40S : Littératures francophones

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40S : Littératures francophones
Secondaire 4 - Cours optionnel
40S : Littératures francophones
Chapitre 1 : Objet du cours...........................................15
Chapitre 2 : Contenus d’apprentissage :
les résultats d’apprentissage........................33
Chapitre 3 : Propositions pédagogiques
pour la mise en œuvre..............................43
Chapitre 4 : Survol des littératures
française et québécoise............................129
« On n’habite pas un pays, on habite une langue »
(E. Cioran, Aveux et Anathèmes, Gallimard)
Français langue première
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NOTES
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Français langue première
40S : Littératures francophones
CHAPITRE 1
Objet du cours
Ce chapitre présente l’objet du cours
Français langue première 40S : Littératures francophones,
en quatre sections :
-
le texte littéraire : pour une définition et une contextualisation;
rôle et finalités des textes littéraires;
le travail pédagogique sur les textes littéraires;
lire pour le plaisir.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
1.1 Le texte littéraire : pour une définition
et une contextualisation
1.1.1
« Peut-on réellement définir l'essence d'un texte littéraire? »(1)
(Giasson, 2000, p. 4). La question n'est pas nouvelle et les
propositions de définition ne manquent pas : c'est ainsi qu'on
avance la dimension fictionnelle et imaginaire du texte
littéraire, son souci d'esthétique et le jeu avec la langue
qu'on perçoit souvent.
Ces caractéristiques s'appliqueraient sans doute à la liste
suivante – évidemment ni exhaustive ni limitative – de textes
littéraires (dont les supports peuvent être d'ordre oral,
textuel, visuel, médiatique ou informatique) :
• almanachs
• dictons
• proverbes
• anecdotes
• énigmes
• récits divers
• anthologies
• fables
(ex. : aventure,
policier, science• autobiographies
• légendes
fiction)
• bandes dessinées
• maximes
• romans
• biographies
• mémoires
• scénarios
• calembours
• monologues
• scripts
• caricatures
• mythes
• slogans
• cartes diverses
• nouvelles
• contes (réalistes,
littéraires
• paraboles
merveilleux,
folkloriques,
• photos-romans
fantastiques,
• pièces de théâtre
poétiques)
• poèmes
1.1.2
Par ailleurs, on oppose souvent le texte littéraire et le texte
dit courant : le premier laisse libre cours à la fiction, à
l'imaginaire et à la création, alors que le second doit être clair et
explicite pour être accessible et compréhensible dans une
perspective de compréhension ou de transmission d'information.
Le texte dit courant relève d'un pôle fonctionnel, alors que le
texte littéraire relève d'un pôle plus esthétique. Mais ces deux
pôles, de même que l'utilisation de la langue qui leur
correspond, ne sont pas disjoints : ainsi, le texte publicitaire qui
relève du pôle fonctionnel met souvent en œuvre des moyens
linguistiques caractéristiques du pôle esthétique; ainsi, le roman
qui relève du pôle esthétique présente dans bien des cas une
représentation du réel caractéristique du pôle fonctionnel.
Il serait donc plus pertinent d'envisager la compréhension
et la production des textes selon un continuum, tel que
celui présenté ci-contre.
(1)
Giasson, J. (2000). Les textes littéraires à l’école. Montréal/Paris : Chenelière-Éducation, 272 p.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Comprendre et produire des textes (dont les supports sont d'ordre
oral, textuel, visuel, médiatique ou informatique) selon une visée
pragmatique
esthétique
y domaine
- de l'information, de l'analyse,
de la description, de l'explication
- de l'opinion, de l'argumentation
- de la procédure, de l'incitation
- de la planification, de la
gestion, de la réflexion
- de l'établissement de relations,
d'interactions
y domaine caractérisé essentiellement par la représentation et
l'explication du réel
y domaine
- de la fiction, de l'imaginaire
- de la création
- de la présentation d'expériences, de sentiments,
d'une vision du monde
- de la créativité, en particulier
dans l'utilisation du langage
y accent mis surtout sur le sens;
langage clair, précis et explicite
y contenu et forme du texte
souvent construits en fonction
de l'intention de la communication et du destinataire
y textes relevant de ce domaine
généralement et tendanciellement monosémiques
y pôle fonctionnel : comprendre
et produire des textes pour
faire
y domaine caractérisé essentiellement par l'expression de
l'imaginaire et l'esthétique du
langage
y accent mis sur le sens et les
effets créés; langage évocateur
et connotatif, exprimant un
univers fictif ou poétique, renvoyant à des réalités souvent
culturelles, jouant souvent sur
des implicites
y attention particulière accordée à
la forme du langage elle-même
y textes relevant de ce domaine
généralement et tendanciellement polysémiques
y pôle esthétique : comprendre
et produire des textes pour le
plaisir
D'un côté, la visée de la pratique de langue est de dominance pragmatique, préoccupée avant tout par une communication claire et efficace;
de l'autre, la visée est plus esthétique, s'attachant plus à évoquer ou à
créer.
L'usage pragmatique de la langue dans sa forme absolue (par exemple,
des directives pour la réanimation cardiaque) se veut transparent pour
le plus grand nombre de destinataires possible; l'usage esthétique de
la langue dans sa forme absolue (par exemple, un texte de poésie
expérimentale) joue sur la forme de la langue et peut faire l'objet de
réactions et d'interprétations diverses. Entre ces deux extrêmes, se
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40S : Littératures francophones
situe la vaste gamme des textes, préoccupés à des degrés
divers par une communication claire et les effets créés. C'est
ainsi qu'on pourrait placer, peut-être au centre de ce
continuum, des textes tels que des journaux intimes où
l'accent est mis sur l'expression de sentiments ou de
réflexions, sur les relations d'expériences et dans lesquels
s'exprime une personnalité selon une « voix » individuelle et
idiosyncratique.
Un tel continuum est donc une manière d'envisager les visées
qui orientent la compréhension et la production de textes,
plutôt qu'une façon de classer les textes.
1.1.3
Enfin, les typologies des textes permettent de situer
également les textes littéraires dans la vaste gamme des
textes. Le tableau ci-contre en présente une(2).
Cette typologie des textes est un instrument pédagogique qui
permet d'attirer l'attention des élèves sur certaines régularités
structurelles des textes et sur les caractéristiques linguistiques
et discursives communes à de nombreux textes.
Cependant, il existe peu de textes qui soient d'un seul type,
qui soient homogènes sur le plan de leur composition. En fait,
la majorité des textes présente un type dominant, tout en
intégrant des aspects d'autres types; le roman constitue sans
doute l'exemple le plus parlant de cette hétérogénéité des
textes : bien qu'étant de type narratif dans son ensemble, le
roman intègre généralement des dimensions, voire des
passages, de types descriptif, explicatif, argumentatif et, bien
entendu, dialogal.
Cette hétérogénéité quant au type de texte se double d'une
hétérogénéité quant à la structure textuelle : ainsi, le fait
divers, dans lequel prédomine le type descriptif, met en œuvre
des structures textuelles telles que la structure narrative et de
cause à effet; ainsi, le texte publicitaire, qui relève
essentiellement du type argumentatif, peut faire appel à des
structures narrative, descriptive, comparative ainsi que
problème et solution.
(2)
C’est la même typologie qui a été retenue dans le Programme d’études. Le français, enseignement secondaire
(Québec, Ministère de l’Éducation, 1995).
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Français langue première
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types
y argumentatif
y descriptif
textes où la visée
pragmatique
domine
textes où la visée
esthétique domine
y
y
y
y
y
y
y
y
y
y
y
genres
texte d’opinion
éditorial
essai, pamphlet
lettre ouverte, article critique
...
Structures textuelles
portrait
y narrative
faits divers
y descriptive
nouvelle journalistique
y séquentielle
compte rendu
règle de jeux, procédures y comparative
y cause à effet
...
y problème et solution
texte documentaire
y explicatif
y
y
y
y
y
y narratif
y récit
y conte, légende, mythe,
fable
y nouvelle littéraire
y roman
y ...
y pièce de théâtre
y entrevue
y ...
y dialogal
y poétique
article de vulgarisation
article d’encyclopédie
manuel scolaire
...
y poème
y texte de chanson
y ...
1.2 Rôle et finalités des textes littéraires
1.2.1
Le cours Français langue première 40S : Littératures
francophones est centré sur l'exploration de l'univers
des textes littéraires francophones. Les supports de ces
textes sont d'ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou
informatique.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Explorer l'univers des textes littéraires francophones permet aux
élèves
y d'explorer le monde de la fiction et de la création, caractérisé par
l'expression de l'imaginaire et par l'esthétique du langage;
y de mettre en œuvre une pensée créative/critique; d'explorer des
textes qui sont généralement polysémiques; ces textes donnent lieu
à une gamme d'interprétations : « [c]e qui est important, ce n'est
pas ce que l'auteur a voulu dire, mais ce qu'il dit au lecteur »(3);
y d'explorer la dimension esthétique de la langue (aux plans
lexical, syntaxique et stylistique);
y d'explorer des textes qui constituent pour eux une source
d'enrichissement, en particulier au niveau de la langue ellemême;
y d'explorer les « couleurs » de la langue propres aux époques et
aux cultures;
y d'explorer les grands courants idéologiques, les mentalités, les
goûts, etc., véhiculés à travers les époques et les cultures;
y de s'intégrer à une expérience imaginaire qui éclaire et élargit
leurs horizons;
y de mettre à profit, dans le processus de leur construction
culturelle et identitaire, les univers fictifs présentés dans ces
textes : les élèves peuvent en effet « se voir » dans les histoires,
les personnages, les situations, les cadres spatiotemporels, avec
lesquels ils entrent en contact; cette projection peut donner lieu
à des réactions, nombreuses et diverses;
y de manifester une appréciation d'autres univers socioculturels et,
ainsi, de mieux comprendre/vivre le leur;
y d'explorer diverses visions du monde;
y de valoriser les textes littéraires francophones et, plus
largement, la langue française et les cultures francophones;
y de valoriser le patrimoine littéraire francophone, dans son
ampleur, sa diversité et sa richesse;
y de valoriser la contribution des littératures francophones à la
diversité culturelle et, plus largement, au patrimoine de
l'humanité;
y de valoriser la langue française comme véhicule d'une vision du
monde.
(3)
Hould, R. (1981). « Principes pour une pédagogie renouvelée de la lecture ». Vie pédagogique, 11, p. 26.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Plus spécifiquement, le champ privilégié par ce cours est
constitué par la gamme, large et variée, des textes littéraires
francophones, dans une double perspective :
y diachronique (des textes de mouvements, périodes et
siècles antérieurs à aujourd'hui);
y synchronique (des textes contemporains, relevant de
l'espace francophone dans ses dimensions locale, régionale,
nationale et internationale).
1.2.2
De manière plus spécifique, on peut assigner les trois
grandes finalités suivantes aux textes littéraires :
Nous lisons pour connaître la fin, pour l'histoire. Nous
lisons pour ne pas atteindre cette fin, pour le seul plaisir
de lire. Nous lisons avec un intérêt profond, tels des
chasseurs sur une piste, oublieux de ce qui entoure. Nous
lisons distraitement, en sautant des pages. Nous lisons
avec mépris, avec admiration, avec négligence, avec
colère, avec passion, avec envie, avec nostalgie. Nous
lisons avec des bouffées de plaisir soudain, sans savoir ce
qui a provoqué ce plaisir.
le plaisir de lire
(Manguel, A. (1998). Une histoire de la lecture, Arles :
Actes Sud, p. 357, cité dans Giasson, op. cit., p. 5)
De tous les objets culturels créés par l'homme, la littérature
est encore le plus fortement accessible, la plus riche de
représentations variées dans le temps et dans l'espace, la
plus susceptible de jeter un point entre les êtres, de nous
livrer un message essentiel sur ce que nous sommes et sur
la fragilité de l'aventure humaine.
la quête du sens
(Vandendorpe, C. (1992). « L'enseignement de la littérature
aujourd'hui »; DFLM. La lettre de l'association, vol. 10, n°
3-4, p. 3, cité dans Giasson, op. cit., p. 5)
Les textes littéraires répondent donc à un besoin particulier, qui
demeure souvent inconscient : le lecteur cherche à donner un
sens à son univers.
Parce que la littérature est un art qui fait appel à
l'intégralité de l'expérience humaine, elle transcende les
divisions artificielles de la connaissance, elle permet de
voir la vie dans sa totalité, sa complexité; cette ouverture
invite à voir les choses au delà de la réalité quotidienne.
Cette connaissance de l'identité humaine ne peut être
véhiculée qu'à travers le langage et que grâce à la liberté
accordée par le langage dans les textes [littéraires].
(Giasson, op. cit., p. 6)
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Dans cette quête du sens, les textes littéraires peuvent être mis
à profit par les élèves dans le processus de leur développement
affectif (le lecteur a tendance à s'identifier aux personnages et
à vivre ainsi, par procuration en quelque sorte, des expériences
de vie) et social (ouverture aux valeurs humaines, à la réalité
multiculturelle) mais aussi cognitif et métacognitif (en discutant
des textes littéraires et en produisant, les élèves développent
une pensée critique et réfléchissent sur leurs pratiques de
compréhension et de production de textes et les stratégies qu'ils
y mettent en œuvre).
l’enrichissement
Si les textes littéraires demeurent un moyen privilégié
d'appropriation de savoirs, ils contribuent, de manière
significative, à l'acquisition du vocabulaire, et, de façon plus
globale, à l'enrichissement de la langue et au développement
des habiletés en lecture. Bref, comme le déclare Giasson (op.
cit., p. 10), « la littérature peut servir non seulement à
informer sur la vie, mais à transformer la vie. »
langagier et,
plus largement,
personnel
1.3 Le travail pédagogique sur les textes
littéraires
On s'accorde aujourd'hui (Giasson, op. cit., entre autres) à
promouvoir un double objectif au travail pédagogique
sur les textes littéraires au cycle secondaire :
compréhension/interprétation par le biais, entre
autres, de l'analyse du fonctionnement des textes, et
réaction critique.
1.3.1
Un bref survol de l'évolution des théories littéraires
On s'entend habituellement (Giasson, op. cit., entre autres)
pour reconnaître que les théories littéraires sont passées
d'une centration sur l'auteur à une centration sur le texte pour
en arriver à une centration sur le lecteur.
Dans le courant centré sur l'auteur, on considère que la tâche
du lecteur consiste à découvrir le sens que l'auteur a voulu
attribuer au texte. C’est le courant de l’intention de l’auteur :
l’auteur est garant du sens du texte. Cette perspective
transparaît dans des questions telles que : Que veut dire
l'auteur quand il dit que…?
22
Français langue première
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Le courant centré sur le texte, quant à lui, part de l'idée que le
texte est une entité dotée d'une signification déterminée,
stable et inchangeable : le texte reste le même pour tout
lecteur et son sens peut être dégagé par une analyse
minutieuse des structures, des personnages, des événements,
etc. C’est le courant de l’intention de l’oeuvre : on recherche
les structures immanentes du texte. Cette perspective
transparaît dans des questions telles que : Quelle est l'intrigue
de ce récit? Quelles sont les figures de style dans ce poème?
Quant au troisième courant, qui se base sur la réception ou la
réaction du lecteur, il rejette les deux premières conceptions,
qui laissent entendre respectivement que le lecteur n'est qu'un
spectateur et que le sens vient du texte seul. Ce courant
reconnaît le rôle du lecteur dans l'interprétation du texte, dans
la mesure où il apporte sa contribution unique à la
(re)construction du sens du texte par l'intermédiaire de ses
propres connaissances et expériences. C’est le courant de
l’intention du lecteur : celui-ci joue un rôle prépondérant
dans la (re)construction du sens du texte. Une telle
perspective transparaît dans des questions telles que : Quelles
émotions particulières ce texte a-t-il éveillées en vous?
Cependant, une centration uniquement sur le lecteur peut
conduire aux mêmes extrêmes, voire aux mêmes excès,
qu'une stricte centration sur l'auteur ou sur le texte.
Le liseur peut s'engager sur la voie de la rigueur qui lui
demande de rester fidèle au texte, de le lire en rase-mots,
de le prendre au pied de la lettre; ce guide-là est tatillon,
il ne lui épargne aucun détail. C'est la voie de la mémoire
au service du texte. L'autre voie, celle de la liberté,
l'entraîne à l'intérieur du livre, mais ne le retient pas
solidement; c'est une lecture dissipée, vorace, impatiente,
distraite qui refuse de se laisser enfermer dans le hic et
nunc du texte sans pour autant vouloir s'en passer. C'est
la voie de l'imagination qui veut tout transformer. Ces
deux voies s'offrent simultanément à tout lecteur et, voilà
l'attrape, séparément elles mènent toutes les deux à
l'échec : l'une à la paralysie, l'autre au délire.
(Gagné, J. (1986). « La part du liseur ». Québec français,
64, p. 60-62, cité dans Giasson, op. cit., p. 13)
C'est sans doute pourquoi on promeut aujourd'hui une
approche plus intégrative, qui s'articule autour de deux
mots-clés : analyse et réaction critique. L'une et l'autre
entretiennent une relation dialectique : la première n'a
Français langue première
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40S : Littératures francophones
d'intérêt, voire de sens, que si elle débouche sur la seconde
et la seconde est d'autant plus significative qu'elle s'appuie
sur ce que la première à permis de dégager du texte. En
d'autres
termes, l'analyse,
en
particulier
des
fonctionnements textuels, est mise au service d'une
réaction critique.
1.3.2
Les textes littéraires : compréhension et réaction
1.3.2.1 Analyse et réaction critique : exemples de tâches relatives au
« personnage » d'un texte narratif.
L'analyse et la réaction critique peuvent être représentées sur
un axe, balisé d'un côté par le pôle Texte et, de l'autre, par le
pôle Élève :
Texte
Analyse
Réaction critique
Élève
On peut proposer aux élèves diverses tâches relatives au « personnage » d'un texte narratif, qu'il est possible de situer sur cet
axe; ainsi :
y associer, par appariement, les noms des personnages à leur
statut narratif de personnage principal ou de personnage
secondaire;
y construire un sociogramme illustrant la dynamique des
personnages;
y dégager les valeurs véhiculées par les personnages;
y réécrire le texte en fonction d'un autre point de vue narratif
que celui originellement mis en œuvre.
Ces quatre tâches d'analyse se situent dans une graduation
allant, semble-t-il, du plus simple au plus complexe et
requérant de la part de l'élève une saisie plus large et plus
profonde du fonctionnement du texte : à ce titre, elles
s'inscriraient de gauche à droite dans la section « Analyse » de
l'axe ci-dessus.
Dans la même perspective, des tâches de réaction critique
proposées aux élèves pourraient être situées sur l'axe selon
une même gradation : solliciter la réaction de l'élève au
comportement d'un personnage l'engage moins, semble-t-il,
dans sa compréhension du texte que lui demander de dire si,
compte tenu de la dynamique des personnages dans le texte,
le comportement du personnage principal est, par exemple,
justifiable. Plus à droite sur la section « Réaction critique » de
l'axe, se situeraient des tâches telles que la réaction à la vision
du monde proposée dans le texte, la réécriture du texte en
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Français langue première
40S : Littératures francophones
changeant le contexte socioculturel de l'univers narratif du
texte ainsi que la composition d'un collage représentant le
sens que l'élève dégage du texte.
1.3.2.2 Les réactions au texte littéraire
La compréhension du texte littéraire est certes nécessaire en
vue de son appréciation par les élèves. Par exemple, dégager
le schéma narratif, examiner les personnages et le cadre
spatiotemporel, permettent de reconstruire le fonctionnement de l'univers narratif et, ainsi, de dégager des effets
de sens produits. Mais il existe, semble-t-il, un danger à en
rester là : à trop vouloir déconstruire le texte, on risque d'en
rester trop près et, paradoxalement peut-être, de s'en
éloigner.
Il importe en effet que les élèves, dans leur processus
d'interprétation et d'appréciation des textes littéraires,
puissent faire part des diverses réactions qu'ils ont à leur
propos.
Réagir au texte littéraire va beaucoup plus loin que dire si on
a aimé, ou non, le texte. La gamme des réactions est large.
Ainsi, on peut réagir en établissant des liens personnels avec
le texte ou l'univers narratif qu'il présente, en manifestant une
appréciation des éléments littéraires ou encore en faisant une
évaluation du texte. Par ailleurs, la réaction peut prendre
plusieurs formes : les réponses personnelles (exprimer ses
sentiments); les réponses créatives (jouer avec les idées du
texte); les réponses critiques (analyser l'art de l'auteur).
Enfin, le lecteur peut envisager l'histoire et, plus largement,
l'univers narratif comme une expérience (parler de l'intrigue,
des personnages, du cadre spatiotemporel, du monde
représenté), comme un message (les thèmes, les valeurs),
comme un objet (examiner comment l'histoire fonctionne,
comment l'auteur détermine le point de vue, crée
l'atmosphère).
Giasson (2000, op. cit., p. 107-108) propose, dans une
perspective synthétique, la classification suivante des
réactions aux textes littéraires, en quatre stades
progressifs :
y stade 1 : évocation : - revivre l'expérience (expérimenter de
nouveau, en relisant, en jouant, en
redisant, ce que l'on a vécu en lisant)
- imaginer les personnages, les lieux,
les événements
Français langue première
25
40S : Littératures francophones
y stade 2 : rapprochements : - établir des liens entre l'univers
fictif et sa propre expérience,
avec un autre livre ou un autre
média (ex. : cinéma, théâtre,
chanson)
- considérer le point de vue des
autres pour revoir sa propre
interprétation
- revoir le texte sous un autre
point de vue (ex. : considérer
une autre perspective, extrapoler)
y stade 3 : réflexion : - interpréter (généraliser la signification
de l'univers fictif et, plus largement,
de l'expérience littéraire en l'appliquant à sa propre vie)
y stade 4 : évaluation : - évaluer ce que l'on a retiré de la
lecture des textes
- évaluer la qualité de l'œuvre au
regard de critères que l'on se fixe soimême.
Il s'agit là d'une classification hiérarchique plutôt que d'une
taxonomie de catégories hiérarchiques : en effet, « une
réponse esthétique demande d'effectuer un voyage à travers
ces stades » (Giasson, op. cit., p. 108).
1.3.3
Des projets d’exploration de l’univers des textes
littéraires francophones
Le cours Français langue première 40S : Littératures
francophones accorde une très large part à l'exploration, par
l'élève, de l'univers des textes littéraires francophones (texte
entendu ici dans un sens large : oral, textuel, visuel, médiatique
et informatique). Cette exploration prend particulièrement la
forme de projets; par exemple, les élèves pourraient
y créer, à l'occasion de la Semaine nationale de la
francophonie par exemple, un « produit culturel » intégrant
divers textes relevant de l'espace francophone;
y animer, à des moments symboliquement associés à la
lecture tels que la Journée mondiale du livre et du droit
d'auteur, un « salon littéraire » mettant l'accent sur les
littératures francophones;
y créer et produire un vidéogramme (destiné par exemple au
Festival des vidéastes) ou un cédérom qui explore le champ
de la production littéraire francophone au Manitoba;
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Français langue première
40S : Littératures francophones
y créer, monter et interpréter, au Festival théâtre jeunesse par
exemple, un texte dramatique;
y etc.
De tels projets d'exploration de l'univers des textes littéraires
francophones (comme ceux proposés dans les onze modules qui
constituent le chapitre 3 ci-après)
y constituent des situations d'apprentissage où les élèves peuvent
vivre, en contexte scolaire, une expérience en langue française,
débouchant sur un « produit culturel »;
y offrent des choix aux élèves, des parcours différenciés en fonction
des intérêts, des préoccupations ou des questions des élèves;
y constituent un creuset intégrateur de volets des apprentissages
langagiers tels que la compréhension, la production, l'oral et l'écrit;
y mobilisent du langage à un triple niveau : celui qui articulera le
produit final, celui nécessaire à la réalisation des tâches conduisant
à ce produit et, enfin, celui relatif à la régulation du processus de
réalisation du projet;
y mettent en place une dialectique entre le processus de réalisation du
projet et le produit, final et fini, qui en résulte;
y mettent l'accent sur l'évaluation de la performance des élèves, dans
une double dimension : le produit final et le processus de sa
réalisation;
y responsabilisent les élèves (ex. : planification et réalisation des
tâches, sens de l'initiative, gestion du projet et des apprentissages);
y confèrent à l'enseignant un rôle de planificateur, d'accompagnateur,
d'orchestrateur et de régulateur;
y jouent sur les images que les élèves se développent, via leur vécu
scolaire, des apprentissages en français et, plus fondamentalement,
de la langue française.
De tels projets se déroulent en trois temps, comme l'illustre le schéma
ci-après.
Français langue première
27
40S : Littératures francophones
Les trois temps du projet d’exploration
préhe
com
nsion et production langa
gièr
e
s
Mise en situation et planification du projet d'exploration
• Expliciter l'interrogation initiale : « Que veux-je savoir
(plus) sur… et pourquoi? »
• Établir la raison d'être du projet et les paramètres de diffusion
• Activer les connaissances antérieures sur le sujet du projet
• Établir le processus de réalisation du projet
• Élaborer des critères d'évaluation du processus
et du contenu du projet
régulation
l’élève
Diffusion du projet d'exploration
Traitement d'information et
engagé dans
et célébration
réalisation du projet d'exploration
un projet
• Présenter le projet dans sa forme
d’exploration
• Identifier, sélectionner et évaluer
finale dans la situation de diffusion
les sources d'information; rassembler
établie
et évaluer l'information pertinente du
projet
• Évaluer le projet (contenu et
processus)
• Créer, à partir de l'information recueillie,
un(des) texte(s)* en fonction de la situation
• Faire un retour sur le processus de
de diffusion du projet
réalisation du projet et les apprentissages
effectués
• Réviser, corriger le(s) texte(s) pour en
établir la version finale
• Célébrer la réalisation du projet
con
struct
ire
ion culturelle et identita
*Le texte est entendu ici dans son sens large : oral, textuel, visuel, médiatique et informatique.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Quelques ouvrages utiles :
• Massé, L. et al. (1998). Le français en projets. Montréal,
Chenelière-Éducation
• Arpon, L. et Capra, L. (2001). L’apprentissage par projets.
Montréal, Chenelière-Éducation
• Morissette, R. (2002). Accompagner la construction des savoirs.
Montréal, Chenelière-Éducation
• Bordallo, I. et Ginestet, J.-P. (1995). Pour une pédagogie du
projet. Paris, Hachette.
1.4 Lire pour le plaisir
Il est primordial que les élèves aient du temps pour lire des textes
littéraires variés, qu’ils choisissent eux-mêmes en vue d’une lecture qui
répond à des besoins d’imaginaire, de divertissement et d’esthétique.
Certaines écoles incluent, dans une journée scolaire, un cycle ou une
semaine, un moment fixe – une période par exemple – pour ce type de
lecture. En effet, lire pour le plaisir implique entre autres que les élèves
• choisissent leurs propres textes;
• les lisent à leur rythme;
• délaissent un texte qu’ils ont choisi, s’ils le souhaitent, au profit d’un
autre.
Les droits imprescriptibles du lecteur :
1. Le droit de ne pas lire.
2. Le droit de sauter des pages.
3. Le droit de ne pas finir un livre.
4. Le droit de relire.
5. Le droit de lire n’importe quoi.
6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
7. Le droit de lire n’importe où.
8. Le droit de grappiller.
9. Le droit de lire à voix haute.
10.
Le droit de nous taire.
(Pennac, D. (1992). Comme un roman. Paris : Gallimard, 4e de
couverture.)
Français langue première
29
40S : Littératures francophones
« Il faut voir(4) souvent lire pour vouloir(4) lire à son tour. Aussi, les
[enseignants] qui lisent « devant » les [élèves] témoignent de
l'importance de la lecture dans leur propre vie. C'est le vouloir-lire(4)
qui transforme éventuellement le pouvoir-lire(4) en savoir-lire(4). »(5)
L'homme qui lit de vive voix s'expose absolument. S'il ne sait(4) pas
ce qu'il lit, il est ignorant dans ses mots, c'est une misère, et cela
s'entend. S'il refuse d'habiter sa lecture, les mots restent lettres
mortes, et cela se sent. S'il gorge le texte de sa présence, l'auteur
se rétracte, c'est un numéro de cirque, et cela se voit. L'homme qui
lit de vive voix s'expose absolument aux yeux qui l'écoutent.
S'il lit vraiment, s'il y met son savoir en maîtrisant son plaisir, si sa
lecture est acte de sympathie(4) pour l'auditoire comme pour le texte
et son auteur, s'il parvient à faire entendre la nécessité d'écrire en
réveillant nos plus obscurs besoins de comprendre, alors les livres
s'ouvrent grand, et la foule de ceux qui se croyaient exclus de la
lecture s'y engouffre derrière lui.
(Pennac, D. (1992). Comme un roman. Paris : Gallimard, p. 173-174.)
(4)
(5)
30
Souligné dans le texte.
Le Pailleur, M. (1992). « En guise d'introduction : un voyage au pays des livres. » Grandir avec les livres.
Fascicule 1. Place à la littérature! La littérature d'enfance et de jeunesse : Considérations pédagogiques
(Ministère de l'Éducation de l'Ontario, p. 12-14).
Français langue première
40S : Littératures francophones
« Si lire, c'est étymologiquement cueillir, ramasser, prendre, voler,
glaner..., la lecture peut se concevoir comme un processus actif
d'appropriation, à partir d'emprunts plus ou moins consciemment
organisés. On peut affirmer que les livres naissent des livres, c'està-dire des lectures antérieures; un texte écrit porte toujours les
traces des filiations et des influences qui ont marqué l'auteur. Dans
cette perspective, lire c'est prélever, et écrire, c'est greffer! La
production d'un nouveau livre passe donc par le démontage et la
déconstruction de livres existants. Des « livres-souches » génèrent
des textes dérivés; un livre en inspire d'autres. »(6)
[...]
« L'enseignement qui s'appuie sur une vision intégrée décloisonne
spontanément le savoir-lire et le savoir-écrire, le savoir-parler et le
savoir-écouter. Dans les classes ainsi orientées, on parle des livres
qu'on lit, on en discute abondamment et on a le goût d'en écrire à
son tour. Un réseau se fait jour qui réunit la lecture et l'écriture, la
parole et l'écoute. »(6)
« L'école a toujours traité le texte narratif (roman, conte, récit,
légende, fable...) comme si ce genre de texte ne comportait que
des informations à extraire et à reconstituer. Pourtant, ce qui fait la
spécificité d'un texte littéraire, c'est la qualité de l'émotion
esthétique qu'il est en mesure de susciter. Conséquemment, la
lecture ne saurait demeurer seulement « efférente » (ce qu'on peut
tirer [du] texte [: par exemple, des données relatives aux
personnages ou aux actions]); elle devrait devenir « afférente » (ce
qu'on apporte soi-même [au] texte [, ses goûts, ses valeurs, ses
croyances]). En effet, la lecture est vue de plus en plus comme une
activité transactionnelle engageant la sensibilité esthétique des
lecteurs. »(7)
(6)
(7)
Le Pailleur, M. (1992). « En guise d'introduction : un voyage au pays des livres. » Grandir avec les livres.
Fascicule 1. Place à la littérature! La littérature d'enfance et de jeunesse : Considérations pédagogiques
(Ministère de l'Éducation de l'Ontario, p. 12-14).
Le Pailleur, M. (1992). « Lire un peu, beaucoup, passionnément! » Grandir avec les livres. Fascicule 6. La voie
du coeur. La littérature d'enfance et de jeunesse : Considérations pédagogiques (Ministère de l'Éducation de
l'Ontario, p. 5).
Français langue première
31
NOTES
32
Français langue première
40S : Littératures francophones
CHAPITRE 2
Contenus d’apprentissage :
les résultats d’apprentissage
Ce chapitre présente les contenus d’apprentissage du cours
Français langue première 40S : Littératures francophones.
Ceux-ci sont exprimés sous la forme de résultats d’apprentissage,
généraux et spécifiques.
Français langue première
33
40S : Littératures francophones
2.1 Les résultats d’apprentissage généraux
Les contenus d’apprentissage du cours Français langue première 40S :
Littératures francophones s’articulent autour de cinq résultats
d’apprentissage généraux, qui déterminent l’objet essentiel du cours :
l’exploration, par l’élève, de l’univers des textes littéraires francophones
(voir 1.2 ci-avant).
• Le premier résultat d’apprentissage général porte sur la
compréhension
et
l’interprétation
de
textes
littéraires
francophones.
• Le deuxième est relatif à des projets d’exploration, par l’élève, de
l’univers des textes littéraires francophones.
• Le troisième est centré plus spécifiquement sur des points de repère
relatifs aux contextes de production des textes littéraires francophones.
• Le quatrième touche à la mise à profit, par l’élève, des expériences
d’apprentissage associées aux textes littéraires francophones dans
le processus de sa construction culturelle et identitaire.
• Le cinquième, enfin, touche à la valorisation, par l’élève, des textes
littéraires francophones et, plus largement, de la langue française
comme véhicule d’une vision du monde.
Le schéma ci-contre présente une vue d’ensemble de ces cinq résultats
d’apprentissage généraux.
On trouvera également ci-après les résultats d’apprentissage
spécifiques (30 au total), correspondant à chacun des cinq résultats
d’apprentissage généraux.
On constatera, en observant le schéma des résultats d’apprentissage
généraux, les relations qu’entretiennent ceux-ci entre eux :
• les résultats d’apprentissage généraux 1, 2 et 3 portent sur
l’exploration de l’univers des textes littéraires francophones, selon
trois dimensions : comprendre et interpréter des textes, réaliser des
projets d’exploration et se donner divers points de repère relatifs
aux contextes de production des textes;
• les résultats d’apprentissage généraux 4 et 5 sont relatifs aux
implications que cette exploration présente pour l’élève, aux
plans du processus de sa construction culturelle et identitaire et de
la langue française comme véhicule d’une vision du monde :
c’est pourquoi ils constituent le noyau central du schéma.
34
Français langue première
40S : Littératures francophones
Schéma des résultats d’apprentissage généraux
L’élève sera capable de...
div
ers
4. mettre à profit les expériences d'apprentissage
associées aux textes* littéraires francophones
dans le processus de sa construction identitaire.
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1. c
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phon
o
c
n
fra
5. valoriser les textes* littéraires francophones
et, plus largement, la langue française
comme véhicule d'une vision du monde.
3. se donner des points de repère historiques,
géographiques et culturels relatifs aux textes*
littéraires francophones.
*Les supports de ces textes pourront être d’ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou informatique.
Français langue première
35
40S : Littératures francophones
Le tableau suivant présente une vue d’ensemble des contenus
d’apprentissage du cours Français langue première 40S : Littératures
francophones :
objet
du cours
objet
du cours
résultats
résultats
d’apprentissage
d’apprentissage
généraux
(RAG)(RAG)
généraux
exploration
de l’univers
exploration de l’univers
des
littéraires
: :
destextes
textes
littéraires
• •comprendre
comprendre et
etinterpréter
interpréterdes textes
des
textesdes projets
• réaliser
• réaliser
des projets
d’exploration
exploration
• se donner des points
• se
points
dedonner
repèredes
relatifs
aux
contextes
de
repère
relatifsde
production
des textes
aux
contextes
de production des textes
identitaire
• construction culturelle
•etlangue
et vision du
identitaire
monde
• langue et vision
du monde
d’apprentissage
savoir-faire,
savoir
savoir-faire, savoir et
et savoir-être
:
savoir-être
:
RAG 1
RAG 1
RAG 2
RAG 2
•
•
•
•
• habiletés
habiletés
connaissances
• connaissances
attitudes
• attitudes
stratégies
• stratégies
RAG 3
RAG 3
implications de
cette exploration
:
implications
de
cette
exploration culturelle
:
• construction
et
visées
visées
d’apprentissage
RAG 4
RAG 4
RAG 5
RAG 5
savoir-être et savoirdevenir
en langue
savoir-être
et savoirfrançaise :
devenir en langue française :
•
•
•
• construction culturelle
construction
culturelle
et identitaire
et identitaire
• littératies
littératies
• rapport à la langue
rapport à la langue
En ce qui concerne la détermination des contenus d’apprentissage, les
résultats d’apprentissage généraux sont envisagés comme des entités
pour que leurs composantes puissent être cernées aussi finement que
possible. Par contre, en ce qui concerne leur mise en œuvre
pédagogique, les résultats d’apprentissage s’agencent autour de
situations d’apprentissage : c’est autour du projet d’apprentissage de
l’élève et, conséquemment, des interventions pédagogiques de
l’enseignant que s’articulent les résultats d’apprentissage.
Par ailleurs, on constatera que les résultats d’apprentissage généraux 1 et
2 se rapprochent l’un de l’autre par leur conception même : ils sont en
effet conçus selon une démarche d’apprentissage de type stratégique, qui
reflète en quelque sorte le comportement langagier attendu de l’élève.
C’est ainsi que le résultat d’apprentissage général 1, centré sur la
compréhension et l’interprétation de textes littéraires francophones,
s’agence en trois temps : l’élève planifie sa compréhension du texte, en
reconstruit le sens et réagit au texte; par ailleurs, durant ces trois phases
(qui sont en interaction dynamique les unes avec les autres), l’élève
régule sa compréhension : il en assure le fonctionnement correct, le
rythme régulier, le déroulement harmonieux. Plus fondamentalement,
dans une telle posture régulatoire, l’élève réfléchit sur son processus
d’apprentissage.
36
Français langue première
40S : Littératures francophones
De manière homologue, le résultat d’apprentissage général 2, centré
sur la réalisation par l’élève de projets d’exploration de l’univers des
textes littéraires francophones, s’agence, lui aussi, en trois phases,
non linéaires elles non plus : l’élève planifie la réalisation de son
projet, il crée le projet et le présente; durant ces trois phases
également, il régule la réalisation de son projet d’exploration en
veillant à son déroulement harmonieux, et, plus fondamentalement,
son processus d’apprentissage.
n
he
ré
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u
nd
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co
ler la compréhen
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du
tex
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1.1 p
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du
4
1.
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se
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p
RAG1
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te
RAG 1
l'élève
en interaction avec le texte
1.3
RAG2
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2.2 c
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éalisation du proj
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a
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io
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lis
r é a g ir a u te x t e
l'élève
réalisant un projet d'exploration
2.3
pré
s e n t e r l e p r oj et
pl
d' e x
ora
ti o
n
Les résultats d’apprentissage spécifiques correspondant aux résultats
d’apprentissage généraux 1 et 2, présentés ci-après, précisent cette
visée stratégique.
Français langue première
37
40S : Littératures francophones
2.2 Les résultats d’apprentissage spécifiques
Résultat d'apprentissage général 1
L'élève sera capable de comprendre et d’interpréter des textes* littéraires
francophones.
Résultats d'apprentissage spécifiques
1.1
planifier sa compréhension du texte
1.1.1
déterminer son intention de lecture ou d'écoute/de visionnement :
envisager les tâches qui s'y rattachent et en examiner les modalités de
réalisation
évaluer sa connaissance du contexte de production du texte (auteur,
réalisateur, époque, genre, etc.) : rassembler l'information dont on
dispose et la compléter au besoin
choisir, dans le répertoire de ses stratégies de compréhension, celles qui
sont appropriées à son intention de communication
1.1.2
1.1.3
1.2
reconstruire le sens du texte
1.2.1
établir la dynamique des composantes de l'univers narratif (intrigue,
personnages, cadre, narration, thèmes, etc.) ou poétique (langue
utilisée, champs lexicaux, sonorités, images, connotations, symboles,
figures de style, thèmes, etc.) et dégager les effets de sens produits
dégager les valeurs véhiculées par le texte et, le cas échéant, la vision
du monde présentée
1.2.2
1.3
réagir au texte
1.3.1
exprimer sa réaction au texte, la justifier en s'appuyant sur les éléments
pertinents du texte, et la confronter avec celle d'autres personnes de
manière à nuancer, à renforcer ou à réviser sa perception et son
appréciation du texte
évaluer dans quelle mesure le texte élargit sa vision du monde, par
exemple en établissant des liens entre son univers et celui représenté
dans le texte, entre ses expériences et ce que vivent les personnages
(sentiments, opinions, croyances, etc.), en établissant des
correspondances entre l'univers du texte et d'autres univers présentés
dans des productions littéraires et artistiques (des récits d'un même
auteur, des récits qui traitent les mêmes thèmes, des adaptations pour le
théâtre, le cinéma, la télévision, etc.)
manifester une appréciation des caractéristiques du texte (genre,
organisation particulière du texte, traitement d'un thème, point de vue
adopté, usage du lexique, de la syntaxe et de figures de style, etc.), en
dégageant l'impact créé (sémantique, stylistique, esthétique, etc.), en
explorant les rapports forme/sens par le biais d'une analyse écrite, d'une
création originale, etc.
1.3.2
1.3.3
1.4
réguler sa compréhension du texte
1.4.1
évaluer l'efficacité des stratégies de compréhension mises en œuvre et,
au besoin, ajuster sa démarche de compréhension du texte (planification,
reconstruction du sens et réaction).
* Les supports de ces textes pourront être d'ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou informatique.
38
Français langue première
40S : Littératures francophones
Résultat d'apprentissage général 2
L'élève sera capable de réaliser des projets d’exploration de l'univers
des textes* littéraires francophones.
Résultats d'apprentissage spécifiques
2.1
planifier la réalisation du projet d’exploration
2.1.1
2.1.2
déterminer l'intention, le destinataire et la forme du projet, à
partir d'interrogations diverses sur l'univers des textes*
littéraires francophones
établir les paramètres de la réalisation du projet
2.2
créer le projet d’exploration
2.2.1
2.2.2
rassembler les données nécessaires à la réalisation du projet
traiter l'information recueillie, en l'organisant en un tout
cohérent en fonction de la situation de diffusion du projet et
des effets recherchés
améliorer le produit créé, en le soumettant à la révision/
correction et à la rétroaction, en vue de l'établissement de sa
forme finale
2.2.3
2.3
présenter le projet d’exploration
2.3.1
2.3.2
2.3.3
partager le projet sous sa forme finale dans la situation
de diffusion établie
évaluer le projet ainsi que le processus de sa réalisation
célébrer la réalisation du projet
2.4
réguler la réalisation du projet d’exploration
2.4.1
évaluer l'efficacité des stratégies de production mises en
œuvre et, au besoin, ajuster sa démarche de réalisation du
projet (planification, création et présentation).
* Les supports de ces textes pourront être d'ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou informatique.
Français langue première
39
40S : Littératures francophones
Résultat d'apprentissage général 3
L'élève sera capable de se donner des points de repère relatifs aux
contextes de production des textes* littéraires francophones.
Résultats d'apprentissage spécifiques
3.1
établir des relations entre les textes* lus et écoutés/visionnés
et leur contexte historique, géographique et socioculturel
3.2
reconnaître la diversité des littératures de l’espace
francophone à partir de leurs aires géographiques et
socioculturelles
3.3
reconnaître l’évolution des littératures francophones à partir
de leurs courants historiques et idéologiques.
* Les supports de ces textes pourront être d'ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou informatique.
40
Français langue première
40S : Littératures francophones
Résultat d'apprentissage général 4
L'élève sera capable de mettre à profit les expériences
d'apprentissage associées aux textes* littéraires francophones dans
le processus de sa construction culturelle et identitaire.
Résultats d'apprentissage spécifiques
4.1
4.2
4.3
4.4
4.5
relever des défis par la réalisation de projets d’exploration de
l’univers des textes* littéraires francophones
présenter une vision personnelle dans son exploration des
textes* littéraires francophones
mettre en œuvre une pensée créative/critique dans son
exploration des textes* littéraires francophones
valoriser la contribution de ses pairs dans son exploration des
textes* littéraires francophones
valoriser son exploration de l’univers des textes* littéraires
francophones comme une source de croissance personnelle,
intellectuelle et sociale, en français.
Résultat d'apprentissage général 5
L'élève sera capable de valoriser les textes* littéraires francophones
et, plus largement, la langue française comme véhicule d'une vision
du monde.
Résultats d'apprentissage spécifiques
5.1
5.2
5.3
5.4
partager son appréciation de textes* littéraires d'auteurs
contemporains et classiques de la francophonie canadienne et
mondiale
valoriser le patrimoine littéraire francophone dans son
ampleur, sa diversité et sa richesse
valoriser la contribution des littératures francophones à la
diversité culturelle et, plus largement, au patrimoine de
l'humanité
valoriser la langue française comme un véhicule qui exprime
des réalités et des valeurs associées à une vision du monde.
* Les supports de ces textes pourront être d'ordre textuel, oral, visuel, médiatique ou informatique.
Français langue première
41
NOTES
42
Français langue première
40S : Littératures francophones
CHAPITRE 3
Propositions pédagogiques
pour la mise en œuvre
Ce chapitre avance des propositions pédagogiques pour la mise en
œuvre des résultats d’apprentissage, présentés au chapitre 2. Ces
propositions sont agencées sous la forme de onze modules
autonomes (voir liste ci-après).
Français langue première
43
NOTES
44
Français langue première
40S : Littératures francophones
Liste des modules
Module 0 : Les journaux de bord
Module 1 : Explorer l'univers narratif : quelques pistes
Module 2 : Explorer l’univers poétique : quelques pistes
Module 3 : Lire un roman avec toutes ses intelligences
Module 4 : Les littératures francophones d’ici et d’ailleurs
Module 5 : L’oeuvre littéraire féminine
Module 6 : D’une oeuvre à l’autre
Module 7 : Des thèmes pour regrouper des œuvres
Module 8 : Un auteur dans tous ses états
Module 9 : Explorer les genres : quelques balises
Module 10 : Le texte dramatique : quelques ressources pédagogiques
Module 11 : La littérature dans sa dimension sociale :
deux pistes d'exploration
Français langue première
45
NOTES
46
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 0 : Les journaux de bord
Les adolescents utilisent les textes littéraires, au même titre que les films
ou les chansons, dans le processus de leur construction identitaire : ils
peuvent en effet se voir dans les histoires, les personnages, les situations,
les cadres spatiotemporels. Cette projection peut être mise à profit pour
offrir aux élèves des occasions de réagir aux univers fictifs avec lesquels
ils sont mis en contact.
Les journaux de bord permettent aux élèves de consigner par écrit, de
manière continue, leurs réactions, cognitives et affectives, aux textes
qu’ils lisent. Ce travail de consignation constitue, pour les élèves, un
bon moyen d’approfondir la compréhension des textes, par le biais,
entre autres, d’une dynamique entre lecture, écriture et pensée.
Afin d’accroître l’efficacité de cette pratique, amener les élèves à
envisager différents types de réactions aux textes : à différents
moments, intervenir spécifiquement sur certains types de réponses et
demander aux élèves de se concentrer sur un type particulier de
réponse. Les types de réponses peuvent être les suivants :
• réaction générale : les élèves consignent leur réaction générale au
texte et observent comment celle-ci évolue au fur et à mesure de
leur lecture.
• citation : citer des passages du texte requiert de la part de l’élève
une décision quant à l’importance desdits passages et des critères
qui motivent une telle décision.
• prédiction : les élèves mettent à profit des indices textuels et leur
compréhension du texte pour prédire l’évolution de la trame
narrative, le comportement des personnages, etc.
• explication : par ce type de réponse, les élèves dépassent la simple
description des personnages ou du cadre spatiotemporel d’un texte
pour se concentrer sur leurs significations : ils peuvent ainsi inférer
les raisons qui sont à l’origine du comportement des personnages, ils
peuvent faire des observations sur l’univers social, psychologique
voire idéologique de l’univers fictif, ils peuvent faire des remarques
sur le fonctionnement textuel, sur la manière dont l’histoire est écrite,
sur le point de vue de narration, sur certains choix de mots, etc.
