RFFP, n°95, septembre 2006, 13 pages, p. 167 Brevet Blandine - 2007 35 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… C’est pour y remédier que la réforme des instructions locales a introduit une présentation par fonction. La présentation budgétaire par politique publique s'exprime, ainsi au travers de la nomenclature fonctionnelle. A titre d’exemple, la « fonctionnelle » des communes comporte dix fonctions principales, chacune d’entre elles étant affectée à un chiffre allant de 0 à 9, avec les intitulés suivants : fonction n°1, « enseignement », n°2, « culture et vie sociale », n°3 « santé », n°4, « interventions sociales », n°5, « logement », n°6, « développement local », n°7, « environnement et aménagement de l’espace », n°8, « transport », n°9, « action économique ». Elle constitue en cela l'outil de formatage par excellence de l'information financière selon une approche propice à l'évaluation des politiques publiques. Or celle-ci peut être considérée comme l'un des principaux points déficients du processus de réforme. En effet, l'élaboration de la comptabilité fonctionnelle des communes a été initialement placée sous la direction de l'INSEE, qui n'a, au départ, fait que peu de place aux spécificités communales. Ainsi le cadre fonctionnel se calque principalement sur celui de l'État via la norme NFA (nomenclature fonctionnelle des administrations). Par ailleurs, le souci d'homogénéité des nomenclatures, n'a pas permis d'autoriser les collectivités à adapter leur présentation budgétaire fonctionnelle selon leurs propres orientations en matière de politiques publiques. Ainsi, la plupart des collectivités contestent le fait de se voir imposer « un classement utilisé à des fins de comptabilité nationale dont les subdivisions ne 59 correspondent ni à (leurs) attentes, ni à (leurs) besoins » . En outre, la comptabilité fonctionnelle apparaît peu opérationnelle : elle offre un découpage en secteurs sans rapport avec une segmentation par actions ou programmes, elle n'éclaire pas sur la nature des services rendus à la population, mais uniquement sur les domaines d'intervention (action économique, voirie ... ). Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT ont également dénoncé sa « rigidité d'utilisation en raison de la non-ventilation 60 de la grande majorité des recettes ». Au regard de ces considérations, il semble que l’outil ne permet pas une retranscription de l'information financière aisément utilisable par les gestionnaires locaux. De plus, les concepteurs de la réforme semblent avoir grandement privilégié la mise en place de la présentation budgétaire par « nature » au sein des collectivités territoriales. Ainsi, l'ensemble des communes de moins de 10 000 habitants doit adopter obligatoirement 61 un budget par nature. Cela représente 35963 communes sur un total de 36 567 . Si les communes de plus de 3 500 habitants doivent obligatoirement disposer d'une présentation croisée par fonction en annexe des documents budgétaires, cela laisse encore 33 917 communes en dehors du dispositif. Enfin, seules les communes de plus de 10 000 habitants peuvent décider d'opter pour un vote par fonction. Pour Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT, c’est effectivement « la difficulté de mise en œuvre de la nomenclature 62 fonctionnelle » qui explique que seule une minorité des collectivités aient opté pour ce mode de construction budgétaire. Parallèlement à l'absence d'approche budgétaire par politique publique efficiente et facilement utilisable, le souci de mesure de la performance des actions des collectivités n'apparaît dans aucun des axes de développement du processus de rénovation des comptabilités du secteur public local. 59 60 61 62 36 ADANS (B.), « LOLF et M14 : deux façon de réformer la comptabilité publique », RFFP, n °93, Février 2006, 14 pages, p. 66 FIEVET (F.) et LAURENT (P.), « Faut-il une LOLF pour les collectivités locales ?», RFFP n°95, septembre 2006, p. 132 Chiffres cités par Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT sur la base du recensement de 1999, Op. Cit., p.133 Précité, p. 133 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire 2. L’absence d'intégration d'outils de mesure de la performance La performance s'apprécie à travers la mesure de nombreux paramètres de l'activité de service public dont la variété et la complémentarité permettront d'apprécier l'efficience, la pertinence, l'efficacité et la qualité de ce service. Or, il semble que, pour de nombreuses collectivités, la conciliation des logiques fonctionnelle et opérationnelle ne va pas sans difficultés. Ce point est d’ailleurs mis en exergue par Danièle LAMARQUE, qui indique que « rassembler une information (…) représentative de l’action soumise à la mesure (…) constitue l’une des principale difficulté reconnue de l’évaluation 63 ». Il est vrai que les dimensions fonctionnelle et opérationnelle mobilisent une information différente: les données financières sont plus rapidement disponibles que celles relatives à l'activité des services; les premières sont fournies par les services des finances, tandis que les secondes proviennent de plusieurs sources, plus ou moins fiables et cohérentes entre elles, et par nature hétérogènes. Il est plus facile de suivre la consommation du budget d'investissement que l'impact d'une opération de rénovation urbaine. En effet, cette question de mesure ne se pose pas de la même manière selon le type d'activités concernées. Marc BEAULIER et Yves SALERY ont tenté de définir les champs de l’évaluation dans une collectivité et ont distingué, à ce propos, trois groupes d’activités relativement 64 homogènes . Le premier groupe concerne les fonctions supports, finances, ressources humaines, systèmes d'informations, logistique... Les auteurs soulignent, ici le caractère classique que revêt aujourd’hui la mesure de l'activité dans ce groupe, de nombreuses collectivités de taille moyenne ou grande ayant mis en place un contrôle sous la forme d’indicateurs liés aux effectifs, de suivi budgétaire ou de suivi des coûts. Le deuxième groupe comprend les activités productrices de biens matériels ou de services identifiables avec facilité, comme les activités des services techniques ou de cantine scolaire...etc. Dans ce groupe-là encore, la mesure de l'activité semble assez aisée, ce type d'activités pouvant s'apparenter « aux productions de biens et de services du secteur privé ». Le troisième groupe est celui qui pose le plus de difficultés et sur lequel les débats sont les plus nets. Certaines activités et leurs résultats sont extrêmement difficiles à mesurer et donc se prêtent plus difficilement à l’évaluation. Ce sont notamment les fonctions du domaine régalien, ou encore certaines productions de services difficilement quantifiables. Bien souvent, la formalisation des objectifs est un exercice délicat. Marc BEAULIER et Yves SALERY donnent ici l’exemple de l’évaluation d’une politique culturelle et posent successivement 3 questions difficiles à résoudre : - « Comment mesurer une action culturelle comme par exemple l'assistance à une compagnie faisant de la création ? » - « L'indicateur sera-t-il basé sur le coût de cette production, le nombre de spectateurs qu'elle attirera, le nombre de fois qu'elle sera jouée ? » - « Comment mesurer les résultats et qu'est ce qu'un résultat dans ce domaine ? » 63 LAMARQUE (D.), Op. Cit., p. 166 64 BEAULIER M. et SALERY Y. « 20 ans de contrôle de gestion dans les collectivités locales : bilan et perspectives », RFFP n°95, septembre 2006, p. 76 Brevet Blandine - 2007 37 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Ce questionnement auquel sont confronté de nombreuses collectivités montre combien l’exercice de mesure de la performance leur est difficile, exercice que les instructions budgétaires et comptables rénovées ne facilitent pas. En effet, alors que les cadres M12 et M51 réservaient une large part à la mise en place d'une démarche de comptabilité analytique, il semble que les nouvelles instructions n'évoquent aucunement le sujet. Cédric GRAIL, Vincent LESCAILLEZ, et Philippe MENUT rappellent ainsi que « les possibilités offertes par la M12 étaient très intéressantes et 65 permettaient un pilotage assez fin des dépenses publiques ». Ils font, ici, référence à la 66 logique des « chapitres de dépenses indirectes » et aux mécanismes de reventilation qui s’y attachent. En effet, en M12, les dépenses de fonctionnement général de la collectivité étaient isolées puis réparties sur les différents services ou chapitres "opérationnels" selon 67 des clés comptables. La technique était, certes peu utilisée, en raison de sa complexité notamment, mais elle avait le mérite de donner un cadre aux collectivités souhaitant mettre en place une démarche analytique. Avec la mise en place des nouvelles instructions, les données fournies par les documents comptables et budgétaires ne sont donc pas directement exploitables à des fins d'analyse de la performance. L’introduction de l'approche patrimoniale améliorant la qualité de l’information constitue certes une avancée. Elle est cependant insuffisante pour permettre aux données comptables d'étayer, sans travail de retraitement, une analyse des coûts des services. Si le cadre réglementaire présente d'importantes lacunes dans le domaine de l'aide à l'évaluation, il a cependant le mérite de ne pas empêcher la mise en place de dispositifs parallèles et complémentaires. De ce fait, il laisse une large place aux initiatives des collectivités locales, que certaines d’entre elles, ont par ailleurs, pleinement investie depuis 68 les années 1990 . Ces dernières ont ainsi pris de l’avance sur leur environnement : il a fallu une dizaine d’années de plus à l’Etat pour commencer la mise en œuvre de modes de gestion modernes. II. Un processus de rationalisation de la décision budgétaire en mouvement : entre expérimentation et coercition… Le parlement a voté en 2001 une loi organique sur les lois de finances applicable, depuis 2006, au seul budget de l’Etat. Ce texte est structuré par certains principes : une segmentation de la structure budgétaire tournée vers les objectifs, une confrontation de ces objectifs avec les résultats au moyen d’indicateurs, des comptes fiables pour une meilleure 65 66 GRAIL C, LESCAILLEZ L, et MENUT P, Op. Cit., p. 247 Les dépenses indirectes étaient de quatre types : Dépenses du Chapitre 930 : Service financier ; Dépenses du Chapitre 931 : Personnel permanent ; Dépenses du Chapitre 932 : Ensembles immobiliers et mobiliers ; Dépenses du Chapitre 934 : Administration générale 67 68 Pour une approche sur la mise en œuvre de cette technique : cf. http://perso.magic.fr/missud/B97.10.htm Pour une analyse empirique : cf. PORTAL (E.), « La planification stratégique dans les collectivités territoriales françaises », coll. Décentralisation et développement local, LGDJ, 2002, 345 pages. 38 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire appréhension des coûts...etc. Du point de vue de la logique de performance ainsi introduite, les collectivités ne sont pas entièrement dépourvues. En effet, certaines ont d’ores et déjà développé des pratiques de gestion tournées vers la recherche de performance, et en ce sens, conformes à ce qu’est aujourd’hui l’esprit de la LOLF. Ces collectivités sont ainsi allées, malgré elles, au devant des recommandations, apparues avec l’introduction de la LOLF au niveau étatique, quand au développement d’un processus de performance au sein du secteur local. Toutefois, des questions restent aujourd’hui encore en suspend, notamment en ce qui concerne précisément l’applicabilité des principes de la LOLF aux collectivités. Avant d’évoquer ce point, nous présenterons quelques expériences locales visant à rationaliser les choix budgétaires. A. Les initiatives locales visant à rationaliser les choix budgétaires Parallèlement à l'adoption des nouvelles normes budgétaires et comptables applicables, des collectivités ont pris, sur la base d'une démarche souvent individuelle et volontaire, un certain nombre d'initiatives visant d'une part à recréer un cadre adéquat de présentation des données budgétaires selon une approche par politique publique, et d'autre part, à assurer la mise en place de dispositifs d'évaluation, le plus souvent ciblés, de ces mêmes politiques publiques. 