• jugement : les élèves portent un jugement sur les personnages et
leur comportement, sur la vraisemblance de l’histoire voire sur
l’écriture du texte elle-même.
• établissement de liens : en établissant des liens avec leurs propres
expériences, connaissances, opinions ou lectures antérieures, les
élèves approfondissent leur compréhension du texte.
Français langue première
47
40S : Littératures francophones
• élargissement : par ce type de réponse, les élèves sont amenés à
réfléchir sur la portée plus large abordée par le texte : une
problématique sociale, les relations humaines, certaines valeurs, etc.
• réflexion sur la lecture elle-même : les élèves notent des observations
sur leur lecture elle-même : difficultés rencontrées et moyens mis en
œuvre pour les résoudre, satisfactions apportées, etc.
Les journaux de bord – qui peuvent également contenir des éléments
tels que collages, dessins, croquis d’un personnage – peuvent se
présenter en deux types :
• journal-dialogue : ce type de journal permet un dialogue écrit entre
deux ou trois élèves ou entre l’élève et l’enseignant;
• journal à double entrée : l’élève divise chaque page de son journal
de bord en deux colonnes : celle de gauche est utilisée pour noter
des citations importantes, décrire des personnages ou des
événements; dans celle de droite, l’élève consigne réflexions,
commentaires ou questions sur les items notés en vis-à-vis dans la
colonne de gauche.
Les journaux de bord peuvent se prêter à une évaluation à la fois
formative et sommative.
• Évaluation formative
Le dialogue qui s’établit entre l’élève et l’enseignant représente la
dimension la plus importante de l’évaluation du journal de bord :
l’apport de l’enseignant à ce dialogue est important dans la mesure
où, par exemple, il invite, par ses réactions (commentaires,
questions, etc.), l’élève à approfondir et à élargir ses réflexions.
D’autres partenaires, tels que d’autres élèves, peuvent aussi
apporter d’utiles contributions à ce dialogue.
Différentes modalités de gestion de ce dialogue gagnent à être mises
en place : par exemple, l’enseignant peut recueillir quatre ou cinq
journaux à la fois pour y noter ses réactions; les élèves peuvent
surligner certains de leurs commentaires sur lesquels ils souhaitent
des réactions de la part de l’enseignant.
En évaluant, dans une perspective formative, les journaux de bord,
on cherchera
• des réactions qui établissent des liens entre des expériences
personnelles et les textes;
• des références spécifiques aux textes;
• des retours sur des réactions antérieures, à des fins d’ajustement,
de modification ou de confirmation;
48
Français langue première
40S : Littératures francophones
• la prise en compte de plus d’une interprétation et de différentes
perspectives;
• plus largement, les divers types de réponse : réaction générale,
citation, prédiction, explication, jugement, établissement de liens,
élargissement, réflexion sur la lecture elle-même.
• Évaluation sommative
L’évaluation sommative des journaux de bord est effectuée à la fois
par les élèves eux-mêmes et par l’enseignant.
• Auto-évaluation par l’élève :
L’élève peut évaluer son propre journal de bord en inscrivant une
marque sur le continuum suivant :
faible ou
incomplet
excellent
et en écrivant une justification à cette marque.
• Évaluation par l’enseignant :
L’exemple présenté ci-après (qui porte plutôt sur l’univers narratif
que sur l’univers poétique) constitue la proposition d’un outil
utilisable par l’enseignant pour évaluer, de manière sommative, les
journaux de bord des élèves. Cet outil – qui se présente sous la
forme d’une échelle d’appréciation – se veut un exemple d’une
pratique d’évaluation de la performance de l’élève. Chaque élève a
un exemplaire d’une telle échelle dans son journal de bord.
Français langue première
49
40S : Littératures francophones
Échelle d’appréciation d’un journal de bord
Appréciation
Descripteurs de la performance de l’élève
• manifeste une compréhension et des réactions profondes relativement à
l’univers narratif; établit des rapports avec ses propres expériences et/ou
avec d’autres textes ou œuvres; peut faire des liens entre le style et la
structure du texte et ceux d’autres histoires qu’il a lues ou visionnées.
• dégage des preuves précises (citations, exemples) qui révèlent une
compréhension fine; apporte, au sujet du personnage et du thème par
exceptionnel
exemple, des éclaircissements fondés sur des inférences et sur son
habileté à dégager des conclusions.
• effectue souvent un retour sur des réactions antérieures pour y
apporter ajustements, modifications ou confirmations.
• donne une description des stratégies et des techniques précises
pouvant permettre d’interpréter, par exemple, des faits, des
personnages et des thèmes.
bon
• manifeste une bonne compréhension de l’univers narratif et indique ses
réactions face à lui; établit des rapports avec ses propres expériences
et/ou d’autres textes ou œuvres.
• étaye ou justifie souvent ses idées ou ses réactions de citations et
d’exemples extraits du texte, bien que, parfois, il se montre vague;
indique qu’il a procédé par inférence pour interpréter l’histoire, et surtout
les raisons d’agir des personnages; apporte des éclaircissements fondés
sur des inférences et sur son habileté à dégager des conclusions.
• effectue régulièrement un retour sur des réactions antérieures pour y
apporter ajustements, modifications ou confirmations.
• donne, avec des encouragements, une description générale des
stratégies et des techniques qui permettent d’interpréter, par exemple,
des faits, des personnages et des thèmes.
satisfaisant
• manifeste une compréhension élémentaire de l’univers narratif et
transmet ses opinions et ses réactions personnelles; établit certains
rapports avec ses propres expériences et/ou d’autres textes ou œuvres.
• étaye ou justifie ses idées ou ses réactions de citations et d’exemples
tirés du texte, mais ceux-ci ne sont pas toujours pertinents; procède
par inférence, mais manque parfois certains détails et subtilités.
• effectue parfois un retour sur des réactions antérieures pour y apporter
quelques ajustements, modifications ou confirmations.
• les descriptions de stratégies et de techniques ont tendance à être
quelque peu générales; peut éprouver de la difficulté à décrire
précisément les problèmes et les défis qu’il a rencontrés.
• montre qu’il comprend les éléments généraux de l’histoire, mais ne
peut sans doute pas interpréter un grand nombre de détails; établit des
liens superficiels avec ses propres expériences et/ou d’autres textes ou
œuvres.
• ses réactions ou ses opinions personnelles se résument habituellement
à des idées générales non étayées de citations ni d’exemples précis;
procède par inférence, mais la logique et l’interprétation sont parfois
rudimentaire
fautives.
• effectue rarement un retour sur des réactions antérieures et n’y
apporte qu’un nombre restreint d’ajustements, de modifications ou de
confirmations.
• décrit souvent maladroitement, voire parfois pas du tout, les difficultés
et les défis qu’il a rencontrés ainsi que les stratégies mises en œuvre
pour les surmonter ou y répondre.
incomplet
50
• inachevé, illogique, non pertinent et/ou incompréhensible; donne peu
d’indications qu’il comprend l’univers narratif; peut être très bref.
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 1 : Explorer l'univers narratif : quelques pistes
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Porter un regard analytique et critique sur l’univers narratif et ses
composantes;
ˆ Approfondir la compréhension des textes fictionnels, en
particulier la dynamique des composantes de l'univers narratif;
ˆ Mettre en place un climat de plaisir autour du livre.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Exemples d'activités de mise en train
ˆ Exemples d'arrêts sur l’univers narratif : lecture, interprétation et
réaction critique
ˆ Exemples de manipulations de l’univers narratif
ˆ Exemples de projets
Ressources d'apprentissage possibles :
ˆ Matériel didactique
ˆ Les textes narratifs : pistes pour des choix de titres
ˆ La nouvelle littéraire : quelques autres ressources spécifiques
ˆ Le roman : quelques autres ressources spécifiques
ˆ Ouvrages de pédagogie et de référence
Français langue première
51
40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
„ Exemples d'activités de mise en train
…
…
…
…
À partir des expériences des élèves en matière de livres de
fiction, animer une discussion sur les textes narratifs (romans,
contes, nouvelles, etc.) : leur existence même, les lectorats, les
besoins qu'ils comblent, le plaisir qu'ils procurent, leur écriture,
leur distribution, les rapports que les élèves entretiennent avec
eux, etc.
À partir de romans que les élèves ont lus ou lisent, animer une
discussion sur les composantes de l'univers narratif : intrigue,
personnages, espace et temps, narration, thèmes, valeurs, vision
du monde, etc.; centrer la discussion sur la dynamique qui
s'établit entre ces composantes au sein d'un univers narratif et
les effets de sens ainsi produits.
Cibler la discussion sur le caractère polysémique des textes
fictionnels, sur le potentiel interprétatif de ces textes, sur la
pluralité et la richesse des lectures de ces textes ainsi que sur le
rôle irremplaçable du lecteur dans l'interprétation de ces textes.
Etc.
„ Exemples d'arrêts sur l’univers narratif : lecture, interprétation et réaction critique
« Que la voie d’accès au roman soit dictée par les motivations du lecteur
ou de la lectrice ou par le genre de roman à lire, le lecteur ou la lectrice
doit toujours explorer les deux facettes du roman : ce qui est raconté
(l’histoire) et comment c’est raconté (le récit ou la narration).
Lire l’histoire (1), c’est
- lire le déroulement des actions et leurs liens logiques;
- comprendre les personnages dans ce qu’ils font et ce qu’ils sont, ici et
maintenant (espace et temps);
- découvrir les thèmes développés;
- mettre en relation ces trois composantes.
Lire le récit (1), c’est
- identifier la voix narrative (qui raconte?);
- découvrir le point de vue (qui voit?);
- reconnaître le discours des personnages;
- percevoir l’organisation du temps de narration;
- reconnaître les procédés d’écriture (images, connotations, champs
lexicaux, champs sémantiques, récurrence, symboles). »
« Lire un roman, c’est lire un discours à travers l’enchevêtrement de tous
ses éléments constitutifs : c’est découvrir et relier tous les signaux donnés
par l’auteur ou l’auteure, c’est suivre le fil ténu qui relie les composantes de
l’histoire et du récit pour arriver à construire le sens. » (2)
(1)
(2)
52
Souligné dans le texte.
Rousselle, J., Lachapelle, M. et Monette, M. (1988). Perspectives 5e . À lire. Dossier (Centre Éducatif et Culturel
inc., p. 56).
Français langue première
40S : Littératures francophones
« Est-il nécessaire de connaître toutes les caractéristiques et toutes les
règles de fonctionnement d’un roman pour en apprécier la lecture? Non.
Beaucoup de lecteurs et de lectrices ne lisent des romans que pour
l’histoire. Mais, en écrivant leurs romans, la plupart des romanciers et
romancières ont d’autres préoccupations que celle de raconter une
« bonne histoire ». Comme le roman est un discours littéraire, il permet
une exploration du langage tant sur le plan de la structure de l’histoire
que sur le plan de l’écriture elle-même. De plus, les personnages qu’on
y trouve vivent des situations qui peuvent nous toucher, nous
émouvoir, tout en véhiculant des valeurs que l’on partage ou qui sont
différentes des nôtres. On apprécie donc davantage un roman si l’on
sait en reconnaître l’originalité, si l’on peut découvrir les choix qu’a faits
l’auteur ou l’auteure tant en ce qui a trait à l’histoire qu’en ce qui a trait
à l’écriture. » (3)
…
Les composantes suivantes de l’univers narratif pourront faire
l’objet d’un arrêt :
• l’intrigue,
• les personnages et les valeurs,
• l’espace et le temps,
• la narration,
• les thèmes et la vision du monde,
• la dynamique entre ces composantes.
…
L'intrigue
• Faire établir par les élèves, en s’appuyant sur leurs expériences
et leurs connaissances, que le roman, au même titre que le
conte ou la nouvelle littéraire, est un texte narratif : il
représente une succession d’événements, liés entre eux selon
une certaine logique.
• À partir d’exemples ou d’une œuvre, faire construire, en
groupes et individuellement, le schéma narratif du roman :
pour ce faire, proposer aux élèves de s’appuyer sur la fiche
L’analyse d’un roman : fiche sur le schéma narratif proposée
ci-après;
on pourra également se reporter à l’encadré Éléments de
contenu notionnel : le schéma narratif du roman présenté ciaprès.
• À partir d’exemples, faire dégager les variations du schéma
narratif dans les textes : ainsi,
la situation initiale, présentée la plupart du temps au début
du roman, peut être évoquée dans un retour en arrière ou
être absente;
(3)
Rousselle, J., Lachapelle, M. et Monette, M. (1988). Perspectives 5e. À lire. Stratégies (Centre Éducatif et Culturel
inc., p. 44).
Français langue première
53
40S : Littératures francophones
le romancier peut choisir de commencer par l’élément
déclencheur, la situation finale étant alors soit rapportée dans
un retour en arrière, soit absente, soit devant être dégagée;
la longueur des séquences narratives peut varier;
les rapports logique et chronologique peuvent jouer l’un avec
l’autre ou l’un sans l’autre;
le résultat n’est pas, de manière absolue, placé à la fin du
roman;
la situation finale peut être absente du texte : elle doit alors
être dégagée à partir des donnée fournies par la lecture; elle
peut aussi se trouver au début du roman;
etc.
Faire dégager les effets de sens de ces variations du schéma
narratif.
• À partir d’exemples, faire établir la particularité du schéma
narratif de la nouvelle et de celui du conte, par rapport au
schéma narratif du roman. On pourra se reporter à l’encadré
Éléments de contenu notionnel : les schémas narratifs de la
nouvelle et du conte présenté ci-après.
Pourquoi dégager le schéma narratif?
Animer une discussion, en sollicitant les expériences des élèves,
sur la pertinence d’un travail sur le schéma narratif d’un roman,
relativement à l’appréciation d’un roman.
Faire valoir que l’appréciation d’un roman passe par une
reconstruction du sens de celui-ci, à partir des ses différentes
composantes.
Faire ressortir que l’intrigue est une des composantes essentielles
d’un roman : les événements, les actions, les liens qui les relient,
les séquences narratives.
Faire établir que la reconstruction du schéma narratif d’un roman
permet de mettre en place une assise de compréhension sans
laquelle il pourrait être difficile d’aborder les autres composantes :
les personnages, le cadre, la narration, les thèmes.
54
Français langue première
40S : Littératures francophones
L’analyse d’un roman : fiche sur le schéma narratif
1. La situation initiale
•
Préciser la nature et les caractéristiques de la situation
initiale : _______________________________________
______________________________________________
2. Le processus de transformation
•
L'élément déclencheur : préciser sa nature et ses
caractéristiques : ________________________________
______________________________________________
•
Les épisodes (ou séquences narratives) :
– identifier les épisodes :
______________________________________________
______________________________________________
– préciser leur nature :
______________________________________________
______________________________________________
– préciser leur enchaînement :
______________________________________________
______________________________________________
•
Le résultat : préciser sa nature et ses caractéristiques;
préciser comment il est atteint :
______________________________________________
______________________________________________
3. La situation finale
•
Préciser la nature et les caractéristiques de la situation
finale :
______________________________________________
•
Qualifier la situation finale, à la lumière de la situation
initiale et du processus de transformation :
logique F
invraisemblable F
Français langue première
vraisemblable F
logique F
autre F (à préciser : ____________)
55
40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
Le schéma narratif du roman
situation
initiale
processus de transformation
élément
série d’événements ou
déclencheur d’actions pouvant être
regroupés en épidodes
(séquences narratives
de longueur variable)
résultat
situation
finale
Ces composantes sont liées entre elles selon un double rapport :
• logique (cause/conséquence),
• chronologique (avant/pendant/après).
Le schéma narratif de la nouvelle
situation
initiale
événement
perturbateur
péripéties
dénouement
inattendu
Le schéma narratif du conte
situation
initiale
56
héros
mission
alliés/ennemis
obstacles/épreuves
situation
finale
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
les personnages
• Faire établir par les élèves, en s’appuyant sur leurs expériences
et leurs connaissances, que les personnages, dans la mesure
où ils permettent aux actions de se développer, constituent une
des clés de lecture importantes d’un roman et, plus largement,
d’un texte narratif.
• À partir d’exemples ou d’une œuvre, en s’appuyant toujours
sur les expériences et les connaissances des élèves, établir que
l’on peut aborder les personnages d’un roman selon les trois
approches suivantes; celles-ci , si elles conduisent à un type de
lecture différent, gagnent à être complémentaires; ainsi
combinées, elles permettent de mieux saisir toute l'ampleur
des personnages :
approche psychologique
(ce qu’ils sont)
approche actancielle
(ce qu’ils font)
approche symbolique
(ce qu’ils représentent)
On pourra s’appuyer sur l’encadré Éléments de contenu
notionnel : trois approches du personnage de roman présenté
ci-après.
Proposer aux élèves de s’appuyer sur la fiche L’analyse du
roman : fiche sur les personnages proposée ci-après.
• En ce qui concerne l’approche psychologique, on mettra
l’accent sur une « saisie » globale du personnage, où les
élèves établissent une dynamique entre les données portant
sur la « caractérisation statique » (nom, traits physiques, traits
psychologiques, langage, environnement, attributs divers) et
l’évolution psychologique du personnage.
À partir de fiches par exemple, on consignera des données sur
la caractérisation statique des personnages. Celles-ci serviront
de point de départ pour retracer l’évolution psychologique du
personnage.
Dans un troisième temps, on établira des relations entre
l’évolution psychologique du personnage et ses caractérisations
physique, psychologique, sociale et relationnelle.
Français langue première
57
40S : Littératures francophones
L’analyse du roman : fiche sur les personnages
1. Les personnages importants
caractérisations
apportées
Š physique : _______
Š psychologique : ___
Š sociale : _________
Š relationnelle : ____
rôles
joués
Š sujet : _________
Š objet : __________
Š adjuvant : _______
Š opposant : ______
Š destinateur : _____
Š destinataire :_____
valeurs
véhiculées
Š________________
Š________________
Š________________
Š________________
Š________________
2. Le personnage principal
• caractérisations : __________________________________
• valeurs : _________________________________________
• évolution psychologique : ____________________________
3. Les personnages secondaires
• lesquels? _________________________________________
• pourquoi? ________________________________________
4. La dynamique des personnages
• les rapports entre les personnages : _____________________
• un schéma (à construire) visualisant ces rapports : _________
5. Signification
• un(des) personnage(s) au(x)quel(s) tu as pu t'identifier au
cours de la lecture et dont tu partages la vision du monde :
_________________________________________________
• un(des) personnage(s) le(s) plus significatif(s), à ton avis
(justifie ta réponse en t'appuyant sur des données du roman) :
_________________________________________________
• ton personnage préféré
(justifie ta réponse en t'appuyant sur des données du roman) :
__________________________________________________
58
Français langue première
40S : Littératures francophones
• En ce qui concerne l’approche actancielle, on pourra proposer
aux élèves, répartis en triades, la démarche suivante pour
élaborer le schéma actanciel d’un roman :
dégager le personnage principal, à partir de considérations telles que « celui sans lequel le roman n’existerait
pas », « celui en fonction duquel semblent avoir été créés
les autres personnages »;
dégager le projet du personnage principal;
dégager les personnages qui jouent un rôle face au projet du
personnage principal : celui qui l’initie (destinateur), celui à
qui il va bénéficier (destinataire), celui qui aide le personnage principal (l’adjuvant), celui qui lui nuit (l’opposant);
construire des schémas représentant la dynamique de ces
fonctions; exemples :
- un schéma du genre de celui proposé ci-après ou sa
variante :
De
S
Adj.
Da
O
Opp.
- un schéma illustrant les couples de relations (sujet/objet,
destinateur/destinataire, adjuvant/opposant);
lors de la mise en commun, on fera valoir que l’approche
actancielle permet
- de dégager les personnages importants et leurs rôles dans
le récit,
- de mettre en évidence certains rapports qui existent entre
les personnages
- d’établir des relations entre le déroulement des actions et
l’évolution psychologique des personnages.
• En ce qui concerne l’approche symbolique, il paraît difficile de
présenter une façon de faire qui permettrait de dégager
pleinement la dimension symbolique d’un personnage.
Voici cependant quelques pistes : dégager, à partir des
caractérisations d’un personnage, l’image qu’il projette;
déterminer ensuite dans quelle mesure cette image peut être
associée à un type humain, à une figure légendaire, à un
personnage mythique ou à une idéologie; mettre enfin d’autres
composantes du roman (telles que les autres personnages, le
cadre, les thèmes, etc.) en relation avec la dimension
symbolique du personnage, celui-ci n’ayant pas de valeur
symbolique en soi.
Français langue première
59
40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
Trois approches du personnage de roman
1.
L'approche psychologique :
• les personnages sont envisagés comme des personnes, en
regard de leur vraisemblance;
• on peut dégager des procédés de caractérisation statique :
nom, traits physiques, traits psychologiques, langage (en
particulier registres de langue), environnement, attributs
divers tels que métier, statut social, talents particuliers, etc.;
• on peut également mettre en évidence des procédés de
caractérisation dynamique : les personnages évoluent dans un
roman; ils interagissent avec d'autres personnages et leur
environnement; l'analyse des différentes situations qu'ils vivent
permet de retracer les étapes de leur évolution psychologique;
• quatre sources d'information pour le lecteur : la description
dans la narration, les propos des autres personnages, les
propos ou les pensées du personnage lui-même, le
comportement et les actions du personnage lui-même.
2.
L'approche actancielle :
• les personnages sont envisagés en regard du rôle qu'ils
jouent dans le déroulement des actions;
• tout récit met en scène des personnages qui jouent des
rôles-type, des actants, c'est-à-dire tous ceux qui
interfèrent dans l'action;
• les rapports entre les personnages sont considérés du point de
vue des actions qu'ils posent et des buts qu'ils poursuivent; ces
rapports correspondent à six fonctions qui sont habituellement
représentées selon un schéma du genre de celui-ci :
adjuvant
(celui qui aide
le sujet dans
sa quête)
objet
(l’être ou la
chose désirée)
destinataire
(celui à qui va
bénéficier l’objet)
sujet
(personnage
en quête de
quelque chose)
opposant
(celui qui s’oppose
au sujet dans sa
quête)
destinateur
(ce qui initie le projet)
• on notera que, dans certains récits, le destinateur et le
destinataire peuvent être le sujet lui même, qu'un
personnage peut être à la fois adjuvant et opposant;
• on notera également que chaque composante du schéma
actanciel peut être un personnage, une chose inanimée ou
une abstraction.
.../...
60
Français langue première
40S : Littératures francophones
.../...
3. L’approche symbolique :
• les personnages de roman peuvent représenter les grandes
aspirations humaines (telles que l’amour ou l’absolu), les
thèmes universels (tels que le bien, le mal, la vie, la mort);
ils acquièrent ainsi une valeur symbolique;
• les indices suivants permettent de le découvrir : le nom, les
valeurs, certains traits particuliers, les commentaires
explicites des personnages, la récurrence (exemples : retour
d’un personnage dans certaines situations stratégiques,
répétition d’un geste ou d’une attitude, association répétée
d’un personnage à un animal, à une couleur, à une idée);
• la valeur symbolique d’un personnage ne peut être saisie de
façon morcelée; elle doit être reliée à l’ensemble du roman :
c’est par la mise en relation d’indices de divers ordres que
l’on peut dégager la dimension symbolique d’un personnage
et celle du roman.
« Le personnage est une construction du texte narratif et du
processus de lecture. Doté d'une identité, il joue un rôle dans
l'organisation de l'intrigue. Comme toutes les autres composantes
du récit, il active les réseaux de relations à l'œuvre dans le roman.
L'analyse du personnage n'est en fait qu'un des [aspects de la]
lecture à partir duquel la cohérence de l'œuvre sera interrogée. »
[...]
Dans la littérature moderne, le personnage a été remis en
question. Vidé de son identité(4), il servira à mettre en cause la
fonction de représentation du roman. Tout un éventail de
techniques ont été mises en œuvre pour contester son statut
d'organisateur de la fiction et sa propre substance(4) : sa
psychologie, son intériorité, son statut social.
Mais, quel que soit le rôle du personnage dans la fiction, celui-ci
reste un des aspects les plus fascinants du monde romanesque.
Lieu des contradictions mêmes de la littérature, il suscite des
questions vivifiantes pour le lecteur. C'est celui-ci qui, par sa
lecture, doit le construire progressivement, donc l'interpréter et le
situer dans la fiction narrative. » (5)
(4)
(5)
Souligné dans le texte.
Paquin, M. et Reny, R. (1984). La lecture du roman. Une initiation (Modulo-Griffon, p. 75).
Français langue première
61
40S : Littératures francophones
• À partir d’exemples et en s’appuyant toujours sur les
expériences et les connaissances des élèves, faire établir la
particularité des personnages dans un conte et dans une
nouvelle :
le conte est organisé autour d’un héros ou d’une héroïne, qui
possède des traits psychologiques élémentaires et en rapport
direct avec les actions posées; le héros ou l’héroïne doit
remplir une mission, il pourra compter sur des alliés et
affronter des ennemis; les personnages d’un conte se
définissent donc plus par le rôle qu’ils jouent que par leur
psychologie;
la nouvelle raconte généralement un court épisode de la vie
d’un personnage aux prises avec un problème à résoudre; les
caractérisations des personnage sont généralement relatives
aux comportements de ceux-ci, à leur façon d’être et d’agir.
Pourquoi analyser les personnages?
Animer une discussion, en sollicitant les expériences des
élèves, sur la pertinence d’un travail sur les personnages
d’un roman, relativement à l’appréciation d’un roman.
Faire ressortir que les personnages permettent de relier
entre elles les diverses composantes ( intrigue, thèmes,
cadre, narration, etc.)
du roman et de les rendre
significatives : « [c]e sont [...] les personnages qui
soutiennent la dynamique de l’action, qui habitent l’espace et
le temps, qui tissent entre eux des réseaux de relations, qui
assurent la vraisemblance et nous entraînent dans l’univers
de la fiction. Ce sont eux aussi qui véhiculent les valeurs
autour desquelles se développe la thématique.
Ils
commandent notre adhésion ou [...] nous invitent à la
réflexion et à la distanciation. » (6)
Faire valoir que comprendre les personnages dans ce qu’ils
font et dans ce qu’ils sont, constitue une clé de lecture qui
conduit au cœur même du roman.
(6)
62
Rousselle, J., Lachapelle, H. et Monette, M. (1988). Perspectives 5e . À lire. Stratégies (Centre Éducatif et
Culturel inc., p. 81).
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Le cadre (l’espace et le temps)
• Faire établir par les élèves, en s’appuyant sur leurs expériences
et leurs connaissances, que l’espace et le temps sont des
éléments clés dans un roman : ils servent à situer les
événements, à leur donner un contexte; mais ils peuvent
également jouer un rôle plus important : révéler certains
aspects du personnage, présenter une valeur symbolique, voire
constituer l’un des thèmes importants d’un roman.
• À partir d’exemples ou d’une œuvre et en s’appuyant toujours
sur les expériences et les connaissances des élèves, faire
dégager l’importance et le rôle du cadre dans un roman.
On pourra, pour ce faire, s’appuyer sur l’encadré Éléments de
contenu notionnel : l’espace et le temps dans le roman
présenté ci-après.
Proposer aux élèves de s’appuyer sur la fiche L’analyse du
roman : fiche sur le temps et l’espace proposée ci-après.
L’espace : exemples d’activités possibles :
- dresser un inventaire des lieux où se déroulent les
principaux événements du roman;
- évaluer l’importance relative des lieux en regard du
développement des actions dans l’ensemble du roman;
- évaluer l’importance qu’accordent les personnages aux
lieux où ils évoluent (voir ce que les personnages ainsi que
le narrateur en disent);
- analyser la façon dont les lieux sont décrits afin de mettre
en évidence :
· un vocabulaire susceptible de révéler la dimension
thématique ou symbolique,
· les liens que l’on peut établir entre les lieux et les
personnages,
· des oppositions du type clos/ouvert, réel/rêvé, urbain/
rural, masculin/féminin, etc.,
· les techniques de description utilisées (exemples :
panoramique (gauche/droite, haut/bas), statique, en
mouvement, etc.),
· qui voit les lieux décrits : le narrateur, un personnage,
plusieurs personnages, etc.
- etc.
Français langue première
63
40S : Littératures francophones
L’analyse du roman : fiche sur l’espace et le temps
1. L’espace
• Où se déroule l’essentiel des événements du roman?
________________________________________________
• Y a-t-il des lieux qui te semblent plus importants que
d’autres? Pourquoi?
________________________________________________
• Les lieux révèlent-ils certaines caractéristiques des
personnages? Lesquelles?
________________________________________________
• En quoi les lieux contribuent-ils à créer l’atmosphère du
roman?
________________________________________________
• Les lieux te paraissent-ils avoir une valeur symbolique?
Laquelle?
________________________________________________
• Les lieux te paraissent-ils suffisamment importants pour qu’ils
puissent être considérés comme l’un des thèmes du roman?
Lequel? __________________________________________
2. Le temps
• À quelle époque se situent les événements racontés dans le
roman? __________________________________________
• Quelle est la durée approximative de l’ensemble des
événements du roman?
________________________________________________
• La narration est-elle faite après, pendant ou avant les
événements de l’histoire?
________________________________________________
• Les événements sont-ils racontés selon l’ordre chronologique?
________________________________________________
• Y a-t-il des retours en arrière, des anticipations, des
accélérations, des ralentissements dans le récit? Quels effets
produisent-ils?
________________________________________________
• L’importance des événements est-elle toujours proportionnelle
à la longueur de leur narration? Quels effets ces jeux sur le
rythme du roman produisent-ils?
________________________________________________
• Le temps te paraît-il avoir une valeur symbolique?
________________________________________________
• Le temps te paraît-il suffisamment important pour qu’il puisse
être considéré comme l’un des thèmes du roman? Lequel?
________________________________________________
64
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le temps : exemples d’activités possibles :
– dégager l’organisation temporelle du roman :
· dégager, à l’aide d’indices temporels, à quelle époque se
déroulent les événements racontés;
· évaluer la durée globale de l’ensemble des événements
du roman;
· établir une ligne de temps qui illustre les étapes de
l’intrigue (par chapitre, pour l’œuvre entière, etc.) : les
moments forts ou dramatiques, les points tournants, les
rebondissements (axe de la tension narrative) mais aussi
les moments plus légers, les pauses (axe de la détente
narrative);
· établir un schéma pour mettre en parallèle la durée des
événements et la place qu’ils occupent, en pages ou en
chapitres, dans le roman;
· mettre en évidence les retours en arrière et faire un
schéma illustrant ces brisures dans le déroulement du
récit;
· etc.;
– relever les indices qui révèlent le traitement particulier
accordé au temps dans le récit :
· le très grand nombre de pages ou de lignes accordé à
certains événements proportionnellement à d’autres qui
occupent peu de place;
· la fréquence des retours en arrière et des anticipations;
· le retour de certains événements;
· certains commentaires du narrateur et des personnages;
– etc.
Pourquoi marquer un arrêt sur le temps et l’espace?
Animer une discussion, en sollicitant les expériences des
élèves, sur la pertinence d’un travail sur le temps et
l’espace dans un roman, relativement à l’appréciation d’un
roman.
Le temps et les lieux dans un roman sont étroitement liés
au déroulement des actions : ils sont donc indispensables
à la compréhension de l’histoire.
Faire valoir que, comme les autres composantes du
roman, le traitement du temps et de l’espace peut fournir
des indices importants sur les thèmes et la symbolique du
roman.
Français langue première
65
40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
1. L’espace dans un roman :
•
la description des lieux :
– sert à situer l’action, à définir le contexte social, historique
ou géographique;
– donne des informations sur les personnages;
– sert à créer une atmosphère précise;
•
le rôle des lieux :
– assure une certaine vraisemblance;
– crée une certaine atmosphère;
– révèle certaines caractéristiques de personnages; balise
l’itinéraire du personnage principal;
– fournit des indices dans un roman d’intrigue;
– remplit une fonction symbolique (exemples : espace
réel/rêvé, clos/ouvert, rural/urbain, masculin/féminin, etc.);
– devient l’un des thèmes du roman.
2. Le temps dans un roman :
66
•
histoire (fiction) et récit (narration) :
– l’histoire, c’est ce qui est raconté, ce sont les événements
narrés (des informations sur l’époque durant laquelle ceuxci se déroulent sont parfois utiles,voire nécessaires);
– le récit, c’est la façon dont le narrateur rapporte les
événements, c’est la narration de ceux-ci;
•
le moment de la narration par rapport à la fiction :
– avant, pendant où après les événements de l’histoire;
•
le temps du récit (de la narration) :
– l’ordre chronologique (temps de la fiction);
– l’organisation de décalages entre la succession des faits de
l’histoire et l’ordre de ces faits dans le récit : retours en
arrière,
anticipations,
ellipses,
télescopages
ou
chevauchements d’actions, retours cycliques;
– le rythme du récit : l’importance d’un événement et la
longueur consacrée à sa narration, les effets produits par
ces ralentissements/accélérations du récit;
•
le rôle du temps :
– situer les événements pour les rendre vraisemblables;
– situer les actions entre elles de manière à permettre au
lecteur de suivre l’intrigue et l’évolution psychologique des
personnages;
– donner un certain rythme au récit;
– remplir une fonction symbolique (exemple : une valeur
symbolique accordée à une époque, à une date, à une saison);
– devenir l’un des thèmes du roman.
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
La narration
• Faire établir par les élèves, en s’appuyant sur leurs expériences
et leurs connaissances, que, dans un roman comme dans un
conte et une nouvelle, l’histoire n’est pas racontée par un
auteur, mais par un personnage imaginaire qui fait aussi partie
de la fiction : le narrateur.
• À partir d’exemples ou d’une œuvre, et en s’appuyant toujours
sur les expériences et les connaissances des élèves, faire
dégager l’importance et le rôle de la narration dans un roman,
et, plus largement, dans un texte narratif.
On pourra, pour ce faire, s’appuyer sur l’encadré Éléments de
contenu notionnel : le narrateur et le point de vue de narration
selon le statut du narrateur présenté ci-après.
Proposer aux élèves de s’appuyer sur la fiche L’analyse du
roman : fiche sur la narration proposée ci-après.
• La narration : exemples d’activités possibles
remettre aux élèves des extraits de textes narratifs (récits
divers, contes, légendes, nouvelles, littéraires, romans, etc.)
et leur proposer de dégager le point de vue de narration dans
ces textes, en relevant les indices textuels pertinents; on
pourra aussi proposer aux élèves de regrouper ces textes en
fonction du point de vue de narration;
à partir d’un fait divers (texte où l’histoire est racontée selon
un point de vue de narration extérieur à l’histoire relatée) –
fait divers proposé aux élèves ou écrit par eux –, faire
procéder à une série de réécritures mettant en jeu un
changement du point de vue de narration :
– le narrateur raconte l’histoire qui lui est arrivée,
– le narrateur raconte l’histoire dans laquelle il joue un rôle
important,
– le narrateur raconte l’histoire dont il a été le témoin,
– le narrateur raconte l’histoire selon le point de vue d’un des
protagonistes de l’histoire (à choisir),
– le narrateur raconte l’histoire en empruntant successivement le point de vue de plusieurs personnages;
proposer
ces réécritures à des groupes différents
(individuellement d’abord, en triades ensuite), de manière à
pouvoir comparer les textes produits sous l’angle des
transformations linguistiques et discursives opérées et des
incidences sur le sens des textes;
etc.
Français langue première
67
40S : Littératures francophones
L’analyse d’un roman : fiche sur la narration
1. Le narrateur
• Qui est le narrateur? ________________________________
• Quel est son statut?
- narrateur participant :
à il raconte une histoire qui lui est arrivée †
à il raconte une histoire dans laquelle il joue un rôle important
†
à il raconte une histoire dont il n’a été que le témoin †
- narrateur externe :
à il raconte l'histoire comme un simple observateur †
à il raconte l'histoire selon le point de vue d'un personnage ou
d'un autre ou en empruntant successivement le point de
vue de plusieurs personnages †
2. Le point de vue de narration
• L’histoire est-elle racontée du point de vue
– d’un narrateur externe †
- d’un seul personnage † (lequel : ____________________ )
– de plus d’un personnage † (lesquels : ________________ )
– autre † (à préciser : ______________________________ )
• Y a-t-il des changements de points de vue? Si oui, quels
changements produisent-ils?
_________________________________________________
Pourquoi considérer la narration?
Animer une discussion, en sollicitant les expériences des élèves, sur
la pertinence d’un travail sur la narration dans un roman,
relativement à l’appréciation d’un roman.
Faire valoir l’incidence de la narration et, en particulier, le point de
vue de narration sur le sens de l’histoire : quel(s) éclairages(s)
veut-on proposer sur l’histoire racontée?
Que signifie le choix d’un point de vue de narration par rapport à
un autre?
Faire valoir que, plus fondamentalement, le choix d’un point de vue
de narration renvoie à une vision du monde.
68
Français langue première
40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
1. Le narrateur
•
Le narrateur est celui qui raconte l’histoire, c’est lui qui est le
maître d’œuvre du récit : il raconte les événements, décrit
les lieux et les personnages, etc.
•
Le narrateur est présent dans le récit : il est alors narrateur
participant
– il raconte une histoire qui lui est arrivée ou une histoire
dans laquelle il joue un rôle important,
– il raconte une histoire dont il n’a été que le témoin;
•
Le narrateur est absent du récit :
externe.
il est alors narrateur
2. Le point de vue de narration selon le statut du narrateur
statut du narrateur
narrateur participant :
fait partie du récit
personnage
principal
point de vue de
narration (position raconte
du narrateur face ce qui lui
à l’histoire
arrive
racontée)
Français langue première
narrateur externe :
ne fait pas partie du récit
personnage
secondaire
ou témoin
omniscient,
observateur et
neutre
aligné sur un ou
des personnages
raconte les
événements
dont il a été
témoin
raconte
l’histoire
comme un
simple
observateur :
les faits et
gestes des
personnages
sont alors
rapportés, mais
non leurs
émotions et
leurs idées
raconte les
événements
selon la manière
dont ils sont
perçus et vécus
par un
personnage ou
un autre, ou en
empruntant
successivement
le point de vue
de plusieurs
personnages
69
40S : Littératures francophones
…
Les thèmes
• Faire établir par les élèves, en s’appuyant sur leurs expériences
et leurs connaissances, qu’un roman, c’est beaucoup plus qu’une
intrigue. Découvrir les thèmes d’un roman, c’est en quelque
sorte trouver le fil conducteur qui relie entre eux les différents
éléments de l’œuvre romanesque. Alors que l’intrigue répond à
la question « qu’est-ce-que ce texte raconte? », les thèmes, eux,
répondent à la question « de quoi parle ce texte? ».
• Faire également établir qu’un thème, c’est une idée développée
dans le roman, c’est aussi une vision du monde.
• À partir d’exemples ou d’une œuvre, et en s’appuyant toujours
sur les expériences et les connaissances des élèves, faire
dégager les thèmes dans un roman et, plus largement, dans un
texte narratif.
On pourra, pour ce faire, s’appuyer sur l’encadré Éléments de
contenu notionnel : les thèmes dans un roman présenté ciaprès.
Proposer aux élèves de s’appuyer sur la fiche L’analyse du
roman : fiche sur les thèmes proposée ci-après.
• Les thèmes : exemples d’activités possibles :
lorsque les élèves, repartis en triades, dégagent les
principaux thèmes dans une œuvre, les inviter à noter les
indices sur lesquels ils s’appuient :
– les personnages :
· les valeurs qu’ils véhiculent,
· les rapports entretenus entre les personnages;
– les champs lexicaux;
– la récurrence de mots, de champs lexicaux, d’idées;
lors de la mise en commun, on insistera sur la nécessaire
mise en relation, pour dégager les thèmes, de ces divers
indices;
on pourra également faire dégager l’organisation des thèmes
(un thème central et des sous-thèmes, des thèmes
juxtaposés ou parallèles, des thèmes en opposition) et faire
commenter l’incidence des configurations thématiques sur le
sens de l’œuvre.
70
Français langue première
40S : Littératures francophones
L’analyse du roman : fiche sur les thèmes
1. Quels sont les principaux thèmes développés dans le roman?
___________________________________________________
2. Quel thème te paraît privilégié? Justifie ta réponse à partir
d’informations pertinentes tirées du texte.
___________________________________________________
3. Comment s’organisent les thèmes dans le roman?
† thème central et sous-thèmes
† thèmes en opposition
† thèmes parallèles ou juxtaposés
† autre (à préciser : _________________________________ )
4. Sur quels indices t’appuies-tu pour dégager les thèmes?
† les valeurs véhiculées par les personnages
† les champs lexicaux
† le retour fréquent d’un mot, d’une idée, d’un champ lexical,
d’une idée
† autre (à préciser : ________________________________ )
5. Les thèmes développés dans le roman permettent-ils de dégager
le sens global de l’œuvre? Justifie ta réponse à partir
d’informations pertinentes tirées du texte.
___________________________________________________
Pourquoi dégager les thèmes?
Animer une discussion, en sollicitant les expériences des élèves, sur
la pertinence d’un travail portant sur les thèmes dans un roman,
relativement à l’appréciation d’un roman.
Faire valoir que la thématique peut souvent constituer le fil
conducteur d’un roman. Cependant, pour qu’elle soit vraiment
signifiante, elle doit être mise en relation avec les autres
composantes romanesques, plus particulièrement avec les
personnages : leur comportement, leur vision du monde, leurs
valeurs, les mobiles profonds de leurs actions, etc.
Faire établir que les thèmes constituent un lieu d’adhésion ou de
distanciation par rapport au roman, de la part du lecteur : il est
donc fondamental que l’on puisse les dégager, les apprécier et se
situer face à la vision du monde qui s’en dégage.
Français langue première
71
40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
Les thèmes dans un roman
Les thèmes sont développés différemment d’un roman à l’autre.
Certains indices sont susceptibles d’être mis à profit pour les
dégager :
•
les valeurs véhiculées par les personnages :
– vérifier le rapport sujet/objet dans le schéma actanciel des
personnages;
– s’appuyer sur ce que l’approche symbolique des
personnages a permis de dégager;
•
les champs lexicaux et les réseaux de significations :
– dégager les champs lexicaux;
– rapprocher les champs lexicaux des uns des autres pour
reconstruire des réseaux de significations qui rendent
compte, non seulement de l’ensemble des thèmes, mais
aussi de la signification profonde du roman;
•
la récurrence :
– la récurrence, c’est le retour fréquent dans un roman, soit
d’un mot, soit d’un champ lexical, soit d’une idée; c’est
une sorte de répétition volontaire et systématisée;
– ce phénomène est relativement facile à observer et
constitue un très bon indice pour dégager les thèmes.
Dans un roman, les thèmes peuvent être organisés ou mis en
relation les uns avec les autres de différentes façons :
72
•
un thème central, qui se développe par le biais de sousthèmes qui constituent autant d’aspects du thème central;
•
des thèmes en opposition :
– c’est ce qui se produit, par exemple, lorsque deux
personnages véhiculent des valeurs qui s’opposent;
– ce type de configuration thématique peut constituer une
clé de lecture intéressante quant au sens du texte;
•
des thèmes parallèles ou juxtaposés :
– les thèmes peuvent être développés en parallèle;
cependant, leur mise en relation permet souvent de
dégager un niveau de signification important du texte.
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Vers une dynamique des composantes de l’univers narratif
• Proposer aux élèves, répartis en triades, d’élaborer une fiche
synthèse des composantes de l’univers narratif du genre de
celle proposée ci-après ou toute autre représentation visuelle
établissant la dynamique des composantes de l’univers narratif.
Cette fiche conduit les élèves à noter toute information
pertinente sous chacune des composantes retenues – intrigue,
personnages, cadre, narration, thèmes – ainsi qu’à établir
toute relation pertinente entre chacune des cinq composantes.
La fiche invite également les élèves à préciser la vision du
monde telle qu’elle se dégage, selon eux, du roman. Enfin, la
fiche contient une dernière catégorie qui conduit les élèves à
noter d’autres éléments qui contribuent au sens du roman.
Une mise en commun des différentes fiches complétées par les
groupes permet de comparer l’information notée sur les fiches,
ainsi que les relations établies; plus largement, c’est la
compréhension du texte – et ses multiples niveaux – qu’ont les
groupes qui est mise en parallèle et partagée.
On sollicitera la réaction (sentiments, émotions et opinions)
des élèves sur les thèmes, les valeurs, leur traitement ainsi que
sur la vision du monde présentée dans le roman; cette
réaction, qui sera justifiée par les éléments appropriés du
texte, pourra prendre des formes diverses : écriture d’un court
texte critique accompagnant le roman, panel simulant une
interaction entre deux critiques portant sur le discours une
appréciation différente, production d'une affiche, etc.
• Plus largement, proposer aux élèves de mettre en place des
« regards croisés » sur les textes narratifs (et poétiques);
exemples :
élaborer l’adaptation théâtrale d’une œuvre romanesque (ou
de certaines des ses parties), la monter et la jouer;
mettre en parallèle des œuvres romanesques (et/ou
poétiques) et des chansons portant sur un même thème;
comparer différentes versions d’une même œuvre, en
particulier élaborées à des époques différentes (exemples :
Cyrano de Bergerac (le texte original de Rostand et le film
mettant en vedette Gérard Depardieu), Robinson (le texte
original et la réécriture opérée par Michel Tournier), les
Misérables ou Notre Dame de Paris (les textes originaux et les
adaptations théâtrales et/ou cinématographiques), etc.
créer une bande dessinée, un vidéogramme, un romanphotos, etc., à partir d’une œuvre lue/étudiée;
etc.
Français langue première
73
40S : Littératures francophones
Fiche synthèse des composantes
de l’univers narratif
Intrigue
Personnages
Cadre
Narration
Thèmes
Vision du monde
Autres éléments qui contribuent au sens du roman
74
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
On trouvera d’autres exemples de travail pédagogique sur ces
composantes de l’univers narratif et leur dynamique dans les
ressources didactiques suivantes (voir références précises ci-après) :
Le roman
• Symphonie : le chapitre consacré au roman (une vingtaine
de romans – disponibles à la
DREF dans des trousses – sont
envisagés sous l'angle de
différentes composantes de
l'univers narratif)
• Équinoxe : la section « As-tu
lu? » du chapitre consacré au
roman propose des activités
relatives à diverses composantes de l'univers narratif, à
partir de 25 romans
• Bilans, Connaissances et activités : la section portant sur le
texte littéraire comprend six
unités consacrées, chacune, à
une composante différente de
l'univers narratif)
• En toutes lettres, Manuel,
Français 5e secondaire : le
module consacré au roman
(trois séquences du module
examinent certaines composantes de l'univers narratif)
• Répertoires, Manuel d'exploitation, Français 5e secondaire :
l'unité consacrée au roman
• En toutes lettres, La lecture du
roman, Guide d'exploitation,
Français 4e et 5e secondaire :
l'ouvrage propose un ensemble
d'activités portant sur quinze
romans
• Lecture active du récit littéraire, 3e, 4e et 5e secondaire :
chacun de ces trois ouvrages
propose des activités relatives
à une douzaine de romans
dans chaque cas
Français langue première
La nouvelle littéraire
• Solstice : le chapitre consacré à
la nouvelle littéraire
• Bilans, Connaissances et activités : la section portant sur le
texte littéraire comprend six
unités consacrées, chacune, à
une composante différente de
l'univers narratif
• Unités d'apprentissage, 4e
secondaire : le module consacré
à la nouvelle littéraire
• En toutes lettres, 4e secondaire :
le module consacré à la
nouvelle littéraire
• Signatures, Français 4e secondaire : le dossier consacré aux
« nouvelles du monde »
• Répertoires, Manuel d'exploitation, Français 4e secondaire :
l'unité consacrée à la nouvelle
• Repères, 4e : 22 nouvelles, 22
univers
75
40S : Littératures francophones
„ Exemples de manipulations de l'univers narratif
… réécrire un texte fictionnel en modifiant le point de vue de
narration : incidences sur les effets de sens
… écrire des suites à des nouvelles, à des contes, à des romans :
mise en oeuvre d'une pensée créative et respect des contraintes
d'un univers narratif
… écrire, dans les « interstices », d'un texte fictionnel, de courts
textes : dialogue entre personnages qui aurait pu avoir lieu, ajout
d'une péripétie, ajout d'un autre personnage secondaire, etc.