1. L’amélioration de la préparation budgétaire : de l’adoption d’une approche sectorielle à la mise en place d’une comptabilité analytique Afin d’améliorer l’étape de la préparation budgétaire, certaines collectivités se sont affranchies de la présentation fonctionnelle officielle en retraduisant l'information budgétaire et financière au travers d'une présentation analytique personnalisée. En effet, comme l’ont souligné Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT, « la nouvelle présentation budgétaire, empreinte de la prééminence de son approche comptable, a 69 suscité un fort besoin de retraduction de la part des élus ». Ainsi, de nouveaux supports de présentation informelle destinés aux élus se sont développés au côté des documents budgétaires officiels. Ces supports ont alors pour principal objet de rendre lisibles les données budgétaires. Présentant le contenu du budget en fonction des grandes politiques publiques menées par la collectivité, le document informel remplace parfois le document officiel dans la discussion. Les outils les plus simples proposent ainsi une nouvelle présentation obtenue à partir d'une simple adaptation de la nomenclature fonctionnelle officielle. Cette présentation peut être opérée par regroupement ou par ramification des rubriques fonctionnelles existantes. Un exemple d'adaptation de la fonctionnelle officielle mis en place dans une commune de 70 50 000 habitants est présenté en annexe n° 7 . Les collectivités ont même parfois élaboré des outils plus développés permettant la mise en place d'une nomenclature analytique, déconnectée de la présentation officielle. Celle¬ci est alors réalisée sur la base d'une codification analytique ad hoc. La déconnexion complète avec la fonctionnelle réglementaire permet ainsi à la collectivité de se doter d'une 69 70 FIEVET (F.) et LAURENT (P.), Op. Cit., p. 135 Cf. annexe n°7 : exemple d'adaptation de la fonctionnelle officielle mis en place dans une commune de 50 000 habitants Brevet Blandine - 2007 39 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… présentation analytique totalement libre et adaptée à ses spécificités. L'élaboration de la nomenclature analytique oblige alors les responsables locaux à se poser de nouvelles questions: quelles sont les politiques publiques menées par la collectivité? Quel est leur mode d'organisation? Ce dernier est-il en adéquation avec les politiques menées? Quels sont les public-cibles concernés par ces actions? Etc. Les nomenclatures analytiques sont alors construites en fonction des choix réalisés par les collectivités. Certaines sont alors réalisées à partir des grands axes politiques au 71 nombre volontairement limité . D'autres en revanche se calent sur l'organisation existante, ou au contraire rénovée à cette occasion. Ainsi, la présentation peut être élaborée autour de « codes gestionnaires » ou « codes services » ayant vocation à refléter les centres de coût qui ressortent de l’organisation. Elle devient alors un outil de comptabilité analytique offrant une lecture détaillée de l'action des services publics et du coût des différentes prestations rendues aux usagers. Cet outil permet de classer les dépenses de la collectivité selon des familles homogènes de destination et à analyser le total de ces dépenses sur ces catégories. Certaines de ces sections, les dépenses des fonctions supports par exemple, sont ensuite reclassées dans les sections sectorielles et donc ajoutées aux dépenses liées à des productions de biens et de services, selon des clés de répartition. Cette nomenclature analytique est généralement choisie par les collectivités qui souhaitent, dans le cadre de la préparation budgétaire, rechercher des connaissances précises de coûts dans des activités de services rendus ou de productions de bien. Elle correspond, ainsi, à l’usage qui est communément fait de la comptabilité analytique en collectivité. En effet, comme l’ont constaté Cédric GRAIL, Vincent LESCAILLEZ, et Philippe MENUT, « la comptabilité analytique n’est pas consultée régulièrement par les directions qui ne s’en servent pas comme un outil de pilotage. Cette comptabilité est surtout utilisée pour les bilans annuels par la direction générale pour ajuster les objectifs et préparer le 72 budget ». Si la mise en place d'arborescences analytiques internes par les collectivités vise à améliorer l’étape de préparation budgétaire, elle peut également être initiée en tant qu'élément préalable à la mise en place d'une démarche d'évaluation. 2. La mise en œuvre d'outils de pilotage ou de gestion spécifiques pour optimiser la prise de décision Une fois l'information financière présentée selon une segmentation reflétant les politiques publiques menées par la collectivité, certaines collectivités ont recherché à mettre en place des outils de pilotage adéquats. Comme pour toutes interventions reposant sur l'initiative individuelle, ce sont principalement les collectivités dotées des moyens les plus importants qui se trouvent à la pointe du mouvement. Si la fonction de contrôle de gestion peut être 73 confiée à une direction opérationnelle , certaines collectivités ont créé leur propre cellule. Le coeur du métier de contrôle de gestion reste cependant le même : il s’agit de produire 74 75 des indicateurs et de les mettre en perspective dans des tableaux de bord . 71 72 73 74 Cf. annexe n°8: exemple de segmentation par politique publique d’un conseil général GRAIL C, LESCAILLEZ L, et MENUT P, Op. Cit., p. 235 Exemple d’un suivi de PPI par une direction chargée de l’animation du territoire présenté ci après Un indicateur est un agrégat ou un ratio, présenté de manière chiffré, ou sous forme de graphique, généralement assortit d’un commentaire, qui mesure la production d’une entité. 40 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire Souvent constituée à partir d’une base d’indicateur de moyens (budgétaires, humains, matériels…), la structure des tableaux de bord a vocation à intégrer des indicateurs de résultats et des indicateurs d’objectifs dont la confrontation permet d’établir les traditionnelles mesures d’efficacité et d’efficience nécessaire à la pilotage décisionnel. L’objectif d’un tableau de bord est, en effet, de fournir une aide à la décision en permettant aux responsables locaux de mettre en place, quasiment en temps réel, des mécanismes de régulation ou de remise en cause. Ils reposent, tout d’abord, sur l’objectivation d’une activité de la collectivité. A ce titre, il apparaît que la démarche d'élaboration d'outils de pilotage ne se présente pas de manière exhaustive : elle semble, le plus souvent, réalisée, au coup par coup, sur certains secteurs d'activités selon les problématiques spécifiques rencontrées par la collectivité. A cet égard, Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT soulignent que « la mise en place d'outils de pilotage porte le plus souvent sur des domaines précis faisant soit l'objet d'un enjeu local 76 (…) soit véhiculant une importante masse budgétaire ». Le bon fonctionnement de ces instruments implique, en outre, le suivi de l’activité au regard de l’atteinte des objectifs définis, puis la mise en évidence des points d’alerte. Ainsi, pour une meilleure appréhension des pratiques de contrôle de gestion interne orienté vers l’optimisation de la prise de décision, il convient d’illustrer notre propos par deux exemples mettant en lumière la volonté d’un nouveau pilotage de l’action locale par l’identification et une meilleure coordination des centres de responsabilité. Nous 77 présenterons successivement un exemple de suivi des projets de PPI , puis la nouvelle organisation du Conseil Général de la Mayenne. En matière de suivi de PPI, la mise en œuvre des modalités de régulation est nécessaire dans la mesure où les collectivités s’exposent lors du vote du PPI aux risques de changement de réglementation, d’erreurs dans l’évaluation des coûts ou de surprogrammation. L’une des collectivités ayant été interviewée dans le cadre de l’étude sur la performance des collectivités a ainsi développé une approche originale de suivi de son PPI. Dans cette collectivité, le suivi du PPI est traité séparément des autres dépenses d’investissement, par une direction opérationnelle, disposant d’un portefeuille d’activités complémentaires. Ces dernières sont liées à l’animation du territoire. L’équipe de chargés de projet, ayant en autres missions de suivre les projets d’investissement de la collectivité, est en relation avec différents correspondants, certains présents sur le terrain et d’autres dans les directions impliquées par les projets. Ce service assure la synthèse des remontées d’informations, contrôle leur cohérence entre elles et par rapport à leur propre constat de suivi. Cette organisation incite les autres directions à opérer un réel autocontrôle et permet 78 de suivre régulièrement les projets, leur avancement faisant l’objet d’un reporting . A coté des arbitrage ponctuels, deux « revues de projets » annuelles sont organisées, et ce, afin d’étudier le besoin éventuel de régulation. Celle-ci est réalisée en deux temps : les arbitrages sont opérés, dans un premier temps, par le Directeur Général des Services; les points 75 Un tableau de bord est un ensemble d’indicateurs présentés simultanément, et régulièrement à un public déterminé en vue de permettre une aide à la décision. 76 77 FIEVET (F.) et LAURENT (P.), Op. Cit., p.139 Exemple tiré de l’étude sur la performance des collectivités territoriales rédigée par Cédric GRAIL, Vincent LESCAILLEZ, et Philippe MENUT., p. 235 78 Extraction de données pour une présentation synthétiques sous forme de tableaux. Brevet Blandine - 2007 41 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… non arbitrés par l’administration sont, ensuite, soumis à l’exécutif. L’ensemble des résultats est consigné par procès-verbal. C’est donc la fiabilité des informations qui permet, dans système expérimental, d’optimiser la prise de décision. Le conseil général de la Mayenne s’est également engagé dans une modernisation de ses modes de fonctionnement. Le budget est désormais présenté par programmes et des rapports budgétaires par programme détaillent leurs objectifs, les actions devant être mises en œuvre, ainsi que les propositions d’inscription budgétaire correspondantes. Parallèlement, le compte administratif a été revalorisé afin d’apprécier le taux de consommation des crédits votés et les résultats des programmes sur la base d’indicateurs d’efficience, de coût et de qualité de service. Ces principes ont été mis en œuvre dans le cadre d’une « nouvelle gouvernance » de la relation élu/administration permettant l’instauration d’un dialogue de gestion favorisant la coordination des différents acteurs. Ainsi, le suivi de l’exécution budgétaire s’effectue sur la base d’un pilotage par tableaux de bord permettant de communiquer trimestriellement à l’ensemble des acteurs, les indicateurs de suivi budgétaire, de suivi des charges indirectes ventilées sur la base d’une comptabilité analytique entre les programmes et de suivi des coûts. Le terrain n'est donc pas vierge d'interventions réalisées à l'initiative des collectivités, et ce alors même que le cadre réglementaire ne prévoit aucune incitation en ce domaine. C’est effectivement ce qui différencie l’approche des collectivités territoriales de l’approche nationale. L’Etat a, lui, été contraint, avec la mise en application de la LOLF en 2006, de moderniser sa gestion. La réforme budgétaire et comptable de l’Etat introduite par la loi organique du 1er août 2001 incite, en effet, à améliorer la performance de la gestion publique et à accroître sa transparence. Alors que plusieurs voix recommandent un passage en format LOLF pour la gestion locale, il importe de savoir ce que l’on entend par l’applicabilité des principes « lolfiens » au secteur local. B. L’institution d’une démarche LOLF : enjeux et modalités d’application Considérant la logique de performance introduite par la LOLF, la démarche ne constitue pas une innovation pour le secteur local. Elle est assise sur des principes vertueux et pertinents qui ne sont pas totalement étrangers à la gestion publique locale telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, comme en témoigne les pratiques de gestion développées par certaines collectivités. Or, comme nous l’avons vu, les démarches initiées dans ce sens sont encore peu nombreuses, d’où l’intérêt que pourrait présenter un passage imposé en format LOLF. La question qui se pose alors est de savoir s’il est possible d’assujettir l’ensemble des collectivités à un tel dispositif, initié au niveau national. C’est au demeurant sur ce point que porte l’un des aspects du débat quant à l’application de textes inspirés de la LOLF aux collectivités locales. Et c’est pour ce qui nous concerne, sous cet angle, que nous évoquerons le sujet de l’applicabilité des principes « lolfiens » au secteur local. Nombreux sont ceux qui se refusent à l’imposition de texte appliquant directement les principes de la LOLF aux collectivités. Ainsi, un rapport du gouvernement indique qu’une 79 « LOLF locale serait inopportune » et un autre qu’il conviendrait seulement pour les 79 Cf. LAMBERT (A.) et MIGAUD (D.) « La mise en œuvre de la LOLF, à l’épreuve de la pratique, insuffler une nouvelle dynamique de la réforme », rapport du gouvernement, octobre 2006, p53 et 163. 