… transposer un univers narratif particulier dans un autre contexte
socioculturel et effectuer tous les ajustements nécessaires :
incidences sur les effets de sens
… transposer un univers narratif textuel sur un autre support :
scénario, vidéogramme, pièce de théâtre, etc., et effectuer tous
les ajustements nécessaires
… écrire, à partir d'un élément déclencheur (ex. : photo, image, publicité) présentant au moins un personnage, un court texte fictionnel
… etc.
„ Exemples de projets
Les exemples de projets qui suivent, d'ampleur variable, touchent à
l'instauration ou à l'amplification d'un climat de plaisir autour du
livre de fiction.
1. Promouvoir la lecture :
… réaliser une enquête ou un reportage audiovisuel sur la place
de la lecture à l'école, sur les lectures des élèves, en
particulier fictionnelles
… établir dans l'école une période statutaire de lecture à l'école
… exposer des livres lus et appréciés, en faire la promotion;
exposer les productions des élèves relatives à ces textes
… animer un club de lecture dans l'école
… animer « l'heure du conte » pour des élèves plus jeunes ou
des séances d'animation du livre
… monter une exposition reliée aux livres, un salon littéraire
… préparer un rallye littéraire, une émission de radio reliée aux livres
… publier une revue littéraire contenant des textes (choisis et
écrits) et des illustrations
… mettre sur pied un « lecturothon »
… préparer le portrait d'un auteur
… monter et animer un ensemble d'activités sur la lecture dans des
manifestations telles que la « Journée mondiale du livre et du
droit d'auteur » (7) ou la Semaine nationale de la francophonie
(7)
À l’instigation de l’Union internationale des éditeurs, l’UNESCO a décrété, en 1995, le 23 avril « Journée mondiale
du livre et du droit d’auteur », s’inspirant d’une tradition catalane qui invite la population à célébrer cette journée
en offrant un livre et une rose.
76
Français langue première
40S : Littératures francophones
2. Valoriser la richesse des genres littéraires :
2.1 Le roman
… écrire collectivement un roman d'aventure
… bâtir un canevas d'intrigue policière
… organiser une semaine de lecture portant sur la sciencefiction
… monter une exposition sur le fantastique
… scénariser un roman et en produire une version cinématographique
… etc.
2.2 Le conte et la légende
… réaliser un dossier sur les contes et les légendes d’une
région, d’un pays ou d’une civilisation
… organiser une « veillée de conteurs »
… publier un recueil de contes connus adaptés
… etc.
2.3 La nouvelle
… monter une sélection de nouvelles à l'intention de
l'ensemble des élèves de l'école
… réaliser un montage sonore ou un accompagnement visuel
d'une courte nouvelle
… etc.
2.4 La poésie et la chanson
… écrire et publier des poèmes
… assembler un recueil de poèmes et en assurer la diffusion
… organiser un événement-poésie
… réaliser un montage visuel pour présenter une(des)
chanson(s)
… composer une(des) chanson(s)
… etc.
2.5 Le théâtre et le monologue
… organiser une lecture publique d'extraits ou de courtes
pièces de théâtre
… imaginer la mise en scène d'une courte pièce de théâtre et
la présenter à des comédiens
… composer une pièce de théâtre, la mettre en scène et la
présenter
… etc.
Français langue première
77
40S : Littératures francophones
2.6 La bande dessinée
… réaliser une bande dessinée
… publier des listes critiques pour guider le choix de bandes
dessinées
… préparer un atelier d'initiation à la bande dessinée pour
des élèves de l'élémentaire
… etc.
2.7 La littérature populaire
… monter un dossier d'information et d'analyse sur les bestsellers
… réaliser un roman-photos
… écrire collectivement un livre-jeu (exemple : « Un livre
dont vous êtes le héros »)
3. Interagir avec les livres de fiction
3.1 Dramatiser à partir de livres de fiction
… lire à haute voix de façon expressive un extrait d'un livre
pour inciter à lire le livre
… réaliser le montage sonore d'un récit
… jouer une scène tirée d'un livre
… faire des improvisations à partir de livres
… transformer un récit en scénario de film
… réaliser un enregistrement vidéo à partir d'un récit
… etc.
3.2 Écrire à partir de livres de fiction
… écrire un texte dans le prolongement d'un livre
… adapter un récit à une autre époque ou à un autre milieu
socioculturel
… publier, lire ou mettre en scène des pastiches de textes
… etc.
3.3 Illustrer à partir de livres de fiction
… résumer un livre en images, composer la jaquette d'un
livre pour inciter à le lire, créer une affiche et des signets
pour en promouvoir la lecture
… intégrer des illustrations à un récit
… illustrer des personnages de livres : constituer un
dictionnaire illustré de personnages, préparer une galerie
de personnages pour une exposition, illustrer des
personnages en les caricaturant
… situer et illustrer les lieux d'un récit
… illustrer un récit en le transformant en bande dessinée, en
album illustré, en roman-photos, en diaporama
… etc.
78
Français langue première
40S : Littératures francophones
3.4 Informer à partir de livres de fiction
… rédiger un dépliant d'information qui aide à comprendre
les éléments historiques, géographiques ou culturels
d'un récit
… produire des capsules radiophoniques, des affiches ou
des pages publicitaires sur des thèmes traités dans des
récits
… monter un dossier d'information et d'analyse sur un sujet
ou un thème présent dans un récit
… etc.
3.5 Critiquer et commenter les livres de fiction
… exprimer son appréciation personnelle d'un livre : tenir un
carnet de notes personnelles sur ses lectures, monter un
fichier de lecture pour la bibliothèque de l'école
… publier des critiques de livres
… exprimer son point de vue sur des thèmes ou des valeurs
présents dans un livre
… comparer le livre à d'autres livres ou objets culturels :
écrire une critique comparée sur diverses formes ou
versions d'un même récit, pour présenter un ou des
éléments communs à plusieurs livres, pour débattre de
certaines valeurs présentées dans les livres
… etc.
D'autres exemples de projets sont proposés dans
Lire et aimer lire au secondaire - Fascicule 1. Projets et activités
de lecture (Ministère de l'Éducation du Québec et Éducation et
Formation professionnelle Manitoba, Bureau de l'éducation
française, 1988 et 1989).
Cet ouvrage présente, souvent en détail, des exemples de projets;
on s'y reportera avec grand profit.
Français langue première
79
40S : Littératures francophones
Ressources d'apprentissage possibles
Matériel didactique
- Symphonie (Beauchemin, 2000 : le chapitre consacré au roman);
l'ouvrage est accompagné d'un Guide d'utilisation
- Équinoxe (Beauchemin, 1998 : le chapitre consacré au roman);
l'ouvrage est accompagné d'un Guide d'utilisation et d'un Matériel
d'évaluation
- Solstice (Beauchemin, 1996 : le chapitre consacré à la nouvelle
littéraire); l’ouvrage est accompagné d’un Guide d’utilisation et d’un
Supplément au guide d’utilisation
- En toutes lettres, Manuel, Français 4e secondaire (Chenelière Éducation,
2001 : le module consacré à la nouvelle littéraire); l'ouvrage est
accompagné d'un Référentiel (Chenelière Éducation, 2000), qui contient
de nombreux articles sur les textes narratifs ainsi que de Documents
reproductibles et d’un Guide d’enseignement
- En toutes lettres, Manuel, Français, 5e secondaire (Chenelière
Éducation, 2001 : le module consacré au roman); l'ouvrage est
accompagné d'un Référentiel (Chenelière Éducation, 2000), qui contient
de nombreux articles sur les textes narratifs ainsi que de Documents
reproductibles et d’un Guide d’enseignement
- Signatures, Français 4e secondaire, Manuel de l’élève (ERPI, 2000 : le
dossier consacré aux « nouvelles du monde »); l’ouvrage va de pair
avec Signatures, Français 4e secondaire, Recueil de textes (ERPI, 2000 :
le dossier intitulé « Des nouvelles du monde ») et est accompagné d’un
Guide d’enseignement
- Bilans, Recueils de textes (Les Éditions CEC, 2001 : le chapitre consacré
au texte narratif); le recueil est accompagné d’un ouvrage
Connaissances et activités et d’un Guide d’enseignement
- Unités d’apprentissage, 4e secondaire (Les Éditions CEC, 2000 : l’unité
consacrée au texte narratif (la nouvelle littéraire)); l’ouvrage est
accompagné d’un recueil Textes 4e secondaire et d’un Guide
d’enseignement
- Repères 4e, Deuxième dossier « 22 nouvelles, 22 univers » (Centre
Éducatif et Culturel, 1986); l’ouvrage est accompagné d’un fascicule
intitulé Stratégies et d’un Guide pédagogique
- Répertoires, Français 5e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 : l’unité consacrée au
roman); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 5e secondaire,
Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 : l’unité
consacrée au roman et la synthèse consacrée au texte narratif) et est
accompagné d’un Guide d’enseignement
- Répertoires, Français 4e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 : l’unité consacrée à la
nouvelle); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 4e secondaire,
Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 : l’unité
consacrée à la nouvelle) et est accompagné d’un Guide d’enseignement
80
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les textes narratifs : pistes pour des choix de titres
- De la lecture à la culture. Le plaisir d'explorer la littérature au
secondaire. Bibliographie sélective commentée d'ouvrages de fiction
pour le secondaire (Services documentaires multimédia inc., 1995)
- Bibliographie annotée d'œuvres littéraires. Francophone 10 à 12
(Alberta Éducation/Direction de l'éducation française, 1997)
- Lire et aimer lire au secondaire - Fascicule 2. Bibliographie sélective
commentée de livres de fiction québécois et étrangers, suivie d'une
annexe (Ministère de l'Éducation du Québec et Éducation et
Formation professionnelle Manitoba/Bureau de l'éducation
française, 1988 et 1989)
La nouvelle littéraire : quelques autres ressources spécifiques
- recueil de nouvelles (par auteur, par pays/région, etc.)
- nouvelles incluses dans des anthologies de textes littéraires, dans
des ressources didactiques
- Unités d'apprentissage, 4e secondaire (Les Éditions CEC, 2000) :
dans la section « Littérature », l'unité intitulée « Lire un recueil de
nouvelles » propose des pistes de travail et des « suggestions de
lecture »; dans la section « Travaux pratiques », l'unité intitulée
« Écrire une nouvelle à la manière de… »
- 20 grands auteurs pour découvrir la nouvelle, Lecture guidée
(Modulo-Griffon, 1990)
- Le récit de fiction, 15 textes à découvrir (Modulo-Griffon, 1993)
- La nouvelle (Collection Séquences, Didier Hatier, 1994) : ce recueil
de textes va de pair avec un Vade-mecum du professeur de français
Le roman : quelques autres ressources spécifiques
- En toutes lettres, La lecture du roman, Guide d'exploitation,
Français 4e et 5e secondaire (Chenelière Éducation, 2001) :
l'ouvrage propose un ensemble d'activités, mises en œuvre sur
quinze titres de roman retenus et transférables à d'autres titres
- Lecture active du récit littéraire. Activités d'animation de la lecture
d'œuvres narratives (ERPI; un ouvrage pour 5e secondaire, 2001;
un ouvrage pour 4e secondaire, 2000; un ouvrage pour 3e
secondaire, 1999; chaque ouvrage est accompagné d'une disquette
qui contient les activités proposées) : chacun de ces trois ouvrages
propose des activités relatives à une douzaine de romans dans
chaque cas
- Symphonie (Beauchemin, 2000) : le chapitre consacré au roman
(une vingtaine de titres, disponibles à la DREF dans des trousses,
accompagnées de pistes de travail)
- Équinoxe (Beauchemin, 1998) : la section « As-tu? » du chapitre
consacré au roman propose vingt-cinq titres de roman et des pistes
de travail
.../...
Français langue première
81
40S : Littératures francophones
.../...
- Bilans, Connaissances et activités (Les Éditions CEC, 2001) : la
section intitulée « Lire un roman » propose un ensemble d'activités
diverses sur le roman ainsi des « suggestions de lecture »
- Unités d'apprentissage, 4e secondaire (Les Éditions CEC, 2000) :
dans la section « Littérature », les unités intitulées « Lire un roman
historique » et « Lire un roman contemporain » proposent des
pistes de travail et des « suggestions de lecture »
- La collection « Littératures et Cultures » (Beauchemin) propose un
ensemble de cinq romans, accompagnés chacun d'un fascicule
intitulé Itinéraires didactiques :
· Roman Gary/Émile Ajar (France), La vie devant soi (le roman a
fait l'objet d'une adaptation cinématographique);
· Jacques Savoie (Canada), Les portes tournantes (le roman a fait
l'objet d'une adaptation cinématographique);
· Pierre Billon (Canada), L'Enfant du cinquième Nord;
· Jacques Roumain (Haïti), Gouverneurs de la rosée;
· Maryse Condé (Antilles), Moi, Tituba sorcière…. Noire de Salem
Ouvrages de pédagogie et de référence
- Albert, M.-C. et Souchon, M. (2000). Les textes littéraires en classe
de langue. Paris : Hachette
- Biard, J. et Denis, F. (1993). Didactique du texte littéraire. Paris :
Nathan
- Giasson, J. (2000). Les textes littéraires à l'école. Montréal/Paris,
Chenelière Éducation (le chapitre 13, intitulé « la lecture
thématique », propose, entre autres, une section sur la nouvelle et
des exemples de projets)
- La lecture du roman. Une initiation (Modulo-Griffon, 1984)
- Comment écrire des histoires. Guide de l'explorateur (ModuloGriffon, 1986)
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 2 : Explorer l’univers poétique : quelques pistes
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Explorer divers aspects des textes poétiques francophones et,
plus largement, de la poésie;
ˆ Explorer diverses dimensions de l'univers poétique;
ˆ Contribuer à « démystifier » la poésie.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Exemples d'activités de mise en train
ˆ Exemples d'arrêts sur quelques poèmes : lecture, interprétation et
réaction critique
ˆ Exemples de projets
Ressources d'apprentissage possibles :
ˆ Matériel didactique
ˆ Recueil de poèmes
ˆ Ouvrages de pédagogie et de référence
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
„ Exemples d'activités de mise en train
…
…
Lecture de poèmes, écoute de poèmes mis en musique, écoute
de chansons (lecture et écoute commentées ou non)
Discussions, en petits groupes, sur des interprétations possibles
de poèmes
…
Discussions sur « la poésie », pour démystifier celle-ci, à partir
des questions suivantes :
• qui écrit de la poésie? à qui? pourquoi?
• où trouve-t-on de la poésie?
• quels sujets aborde-t-on en poésie?
• rapports poésie/chanson?
• comment définit-on la poésie?
• etc.
…
Partage d'expériences reliées à la poésie; exemples : lecture
et/ou écriture de poèmes, connaissance de l'univers poétique
(genres, poètes, composantes formelles, etc.), etc.
…
Présenter plusieurs images, une à la fois, aux élèves et mener une
discussion sur ce qu'ils voient dans l'image et les émotions qu'elle
suscite. Leur demander ensuite de choisir une des images et de
noter tous les mots auxquels elle fait penser. Demander alors aux
élèves d'en choisir quelques-uns et de composer, à partir de ces
mots, un poème qui représente ce que l'image suggère.
…
Valoriser les formes d’interprétation possibles d’un poème :
réaction verbale et/ou écrite, discussions, représentation
dramatique, musique, danse, etc.
…
Etc.
„ Exemples d'arrêts sur quelques poèmes : lecture, interprétation et réaction critique
84
…
Proposer aux élèves un corpus de poèmes variés; les inviter à
grouper les poèmes selon des critères à mettre en évidence
(exemples : thèmes, écriture, époque, mouvement littéraire, etc.)
…
Lecture et interprétation de poèmes centrés sur la structure du
poème et les effets de sens produits; réaction critique
…
Lecture et interprétation de poèmes centrés sur les images et les
effets de sens produits; réaction critique
…
Lecture et interprétation de poèmes centrés sur les figures de
style et les effets de sens produits; réaction critique
…
Lecture et interprétation de poèmes centrés sur les symboles et
les effets de sens produits; réaction critique
…
Lecture, écoute/visionnement et interprétation de poèmes et de
chansons présentant un message social ou politique; réaction
critique
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
…
…
…
Lecture et interprétation de poèmes rassemblés autour d'un
thème, d'une époque, d'un mouvement littéraire, etc.; réaction
critique
Interprétation comparative d'un poème et de sa version mise en
musique/chantée; réaction critique
Interprétation comparative d’un(de) poème(s) et d’une(de)
chanson(s) abordant le même thème; réaction critique
Exemple d’une démarche générique de lecture d’un poème (une
telle démarche est d’autant plus productive qu’elle s’appuie sur des
lectures successives et récursives) :
1. Un premier survol d'ensemble du poème : premières
impressions?
2. Le titre : qu'évoque-t-il à la première lecture?
3. Lecture du poème, au besoin à plusieurs reprises,
lentement et à haute voix : premières impressions?
4. Les mots et les champs lexicaux : noter les connotations et les évocations.
5. Les figures de style : les dégager et noter les effets de
sens produits.
6. Les images : les dégager et noter les évocations.
7. Les thèmes : les dégager, préciser leur développement
et noter les évocations.
8. Les relations mots/figures de style/images/thèmes :
noter les relations et les effets de sens produits.
9. La structure de poème : noter toute observation sur les
éléments structurels du poème, y compris la syntaxe,
qui paraissent significatifs.
10. La musicalité : relire le poème à haute voix, noter les
endroits où l'on peut déceler une recherche particulière
sur le plan des sonorités et du rythme, et dégager
l'effet produit.
11. Le(s) message(s) du poème, les sentiments et les
émotions exprimés dans le poème : les dégager en
mettant en relation les observations notées ci-dessus
(des points 4 à 10).
12. Exprimer une réaction personnelle au poème et la
justifier à partir d'éléments pertinents tirés du texte.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
…
Exemple d’une grille de lecture générique d’un poème :
1. Identification et aspect formel du poème :
• titre :
• auteur :
• caractéristiques formelles (exemples : nombre de
strophes, présence ou non de rimes, vers libres ou
non, etc.) :
2. Thèmes du poème (identification et justifications) :
3. Structure du poème (exemples : parties que l'on peut
mettre en évidence, reprise de certains vers, etc.) :
4. Champs lexicaux
évocations) :
(identification,
exemples
et
5. Figures de style (identification, exemples et évocations) :
6. Images (identification, exemples, procédés de création
et évocations produites) :
7. Sentiments et émotions exprimés dans le poème
(identification et exemples) :
8. Sentiments et émotions ressentis à la lecture du poème
(identification et justifications) :
9. Réactions au(x) message(s) du poème (justifications) :
10. Rapprochement avec d'autres poèmes, d'autres textes
non poétiques, des chansons, etc. (justifications des
rapprochements établis) :
11. Autres points (à préciser) :
…
86
Etc.
Français langue première
40S : Littératures francophones
„ Exemples de projets
… Des textes poétiques aux élèves :
• lecture et interprétation, en dyades ou triades, de poèmes;
réaction critique : message, forme, mouvement littéraire, etc.
• un poète, des textes : un auteur, une écriture et un contexte
socioculturel
• des poètes d’une époque : rapprochements et « voix »
particulières
• les textes poétiques dans les recueils de textes poétiques, dans
les anthologies : une analyse critique
• les poètes dans les recueils de textes poétiques, dans les
anthologies : une analyse critique
• la « poésie féminine » : auteures et textes
• la poésie engagée : auteures, auteurs et textes
• des textes poétiques chantés : exemples et effets produits
• l'écriture poétique au fil des siècles : une évolution
• etc.
… Des élèves aux textes poétiques :
• établir des correspondances : un(des) texte(s) poétique(s) et
une(des) musique(s) choisie(s) ou composée(s), un(des) textes(s)
poétique(s) et une(des) image(s) choisie(s) ou composée(s),
un(des) texte(s) poétique(s) avec un(d') autre(s) texte(s), etc.
• mettre en scène des textes poétiques : lecture expressive ou
récitation accompagnée de musique, de mime, etc.
• grouper, autour d'une pertinence à définir, des poèmes et
composer, à partir de ce groupement, un collage qui illustrerait
les relations entre les poèmes
• composer un collage à partir de poèmes choisis (au hasard,
groupés thématiquement, présentant une parenté formelle, etc.)
• écrire des textes poétiques; exemples :
écrire un haïku : poème de 17 syllabes en trois vers (5-7-5)
d'origine japonaise, le haïku capte un détail de la vie
quotidienne : concret, visuel, il traduit brièvement en mots une
image (on pourra proposer aux élèves une image, une
illustration ou une photo pour déclencher l'écriture)(1);
écrire des poèmes où les élèves réinvestissent les éléments
dégagés lors de la lecture de poèmes, où ils « trouvent leur
propre voix » et présentent leur vision du monde; rassembler
ces poèmes en un recueil qui pourrait être illustré(2); le
lancement de ce recueil pourrait se faire lors d'un événementpoésie, où les élèves liraient, avec un support musical
approprié qu'ils auraient choisi, quelques poèmes;
etc.
(1)
(2)
On trouvera des exemples de haïkus, entre autres, dans Intermèdes (Beauchemin, 1997, p. 237) ainsi que dans
En toutes lettres, Référentiel, Français 4e et 5e secondaire (Chenelière Éducation, 2000, p. 185-186).
On trouvera des exemples développés d'un tel projet dans le Module 4 « Le texte poétique : le chant des mots »
dans En toutes lettres, Manuel, Français 4e secondaire (Chenelière Éducation, 2001) ainsi que dans l’ouvrage Le
français en projets (Chenelière Éducation, 1998 : projets « Un recueil de poèmes » et « Un récital de poésie »).
Français langue première
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40S : Littératures francophones
• jouer avec les mots et dégager les effets de sens produits;
exemples :
composer, pour des mots croisés, des définitions de mots qui
privilégient les connotations, le sens figuré et les associations;
composer de courts textes qui présentent des contraintes
formelles, telles que la présence obligatoire de certains sons ou
l’absence obligatoire de certaines lettres;
composer des palindromes (exemples de mots : kayak, Laval,
été, ici, alla, ressasser; exemples de phrases : Karine alla en
kayak, à Laval elle l’avala, engage le jeu que je le gagne, la
malade pédala mal);
composer des rébus, des phrases écrites selon la technique du
« cadavre exquis »;
composer des mots-valises, les rassembler en un dictionnaire
(pour un exemple, voir Finkielkraut, A. (1979). Ralentir : motsvalises! Paris : Seuil);
composer de courts textes contenant certaines figures de style
spécifiques (voir ci-après l’encadré Éléments de contenu
notionnel : le discours poétique : quelques figures de style);
réécrire des textes en modifiant le registre de langue initial;
composer de courts textes mettant en scène des quiproquos
ayant leur origine dans des ambiguïtés sémantiques;
composer des slogans publicitaires (pour des produits ou des
services existants ou à inventer) mettant en jeu des procédés
de création lexicale et/ou des expressions idiomatiques;
composer des textes qui sont des pastiches et/ou des parodies
de textes originaux;
Arrêt sur Exercices de style :
- dans ce livre, publié une première fois en 1947, Raymond
Queneau propose une suite de courts textes qui sont autant
de façons différentes de rapporter une même histoire : un
incident dans un autobus à midi. Ces variations résultent de
transformations opérées sur le fait divers initial : modification de certains temps verbaux, de certains types de
phrase, du registre de langue, du point de vue de narration,
du vocabulaire, etc., bref, au total, 99 variations!
- lectures d’Exercices de style : lecture à haute voix de
certains textes, dramatisation, mise en scène; discussion
sur les effets de sens produits;
- trouver (ou inventer) des faits divers et, sur le modèle
d’Exercices de style, transformer un fait divers en variant le
style; par exemple, le réécrire dans des formes telles que
rap, texte publicitaire, règles d’un jeu, énigme, déclaration
d’amour, petite annonce, interrogatoire, conte ou poème.
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40S : Littératures francophones
• recueillir des poèmes autour d'un axe les rassemblant : un thème,
un poète, une époque, un mouvement littéraire, etc.; ajouter à cet
ensemble de poèmes un poème écrit par l'élève et/ou une préface,
écrite par l'élève également, explicitant le choix et l'ordre des
poèmes retenus; présenter les poèmes; lire certains d'entre eux;
partager les réactions suscitées par ces poèmes;
• mettre en images et en musique un ensemble de poèmes choisis;
• mettre sur pied des « événements-poésie » à des moments
appropriés qui pourraient regrouper une large gamme
d'activités et des projets liés à la poésie; exemples de tels
événements : salon de poésie, boîte à chansons, semaine de la
francophonie, etc.
• inscrire la production de textes poétiques dans des circuits de
communication; pour un exemple, voir le site Web :
http://www.poesie-en-liberte.org
Propos sur la poésie
Nous savons que ce mot a deux sens, c’est-à-dire deux
fonctions bien distinctes. Il désigne d’abord un certain genre
d’émotions, un état émotif particulier, qui peut être provoqué
par des objets ou des circonstances très diverses. Nous
disons d’un paysage qu’il est poétique; nous le disons d’une
circonstance de la vie; nous le disons parfois d’une personne.
Mais il existe une seconde acception de ce terme, un second
sens plus étroit. Poésie, en ce sens, nous fait songer à un art,
à une étrange industrie dont l’objet est de reconstituer cette
émotion que désigne le premier sens du mot.
Restituer l’émotion poétique à volonté [...] au moyen des
artifices du langage, tel est le dessein du poète, et telle est
l’idée attachée au nom de poésie, pris dans le second sens.
Entre ces deux notions existent les mêmes relations et les
mêmes différences que celles qui se trouvent entre le parfum
d’une fleur et l’opération du chimiste qui s’applique à le
reconstruire de toutes pièces.
Extrait de Paul Valéry,
« Théorie poétique et esthétique », Variété,
© Éditions Gallimard, 1927.
(cité dans Bilans, Recueils de textes, Les Éditions CEC, 2001,
p. 139)
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Éléments de contenu notionnel
Le discours poétique : quelques figures de style
La brève synthèse qui suit(3) présente, regroupées selon l'effet de sens produit,
quelques figures de style « à effets stylistiques »(4), accompagnées d'un exemple.
1.
Expression de caractères communs à deux réalités
• sans changement de sens
- comparaison
Des divans profonds comme des tombeaux
- analogie
Un repas sans vin, c’est une journée sans soleil
• avec changement de sens
- métaphore
Bronzton, les verres fumés de la peau
- personnification
La lumière regarde et le silence écoute
2. Expression d'un rapport habituel entre deux réalités
- métonymie
Je t’invite à boire un verre
- synecdoque
Cette personne n’a pas mis le nez dehors
durant tout l’hiver
3. Expression d'une propriété de la réalité plutôt que son nom
- périphrase
« C’était l’heure tranquille où les lions vont boire »
(V. Hugo, désignant « le soir »)
- antonomase
Ce lutteur est un hercule
4. Actualisation simultanée de deux significations
- double sens
Molson Dry, le goût du changement
- allusion
Voilà un temps de pluie qui nous porte à chanter
5. Feintes
- hyperbole (exagération)
- euphémisme
- litote
Ce film est sublime et époustouflant
C’est une personne d’un certain âge
Ce n’est pas une réussite (= c’est un véritable fiasco)
6. Association d'idées par opposition
- antithèse (opposition)
Un quart Perrier, tout pour la soif, rien pour les
calories
- paradoxe
Je ne sais rien, mais je dirai tout
7. Associations de mots impertinentes
- oxymore (ou oxymoron) Se hâter lentement, se faire douce violence,
un silence éloquent
8. Répétitions
• de sens
- allitération
- assonance
• de mots, d'idées
Drôle de drame
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
9. Addition
- énumération, accumulation
À ces figures de style « à effets stylistiques » peuvent s'ajouter des « figures
ludiques »(5), telles que
- calembour
Demain, la faim du monde
- contrepèterie
Un vieillard en or avec une montre en deuil
- mot-valise
L’électrifficacité
- création individuelle
Les libère-lunchs.
(3)
(4)
(5)
Cette brève synthèse s’appuie sur des informations présentées sur le sujet dans Arcand, R. (1991). Figures et
jeux de mots. Modulo-Griffon; cet ouvrage présente un inventaire des figures de style, accompagné d’exemples
et d’explications.
Ibid., p. 102.
Ibid., p. 308
90
Français langue première
40S : Littératures francophones
Ressources d'apprentissage possibles
Matériel didactique
- Intermède (Beauchemin, 1997 : l'unité intitulée « La poésie »);
l'ouvrage est accompagné d'un Guide d'utilisation et d'un Matériel
d'évaluation
- Symphonie (Beauchemin, 2000 : le chapitre consacré à la poésie);
l'ouvrage est accompagné d'un Guide d'utilisation
- En toutes lettres, Manuel, Français 4e secondaire (Chenelière
Éducation, 2001 : le module 4 intitulé « Le texte poétique : le chant
des mots »); l'ouvrage est accompagné d'un Référentiel
(Chenelière Éducation, 2000), qui contient de nombreux articles sur
la poésie ainsi que de Documents reproductibles et d’un Guide
d’enseignement
- En toutes lettres, Manuel, Français, 5e secondaire (Chenelière
Éducation, 2001 : le module 4 intitulé « Le langage poétique »);
l'ouvrage est accompagné d'un Référentiel (Chenelière Éducation,
2000), qui contient de nombreux articles sur la poésie ainsi que de
Documents reproductibles et d’un Guide d’enseignement
- Signatures, Français 4e secondaire, Manuel de l’élève (ERPI, 2000 :
le dossier consacré aux textes poétiques); l’ouvrage va de pair
avec Signatures, Français 4e secondaire, Recueil de textes (ERPI,
2000 : le dossier consacré aux textes poétiques) et est
accompagné d’un Guide d’enseignement
- Bilans, Recueils de textes (Les Éditions CEC, 2001 : le chapitre
intitulé « Le texte poétique » qui présente des textes marquants
de poètes français et québécois); le recueil est accompagné d’un
ouvrage Connaissances et activités et d’un Guide d’enseignement
- Unités d’apprentissage, 4e secondaire (Les Éditions CEC, 2000 : l’unité
consacrée au texte poétique ainsi que l’unité intitulée « Changer le
monde (Écrire un texte poétique engagé) » dans la section « Travaux
pratiques »); l’ouvrage est accompagné d’un recueil Textes 4e
secondaire et d’un Guide d’enseignement
- Le texte poétique, Français 3e secondaire, Manuel d'apprentissage
(Les Éditions du CEC, inc., 1999); l’ouvrage va de pair avec le
recueil de textes Corpus, Français 3e secondaire (Les Éditions du
CEC, 1999 : le chapitre intitulé « La société des poètes disparus »)
et est accompagné d’un Guide d’enseignement
- Perspective 5e, Images et mots. Stratégies (Centre Éducatif et
Culturel, 1990); l'ouvrage est accompagné d'un Dossier et d'un
Guide pédagogique
- Répertoires, Français 5e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 : l’unité consacrée à
la poésie); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 5e
secondaire, Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 :
l’unité consacrée à la poésie et la synthèse consacrée au texte
poétique) et est accompagné d’un Guide d’enseignement
.../...
Français langue première
91
40S : Littératures francophones
.../...
- Répertoires, Français 4e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 : l’unité consacrée à
la poésie); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 4e
secondaire, Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 :
l’unité consacrée à la poésie) et est accompagné d’un Guide
d’enseignement
- Sans frontières, 11e année, Français cours préuniversitaire (Centre
franco-ontarien de ressources pédagogiques, 2001 : l’unité
consacrée au texte poétique); l’ouvrage est accompagné d’une
vidéocassette intitulée Poetica et d’un guide pédagogique
- Le français en projets, Activités d’écriture et de communication
orale (Chenelière Éducation, 1998)
- L’ensemble Petite fabrique de littérature : le tome 1 intitulé De littérature
en littérature (Magnard, 1986); le tome 2 intitulé Lettres en folie
(Magnard, 1999); le tome 3 intitulé Les petits papiers (Magnard, 2003)
- Vermeersch, G. (2002). La petite fabrique d’écriture (Magnard)
Recueil de poèmes
- Recueil de poèmes par époque, par mouvement littéraire, par
pays/région, par thèmes, etc.
- Poèmes inclus dans des anthologies de textes littéraires
- Dionne, R. (1999, 2e éd.). Anthologie de la poésie franco-ontarienne,
des origines à nos jours. Sudbury : Les Éditions Prise de parole
- Léveillé, J. R. (1990). Anthologie de la poésie franco-manitobaine.
Saint-Boniface : Les Éditions du Blé
- Mailhot, L. et Nepven P. (1996). La poésie québécoise, des origines
à nos jours. Anthologie. Montréal : Éditions TYPO
- Voir également le site Web (parmi bien d’autres) :
http://www.poesie.webnet.fr/, qui présente, entre autres, plus de
6000 poèmes de langue française
Ouvrages de pédagogie et de référence
- Albert, M.-C. et Souchon, M. (2000). Les textes littéraires en classe de
langue. Paris : Hachette (l’ouvrage présente quelques considérations
relatives au travail pédagogique sur les textes poétiques)
- Roy, B. (1988). Imaginer pour écrire. Ateliers d'écriture et
enseignement de la poésie. Montréal : VLB éditeur
- Giasson, J. (2000). Les textes littéraires à l’école. Montréal/Paris :
Chenelière Éducation (l’ouvrage et surtout destiné à l’enseignement
primaire mais propose des considérations générales applicables au
cycle secondaire)
- Arcand, R. (1991). Figures et jeux de mots. (Modulo-Griffon;
l’ouvrage est accompagné d'un Cahier d'exercices)
- Dictionnaire des symboles (mythes, rêves, coutumes, gestes,
formes, figures, couleurs, nombres) (Robert Laffont/Jupiter,
Collection « Bouquins », 1982)
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 3 : Lire un roman avec toutes ses intelligences
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Valoriser les différents styles d'apprentissage des élèves par
l'intermédiaire de l'étude d'un roman;
ˆ Permettre à l'élève de mettre en œuvre des activités de création
associées à un texte qui sont influencées par son inventaire
d'intelligences;
ˆ Sensibiliser l'élève aux dynamiques d'apprentissage des autres.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Préprojet
ˆ Projet
ˆ Postprojet
Ressources d’apprentissage possibles
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
Puisque les élèves se regrouperont suite à un inventaire d'intelligences,
il serait utile que la classe entière travaille sur le même roman. L'étude
du roman peut se faire de façon plus ou moins autonome selon la
dynamique du groupe d'élèves.
Le projet proprement dit se déroule en trois volets : d'abord, les élèves
établissent un inventaire d'intelligences; ensuite, ils font l'étude du
roman et, enfin, ils réalisent des activités reliées au roman visant des
intelligences différentes.
„ Préprojet
…
…
…
…
…
Animer une discussion au cours de laquelle les élèves tentent de
trouver une définition de l'intelligence.
Présenter la définition de l'intelligence selon Gardner (pour des
définitions, voir les ouvrages Les intelligences multiples dans
votre classe ou Les intelligences multiples, guide pratique parus
chez Chenelière-Éducation)
Inviter les élèves à déterminer leur inventaire d'intelligences (voir
l'outil « Sept personnes qui te ressemblent… » disponible à l'adresse
électronique suivante : « http://acelf.ca/revue/xxv2/articles/r25202.html »)
Inviter les élèves à se regrouper avec deux élèves qui ont des
inventaires différents des leurs : comparer les inventaires et
discuter des avantages de faire l'étude d'un roman en utilisant
les intelligences multiples.
Présenter le roman à l'étude dans son contexte socioculturel et
historique.
„ Projet
…
Étude du roman dirigée par l'enseignant
• Inviter les élèves à se rassembler selon les groupes qu'ils ont
établis dans la phase de préprojet et à analyser un aspect du
roman (ex. : intrigue, personnages, cadre, thèmes, valeurs).
• Inviter les élèves à faire une réflexion dans leur journal de bord
après chaque rencontre de groupe. Les entrées de ce journal
pourront servir de support pour des dialogues entre les élèves et
l'enseignant, entre les élèves eux-mêmes.
94
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Étude du roman dirigée par les élèves
• Inviter les élèves à se regrouper selon les groupes qu'ils ont
établis dans la phase de préprojet. Établir les dates où les
groupes vont se réunir et le nombre de rencontres. Inviter les
élèves à gérer leur étude du roman de façon à pouvoir terminer
la lecture du roman à une date précise.
• Lors de chaque rencontre, les élèves analyseront un aspect du
roman (ex. : intrigue, personnages, cadre, thèmes, valeurs).
Ils gèreront également la discussion.
• Inviter les élèves, après la discussion de groupe, à y réagir
dans un journal de bord. Les entrées de ce journal pourront
servir de support pour des dialogues entre les élèves et
l'enseignant, entre les élèves eux-mêmes.
…
Les élèves créent ensemble, pour un roman, des activités qui
conduisent à un questionnement plus approfondi sur le roman et
développent la pensée critique. Chaque groupe doit inclure deux
activités qui visent deux types d'intelligence différents. Les
élèves, peu importe la modalité de l'étude du roman, gèrent le
projet de façon autonome.
…
Les groupes font part à l'enseignant de l’avancée de leur projet
par le biais d'un dossier qui contient l'ordre du jour de chaque
rencontre et le procès-verbal (voir ci-après le matériel destiné à
l'élève) et qui est à rendre après chaque rencontre.
…
Les groupes développent deux activités par groupe, visant deux
intelligences différentes. Pour ce faire, ils
• identifient les intelligences choisies,
• expliquent les activités (objectif et déroulement),
• développent un processus d'évaluation des activités, à partir
de critères qu'ils construisent,
• créent le produit qui pourrait découler de chaque activité.
…
Mettre en place un partage des projets sous la forme de
présentations formelles, de galeries de projets ou d'une table
ronde. S'assurer que les différentes intelligences ainsi que les
activités elles-mêmes et leur produit sont bien mises en
évidence. Inviter les élèves à expliquer les raisons pour
lesquelles ils ont créé l'activité et les habiletés visées par celle-ci.
Susciter des réactions aux projets présentés.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
„ Postprojet
96
…
Animer une discussion sur les intelligences multiples et la
pertinence d'exploiter un roman ou une pièce de théâtre selon
cette perspective.
…
Animer une discussion sur les intelligences qui sont valorisées
dans notre société (et dans d'autres).
…
Inviter les élèves à faire une réflexion, dans leur journal de bord,
sur le projet et le travail effectué dans le cadre de ce projet (voir
ci-après un exemple d'une échelle d'appréciation d'un journal de
bord).
Français langue première
40S : Littératures francophones
Matériel destiné à l'élève
L'ordre du jour : sujets à discuter au cours de la rencontre.
Exemple d'un ordre du jour :
Date :
1. Discussion d'un aspect du roman (à expliciter).
2. Discussion d'un projet possible.
3. Discussion d'une question pour le journal.
4. Discussion de la lecture à faire d'ici la prochaine
rencontre.
5. Rédaction du procès-verbal (responsable et
responsable de la prochaine rencontre).
6. Écriture dans le journal.
Le procès-verbal : un compte rendu de ce qui a été dit et fait au cours
d'une rencontre.
Exemple d'un procès verbal :
Date :
Personnes présentes :
Personnes absentes :
1. Nous avons discuté de...
2. Nous pensons faire un projet de type...
3. Nous avons décidé d'écrire au sujet de... dans
notre journal de bord
4. Nous avons décidé de lire jusqu'à la fin du
chapitre x d'ici la rencontre du x avril
5. Le prochain procès-verbal sera rédigé par...
6. Nous avons eu le temps d'écrire x minutes dans
nos journaux et x minutes pour lire.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Échelle d'appréciation d'un journal de bord : un exemple
Appréciation
Descripteurs de la performance de l'élève
exceptionnel
- fait une réflexion profonde sur la question de discussion en faisant
référence à de nombreux aspects du roman.
- justifie ses idées en donnant des citations ou faisant des
références précises au texte, qui démontrent une compréhension
fine et une capacité de faire des inférences
- répond de façon approfondie aux commentaires de ses
coéquipiers ou de l'enseignant et amplifie ceux-ci
- fait des prédictions sur la suite de l'intrigue en faisant référence à
des aspects précis de ce qu'il a lu
bon
- fait une réflexion sur la question de discussion en faisant
référence à quelques aspects du roman
- justifie ses idées en donnant des citations ou faisant des
références au texte qui sont plutôt générales que précises, qui
démontrent une bonne compréhension du texte et une capacité
de faire quelques références
- répond aux commentaires de ses coéquipiers ou de l'enseignant
et ajoute un ou deux commentaires
- fait quelques prédictions sur la suite de l'intrigue mais les
références au texte sont plutôt générales que précises
satisfaisant
- répond à la question de discussion de façon générale en faisant
quelquefois référence au texte
- justifie ses idées en faisant référence au texte ou en donnant des
citations, mais celles-ci ne sont par toujours pertinentes
- répond aux commentaires de ses coéquipiers ou de l'enseignant
- fait quelques prédictions sur la suite de l'intrigue sans toutefois
pouvoir justifier son raisonnement
rudimentaire
- tente de répondre à la question mais sa compréhension du texte
est trop limitée pour pouvoir approfondir ses réactions
- donne des impressions générales plutôt que des idées précises,
est incapable de trouver des exemples du texte pour se justifier
- ne répond pas aux commentaires de ses coéquipiers ou de
l'enseignant
- est incapable de faire des prédictions sur la suite de l'intrigue
incomplet
- inachevé, donne peu d'indications qu'il a compris le roman, trop
court
Je pense que mon journal se situe au niveau _____________________
parce que ________________________________________________
________________________________________________________
________________________________________________________
Appréciation de l'enseignant : ________________________________
________________________________________________________
________________________________________________________
________________________________________________________
98
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 4 : Les littératures francophones d’ici et d’ailleurs
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Valoriser la production littéraire des communautés francophones
minoritaires du Canada;
ˆ Valoriser la production littéraire de l’espace francophone
international;
ˆ Valoriser la pluralité des « voix » au sein de l’espace
francophone, en particulier sous l’angle de la diversité culturelle;
ˆ Valoriser, par le biais de la lecture de textes littéraires
francophones d’ici et d’ailleurs, des valeurs communes à la
francophonie telles que l’affirmation identitaire, le respect des
différences et le pluralisme.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Les littératures des communautés francophones minoritaires du Canada
• Activités préprojet
• Projet
• Activités postprojet
ˆ Les littératures de l’espace francophone international
• Activités préprojet
• Projet
• Activités postprojet
Ressources d'apprentissage possibles
Français langue première
99
40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
Les littératures des communautés francophones
minoritaires du Canada
„ Activités préprojet
…
Animer une discussion sur la communauté franco-manitobaine
et, plus largement, les communautés francophones minoritaires
du Canada : histoire, enjeux du présent, vision pour l’avenir,
vitalité ethnolinguistique, production culturelle, stratégies de
développement, etc.
…
Centrer la discussion sur la production littéraire au sein de ces
communautés : auteurs, maisons d’édition, thèmes, écritures,
etc.
„ Projet
100
…
Distribuer aux élèves, répartis en petits groupes, des textes ou
des extraits des textes présentés dans le film Le Blé et la plume.
…
Demander aux élèves de faire une présentation du texte ou de
l’extrait en faisant ressortir, le cas échéant, la dynamique des
composantes de l'univers narratif ou poétique, en dégageant les
valeurs véhiculées par le texte et la vision du monde présentée,
en exprimant leur réaction au texte et en établissant des liens
entre leur univers et celui de l'auteur et d'autres textes du même
auteur ou d'autres productions littéraires ou artistiques de
l'époque.
…
Organiser des sessions plénières au cours desquelles les élèves
auraient l'occasion de présenter les textes et leurs auteurs.
…
Visionner le film Le Blé et la plume; susciter des réactions
diverses; faire ressortir la vision de la production littéraire qui
s'en dégage, les images qui en ressortent.
…
Demander aux élèves de faire une critique du film, à partir des
textes ou des extraits qu'ils ont lus, du choix d'images faits par
la réalisatrice et de tout élément du film jugé pertinent.
…
Explorer la production littéraire franco-manitobaine : maisons
d'édition (les Éditions du Blé, les Éditions des Plaines - voir
l'édition annuelle de l'Annuaire des services en français au
Manitoba), auteurs, textes publiés (genres, lieux de publication,
etc.), critique universitaire, lectorat, manifestation (ex. :
Festival des écrivains en septembre); inviter des personnes
impliquées à des titres divers dans la production littéraire
franco-manitobaine.
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Explorer la production littéraire de l'Ouest canadien ou, plus
largement, du Canada francophone à l’extérieur du Québec (ex. :
Ontario, Acadie) : auteurs, préoccupations, ancrage géographicoculturel et/ou thèmes universels, etc.
…
Présenter le produit de ces explorations sous des formes telles
que film, représentation graphique (ex. : collage, dessin),
cédérom, site Web; partager ce produit en classe, à l'école, ou
lors d'un évènement conçu à cet effet. De manière plus large,
mettre sur pied toute initiative promotionnelle sur les littératures
des communautés francophones du Canada.
…
Demander aux élèves de faire leur propre évaluation à partir des
critères qui auront été dégagés, ainsi que et l'évaluation d'une
autre présentation; l'enseignant fera sa propre évaluation tout en
tenant compte de l'évaluation faite par les élèves.
„ Activités postprojet
…
Visionner d'autres productions artistiques consacrées à l'Ouest
canadien (ex. : la chanson de Daniel Lavoie Jours de plaine et le
vidéo qui en a été fait, disponible auprès de l'Office national du
film) et discuter de la vision qui s’en dégage.
…
Animer une discussion sur le rôle de la production littéraire quant
à la vitalité d'une minorité francophone.
„ Ressources d'apprentissage possibles
- Véron, L. (2000). Le Blé et la plume. Saint-Boniface : Maison de
distribution Source
En 1999, les Éditions du Blé, première maison d'édition
francophone à Saint-Boniface, célébraient leurs vingt-cing
ans. Cet anniversaire a inspiré le sujet de ce documentaire
qui rend hommage à la littérature franco-manitobaine : un
hommage aux mots et à ceux et celles qui les écrivent,
constitué d'une sélection d'extraits de textes et d'entrevues
d'auteurs . Le Blé et la plume est un film au style
impressionniste qui, en 27 minutes et à travers de courtes
séquences aux tons divers, crée des instants de poésie
visuelle et donne une nouvelle dimension aux mots.
- Léveillé, J.R. (1990). Anthologie de la poésie
manitobaine. Saint-Boniface : Les Éditions du Blé
franco-
- Sous les mâts des Prairies. Anthologie littéraire fransaskoise et
de l'Ouest canadien (2000). Regina : les Éditions de la nouvelle
plume
- Morcos, G. (1998). Dictionnaire des artistes et des auteurs
francophones de l'Ouest canadien. Sainte-Foy : Presses de
l'Université Laval
.../...
Français langue première
101
40S : Littératures francophones
.../...
- Les publications des maisons d’édition de l’Ouest canadien, telles
que les Éditions du Blé et les Éditions des Plaines du Manitoba ainsi
que des textes fictionnels publiés dans certains numéros de la
revue Cahiers franco-canadiens de l’Ouest
- Dionne, R. (1997). Anthologie de la littérature franco-ontarienne
des origines à nos jours. Sudbury : Éditions Prise de Parole
- Dionne, R. (1997). Histoire de la littérature franco-ontarienne des
origines à nos jours. Sudbury : Éditions Prise de Parole
- Dionne, R. (1999, 2e éd.). Anthologie de la poésie francoontarienne des origines à nos jours. Sudbury : Les Éditions Prise de
Parole
- Maillet, M. et al. (1979). Anthologies de textes littéraires acadiens
1606-1975. Moncton : les Éditions d’Acadie
- Textes d’auteurs des communautés francophones minoritaires du
Canada
Les littératures de l’espace francophone international
« On n'habite pas un pays, on habite une langue » (E. Cioran, Aveux
et Anathèmes, Paris : Gallimard)
„ Activités préprojet
…
Animer une discussion sur l’espace francophone international;
localisation géographique, démographie, unité linguistique et
diversité culturelle, considérations politiques, économiques et
culturelles, etc.
…
Centrer la discussion sur la production littéraire au sein de
l’espace francophone international : auteurs, mouvements,
thèmes, écritures, etc.
„ Projet
102
…
Distribuer des textes d'auteurs de l’espace francophone
international ou donner des noms d'auteurs aux élèves qui
trouvent ensuite des textes de ces auteurs.
…
Demander aux élèves de présenter une courte biographie d'un
auteur et de situer cet auteur dans son contexte social, politique,
historique, géographique et littéraire.
…
Demander aux élèves de faire une présentation du texte ou d'un
extrait, en faisant ressortir, le cas échéant, la dynamique des
composantes de l'univers narratif ou poétique, en dégageant les
valeurs véhiculées par le texte et la vision du monde présentée,
en exprimant leur réaction au texte et en établissant des liens
Français langue première
40S : Littératures francophones
entre leur univers et celui de l’auteur et d'autres textes du même
auteur ou d'autres productions littéraires ou artistiques de l'époque.
…
Demander aux élèves de situer l'œuvre dans son contexte
littéraire (mouvement, genre, etc.) en expliquant la manière
selon laquelle l'œuvre reflète ou non les tendances, le style ou la
philosophie de ce contexte.
…
Demander aux élèves de préparer une fiche, destinée à être
distribuée aux autres élèves, qui résumerait les points principaux
de la présentation de l'auteur et de son œuvre.
…
Organiser des sessions plénières au cours desquelles les élèves
auraient l'occasion de présenter l'auteur qui leur a été attribué.
…
Demander aux élèves de faire leur propre évaluation à partir des
critères qui auront été dégagés, ainsi que l'évaluation d'une
autre présentation; l'enseignant fera sa propre évaluation tout en
tenant compte de l'évaluation faite par les élèves.
„ Activités postprojet
…
Demander aux élèves de créer une carte géographique des
auteurs étudiés avec une courte biographie de ceux-ci.
…
Demander aux élèves de créer une affiche consacrée à l'auteur
afin de la mettre à la bibliothèque.
Inviter les élèves à faire une lecture indépendante d'un auteur
présenté par un de leurs camarades de classe, en tenant un
journal de bord.
Inviter les élèves à monter une exposition ou un salon littéraire,
à créer un site Web ou à mettre sur pied toute autre initiative
promotionnelle sur des auteurs de l’espace francophone
international.
Animer une discussion sur l'intérêt, voire la pertinence, de lire
des textes d’auteurs de l’espace francophone international :
valeurs portées par la langue française, usage particulier du
français, thématiques abordées; rôle de la production littéraire
dans l’affirmation identitaire francophone.
…
…
…
„ Ressources d'apprentissage possibles
- Brahimi, D. (2001). Langue et littératures francophones. Paris :
Ellipses Édition Marketing; cet ouvrage de synthèse propose
une « histoire de la francophonie » et une « géographie des
littératures francophones »; il examine ensuite la
« problématique de la francophonie » sous quatre aspects : le
« français revendiqué », « le français contesté », « le français
modifié » et « le français menacé »; l'ouvrage présente enfin une
« thématique des littératures francophones : enfance,
autobiographie; double culture; couple mixte; misère, exclusion;
le passé et l'histoire; luttes et résistance; désenchantement; le
féminisme contre le patriarcat; réalisme ou poésie »
.../...
Français langue première
103
40S : Littératures francophones
.../...
- D'ailleurs… à ici. Anthologie de textes littéraires (1999). Ottawa :
Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques (les textes de
cette anthologie sont groupés autour de thèmes; l'ouvrage est
accompagné d'un Guide pédagogique)
- Les anthologies de la collection Littératures francophones, publiés
chez Nathan/Agence de coopération culturelle et technique :
• Littérature francophone. Anthologie (1992; l'ouvrage est
accompagné d'un Guide pédagogique)
• Littératures francophones de l'Océan Indien (1993)
• Littératures francophones du Monde Arabe (1994)
• Littératures francophones d'Afrique de l'Ouest (1994)
• Littératures francophones d'Afrique Centrale (1995)
• Littératures francophones d'Asie et du Pacifique (1997)
• Littératures francophones d'Europe (1997)
- Des ouvrages publiés chez Belin consacrés aux littératures
francophones (présentation des littératures et textes choisis) :
• La littérature européenne (1996)
• Littératures francophones. I. Le Maghreb (1996)
• Littératures francophones. II. Les Amériques (Haïti, Antilles Guyane, Québec) (1998)
• Littératures francophones. III. Afrique Noire, Océan Indien (1998)
- Deux ouvrages consacrés à la littérature francophone, publiés par
l’Agence universitaire de la francophonie et Hatier :
• Littérature francophone, 1. Le roman (1997)
• Littérature francophone, 2. Récits courts, poésie, théâtre (1999)
- Le dossier « Littératures de la francophonie » paru dans le
no 127/automne 2002 de la revue Québec français
- L'Alliance française du Manitoba (tel. : 477-1515) met à la
disposition des écoles/classes qui en font la demande une
exposition consacrée au thème suivant : « Littérature du Sud.
Nouvelle génération » (Afrique noire, Maghreb, Caraïbes, Océan
Indien) : un ensemble de 22 affiches, chacune consacrée à un
auteur différent
- un site Web, général sur la francophonie : www.francophonie.org
104
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 5 : L’œuvre littéraire féminine
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Mettre en valeur l’oeuvre littéraire féminine;
ˆ Mettre l’élève en contact avec une « voix » littéraire particulière,
voire différente, qui offre une vision du monde spécifique.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Activités préprojet
ˆ Projet
ˆ Activités postprojet
Ressources d'apprentissage possibles
Français langue première
105
40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
„ Activités préprojet
…
Animer une discussion sur l'image de la femme dans le passé et le
contraste que l'on peut en faire avec celle qui existe actuellement.
…
Utiliser des tableaux ayant comme sujet des femmes et
demander aux élèves de commenter le rôle de la femme dans la
société, dans la famille de l'époque.
…
Demander aux élèves de penser à des personnages féminins
qu'ils ont rencontrés au courant de leurs lectures et aux rôles
qu'ils avaient au sein de ces œuvres. Leur demander la
perception des personnages qu'ils dégagent de l'œuvre et la
perception des lecteurs à l'époque de la création de l'œuvre.
« Pourquoi la littérature des femmes reste-t-elle encore
aujourd'hui relativement inconnue? Pourquoi des textes
appréciés à leur époque sont-ils tombés dans l'oubli? À vrai
dire, les écrits féminins souffrent souvent des préjugés qui
nuisent aux femmes en général. (…) Dans le domaine
sociopolitique, la femme qui s'attaque aux structures officielles,
à dominance masculine, est considérée dangereuse,
subversive; au mieux, elle sera caricaturée comme George
Sand; au pire, guillotinée comme Olympe de Gouges. Dans un
tel contexte, comment s'étonner que l'Académie française,
fondée en 1635 pour réunir les meilleurs écrivains, n'ait pas élu
une seule femme avant 1980! »
Harvey et Gaboury-Diallo (1995). La littérature au féminin. p. vii
„ Projet
106
…
Distribuer des textes d'auteures féminines de toutes les époques
ou donner les noms des auteures aux élèves qui trouveront
ensuite des textes.
…
Demander aux élèves de présenter une courte biographie de
l'auteure en situant celle-ci dans son contexte social, politique,
historique, géographique et littéraire. Leur demander de
souligner les obstacles que l'auteure a dû surmonter, en
particulier face à la mentalité de l'époque.
…
Demander aux élèves de faire une présentation de l'extrait ou du
texte en faisant ressortir la dynamique des composantes de
l'univers narratif ou poétique, en dégageant les valeurs véhiculées
par le texte et la vision du monde présentée, en exprimant leur
réaction au texte et en établissant des liens entre leur univers et
celui de l'auteure et d'autres textes du même auteur ou d'autres
productions littéraires ou artistiques de l'époque.
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Demander aux élèves de situer l'œuvre dans son contexte littéraire
(mouvement, genre, etc.) en expliquant la manière selon laquelle
l'œuvre reflète ou non les tendances, le style ou la philosophie de
ce contexte. Leur demander de trouver le texte d'un auteur
masculin de la même époque ou du même mouvement et leur
demander de le comparer au texte qu'ils lisent.
…
Demander aux élèves de préparer une fiche, destinée à être
distribuée aux autres élèves, qui résumerait les points principaux
de la présentation de l'auteure et de son œuvre.
…
Organiser des sessions plénières au cours desquelles les élèves
auraient l'occasion de présenter l'auteure qui leur a été attribuée.
…
Demander aux élèves de faire leur propre évaluation à partir des
critères qui auront été dégagés, ainsi que l'évaluation d'une
autre présentation; l'enseignant fera sa propre évaluation tout en
tenant compte de l'évaluation faite par les élèves.
„ Activités postprojet
…
Demander aux élèves de faire une réflexion au sujet de la femme
auteure à partir de questions telles que :
• Comment la femme auteure est-elle influencée par la société
dans laquelle elle vit?
• Les auteurs masculins sont-ils influencés de la même manière?
• Choisissez une femme auteure. De quelle façon sa pensée
peut-elle être qualifiée de « féministe » à cette époque? Peutelle l'être à notre époque? Pourquoi?
…
Proposer aux élèves de reprendre un thème abordé dans un des
textes et rédiger leur propre texte exprimant leur vision et leurs
idées.
…
Demander aux élèves d'imaginer l'interview que l'auteure
donnerait si elle revenait à son époque.
…
Demander aux élèves de préparer des affiches biographiques des
auteures, destinées à la bibliothèque.
…
Tracer la figure de la femme dans certaines oeuvres, retracer son
évolution dans un corpus défini d’oeuvres.
„ Ressources d'apprentissage possibles
- Harvey, C. et Gaboury-Diallo, L. (1995). La littérature au
féminin. Laval : Mondia Éditeurs
- Makward, C.P. et Cottenet-Hage, M. (1996). Dictionnaire littéraire
des femmes de langue française. Paris : Karthala et ACCT
.../...
Français langue première
107
40S : Littératures francophones
.../...
- Deforges, R. (1993). Poèmes de femmes. Des origines à nos jours.
Anthologie. Paris : Le Cherche midi éditeur
- Brossard, N. et Girouard, L. (2003). Anthologie de la poésie des
femmes au Québec. Montréal : Les éditions du remue-ménage
- Duby, G. et Perrot, M. (1991) Histoire de femmes en Occident (les
volumes 2 (le Moyen Âge) à 5 (le XXe siècle) sont les plus pertinents
pour les fins de ce projet)
- Textes d'auteures intégrés dans des anthologies de textes
littéraires
108
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 6 : D’une œuvre à l’autre
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Permettre aux élèves de découvrir le rôle que joue l'interprétation
du texte dans l'adaptation de l'œuvre dans une autre forme, les
amener à reconnaître les caractéristiques de formes diverses
(littéraires ou autres ) et à comprendre non seulement les différences entre les formes mais les contraintes qui les régissent;
ˆ Donner aux élèves l'occasion de comprendre la relation qui
existe entre les techniques narratives et cinématographiques et
les choix qui s'imposent dans la traduction d'une œuvre littéraire
à l'écran;
ˆ Faire connaître la francophonie par l'intermédiaire des films.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Étape de comparaison entre une œuvre littéraire et son adaptation
cinématographique
ˆ Étape d'adaptation d'une œuvre littéraire
Ressources d’apprentissage possibles
Français langue première
109
40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
Ce projet se présente en deux étapes qui peuvent être exploitées
séparément ou l'une après l'autre. Mais les élèves gagneraient à faire
les deux étapes du projet, puisque les connaissances acquises dans la
première étape peuvent être réinvesties dans la seconde.
„ Étape de comparaison entre une œuvre littéraire et son
adaptation cinématographique
…
Animer une discussion sur des films qui ont été tournés à partir
d'œuvres littéraires ou de best-sellers. Demander aux élèves si le
texte a été changé ou si certaines parties de l'intrigue ont été
omises; faire des hypothèses sur les raisons pour lesquelles ces
changements ont eu lieu.
…
Animer une discussion sur le sujet suivant : existe-t-il des
romans qui seraient impossibles à adapter à l'écran? existe-t-il
des romans qu'il est préférable de ne pas voir en film?
…
Animer un débat sur la question suivante : Est-ce une erreur de
porter une œuvre littéraire à l'écran?
…
Sélectionner un extrait, long et significatif, d’un roman, d'une
pièce de théâtre ou d'une nouvelle qui corresponde à la séquence
présentée dans l'adaptation cinématographique de la même
œuvre.
Exemples d'œuvres littéraires qui ont fait l'objet d'une
adaptation cinématographique :
Cyrano de Bergerac, Les portes tournantes, Le matou, Jean de
Florette, Manon des Sources, L'avare, Les Misérables, Hiroshima
mon amour, Le vieillard et l'enfant, Notre-Dame de Paris,
Bonheur d'occasion, Kamouraska, Les fous de Bassan, Maria
Chapdelaine, Les filles de Caleb, Germinal, La vie devant soi,
Agaguk, Un homme et son péché, Le conte de Monte Cristo,
L'homme qui plantait des arbres.
Certains films existent en plusieurs versions; ainsi, il serait
intéressant non seulement de comparer le film à l'œuvre mais
les différents films entre eux (par exemple, analyser la version
de Disney de Notre-Dame de Paris ou comparer les diverses
versions des Misérables avec Les Misérables du XXe siècle).
…
110
Commenter, avec les élèves, des éléments de l'univers narratif
tels que intrigue, personnages, cadre spatiotemporel, point de
vue de narration, thèmes, valeurs.
Français langue première
40S : Littératures francophones
…
Inviter les élèves à discuter en petits groupes de l'adaptation
cinématographique qui pourrait être faite de cet extrait en
proposant des idées sur la manière selon laquelle un réalisateur
pourrait « traduire cinématographiquement » les divers éléments
de l'univers narratif. Inviter les élèves à porter un regard critique
sur les éléments qui seraient, à leur avis, plus ou moins difficiles
à transposer à l’écran.
…
Animer une discussion plénière où les élèves partagent le
résultat de leurs discussions.
…
Visionner la séquence filmée de l'extrait étudié. À partir des
différences ou des ressemblances entre l'extrait et son
adaptation cinématographique, inviter les élèves à noter les
types d'adaptation réalisés (ex. : économie de dialogue ou de
narration, images utilisées, caractérisation des personnages).
…
Variante : assigner à différents groupes d'élèves différents extraits
d'une adaptation cinématographique d'une œuvre littéraire, faire
le travail de comparaison tel que présenté ci-dessus et partager
les analyses, en s'attachant à faire valoir les passages qui sont
fidèles à l'œuvre originale et ceux qui le sont moins et à en
dégager les raisons.
…
Visionner dans son intégralité l'adaptation cinématographique de
l'œuvre littéraire travaillée.
„ Étape d'adaptation d'une œuvre littéraire
…
L'adaptation, cinématographique ou théâtrale, d'une œuvre
littéraire peut se faire après, par exemple,
• l'étude collective d'un roman (dans ce cas, des parties
différentes du roman pourraient être attribuées à des groupes
d’élèves différents),
• la lecture de nouvelles,
• une lecture indépendante d'une œuvre littéraire,
• un partage d'extraits littéraires.
…
Inviter les élèves, repartis en petits groupes, à retracer la
caractérisation des personnages et le déroulement de l'intrigue,
à préciser le cadre spatiotemporel, le point de vue de narration,
les thèmes, les valeurs et la vision du monde.
…
Planifier, en petits groupes, l'adaptation de l'œuvre littéraire, en
utilisant une grille semblable à celle-ci :
Français langue première
111
40S : Littératures francophones
Éléments de
l’univers
narratif
Informations
données dans
le texte
À retenir dans
l’adaptation
oui/non
Comment
traduire cet
élément dans
l’adaptation
•
•
•
•
•
Atmosphère
créée ou
émotion
suscitée
•
•
•
•
•
Autres
dimensions
de l’œuvre
originale
•
•
•
•
•
…
Réaliser, en petits groupes, l'adaptation de l'œuvre littéraire :
• Adaptation cinématographique :
112
Établissement du scénarimage : guide de navigation au
tournage, le scénarimage est la représentation visuelle d'une
histoire; chaque case de l'histoire contient un dessin qui
indique ce que la caméra verra, ce qui sera filmé et comment;
dans chaque case sont également indiquées les paroles
prononcées par les personnages (et/ou le narrateur) ainsi que
d'autres informations essentielles (ex. : musique, cadrage).
Français langue première
40S : Littératures francophones
Exécution de ce qui a été planifié en préproduction : veiller au
cadrage et aux angles de prises de vue. Le temps du tournage
dépendra de facteurs tels que le niveau d'organisation, le
nombre de décors et la complexité des dialogues et des
scènes.
Réaliser la postproduction : montage des séquences, mixage
du son et addition d'effets graphiques ou spéciaux, musique
ou bande sonore.
Visionner le produit fini.
On trouvera de très utiles renseignements sur la production
cinématographique dans
• La folie des films. Une approche critique et pratique à
l'étude des médias dans la salle de classe. Winnipeg :
Freeze Frame (téléphone : 943-5341 ou le site Web :
www.freezeframeonline.org);
• Le cédérom P'tit coup d'œil sur le cinéma du cahier
d'introduction au programme L'Œil cinéma, disponible à
la DREF (cahier et cédérom sont intégrés à chacune des
trousses du programme).
• Adaptation théâtrale
Pour un exemple de démarche, on pourra se reporter à
l'ouvrage suivant :
Le français en projets. Activités d'écriture et de communication
orale (Chenelière Éducation, 1998 : projets « Une pièce de
théâtre (à écrire) » et « Une pièce de théâtre (à monter) ».
…
Présenter l'adaptation, cinématographique ou théâtrale, réalisée
dans des situations authentiques : soirée à l'école, évènement
particulier à l'école ou dans la communauté, festivals hors école,
etc.
…
Demander aux élèves de faire leur propre évaluation à partir de
critères qui auront été dégagés, ainsi que l'évaluation d'une
autre adaptation présentée, le cas échéant; l'enseignant fera sa
propre évaluation tout en tenant compte de l'évaluation faite par
les élèves.
…
En guise de clôture, animer une discussion rôle de l'interprétation
du sens d'une œuvre littéraire dans le processus de l'adaptation,
cinématographique ou théâtrale, d'une œuvre originale. Centrer
la discussion sur la dimension créative de ce processus.
Français langue première
113
NOTES
114
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 7 : Des thèmes pour regrouper des œuvres
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Explorer un thème par l'intermédiaire d'œuvres et de genres
différents;
ˆ Inscrire cette exploration dans un questionnement personnel;
ˆ Envisager une conception plus large de la notion de thème;
ˆ Enrichir sa vision du monde en la confrontant à d'autres.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Préprojet
ˆ Projet
ˆ Postprojet
Ressources d’apprentissage possibles
Français langue première
115
40S : Littératures francophones
Propositions pédagogiques
Les thèmes permettant de regrouper des œuvres sont très nombreux :
la francophonie, l'identité, les relations humaines, la richesse, la
pauvreté, la liberté, l'amour, l'engagement, la discrimination,
l'affirmation de soi, l'oppression, etc. Mais on peut élargir la conception
que l'on se fait de la notion de thème, dans la perspective de la
définition proposée dans Le Petit Robert (2000) : « idée, pensée qui
constitue le sujet des propos d'une personne, le centre de ses
préoccupations : ce sur quoi s'exerce la réflexion ou l'activité. » Le
thème peut être envisagé sous plusieurs aspects : philosophique,
culturel, social, historique ou religieux, etc. Par exemple, plutôt que de
discuter du thème de l'amour, il serait possible de passer aux rapports
de force entre hommes et femmes, comme ils sont illustrés dans les
œuvres suivantes : Florence et Le temps des lilas de Marcel Dubé, Aux
femmes que j'aime de Jean-Pierre Ferland, Mignonne allons voir… de
Ronsard et Qu'en avez-vous fait de Marceline Desbordes-Valmore. Un
autre exemple pourrait être de parler du dynamisme entre un peuple et
le lieu qu'il occupe plutôt que de parler simplement du thème de la
nature; on pourrait ainsi utiliser comme œuvres L'homme qui plantait
des arbres de Jean Giono, La tempête de Gabrielle Roy, Mon pays de
Gilles Vigneault et Jours de Plaine de Daniel Lavoie.
„ Préprojet
…
Solliciter l'expérience des élèves sur l'intérêt de la notion de
thème. Animer une discussion avec les élèves sur des films qu'ils
ont vus qui traitent d’un même thème. Comparer le traitement
de ce thème par les différents réalisateurs. Présenter l'idée d'un
thème plus englobant : par exemple, un bon nombre de films
pour adolescents abordent le thème de l'aliénation des jeunes
(interaction entre les groupes sociaux, utopies, intégration
sociale, identité, etc.)
…
Animer une discussion sur certains thèmes abordés dans des
œuvres que les élèves ont lues. Inviter les élèves à porter un
regard critique sur la différence du traitement d'un même thème
en fonction du contexte social ou culturel dans lequel l'œuvre a
été produite.
„ Projet
…
Rassembler des textes autour d'un thème. Privilégier une large
gamme de textes : nouvelles, poèmes, chansons, pièces de
théâtre ou romans, etc.
On se reportera aux ressources d'apprentissage proposées
dans le module 1 pour avoir accès à un exemple de corpus de
textes possibles.
116
Français langue première
40S : Littératures francophones
… Explorer le thème dans les textes en utilisant, par exemple, la
fiche d'exploration d'un thème proposée ci-dessous. On pourra
aussi proposer une exploration de thèmes différents, menée en
parallèle par des groupes d'élèves différents.
Fiche d’exploration d’un thème*
Thème(s) exploré(s) : _______________________________
Thèmes • principaux : _______________________________
• secondaires : _____________________________
Thème(s) privilégié(s) : _____________________________
Organisation des thèmes (ex. : thèmes central et sousthèmes, opposition, parallèles) : _______________________
_________________________________________________
Évolution du thème dans les textes : ___________________
_________________________________________________
Indices qui révèlent les thèmes :
• personnages (rapports entre personnages, valeurs véhiculées
• champs lexicaux
• retour fréquent d’éléments tels que mots, idées, champs
lexicaux et symboles
• point de vue de narration
• contexte de production du texte
• autres (à préciser)
Thème et vision du monde : __________________________
_________________________________________________
Autres éléments pouvant être mis à profit pour l’exploration
d’un thème : ______________________________________
* Cette fiche étant générique, elle pourrait ne pas s’appliquer
telle quelle à toutes les situations d’exploration d’un thème.
… Présenter l'exploration des thèmes sous différentes formes :
• Analyse écrite, en présenter une synthèse oralement
• Collage avec des extraits des textes, lecture expressive de
certains extraits de textes
• Saynète
• Dialogue simulé entre deux auteurs qui ont traité du même
thème
• Montage vidéo ou audio
• Etc.
Français langue première
117
40S : Littératures francophones
… Demander aux élèves de faire leur propre évaluation à partir de
critères qui auront été dégagés (ex. : qualité de l'exploration,
pertinence des textes retenus, création), ainsi que l'évaluation
d'une autre présentation; l'enseignant fera sa propre évaluation
en tenant compte de l'évaluation faite par les élèves.
„ Postprojet
… Animer une discussion sur l'intérêt, dans la compréhension et
l'appréciation des textes littéraires, d'une exploration de thèmes :
faire établir, entre autres, que les thèmes constituent un lieu
d'adhésion ou de distanciation de la part du lecteur par rapport au
texte littéraire; dégager les thèmes dans des textes, rassembler
des textes autour de thèmes, explorer les thèmes, les apprécier,
tout cela permet de se situer face à une vision du monde.
118
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 8 : Un auteur dans tous ses états
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Explorer un auteur, au choix et à partir de critères personnels;
ˆ Faire valoir des liens entre un auteur et le contexte
socioculturel et politique où il s'inscrit;
ˆ Explorer la notion d'auteur.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Activités préprojet
ˆ Projet
ˆ Activités postprojet
Ressources d’apprentissage possibles
Français langue première
119
40S : Littératures francophones
„ Activités préprojet
…
Animer une discussion sur la notion d'auteur, sur les facteurs qui
contribuent à la célébrité (ou non) d'un auteur; centrer la
discussion sur l'influence du contexte socioculturel et politique
sur une œuvre (on pourra souhaiter mettre à profit ici les
renseignements présentés au chapitre 4 du présent programme
d’études).
…
Animer une discussion sur les critères qui permettent de choisir
un auteur (ex. : intérêt, curiosité, représentativité, célébrité (ou
non), importance) et sur les paramètres de l'exploration d'un
auteur (ex. : justification du choix, contexte de l'œuvre,
biographie, engagement, style, genre, thèmes, vision du monde,
rapport avec d'autres formes d'expression artistique).
„ Projet
…
Exploration proprement dite d' « un auteur dans tous ses états »,
en s'appuyant, par exemple, sur une fiche d'exploration d'un
auteur, du genre de celle jointe ci-après.
…
Tenue d'un journal d'exploration, où l'élève consigne toute trace
de son exploration : réactions, commentaires, notes diverses,
citations, informations, etc.
„ Activités postprojet
…
Présenter, sous diverses formes, l'exploration faite d'un auteur :
pancartes, dossier, « galerie d'auteurs », présentation intégrant
des lectures d'extraits de l'œuvre accompagnées de pièces
musicales et/ou d'œuvres d'art, etc.
…
Inviter les élèves à faire leur propre évaluation à partir de
critères qui auront été dégagés.
…
Animer une discussion sur l'expérience
constituée par l'exploration d'un auteur.
d'apprentissage
„ Ressources d'apprentissage possibles
120
…
Voir, pour des points de départ dans les textes d'auteurs
francophones, les ressources d'apprentissage listées dans des
modules antérieurs (en particulier les modules 1, 2 et 4).
…
Voir également le chapitre 4 du présent programme d’études et,
en particulier, les anthologies de textes littéraires qui y sont
recensées.
Français langue première
40S : Littératures francophones
Fiche d’exploration d’un auteur
Raisons du choix
Notes et commentaires
Auteur
OEuvre
Contexte
socioculturel
et politique
• faits biographiques
marquants
titres marquants
courants artistiques
et idéologiques
genres
styles
• informations
biographiques
ayant une
incidence sur
l’œuvre
thématiques
explorées
événements
marquants
extraits choisis
(liens avec l’œuvre)
Français langue première
121
NOTES
122
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 9 : Explorer les genres : quelques balises
Intentions pédagogiques du module :
ˆ Explorer les genres et dégager leurs caractéristiques;
ˆ Valoriser la pluralité et la diversité des genres dans les textes
littéraires.
Résultats d’apprentissage :
Ce module travaille, à des titres divers, l’ensemble des résultats
d’apprentissage (se reporter au chapitre 2).
Propositions pédagogiques :
ˆ Activités préprojet
ˆ Projet
• Exemple d'un projet : la fable, des textes au spectacle
• Exemple d'un projet : un festival du récit oral
ˆ Activités postprojet
Ressources d'apprentissage possibles
Français langue première
123
40S : Littératures francophones
„ Activités préprojet
…
Animer une discussion, en sollicitant les connaissances et les
expériences des élèves, sur les genres; dégager quelques
catégories générales : roman, conte et légende, fable, nouvelle,
mais aussi, de manière transversale, récit de vie, récit historique,
fantastique, science-fiction, policier, etc.
…
Établir quelques caractéristiques spécifiques définissant ces
genres, relatives pas exemple au cadre, à l'intrigue, aux
personnages et aux thématiques.
„ Projet
…
Proposer aux élèves de choisir, individuellement ou en groupes,
un genre tels que fantastique, science-fiction ou policier ou tout
autre genre qu'ils souhaiteraient explorer.
…
Rassembler des textes illustrant le genre choisi.
…
Lire les textes choisis selon deux perspectives :
• analyse : spécifier les caractéristiques du genre, à l'aide, par
exemple, de la Fiche d'exploration d'un genre littéraire proposée
ci-après;
• réactions critiques à l'univers narratif présenté, consignées par
exemple dans un journal de bord.
…
Partage de l'exploration entre élèves et/ou entre groupes.
…
Produire des textes relevant du genre exploré et y réinvestir les
caractéristiques dégagées; diffuser les textes selon diverses
modalités :
• rassembler des textes parmi ceux qui ont été lus, à partir de
critères à déterminer, les accompagner de pièces musicales, de
représentations graphiques ou de toute autre création
• constituer un dossier illustrant le genre exploré, contenant tout
texte (entendu au sens large) pertinent
• lire, de manière expressive, les textes produits
• créer un vidéo mettant en scène l'univers fictif créé
• créer un rallye littéraire sur le genre exploré
• etc.
…
Les élèves évalueront leur travail, à partir de critères qu'ils auront
eux-mêmes dégagés.
…
Exemple d'un projet : la fable, des textes au spectacle
• Solliciter les expériences des élèves sur les fables, leurs
connaissances sur ce genre, en particulier sur les
caractéristiques de celui-ci.
124
Français langue première
40S : Littératures francophones
• Établir un corpus de fables (voir, entre autres, le site Web :
http://www.lafontaine.net); dégager de la lecture des fables
les caractéristiques particulières du genre (ex. : facture
formelle, symbolisme des animaux par exemple, morale) et, en
particulier, sa fonction sociale.
• Réécrire des fables :
choisir une fable du corpus et la réécrire, en s'appuyant par
exemple sur la réécriture de la fable « Le lièvre et la tortue »
présentée sur le site Web : http://persowanadoo.fr/fabliaux/;
réécrire une fable sous la forme, par exemple, d'une courte
pièce de théâtre en un acte;
réécrire une fable en lui donnant un ton personnel.
• Composer des fables, les illustrer,
accompagnement musical approprié.
les
lire
avec
un
• Monter un spectacle (pour l'école, en tournée dans d'autres
écoles, etc.) de fables : fables originales ou réécrites ou
composées lues avec accompagnements; pièce de théâtre
construite à partir de fables, accompagnée de masques créés
pour la circonstance, etc.
…
Exemple d'un projet : un festival du récit oral
• Mettre sur pied un festival du récit oral pour
donner une destination sociale aux textes lus, écrits, écoutés,
visionnés;
impliquer d'autres élèves, des adultes, des auteurs;
développer la lecture expressive, le plaisir du texte dit;
développer une appréciation de la littérature orale :
caractéristiques (ex : importance de la parole, des éléments
prosodiques, du silence, des gestes), formes de textes
privilégiés (ex. : conte, légende, fable, mythe, mais aussi
récits de voyage, histoires drôles), figures emblématiques
(ex. : le troubadour au Moyen Âge, le griot dans les
civilisations africaines).
Français langue première
125
40S : Littératures francophones
Fiche d'exploration d'un genre littéraire
1. Intrigue, structure narrative
2. Personnages
3. Cadre spatiotemporel
4. Narration
5. Thèmes, valeurs et vision du monde
6. Moyens linguistiques et discursifs (vocabulaire, syntaxe,
champ lexical, figures de style, etc.)
7. Autres critères (à préciser)
126
Français langue première
40S : Littératures francophones
„ Activités postprojet
…
Animer une discussion sur l'intérêt de la notion de genre pour
explorer les textes littéraires.
…
Animer une discussion sur l'attrait qu'exercent certains genres
ainsi que sur les contradictions qui pèsent sur certains genres
(ainsi, le policier, considéré par certains comme un genre mineur,
connaît pourtant un fort succès quant au nombre de livres
vendus et aux films visionnés).
„ Ressources d'apprentissage possibles
- L'ouvrage De la lecture à la culture. Le plaisir d'explorer la
littérature au secondaire. Bibliographie sélective commentée
d'ouvrages de fiction pour le secondaire (Services
documentaires multimédia inc., 1995) présente des propositions
de titres d'œuvres pour les divers genres littéraires ainsi qu'une
brève présentation des caractéristiques du genre et quelques
propositions pédagogiques pour le genre
- La collection « Séquences » (publiée chez Didier Hatier dans les
années 1990) propose une anthologie de textes et un vademecum, dossier didactique pour l'enseignant, pour chacun des
genres suivants :
• le fantastique
• l'énigme criminelle
• la science-fiction
• le récit de vie
• le mythe
• la lettre
• la fable
• l'essai
• le conte
• le texte de théâtre
Français langue première
127
NOTES
128
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 10 : Le texte dramatique : quelques ressources
pédagogiques
Outre des lectures de textes dramatiques et un travail plus large sur
l'art dramatique, il pourrait être utile de proposer aux élèves de suivre
une saison complète du Cercle Molière : historique et fonctionnement
(voir l'ouvrage Le Cercle Molière. 75 ans de théâtre), rencontres avec
le personnel, processus du choix des textes pour une saison,
assistance aux spectacles, rencontres avec l'équipe de chaque
spectacle, comptes rendus critiques des pièces, participation aux
activités de la saison, etc.
Matériel didactique
-
Intermède (Beauchemin, 1997 : le chapitre consacré au théâtre);
l’ouvrage est accompagné d’un Guide d’utilisation et d’un Matériel
d’évaluation
-
En toutes lettres, Manuel, Français 4e secondaire (Chenelière
Éducation, 2001 : le module consacré au texte dramatique); l'ouvrage
est accompagné d'un Référentiel (Chenelière Éducation, 2000), qui
contient de nombreux articles sur le théâtre ainsi que de Documents
reproductibles et d’un Guide d’enseignement
-
En toutes lettres, Manuel, Français, 5e secondaire (Chenelière
Éducation, 2001 : le module consacré au texte dramatique);
l'ouvrage est accompagné d'un Référentiel (Chenelière Éducation,
2000), qui contient de nombreux articles sur le théâtre ainsi que de
Documents reproductibles et d’un Guide d’enseignement
-
Signatures, Français 4e secondaire, Manuel de l’élève (ERPI, 2000 :
les dossiers consacrés aux textes dramatiques : « La vie en scène »
et « Des airs de famille »); l’ouvrage va de pair avec Signatures,
Français 4e secondaire, Recueil de textes et est accompagné d’un
Guide d’enseignement
-
Bilans, Recueils de textes (Les Éditions CEC, 2001 : le chapitre
consacré au texte dramatique); le recueil est accompagné d’un
ouvrage Connaissances et activités et d’un Guide d’enseignement
-
Unités d’apprentissage, 4e secondaire (Les Éditions CEC, 2000 :
l’unité consacrée au texte dramatique); l’ouvrage est accompagné
d’un recueil Textes 4e secondaire et d’un Guide d’enseignement
Français langue première
129
40S : Littératures francophones
-
Répertoires, Français 5e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 : l’unité consacrée
au théâtre); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 5e
secondaire, Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2001 :
l’unité consacrée au théâtre et la synthèse consacrée au texte
dramatique) et est accompagné d’un Guide d’enseignement
-
Répertoires, Français 4e secondaire, Recueil de textes et de
connaissances (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 : l’unité consacrée
au théâtre); l’ouvrage va de pair avec Répertoires, Français 4e
secondaire, Manuel d’exploitation (Éditions Grand Duc-HRW, 2000 :
l’unité consacrée au théâtre) et est accompagné d’un Guide
d’enseignement
-
L’ensemble (1992) consacré au Texte de théâtre (anthologie de
textes et vade-mecum du professeur de français) de la collection
« Séquences », publiée chez Didier Hatier
Dans la perspective de la mise en scène de textes dramatiques et,
plus largement, de l'art dramatique, on pourra consulter, avec grand
profit, les ouvrages suivants :
130
-
Girard, D. et Vallières, D. (1988). Le théâtre. La découverte du
texte par le jeu dramatique. Mont-Royal : Modulo-Griffon
-
Sabourin, J.-G. (1994). En scène, tout le monde! Montréal :
Guérin
-
Gravel, H. et Azzola, M. (1989). Expression dramatique. Sudbury :
Éditions Prise de parole
-
Théâtre Action (2000, 7e éd.). Trousse d'expression dramatique.
Répertoire d'exercices d'expression dramatique. Vanier : Théâtre
Action (disponible auprès du Centre franco-ontarien de
ressources pédagogiques)
-
Théâtre Action (1986). Le petit manuel des coulisses.
Organisation d'une troupe et production d'un spectacle de
théâtre. Vanier : Théâtre Action
-
Théâtre Action (2000). Brisez la glace! Organisation d'une ligue
d'improvisation. Vanier : Théâtre Action (disponible auprès du
Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques).
Français langue première
40S : Littératures francophones
Module 11 : La littérature dans sa dimension sociale :
deux pistes d'exploration
„ Des « phénomènes littéraires » : le best-seller et le roman
d'amour
Analyser le « phénomène » du best-seller et du roman d'amour pour
… le déconstruire afin de mieux comprendre son succès populaire;
… en démonter la formule;
… en produire.
Ressources possibles :
- Préfontaine, C. (1991). Le roman d'amour à l'école. Montréal :
les Éditions Logiques; l'ouvrage analyse le phénomène du
roman d'amour et propose des pistes pédagogiques
- Lire et aimer lire au secondaire - Fascicule 1. Projets et
activités de lecture. (Ministère de l'Éducation du Québec et
Éducation et Formation professionnelle, Bureau de l'éducation
française, 1988 et 1989) : la section 8.8 consacrée à la
littérature populaire
„ Le « champ littéraire »
…
Considérer la littérature comme un « champ », c'est-à-dire dans
son fonctionnement socio-économique (l'édition par exemple),
institutionnel (les prix littéraires par exemple) pour mieux
comprendre
• l'objet-livre;
• le système éditorial (maisons d'édition, phénomènes de
concentration, etc.);
• les modes de diffusion (librairies, ventes par correspondance
ou via Internet, bibliothèques, le livre dans les grandes
surfaces, la cyberédition, le rôle des médias, etc.;
• la critique littéraire;
• les prix littéraires;
• la publicité littéraire;
• l'image, sociale en particulier, de l'écrivain;
• la paralittérature (ex. : best-sellers, roman sentimental,
roman-photo, bande dessinée, roman policier).
Ressource possible :
- Rosier, J.-M. et al. (2000). S'approprier le champ littéraire.
Propositions pour travailler l'institution littéraire en classe de
français. Bruxelles : De Boeck Duculot.
Français langue première
131
NOTES
132
Français langue première
40S : Littératures francophones
CHAPITRE 4
Survol des littératures
française et québécoise
Ce chapitre présente un survol des littératures française et
québécoise organisé chronologiquement. Les points de repère ainsi
livrés devraient constituer d’utiles balises pour situer ces
littératures francophones dans leurs contextes de production et
pour reconnaître leur évolution.
Français langue première
133
NOTES
134
Français langue première
40S : Littératures francophones
Survol de la littérature française
• Le Moyen Âge (5e - 15e siècle)
• Le XVIe siècle : la Renaissance
• Le XVIIe siècle : le siècle de Louis XIV
• Le XVIIIe siècle : le siècle des Lumières
• Le XIXe siècle
• Le XXe siècle
• Ressources d’apprentissages possibles
Français langue première
135
NOTES
136
Français langue première
40S : Littératures francophones
roman
breton
chanson
de geste
littérature morale
littérature courtoise
littérature épique
conte et nouvelle
Le Moyen Âge
5e - 15e siècle
poème lyrique
lai
chanson
fabliau ou
conte à rire
poésie lyrique
littérature satirique
farce
chronique
rondeau
ballade
Français langue première
Roman de
Renart
mystère et
miracle
137
40S : Littératures francophones
Le Moyen Âge : quelques points de repère socioculturels
La féodalité
Le régime féodal caractérise la société médiévale du 9e au 13e siècle. La
société féodale, hiérarchisée, est marquée par le principe de soumission du vassal à son suzerain (obéissance et fidélité en échange d'une
protection). Les trois classes qui la composent sont la noblesse (qui
combat), le clergé (qui prie) et le peuple (qui travaille). Le royaume est
divisé en fiefs, ayant chacun à sa tête un seigneur.
La chevalerie
Arrogants et fiers, les chevaliers constituent un corps d'élite. Ce sont
des combattants prestigieux et respectés qui ont pour devoir de
défendre la foi catholique et la justice. Entre deux exploits militaires, le
fougueux chevalier devient le sujet principal d'une littérature courtoise
où, pour répondre aux désirs de « la dame » de son cœur, il acceptera
de se soumettre à de vaillants exploits. Son cheval richement harnaché
et son armure métallique et pesante sont souvent les seuls biens que
possède le chevalier.
Les croisades
Du 11e au 13e siècles, ont lieu des expéditions militaires, les Croisades,
qui amènent les chevaliers loin du territoire français. Leur but : « prendre la Croix » pour délivrer les lieux saints de Jérusalem occupés par les
« Infidèles » (Arabes et Turcs). Grâce aux Croisades, l'Occident découvre l'Orient. De ce fait, elles permettront l'enrichissement des arts et
des sciences ainsi que l'introduction de fruits, de légumes et d’épices
jusqu'alors inconnus. Au nombre de huit, ces guerres saintes seront à
l'origine de l'idéal chevaleresque et feront l'objet d'une littérature
épique, la Chanson de geste, dont le meilleur exemple est la Chanson
de Roland.
La religion
Le rôle de l’Église est fondamental dans tous les domaines de la société
médiévale. C'est le pape qui prêche la première Croisade, au 11e siècle.
L'Église soutient la royauté, sauvegarde les trésors artistiques et s'occupe
de l'enseignement. Au 12e siècle, en plus d'offrir le « droit d'asile », les
deux mille monastères de l'Occident sont souvent à l'origine des progrès du monde rural et influencent l'économie des pays. Les ordres
monastiques importants sont tous fondés au Moyen Âge. L'Église est
également à l'origine des grands pèlerinages de l'époque (St-Jacques
de Compostelle en Espagne, Jérusalem, Rome) qui déplacent de
grandes foules vers les lieux saints. Par ces voyages à pied, longs et
difficiles, les pèlerins espèrent atténuer la peur de la mort et celle du
Jugement dernier, peur que l'on retrouve dans les ballades des
écrivains d'alors.
138
Français langue première
40S : Littératures francophones
Du 5e au 15e siècle, le Moyen Âge correspond à la formation de l'unité
nationale française. De nombreux bouleversements sociaux et culturels
accompagnent cette formation territoriale et politique. En 496, Clovis, le
roi des Francs, se convertit au catholicisme pour avoir l'appui de l'Église
catholique. Il réalise la première unification du pays en se ralliant les
nombreux petits fiefs éparpillés. Au 9e siècle, Charlemagne, maître de la
Francie, agrandit le royaume des Francs. C'est à la fin de la guerre de
Cent Ans, au 15e siècle, que naîtra le sentiment d'unité nationale qui ne
cessera de s'accroître.
L'unité
nationale :
la naissance
de la France
Ancêtre de la France actuelle, la Gaule abritait plus de 300 petits peuples celtiques parlant divers dialectes celtiques. Lors de l'occupation
de la Gaule par les Romains, ceux-ci imposèrent leur langue, le latin,
comme langue officielle. Mais le peuple continua à parler le celtique
qui disparaîtra progressivement alors que le latin se transforme et
devient, en se simplifiant, la langue populaire appelée langue romane
ou roman. En 476, après l'occupation de la Gaule par les Germains,
on observe un recul du latin écrit et une transformation de la langue
parlée. En quelques siècles, de multiples parlers locaux seront progressivement regroupés en deux grands dialectes : la langue d’oïl,
dans le nord de la France, et la langue d’oc, dans le Sud de la France
(« oïl » et « oc » représentent notre oui actuel dans chacune de ces
régions). Au 16e siècle, après une lente évolution liée à l'histoire politique du pays, la langue du Nord de la France, le francien ou langue
d'oïl, s'imposera comme langue nationale.
La naissance
de la langue
française
Quant au latin, il restera langue officielle de l'Église et, jusqu'au 19e
siècle, langue de rédaction des thèses universitaires, ce qui explique
l'existence des « quartiers latins » près des universités. Du 11e siècle
au 13e siècle, on parle l'Ancien français et, du 14e au 16e siècle, le
Moyen français. Ce n'est qu’au 17e siècle que le français accédera à la
forme qu'il a aujourd'hui.
C'est au 13e siècle que naissent en France les premières universités. A
Paris, Robert de Sorbon fondera la Sorbonne où l'on étudie théologie,
médecine, droit, arts libéraux (grammaire, rhétorique et logique) et
quadrivium (géométrie, musique, arithmétique et astronomie).
L'Université
Une dizaine d'autres universités apparaissent dans les grandes villes de
France et chacune d'elles a sa spécialité. Maîtres et étudiants voyagent
alors dans toute l'Europe (Grande-Bretagne, Italie, France, Allemagne)
pour étudier dans les universités.
Français langue première
139
40S : Littératures francophones
L'imprimerie
Vers 1440, en Allemagne, Gutenberg invente « le plus grand événement de l'histoire » (Victor Hugo) : l'imprimerie. Grâce à cette découverte, les livres se diffusent rapidement en Europe et les mentalités se
transforment radicalement. En 50 ans, on passe de quelques milliers à
20 millions de livres : bibles, auteurs anciens, auteurs contemporains,
sujets scientifiques, cartes géographiques…
Les Grandes
Découvertes
En l'espace de 30 ans, les principaux voyages de découverte se sont
réalisés. Le Portugal, l'Espagne, l'Angleterre et la France profitent de
l'invention de nouveaux navires et d'instruments de navigation plus
perfectionnés pour découvrir l'Afrique (Diaz) en 1456, l'Amérique
(Christophe Colomb) en 1492, l'Asie (Vasco de Gama) en 1497 et le
Canada (Jacques Cartier) en 1534.
Les sciences
Au Moyen Âge, les religieux représentent les savants de l'époque. Il
est difficile de saisir la frontière entre la religion, la philosophie et la
science; la rigueur de la pensée scientifique n'existe pas encore.
Cependant l'alchimie, qui attire de nombreux savants, permet de
découvrir l'alcool comme solvant ainsi que le magnétisme. Les chiffres
arabes permettent à l'arithmétique de se développer. Plusieurs inventions vont faciliter la vie quotidienne agricole : le collier d'épaule pour
l'attelage des chevaux, les moulins à eau et à vent, les routes pavées,
la charrue à roues, etc. La boussole (utilisée en navigation), les lunettes,
le rouet (pour filer la laine), le fer (qui remplace le bois) : autant de progrès techniques qui favorisent la croissance de la société médiévale.
Les arts
• L'architecture : de nombreuses œuvres d'art naissent au Moyen
Âge : abbayes, palais, châteaux, remparts, cathédrales, églises…
Les XIe et XIIe siècles sont caractérisés par l'art roman et la voûte
en berceau en pierre, ce qui fait des cathédrales des constructions
massives et solides, peu éclairées à l'intérieur.