42 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire 80 collectivités territoriales « de s’inspirer de ses principes ». A plusieurs égards, une démarche volontariste apparaît préférable à une mise en place par coercition. Ainsi, la démarche LOLF doit, semble-t-il, rester un dispositif parallèle et complémentaire offrant la possibilité, aux collectivités qui le souhaitent, d’optimiser le cadre réglementaire local. Il est vrai que la LOLF peut présenter de réels apports en termes d’amélioration de la gestion publique locale : les enjeux, en la matière, sont liés notamment aux nouvelles règles 81 de certification des comptes et de segmentation budgétaire stratégique . Mais, il semble, à ce jour, impossible de soumettre l’ensemble des collectivités à de tels principes. Nous présenterons successivement ces principes, définirons en quoi ils constituent des enjeux pour le secteur local et exposerons, pour chacun d’eux, les raisons pour lesquelles ils ne peuvent, à ce jour, être appliqués aux collectivités de façon normative. 1. Les obstacles à la généralisation du principe de certification des comptes locaux La certification des comptes consiste à « émettre une opinion, écrite et motivée, sur la conformité des états financiers d’un organisme à un référentiel comptable défini ». Au niveau de l’Etat, cette opinion est donnée par la Cour des comptes, en application de la LOLF. La définition, ainsi, posée par la loi de 2001 fait peser la certification sur : - la régularité des comptes, c’est-à-dire leur conformité aux règles et procédures en vigueur ; - la sincérité des comptes, entendue comme l’application de bonne foi des règles et procédures en vigueur, afin de traduire la connaissance que les responsables de l’établissement des comptes ont de la réalité et de l’importance relative des événements enregistrés ; 82 - la capacité des comptes à donner une image fidèle de la situation financière . L’idée que les collectivités locales puissent également voir leurs comptes soumis à certification est souvent présentée comme l’un des enjeux du modèle posé par la LOLF. Une telle évolution paraît effectivement nécessaire. D’une part, les citoyens comme les partenaires des collectivités territoriales sont en droit de savoir, dans des délais raisonnables, si les comptes qui leur sont présentés sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle de la situation financière de la collectivité. D’autre part, cette information apparaît également essentielle pour les élus et les gestionnaires locaux : des écritures incorrectes ou incomplètes peuvent les amener à prendre des décisions entraînant leurs collectivités dans une mauvaise direction. Le fait qu’ils puissent être assurés de la fiabilité et de la sincérité de leurs comptes leur permet alors d’orienter les choix de gestion en fonction de la réalité de leur situation financière. Aussi, André DELION a-t-il démontré le lien nécessaire entre gestion de la performance et mode d’élaboration et de présentation des comptes. Il est vrai que la nécessité de « rendre les services publics plus économiques et plus efficients », impose « de disposer 80 81 Cf. RICHARD (P.) « Solidarité et performance, les enjeux d’une maîtrise des dépenses publiques locales, décembre 2006, p.7 Pour un développement concernant les enjeux de l’application de la LOLF au secteur local, cf. FLIZOT (S.) « LOLF et amélioration de la performance de la gestion publique locale », La Revue du Trésor n°7, juillet 2007, 4 pages, p. 690 et 691 82 Cf. rapport au Gouvernement précité relatif à La mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, octobre 2006 ; cf. également le recueil des normes comptables de l’Etat, mai 2004. Brevet Blandine - 2007 43 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… 83 de données fiables (…) pour l’évaluation des coûts ». La certification des comptes est ainsi un appui précieux pour améliorer la gestion locale. La plupart des acteurs de la gestion publique sont conscients des enjeux tenant à la qualité des comptes en termes d’optimisation du cadre local ; en témoignent les démarches entreprises en 2004 par la Cour des comptes et les CRC pour « renforcer leurs contrôle sur 84 la fiabilité des informations financières produites » par les collectivités territoriales . Dans le même état d’esprit, la direction générale de la comptabilité publique, dans son contrat de performance pour la période 2006-2008, a choisi de mettre l’accent sur la qualité des comptes locaux et, pour déterminer le niveau de qualité atteint par chaque comptabilité 85 locale, a élaboré un « indice agrégé de suivi qualitatif des comptes locaux ». Si la certification des comptes locaux est un objectif à atteindre, la question des modalités de son application au secteur local ne semble pas encore réglée. Il semble dès lors impossible d’envisager, à ce jour, une généralisation de ce principe à l’ensemble de la gestion publique. La préparation du premier exercice de certification des comptes de l’Etat sur les comptes 2006 montre l’ampleur des efforts à fournir tant du côté du « certifié » que du « certificateur». La lourdeur du système invite alors à une mise en œuvre progressive et prudente pour la certification des comptes locaux. Le rapport RICHARD de décembre 2006 propose ainsi, avant toute réflexion sur la généralisation de la certification des comptes, une démarche volontariste reposant sur une expérimentation à partir de collectivités qui le souhaiteraient. Cette expérimentation pourrait, en outre, être l’occasion d’affiner les critères de choix du certificateur, car, sur ce point, la question est loin d’être tranchée. Le rapport RICHARD de décembre 2006 se montre peu explicite sur le certificateur devant pourvoir à la certification des comptes locaux : il indique ainsi qu’il « est possible de concevoir qu’il s’agisse d’instances privées : commissaires aux comptes, cabinets d’audits, qui ont notamment l’habitude de certifier les comptes des grandes organisations », mais que « les chambres régionales des comptes paraissent également des candidats naturels » en raison de « leur 86 avantage comparatif certain en matière de connaissance des comptes locaux » A la différence, un rapport MIGAUD – LAMBERT de septembre 2005 se prononce de 87 manière très claire sur la compétence des CRC . Enfin, leur rapport remis en octobre 2006 indique que « si les CRC paraissent à cet égard comme les plus légitimes, le recours à des 88 commissaires aux comptes professionnels ne doit pas être exclu ». 