À partir du XIIe siècle et jusqu'au XVe siècle, le style gothique remplace le style roman : ce style nouveau et révolutionnaire impressionne par la hauteur et la légèreté de ses murs, percés de nombreuses ouvertures agrémentées de vitraux polychromes.
140
Français langue première
40S : Littératures francophones
• La sculpture : associée à l'art religieux, elle représente les scènes
de la vie du Christ. Des milliers de statues décorent les façades et
les portails des églises, trois mille pour la seule cathédrale de Reims!
Éclatante manifestation de la foi médiévale, les cathédrales et les
églises ont aussi des fonctions communautaires : rencontres des
magistrats, des marchands, des artisans; lieux d'enseignement;
présentation des mystères.
• La peinture, les vitraux, les tapisseries : peintures murales
des églises romanes, miniatures sur parchemin illustrant la Bible et
les Psautiers, vitraux illustrant la vie de Jésus, tapisseries gigantesques ornant les murs des châteaux, tout cela fait de la France
le pays maître de cet art d'ornement, typiquement français.
• La musique : elle célèbre l’amour courtois et devient populaire
dans toutes les couches sociales.
Français langue première
141
40S : Littératures francophones
Les genres littéraires au Moyen Âge : quelques points de repère
Naissance de
la littérature
française
En ce qui concerne la littérature, l’âge d’or du Moyen Âge se situe dans
sa seconde moitié, du 11e au 15e siècles. Deux textes sont cependant
considérés comme textes fondateurs, « les Serments de Strasbourg »
(texte rédigé en langue d’oïl) en 842 et la « Cantilène de Sainte Eulalie »
en 881. Mais la véritable littérature ne naîtra qu’au 12e siècle. Avant
cette époque, la notion d’auteur n’existe pas et les textes sont souvent
anonymes. Cependant, à cette époque déjà, presque tous les genres
sont représentés.
Littérature
épique
La littérature épique se caractérise par les Chansons de geste (« gesta »
en latin signifie les « hauts faits » accomplis) qui illustrent la vie du
chevalier. Ces grands poèmes épiques rapportent des légendes, qui
idéalisent la société féodale. C'est une littérature en vers, essentiellement orale. Aujourd'hui, il ne reste que 80 chansons de geste, dont la
Chanson de Roland, la plus ancienne et la plus connue qui remonte au
début du 12e siècle.
Littérature
courtoise
La littérature courtoise, destinée aux gens de la cour, a pour préoccupation essentielle de mettre en scène un héros chez qui l'élégance du
geste et de la parole ont pris le dessus. Ce n'est plus pour son roi que
le chevalier s'exalte mais pour la dame de son cœur qui le soumet à de
difficiles épreuves, le tout sur fond de merveilleux chrétien. L'amour,
qui reste souvent platonique, est affirmé comme une valeur suprême.
• Les « romans bretons »
Ils rapportent la vie à la cour légendaire du roi Arthur; c’est le cas
de Tristan et Iseult. Dans ce contexte chevaleresque, Chrétien de
Troyes fait revivre Lancelot et Perceval et Marie de France présente
ses Deux amants. Avec les romans arthuriens, le Roman de la Rose,
principal ouvrage du 13e siècle, œuvre en vers à la fois poétique et
philosophique, fut source d'inspiration pour de nombreux poètes
ultérieurs et fera l’objet au 20e siècle d’adaptations cinématographiques.
• Les poèmes lyriques : les lais
La poésie, premier genre littéraire à se manifester, connut son âge
d'or au Moyen Âge. Dès le 12e siècle, les troubadours du Sud se
promènent de château en château pour chanter des poèmes dédiés
à leur dame idéale. Les trouvères du Nord suivront dans la lignée
pour diffuser cette poésie amoureuse ou une poésie qui relate les
difficultés de la vie. Christine de Pisan auteure de Quand je vois et
Rutebeuf dans Pauvre Rutebeuf (mis en musique en 1956 par Léo
Ferré) se sont illustrés dans ce genre.
142
Français langue première
40S : Littératures francophones
La littérature satirique, populaire et bourgeoise, se rattache davantage
à la vie quotidienne du peuple. Loin de l'esprit de l'amour courtois, elle
est beaucoup plus terre à terre. Ces petits récits ou ces courtes pièces
théâtrales peuvent être à la fois comiques, voire grossiers, ou sérieux
et dégagent tous une morale.
Littérature
satirique
• Les fabliaux ou contes à rire
Le comique relève souvent du gros rire : bastonnade, méprises, jeux
de mots, quiproquos. Les fabliaux décrivent les mœurs des paysans
ou de la classe moyenne.
• Les farces
Ancêtres de la comédie, les farces sont jouées dans les grands
marchés et connaissent un grand succès. Le jeu de Marion et Robin
et, plus tard, la Farce de Maître Pathelin d’auteurs inconnus restent
significatives du théâtre comique de l’époque.
• Les « mystères » et les « Miracles »
Ils ont lieu sur le parvis des églises et sont essentiellement religieux.
Ces pièces théâtrales illustrent la vie du Christ et de la Sainte Vierge.
Leur but est d’enseigner et ils s’inspirent de l’Histoire Sainte. Ils peuvent être joués plusieurs jours de suite.
• le Roman de Renart
Dans cette œuvre collective écrite en vers, les auteurs utilisent les
animaux pour ridiculiser les hommes. C’est un recueil de contes
anciens et anonymes qui, en 26 branches ou épisodes et en 22 000
vers, parodient la société médiévale.
La poésie lyrique acquiert son identité lorsque, au 13e siècle, le roman
cesse d'être écrit en vers. Née au début du 12e siècle, elle atteindra son
apogée aux 14e et 15e siècles. Généralement chantée devant les dames
de la cour par des poètes musiciens (trouvères, troubadours ou
ménestrels), cette poésie narre toujours l'amour, souvent malheureux,
du chevalier pour la dame de son cœur. Parmi les formes poétiques, on
trouve la ballade, le rondeau, le lai et la complainte, types de poèmes
à forme fixe, à la mode jusqu'au 16e siècle.
Poésie lyrique
• la ballade
Cette forme poétique exploite les sentiments liés à la mélancolie, la
fuite du temps, la solitude et la mort. Christine de Pisan (Cent ballades d'amants), première femme de lettres officielle dans l'histoire
de la littérature française, y révèle sa sensibilité et aussi son goût de
l'indépendance. François Villon, poète le plus célèbre du Moyen Âge,
et Charles d'Orléans ont aussi marqué leur époque.
• le rondeau
Cette forme poétique sera exploitée par ces mêmes poètes (Villon,
Charles d'Orléans, Christine de Pisan, Eustache Deschamps…). Elle
est toujours écrite dans un esprit semblable à celui de la ballade,
tout en exploitant les mêmes thèmes.
Français langue première
143
40S : Littératures francophones
Littérature
morale
L'influence du christianisme poussera certains auteurs à se lancer dans
la littérature morale. Leur but est de comprendre les actions humaines,
de leur donner un sens et d'inciter à la réflexion religieuse, morale et
politique. S'y distingueront Saint-Bernard de Clairvaux, moine fondateur de l'Abbaye de Clairvaux au 12e siècle, à travers ses Sermons ainsi
qu'Alain Chartier avec Le livre des quatre dames.
Chanson
De tout temps, la chanson a été présente : chansons satiriques,
religieuses, à boire, d'amour, etc. Au 13e siècle, la chanson, qui
célébrait alors surtout l'amour courtois, se diversifie et devient plus
populaire. On y retrouve, entre autres, la pastourelle, l'aubade, la sérénade, la balette, la carole, la chanson de toile, la romance, la réverdie,
etc. D'autres chansons, grivoises celles-là, les Carmina Burana, seront
reprises au 20e siècle par Carl Orff. Le symbolisme érotique y remplace
l'amour courtois.
Conte et nouvelle
Le conte est la forme la plus simple et la plus ancienne du récit littéraire, transmis par tradition orale. Très prisé au Moyen Âge, le conte
s'écarte progressivement de sa dimension sacrée initiale pour adopter
un ton plus léger, grivois ou satirique. Peu à peu le conte donne luimême naissance à une littérature plus légère et profane : la nouvelle,
dont l’inspiration viendra d’Italie, d’où Boccace avec son Décaméron
inspirera les auteurs français de la fin du 15e siècle, tels que Marguerite
de Navarre avec son Heptaméron.
Chronique
Rédigée en latin jusqu'au 13e siècle, la chronique raconte un événement historique dont l'auteur fut le témoin. Le Moyen Âge compte
plusieurs grands chroniqueurs, comme Philippe de Commynes qui,
dans ses Mémoires, présente une analyse des événements décrits et
apparaît, à ce titre, comme le premier historien français.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
nouvelle
roman
- pastoral
- chevaleresque
- parodique
- sentimental
littérature historique
conte
prose
narrative
littérature religieuse
Rabelais
prose
d’idées
littérature morale
essais (Montaigne)
Le XVI e siècle :
la Renaissance
tragédie
théâtre
comédie
chanson et
musique
genres :
- miracle
- mystère
- satire
- farce
poésie
ode
sonnet
ballade
Français langue première
145
40S : Littératures francophones
Le XVI e siècle : quelques points de repère socioculturels
La
Renaissance
Le 16e siècle est reconnu comme celui de la Renaissance, par rapport à la
période précédente, le Moyen Âge, considérée souvent à tort comme une
période de « sommeil ». La Renaissance, c'est-à-dire « nouvelle
naissance », est comme un retour aux sources, à l'Antiquité. Le 16e siècle
est une période de grands changements, tant dans le domaine des
mentalités que dans celui de l'art (littérature, peinture, musique,
architecture, sculpture) et des sciences (astronomie, médecine, etc.). À
la fin du Moyen Âge, quelques évènements majeurs ont préparé la
Renaissance : l'imprimerie et les Grandes Découvertes auxquelles
s’ajouteront les guerres d'Italie, pendant la première moitié du 16e siècle.
Le 16e siècle est une période de remise en question des différentes
croyances religieuses, morales, intellectuelles et politiques, ce qui va
bouleverser les mentalités et influencer la littérature. Cette évolution,
accentuée par la modification du savoir et sa diffusion à un public élargi,
conduira à l'émergence des deux courants de pensée propres à la
Renaissance : l'Humanisme, profane et culturel et la Réforme, religieux.
L'influence
italienne
Lors des guerres d'Italie, les Français découvrent dans ce pays une richesse
économique et culturelle ainsi qu’une société raffinée qu'ils ne connaissent
pas encore. À ce contact, la société française subit de profondes
transformations dans tout ce qui touche à la culture et à la vie quotidienne.
Véritable mécène, le roi François 1er attire à la Cour de France des
savants et des artistes italiens tels que Léonard de Vinci, dont il devient
le protecteur. Ce roi est à l'origine du « faste », un nouvel art de vivre
français.
Évidemment, la littérature sera le miroir des bouleversements de la
société.
L'humanisme
« L'homme est l'inventeur de toute science, le chercheur de toute vérité
et la source de toute erreur. » (Érasme, Éloge de la folie)
L’humanisme est un mouvement intellectuel qui, tout en prônant un
retour à l'Antiquité (Grèce et Rome), place l'homme au centre de
l'univers. L’humanisme est une philosophie qui se met au service de
l’homme; c'est aussi la recherche de la société idéale et de la sagesse,
celles du monde antique. Curieux et souvent polyglotte, l'humaniste
veut tout savoir de ce qui le concerne. L'humanisme redonne sa place
au corps (on découvre le nu) et à la liberté dans tous les domaines :
religion, morale, politique, d'où le goût passionné de la vie et
l'émergence de l'individu qui en découlent.
146
Français langue première
40S : Littératures francophones
Mais, après un temps d'optimisme fondamental envers la créature
humaine, la seconde moitié du 16e siècle voit naître une remise en question du modèle antique. Les incertitudes politiques, religieuses et intellectuelles entraînent le doute et le scepticisme quant aux qualités
humaines. Ces interrogations, que l'on sent déjà poindre chez Montaigne
(« Que sais-je? »), sont à l'origine des incertitudes du baroque.
Dans le domaine de l'art (peinture et sculpture), l'homme est le centre
et les sujets profanes sont beaucoup plus fréquents qu'au Moyen Âge.
Toute la littérature de cette époque sera fortement marquée par cet
esprit nouveau.
« Ma foi est un château fortifié de murailles »
(Martin Luther, « Ein feste Burg »)
La Réforme
(Allemagne)
Née en Allemagne en 1517, sous la poussée d'un moine défroqué,
Martin Luther, la Réforme (qui signifie retour à la forme, à la loi
primitive) est le résultat d'une crise de foi et d'une crise sociale, à la
suite de certains scandales de l'Église : indulgences, immoralité, corruption. Ce nouveau dogme s'oppose à la fois au pape et à l'empereur
du Saint Empire romain germanique, Charles Quint.
La Réforme religieuse de Luther préconise trois points essentiels :
• le retour à la lettre des Évangiles, l'Évangélisme;
• l'utilisation de la langue du peuple, au lieu du latin, comme langue
liturgique;
• le libre examen de conscience, soit une confession directe à Dieu.
Née de cette protestation contre toutes sortes d'abus, cette nouvelle
religion fait de nombreux adeptes, les Protestants. À l'échelle plus
humaine, cette foi s'étendra rapidement à toute l'Europe, surtout celle
du Nord. C'est la fin de l'unanimité religieuse. En Angleterre, Henri VIII
implante la religion anglicane. En Écosse, John Knox fonde l'église presbytérienne. L'esprit de cette époque de contestation colore fortement
la littérature du 16e siècle et, en particulier, la poésie dite engagée.
En France la religion réformée est d'abord tolérée et ses partisans, les
Protestants ou Huguenots, se retrouvent dans toutes les classes de la
société. L'austère Jean Calvin s'en fait le théoricien et adopte les thèses
de Luther. Mais, très vite, le protestantisme devient indésirable car jugé
dangereux : il exposerait le royaume de France à la division intérieure.
Mais la Réforme entraîne la Contre-Réforme catholique, ce qui aboutit
à une guerre civile déchirant l'état français. C'est la grande tragédie du
16e siècle dont le massacre de la Saint-Barthélémy (1572) est le point
culminant. Ces mouvements violents auront une grande influence sur
la littérature de la Renaissance, les écrivains engagés faisant de leur
plume une arme. (Agrippa d'Aubigné, Les Tragiques)
Français langue première
Les guerres
de religion
(France)
147
40S : Littératures francophones
Découverte du
Nouveau Monde
et autres
découvertes
Après le Portugal et l'Espagne, la France du 16e siècle se met à l'heure
des Grandes Découvertes. Sous l'égide de François 1er, les navigateurs
français explorent les côtes de l'Amérique du Nord. En 1534, Jacques
Cartier arrive au Canada et en prend possession. Cette découverte
s'ajoute aux précédentes (Christophe Colomb et l'Amérique en 1492,
Vasco de Gama et l'Asie en 1497, Magellan et le tour du monde de
1519 à 1522) et modifiera la représentation du monde de l'époque.
La découverte de notions nouvelles est révolutionnaire : rotondité de la
Terre, héliocentrisme, nouveaux peuples, nouvelles mœurs et religions
inconnues…
Les sciences
Au 16e siècle, l'homme éprouve une soif immense de savoir. Il veut tout
comprendre. C'est le point de départ de la recherche et de l'expérimentation. D’importants progrès voient le jour : l'algèbre apparaît en fin de
siècle; la médecine se développe, notamment dans les domaines de
l'anatomie et de la chirurgie; la construction des armes à feu se raffine;
la production de la soie est introduite en France ainsi que la culture de
nouvelles plantes, telles que le houblon, utilisé dans la fabrication de
la bière. On découvre le secret des émailleurs italiens et allemands.
L'utilisation de la boussole aide les navigateurs à s'orienter, ce qui
favorisera la colonisation du Nouveau Monde. Les progrès de l'imprimerie bouleversent la propagation du savoir.
Les arts
Grâce à l'Italie, la France redécouvre l'antiquité. Amoureux des arts,
François 1er s'entoure d'artistes italiens qui vont embellir le cadre de vie
des princes de la cour.
• L'architecture : elle est représentée en particulier par les Châteaux
de la Loire (Chambord, Blois…) élégants et lumineux, puis par le
palais royal de Fontainebleau, dont les artistes italiens feront une
demeure fastueuse.
• La peinture et la sculpture : elles se mettent au service de
l'architecture. Les artistes italiens et français uniront leurs talents.
L'élégance des premiers, s'alliant au maniérisme des seconds,
donnera naissance à la peinture décorative de l'école de
Fontainebleau. Signalons parmi les peintres Jean et François Clouet
pour leurs portraits; parmi les sculpteurs, Jean Goujon et Germain
Pilon.
• La musique : c'est un art privilégié à la cour du roi. Diffusée partout
en Europe, la musique française, soit vocale, soit de danse, connaît
des compositeurs renommés (Anequin, Lejeune, Roland de Lassus)
que l'on se dispute dans les cours d'Europe.
148
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les genres et courants littéraires au XVI e siècle :
quelques points de repère
Dès le début du 16e siècle, un à un, les grands fiefs sont annexés à la
royauté. En 1539, François 1er impose le français dans toute la France,
pour remplacer le latin dans les actes juridiques et administratifs. Seule
l'Église continuera à utiliser le latin comme langue liturgique, et ce,
jusqu'en 1965.
Unification
linguistique et
évolution de la
langue française
L'imprimerie réglemente l'usage de la grammaire et de l'orthographe
lexicale. La « langue du roi » s'enrichit de mots nouveaux : emprunts
à d'autres langues comme l'italien, créations (néologismes), termes de
dialectes régionaux, évolution de mots latins. Peu à peu, la langue
française se rapproche de ce qu'elle est aujourd'hui. Après de nombreuses modifications par rapport au français médiéval, le français de
la Renaissance acquiert ses lettres de noblesse : la langue française
s’affirme progressivement comme une langue à part entière, porteuse
de savoir et outil de réflexion.
L'influence des auteurs du Moyen Âge, centrés sur la foi chrétienne,
persiste au 16e siècle, malgré l'importance que prend la place de
l'homme dans tous les domaines. Ballade et rondeau par exemple conservent leur place. Cependant, l'influence italienne est prépondérante
(Boccace, le Décaméron; Pétrarque, Sonnets; Machiavel, le Prince)
ainsi que celle des auteurs antiques, grecs (Socrate, Aristote, Platon)
ou latins (César, Virgile). Ces nouvelles sources d'inspiration seront
essentielles chez les auteurs de la Renaissance. La littérature d'alors
est caractérisée par le renouvellement de la pensée, liée elle-même
aux changements profonds de la société. Le 16e siècle marque une
époque de découvertes qui entraînent des réflexions politiques,
religieuses et philosophiques, remettant en question les croyances, les
pensées et même le langage. L'écrivain humaniste est engagé et
n'hésite pas à interroger le pouvoir politique ou à dénoncer les abus du
clergé et des princes. Il s'interroge incessamment sur l'homme, la
nature et le monde. De ce fait, si le début du siècle est marqué par
l'individualisme et la confiance en l'être humain, la fin en révèle plutôt
la perte de confiance en l'homme, perçu à la fois dans sa grandeur et
dans ses limites. Cela donne lieu à une période de scepticisme d'où
émergent les aspirations morales, religieuses, politiques et sociales de
l'époque. Cette littérature de réflexion critique annonce l'esprit de la
philosophie du siècle des Lumières.
Français langue première
La littérature
au 16e siècle
149
40S : Littératures francophones
Prose d’idées
L'intense activité intellectuelle de la Renaissance et la diffusion
galopante du livre permettent de débattre des grands bouleversements
de ce siècle. Un tel contexte contribue au grand essor que connaît alors
la littérature prosaïque du 16e siècle.
Littérature
historique
On retrouve la littérature historique chez Jean Bodin, Étienne Pasquier
ou Blaise de Monluc (Commentaires) qui rapporte ses campagnes militaires ou chez d'autres auteurs qui dénoncent l'absurdité des guerres
de religion.
Littérature
religieuse
De nombreux auteurs se sont essayés à la littérature religieuse à travers différents types d'ouvrages : Rabelais, Erasme, Marguerite de
Navarre, Lefèvre d'Étaples (traducteur de la Bible en français et commentateur) Montaigne et Jean Calvin (Institution de la Religion
Chrétienne), fondateur du protestantisme français.
Littérature
morale
La littérature morale, qu'on retrouve encore chez de nombreux auteurs
du 16e siècle, est plus particulière chez Jacques Amyot et Étienne de la
Boétie, qui s'expriment avec ferveur et conviction dans les voies où ils
se sont engagés.
Essai
Un genre nouveau fait son apparition au 16e siècle : l’essai. L’œuvre
unique de Montaigne qui sera source d'inspiration pour de nombreux
auteurs ultérieurs, est le premier bastion de la littérature du « moi ».
Montaigne, dans l'œuvre de toute une vie, innovera dans ce genre, où,
à travers l'analyse de sa propre personnalité, il aborde tous les sujets,
se prêtant ainsi à la réflexion philosophique : éducation, haine, convoitise, amitié, langue simple, ouverture d'esprit, message non moralisant, sobriété d'une vie proche de la nature, mort… Montaigne propose
une sagesse et un art de vivre qui représentent la conscience de vivre.
Plus de quatre siècles plus tard, ce précurseur, philosophe de la pensée
humaine, qui décrit les sentiments de tous les humains, reste un auteur
accessible et actuel.
150
Français langue première
40S : Littératures francophones
Quoique la littérature de fiction revête une certaine importance au 16e
siècle, elle arrive loin derrière l'œuvre religieuse ou morale, en ce qui
concerne le nombre d'auteurs, de lecteurs ou de parutions. Cependant,
les auteurs de ce genre sont de véritables écrivains.
Prose narrative
Deux auteurs exceptionnels dominent cette période :
Marguerite de Navarre (sœur de François 1er), cultivée et sensible, fut
la protectrice des gens de lettres, des savants et des artistes. Sa cour
fut un des foyers de l'humanisme. C'est une des premières femmes
libres de l'histoire de France. Curiosité, sensibilité et courage intellectuel font d'elle une femme d'exception.
Marguerite
de Navarre
Sans doute l'écrivain le plus créatif de la littérature française, Rabelais
fera une admirable synthèse de la prose d'idées et de la prose narrative.
Il s'adresse à tous les publics, qu’ils soient lettrés ou populaires, et il les
séduit. Sa prose, comique et satirique, lyrique et tragique, se propose
de mettre en relief la vérité et la sagesse cachées derrière l'apparence
de la folie. Chez Rabelais, tout est symbole : la taille de ses héros, le
rire, les excès. Pour cet auteur d'avant-garde, tout dans la vie doit être
au service du bonheur et de l'épanouissement de l'homme, ce pour quoi
celui-ci doit se libérer de toute entrave possible, qu'elle soit morale,
religieuse ou autre. C’est sans doute pour cette raison que certains de
ses livres seront condamnés par l'Église. D'une richesse exceptionnelle,
son écriture en fait un virtuose de la langue française.
François
Rabelais
Avec la « saga » de ses géants, « Gargantua » et « Pantagruel »,
Rabelais, ce moine, médecin et grand voyageur, écrivain d'une
phénoménale culture, écrit dans la lignée des fabliaux du Moyen Âge.
Ses œuvres, proches du roman actuel, ressemblent plutôt à des contes
fantastiques et sont une satire, parfois très caustique, de certains
aspects de son époque.
Le roman du 16e siècle apparaît sous des registres divers :
chevaleresque (adapté des œuvres médiévales), parodique, sentimental (intrigue à l'italienne) ou pastoral (retour à la nature).
Roman
Durant la Renaissance, la nouvelle est un genre littéraire qui connaît un
grand essor. Marguerite de Navarre excelle dans ce genre. Dans
L'Heptaméron où elle est inspirée par Boccace (le Décaméron), l'auteure
se démarque de l'écrivain italien par une observation psychologique plus
fine et un style plus recherché. Les dix personnages à qui elle donne la
parole abordent et commentent les thèmes chers à l'humanisme.
Nouvelle
Français langue première
151
40S : Littératures francophones
Conte
Teinté de l'esprit « gaulois » du Moyen Âge, le conte reste l'instrument
de la satire.
Théâtre
Le théâtre s'inspire des formes théâtrales de l'Antiquité. Il représente
le genre qui connaît le moins d'évolution. Au 16e siècle, le théâtre continue dans la ligne du Moyen Âge; cependant, il jette déjà les bases du
succès que ce genre atteindra au 17e siècle.
Miracle,
Mystère,
farce et satire
Pour répondre à un public populaire, certaines confréries se plaisent à
cultiver ces genres médiévaux. Mais le Parlement interdit bientôt la
représentation des Mystères et la farce est sur son déclin. L'Hôtel de
Bourgogne est la seule salle qui, à Paris, offre encore des représentations publiques.
Tragédie
Jodelle publiera Cléopâtre captive, la première tragédie française.
Scaliger écrira La Poétique et y fixe les règles de la tragédie. Il est le
père de la règle des trois unités (lieu, temps, action), qui sera reprise
au 17e siècle. Garnier s'illustrera avec Les Juives.
Comédie
La comédie s'inspire des auteurs grecs et latins comme Plaute et
Térence. Parmi les adaptateurs, pas d'auteur illustre. Cependant, ces
comédies sont connues des auteurs du 17e siècle et les inspirent. Un
des initiateurs, Jodelle, présentera Eugène.
Tragi-comédie
Prisée du public populaire, la tragi-comédie fera l'objet d'un débat dramaturgique, opposant les tenants de la sérieuse tragédie à ceux d'un
genre plus léger.
Poésie
Après Villon, au 15e siècle, s'installe un temps de « silence » poétique de
quelques décennies. Mais, bientôt, les conditions politiques, la protection
des artistes et les influences étrangères contribueront à un renouveau de
cet art. L'inspiration, les formes et la langue elle-même s'épanouissent
alors au fil du siècle pour faire, de la Renaissance, l'âge d'or de la poésie
française.
152
Français langue première
40S : Littératures francophones
Clément Marot crée, au début du siècle, un style nouveau qui marque
son originalité. Il fait la transition entre les grands rhétoriqueurs du
Moyen Âge, au service d'une inspiration courtisane, et les tenants d'un
nouveau lyrisme. Il introduit des genres nouveaux (épître, épigramme,
églogue et élégie). Influencé par les querelles de religion, il rédigera
Trente psaumes et l'Enfer mais c'est par la publication de L'adolescence
clémentine qu'il connaît la consécration poétique.
Clément
Marot
Les poètes lyonnais sont influencés par ceux de l'Italie et plus particulièrement par Pétrarque. La maîtrise du sonnet est le fait de cette
poésie, représentée par Maurice Scève (Délie, objet de la plus haute
vertu) et Louise Labé (Débat de folie et d'amour), femme libre de pensée et de mœurs. Ces poètes ouvriront la poésie au lyrisme amoureux.
L’école
lyonnaise
À Paris, sept poètes du Quartier latin se rassemblent. Parmi eux,
Ronsard et du Bellay, qui entreront au panthéon poétique français. Ces
deux chefs de file proclament la nécessité d'une révolution rapide de la
poésie. Pour eux, ce renouveau doit passer par les textes antiques et
la valorisation de la langue française. Ces poètes mettront leurs talents
versificateurs au service de l'ode, de la ballade et surtout du sonnet,
dont on dit que Ronsard est « le vrai créateur ». Mignonne, allons voir
si la rose est le plus célèbre poème de Pierre de Ronsard. Il y fait
revivre cette formule du poète latin Horace : Carpe Diem (cueille le
jour). Comme les poètes de son époque, Ronsard sera inspiré par les
thèmes classiques : l'amour, la nature, la fuite du temps, la mort.
La pléiade
Le groupe de la Pléiade publiera un manifeste (Défense et Illustration
de la langue française) dont le but essentiel est de défendre le français
contre le latin et de l'enrichir. Joachim du Bellay le rédigera. Calquées
sur le grec et le latin, de nouvelles figures de style viennent enrichir la
langue française.
Dans Les Tragiques, poésie épique, Agrippa d'Aubigné, marqué du style
baroque, dénonce le massacre des Protestants (massacre de la SaintBarthélémy). Engagé dans l'armée huguenote, ce poète protestant
défendra ses idées à coup d'épée et à coup de plume.
Français langue première
Agrippa
d’Aubigné
153
40S : Littératures francophones
Poèmes à forme fixe
Ode
L’ode est constituée d'un nombre variable de strophes qui ont toutes le
même nombre de vers.
Ballade
La ballade se compose d'un couplet et d'un envoi, constitués sur les
mêmes rimes. Les couplets comptent autant de vers que les vers
comptent de syllabes, soit généralement 8 ou 10. L'envoi, plus court,
reproduit la forme de la seconde moitié du couplet. Le dernier vers des
couplets et de l'envoi est le même (Ballade des pendus de François
Villon).
Sonnet
Le sonnet est la forme la plus connue. Il se compose de quatre vers
répartis en deux quatrains sur deux rimes et deux tercets sur trois rimes.
La disposition des rimes est la même dans les quatrains : le plus souvent
embrassées (ABBA), mais parfois croisées (ABAB). Les tercets sont composés de rimes suivies et de rimes croisées (CCD/EDE). Les vers sont des
alexandrins, des décasyllabes ou, moins souvent, des octosyllabes
(Sonnets pour Hélène de Ronsard).
Chanson et
musique
La chanson française comprend de célèbres compositeurs tels que
Clément Anequin, Claude Lejeune, Roland de Lassus. Ces auteurs
musiciens sont recherchés dans toutes les cours d'Europe.
Le Cour du roi François 1er considère la musique comme un art de premier ordre et donne toute sa place à la musique de danse et à la
musique vocale. Grâce à ce contexte artistique ouvert, la chanson
française connaîtra son apogée au 16e siècle.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
théâtre
poésie
roman
Baroque et Préciosité
Le XVII e siècle :
le siècle de Louis XI V
Classicisme
prose
narrative
poésie
prose d’idées
Français langue première
théâtre
155
40S : Littératures francophones
Le XVII e siècle : quelques points de repère socioculturels
Le Grand
Siècle ou
le triomphe de
la raison
Le siècle de Louis XIV, le Roi-Soleil, connaît un prestige sans égal, qu'il
soit d'ordre politique, militaire, économique, religieux, culturel ou
littéraire. « L'état, c'est moi » : par ces mots, ce monarque absolu
affirme son intention de régner dans tous les domaines. Sous son
règne, la France connaît un rayonnement formidable et jouit d'un
ascendant sur tous les pays d'Europe. Cependant, certains troubles
entachent l'image du pays :
• troubles religieux : Jésuites et libertins s'élèvent contre le jansénisme,
mouvement rigoriste de l'Église catholique. La vision pessimiste de
ces puritains austères qui dénoncent les libertins, les matérialistes et
les libres penseurs, nourrira abondamment la littérature de l'époque.
Théophile de Viau (le Parnasse satyrique) s'oppose à Malherbes et
sera condamné à mort alors que Racine (Phèdre) et Pascal (les
Provinciales) défendront cette nouvelle doctrine. Au même titre que la
Contre-Réforme, la révocation de l'Édit de Nantes par Louis XIV, en
1685, provoquera aussi toute une controverse littéraire, .
• troubles sociaux : ceux-ci sont dus au contraste flagrant entre le
faste de Versailles et la misère du peuple, contraste dénoncé par
François de la Rochefoucault (Réflexions diverses), Jean de la
Bruyère (Caractères), La Fontaine et Bossuet.
• troubles à l'intérieur de la noblesse : c’est la Fronde, période de
luttes de certains princes qui s'opposent à l'absolutisme royal. Le
Cardinal de Retz (Mémoires) y fera référence.
Tous ces troubles alimenteront la littérature du XVIIe siècle.
La langue
française
au XVII e siècle
Le XVIIe siècle fait le tri dans la langue trop luxuriante du XVIe. Fondée
en 1635 par Richelieu, l'Académie française est chargée d'établir les
règles du bien-parler et du bien-écrire. Syntaxe, orthographe, grammaire et prononciation seront alors définies. Ce siècle de la raison
impose des exigences de précision et de clarté. Vaugelas rédige le premier dictionnaire. La Grammaire générale et raisonnée de Port-Royal
condamne l'originalité de la période précédente. Comme dans les
autres arts, la rigueur se fait sentir dans la langue. On normalise aussi
la poésie, on fixe les règles du vers français. « Un mot pour une idée,
un seul sens pour un mot » : François de Malherbes met l'accent sur la
technique, face à l'imagination et l'inspiration. Il soumet le vers
français à la raison. Dans son Art poétique, Boileau ira encore plus loin
dans la codification de la poésie française. Ces deux poètes contribuent
au raffinement d'une langue qui s'affirme dans les salons littéraires
mondains. Anoblie, cette langue devient celle de l'élite européenne. À
peu de chose près, c'est celle que l'on parle et écrit de nos jours, même
si, au 17e siècle, le latin reste encore la langue du savoir.
156
Français langue première
40S : Littératures francophones
• La cour de Versailles, située à 16 km de Paris, succède à celle du
palais du Louvre. Le château de Versailles, modèle du classicisme
français, est le lieu des réjouissances entourant la vie du roi, que dix
mille personnes servent avec cérémonie. L'étiquette en est le mot
d'ordre et tout tourne autour des désirs et des activités du Roi-Soleil.
• Le peuple, lui, a faim : paysans subissant de mauvaises récoltes,
habitants des villes souvent réfugiés dans les cours des miracles ou
vivant dans des conditions peu enviables. Les impôts sont de plus en
plus lourds et la colère gronde sourdement. C’est souvent la misère.
• La bourgeoisie est une classe qui monte : la « noblesse de robe »,
née des concessions du roi et qui veut réduire les pouvoirs de la
noblesse de sang, entoure le monarque de ses conseils et joue de
plus en plus un rôle capital dans l'économie du pays. Commerçants
et chefs d'entreprise accèdent au devant de la scène politique. Ils
seront vite décriés comme parvenus par plusieurs écrivains, tels La
Bruyère.
• Colbert organise une Marine qu'il veut rivale des Marines anglaises et
espagnoles. Ainsi, l'expansion coloniale se développe et Samuel de
Champlain fonde, en Amérique du Nord, la colonie de la Nouvelle
France, près du Fleuve Saint-Laurent.
• L'éducation prend une place importante dans la société du XVIIe siècle.
Bourgeois et nobles fréquentent les collèges des Jésuites ou ceux rattachés à l'Université. Latin et philosophie dans l'esprit d'Aristote, y
ont une place de choix.
La société
Tout le XVIIe siècle sera empreint d’un lourd litige religieux. Le roi,
monarque de droit divin, a, dans les faits, toute autorité dans l’Église. Il
se donne donc pour mission la protection de la foi catholique, religion
d’état. À cet effet, il signera la révocation de l’Édit de Nantes (1685) pour
protéger la France de l’hérésie protestante, ce qui donnera lieu à de
sanglants combats entre Catholiques et Protestants et forcera ces
derniers (ou Huguenots) à s’expatrier.
La religion
De plus, à la suite de la Contre-Réforme, l’Église elle-même est divisée
en son intérieur. Les Jansénistes, comme les Protestants, veulent retrouver l’idéal évangélique, mais d’une façon rigoureuse, austère et fondée
sur la peur. À cette vision intransigeante de la destinée de l’homme s’oppose celle des Jésuites, plus libéraux et tolérants. Au sein même de
l’Église catholique, ces deux tendances créeront des affrontements violents. Un autre groupe, celui des libertins, remet en question et refuse
toute autorité, qu’elle soit monarchique ou religieuse. Ces libres penseurs
feront l’objet d’attaques des Jansénistes bien-pensants.
Jansénistes et libertins sont vite considérés par l’autorité comme dangereux pour la société du XVIIe siècle.
Tout comme les Protestants, les Jansénistes seront condamnés et persécutés par l’Église. Ces querelles intestines alimenteront largement la
littérature du XVIIe siècle et la plume deviendra l’arme acerbe de nombreux écrivains engagés.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Les sciences
Le XVIIe siècle est témoin de l'impulsion considérable des sciences. Les
expériences scientifiques sont encouragées et les savants protégés.
1666 voit la naissance de l'Académie des Sciences à Paris. Descartes et
Pascal apportent également une contribution significative au domaine
des sciences et de la philosophie. À 19 ans, Pascal invente une machine
arithmétique, étudie le calcul infinitésimal et entreprend le calcul des
probabilités. Ses études sur le vide et la pesanteur prolongent celles de
Galilée et Toricelli. Le XVIIe siècle marque la naissance de la science
expérimentale. Avec le Discours de la Méthode, Descartes innove en
matière d’ouvrages scientifiques, en passant du latin au français.
En physique, Denis Papin découvre la force de la vapeur et invente
l'autocuiseur. Il formule aussi la loi de la composition des forces, tandis
que Mariotte étudie les états solide, liquide, gazeux, et invente le
baromètre.
L'Anglais Harvey découvre la circulation du sang. D'empirique à scientifique, la médecine entre dans une phase d'explorations et de découvertes, concernant les différentes fonctions du corps humain.
Les arts
Siècle d'épanouissement du classicisme français, le XVIIe siècle se
démarque de la Renaissance et du Baroque en revenant, en réaction à
la variété et l'abondance du siècle précédent, à une sobriété et une discipline qu’on retrouve aussi en philosophie et en littérature.
• L'architecture : lignes et angles sont droits et symétriques. Tout est
calculé selon des proportions mathématiques. Le Château de
Versailles, réalisé par Hardoin-Mansart, représente le symbole du
classicisme de cette époque. Avec les jardins de Versailles, réalisés
par Le Nôtre, on touche au chef-d'œuvre du jardin à la française.
Autres créations de l'architecture classique : la Galerie des Glaces et
le Grand Trianon à Versailles, le dôme des Invalides et la place
Vendôme à Paris.
• La peinture : caractérisée par l'opposition entre les lignes horizontales et verticales, elle diffère du mouvement continu et libre du style
baroque.
Peintres célèbres : Poussin, Lorrain, Le Brun, les trois frères Le Nain
(peintures d'églises, scènes paysannes, sujets mythologiques, portraits, etc.).
• La sculpture : elle reprend le plein relief de l'art gréco-romain et les
attitudes simples des personnages, habillés de draperies tombantes.
Plusieurs mouvements funéraires sont l'œuvre de Coysevox qui
décore aussi le château de Versailles.
• La musique : elle est dominée par Lulli qui, Italien d'origine, va
imposer le mariage réussi de la tradition musicale italienne et du
goût français. Avec Molière, il crée des comédies-ballets et fondera
l'Opéra en France.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Les genres littéraires au XVII e siècle : quelques points de repère
Le XVIIe siècle est considéré comme l'âge d'or de la littérature en
France. Les courants artistiques et littéraires sont toujours le reflet
fidèle d'une société donnée à un moment précis de son histoire,
chaque courant exprimant sa propre vision du monde. On peut
ramener ces courants à deux grandes tendances qui se perpétuent de
siècle en siècle. L'une est basée sur l'imagination et l'inspiration et
fait appel à la sensibilité; thèmes, procédés stylistiques et vocabulaire
sont empreints d'exubérance et d'idéalisme. L'autre tendance est
basée sur la sobriété et l'épuration et s'adresse à la raison. Ces tendances sont indissociables.
Le XVIIe siècle voit la naissance des premiers véritables courants littéraires. Deux courants dominent ce siècle : le Baroque dans la première
moitié du siècle et le Classicisme dans la seconde. Mais, en 1670, la
Querelle des Anciens et des Modernes provoque le déclin du classicisme,
les premiers restant fixés sur les auteurs de l'Antiquité, les seconds,
désireux de se tourner vers l'avenir. Au début du XVIIIe siècle, les
Modernes sortiront vainqueurs de cette querelle.
Le Baroque et la Préciosité
Le terme « Baroque » signifie perle de forme irrégulière. Né en Italie,
le Baroque est un mouvement artistique et littéraire qui va de la
deuxième moitié du XVIe siècle à la première moitié du XVIIIe siècle. En
France, il connaît son apogée entre 1620 et 1640. Cet art est
caractérisé par l'excès, l'irréel et le mouvement, qui sont aussi les
caractéristiques de la peinture et l’architecture de cette époque. La fin
mouvementée de la Renaissance (remise en question par la Science
des croyances religieuses, sens de la vie, luttes religieuses…) entraîne
une littérature d'un type nouveau qui va porter les sentiments à leur
paroxysme. Désespoir, jalousie, haine, mort violente sont parmi les
thèmes chers au baroque. La nature y est souvent présente.
Démesure, mélange des règles, fusion des opposés, métaphores à
profusion, recherche du théâtral, les auteurs baroques se permettent
une liberté et une tolérance, tant dans leur vie que dans leur art. Cette
vision du monde traduit l'inquiétude spirituelle et philosophique des
artistes d'alors. Au service de l'imaginaire, cette esthétique se
manifeste particulièrement dans les salons mondains où un phénomène
de société s'affirme : la Préciosité.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
En réaction aux mœurs grossières de la cour d'Henri IV, va naître un
mouvement qui manifeste à outrance le raffinement et la distinction. Le
langage précieux privilégie métaphores et périphrases; une perruque
devient « la jeunesse des vieillards » et l'on n'hésite pas à « laisser
mourir une conversation » après s'être « délabyrinthé les cheveux ».
Échanges épistolaires, jeux de l'esprit, poésies galantes et maximes
sont les activités précieuses par excellence. L'amour en est le thème
favori (« Carte du Tendre ») et ce sont les femmes qui « font salon » :
Madame de Rambouillet, Mademoiselle de Scudéry; ce sont ces salons
que fréquentent et qui influencent de grands auteurs tels que Corneille,
Madame de Sévigné, Malherbes, La Fontaine et La Rochefoucault. La
libération de la femme et l'égalité des sexes sont parmi les revendications des ces érudites. Cependant, certains auteurs sont irrités par les
excès des Précieux et en feront une critique acerbe, en particulier
Molière avec ses Précieuses ridicules et ses Femmes savantes.
Poésie
C'est dans l'Antiquité et dans les poètes italiens ou espagnols que la
poésie baroque trouve ses racines. Compositions denses et touffues,
contrastes, contradictions, effets de démesure, lyrisme, extravagances,
thèmes de l'eau et du feu aux formes insaisissables et éphémères,
recherche des sensations fortes, telles sont les composantes de la poésie
baroque. Effets de paradoxe et de surprise se mettent au service de la
poésie galante. Cette poésie peut être prière, divertissement ou refléter
les préoccupations métaphysiques. On y retrouve le sonnet, le madrigal,
l'épigramme et l'impromptu. Parmi les œuvres produites, signalons les
OEuvres poétiques de Théophile de Viau et les OEuvres de Saint-Amant.
Théâtre
Bien que décrié par les dévots et l'Église, le théâtre français connaît son
siècle d'or au XVIIe siècle. Là encore, les auteurs baroques s'inspirent
des comédies italiennes et espagnoles. Intrigues complexes se mêlent
au surnaturel et au merveilleux. Sentiments extrêmes, violence et
sensualité se côtoient aisément. Avec ses « pièces à machines »
(trucages, apparitions ou disparitions soudaines d'un char ou d'un
personnage), le théâtre du XVIIe siècle est le père de l'opéra à la
française. S'y retrouvent aussi des pièces pastorales avec bergers,
bergères et intrigues amoureuses. Le théâtre baroque est représenté
principalement par des comédies (l'Illusion comique de Corneille) et
des tragi-comédies (le Cid de Corneille).
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Français langue première
40S : Littératures francophones
Le XVIIe siècle marque l'affirmation du roman comme genre littéraire,
proche de celui que nous connaissons aujourd'hui. Le roman précieux
est représenté principalement par l'Astrée d'Honoré d'Urfé et par
Clélie de Madeleine de Scudéry. Dans ces romans, les auteurs
proposent un code de conduite de la relation amoureuse où la femme,
idéalisée, doit demeurer inaccessible et où l'homme la désire pour son
esprit plus que pour son corps.
Roman
Le Classicisme
Le Classicisme correspond à l'apogée du règne de Louis XIV. C'est un
mouvement artistique qui se dresse face au baroque en privilégiant
l'ordre et la sobriété. Il oppose la raison à l'imaginaire et se base sur
l'imitation des Anciens et sur des règles strictes. Ainsi, la tragédie doit
respecter la règle des trois unités (lieu, temps, action) et celles de la
vraisemblance et de la morale. Dans la société de la cour du XVIIe
siècle, l'Honnête Homme est un être cultivé et raffiné chez qui prime
l'esprit et qui brille par sa conversation. L'Honnête Homme fait suite à
l'Humaniste de la Renaissance. Dans le style classique, peu de lyrisme
mais un esprit de simplicité, vérité, clarté et rigueur. L'analyse psychologique y est particulièrement soignée.
On versifie beaucoup au XVIIe siècle : théâtre, lettres, satires… Poète
de cour, après avoir touché au Baroque, François de Malherbes
s'attache à épurer la langue pour en faire un instrument parfait.
Malherbes fera le lien entre le Renaissance et le Classicisme. Pour lui,
la poésie doit répondre plus à la technique qu'à l'inspiration. « Enfin
Malherbes vint » (Boileau, Art poétique). Parmi ses œuvres, signalons
Consolation à Du Perrier, Odes à Marie de Médicis, Larmes de SaintPierre et Prière pour le roi allant en Limousin. Dans son Art Poétique,
Nicolas Boileau se lance à la défense du Classicisme. Il sera aussi
nommé historiographe du roi. Parmi ses œuvres, signalons Les Épîtres,
Les Satires et Le Lutrin. Jean de la Fontaine s'illustrera avec les Fables
où, à travers des éléments comiques, il fera une critique de la société
en s'inspirant du fabuliste grec Esope. Mettant souvent en scène des
animaux, ces Fables, chef-d'œuvre de l'art classique, se terminent
généralement par une morale. Le corbeau et le renard, La cigale et la
fourmi, Le laboureur et ses enfants et également La mort et le
bûcheron comptent parmi les fables les plus célèbres. Parmi les genres
poétiques, on retrouve des ballades et des madrigaux.
Français langue première
Poésie
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40S : Littératures francophones
Théâtre
Le théâtre classique du XVIIe siècle connaît une explosion de chefsd'œuvres dramatiques. Le théâtre irrégulier (baroque) passe
graduellement au théâtre régulier ou classique, régi par des règles et
qui a sa source chez les Anciens (Grecs ou Latins).
Tragédie
Après Corneille, qui passe du baroque au classique avec des pièces
telles que Cinna, Horace, Polyeucte, et Médée, Racine représente le
modèle du classicisme avec des pièces telles que Phèdre, Andromaque,
Iphigénie et Athalie. Les héros cornéliens sont dotés d'une volonté
farouche; ils n'aiment que ceux qu'ils estiment. Leur sens de l'honneur
atteint son paroxysme. Concernant la grandeur de l'homme, ils
soulèvent des questions de portée universelle. Chez Racine, la tragédie
est celle de la crise. Les héros raciniens sont écrasés par une passion
qui les dépasse. Accablés par un destin implacable et impuissants
devant la situation, ils n'ont de solution que la fuite dans le suicide ou
la folie. Ces âmes tourmentées vivent toutes de véritables drames
intérieurs.
Comédie
À travers le rire et le ridicule, Molière dépeint la société et les mœurs
de son époque : noblesse, bourgeoisie, clergé et peuple. Ainsi, il
démasque les travers de l'être humain : le dévot, le parvenu, l'obsédé,
le pédant, le fourbe, etc. Il utilise la moquerie pour dénoncer le vice. À
cause de ces dénonciations, Molière s'attire souvent les foudres des
autorités laïques ou religieuses. Molière, grâce à ses thèmes, son style
et ses dialogues, a atteint le sommet de la comédie, avec des pièces
telles que Tartuffe, Don Juan, Le Misanthrope, Le Médecin malgré lui,
L'Avare et le Malade imaginaire.
Comédie-ballet
À la comédie s'ajoutent musique et danse. Ancêtre de la comédie musicale et de l'opéra-comique, la comédie-ballet comporte en alternance
des parties chantées et des dialogues, bâtissant ainsi la trame du
drame lyrique musical. Signalons dans ce genre Le Bourgeois gentilhomme de Molière.
162
Français langue première
40S : Littératures francophones
Cette prose est dite prose des moralistes, appelés « philosophes » à
cette époque. Le développement des salons mondains suscite de nombreuses réflexions sur l'être humain, réflexions d'où surgiront, en
prose, des écrits variés de genres différents. Ces œuvres décrivent et
critiquent la société et ont un point commun : elles moralisent et portent à la réflexion. Parmi ces œuvres, citons :
• Les ouvrages philosophiques :
- Pascal : Pensées, Discours sur la condition des Grands
- Descartes : Principe de philosophie, les Passions de l'âme
• Les ouvrages épistoliers :
- Madame de Sévigné : Lettres à sa fille
− La Rochefoucault : Correspondance
• Les maximes :
− La Rochefoucault : Maximes, Réflexions diverses
• Les études de caractère :
− La Bruyère : Les Caractères
• Les traités éducatifs :
− Fénelon : Télémaque
• Les sermons religieux :
− Bossuet : Oraisons funèbres.
Prose d’idées
Le roman classique se veut, lui aussi, porteur d'une morale. Il est plus
réaliste que le roman baroque et chacun des lecteurs peut s'y reconnaître. On distingue :
• le roman historique avec Madame de la Fayette : La Princesse de
Clèves et Zaïde à dimension psychologique;
• le roman de mœurs avec Antoine Furetière : Le Roman bourgeois.
Prose narrative
Le conte et la nouvelle sont toujours aussi populaires : ainsi, Jean de
Segrais : Nouvelles françaises; La Fontaine : Contes et Nouvelles en
vers; Charles Perrault : Contes de ma mère l'Oye, contes en vers et en
prose.
D'autres genres fleurissent au XVIIe siècle :
• les Mémoires, du Cardinal de Retz et de Saint-Simon, parmi les
plus célèbres;
• la littérature des colons de Nouvelle-France, récits de voyage ou
genre épistolaire : Paul Le Jeune : Relations des Jésuites, Jérôme
Lalemant : Rapport sur les Hurons et Marie de l'Incarnation : Lettres
de la Vénérable Mère Marie de l'Incarnation.
Plusieurs auteurs se sont illustrés dans des genres différents. Ainsi, La
Fontaine (fables et contes), Perrault (poèmes et contes), Pascal
(réflexions philosophiques et écrits religieux), La Rochefoucault
(Maximes et Mémoires), pour ne citer que ceux-là.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
164
Français langue première
40S : Littératures francophones
chanson
prose d’idées
Le XVIII e siècle :
le siècle des Lumières
poésie
théâtre
roman
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Le XVIII e siècle : quelques points de repère socioculturels
La fin du règne de Louis XIV est marquée par l'immobilisme. Économie
stagnante, privilèges de l'aristocratie, misère du peuple, renouveau des
persécutions des Protestants. À la mort de Louis XIV, en 1715, le besoin
de nouvelles lumières se fait sentir en France.
Une vision du
monde différente
Les lumières viendront de l'élite intellectuelle qui propose alors une
vision du monde différente. La façon d'être du XVIIIe siècle ne se
centre plus sur Dieu et la religion mais sur l'Homme et la Raison. La
morale se fonde sur la foi en la nature, d'où l'homme dégage la
conscience du bien et du mal. On assiste alors à un renversement des
valeurs politiques, sociales et morales. Ce n'est plus une société
conforme mais c’est l'individu qui devient le point de référence
(Rousseau : Du contrat social). Les concepts de privilège et de hiérarchie sont remplacés par ceux de justice, travail et mérite personnel
(Montesquieu : De l'Esprit des lois).
Le XVIIIe siècle est caractérisé par un bouillonnement intellectuel et
social, qui entraînera le passage de l'Ancien Régime à la Révolution
française en 1789, et lui vaudra le surnom de « Siècle des Lumières ».
Ces lumières naissent d'un nouvel esprit, philosophique, engendré du
rationalisme cartésien et de la révolution scientifique du XVIIe siècle.
On entre dans une période où lois et raison font autorité. Dans tous les
domaines, on désire découvrir vérité et rationnel et faire jaillir le progrès possible qui en découle, tout en luttant contre l'obscurantisme
(ignorance, intolérance et fanatisme). Les concepts-clé de l'époque
sont contestation, critique, polémique et expression de soi.
Le « philosophe »
166
Après « l'humaniste » du XVIe siècle et « l'honnête homme » du XVIIe,
le XVIIIe siècle voit la naissance du « philosophe ». Si jusqu'au XVIIe
siècle le penseur méditait sur le monde, le philosophe, lui, pense et agit
dans un but précis : transformer ce monde et en contester les valeurs,
anciennes et dépassées. Malgré la censure royale et l'embastillement
possible, le philosophe lutte pour le droit à la critique et à la liberté
(Dumarsais : Encyclopédie, article : philosophe). Il se passionne aussi
pour les sciences nouvelles : physique, mathématiques, biologie,
botanique, médecine (Diderot : Rêve de d'Alembert, Rousseau : Discours
sur les sciences et les arts, Voltaire : Zadig, Diderot : Entretiens et De
la morale des rois). L’intention du philosophe consiste à améliorer le
bien-être de l'homme et son aisance matérielle, pour que celui-ci trouve, enfin, le bonheur. Cette confiance en l'homme et en son avenir sera
à l'origine du mythe actuel : le droit au progrès et au bonheur.
Français langue première
40S : Littératures francophones
C'est dans les cafés, salons et clubs, empruntés aux habitudes de
l'Angleterre, que lettrés, savants et artistes promeuvent les idées
nouvelles. Dans ces nouveaux centres intellectuels, les inégalités
sociales s'estompent. On s'y retrouve pour lire, discuter et philosopher.
C'est de ce brassage d'idées novatrices et audacieuses que naîtront les
mouvements, les faits et les écrits révolutionnaires : prise de la
Bastille, le 14 juillet 1789, qui marquera le début de la Révolution
française, abolition de la royauté, instauration de la République, liberté
de culte, gratuité de l'enseignement, etc., le tout ratifié par la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
La Révolution
française
À la suite des Précieuses du XVIIe siècle, plusieurs femmes, dans
toutes les classes de la société, se lancent dans la discussion
philosophique et la controverse, telles Mme de Tencin, protectrice de
Rousseau ou Olympe de Gouges qui défend les droits des femmes du
petit peuple.
La devise de l'époque devient celle de la République française :
« Liberté, Égalité, Fraternité », toujours actuelle.
Mais ce siècle des Lumières va se terminer dans le sang. Les idéaux de
tolérance et de liberté (Voltaire : Lettres philosophiques) se
transforment en déraison et en répression. Jugé par le Tribunal
Révolutionnaire, le roi Louis XVI et la reine Marie Antoinette devront
payer de leur vie, en passant par la guillotine, en 1793. Cette période,
dite de la Terreur, assombrit la fin de ce siècle (Robespierre :
Discours du 18 floréal, an II, Madame Tallien : Mémoires, Danton :
Comment sauver la France?).
Pays populeux, la France est surtout peuplée de paysans. On assiste à
la montée de la bourgeoisie aux dépens de l'aristocratie. Cosmopolite,
la société exprime le goût de tout ce qui est étranger, exotique, voyage,
exploration (Bernardin de Saint-Pierre : Paul et Virginie). L'expansion
coloniale s'amplifie. Dans l’Histoire du chevalier des Grieux et de Manon
Lescaut, l'abbé Prévost décrit la vie des jeunes gens déportés vers des
pays lointains, comme la Louisiane.
Français langue première
La société
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40S : Littératures francophones
La religion
Au XVIIIe siècle, la religion est un sujet très débattu. La religion apparaît alors comme un obstacle à la liberté. Voltaire lui substituera une
« religion naturelle », laïcisée : le « déisme », où l'homme n'a que
faire de la religion pour être en relation avec Dieu (Voltaire : Traité sur
la tolérance). Pour Rousseau, cette religion naturelle se rapproche du
panthéisme où Dieu et nature ne font qu'un (Rousseau : Julie ou La
nouvelle Héloïse). L'athéisme de Diderot le poussera à se révolter contre l'intrusion de la religion dans les domaines social, politique ou
moral (Diderot : Lettre sur les Aveugles à l'usage de ceux qui voient).
D'autres, agnostiques, marquent cette période de leur indifférence.
Mais la plupart des penseurs privilégient une religion plus tolérante et
respectueuse de la liberté et de la raison de chacun.
Le refus de la tradition chrétienne, la recherche d'une nouvelle morale,
plus ouverte, ainsi que les diverses conceptions du monde se
reflèteront grandement dans toute la littérature du XVIIIe siècle.
Les arts
L'art français s'affirme également et son prestige s'étend en Europe.
• L'architecture : urbanisation des villes, hôtels particulier, églises
nouvelles. Sous Louis XV, le style rocaille se transforme en art
rococo caractérisé par une absence excessive de symétrie (ainsi le
Petit Trianon à Versailles). Mais c'est à un style plus sobre et à la
ligne droite que l'on reviendra sous Louis XVI (Place Royale (place
de la Concorde aujourd'hui), Église de la Madeleine).
• La sculpture : le buste, signe de l'affirmation de l'individu, connaît
un succès phénoménal. Houdon immortalise ainsi Voltaire, Benjamin
Franklin et Diderot.
• La peinture : musées et collectionneurs apparaissent. Les sujets
sont les suivants : vie quotidienne, fêtes galantes, scènes exotiques
(Watteau, Fragonard). Diderot initie la critique d'art (Salons). Avec
le premier empire, on revient à la rigueur de l'art antique en
célébrant la gloire nationale (David : Bonaparte). Au XVIIIe siècle, la
peinture se popularise. Elle deviendra, comme la littérature, une
peinture d'idées, un art d'idéologie.
• La musique : à la mode, elle devient un fait social et culturel dont
on discute beaucoup. La musique italienne s'affirme (Vivaldi : Les
quatre saisons). On assiste à la naissance de l'orchestre moderne et
de l'opéra-comique. Rameau (Castor et Pollux) est un compositeur
reconnu. Les salons parisiens se disputent l'Autrichien Mozart.
168
Français langue première
40S : Littératures francophones
Dans ce siècle de raison et de progrès , les sciences connaissent un
remarquable essor. Les nombreux instruments récemment conçus
permettent cette expansion. Les grandes découvertes (Newton : la
gravitation universelle), la chimie moderne (Lavoisier) le courant
électrique, la machine à vapeur (Denis Papin) sont à la base de la
révolution industrielle du XIXe siècle. Parmi les savants illustres, mentionnons Fontenelle (Entretiens sur la pluralité des mondes) et Buffon
(Histoire complète et scientifique de la Nature). L'Académie des
Sciences, fondée en 1666, encourage les expéditions (Cercle polaire) et
les expériences diverses.
Les sciences
L'Encyclopédie (1751), ouvrage gigantesque de Diderot et D'Alembert,
bien que décriée par plusieurs, reste l'œuvre de divulgation
scientifique et culturelle la plus importante du siècle.
La langue française continue à être la langue de l'élite intellectuelle en
Europe (Allemagne, Russie, Hollande, Angleterre, etc.). Langue et culture françaises connaissent leur apogée, en raison de leur raffinement
et de leur civilité. Le vocabulaire évolue en fonction des sciences et
techniques nouvelles. Des mots étrangers enrichissent la langue
française : artistiques et italiens (mosaïque, aquarelle, ténor, fresque),
philosophes et anglais (politicien, budget, verdict). Des néologismes
apparaissent : anglomanie, citoyens, vandalisme.
Français langue première
La langue
française
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40S : Littératures francophones
Les genres littéraires au XVIII e siècle : quelques points de repère
Une littérature
engagée et
une littérature
sentimentale
Le XVIIIe siècle voit la victoire des Modernes dans la querelle qui les
opposait aux Anciens, à la fin du XVIIe siècle. Les écrivains inventent
d'autres genres littéraires, plus proches de l'esprit du siècle. L'idée a
pris le pas sur la forme. Le but des belles lettres, de la philosophie et
de la politique est de libérer l'esprit et les sens de la morale aliénante
des siècles précédents. La littérature du XVIIIe siècle se veut avant tout
militante. Elle vise la liberté.
Toutefois, la seconde moitié de ce siècle voit éclore une sensibilité nouvelle, où, autant que la raison, le cœur connaît le droit à l'expression.
Parmi d'autres auteurs, Diderot et Rousseau se feront les avocats de ce
nouvel esprit, où l'homme doit suivre ses instincts et ses sentiments et
être en accord avec la Nature et Dieu, son « ordonnateur ». On est alors
en présence d'une littérature lyrique où l'expression des sentiments et
du « moi » prennent le dessus. Les thèmes favoris sont : l'amour malheureux, la beauté inaccessible, la passion, la nature changeante, la
mort, autant de thèmes qui feront de cette période une sorte de préromantisme (Rousseau : Les Rêveries du promeneur solitaire, Bernardin
de Saint-Pierre : Études de la Nature).
En fait, il existe deux types de littératures, tout au long du XVIIIe
siècle : une littérature engagée, politique et philosophique
(Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Beaumarchais, Chénier) et une littérature sentimentale (l'abbé Prévost, Rousseau, Diderot). Ces deux
types de littérature vont coexister et certains écrivains, tels Rousseau
et Chénier, s'illustreront parallèlement dans les deux visions.
Prose d'idées
Le XVIIIe siècle marque le triomphe de la prose d'idées. Dans ce
domaine foisonnent des écrits semblables à l'essai : réflexions politiques, évocations historiques, traités philosophiques, dictionnaires,
encyclopédies. L'objet de ces œuvres est d'expliquer, convaincre et
inviter le lecteur à son propre engagement vis à vis de la cause
défendue.
• Montesquieu
De l'esprit des lois [De l'esclavage des Nègres, la séparation des
pouvoirs] (essai de sociologie politique, œuvre de toute une vie).
Essai sur le goût écrit pour l'Encyclopédie.
170
Français langue première
40S : Littératures francophones
• Voltaire
Le siècle de Louis XIV (condamné par la censure)
Traité sur la tolérance (réquisition contre le fanatisme)
Des délits et des peines (où Voltaire s'insurge contre la justice
inhumaine)
Essai sur les mœurs (où Voltaire se penche sur la civilisation d'autres
continents)
Lettres philosophiques suivies de Lettres anglaises
Le Russe à Paris (satire).
• Diderot
L'Encyclopédie (qui fait la synthèse de la pensée des Lumières)
Pensées philosophiques (censurées, critique du christianisme)
Salons (œuvres critiques de la peinture)
Lettres à Sophie Volland (sorte de journal intime et miroir des
mœurs du XVIIe siècle)
Voyage autour du monde (apologie de la vie naturelle).
• Rousseau
Du contrat social (critique du rôle de la société face à l'homme; l'auteur y énonce quelques idées prérévolutionnaires; les grands révolutionnaires, dont il est l'idole, s'y réfèreront)
L'Émile ou de l'Éducation (présentation des problèmes de la
pédagogie moderne)
Lettre à D'Alembert (prise de position contre le genre théâtral).
• La Hontan
Dialogue curieux entre l'auteur et un
sens (mythe du « bon sauvage » du Canada).
sauvage
de
bon
• Prose révolutionnaire
Mirabeau, Condorcet, Danton, Robespierre.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Roman
La forme moderne du roman, qui veut « être vrai » et « faire vrai »,
vient de l'Angleterre. Considéré par plusieurs comme un genre mineur,
souvent immoral et destiné aux femmes, il reste affranchi de toute
règle. Ainsi, il va pouvoir se développer à la convenance de ses auteurs.
Il connaît alors une grande popularité et son ascension est parallèle à
celle de ses lecteurs, constitués en particulier par la classe bourgeoise.
Pour répondre au goût de cette nouvelle clientèle, le roman réalise, à
travers les intrigues, une transposition de la vie réelle où chacun peut
se reconnaître. Parmi les thèmes les plus prisés, signalons l'amour, les
relations sentimentales, l'ascension sociale et la pensée philosophique.
Cette effervescence de création se traduit dans la diversité des romans.
• Le roman épistolaire ou par lettres :
Montesquieu : Lettres persanes (satire de la société)
Rousseau : Julie ou la Nouvelle Héloïse (qui prône le retour à la nature)
Laclos : Les liaisons dangereuses (œuvre qui dépeint une aristocratie libertine et décadente).
• Le conte philosophique
Voltaire : Candide ou l'optimisme (satire du « Tout est bien dans le
meilleur des mondes »)
Zadig ou la Destinée (paru anonymement)
Micromegas (récit relatant la rencontre d'un géant avec les hommes
minuscules : tout est relatif).
• Le roman d'apprentissage
L'Abbé Prévost : Manon Lescaut (peinture d'une société corrompue
et d'une passion amoureuse)
Marivaux : La Vie de Marianne
Crébillon : Égarements.
• Le roman picaresque
Lesage : Gil Blas (un aventurier s'élève dans la société).
• Le roman immoral
Sade : La philosophie dans le boudoir (où érotisme, perversion et
cruauté se rencontrent pour la première fois).
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Français langue première
40S : Littératures francophones
• Le roman dialogué
Diderot : Jacques le Fataliste (expression des idées de l’auteur sur
un grand nombre de sujets, déconstruction du roman).
• Le roman lyrique et la nature
Bernardin de Saint-Pierre : Paul et Virginie (roman exotique, annonciateur du romantisme).
Au XVIIIe siècle, le poète ne cherche plus à briller dans les salons.
Genre tenu pour mineur, la poésie devient un instrument de la raison
et, de ce fait, s'éloigne du lyrisme des siècles précédents.
Poésie
• André Chénier peut-être considéré comme un poète riche de
promesses, mais il meurt trop jeune, guillotiné :
- Iambes (composé en prison; poème de désespoir où il dénonce
l'arbitraire de la justice)
- Idylles ou Bucoliques.
• Jean-Jacques Rousseau : Rêveries du
(recherche du réconfort dans la nature)
promeneur
solitaire
• Voltaire : la Henriade et Poème sur le désastre de Lisbonne.
Divertissement social de prédilection et en plein essor, le théâtre du
XVIIIe siècle se transforme. Il voit le déclin de la tragédie (où Voltaire
se risquera encore), qui cède la place au drame bourgeois.
Théâtre
• Diderot :
- Le Fils naturel
- Le Père de famille.
On commence à s'y exprimer en prose pour décrire les conditions et les
comportements sociaux. De nouveaux personnages apparaissent : le
joueur, l'aristocrate corrompu, le négociant.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Dans le genre comédie, deux auteurs s'illustrent :
• Marivaux (comédie amoureuse) :
Le Jeu de l'amour et du hasard et La double inconstance (pièces où
l'auteur analyse l'univers féminin).
• Beaumarchais (comédie d'intrigue) :
Le mariage de Figaro (charmant badinage) et Le Barbier de Séville
(comédie de mœurs, farce populaire avec musique).
Chanson
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De nombreuses chansons marquent les débordements dont une foule
est capable dans un temps de rébellion. Mentionnons particulièrement
Rouget de l'Isle dont le chant de guerre La Marseillaise est devenu
l'hymne national français.
Français langue première
40S : Littératures francophones
roman
conte et
nouvelle
poésie
prose
d’idées
roman et
récit
théâtre
Romantisme
poésie
Fantastique
Le XI X e siècle
poésie
Réalisme
Naturalisme
Parnasse
roman, conte
et nouvelle
Français langue première
chanson
théâtre
Symbolisme
poésie
175
40S : Littératures francophones
Le XI X e siècle : quelques points de repère socioculturels
Les
bouleversements
politiques
Engendrée par la Révolution de 1789, la société du XIXe siècle connaît
de nombreux et profonds bouleversements : révolution et guerres
napoléoniennes ont ébranlé l'Europe et la France où la vie politique est
devenue complexe. En un siècle, ce pays aura connu deux révolutions,
un coup d'état et huit régimes politiques successifs (un consulat, deux
empires, deux monarchies — trois rois — et trois républiques). Durant
cette période d'instabilité et de transformations politiques et sociales,
la société est en pleine mutation.
Cet état de malaise existentiel, qualifié de « mal du siècle », « vague
des passions » ou « mal romantique » va se refléter dans toutes les
formes de la littérature.
La bourgeoisie
En 1789, le peuple français a osé rêver d'une république généreuse et
humanitaire. Mais, après la chute de la monarchie de Louis XVI et
l'instauration de la Première République (1792), c'est la bourgeoisie, la
classe montante, qui s'empare du pouvoir puisque seule détentrice des
richesses du pays. Le seul ordre qu'on vénère, c'est l'ordre
économique; son mot d'ordre : « enrichissez-vous », son mot de
passe : « profit ». Seule la bourgeoisie bénéficie des développements
économiques et urbains. Le grand perdant, celui qui fait la révolution
et qui s'est fait voler la victoire, c'est le petit peuple. Ce dernier devient
alors l'esclave de ce siècle et contribue, à ses dépens, à
l'enrichissement de la bourgeoisie. Les inégalités sociales s'accentuent
et sèment le germe d'une autre révolution : celle du syndicalisme et du
socialisme. Avec la naissance du prolétariat, on assiste à de
nombreuses insurrections, d'où émergera la Confédération Générale du
Travail, la C.G.T., toujours d'actualité en France.
Les réformes
sociales
Mais le XIXe siècle est aussi le siècle des réformes sociales :
• scolarité obligatoire, gratuite et laïque (Lois de Jules Ferry en 1882)
• droit de grève
• suffrage universel
• droit au travail
• abolition de l'esclavage et de la peine de mort
• liberté de la presse; abolition de la censure, romans-feuilletons (en
1860, 60 quotidiens existent à Paris).
176
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les découvertes de la science ont des retombées économiques
industrielles. Nombreux sont les domaines qui en profitent :
• industrie du charbon et du textile
• fonderies; métallurgie
• organisation de la poste
• libre-échange avec l'Angleterre.
Une
effervescence
économique
Cette effervescence donne lieu à la naissance de nombreuses banques.
Siècle de matérialisme et de conformisme, le XIXe siècle apparaît
comme le père virtuel de la mondialisation actuelle.
Ils possèdent terres, industries et banques et vivent dans le luxe. Ils
méprisent la classe des pauvres et les craignent. (Rimbault et Verlaine
les ridiculisent, Balzac et Flaubert les dénoncent.)
Malgré l'assainissement des terres, l'apparition des engrais et l'amélioration des récoltes, les paysans mènent une vie misérable. Trop souvent
salariés ou en location des terres qu'ils cultivent, ils choisissent de fuir
vers les villes. L'exode rural s'accroît et les paysans vont grossir la masse
des ouvriers prolétaires.
Esclaves du machinisme, travaillant de treize à quinze heures d'affilée,
chaque jour, sans protection ni assurance, ils sont à la merci de l'accident, de la maladie. Leur misère les amène souvent à la violence et l'alcoolisme, phénomènes qui les marginalisent davantage. Femmes et
enfants, utilisés et sous payés, payent un lourd tribut à la société.
Les bourgeois
Les paysans
Les ouvriers
Ces injustices sociales flagrantes poussent les ouvriers à des regroupements, des revendications sociales et des soulèvements populaires.
La Première Internationale, qui rassemble les prolétaires, a lieu en
1862, sous l'égide de Karl Marx (« Prolétaires de tous les pays, unissez-vous »).
Français langue première
177
40S : Littératures francophones
La religion
Les découvertes scientifiques spectaculaires conduisent le XIXe siècle
à embrasser une foi nouvelle : la foi dans le progrès. La science semble
être la source fondamentale du bonheur de l'homme et la réponse à
ses problèmes humains et métaphysiques. Cette foi illimitée dans le
progrès, appelée scientisme, détrône bientôt, chez certains, la foi en
Dieu mais sera combattue par l'Église. Propagée par le positivisme
(théorie d'Auguste Comte qui affirme sa foi dans la Science et la
Raison, combattant ainsi la doctrine chrétienne qui soutient l'origine
divine de l'homme), le scientisme mène à la théorie de l'évolution des
espèces de Darwin qui, attaquant la doctrine chrétienne, avance l'idée
de parenté entre l'homme et l'animal, ce qui suscite des réactions de
la part de certains écrivains. Ces idées nouvelles et révolutionnaires
perturbent la perception que l'être humain a de lui-même et de sa
place dans l'univers. De nombreux écrivains vont cependant suppléer
à ce détournement de la spiritualité en se tournant vers des activités
parareligieuses telles que le spiritisme ou l'occultisme, ce qui va donner
lieu à un nouveau genre littéraire : le Fantastique.
Les sciences
Sur les traces du siècle précédent, recherches et découvertes foisonnent :
- système métrique (obligatoire en 1840)
- découverte, par calcul, de la planète Neptune
- chemin de fer
- moteur à explosion
- typographie
- photographie - phonogramme
- exploitation de la « fée électricité »
- en médecine : premier vaccin (Pasteur), stéthoscope, rayons X,
anesthésie et méthode expérimentale de Claude Bernard.
Les arts
Le XIXe siècle connaît un bouleversement dans le domaine de
l'esthétique. L'artiste aussi évolue. Il désire traduire de façon
personnelle et subjective ses propres perceptions de sa vision du
monde. L'imagination a libre cours et se permet de transformer la
réalité selon le sentiment de l'artiste. Au XIXe siècle, Paris devient la
capitale mondiale des arts et elle accueille de nombreux artistes
étrangers.
178
Français langue première
40S : Littératures francophones
L'architecture
Le néo-classicisme caractérise le début du siècle : Arc de Triomphe du
Carrousel, colonne Vendôme, grand travaux d'urbanisation du baron
Haussmann à Paris, Opéra de Paris et Tour Eiffel (construite pour
l’Exposition universelle de 1889).
La sculpture
Commercialisée par la bourgeoisie, elle devient un « art de salon et de
chambre à coucher » (Baudelaire) ainsi qu'un art de musée.
Mentionnons, parmi les grand sculpteurs, les noms d’Auguste Rodin et
de Camille Claudel.
La peinture
Suivant l'esprit du siècle, plusieurs écoles coexistent. Le
néo-classicisme (Ingres) sous Napoléon 1er sera suivi de l'art
romantique (Géricault) puis de la peinture réaliste (Corot, Courbet,
Millet, Daumier) qui, parallèlement à Balzac, Flaubert, Stendhal ou
Maupassant en littérature, traduira la réalité sociale de l'ouvrier et du
paysan, du monde du travail et, parfois, de la déchéance (alcoolisme,
prostitution, misère des foyers). Mais c'est l'Impressionnisme qui va
révolutionner la peinture en traduisant sur toile l'esprit du naturalisme
littéraire (Monet, Pissarro, Cézanne, Degas, Renoir), peinture
d'avant-garde que les Salons refusent d'exposer. Le but de
l'Impressionnisme est de traduire les « impressions » essentielles du
sujet qui perçoit. La première exposition consacrée aux
Impressionnistes soulève, en 1874, des nombreux commentaires
négatifs (Le déjeuner sur l'herbe de Manet et Impression, soleil levant
de Claude Monet). Suivent, dans la lignée des Impressionnistes,
Gauguin, Van Gogh, Degas et Toulouse-Lautrec, qui témoignent à leur
tour de la vie quotidienne du petit peuple et de la nature telles qu'ils
les voient.
La musique
Paris attire de nombreux compositeurs étrangers : Rossini, Bellini,
Liszt, Chopin. Parmi les Français, signalons Berlioz qui crée l'orchestre
moderne, Gounod (Faust), Bizet (Carmen) et Claude Debussy qui
innove avec des dissonances et des harmonies nouvelles.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
La langue
française
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La langue continue son évolution. Au XIXe siècle, les Romantiques vont
bientôt accueillir dans leur œuvre les mots prosaïques de la classe
paysanne et ouvrière. (Victor Hugo va mêler « les mots sénateurs » et
« les mots roturiers » pourvu qu'ils « disent vrai ».) Aux expressions
abstraites, on préfère celles qui sont plus concrètes; on simplifie : on
ne « délabyrinthe plus ses cheveux », on les peigne. Apparaît aussi
l'emploi des particularismes linguistiques des personnages de roman,
leurs expressions locales ou régionales. Selon l'origine sociale des
héros de roman, les styles varient et ainsi se répandent dans la société
française, en même temps que les livres. Le vocabulaire français se
diversifie. L'ère industrielle voit apparaître de nouveaux mots : avion,
voler, gare, etc. La politique en introduit d'autres : socialisme, antidémocratique, etc. Dans les journaux sportifs apparaissent les mots football, base-ball, tennis, etc.; aux romans russes, on emprunte des termes tels que toundra, cosaque, steppe, mammouth, vodka, etc. La lettre w apparaît dans l'alphabet français en 1878. Petit à petit, une double association s’établit : la langue française est associée à la culture et
la langue anglaise aux affaires.
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les genres littéraires au XI X e siècle : quelques
points de repère
La littérature du XIXe siècle se dessine en plusieurs mouvements :
- le préromantisme (1800-1820) et le Romantisme (1820-1850)
- le Fantastique
- le Réalisme, le Naturalisme et le Parnasse (1850-1890)
- le Symbolisme (1880-1890).
Le Romantisme
Après la période révolutionnaire et les guerres napoléoniennes, la
France est déçue, ses rêves s'étant dissous dans le sang de la
désillusion. De ce bouleversement des idées et de cette remise en
cause des traditions émerge une « nouvelle manière de sentir »
(Baudelaire) et un esprit de mélancolie pour deux générations,
sensibilité que l'on va appeler « le mal du siècle ».
Le mal de vivre
Cette nouvelle perception du monde, née à la fin du XVIIIe siècle en
Angleterre et en Allemagne, est à l'origine d'un vaste mouvement
européen appelé le Romantisme.
Trois sources d'inspiration sont à l'origine de ce mouvement en France :
- l'œuvre de Jean-Jacques Rousseau au XVIIIe siècle : Rêveries du
promeneur solitaire;
- la littérature allemande : Goethe avec Les souffrances du jeune
Werther;
- la littérature anglaise : Walter Scott, Ann Radcliffe, Byron.
Cette pensée nouvelle est véhiculée par les écrivains exilés dans ces
pays, écrivains considérés comme précurseurs du Romantisme. Parmi
ces préromantiques, signalons Chateaubriand et Madame de Staël.
C'est en 1820, à la parution des Méditations poétiques de Lamartine
que le mouvement romantique voit le jour en France.
Le Romantisme s'élève contre la vigueur et le rationalisme du siècle des
Lumières. Ainsi, ce mouvement va établir la primauté des passions sur
la raison.
Français langue première
181
40S : Littératures francophones
Les caractéristiques communes des écrivains romantiques sont les
suivantes :
- le rejet de la tradition classique au profit de l'histoire nationale;
- l'intérêt porté au Moyen Âge (littérature, légendes, religiosité);
- l'intérêt pour les littératures étrangères (Angleterre, Allemagne,
Espagne);
- l'idéal social et humanitaire;
- la couleur locale et la vérité historique.
Le Romantisme part d'un sentiment d'inadaptation et de repli sur soi.
Ses thèmes favoris sont : l'ennui, la nostalgie, le rêve, la nature
sauvage, le surnaturel et la mort, le tout gravitant autour d'un thème
central : le « Moi » et l'introspection.
Le héros
romantique
Le héros romantique se complaît dans sa mélancolie et ses déchirements profonds. Son monde se nourrit d'insatisfaction et de malaise, de
passions exaltées et de tourments irréversibles de l'âme. Il fait l'apologie de la souffrance et côtoie le suicide. Assoiffé d'idéal et d'absolu, il
dénigre le matérialisme de la bourgeoisie contemporaine et se complaît
dans son lyrisme. Pour le romantique, la souffrance est le privilège des
âmes hors du commun. « C'est un fatal présent du ciel qu'une âme sensible » répète-t-il, après Rousseau.
Éternel révolté, le héros romantique cherche consolation dans la nature
et le surnaturel. Pour adoucir son mal, il tente un retour vers Dieu et
touche parfois à l'occultisme. Il est avide d'exotisme (voyages) et de
liberté totale. Le bizarre et l'exceptionnel l'attirent. Il rêve de voyages
dans le temps et dans l'espace. Certains romantiques se croient chargés
d'une mission et s'engagent dans la vie politique (Lamartine, V. Hugo :
Les Châtiments) ou produisent des œuvres socialement militantes
(Hugo : Les Misérables, G. Sand : La mare au diable).
Mais, en fait , le héros romantique aime se complaire dans sa tristesse
et il cultive son mal-être d'où il semble tirer le sens de sa vie.
Quelques pensées romantiques célèbres :
- « L'homme est un apprenti, la douleur est son maître. » (Musset)
- « La vérité sur la vie, c'est le désespoir. » (Vigny)
- « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. » (Lamartine)
Le Romantisme a produit de nombreux chefs-d'œuvre dans chacun des
genres littéraires. Mais il a eu aussi ses excès, en particulier les
exagérations caricaturales de certaines des lamentations du héros.
182
Français langue première
40S : Littératures francophones
La littérature romantique rejette toute règle et toute contrainte,
notamment les règles classiques (les trois unités en particulier).
L'écrivain veut jouir d'une liberté totale et s'exprimera à sa convenance, utilisant mots et expressions d'origines diverses. « Il ne faut
pas faire de distinction entre les mots sénateurs et les mots roturiers »
(V. Hugo). Ainsi le trivial et le raffiné se côtoient dans un même texte,
de même que le beau, le laid, le grotesque ou le néologisme. L'argot,
la langue populaire et l'expression locale sont aussi de mise, à condition qu'elles servent à traduire la vérité, la clarté et le pittoresque.
Le refus
des règles
Elle se met au service de la défense d'une cause comme, par exemple,
exprimer les prises de position des Romantiques, en particulier leur
désir de liberté, face aux règles et à la raison des XVIIe et XVIIIe
siècles.
• Victor Hugo : Préface de Cromwell
• Germaine de Staël : De l'Allemagne et De la littérature
• Stendhal : Racine est Shakespeare.
Prose d'idées
Au XIXe siècle, le roman acquiert ses lettres de noblesse et s'impose
comme le genre le plus prisé et connaît un succès énorme. Il cherche
à peindre la réalité de la société et se veut le témoin de son époque.
Le roman romantique innove de par la structure du récit, telle qu'elle
existe encore aujourd'hui.
Roman
Deux types de romans émergent :
• le roman autobiographique ou roman confession (récit intimiste, à la
première personne, exposant les tourments du « moi » et utilisant
l'analyse psychologique) :
− François-René de Chateaubriand : René
− Alfred de Musset : La confession d'un enfant du siècle
− Benjamin Constant : Adolphe
− Georges Sand : Indiana;
• le roman historique qui rappelle les évènements passés et la vie quotidienne du temps jadis et qui prend la défense des défavorisés :
- Alexandre Dumas : Les trois Mousquetaires, Le Comte de Monte-Cristo
- Victor Hugo : Notre-Dame de Paris, Les Misérables
- Prosper Mérimée : Carmen
- Alfred de Vigny : Cinq-Mars
- Eugène Sue : Les Mystères de Paris.
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40S : Littératures francophones
Poésie
Elle correspond au « chant intérieur » du poète qui revendique la
primauté des sentiments sur la technique. C'est une poésie lyrique et
passionnée, guidée par un esprit de liberté. Le poète a recours aux
comparaisons, métaphores et symboles pour exprimer la violence de
ses sentiments. Les thèmes favoris : ruines, crépuscules, nuit, lune,
automne, orages, nature déchaînée, voyages; ces thèmes traduisent le
mal de vivre du poète romantique.
•
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•
•
Théâtre
Alphonse de Lamartine : Le lac, l'automne, l'isolement
Alfred de Musset : Tristesse, La nuit de mai
Victor Hugo : Tristesse d'Olympia, Rêverie, Mélancholia
Alfred de Vigny : Le cor, La mort du loup
Gérard de Nerval : El Desdichado, Fantaisie.
Au début du XIXe siècle, on assiste à la décadence de la tragédie
classique. Après la vogue du mélodrame, le théâtre romantique opte
pour le lyrisme tout en combinant tragédie et comédie, comme dans la
vie. Le héros représente souvent le poète en lutte avec la société.
Couleur locale, exotisme, mélange des genres et des registres de
langue, vers ou prose, complexité de l'intrigue, tout cela est mis au
service de la vérité, historique ou sociale.
•
•
•
•
Victor Hugo : Hermani, Ruy-Blas
Alfred de Vigny : Chatterton
Alfred de Musset : Lorenzaccio, On ne badine pas avec l'amour
Alexandre Dumas : Antony, La tour de Nesle.
Le Fantastique (ou Romantisme noir)
Objet du
Fantastique
« Fantastique : qui est créé par l'imagination, qui n'existe pas dans la
réalité » (Le Robert). Le Fantastique touche à la rupture soudaine et
inexpliquée de l'ordre logique. C'est aussi l'intrusion du surnaturel
dans le monde quotidien. De nombreux romantiques sont attirés par
le Fantastique. Leur goût du rêve, du mystère, du surnaturel et de la
folie les y amène.
L'atmosphère du récit fantastique est bizarre, lourde voire effrayante;
elle mêle l'irréel au réel, jouant avec les peurs et les angoisses enfouies
au fond de l'être humain, depuis la nuit des temps.
184
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le genre fantastique se développe dans la première moitié du XIXe
siècle, avec le Romantisme, et il se perpétue parallèlement au Réalisme.
Déjà au XVIIIe siècle, Cazotte avait publié Le diable amoureux (1772),
œuvre qui marque la naissance du Fantastique comme genre littéraire.
De tout temps, l'être humain a été attiré par ce qui le dépasse :
l'au-delà, le mystère. Ne comprenant pas les forces qui l'influencent, il
s'imagine, depuis toujours, des récits fabuleux où des êtres étranges,
détenteurs de pouvoirs magiques, accomplissent des actes prodigieux.
Il s'invente un monde qui tente de répondre à ses questions existentielles : le monde du merveilleux, où les forces du Bien (la vie) et celles
du Mal (la mort) s'affrontent sans relâche.
Jusqu'au XVIIIe siècle, le merveilleux est florissant (ainsi les Contes de
Perrault au XVIIe siècle). Mais le siècle des Lumières voit en partie le
merveilleux, tout comme la croyance en Dieu, s'estomper, terrassés par
la Raison. Cependant, l'homme a besoin de croire en quelque chose qui
le subjugue et le domine. Certains prônent alors le retour du divin,
mais hors des religions révélées, et tentent des expériences
parareligieuses (spiritisme, occultisme). L'être humain du XIXe siècle
renouvelle son imaginaire à travers le Fantastique, qui prend alors le
relais du merveilleux et de la croyance en Dieu.
Le genre fantastique français subit l'influence des littératures
étrangères. À la fin du XVIIIe siècle, le roman « noir » ou « gothique »(1)
anglais se déverse sur la France : Horace Walpole avec Le château
d'Otrante (1764), Ann Radcliffe avec Le mystère d'Udolphe (1794), M.
G. Lewis avec Le moine (1796) et Mary Shelley avec Frankenstein
(1818), premier personnage mythique du Fantastique.
Historique et
influences
étrangères
Les héritiers français du roman noir (Nodier, Hugo, Lautréamont) peupleront leurs récits d'horreur, de vampires et de spectres (Nodier : Les
démons de la nuit, V. Hugo : Han d'Islande et Lautréamont : Les chants
de Maldoror).
Après la traduction des Contes d'Hoffmann, lui-même précédé de
Goethe dont le héros, « Faust », pactise avec le diable pour obtenir une
éternelle jeunesse, l'influence allemande déferle sur la France.
L'horreur et le sang des romans anglais laissent alors la place à des
sentiments plus subtils, moins violents, plus intériorisés, faisant part
des secrets les plus intimes de l'âme humain.
(1)
Le gothique fait référence aux romans anglais qui présentent des décors situés en Espagne et en Italie, hauts
lieux de l'architecture médiévale gothique : châteaux mystérieux en ruine, couvents, cimetières, passages
souterrains secrets, oubliettes, autant de lieux propices invitant aux activités criminelles et cachées.
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40S : Littératures francophones
Les Histoires extraordinaires d'Edgar A. Poe, traduites de l'américain en
1856 par Baudelaire, seront à l'origine du Fantastique psychologique,
parallèle à la période positiviste de l'époque. Après 1850, le Fantastique
va composer avec le courant réaliste, avec les récentes découvertes en
psychologie (S. Freud) et la médecine aliéniste du professeur Charcot,
les études nouvelles sur l'hypnose et l'hystérie. La folie devient alors un
thème littéraire prisé.
Caractéristiques
du genre
fantastique
C'est la présence troublante, mystérieuse et illogique de personnages
ou d'éléments surnaturels dans la vie quotidienne (vampires, spectres,
revenants, morts-vivants, démons, fantômes, squelettes, objets qui
s'animent, doubles) qui donne le ton. Les thèmes privilégiés sont la terreur, le crime, la sexualité, la mort, le satanisme, la folie, mais aussi
l'exotisme et le pittoresque. Le but de l'auteur fantastique est de
dérouter le lecteur, l'horrifier, le mettre en doute.
Les sentiments ainsi créés sont l'inquiétude, le malaise, la terreur, l'épouvante, le doute, l'incertitude, l'hésitation. L'écriture fantastique est à la
première personne, l'emploi du « je » ne faisant que renforcer l'inquiétude et l'incertitude du lecteur, incertitude déjà créée par les figures de
style utilisées telles que métaphores, comparaisons et personnifications.
Genres
littéraires
fantastiques
Le Fantastique est étroitement lié au récit : conte, nouvelle et roman.
• conte et nouvelle :
− Charles Nodier : Smarra ou les démons de la nuit, Jean-François
les Bas-Bleus
− Prosper Mérimée : La Vénus d'Ille
− Gérard de Nerval : Aurélia, Les filles du feu
− Théophile Gauthier : La cafetière, La morte amoureuse
− Villiers de l'Isle-Adam : Contes cruels
− Guy de Maupassant : Le Horla, La chevelure, Contes cruels et fantastiques
• roman et récit :
− Honoré de Balzac : La Peau de chagrin
− Victor Hugo : Han d'Islande
− Théophile Gauthier : Le Roman de la Momie
• poésie :
− Lautréamont : Les chants de Maldoror (poème en prose)
− Aloysius Bertrand : Gaspard de la nuit (poème en prose).
186
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le Réalisme, Le Naturalisme, Le Parnasse
(ou la contestation du Romantisme)
La seconde moitié du XIXe siècle est marquée par l'influence du positivisme, ce qui va donner naissance à plusieurs courants littéraires dont
le Réalisme et le Naturalisme, courants qui reflètent les préoccupations
scientifiques et sociales du moment. « La science renferme l'avenir de
l'humanité. Il viendra un jour où l'humanité ne croira plus mais où elle
saura » (Ernest Renan).
En étroite relation avec les développements sociaux et l'évolution des
mentalités, ce mouvement se targue de représenter la réalité telle
quelle. Exprimant un souci d'objectivité, le Réalisme réagit et s'élève
contre le lyrisme et les épanchements sentimentaux des Romantiques.
Le Réalisme
En 1838, l'avènement de la photographie, perçue comme art révélateur
de la stricte réalité, va influencer les artistes réalistes.
Le but de l'écrivain réaliste sera de rendre compte du réel, après une
observation minutieuse, digne de l'expérience scientifique. Ainsi,
comme le peintre de son époque, l'écrivain réaliste choisit ses thèmes
dans la vie quotidienne, n'hésitant pas à dépeindre la marginalité, la
laideur et même le sordide (ainsi, Balzac dans Le Père Goriot). Les
thèmes concernant la vie de la petite bourgeoisie y sont aussi
privilégiés, dans ce qu'elle a de plus médiocre : hypocrisie et égoïsme.
L'écrivain veut témoigner et émouvoir. Deux types de héros se
partagent le roman réaliste : le jeune homme de classe inférieure qui
veut s'élever dans la hiérarchie sociale mais s'y heurte et le bourgeois,
mesquin et méprisable. Calqué sur la vie quotidienne, le héros fait
plutôt figure d’anti-héros.
Stendhal : Le Rouge et le Noir, La Charteuse de Parme
Honoré de Balzac : Le Père Goriot, La comédie humaine,
Physiologie du mariage
Gustave Flaubert : Madame Bovary, L'éducation sentimentale
Guy de Maupassant : Une vie, Le saut du berger, Boule de suif, Les
contes de la bécasse
Roman et Conte
Dans les cafés-concerts, illustrés par le peintre Toulouse-Lautrec, la
chanson réaliste connaît un franc succès. L'amour dramatique de
préférence, et la misère du peuple, en sont les thèmes préférés.
Chanson
Français langue première
187
40S : Littératures francophones
Théâtre
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, un théâtre réaliste (théâtre de
mœurs, vaudeville et opérette), où chacun peut se reconnaître, se
divise en deux sous-genres :
• les comédies dites sérieuses, souvent moralisatrices :
Alexandre Dumas fils : La dame aux camélias;
• les comédies drôles et spirituelles, peignant les travers de la société :
le pouvoir de l'argent, le triomphe de la médiocrité, le mariage
(adultère, divorce, triangle amoureux) :
Eugène Labiche : Le voyage de Monsieur Perrichon
Georges Courteline : Messieurs les ronds-de-cuir
Edmond Rostand : Cyrano de Bergerac (qui atteint le triomphe)
Georges Feydeau : Le dindon.
Le Naturalisme Défini par Zola (chef de file de ce mouvement) comme « la formule de
la science moderne appliquée à la littérature », à la fin des années
1870, le Naturalisme puise sa source dans l'évolution scientifique du
siècle. Il prolonge le Réalisme sous une forme encore plus scientifique.
Se basant sur la méthode expérimentale de Claude Bernard, l'écrivain
naturaliste se veut un observateur et un expérimentateur. Certains
titres de Zola révèlent bien cet esprit novateur : Histoire naturelle et
sociale d'une famille sous le Second Empire (Histoire des RougonMacquart) et Le Roman expérimental.
En niant l'existence de tout élément surnaturel, le Naturalisme dépasse
le Réalisme dans la peinture qu'il fait du milieu social populaire, des
ouvriers, mineurs, paysans, petits Parisiens sans en cacher la misère,
la violence (alcoolisme, prostitution). Le roman naturaliste veut « faire
vrai » tout en expliquant les mécanismes divers de la vie, en se basant
sur les découvertes de la science : physiologie, psychologie, névrose,
hérédité, sélection naturelle (Darwin) , déterminisme biologique. Ainsi
procédera Zola dans la saga des Rougon-Macquart.
Le roman naturaliste se veut un terrain expérimental aux prétentions
scientifiques. Mais, comme le dit Maupassant, l'œuvre de l'artiste
étant toujours teintée d'une vision personnelle, donc arbitraire, le
Naturalisme réussit-il à être ce à quoi il aspire? N'y a-t-il pas contradiction à considérer l'art littéraire comme une science? Tout imprégné
d'« humanité », le personnage romanesque est-il comparable à un
robot programmé? C'est dans ces questions que résident l'ambiguïté
et la limite du Naturalisme.