83 84 DELION (A.) « Service public et comptabilité publique », AJDA, juin 1997, p.69 Rapport public de la Cour des comptes pour 2004 « La fiabilité des comptes des collectivités territoriales », mars 2005, chapitre 13. 85 Extrait du contrat pluriannuel de performance 2006-2008 de la DGCP : « Calculé automatiquement à partir des bases comptables nationales, cet indice porte sur quatre champs : hauts de bilan, comptes de tiers, opérations dites complexes et délais de passation des opérations. Il distingue les items suivant qu’ils relèvent exclusivement de l’intervention du comptable ou qu’ils sont partagés avec l’ordonnateur. Cet indice, calculé pour chaque collectivité, est ensuite agrégé par trésorerie, département et, enfin, au niveau national ». 86 87 Op. Cit. p.140 Cf. LAMBERT (A.) et MIGAUD (D.) « La mise en œuvre de la LOLF, réussir la LOLF, clé d’une gestion publique responsable et efficace », rapport du gouvernement, septembre 2005, note sur l’application des principes de la LOLF aux collectivités locales, p.9 88 44 Op. cit., p. 167 Brevet Blandine - 2007 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire Or, la charge imposée serait évidemment lourde, voire insurmontable, si les CRC étaient chargées de certifier la totalité des comptes locaux. Outre qu’une telle obligation paraît excessive pour les plus petites collectivités, l’obstacle pourrait être à terme contourné en remplaçant, comme le propose Luc SAIDJ, « la certification des comptes par le système 89 actuel de l’apurement administratif » pour ces entités. On pourrait alors distinguer la « certification administrative » réalisée par les comptables du Trésor et une certification pour les plus grandes collectivités, réalisée par un autre certificateur. La généralisation du principe de certification des comptes au secteur local devra en tout état de cause attendre que ces questions soient réglées. La certification des comptes n’est pas le seul principe « lolfien » à être présenté comme un enjeu pour le secteur local. Un autre apport majeur de la LOLF en termes d’amélioration de la gestion publique est constitué par la nouvelle segmentation budgétaire stratégique proposée. Si une telle approche se présente comme une avancée au niveau de l’Etat, il semble qu’elle ne peut-être transposée telle quelle à toutes les collectivités, dans leur diversité. 2. Une nouvelle segmentation budgétaire stratégique non transposable à titre normatif Examiné sous l'angle de l'évaluation des politiques d'une structure publique, la démarche LOLF semble bien plus efficiente que le cadre proposé par les instructions budgétaires et comptables rénovées du secteur public local. Par son nouveau mode de construction des autorisations budgétaires, elle normalise le système d'information financière de l'État dans le sens d'une meilleure lisibilité des actions que celui-ci entreprend. L’approche retenue substitue à la logique de moyens prévue par l'ordonnance de 1959, une logique de résultats. Pour ce faire, le mode de construction des autorisations budgétaires a été totalement réformé. Les dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959 régissant le mode de construction des autorisations des lois de finances jusqu'en 2005, sont le parfait reflet de la logique de moyens qui prévalait jusque-là. Les autorisations budgétaires de l'État agencées, par ministère, en titres, chapitres et articles permettaient ainsi aux services de l'État de connaître avec précision les moyens dont ils disposaient afin d'assurer les missions qui leur étaient confiées. En revanche, il était quasiment impossible de déterminer la masse budgétaire adoptée par le Parlement au titre d’une même politique, compte tenu de la fréquente implication de plusieurs services à sa réalisation. Avec la mise en place de la LOLF, en 2006, les crédits votés par le Parlement ont été répartis en « missions» et « programmes », tels que définis à l'article 7 de la LOLF. Ceuxci décrivent ainsi, précisément les masses budgétaires rattachées aux politiques publiques incombant à l'État. Sur ce point, Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT établissent alors un rapprochement entre la LOLF et le dispositif applicable aux collectivités, en affirmant que le 90 budget de l’Etat est adopté « selon une présentation fonctionnelle modulable ». Surtout, et c'est là l'élément le plus important, la LOLF établit la connexion entre la gestion budgétaire et la mise en place d'indicateurs propres à la réalisation d'une démarche d'évaluation des politiques publiques. 89 SAIDJ (L.), « La loi organique du 1er août 2001 sur les lois de finances : quels enseignements pour les collectivités locales ? », Revue française de finances publiques, n°85, février 2004, p. 48 90 FIEVET (F.) et LAURENT (P.), Op. Cit., p. 141 Brevet Blandine - 2007 45 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Ainsi, dans la loi de finances pour 2006, les 132 programmes dont relèvent 614 actions, sont affectés de 630 objectifs précis à atteindre. 1 300 indicateurs de performances ont été conçus afin de venir mesurer la satisfaction des objectifs définis pour chaque programme. 91 Ces indicateurs sont répartis selon les 3 axes distincts suivants : - l'efficacité socio-économique, qui doit permettre d'apprécier le résultat obtenu à raison de son impact sur l'environnement économique et social; il s'agit ici d'examiner le point de vue du citoyen; - la qualité du service rendu, qui induit nécessairement la recherche d'un équilibre entre coût et qualité; il s'agit ici d'examiner le point de vue de l'usager; - l'efficacité de la gestion, qui conduit à une appréciation de l'optimisation des moyens employés; il s'agit ici du point de vue du contribuable. Par ce mécanisme, le modèle posé par la LOLF tente de concilier les logiques fonctionnelle et opérationnelle et de dépasser, ainsi l’une des difficultés reconnue à l’évaluation. La réforme budgétaire de l’Etat affiche clairement l’ambition de réussir là où, comme nous l’avons vu précédemment, de nombreuses collectivités échouent. Compte tenu du constat, il peut être souhaité qu'un tel cadre juridique soit prévu pour les collectivités. Il nous semble cependant qu'une telle orientation, si elle devait se dessiner, dans un avenir proche ne pourrait être qu'incitative et non pas normative. En effet, la démarche LOLF est une démarche particulièrement aboutie, qui s'effectue auprès d'un seul acteur, l'État. Or, il existe une multiplicité d'acteurs locaux. Ainsi, comme l’ont fait