188
Français langue première
40S : Littératures francophones
Germinal, L'assommoir, Thérèse Raquin, Nana, La Bête humaine, La
curée, La fortune des Rougon-Macquart... : en une vingtaine de
romans, Zola peint les quatre mondes de l'époque : le peuple, la bourgeoisie parvenue, le grand monde et celui des marginaux.
Roman et
nouvelle
Au XXe siècle, plusieurs films mettront certains de ces romans à la
portée de tous.
« Il n'y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien, tout ce qui
est utile est laid. » (Théophile Gauthier) Dans le domaine de la poésie,
le Parnasse(2) représente l'équivalent du Naturalisme. Après 1850, de
jeunes poètes, orientés par Théophile Gauthier, impriment une tendance nouvelle à la poésie en rejetant les débordements passionnés
des Romantiques et leur engagement politique et social. La poésie
renoue alors avec les pratiques classiques, quand le poète était un
artisan de la langue. La poésie devient descriptive. La description de
contrées lointaines a remplacé celle de l'âme. Le Parnassien a recours
à l'impersonnalité, sa documentation est solide et sa discipline austère.
La technique et la raison ont pris la place de l'exaltation des
sentiments. Pour le Parnassien, l'Art est gratuit et au seul service du
culte de la beauté. Cette doctrine, « l'Art pour l’Art » (Théophile
Gauthier), désire créer pour créer et non plus pour interpréter. Le poète
parnassien privilégie la forme. Il fera la transition entre les poètes
romantiques et symbolistes, poètes qui, bientôt, révolutionneront la
poésie en lui apportant tout un langage nouveau.
Le Parnasse
Théophile Gauthier : L'Art pour l'Art, Émaux et Camées
Leconte de Lisle : Poèmes antiques, Poèmes barbares
Jose-Maria de Heredia : Les trophées
Théodore de Banville : Les stalactites, Les Cariatides, Odes funambulesques.
Poésie
Le Symbolisme
Le Symbolisme marque la révolte contre les excès du Naturalisme et la
froideur du Parnasse, contre l'univers logique et rationnel de la science.
Le poète symboliste cherche à fuir la petitesse de la vie pour un
« ailleurs » plus riche, dépassant ainsi la réalité matérialiste de son
époque. L'écrivain symboliste vit en opposition avec le conformisme
bourgeois. Ce sera un marginal, éprouvant, à travers une grande
lucidité, un pessimisme existentiel. Baudelaire est l'initiateur de ce
mouvement dont le but n’est plus de décrire ou d'affirmer (réalité ou
sentiment) mais de suggérer, d'évoquer, pour atteindre la nature
spirituelle des êtres et des choses.
(2)
Objet du
Symbolisme
Parnasse : montagne sacrée de la mythologie gréco-latine où résident les muses, protectrices des arts et des
lettres.
Français langue première
189
40S : Littératures francophones
Le symboliste cherche à voir l'idée derrière l'apparence. Il privilégie les
idées et le mystère plutôt que la réalité et le rationnel et propose au
lecteur de s'évader du quotidien banal en utilisant le rêve,
l'imagination, la sensibilité. Pour ce faire, il use du symbole qui, au
moyen d'une image, exprime l'idée avancée. Par exemple, la flamme
symbolise l'amour et « l'albatros » de Baudelaire, oiseau ridiculisé par
les marins ou le « Pierrot » de Verlaine symbolisent le poète incompris.
L'écriture symboliste rompt aussi avec les règles traditionnelles de la
poésie. La forme extrêmement soignée, le vers libre et la liberté des
rythmes donnent naissance à une langue musicale. Verlaine, lui, innove
la poésie en prose.
Vivant en marge de la société bourgeoise, en quête d'une vie plus
intense, ces éternels révoltés que sont les symbolistes cherchent une
échappatoire dans une vie de bohème et les paradis artificiels (drogue,
voyages). Leur vie, déréglée et malheureuse, fera d'eux des « poètes
maudits ».
Poésie
190
Charles Baudelaire : Les fleurs du mal, Le spleen de Paris, Les paradis
artificiels, Mon cœur mis à nu
Paul Verlaine : Poèmes saturniens, Sagesse, Les Poètes maudits,
Fêtes galantes, Romances sans parole
Arthur Rimbaud : Poésies, Une saison en enfer, Illuminations
Stéphane Mallarmé : Poésies.
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le Féminisme
Le Surréalisme
Le mouvement Dada
poésie
roman
La Première Guerre
mondiale
L’Entre-deux-guerres
1914 - 1939
théâtre
La Belle Époque
1880 - 1914
roman
et récit
chanson
poésie
Le XX e siècle
roman,
récit, essai
théâtre
roman
poésie
L’Occupation
1939 - 1945
La Postmodernité
1970 -
poésie
théâtre
théâtre
chanson
roman,
essai
poésie
l’absurde
l’existentialisme
L’Après-guerre
1945-1970
le nouveau
roman
théâtre
chanson
le roman
policier
la science-fiction
Français langue première
191
40S : Littératures francophones
Le XX e siècle : quelques points de repère socioculturels
La société :
une mouvance
irréversible
Avec la montée fulgurante du progrès, le XXe siècle s'annonce comme
un siècle de bonheur. En France, dès le début du siècle, Paris se dote
d'eau courante, de gaz, d'électricité, d'égouts. Le métro fait son
apparition pour l'Exposition universelle de 1900, juste après la Tour
Eiffel. Les autos se multiplient et les transports en commun
s'améliorent, des tramways jusqu'au R.E.R.
Conquêtes sociales et développement culturel : en 1935, les femmes
obtiennent l'égalité des sexes avec les hommes dans le monde du
travail et, en 1945, accèdent au droit de vote. La contraception est
légalisée en 1967. Radiodiffusion, disques 33 tours, télévision puis
cédérom se répandent. En 1927, le cinéma devient parlant; la bande
dessinée apparaît. Le sport se popularise, football et cyclisme en
particulier; l'année 1903 voit la naissance du Tour de France. Vers la fin
du siècle, priorité est donnée à la culture : création du Musée d'Orsay
(Impressionnistes), Pyramide du Louvre, Bibliothèque nationale de
France, Opéra-Bastille, Cité de la musique, etc.
Pendant toute la première moitié du siècle, Paris est toujours la
capitale du monde et de nombreux artistes étrangers viennent s'y
exprimer. L'empire colonial français, qui a atteint son apogée dans les
années 30, s'efface peu à peu devant l'ère de décolonisation.
Cependant, dès le début du siècle, des signes avant-coureurs de
désastre, suivis de bouleversements généralisés, se manifestent en
Europe : Révolution de 1917 en Russie, régime totalitaire en U.R.S.S.
(Lénine, Staline), fascisme en Italie (Mussolini), nazisme en Allemagne
(Hitler), guerre d'Espagne (Franco), répressions au Portugal (Salazar),
crises économiques et politiques en France, événements qui feront que
la planète Terre ne sera plus jamais ce qu'elle a été.
À la stupeur de plusieurs générations, les deux grands conflits
mondiaux teinteront ce siècle de perplexité et d'angoisse, dues à la
perte des valeurs traditionnelles. Le bilan qu'on en fait est lourd
d'horreur, d'inégalité, de désolation, de remise en question. Les deux
grandes guerres, les nombreuses interactions politiques et
socio-économiques, la diversification des moyens de communication
marquent les aspects d'un phénomène nouveau et planétaire : la
mondialisation des problèmes.
C'est dans ce contexte de mouvance irréversible que se situent les arts,
dont la littérature, au XXe siècle.
192
Français langue première
40S : Littératures francophones
Dans l’Après-guerre, à partir des années 50, le malaise social se
retrouve aussi au sein de l’Église. La religion est délaissée, surtout par
la jeune génération. Les valeurs traditionnelles du christianisme sont
remplacées progressivement par des valeurs plus « modernes ».
L’amour a changé de sens. Celui de l’Évangile n’a plus le même attrait.
On le remplace par un amour « à la portée de tous », plus facile. Les
exigences de l’Évangile sont délaissées et l’on préfère s’aimer de façon
plus simple, plus « naturelle ». C’est le temps des beatniks, des
hippies, des grands rassemblements tels Woodstock, où le grand slogan
est devenu : « Faites l’amour, pas la guerre ». C’est alors que le pape
Jean XXIII, progressiste et ouvert sur son époque, convoque un
concile. Ce sera le 2e Concile du Vatican (1962-1965), afin que l’Église
s’inscrive dans le monde moderne, tout en respectant les fondements
de l’Église catholique.
La religion
Progrès fabuleux dans ce domaine! Découverte de la radioactivité
(P. et M. Curie), fission de l'atome (I. et F. Joliot-Curie), création des
matières plastiques, tissus et colorants artificiels. Biologie et médecine
ont beaucoup évolué, (ce qui pousse à définir une éthique biologique) :
clonage, cellules-souches, identification de l'A.D.N., aliments génétiquement modifiés (A.G.M.), bébé-éprouvette, fabrication d'organes
humains et de membres de remplacement.
Le premier avion à traverser la Manche, en 1909, avec Louis Blériot, est
l'ancêtre du Concorde (Paris—New-York en trois heures). À partir de
1965, l'astronautique ne cesse de se développer. La réalité dépasse la
fiction. Oui! on a marché sur la lune (1969).
Les sciences
et techniques
Dans la deuxième partie du XIXe siècle, le Symbolisme a marqué le
début d'une ère nouvelle : la modernité. De nombreux courants, dont
certains révolutionnaires, vont naître et partager quelques caractéristiques communes : divorce d'avec les œuvres du passé, prédominance
de la réalité intérieure plutôt qu'extérieure, changement radical des
techniques d'écriture, primauté du style.
La Modernité
peinture
De nouveaux mouvements voient le jour : le fauvisme (Matisse, Dufy,
Vlaminck), l'art naïf (Douanier Rousseau), le primitivisme (Utrillo), l'École
expressionniste de Paris (Modigliani). En 1907, Picasso (Guernica) est à
l'origine du cubisme, avant d'évoluer vers le surréalisme qui représente,
par la peinture, ce qu'André Breton traduit par sa poésie. Autres peintres
surréalistes : Chagall, Lurçat, Dali, Miro, Ernst, Magritte.
Les arts
sculpture
La première moitié du siècle, Maillol dédie son art au corps de la femme;
Camille Claudel (élève de Rodin), Giacometti, qui exprime la tragédie de
l’Homme dans une vie sans Dieu (L’Homme qui marche).
Français langue première
193
40S : Littératures francophones
architecture
Le Corbusier symbolise l'architecture moderne en portant attention aux
besoins pratiques de la vie moderne, sans en oublier l'aspect agréable
(unités d'habitation de Marseille, église de Ronchamp).
musique
Tout comme Fauré qui a mis en musique la poésie de Verlaine ou
Debussy qui a transposé « L'après-midi d'un fauve » de Mallarmé,
Maurice Ravel (Boléro) fera de même en s'inspirant de la littérature de
son époque, par exemple des Histoires naturelles de Jules Renard.
La deuxième moitié du siècle verra de grands changements dans les
styles musicaux : rock, disco, techno.
cinéma
Considéré comme le septième art, il s'impose en trouvant parfois son
inspiration dans les œuvres littéraires (Renoir, Carné).
La Belle Époque (1880-1914)
Le tout début du XXe siècle en France est une époque de progrès et
d'euphorie, c'est la « Belle Époque » qui connaît l'expansion industrielle
et coloniale. Malgré de grandes inégalités sociales, ignorées par l'élite
de ce pays, la classe bourgeoise veut croire que les récentes
découvertes vont permettre de mener une vie facile; son existence est
luxueuse et sans souci.
La littérature
jusqu'en 1914
Roman
En réaction aux mouvements réaliste et positiviste, le Dilletantisme est
un mouvement qui prône le retour du spiritualisme et l'amour du beau.
Maurice Barrès (Les Déracinés) et Ernest Renan proclament l'importance des traditions, de la patrie et de la religion, tandis qu'Anatole
France écrit : « Le beau nous apporte la plus haute révélation du divin »
et s'exprime à travers des romans historiques et de mœurs. Pour
l'écrivain dilettantiste, la forme et le style sont simples; l'accent est mis
sur l'étude psychologique, le primat de l'esprit sur le corps, la liberté, le
culte de l'intellect et l'amour du beau.
D'autres romanciers vont privilégier un nouvel humanisme. Ainsi,
Romain Rolland (Jean-Christophe), précurseur du roman-fleuve et
Alain Fournier qui sera rendu célèbre grâce au Grand Meaulnes. Quant
à Marcel Proust, il fera la chronique d'une société en voie d'extinction :
celle de la noblesse et des salons parisiens. Partiellement autobiographique, son énorme roman rédigé en sept parties (À la recherche du
temps perdu) est sans doute la plus grande œuvre du XXe siècle. Le
thème en est celui du temps et de la mémoire.
194
Français langue première
40S : Littératures francophones
Poésie
Homme des grandes passions, Guillaume Apollinaire domine cette
période en lui apportant une nouvelle sensibilité poétique.
À l'aide de poèmes-dessins ou calligrammes (association du texte et du
dessin), l'auteur dit son plaisir et sa douleur de vivre, d'aimer, d'écrire
(Le bestiaire, Alcools, Calligrammes). D'autres poètes le suivront sur la
lancée de la Modernité : Max Jacob, Blaise Cendrars (Feuilles de
route), Pierre Reverdy (Poèmes en prose), Anna de Noailles (Le
cœur innombrable), Paul Claudel (Cinq grandes odes) et Paul Valéry
(Charmes).
Théâtre
Ce sont Alfred Jarry et Paul Claudel qui vont en faire évoluer l'esprit.
Dans Ubu roi puis Ubu enchaîné, Jarry dénonce l'hypocrisie des
gouvernements et ridiculise l'esprit « petit bourgeois » en utilisant la
caricature et le langage dramatique. Tout en peignant la nature
humaine de manière symbolique et burlesque, ces pièces d'avantgarde annoncent déjà le surréalisme et le théâtre de l'absurde.
À travers son œuvre, Paul Claudel, écrivain chrétien mystique, rappelle
à l'être humain la noblesse de son destin spirituel et lui révèle comment
Dieu aide l'homme à supporter le tragique de sa condition (La Ville,
L'Annonce faite à Marie).
La Première Guerre mondiale (1914-1918)
L'Entre-deux-guerres (1918-1939)
L’optimisme aveugle de la Belle Époque masque une réalité
douloureuse. En France, on assiste à quelques scandales financiers
(l'affaire du canal de Panama) et politiques (l'affaire Dreyfus). L’année
1905 voit la séparation de l'Église et de l'État. Clémenceau, le président, réprimera plusieurs grèves et manifestations. Le parti communiste est en germe.
À l'extérieur, les diverses tensions européennes font que la Première
Guerre mondiale, la « Grande Guerre », est déclarée le 2 août 1914. Le
monde est en feu (65 millions de soldats dont 8 millions de morts et 10
millions de morts civils).
Français langue première
195
40S : Littératures francophones
Après ces quatre ans d'atrocités (Henri Barbusse : Le feu, Georges
Duhamel : Civilisation) dans plusieurs pays d'Europe et plus particulièrement en France, l'armistice est signée le 11 novembre 1918 entre
l'Allemagne et les Alliés. Beaucoup de choses ont changé en France,
notamment une de ses frontières, l'Alsace-Lorraine redevenant
française.
Après le lourd bilan de cette « drôle de guerre », la France a un grand
besoin de reconstruction. La Société des Nations (SDN), ancêtre de
l'O.N.U., fait croire à une paix durable entre les pays. Mais la crise
économique mondiale de 1929 laisse entrevoir la fragilité du monde
libéral. Prétextant un contrôle plus grand de l'État, les régimes fascistes
voient le jour en Allemagne et en Italie. La poussée démocratique
conduira à la Guerre Civile en Espagne et provoque, en France, l'arrivée
au pouvoir du Front populaire (1936) avec les congés payés et la
semaine de 40 heures.
Les « années folles », c'est le nom qu'on prête aux neuf premières
années qui suivent la Première Guerre mondiale, temps de fête où l'on
veut oublier la barbarie passée. Mode vestimentaire et coiffures se
modernisent (Maurice Chevalier chante : « Elles s'étaient fait couper les
ch’veux » ). Les mœurs s'émancipent, les esprits se libèrent. Les ÉtatsUnis sont vus comme la première puissance mondiale pendant que
l'empire millénaire des tsars s'écroule en Russie. C'est le temps du
mythe américain. C'est aussi le début du mirage communiste. Mais, à
l'horizon, se profilent déjà d'autres menaces internationales. Les
rapports de force s'étant modifiés en Europe, l'équilibre entre les pays
reste très précaire, ce qui amène bientôt les tensions européennes à un
deuxième conflit mondial.
La littérature
de 1914 à 1939
196
Encore une fois, les bouleversements sociaux ont un impact direct sur
la littérature. De nombreux écrivains substituent alors la réalité au rêve
de la réalité. Ils expriment en sentiments et en pensées ce que cette
nouvelle réalité leur fait vivre. L'écrivain de l'Entre-deux-guerres
s'émerveille des promesses de la technologie et chante les réalisations
du monde industriel, de ses imprévus, de sa frénésie. Ses sources
d'inspiration se renouvellent (aéronautique, automobile, train, vitesse,
Tour Eiffel).
Français langue première
40S : Littératures francophones
Plusieurs nouveaux courants littéraires vont alors apparaître.
Le mouvement Dada ou Dadaïsme (1916-1923)
Fondé par Tristan Tzara, le Dadaïsme est un mouvement anarchiste
et de révolte, qui veut détruire toutes les valeurs occidentales à
l'origine des massacres de 1914-1918 en Europe. Provocateur, il rejette
toute organisation, toute hiérarchie, tout modèle culturel et ridiculise
toute institution et idéologie, qu'elles soient d'ordre moral, religieux,
social ou politique. Cet esprit de désacralisation des valeurs les plus
ancrées se retrouve aussi en peinture : Marcel Duchamp applique des
moustaches à la Joconde. Le langage dadaïste (le terme « dada » vient
du hasard du dictionnaire) se veut incohérent, les mots étant
volontairement disloqués car, pour l'écrivain dadaïste, le mot est
trompeur et il faut s'en méfier. L'écriture dadaïste se fait au hasard des
mots qui se regroupent « tout seuls » et qui s'inventent eux-mêmes,
selon le mélange des lettres, la raison restant en dehors de la logique
(Tristan Tzara, Pour faire un poème dadaïste, L'homme approximatif, Le
Manifeste dada, Œuvres complètes).
Malgré le vide que célèbre le mouvement dada, en rejetant tout
modèle esthétique et culturel, on peut cependant se demander si ce
courant qui restera très populaire tout au long du XXe siècle n'aurait pas
contribué au pouvoir créateur des artistes contemporains. Des peintres
comme Picabia et Ernst, des poètes comme Breton, Eluard, Aragon,
Michaux ou Vian profiteront de l'influence du mouvement Dada.
Le Féminisme
L'esprit d'émancipation qui caractérise l'Entre-deux-guerres permet
aux femmes de se libérer de leur image traditionnelle. Pendant la
guerre, la femme est devenue chef de famille. Lorsque l’homme revient
de la guerre, elle en conteste l'autorité et continue à se prendre en
main. On assiste alors à un relâchement d’une certaine morale conjugale. La femme devient de plus en plus libre, tant dans ses occupations
que dans sa vie amoureuse. Elle revendique son égalité avec l'homme.
De cet esprit va naître un mouvement nouveau : le Féminisme, dans
lequel Colette jouera un rôle important. À travers ses romans,
l'écrivain se penche sur les subtilités de l'âme féminine et de ses
relations avec l'homme et la vie (La naissance de Claudine, Sido, La
chatte). Après avoir captivé la génération de son époque, plusieurs des
romans de Colette seront portés à l'écran.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Le Surréalisme
Révolutionnaire, ce mouvement est le plus puissant du XXe siècle. Des
événements successifs l’ont préparé imperceptiblement à surgir, plus ou
moins brusquement, en fonction des contingences d'une époque. Ainsi,
on peut dire que le Surréalisme a été pressenti par les écrivains
symbolistes : fantaisie imaginaire d'Appollinaire, fantasmes de
Lautréamont, « voyance » de Rimbaud, vision créatrice de Baudelaire,
contestation sociale de Jarry et son refus de logique, hallucinations de
Nerval, proches de la folie, tout cela a semé les germes de ce
mouvement. Sans oublier Sade qui guida les Surréalistes dans leur
quête de l'érotisme. Le XIXe siècle et son époque romantique en a aussi
jeté les bases, en ce qui concerne leur attrait commun pour le rêve,
l'insolite et le surnaturel. Même le mouvement réaliste, dans son usage
des découvertes scientifiques et de la psychanalyse, a jeté les prémices
du Surréalisme. Apollinaire, qui inventa le terme « surréaliste »,
passe pour en être le précurseur (Alcools).
Comme le Dadaïsme qui l'a fortement inspiré, le Surréalisme exprime la
pensée en dehors de la censure de la raison. Le mot « surréalité » réfère
à une réalité autre, au-delà de la réalité elle-même. Et c'est par l'intuition,
la rencontre fortuite (les « trouvailles ») et le rêve que, parfois, on a la
chance d'y accéder. Alors, on puise dans l'inconscient, ce réservoir
d'images. Blessés par les affres de la guerre, les surréalistes essaient de
concevoir une nouvelle vision du monde pour pouvoir, peut-être, le
transformer.
Caractéristiques du Surréalisme :
• révolte contre tout conformisme, responsable de la guerre
• refus du réel, de la logique, de la morale
• rejet du contrôle de la raison
• appel à l'inconscient, à l'imagination débridée, à la folie
• intérêt pour les théories de Freud et Marx
• attrait pour le bizarre, l'inattendu, le mystérieux, l'excentrique,
l'humour noir, l'extraordinaire.
Caractéristiques de l’écriture surréaliste :
Dans les diverses techniques utilisées, raison et logique n'interviennent
pas. Seule la « liberté » qui semble surgir d’un inconscient débridé,
semble prévaloir.
• L'écriture
automatique
:
laissant
libre
cours
à
son
intellect, sans contrôle aucun de sa raison et d'un seul jet, l'écrivain
rédige, sans y réfléchir, un monologue ou une histoire.
Breton : « Le seul mot de liberté est tout ce qui m'exalte encore ».
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Français langue première
40S : Littératures francophones
• L'écriture en état d'hypnose ou de semi-conscience :
L'écriture de groupe (« jeu du cadavre exquis ») où chacun écrit des
éléments d'une phase sur un papier qui circule, tout en ignorant ce
que le précédent « écrivain » a déjà noté; les phrases inattendues
qui en découlent sont souvent déroutantes et certainement très
originales : « le cadavre exquis boira le vin nouveau », « quand les
oiseaux nageront » (Aragon), « la moule fera preuve d'énergie »
(Breton).
• Thèmes privilégiés : la femme, la passion amoureuse, le désir.
• Genre privilégié : la poésie en vers libres.
En explorant ainsi toutes les possibilités du langage et en le libérant des
restrictions de la pensée rationnelle, les surréalistes espèrent laisser
surgir des profondeurs la parole intérieure, la parole vraie qui, au
carrefour du réel et de l'irréel, permettra l'émergence de l'homme total.
Surgi après le sanglant premier conflit mondial, le projet surréaliste se
veut plus un projet révolutionnaire que poétique. Son but? Changer la
vie de l’être humain (théories freudiennes) et celle du monde (théories
marxistes).
Un tel projet explique l'engagement politique de la plupart des
surréalistes (écrivains, peintres, sculpteurs, musiciens) et leur
adhésion au Parti Communiste et, plus tard, dans la Résistance sous
l'Occupation. Ces engagements seront à l'origine de la rupture du
groupe, en 1935, rupture à partir de laquelle chacun connaîtra une
évolution différente, quoique marquée de l’empreinte surréaliste.
On doit au Surréalisme d'avoir
• libéré les images enfouies dans l'inconscient,
• réinventé le langage poétique,
ce qui a transformé fondamentalement notre vision du monde contemporain.
La peinture et les arts plastiques ont, eux aussi, profité de cet
éclatement de la forme : collage, sculptures, tableaux créés à partir de
fragments divers et agencés de façon inusitée et spectaculaire
(Duchamp, Ernst, Dali, Miro, Tanguy, Chirico).
Le mouvement surréaliste a révolutionné l'art et la littérature et a
connu son apogée entre 1924 et 1939. Cependant son impact se fit
encore sentir lors du soulèvement étudiant de mai 1968; sa dissolution
officielle n’eut lieu qu’en 1969.
Français langue première
199
40S : Littératures francophones
Roman et récit
Après la Grande Guerre, les romans abondent. L'intérêt général de ces
écrits réside surtout dans la recherche psychologique. En se détournant
du roman traditionnel (personnages, intrigue, dénouement), les
romans de l'Entre-deux-guerres s'attachent aux problèmes de la
conscience.
Marcel Proust : Le Temps retrouvé, La Prisonnière, Albertine disparue
André Gide : Si le grain ne meurt (récit autobiographique), La
Symphonie pastorale, Les Faux-Monnayeurs, Journal, Retour
d'U.R.S.S. (récit désenchanté après son voyage dans ce pays)
Jean Giraudoux : Juliette au pays des hommes, Les Aventures de
Jérôme Bardini
Raymond Radiguet : Le Diable au corps, Le Bal du comte d'Orgel
D'autres romans se font jour où le romancier choisit la quête spirituelle
et la défense des valeurs chrétiennes.
François Mauriac : Thérèse Desqueyroux, Le Nœud de vipère, Le
Mystère Frontenac
Georges Bernanos : Sous le Soleil de Satan, Journal d'un curé de
campagne, Les Grands cimetières sous la lune
Certains auteurs ne font partie d'aucun mouvement.
Henry de Montherlant : Les Célibataires
Colette : Le Blé en herbe
Jean Cocteau : Les Enfants terribles
Le roman-fleuve voit le jour avec Jules Romain, Georges Duhamel
et Roger Martin du Gard qui crée le roman social familial avec Les
Thibault.
Le roman « pacifiste » naît avec Jean Giono qui chante sa Provence
natale : Colline, Regain, Le Grand troupeau, Le Chant du monde. Il en
est de même pour Marcel Pagnol : Jean de Florette, Manon des
sources, La Gloire de mon père, Le Château de ma mère. Plusieurs de
leurs romans seront portés à l'écran.
200
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le roman surréaliste et les récits fantastiques :
André Breton : Nadja (la relation au monde du rêve)
Louis Aragon : Le Paysan de Paris, Les Beaux quartiers, Les Voyageurs
de l'impériale.
Plusieurs écrivains, ébranlés par les crises que traversent la France et
l'Europe, sortent de leur neutralité et prennent parti pour une cause.
Parmi ces écrivains dits « engagés », on peut citer :
André Malraux : La Condition humaine (fraternité et révolution en
Chine), L'Espoir (lutte contre le fascisme et la guerre d'Espagne)
Louis-Ferdinand Céline : Voyage au bout de la nuit (peinture de la
mascarade humaine et néant des valeurs reconnues), Mort à crédit
(autobiographie de son enfance).
Durant cette période de remise en question, c'est le Surréalisme qui
imprime sa marque.
Poésie
André Breton : Second manifeste du Surréalisme, l'Union libre
Louis Aragon : Traité du style
Paul Eluard : Capitale de la douleur, l'Amour de la poésie,
Mourir de ne pas mourir
Robert Desnos : Corps et Biens
Jules Supervielle : Poèmes de l'humour triste, La Fable du monde
Henri Michaux : Un Barbare en Asie
Et encore, Péret et Soupault.
Le théâtre de boulevard va s'affirmer, juste après la guerre, avec des
pièces légères, répondant au besoin d'évasion du public.
Théâtre
Sacha Guitry : Châteaux en Espagne, Escaliers de service
Marcel Pagnol : Topaze
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40S : Littératures francophones
Un des auteurs les plus représentatifs de cette époque va dominer la
scène théâtrale : Jean Giraudoux qui reprend les mythes antiques
d'où ressort le sentiment du tragique, mêlé de fantaisie et d'humain :
La Guerre de Troie n'aura pas lieu, Amphitryon 38.
Jean Cocteau : Orphée (au relent surréaliste)
Roger Vitrac : Les Mystères de l'amour, Victor ou les Enfants au pouvoir
(pièce d'inspiration dadaïste)
Jean Anouilh, chez qui ressort le sentiment de détresse de
l'Entre-deux-guerres avec l'Hermine et Le Sauvage
Antonin Artaud : son théâtre qui libère les forces obscures de
l'inconscient est lié au théâtre de la cruauté : l'Ombilic des limbes,
Le Théâtre et son Double.
Chanson
Marquée par le Surréalisme, la chanson française marie étroitement
poésie et musique et descend dans la rue. C’est l’âge d’or de SaintGermain-des-Prés.
Boris Vian : J'suis snob, Les joyeux bouchers, Je bois, Le déserteur
Charles Trenet : Le fou chantant, Une noix.
L'Occupation (1939-1945)
Les différents bouleversements politiques et sociaux des pays
d'Europe aboutissent à la déclaration de guerre de la France à
l'Allemagne, le 3 septembre 1939. Commence la Seconde Guerre
mondiale. L'armée allemande entre dans Paris. C'est l'Occupation. De
1939 à 1945, les écrivains s'engagent ou paient un lourd tribut à la
guerre : Proust, Bergson, Romain entre autres, qui ont des ancêtres
juifs, doivent s'exiler et leurs livres sont interdits. Pour des raisons
politiques, certains auteurs se réfugient à l'étranger : Breton,
Bernanos, St. John Perse, Péret. D'autres s'engagent dans la
Résistance : Sartre, Malraux, Mauriac, Char. Saint-Exupéry disparaît en
Méditerranée lors d'une mission aérienne en 1943. Selon les différentes
positions politiques qu'ils assument, les destins des auteurs varient :
celui-ci se suicide, cet autre est condamné à mort, tel autre devient
cible d'attaques violentes à cause de ses idées antisémites (ainsi
Céline).
202
Français langue première
40S : Littératures francophones
A. Camus dirige le journal Combat. Aragon et Eluard, les poètes
surréalistes de la Résistance, se font les défenseurs de la liberté et
militent au Parti Communiste.
Marcel Aymé : Le Chemin des écoliers (narration comique sur
l'Occupation)
La littérature
sous l’Occupation
Roman, Récit,
Essai
Antoine de Saint-Exupéry : Pilote de guerre, Le Petit prince
Jules Romains : Les Hommes de bonne volonté
Jean-Paul Sartre : La Nausée, Le Mur, L'Être et le néant, Les Chemins
de la liberté
Simone de Beauvoir : L'Invitée
Albert Camus : Noces (célébration de l'Algérie), L'Étranger
Jean Genêt : Le Condamné à mort
Aragon : Aurélien
Louis Aragon : Le Crève-cœur, Les Yeux d'Elsa
Poésie
Robert Desnos : Poèmes du bagne, État de veille
Francis Ponge : Le Parti pris des choses (poème en prose à l'écart de
toute école)
Jean-Paul Sartre : Les Mouches, Huis-clos (mythes antiques et contexte intemporel, existentialisme)
Théâtre
Henri de Montherlant : La Reine morte
Jacques Prévert : Les Enfants du paradis, Les Visiteurs du soir (deux
pièces devenues des classiques du cinéma).
Français langue première
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40S : Littératures francophones
L'Après-guerre (1945-1970)
Le temps des
incertitudes
« Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes
mortelles » (Paul Valéry)
Ruines en Europe et déchirement des consciences sont le fait de cette
deuxième Guerre Mondiale : 50 millions de morts dont 6 millions de
Juifs, gazés dans les camps de concentration. L'enfer atomique des
bombes américaines fait 225 000 victimes à Hiroshima et Nagasaki
(Japon). Les mots « terre » et « terreur » sont devenus presque
synonymes. Le film et la photo ont répandu les horreurs de la guerre.
Mais, plus tragique que les destructions humaines ou matérielles, c'est
le fait que l'homme découvre soudain sa puissance d'autodestruction.
Cette révélation douloureuse et brutale va influencer profondément les
générations, contemporaines et à venir. Confronté à sa puissance et à
sa fragilité, l'être humain a perdu les valeurs qui formaient la base de
sa civilisation. Désorienté par cette perte de repères et l'effondrement
de ses croyances humanistes, l'homme du XXe siècle va continuer à
chercher et à se chercher, fait que Freud avait déjà décelé dans son
ouvrage Malaise de la civilisation.
De plus, le monde se divise maintenant en deux blocs, deux idéologies :
le Communisme en U.R.S.S. et le Capitalisme avec le « géant américain ».
Leur « guerre froide » effraie les peuples. Quelle idéologie choisir?
Un autre fossé se creuse, dans la société celui-là. Les aînés, comme
après la Première Guerre, tentent d'oublier les hostilités à travers le
confort matériel. Les jeunes cependant ont perdu confiance; se crée
alors une cassure entre les générations. Tout en essayant de remettre
leur pays sur pied, les jeunes adultes tentent de forger un nouveau
sens à leur vie et de recréer un nouvel humanisme. L'esprit du « grand
frère » américain déferle sur les pays alliés européens qui vont
chercher leur bonheur à travers l'accumulation des biens matériels. La
culture américaine se déverse en Europe (chewing-gum, jean, roman
policier, culture populaire, etc.).
La littérature
de l'Après-guerre
204
Nombreux sont les écrivains qui dénoncent les risques de cette culture
de masse, éloignée de la réalité. Ils dénoncent aussi le matérialisme
qui, dépossédant l'être humain d'une partie essentielle de son être et
le laissant mijoter dans l'insouciance, lui prépare un réveil cuisant.
Certains écrivains s'efforcent de pallier à ce miroir aux alouettes qu'est
le « rêve américain » en militant au sein du Parti Communiste. La
musique et la peinture ne sont pas en reste, où se mêlent la
contestation, le tragique et l'absurde.
Français langue première
40S : Littératures francophones
De cette vision du monde transformée va naître un nouveau
mouvement : l'Existentialisme.
L'Existentialisme (1938-1960)
« L'existence précède l'essence. » (Jean-Paul Sartre)
En 1938, après la publication de La Nausée de Sartre, va naître un
mouvement philosophique, sociologique et littéraire qui va tenter de donner
une réponse aux questions de l'homme. Ce mouvement est représenté par
des philosophes (J.-P. Sartre et S. de Beauvoir) et des écrivains (A. Camus),
derniers maîtres à penser du XXe siècle. Cette tendance, qui vise avant tout
une portée sociale, est fondée sur la responsabilité de chacun. Selon
l'Existentialisme, l'homme est seul responsable de ses actes dont il devient
le fruit. L'être humain se définit par la façon dont il existe et par ses choix
face à la société. L'être humain se crée à partir de ses propres choix. La
liberté de chacun est illimitée à condition qu'elle n'empiète pas sur celle des
autres. « L'homme est condamné à être libre » et « l'enfer, c'est les autres »
(Sartre). Cette philosophie de l'existence refuse totalement Dieu. L'homme
est seul, prisonnier de sa liberté, dans un monde absurde et incohérent et il
doit savoir que tout s'arrêtera définitivement avec la mort. Cela révèle une
conscience du désespoir face à la condition humaine. C'est alors dans l'action,
et l'action seule, que l'homme, qui ne fait qu'« exister » sans « être » va, peu
à peu, se créer lui-même. « Tu n'es rien d'autre que ta vie. » (Sartre)
L'Absurde
« La vraie générosité envers l'avenir consiste à tout donner au présent. »
(Albert Camus)
Avec cette philosophie proche de l'Existentialisme, on fait face à une
humanité qui recherche la justification de son existence et qui, à force,
en arrive à devenir étrangère à elle-même (L'Étranger de Camus).
Cette prise de conscience du non-sens du quotidien, du temps
inexorable, de la solitude infinie et de la mort inévitable, rendrait toute
action inutile, mais c'est cette conscience qu'il a de sa condition absurde qui
rend à l'homme sa dignité. Camus, qui représente cette philosophie, illustre
l'absurdité de la vie par notre destin qui consiste à repousser vers le haut
d'une montagne un rocher qui en redescendrait toujours et toujours,
inexorablement (Le Mythe de Sisyphe). Pour dépasser l'absurde de la vie
et donner un sens à notre existence, nous devons utiliser notre liberté en
donnant la prépondérance à la vie physique, et faire communier notre être
charnel avec l'univers. La réponse à l'absurde, c'est l'engagement. Choisir
de vivre ensemble dans l'action, s'engager à la défense d'une cause, celle
de la liberté en priorité, combattre l'asservissement, vivre la solidarité, la
générosité, tout cela teinte d'une morale humaniste la philosophie
existentialiste et pourrait même apporter le bonheur.
Français langue première
205
40S : Littératures francophones
Roman et Essai
Dorénavant, l'écrivain n'écrit plus pour son plaisir ou celui du lecteur.
Devenue polémique, la littérature se charge d'une mission, celle
d'enseigner ou de servir une cause (philosophique, politique,
religieuse). C'est J.-P. Sartre qui invente l'expression « écrivain engagé »
(« Longtemps, j'ai pris ma plume pour une épée » écrit Sartre). Le
romancier traduit les préoccupations métaphysiques et sociales de sa
génération, dénonce les perturbations historiques et sociologiques, les
incohérences de la vie, ses angoisses.
Le roman adopte alors la technique narrative du monologue intérieur.
Le style est personnel, localisé, daté. Le langage parlé et l'argot
traduisent parfois le réalisme total de la situation. Le bon usage de la
syntaxe n'est pas toujours respecté car l'écrivain existentiel veut dire
tout et dire vrai. Les idées sociales sont abondantes.
Thèmes privilégiés : la liberté, l'absurdité de l'existence, l'engagement,
la révolte, la mort.
Genres privilégiés : le roman, l’essai, le théâtre.
Le roman français de l'après-guerre est très influencé par le roman
américain qui a choisi la vérité objective et l'anti-intellectualisme et dont
le langage simplifié et direct recherche l'effet immédiat sur le lecteur.
Pour Ernest Hemingway, l'action seule peut aider l'homme à sortir du
néant (Le Soleil se lève aussi, Le Vieil homme et la mer).
Plusieurs considèrent William Faulkner comme l'initiateur du roman
moderne (Le Bruit et la fureur, Sanctuaire).
Sartre voit en John Dos Passos « le romancier le plus considérable de ce
temps » (Manhattan Transfer). Quant à John Steinbeck (Des Souris et
des hommes, Les Raisins de la colère), il met l'accent sur le palpable : le
corps biologique, la terre nourricière, le cœur battant.
Les romanciers existentialistes :
Jean-Paul Sartre : l'Être et le néant, La Mort dans l'âme, Les Mots
(autobiographie)
Simone de Beauvoir : Le Deuxième sexe (texte fondamental dans
l'histoire du féminisme), Mémoire d'une jeune fille rangée
Albert Camus : La Peste, L’Étranger, L'Été, La Chute, Le Mythe de
Sisyphe, Le Premier homme
Samuel Beckett : L'Innommable
206
Français langue première
40S : Littératures francophones
Autres romanciers :
Tous n'épousent pas la cause existentialiste et chacun s'engage selon
sa conscience dans des causes diverses.
Louis Aragon : Blanche ou l'Oubli
Jean Giono : Le Hussard sur le toit, Les Âmes fortes
Hervé Bazin : Vipère au poing
Jean Genêt : Journal du voleur
Jean Cayrol : Je vivrai de l'amour des autres
Vercors : Le Silence de la mer, Les Animaux dénaturés
Julien Gracq : Le Rivage, Les Syrtes
Boris Vian : J'irai cracher sur vos tombes, L'Écume des jours,
L'Arrache-cœur
Raymond Queneau : Zazie dans le métro
François Mauriac : Le Sagouin (à thème religieux)
André Malraux : Le Musée imaginaire (philosophie de l'art),
Antimémoires (autobiographie)
Julien Green : Partir avant le jour (à thème religieux)
Et tant d'autres : Michel de Saint-Pierre, Henri Troyat, Paul Vialar,
Louis Pergaud, Roger Peyrefitte, Paul Guth, Romain Gary, Gilbert
Cesbron, A. J. Cronin, Alphonse Daudet, Maurice Druon, Henri Bosco,
Pierre Boulle, etc.
Après le Surréalisme, il n'y a plus de grand courant poétique. Poésie et
prose tendent à se rejoindre. On explore l'imaginaire et le jeu avec les
mots dans une quête toujours existentielle.
Quelques tentatives de nouveaux mouvements apparaissent cependant.
Poésie
L'Oulipo (1960-1980)
(Ouvroir de la littérature potentielle)
Son but est de donner sa fonction ludique à la littérature. Les auteurs
soumettent l'écriture à des contraintes formelles : par exemple, écrire
un roman de 312 pages sans utiliser la lettre « e » puis un autre roman
où le « e » doit se retrouver dans chaque mot. Et toujours, la lutte
contre le conformisme littéraire. Ces textes, remplis d'humour et
d'inventions verbales, sont tout à fait désopilants.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Raymond Queneau : Exercices de style
Georges Pérec : La Disparition (sans « e » ), Les Revenentes (avec
« e »), Les Choses
Italo Calvino : Les Villes invisibles
Le lettrisme (1946)
Les lettristes veulent inventer un art qui se substituerait à la musique
aussi bien qu'à la poésie (poésie sonore ou musique verbale).
Autre poésie
Louis Aragon : Elsa, Le Fou d'Elsa
Paul Eluard : Poésie ininterrompue (« La terre est bleue comme une
orange »)
Jean Cocteau : Le Requiem, Clair-Obscur
Pierre Emmanuel et Patrice de la Tour du Pin représentent la foi
catholique tandis que Pierre Reverdy et Jacques Audiberti (Le
Maître de Milan) se font les chantres de l'anticonformisme
Jacques Prévert : Paroles, Spectacle, Histoires (au relent surréaliste)
René Char : Fureur et Mystère (révolte contre les conventions)
Parmi les poètes les plus marquants de ce siècle, citons encore :
Henri Michaux : La Vie dans les plis, Connaissance par les gouffres,
Humour caustique
et Francis Ponge : Pièces (poème-prose)
Pour F. Ponge, décrire les objets les plus banals est le cœur de son
œuvre, l'objet représentant la société de consommation masquant
notre vide intérieur. La présence obsédante de l’objet dans la littérature
et l'art du XXe siècle n'est pas nouvelle, la poésie des surréalistes et les
peintures du Cubisme en font foi. Cette présence se manifestera dans
le théâtre de l'Absurde et le Nouveau Roman pour s'amplifier jusqu'à la
fin du siècle, du pop art américain jusqu'aux artistes hyperréalistes.
208
Français langue première
40S : Littératures francophones
Sous l'influence de la psychanalyse, le théâtre s'est beaucoup transformé
depuis le début du siècle et il est passé de la légèreté à l'incohérence
des personnages et à l'invraisemblance de l'intrigue. Les auteurs
choisissent de traduire ce qui se passe au fond de l'âme. Les techniques
scéniques sont nouvelles. Il y a une plus grande proximité entre l'acteur
et le spectateur. Après la libération, quelques troupes théâtrales se
créent : celle de Jean-Louis Barrault et Madeleine Renaud, puis celle de
Jean Vilar, créateur du Festival d'Avignon, qui fait revivre le théâtre de
l'Antiquité. Le T.N.P. (Théâtre National Populaire) est fondé à Paris.
Théâtre
Henri de Montherlant : Le Maître de Santiago, Port Royal (pièces à
thème religieux)
Jean Anouilh : Colombe, l'Alouette
Le théâtre engagé
L'Allemand Bertolt Brecht, précurseur du théâtre engagé, utilise ce
moyen pour transformer le monde et y promouvoir la société socialiste.
Son influence se fait sentir sur le théâtre français. Parmi les
existentialistes, on retrouve Sartre (Morts sans sépulture, Les Mains
sales, Les Séquestrés d'Altona) et Camus (Caligula, Le Malentendu,
Les Justes) qui font passer leur idéologie philosophique avant le
divertissement.
De nombreux auteurs de l'Après-guerre reprennent les mythes
gréco-romains qui, transposés dans la civilisation contemporaine,
expriment les inquiétudes de la condition humaine.
Le théâtre de l'absurde existentialiste laisse bientôt la place au théâtre de
l'Absurde (1950-1980) qui se caractérise par
• le refus du réalisme
• les disparitions de l'intrigue et du vraisemblable
• la dépersonnalisation des personnages
• la désarticulation du langage (la communication devient secondaire)
• le rôle primordial accordé aux objets (symbole de la solitude).
Les thèmes privilégiés sont les suivants : peur, attente, renfermement,
vieillissement, mort et solitude.
Ces thèmes sont le reflet de l'époque : le nucléaire, la « guerre froide »,
le fossé des générations, le désespoir qui monte, etc. Ce théâtre de
l'absurde est déconcertant. Tout (le fond, la forme comme le décor)
semble extravagant, illogique, insensé, ridicule, saugrenu. Le choc que
suscite un tel spectacle laisse le spectateur désemparé, impuissant,
piégé, amer, comme en attente, en attente de…
Eugène Ionesco : Les Chaises, Rhinocéros, Le Roi se meurt, La
Cantatrice chauve, La Leçon
Samuel Beckett : En attendant Godot, Oh! Les Beaux jours, Fin de partie
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40S : Littératures francophones
Jean Genêt : Les Bonnes, Les Paravents
Ces pièces présentent la difficulté de l'homme à vivre et communiquer et
son désir d'un « ailleurs », tandis que le théâtre de Ionesco exprime
l'angoisse sourde de l'être humain, seul, dans un monde où Dieu n'a plus
sa place et où les mots n'aident plus à communiquer. Il nous prévient
aussi du danger des idéologies qui s'installent. Beckett, lui, représente
l'expérience du Mal. Ses personnages, des marginaux, refusent l'ordre
social et se révoltent.
Chanson
« L'anarchie, c'est l'avoine du poète. » (Léo Ferré)
Avec le microsillon, la chanson se répand dans les foyers dès 1950. En
1952, avec Georges Brassens, la chanson française connaît un nouvel élan avec ses chansons anarchisantes mais tendres. Puis, elle est utilisée par Léo Ferré dans un but politique (l'Homme). L'anticonformiste
Jacques Brel (Les Bourgeois) est très applaudi tandis que Le
Déserteur de Boris Vian est interdit pour des raisons politiques. Serge
Gainsbourg ignore le scandale de Je t'aime, moi non plus. Et Hugues
Aufray annonce le mouvement hippie, né aux É.U., qui s'installe à StGermain des-Prés, à Paris.
Kosma met en musique la poésie de Prévert chantée par Yves Montand
et Juliette Gréco. Mouloudji, Jacques Douai, Cora Vaucaire, Catherine
Sauvage chantent les temps nouveaux. C'est « l'âge d'or de
Saint-Germain des-Prés ». Suivront Charles Aznavour, Gilbert Bécaud,
Serge Reggiani, Guy Béart, Edith Piaf, Les Compagnons de la Chanson,
Jean Ferrat, Serge Lama, Barbara et bien d’autres.
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40S : Littératures francophones
Le Nouveau Roman (1953 - 1970)
En 1953, Alain Robbe-Grillet publie Les Gommes en réaction contre le
mouvement réaliste et psychologique, s’éloignant aussi du Surréalisme et
de l’Existentialisme. C’est le début du Nouveau Roman. L’écrivain du
Nouveau Roman refuse, lui, tout engagement quel qu’il soit et toute
explication toute faite, de quelque ordre qu’elle soit. Le Nouveau Roman
n’est plus une théorie ni un reflet de la société. C’est un tout autoréférent.
Certains auteurs, dès le XIXe siècle lui ont ouvert la voie : Flaubert
(L’Éducation sentimentale), Joyce, Kafka, Proust, Dostoïevski, Virginia Woolf.