remarquer Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT, la diversité des collectivités aussi bien en taille qu’en moyen implique « un nécessaire besoin d'adaptation tant des référentiels d'une structure à l'autre que de l'organisation nécessaire à la mise en place des 92 nouveaux outils ». Il semble ainsi plus raisonnable que chaque structure prenne le temps qu'il lui est nécessaire à la mise en œuvre de tel dispositif. On peut, en outre, légitimement penser que l’indicateur est d’autant plus pertinent qu’il est défini au plus près du terrain Par ailleurs, imposer une nouvelle structuration de la présentation budgétaire en missions/programmes/actions aux collectivités impliquerait une refonte des instructions comptables actuelles, ce à quoi le ministère de l’Intérieur s’est refusé. Interrogé en 2003 sur la question de savoir s’il est envisagé de « proposer de substituer une structuration par mission et programme du budget communal à l'actuelle division en chapitres et articles », ce dernier indique qu’en raison de sa souplesse, « le cadre budgétaire et comptable actuel des communes répond en tout ou partie aux besoins de responsabilisation des élus locaux et d'amélioration de la gestion au sein de l'administration communale » et « qu’il n'est donc pas prévu de substituer l'actuelle structure du budget communal reposant sur les chapitres et articles par les notions de missions et de programmes 93 ». Enfin, Cédric GRAIL, Vincent LESCAILLEZ, et Philippe MENUT ont, à leur tour, mis en garde contre les dangers d’une standardisation d’indicateurs à toutes les collectivités, sous l’impulsion de l’Etat. Selon eux, une telle démarche pourrait être perçue comme le moyen pour l’Etat d’exercer une nouvelle forme de contrôle sur les collectivités. Ils précisent, en effet, que « si les systèmes de mesures sont uniformes et centralisés au niveau de l’Etat 91 Cf. PORTAL (E.) « De l’application des principes de la LOLF dans les collectivités locales à la démarche locale de performance », la Revue du Trésor, n° 7, juillet 2007, 4 pages, p. 696 92 93 46 FIEVET (F.) et LAURENT (P.), Op. Cit., p. 145 Question n°26081 publiée au JO du 13 octobre 2003, p. 7757 et réponse au JO du 1 Brevet Blandine - 2007 er février 2005, p. 1080 Partie II. L’optimisation du cadre légal par des dispositifs parallèles et complémentaires d’aide à la rationalisation de la décision budgétaire alors les collectivités pourront être comparées selon des critères qu’elles n’ont pas choisis, et dont, in fine, pourrait dépendre le niveau de dotation qui leur est accordé individuellement 94 ». Sur ce point, il y a lieu de considérer toutefois que l'autonomie de gestion garantie par la Constitution ne permettrait sans doute pas l'institution d’un tel contrôle. En conséquence, la démarche ne semble pas pouvoir être proposée de manière trop rigide, ni sous la forme d’un texte, ni sous celle d’un délai. Il semble, donc, préférable de proportionner, et de circonstancier sa mise en œuvre. Imposer un modèle commun ne semble pas être la solution pour inciter les collectivités à s’engager dans une démarche de performance. L’émulation serait sans doute plus forte si on laissait chacune éprouver son propre dispositif et le comparer aux autres. 94 Op. Cit., p. 250 Brevet Blandine - 2007 47 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Conclusion La comptabilité ne doit plus être regardée comme relevant de la seule logique d’enregistrement, mais bien comme un levier de gestion permettant aux collectivités territoriales de relever le défi de la performance financière. On peut, en effet, parler, en la matière, de véritable défi, pour les responsables locaux, dans la mesure où l’enjeu réside non seulement dans leur aptitude à définir une stratégie de saine santé financière, dans un contexte financier de plus en plus contraint, mais aussi dans leur capacité à faire coïncider cette performance financière réelle avec celle perçue par le citoyen- électeur- contribuable. Pour relever ce défi, les gestionnaires locaux doivent s’engager dans la voie de la modernisation comptable. Certes, ils ont à leur disposition de solides fondamentaux financiers. Il est vrai que le cadre budgétaire et comptable est relativement bien pensé pour gérer les grands équilibres financiers sur une trajectoire durable et supportable. Mais, il semble qu’il leur soit indispensable, pour atteindre l’objectif global de performance financière, d’optimiser ce dernier par une démarche de contrôle de gestion, garantissant l’efficacité de la décision budgétaire. L’agrégation, la synthèse et l’analyse de l’information financière doivent s’effectuer tant au niveau stratégique pour l’élaboration d’un plan financier, qu’au niveau de l’impact et de la gestion financière et administrative des politiques publiques. La diversité des informations recueillies et traitées constitue la condition sine qua non pour que les actions des élus et des services gagnent en pertinence, en cohérence, en efficacité, en efficience et en impact. 48 Brevet Blandine - 2007 Bibliographie Bibliographie Ouvrages BOUINOT (C.), LARPIN (F.), THEVENOT (M.), « L'analyse financière en M14 : une nouvelle pratique : du bilan au tableau de situation financière, du compte administratif aux soldes intermédiaires de gestion, du compte de gestion au tableau de flux, du rétrospectif au prospectif », 2e éd. Economica, 2000, BOUINOT (J), « Analyse financière : fondements et méthodes », Juris-classeurs, 1994, 28 pages COUARIEU (J.), « La gestion financière de votre commune », Éditions Le Moniteur, 1980 DEMEESTERE (R.), « Le contrôle de gestion dans le secteur public », LGDJ, 2002, 196 pages GUENGANT (A.), « L’analyse financière des communes », Economica, 1998, 110 pages KLOPFER (M.), « La gestion financière des collectivités territoriales », Le Moniteur, 2005, 823 pages MARSAUD (J.): « Recul, redéploiement ou déploiement du management dans les communes, Le cas de la ville de Saint Denis » (P.M.P.) septembre 1995 PORTAL (E.), « La planification stratégique dans les collectivités territoriales françaises », coll. 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», RFFP n°95- septembre 2006, 17 pages FLIZOT (S.) « LOLF et amélioration de la performance de la gestion publique locale », La Revue du Trésor n°7, juillet 2007, 4 pages GRAIL (C.), LESCAILLEZ (V.), et MENUT (P.), étude sur l’amélioration des performances des collectivités territoriales, parue dans les Cahier détaché de la Gazette des Communes, n°2, juillet 2007 GUENGANT (A.) et LE MEUR (Y.), « Quels tableaux financiers pour les communes ? », article publié dans Les cahiers du management territorial, décembre 2000, janvier et février 2001 HERNU (P.), « Les incidences de la M14 sur l'analyse financière communale », La Gazette des communes n°1422 du 29 septembre 1997 HUET (G) et KLOPPFER (M), « Enjeux de la gestion pluriannuelle : autorisation de programme et nouvelles autorisation d’engagement », La lettre du financier, juin 2003, fiche technique, 12 pages QUIGNON (B.), « La maîtrise des coûts », actes des Rencontres financières des décideurs locaux, novembre 1994 LAMARQUE (D.), « La performance dans les collectivités territoriales », RFFP, n°95, septembre 2006, 13 pages LAURENT (P.) et BOYER (B.), « La stratégie financière des collectivités locales », LGDJ, 1995, 193 pages LYNN, Revue Politique et Management Public, 1981 PORTAL (E.) « La planification stratégique locale : pratique et enjeux », RFFP n°85, février 2004, 16 pages PORTAL (E), « Les instruments financiers à vocation pluriannuelle : les autorisation de programme et les autorisations d’engagement », RFFP, n°95- Septembre 2006 PORTAL (E.) « De l’application des principes de la LOLF dans les collectivités locales à la démarche locale de performance », la Revue du Trésor, n° 7, juillet 2007, 4 pages POTIER (V.) et BŒUF (J-L.), « Un contrôle d'opportunité? », La gazette des communes, n°1532, 10 janvier 2000 SAIDJ L., « La loi organique du 1er août 2001 sur les lois de finances : quels enseignements pour les collectivités locales ? », Revue française de finances publiques, n°85, février 2004 Publications et rapports officiels 50 Brevet Blandine - 2007 Bibliographie er Rapport BUSSEREAU sur la mise en œuvre de la loi organique du 1 août 2001 relative aux lois de finances en application de la loi de finances pour 2003, juin 2004, 49 pages Rapport public de la Cour des comptes pour 2004 « La fiabilité des comptes des collectivités territoriales », mars 2005 Rapport de la Cour des Comptes, sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2006, 127 pages Guide pratique de l’élu de la Direction Générale des Collectivités Territoriales, « La comptabilité M14 des communes », n°33,2006, 31 pages Rapport LAMBERT (A.) et MIGAUD (D.) « La mise en œuvre de la LOLF, réussir la LOLF, clé d’une gestion publique responsable et efficace », rapport du gouvernement, septembre 2005, note sur l’application des principes de la LOLF aux collectivités locales Rapport du gouvernement LAMBERT (A.) et MIGAUD (D.) « La mise en œuvre de la LOLF, à l’épreuve de la pratique, insuffler une nouvelle dynamique de la réforme », octobre 2006 Rapport RICHARD (P.) « Solidarité et performance, les enjeux d’une maîtrise des dépenses publiques locales, décembre 2006 Recueil des normes comptables de l’Etat, mai 2004 Sites internet http:// www.minefi.gouv.fr http:// www.questions.assemblee-nationale.fr http:// www.lagazettedescommunes.com http:// www.ressources-consultants.fr http:// www.ccomptes.fr http:// www.legifrance.gouv.fr http://www.territorial.fr Brevet Blandine - 2007 51 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Liste des annexes Annexe n°1 : méthode d’observation des situations financières dégradées de la comptabilité publique (Cf., Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, « La stratégie financière des collectivités locales », LGDJ, 1995, p.71) Annexe n°2 : les ratios de l’article L. 2313-1 du CGCT (Cf. Direction Générale des Collectivités Territoriales, « La comptabilité M14 des communes », Guide pratique de l’élu, n°33,2006, p. 31) Annexe n°3 : présentation des soldes intermédiaires de gestion issus du PCG (Cf. http://www.bilan-bilans.com ) Annexe n°4 : présentation d’un tableau de financement issu du PCG (Cf. Claire BOUINOT, Françoise LARPIN, Martial THEVENOT, « L'analyse financière en M14 : une nouvelle pratique : du bilan au tableau de situation financière, du compte administratif aux soldes intermédiaires de gestion, du compte de gestion au tableau de flux, du rétrospectif au prospectif » KPMG Collectivités territoriales, secteur public 2e éd., Economica, DL 2000, p. 213) Annexe n°5 : approche comparée de l’utilisation des tableaux de SIG par une entreprise et par une collectivité territoriale 52 Brevet Blandine - 2007 Liste des annexes (Cf. Alain GUENGANT, « L’analyse financière des communes », Economica, 1998, 110 pages, p.47) Annexe n°6 : présentation de quatre scénarios de stratégie financière (Cf. Philippe LAURENT et Bénédicte BOYER, « La stratégie financière des collectivités locales », LGDJ, 1995, p.120 à123) Annexe n°7 : exemple d'adaptation de la fonctionnelle officielle mis en place dans une commune de 50 000 habitants (Frédéric FIEVET et Philippe LAURENT, « Faut-il une LOLF pour les collectivités locales? », RFFP n°95- septembre 2006, 17 pages, p. 136) Annexe n°8 : exemple de segmentation par politique publique d’un conseil général (Cf. Christophe RUPRICH-ROBERT et Magali BENCIVENGA, «Évaluation des politiques publiques: nouveau guide pratique», Ed. de la Lettre du cadre territorial, 2002) Annexes non communiquées par l'auteur : Voir la version papier au Centre de Documentation Contemporaine de Sciences Po Lyon. Brevet Blandine - 2007 53 Quand la comptabilité sert l’objectif de performance financière des collectivités territoriales… Résumé Cette étude tend à démontrer pourquoi et comment le secteur public local doit s’engager dans la voie de la modernisation de son système d’information financière pour relever le défi de la « performance financière »…défi d’un nouveau contexte, celui d’une plus grande tension des finances locales, défi d’un nouveau rôle aussi, face à un citoyen mieux informé et plus exigeant. Ainsi, nous verrons que si les collectivités territoriales peuvent désormais compter sur un cadre budgétaire et comptable adapté à leur ambition de saine santé financière, il semble qu’il leur soit indispensable, pour atteindre l’objectif global de performance financière et faire ainsi coïncider la performance financière réelle de l’organisation avec celle perçue par le citoyen, d’optimiser ce dernier par une démarche de contrôle de gestion, garantissant l’efficacité de la décision budgétaire. MOTS-CLE Système d’information financière, performance financière, équilibre, analyse financière, stratégie, efficacité, aide à la décision, contrôle de gestion 54 Brevet Blandine - 2007