Le Nouveau Roman devient un univers fermé sur lui-même, qui rejette
toute intrigue linéaire. Au gré des caprices du rêve, de la mémoire et
des mouvements de la conscience que N. Saurraute appelle « les
tropismes », le personnage se dissout dans le roman. Primauté absolue
est accordée aux objets, symboles de déshumanisation et
d’étouffement provoqués par les possessions matérielles. Dans le
Nouveau Roman, le récit est discontinu, décousu et réagencé en un
désordre ingénieux. Écrit dans cet esprit, le Nouveau Roman pousse
le lecteur à jouer un rôle actif et à trouver sa propre vérité.
Nathalie Sarraute : Le Planétarium, Les Fruits d’or
Michel Butor : La Modification, L’Emploi du temps
Claude Simon : La Routes des Flandres, Le Palace
Marguerite Duras : Un Barrage contre le Pacifique, Hiroshima mon
amour (adapté pour le cinéma), L’Amant (adapté pour le cinéma)
Alain Robbe-Grillet : Les Gommes, le Voyeur, la Jalousie, L’Année
dernière à Marienbad (scénario de film)
Le Roman policier
Autrefois œuvre de seconde classe, le roman policier est devenu très
populaire. En 1841, avec Le Meurtre de la rue Morgue, l'Américain
Edgar A. Poe inaugure le genre. En Grande-Bretagne, Conan Doyle crée
le célèbre couple Sherlock Holmes et Watson et influera sur Agatha
Christie, entre autres.
En France, au début du siècle, Gaston Leroux (Rouletabille) et
Maurice Leblanc (Aventures d'Arsène Lupin, gentleman cambrioleur)
font découvrir le roman policier français. Ils seront suivis d'Albert
Simonin et de Léo Mallet (séries noires) après 1945. Georges
Simenon créera l'inspecteur Maigret. Dans les années 50, Boileau et
Narcejac inspirent le cinéma d'Hitchcock (Vertigo) et San Antonio est
le père du commissaire du même nom.
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40S : Littératures francophones
Aujourd'hui, avec 700 nouveaux titres par an, le « polar » ou « roman
noir » détrône le classique. Ayant renoué avec la tradition du roman
social, le polar dépeint la vie actuelle où chacun se reconnaît : violence,
sexe, drogue, mais aussi chômage, banlieue, sans-papiers,
intégrismes, etc. - ce qui lui ouvre la porte du succès.
La Science-fiction
Ce genre qui représente le roman d'anticipation connaît aussi un franc
succès. La science-fiction propose une réflexion parfois philosophique
sur notre monde, notre avenir. Pollution, écologie, progrès sont les
thèmes de la science-fiction qui, en imaginant un nom nouveau,
dépeint la société à la façon d'un miroir déformant ou grossissant.
Père de la science-fiction en France, Jules Verne écrit au XIXe siècle des
romans devenus célèbres : Voyage au centre de la Terre, De la Terre à
la Lune, 20 000 lieux sous les mers. Il sera suivi au XXe siècle de
Gérard Klein (Un chant de pierre), Pierre Boulle (La Planète des
singes) et René Barjavel (La Nuit des temps).
La Postmodernité (1970 à aujourd'hui)
« Quelque chose est en déclin dans la Modernité. » (Jean-François
Lyotard)
Le concept de « condition postmoderne » est né en 1979, au Québec.
Quelques expressions clés représentent cette période où, après les
bouleversements des années 60 (révolte généralisée en Mai 68), rien
ne sera plus jamais comme avant. Un esprit de liberté et
d'émancipation nouvelles souffle sur le monde et balaie tous les tabous.
Il est maintenant « interdit d'interdire ».
Les expressions suivantes traduisent cette réalité nouvelle :
• Corps en représentation
• Crise de l'autorité
• Nivellement des générations
• Égalité des rapports parents-enfants
• Liberté sexuelle
• Désagrégation de la famille nucléaire
• Évolution de la conscience religieuse
• Dénigrement de l'enseignement
• Culture de la consommation
• Crise économique et nouveau libéralisme
• Civilisation de la communication
• Mondialisation.
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Français langue première
40S : Littératures francophones
À la fin du XXe siècle, beaucoup de choses se sont écroulées :
croyance dans les grandes idéologies, famille, sens du sacré, Mur de
Berlin, illusions diverses… Mais peu d'entre elles ont été remplacées et
cette « ère du vide » est une source d'angoisse pour les générations
d'aujourd'hui. Le sociologue Edgar Morin affirme que « l'humanité
vient d'entrer dans un nouveau Moyen Âge ».
Cependant, en ce début de XXIe siècle, qui le veut peut, au travers d'un
voile mouvant, percevoir une tendance imperceptible et planétaire où
les hommes auraient l'air de se tendre la main, et où les termes de
respect, justice, égalité, fraternité, liberté, solidarité retrouveraient leur
sens premier. Il semble que le métissage des villes et des pays,
l'ouverture des frontières en Europe, les facilités plus grandes
d'immigration, la popularité croissante des voyages chez les jeunes
rapprocheraient les êtres humains. Pourrait-on croire qu'un esprit
d'accueil et de tolérance vrais soit en train de voir le jour? Certaines
organisations comme « Médecins sans frontière » voudraient bien le
laisser croire, ainsi que les œuvres d'entraide internationales, de plus en
plus nombreuses.
La mondialisation serait-elle à la source d'un nouvel humanisme où il
ne resterait plus qu'une seule race, la race humaine? A. Malraux a dit :
« Le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas. » Peut-on croire que ce
nouvel élan vers un ailleurs caractérisera le XXIe siècle? Et si, après ce
deuxième Moyen Âge, nous entrions dans une nouvelle Renaissance
qui, lentement mais sûrement, nous amènerait vers une nouvelle
humanité, vers l'Humanité?
« Rien n'est plus lent que la véritable naissance d'un homme. »
(Marguerite Yourcenar)
La littérature
postmoderne
L'art et la littérature sont le miroir de leur époque. On assiste aujourd'hui
à une nouvelle sensibilité, dans un temps où, les repères traditionnels
ayant disparu, il devient très difficile de vivre selon ses propres valeurs.
Les écrivains des trois dernières décennies du XXe siècle dénoncent
l'individualisme des systèmes actuels et en préviennent les lecteurs
tout en les incitant à prendre leur place dans une société
uniformisante et à respecter leur propre vérité.
Le but de l'écriture postmoderne est de changer le monde, en éclairant
le lecteur.
Français langue première
213
40S : Littératures francophones
Caractéristiques de ce renouveau de l'expression littéraire :
• La narration redevient plus traditionnelle.
• Les auteurs redeviennent des témoins de la réalité sociale inquiète.
• On parle d' « écriture » plutôt que du « style », une écriture qui colle
à la réalité (langage parlé, plus simple, plus direct)
• Émergence de l' « intertextualité » : l'auteur postmoderne se branche
et recourt, en les intégrant, à des idéaux, des valeurs différentes,
des allusions littéraires, des citations d'auteurs divers, des fragments
d'autres œuvres.
• Il y a multiplicité des points de vue et mixité des valeurs.
• L'homogénéité laisse la place à l'hétérogénéité totale : genres,
styles, tonalités, cultures, éthique. Dans un désordre savamment
agencé, on retrouve la lettre, le document, le portrait incorporés
dans la fiction.
• Pour parer à son angoisse, l'auteur a recours à l'ironie, à l'humour,
au sarcasme.
• Le lecteur se fait interpeller par le narrateur qui l'invite à prendre
position.
• Les nombreuses ruptures dans le fil du texte (parenthèses-notesrenvois) rappellent le lecteur à l'attention.
• Parfois l'auteur s'exprime ou bien s'observe en train d'écrire, il
s'auto-représente. C'est la « mise en abyme ». Le « je », principal
référent de ce type de roman, peut aussi se dédoubler, être contradictoire, pluriel, ce qui donne un récit haché, parcellaire, sans
direction unique.
Roman
Thèmes favoris du roman postmoderne :
le non-sens de l'existence, l'Histoire, la vie ordinaire, la solitude,
l'inquiétude, la recherche de soi, les arts et l'écriture, l'introspection et
les réflexions intimes, la recherche du plaisir.
Marguerite Yourcenar (première femme élue à l'Académie française
en 1980) : l'Œuvre au noir
Albert Cohen : Belle du seigneur
Michel Tournier : Vendredi ou les limbes du Pacifique
Patrick Modiano : Rue des boutiques obscures
Jorge Semprun : L'Écriture ou la vie
Philippe Delerm : Le Portique
Yves Simon : La Dérive des sentiments
214
Français langue première
40S : Littératures francophones
Fernando Pessoa : Le Livre de l'intranquillité
Hervé Guibert : Le Paradis
Philippe Solers : Passion fixe
J.-M.G. Le Clézio : Onitsha
Annie Ernaux : Passion simple
Jean Echenoz : Cherokee
Les poètes de cette ère postmoderne abondent. L'écriture poétique se
diversifie et se rapproche d'une réalité toute simple que les mots ont
parfois du mal à traduire. Comme le romancier, le poète d'aujourd'hui
se situe entre l'humour et la détresse; il représente notre inquiétude et
notre peine à dire. La poésie invite l'être humain à vivre selon sa propre
morale, à ne pas se laisser engluer dans des systèmes conformes, à
s'éloigner de la « technicité » et la consommation pour réapprivoiser la
nature et sa propre nature. Le style devient plus sobre, l'émotion est
retenue mais présente. La concision du verbe va au but.
Poésie
Eugène Guillevic : Motifs, poèmes (son message : la nature peut nous sauver)
Yves Bonnefoy : Ce qui fut sans lumière (son message : gardons
l'espoir malgré tout)
Philippe Jaccottet : Cahier de verdure
Le genre dépérirait-il? Le prestige du texte semble céder la place à
l'expression corporelle. Les auteurs continuent à représenter leur monde
mais en usant d'une grande diversité des techniques de scène, sur laquelle,
aujourd'hui, tout est permis. L'éclectisme est devenu une des valeurs
premières de ce théâtre. Sobriété des sentiments et lyrisme se côtoient.
Théâtre
Les thèmes privilégiés en sont : la marginalité sous toutes ses formes,
l'amitié, l'amour, les ruptures, la famille, évocation de l'histoire de
France (guerres de Corée, d'Algérie) mais vue sous l'angle du quotidien.
Bernard-Marie Koltes : Dans la solitude des champs de coton
Michel Vinaver : Les Huissiers
Et les metteurs en scène comme Patrick Chéreau et Ariane
Mnouchkine qui reprennent les textes classiques en leur donnant une
saveur contemporaine.
La génération actuelle des chansonniers semble se chercher, après le
départ des « grands » (Brel, Brassens…). Les paroliers restent liés à la
poésie. Certains sont des révoltés et incarnent une certaine jeunesse,
tel Renaud. D'autres s'épanchent davantage. Mais l'on peut dire que la
chanson française actuelle est riche et multiple et qu'elle représente
bien les intérêts divers de sa génération.
Français langue première
Chanson
215
40S : Littératures francophones
Ressources d’apprentissage possibles
Anthologies destinées à un public scolaire/étudiant
• Amon, E. et Bomati, Y. (2000). Lectures. Anthologie pour le lycée
(Tome 1 : Moyen Âge, XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles et Tome 2 : XIXe et
XXe siècles), Paris, Magnard.
• Carbonell, A. et al. (1996). Lettres, Textes, méthodes, histoire littéraire, 1re, Paris, Nathan.
• Desaintghislain, C. et al. (1995). Français. Littérature et méthodes,
classes des lycées, Paris, Nathan (l’ouvrage est accompagné d’un Livre
du professeur).
• Hambursin, M. (2000). Anthologie de littérature en langue française,
Textes en archipels, Bruxelles. DeBoeck Duculot (édition revue et
actualisée).
• Laurin, M. (2001). Anthologie littéraire de 1850 à nos jours, Laval,
Groupe Beauchemin (l’ouvrage est accompagné d’un Complément
pédagogique).
• Laurin, M. (2000). Anthologie littéraire du Moyen Âge au XIXe siècle,
Laval, Groupe Beauchemin (l’ouvrage est accompagné d’un
Complément pédagogique).
• Ouvrage collectif (2004). Le Manuel de littérature française, Paris,
Bréal/Gallimard.
• Parodi, L. et Vallaco, M. (1998 et 1999). Littérama (4 volumes :
Moyen Âge - XVIIIe, XIXe, XXe et Clefs de lecture, accompagné d’un
Livre du professeur), Genève, CIDEB (distribué au Canada par
Hurtubise HMH).
• Pilote, C. (1997). Français, Ensemble 1, Méthode d’analyse littéraire
et littérature française, Laval, Éditions Études Vivantes.
• Prat, M.H. et Aviéronos, M. (2001). Littérature, Textes, histoire,
méthode (Tome 1 : Moyen Âge, XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles et
Tome 2 : XIXe et XXe siècles), Paris, Bordas (chacun des deux tomes
et accompagné d’un Livre du professeur).
• Protocole de l’Ouest et du Nord canadiens (2004). Textes choisis.
Auteurs marquants de la littérature mondiale, Edmonton, Alberta
Learning (l’ouvrage est accompagné d’un Guide d’enseignement
disponible sur le site Web : « http://www.education.gov.ab.ca/
french/français/anthologies/guide.pdf » [juillet 2005]).
.../...
216
Français langue première
40S : Littératures francophones
.../...
• Sabbath, H. (dir.) (2004). Littérature 2de, Des textes aux séquences,
Paris, Hatier.
• Sabbath, H. (dir.) (2001). Littérature 1re, Des textes aux séquences,
Paris, Hatier.
• Sabbath, H. (dir.) (1995). Littératures, Textes et méthodes,
Montréal, Éditions Hurtubise.
• Thérien, C. (1997 et 1998). Anthologie de la littérature d’expression
française (Tome 1 : des origines au romantisme et Tome 2 : du réalisme à la période contemporaire), Anjou, les Éditions CEC.
• Trépanier, M. et Vaillancourt, C. (1998). Français, Ensemble 2,
Méthode de la dissertation explicative et littérature française, Laval,
Éditions Études Vivantes.
Ouvrages de référence
• Calais, E. et Doucet, R. (2001). Précis de littérature par siècle par
genre, Paris, Magnard.
• Collection Langue et littérature au collégial (Éditions Études
Vivantes) :
- Le Moyen Âge et la Renaissance (2000);
- Le 17e siècle : le Baroque et le Classicisme (2000);
- Le siècle des Lumières (2000);
- Le Romantisme et les Révolutions (2000);
- Après les révolutions : le Réalisme et le Symbolisme (2000);
- De la Belle Époque à l’entre-deux-guerres : la Modernité et le
Surréalisme (2000);
- La guerre et l’après-guerre : l’Existentialisme et le théâtre de
l’Absurde (2000);
- Le monde contemporain et le roman français (2000);
et
- La méthodologie de l’analyse littéraire et du commentaire composé (2000);
- Guide des procédés d’écriture et des genres littéraires (2000).
• Collection Les essentiels (Mondia) :
- Le Moyen Âge (1996);
- Renaissance : Humanisme et Réforme (1995);
- Le baroque et la préciosité (1995);
- Le romantisme (1995);
- Le classicisme (1994).
• Dictionnaires des grandes œuvres de la littérature française
(Le Robert/Les usuels, 1992).
.../...
Français langue première
217
40S : Littératures francophones
.../...
• Dictionnaires des œuvres du XXe siècle. Littérature française et francophone (Le Robert/Les usuels, 1995).
• Eterstein, C. (dir.) (1998). La littérature française de A à Z, Paris, Hatier.
• Saint-Gelais, N. (2001). Pratique de la littérature, Mont-Royal,
Modulo-Griffon (l’ouvrage est accompagné d’un Guide pédagogique).
De nombreuses maisons d’édition proposent des œuvres littéraires
dans leur version intégrale; signalons entre autres
• la collection disponible auprès de Beauchemin Parcours d’une
œuvre (chaque œuvre est accompagnée d’un Complément pédagogique) - pour connaître les titres disponibles, consulter le site
Web : « http://www.beaucheminediteur.com » [juillet 2005];
• la collection disponible auprès de Hatier, Profil d’une œuvre;
• la collection disponible auprès de Hatier, Classiques Hatier - œuvres
et thèmes;
• la collection disponible auprès de Magnard, Classiques et contemporains;
• la collection Classiques universels, disponible auprès de Hurtubise HMH;
• la collection Classique Larousse, disponible auprès de Larousse.
218
Français langue première
40S : Littératures francophones
Survol de la littérature québécoise
• Avant-propos
• Les écrits coloniaux
• La littérature orale et l’imaginaire collectif
• Le romantisme des Patriotes
• Le terroir et l’anti-terroir
• Les Idéalistes
• Le réel et l’au-delà du réel, l’automatisme
• Maîtres chez nous : la Révolution tranquille
• Où la littérature fait fi du passé
• L’individualisme, héritage de la contre-culture
• Le Québec, société de la pluralité. Une littérature
de l’altérité
• Ressources d’apprentissage possibles
Français langue première
219
NOTES
220
Français langue première
40S : Littératures francophones
À bien des égards, le développement de la littérature d'expression
française sur le continent nord-américain peut paraître surprenant. Que
l’on pense par exemple aux défis que le peuple québécois a dû
surmonter, afin de s'enraciner dans un continent où rien, a priori, ne
garantissait une possible survie. Défis d'ordre géographique (exil loin
de la mère-patrie), démographique (majorité anglo-saxonne
écrasante) et historique (minorité « vaincue » facilement assimilable),
etc.
Avant-propos
C'est en grande partie grâce à la littérature que le peuple québécois a
su résister à la loi du plus fort et garder, avec sa fierté, « la langue de
chez nous ».
La littérature d'expression française en Amérique du Nord a su acquérir
ses lettres de noblesse après avoir subi plusieurs changements
d'identité. Ces changements, progressifs et profonds, verront, dès le
17e siècle, la Nouvelle-France s'appeler « Canada » et les Français
devenir des « Canadiens ». Cette identification est un fait accompli
dans la deuxième moitié du 17e siècle ainsi qu'en témoigne l'ouvrage
de Pierre Boucher : Histoire véritable et naturelle des mœurs et
productions du pays de la Nouvelle-France, vulgairement dite le
Canada (1664).
Après la Conquête de 1759 par les Anglais, les Canadiens protestent
car, en 1763, le droit canadien est remplacé par le droit anglais. C'est
grâce à cette lutte que, pour sauvegarder identité et langue, la
littérature canadienne va renaître.
Lors de la Confédération (1867), l'appellation « Canada » s'étend à tout
ce nouveau pays, qui passe alors sous régime anglais. La nation
canadienne-française s’applique surtout au Québec, mais s'étend aussi
à toute communauté à l'ouest du Québec, alors que, sous Louis XIV à
la fin du 17e siècle, la Nouvelle-France s'étendait de l'Atlantique aux
Grands Lacs et de la Baie d'Hudson au Golfe du Mexique. De ce fait
apparaît le vocable « Canadien français » et les Britanniques sont
désignés comme « Canadiens anglais ». Au Québec, cette appellation
va durer un siècle. Peu à peu va se créer une identité nouvelle
québécoise : avec la Révolution tranquille (1960-1964), l'identité
« Québec » se fait jour ainsi que l'appellation de « Québécois », pour
tout résident du Québec.
Notons que, de même que le Québec a du mal à définir ses propres
débuts, l'histoire de sa littérature éprouve les mêmes difficultés et se
découpe de façon arbitraire et plutôt vague. On constate le manque
d'« époques » signifiantes et marquantes telles que la Renaissance ou
le Romantisme, ainsi que l'absence de « mouvements » et d'« écoles »
littéraires.
Français langue première
221
40S : Littératures francophones
Par ailleurs, le courant reflétant les réalités sociales et artistiques d'une
époque déterminée, la notion de courant littéraire permet une
ouverture plus large dans le découpage de la littérature québécoise.
Les dix sections présentées ci-après représentent dix courants, c'est-àdire dix étapes de l'apprentissage d'un peuple jeune qui découvre,
progressivement, en même temps que la liberté individuelle et
collective, l'accès à la parole, à sa parole.
• Les écrits coloniaux
• La littérature orale et l’imaginaire collectif
• Le romantisme des Patriotes
• Le terroir et l’anti-terroir
• Les Idéalistes
• Le réel et l’au-delà du réel, l’automatisme
• Maîtres chez nous : la Révolution tranquille
• Où la littérature fait fi du passé
• L’individualisme, héritage de la contre-culture
• Le Québec, société de la pluralité. Une littérature de l’altérité.
Ces dix courants prennent leur source dans
y
la littérature de la Nouvelle-France (1534-1760) : recherche et
découverte d'un nouveau monde;
y
les écrits du Canada français (1760-1960) : défense des
valeurs traditionnelles autant que des valeurs prônant la
liberté;
y
la littérature du Québec (1960 à aujourd'hui) : description d'un
pays jeune assurant son destin et proclamant la reconnaissance
de son moi ainsi que celle de l'étranger, jusque là ignoré.
Dans chacune de ces étapes, on est confronté à la vision d'un monde
en pleine évolution, évolution qui s'apparente à un courant nouveau,
lien logique entre le courant précédent et le suivant.
Cette vision du monde se situe dans un contexte historico-culturel qui
détermine le courant littéraire de l'époque. Enfin ces courants, tant
sociaux que littéraires, sont apparentés aux courants existant alors en
Europe et aux États-Unis.
222
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les écrits coloniaux
À l'époque de la Renaissance, au XVIe siècle, la culture européenne est
en pleine expansion.
Avec la recherche de métaux précieux débute l'ère des expéditions
maritimes européennes, à la recherche d'un passage vers l'Ouest pour
les routes de l'Asie.
Contexte
historique :
la
Nouvelle-France
(1535 - 1759)
Au XVIe siècle, les guerres de religion réveillent l'esprit missionnaire. Le
Portugal et l'Espagne se lancent alors dans la course à l'exploration,
dans le but de s'enrichir et d'évangéliser les peuples païens.
Après Christophe Colomb qui, au nom de l'Espagne, arrive en Amérique
en 1492, l'Italien Amerigo Vespucci, publie Mundus Novus (le Nouveau
Monde) en 1504 (le mot « Amérique » vient du prénom
« Amerigo »). Puis le Portugais Magellan apporte la preuve que la Terre
est ronde. Le roi de France François 1er confie, en 1524, la première
exploration française en Amérique du Nord, à Giovanni da Verrazano
qui sera le premier à reconnaître, comme distinct de l'Europe et de
l'Asie, le continent américain.
C'est en 1534 que François 1er confie une mission à Jacques Cartier, afin
de trouver un passage vers l'Ouest. Cartier se rendra trois fois au
Canada et explorera toute la région du Saint-Laurent. Mais... pas de
métaux précieux et pas de passage vers l'Asie! Au début du XVIIe
siècle, c'est le commerce de fourrures de castor, qui, grâce à la mode
des chapeaux de feutre, ravive l'esprit d'exploration. Les marchands,
les premiers à s'enfoncer à l'intérieur du continent, pactisent avec les
« Indiens » (Hurons et Montagnais) qui sont 250 000 à occuper le
territoire de la Nouvelle-France et qui invitent les Français à s'installer
sur le continent (Des Sauvages, Samuel de Champlain en 1603).
Les « Coureurs de bois », appelés aussi « Voyageurs » ou « Indiens
blancs », vont suivre et poussent leurs investigations toujours plus vers
l'Ouest. Ils établissent ainsi un vaste réseau de voies de communication
et de postes de traite avec les Amérindiens.
Autres acteurs essentiels de cette implantation des Européens en
Amérique du Nord, les missionnaires, dont le but est l'évangélisation
des peuples autochtones. Deux ordres religieux, Jésuites et Récollets,
surnommés « Robes noires » à cause de leur soutane, parcourent le
continent nord-américain. Les écrits de leurs aventures sont une source
précieuse de documentation ethnologique. Ils témoignent aussi de la
naissance de ce pays, du quotidien de ses femmes et ses hommes, des
relations avec les tribus autochtones.
Français langue première
223
40S : Littératures francophones
Des femmes
Dès le début de la colonie, le rôle des femmes, des hommes et des
religieux suscite l'admiration. C'est surtout par leur correspondance
qu'on est au fait de la colonie en Nouvelle-France. Parmi ces femmes,
piliers de l'implantation des familles, signalons : une grande mystique,
Marie de l'Incarnation, appelée « la Sainte Thérèse du Canada »,
Marguerite Bourgeoys, première institutrice; la religieuse Marie Morin;
Élizabeth Bégon qui rend compte de la vie mondaine de la colonie;
Jeanne Mance et ses œuvres sociales, etc.
L'éducation
De Ville-Marie (Montréal) à Québec, l'éducation est prodiguée par de très
jeunes Françaises héroïques. Dans une étable de pierre, Marguerite
Bourgeoys ouvre la première école. On peut dire que, sous toutes ses
forces, l'éducation est placée sur la tutelle de l'Église. Le Collège des
Jésuites dispense un enseignement semblable à celui qui se donne en
France. Mais l'enseignement secondaire n'est pas encore généralisé et
l'université fait totalement défaut. De plus, les presses à imprimer sont
interdites dans la colonie et les livres doivent tous venir de France.
Les arts
Jusqu'au XVIIIe siècle, les arts sont destinés aux édifices religieux :
églises, séminaires, couvents, hôpitaux. L'évêque de Québec,
Monseigneur François de Laval, recrute d'abord des peintres renommés
en France. Puis il créera l'École des Arts et Métiers où l'on enseigne les
métiers traditionnels : peinture, sculpture, dorure, ébénisterie,
maçonnerie, afin de promouvoir la formation d'artistes nés en
Nouvelle-France.
La littérature
Les histoires des auteurs des récits coloniaux ont été maintes fois
rééditées. Elles suscitent, aujourd'hui encore, un intérêt qui fait dire à
certains historiens littéraires que ces auteurs, de par les thèmes qu'ils
ont traités, ont atteint un des sommets de la littérature québécoise. À
travers l'intrépidité de l'exil, le courage de l'implantation, la témérité et
les difficultés de l'adaptation, ces récits représentent une source
d'inspiration pour les écrivains québécois d'aujourd'hui, chez qui ces
textes ont pris une valeur sacrée.
224
Français langue première
40S : Littératures francophones
A)
Récits de voyages et de découvertes
Si l'on connaît bien l'époque de la découverte du Canada, c'est grâce
aux écrits que nous ont laissés les premiers explorateurs,
colonisateurs, voyageurs et administrateurs de leurs voyages en
Nouvelle-France. Parmi eux, le découvreur du Canada, Jacques
Cartier qui, de Saint-Malo en France, fit trois fois le voyage vers ce
nouveau monde (1534 à 1542). Cartier est le premier écrivain
(Voyages en Nouvelle-France) à nommer puis décrire cette nouvelle
contrée et, en particulier, ses habitants, Micmacs, Hurons et Iroquois.
Dans ses récits, on ressent constamment son don d'émerveillement
ainsi que son esprit religieux. Jacques Cartier sera le premier à explorer
le Saint-Laurent et à y faire une tentative de colonisation.
Samuel de Champlain, autre grand explorateur et fondateur de
Québec, explora la vallée du Saguenay et imagina tout le système
hydrographique des Grands Lacs. En 1608, il fonde l'Habitation du
Québec. De retour en France, il publie Des Sauvages. Allié des Hurons
et des Montagnais, Champlain imagine la route de l'Ouest en poussant,
pendant 26 ans, ses investigations qu'il partagera en 1632 dans les
Voyages de la Nouvelle-France. Ses dessins, ses croquis de la vie des
Autochtones, ses cartes détaillées de la Nouvelle-France, ses
descriptions de l'Habitation, ses enquêtes, ses rapports, son
argumentation, tout cela fait de Champlain le premier historien
(Œuvres de Champlain) de la Nouvelle-France.
Le Baron de La Hontan est un jeune Français qui découvre le Canada à
l'âge de 17 ans. Après un séjour d'une dizaine d'année sur le nouveau
continent, il publie plusieurs ouvrages dont la description libertine fera
scandale en France : Nouveaux Voyages de Monsieur le Baron de la
Hontan en Amérique septentrionale, Mémoires de l'Amérique
septentrionale (1703) et Dialogues avec un sauvage (1703), récit dans
lequel La Hontan transforme l'image du sauvage en celle du « bon
sauvage » et où il décrit les vertus amérindiennes par rapport aux vices
de la civilisation européenne.
B)
Description des ethnies autochtones
Plusieurs des écrits coloniaux décrivent les mœurs des Autochtones.
Parmi eux, un Récollet, Gabriel Sagard, décide de vivre au milieu du
peuple huron dont il apprend la langue. Précurseur, il représente le
prédécesseur du Voyageur canadien. Sa sympathie pour les Hurons,
qu'il juge de même nature que les Européens, l'incitera à faire, à
travers ses propres aventures de mission, un tableau très détaillé de la
vie quotidienne des Hurons dans Le grand voyage au pays des Hurons
(1632). En 1636, Sagard publie L'Histoire du Canada où il défend les
activités missionnaires réalisées dans ce pays.
Français langue première
225
40S : Littératures francophones
Parallèlement en France, Jean-Jacques Rousseau, dans son Discours
sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes (1755),
trace un portrait idyllique du « bon sauvage » et idéalise les habitudes
de vie des Amérindiens. Il se rapproche ainsi, tout en critiquant les
méfaits de la civilisation européenne de l'époque, des auteurs tels que
la Hontan et Sagard.
Le Jésuite François-Xavier de Charlevoix est considéré comme le
meilleur historien de la Nouvelle-France. À travers deux de ses
ouvrages, Journal d'un voyage (1723) et Histoire et description générale
de la Nouvelle-France (1744), Charlevoix a analysé les comportements
et mentalités de diverses communautés ethniques, de la NouvelleFrance et de l'Acadie aux Grands Lacs, jusqu'à la Nouvelle-Angleterre.
C)
Annales et correspondances épistolaires
Les Français habitant la Nouvelle-France ont laissé une correspondance
précieuse dans laquelle ils faisaient un compte rendu détaillé de leur
nouvelle situation à leur famille ou à leurs supérieurs restés en France.
Les plus illustres de ces annales, relatant au jour le jour l'aventure
missionnaire et coloniale, appartiennent aux Jésuites. Ces Relations
des Jésuites comprennent soixante-treize volumes, écrits entre 1611 et
1693. Parmi ces Jésuites, le Père Jean de Brébeuf rédige de
nombreux rapports à ses supérieurs, qui sont des œuvres ethnologiques
où il décrit, entre autres, tous les détails de rites mortuaires des
Hurons, chez qui il a été envoyé. Prisonnier des Iroquois, il sera
supplicié atrocement en 1649 et sera déclaré le premier des « martyrs
canadiens ». Canonisé, il est proclamé patron du Canada en 1940.
Marie Morin, religieuse des Hospitalières de Ville-Marie (Montréal),
rédige les Annales de l'Hôtel-Dieu de Montréal, où elle évoque, entre
autres, les difficultés de la vie de l'époque, marquée par les guerres
iroquoises.
En ce qui concerne la correspondance, c'est à Marie de l'Incarnation
que l'on doit la plus grande part de renseignements concernant, en
particulier, l'éducation des jeunes filles de la colonie, auxquelles elle
dévouera sa vie. Les 13 000 lettres qu'elle écrira, dans le monastère
des Ursulines qu'elle a fondé pour la formation des jeunes, sont
représentatives de l'idéal religieux de cette époque.
226
Français langue première
40S : Littératures francophones
La littérature orale et l’imaginaire collectif
La bataille des plaines d'Abraham, le 13 septembre 1759, est la plus
courte de l'histoire. Après un combat de trente minutes, une fusillade
décisive offre la victoire aux Anglais. Par la suite, à cause d'une
population vaillante mais peu nombreuse, la colonie française
s'effondre. Le destin du peuple québécois est joué et les conséquences
sont encore vivaces aujourd'hui.
Après la Conquête, les administrateurs français retournent en France
laissant la place aux Britanniques et à un gouverneur anglais. Le
régime anglais régit la colonie. Le Canada s'appelle désormais la
province de Québec. Pour accéder à un poste d'administration, le
Canadien français doit prêter un serment anti-catholique, ce qui l'exclut
du rôle politique. Peu à peu cependant, la vie reprend son cours. L'Église
coloniale, catholique, est maintenant sous l'autorité d'un roi protestant.
Contexte
historique :
après la
conquête,
la survie
(1760 - 1899)
Après la Révolution américaine et l'Indépendance des États-Unis en
1783, la majorité anglophone augmente encore car nombreux sont les
Loyalistes qui émigrent alors en Amérique du Nord britannique. Ces
derniers exigent bientôt, en plus des lois anglaises, un territoire qui
leur soit propre. En 1791, l'Acte constitutionnel divise la colonie en
deux provinces : le Bas-Canada (le Québec) aux Canadiens français et
le Haut-Canada (l'Ontario) aux colons anglais et loyalistes. Les
Canadiens français pourront siéger à l'Assemblée législative, élue par
leur population, ce qui leur confère un premier pouvoir politique. Après
le régime autocratique français, puis le régime militaire, cet
apprentissage de la démocratie ne sera pas facile mais il est à l'origine
d'un peuple qui, plus tard, revendiquera une liberté totale et une
autonomie complète.
Après le retour de la classe instruite vers la France, en 1760,
l'enseignement, si bien organisé en Nouvelle-France, se démantèle. Les
écoles ferment et l'analphabétisme se répand rapidement. Au début du
XIXe siècle, seulement 4 000 personnes sur 150 000 savent lire et
écrire. Ce qui fera dire à Lord Durham des Français du Bas-Canada
qu'ils sont « un peuple sans histoire et sans littérature ». Il propose
l'assimilation de ces êtres qu'il estime inférieurs, parce qu'ils ne
reconnaissent pas « l'incomparable grandeur de l'Empire britannique ».
La littérature
Effectivement, la population canadienne-française, abandonnée par son
élite et éparpillée sur une vaste superficie, n'a pas le loisir de lire ou
d'écrire. Le dur labeur quotidien et la lutte pour la survie sont le lot de
ces hommes et ces femmes remarquables et font que la majorité
d'entre eux est analphabète.
Français langue première
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40S : Littératures francophones
Journaux et
gazettes
La première presse canadienne voit le jour en 1764 et permettra très
vite la diffusion des journaux et des gazettes, informateurs publics de
première importance : La Gazette de commerce et littéraire pour la ville
et district de Montréal en 1778, puis La Gazette de Montréal/The
Montreal Gazette en 1785 et Le Canadien, premier journal politique en
1806; ces journaux se caractérisent par leur orientation nationaliste
fondée sur une langue et une culture communes. Les Canadiens
français ne savent lire ni écrire? Qu’à cela ne tienne, ils parleront! Si,
en 1848, le Répertoire National ne put rassembler que trois cents petits
textes, découverts dans les journaux de l'époque et couvrant une
période d'une centaine d'années, il fut plus aisé de se tourner vers la
littérature orale qui, pendant cette même période, demeura le ciment
de la vie sociale des Canadiens français.
La littérature
orale
La littérature orale, c'est le patrimoine d'un peuple qui, transmis de
bouche à oreille et de génération en génération, traverse les siècles
pour en conserver les racines les plus anciennes. C'est le lien culturel
qui, sans le secours de l'écriture, propage l'héritage culturel et la
mémoire ancestrale et collective. Chez les Canadiens, la littérature
orale est peuplée de sorcières, de loups-garous, de diables, de
revenants… Elle transmet aux jeunes générations la moralité populaire,
moralité où les notions de Bien et de Mal occupent une place bien
définie. À travers sa littérature orale, dont l'origine se perd un peu dans
la nuit des temps, le Québec s'est forgé, petit à petit, une identité
culturelle à travers laquelle il apparaît comme un peuple vaincu mais
insoumis et indépendant, pauvre mais fier et hospitalier, bon vivant et
enjoué.
C'est par les chansons, les contes et les légendes qu'on désigne
d'ordinaire la littérature orale, dont les auteurs restent inconnus, et qui
est plutôt le résultat d'une production collective, dont le contenu peut
changer d'un orateur à l'autre. Grâce à la littérature orale, les
caractéristiques de l'âme québécoise ont pu se préciser; la culture
canadienne française parvient alors à exister désormais en soi.
La chanson
228
Une chanson, née en France, représenta l'hymne national des
Canadiens pendant de nombreuses années : À la claire fontaine. Les
Patriotes, dit-on, la chantèrent en 1838 lors de leur ultime combat à
Saint-Eustache, encerclés par les Britanniques. Pour certains, la devise
du Québec « Je me souviens » viendrait du refrain :
Français langue première
40S : Littératures francophones
Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai. (En 1880,
Calixa Lavallée et Basile Routhier créent Ô Canada, qui supplantera À
la claire fontaine pour devenir l’hymne national.) De nombreuses
chansons traversent le temps. Elles montrent un peuple qui aime
chanter, rire et danser. Les veillées canadiennes sont le symbole vivant
de la joie de vivre des Québécois.
Partie très importante de la littérature, le conte décrit bien l'imaginaire
collectif du peuple québécois. On en retrace plus de 20 000! On peut
les diviser en trois catégories : les contes pour rire, les contes d'esprit
rabelaisien et les contes malicieux.
Le conte
Ces contes sont colportés de siècle en siècle et on les rapporte à
l'occasion de nos jours encore.
On trouve aussi les contes anecdotiques (réalistes, vraisemblables) et
les contes historiques qui racontent les exploits de personnages
légendaires tels Cartier, Montcalm, Madeleine de Verchères.
Nombreuses sont les légendes qui nous sont parvenues. La plus
célèbre, écrite par Honoré Beaugrand, est probablement celle de « La
chasse-galerie » où des bûcherons vendent leur âme au diable pour
aller rencontrer, le soir de Noël, leurs blondes restées au village. Ils
feront le voyage, de leur chantier forestier jusqu'aux belles, en canot
volant. Autre légende québécoise, celle de « La Corriveau », légende
fantastique relatant l'histoire d'une femme qui fut pendue pour avoir
assassiné ses deux maris.
La légende
L'imaginaire populaire se reflète bien à travers ces contes et légendes
qui, en fait, reflètent la psychologie de tout un peuple.
Dès la première moitié du XIXe siècle, quand les premiers écrivains
apparaissent, c'est dans la littérature orale qu'ils puisent leur source
d'inspiration. Certains transcrivent les légendes ancestrales ou les
adaptent. D'autres les utilisent pour étoffer leur roman. Quoi qu'il en
soit, ces récits représentent généralement la vision du monde de ce
peuple dont les valeurs restent celles des ancêtres.
Français langue première
La littérature
orale, racine de
la littérature
écrite
229
40S : Littératures francophones
Philippe Aubert de Gaspé fils, avec L'influence d'un livre (1837)
reprend de nombreuses légendes qui font souvent mention du diable,
en particulier dans l'histoire de Rose Latulippe, entraînée par un beau
danseur étranger. Ce livre tient aussi du roman de mœurs et du roman
historique. Philippe Aubert de Gaspé père, publie en 1863 Les
Anciens Canadiens où, avec la reprise de la légende de la Corriveau, il
apporte un précieux témoignage folklorique, tout en intégrant dans son
récit des personnages historiques et fictifs. Ce livre est considéré
comme l'un des romans les plus importants du XIXe siècle.
Louis Fréchette est considéré comme le plus grand écrivain du XIXe
siècle : il publie plusieurs recueils de poésie (La voix d'un exilé, PêleMêle, Les Oiseaux de neige), une œuvre dramatique Retour de l'exilé
(1880), suivie de La légende d'un peuple (1887), des contes et ses
Mémoires intimes.
230
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le romantisme des Patriotes
Au début du XIXe siècle, bien que le Québec soit peuplé en majorité de
Canadiens français, une question se pose : doit-on unir les deux Canada
afin que la politique anglaise soit prépondérante?
Contexte
historique
En 1834, le Parti canadien, appelé « Patriote », désire accéder à la
souveraineté politique. Refus de l'Angleterre. Le pouvoir réel demeure
dans la minorité anglaise. Dès 1830, le début de l'industrialisation fait
de Montréal le point central de l'économie canadienne. Mais, crise
économique mondiale, immigration irlandaise massive et épidémies en
font une ville à majorité anglophone et au prolétariat croissant.
Cette situation instable conduit en 1738-39 à la Rébellion des Patriotes
qui entraîne les Canadiens français à se battre pour la souveraineté.
Cette révolte armée subit un cuisant échec : 12 Patriotes sont pendus
et une soixantaine déportée en Australie. La chanson « Un Canadien
errant » d'Antoine Gérin-Lajoie leur est dédiée. Lourde conséquence
de cette rébellion : « le rapport Durham » par lequel Lord Durham,
alors gouverneur du Canada, propose d'unir les deux Canada, Québec
et Ontario. Son but : assimiler les Canadiens français, « ces êtres
inférieurs », à l'Empire britannique, où seul l'anglais ferait loi. L'Acte
d'Union des Canada est signé en 1840. Le Canada-Est (Québec) crie à
l'injustice.
La Rébellion
des Patriotes
Après 1840, l'Église du Québec accroît encore son influence sur la
population, dans le but de préserver la religion catholique, la langue
française et les institutions canadiennes. L'Église prend aussi la direction
des associations littéraires, censure théâtre et littérature et réprouve la
danse. De plus, elle accentue son poids sur le monde politique. Évêque
de Montréal, Monseigneur Ignace Bourget est l'emblème de
l'ultramontanisme, mouvement conservateur qui prône la suprématie de
l'Église sur l'État et voue une obéissance inconditionnelle au pape.
Craignant la portée du nouvel esprit démocratique représenté par
l'Institut canadien (société littéraire laïque), Monseigneur Bourget
l'interdira et en excommuniera certains de ses membres. Les
Ultramontains s'assurent désormais que les Canadiens français sont
soumis à leur curé de paroisse et qu'ils ne se consacrent qu'à leurs
activités agricoles.
Ascendance du
clergé sur la
société
canadienne
Français langue première
231
40S : Littératures francophones
La littérature
Idées novatrices
et romantisme
Le vent de la démocratie balaie l'Europe du XIXe siècle. Les révolutions,
américaine en 1775 et française en 1789, ont donné le ton. L'autorité
du peuple commence à faire loi et on parle des droits de la personne.
Les concepts de liberté, individuelle et collective, les idées
républicaines, la séparation de l'Église et de l'État, l'accès à
l'enseignement public ont maintenant droit de cité.
Dans le domaine de la littérature, ces idées novatrices donneront
naissance au romantisme. L'expression personnelle a alors libre cours
et l'imagination sans retenue donne lieu à un lyrisme personnel, à base
d'amertume, de nostalgie et de vague à l'âme. Ce romantisme est aussi
teinté d'esprit humanitaire, et invite l'écrivain à devenir guide de son
peuple, dans cette expression de la liberté. De nombreux auteurs
littéraires s'engagent dans la vie politique. Ce vent nouveau atteint le
Québec du XIXe siècle, mais dans cette province, on fait face à deux
idéologies totalement opposées : le libéralisme et l'ultramontanisme;
ces deux tendances donneront leur couleur au romantisme québécois.
• Les Libéraux sont des Montréalais représentés par les écrivains,
journalistes, orateurs. Leur ambition est basée sur l'avenir de la
démocratie. Tout les passionne : politique, économie, linguistique,
éducation, social. L'idée de liberté et de progrès est le moteur de
ces hommes et femmes révolutionnaires, dont plusieurs sont
membres de l'Institut canadien.
• Les Ultramontains, laïcs et religieux, résident surtout à Québec et
se regroupent autour du clergé. Attachés au passé, ils redoutent
l'assimilation des Canadiens français et la perte de la foi
catholique. Ces conservateurs font triompher leur idéologie et
réussissent à repousser les courants littéraires européens du XIXe
siècle (réalisme, naturalisme et symbolisme) jusqu'au XXe siècle
québécois.
Mais ce qui différencie le romantisme québécois du romantisme
européen, c'est le concept de la « cause nationale » et l'attachement à
la patrie qui représentent alors, pour les Canadiens français, un mode
de vie, une façon d'être. Cette distinction par rapport aux autres
romantismes se retrouve autant chez les écrivains libéraux que chez les
Ultramontains.
A) Quelques échappées d’un romantisme « empêché »
Les ancêtres des Québécois, gens d'ordinaire paisibles, sont peu
intéressés par les récits excessifs. La plupart sont analphabètes et ne
s'occupent que de satisfaire leurs besoins premiers. Le critique littéraire
Octave Crémazie le déplore dans un écrit où il mentionne que, pour
232
Français langue première
40S : Littératures francophones
ce peuple, la culture est un vain mot. De ce fait, la littérature au
Québec a du mal à trouver sa voie. Cependant, quelques œuvres
réellement romantiques voient le jour et la littérature québécoise
commence à se diversifier : conte (place privilégiée au XIXe siècle),
roman, poésie, critique littéraire.
Georges Boucherville offre le premier récit fantastique québécois : La
Tour de Trafalgar (1835). Des femmes aussi se sont distinguées dans ce
courant romantique : Henriette Dessaulles/Fadette, conteuse et
journaliste, livre son âme dans son journal : Journal d'Henriette
Dessaulles (1874-1880). Félicité Angers/Laure Conan signe le
premier roman d'introspection canadien français : Angéline de Montbrun
(1884) où l'émotion est toujours sous-jacente.
B) Un romantisme militant et engagé
La littérature québécoise a d'abord été au service d'une lutte, celle de
la liberté, lutte qui atteint son apogée lors de la Rébellion des Patriotes
et des luttes libertaires, instituées par l'Institut canadien de Montréal.
Sur les rives du Saint-Laurent souffle un esprit d'ouverture, de liberté
et de tolérance qui veut faire oublier les injustices de la Conquête. La
conscience nationale d'un peuple est en train de naître. Son destin
historique se dessine. Ces Patriotes, s'ils tiennent à leurs racines
françaises autant qu'à leur langue, sont ouverts à d'autres courants.
Ainsi, ils se choisiront, parmi leurs chefs, des Anglais et des Irlandais.
Les auteurs de ce courant sont des fils de bourgeois éduqués, à l'idéal
élevé, et suivent les traces des romantiques français tels Victor Hugo
et Lamartine qui, par leur plume et leurs actions, se sont lancés dans
une politique libératrice. Leurs revendications sont semblables à celles
de tous les peuples opprimés : usage de leur langue, le français, libre
choix de leur gouvernement, abolition et correction des injustices
sociales.
Romantisme
révolutionnaire
Parmi les écrivains, quelques-uns se démarquent : ainsi, FrançoisXavier Garneau. Il a composé de nombreux poèmes. Mais c'est à
travers son Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours
(1845-1852), où il compile tous les récits d’avant et d’après la Conquête,
qu’il influencera les auteurs de la seconde moitié du XIXe siècle. Cet
ouvrage, à la fois scientifique et nationaliste, vise à démontrer que
l'affirmation de Lord Durham – « Les Canadiens, peuple sans histoire
et sans littérature » – est sans fondement. Avant sa mort, FrançoisXavier Garneau sera consacré historien national.
Français langue première
233
40S : Littératures francophones
Marie-Thomas Chevalier de Lorimier : partisan des Patriotes,
accusé en 1838 d'avoir fomenté la Rébellion, il fut condamné à la
pendaison. Le 14 février 1839, la veille de son exécution, il rédige son
testament politique. Dans cet écrit comme dans ses lettres, de Lorimier
fait figure de héros romantique.
Journaliste actif sur le plan politique, Antoine Gérin-Lajoie compose,
en 1842, un chant patriotique, Un Canadien errant, en hommage aux
Patriotes déportés en Australie. Il écrit également la première tragédie
en trois actes du Canada français : Le Jeune Latour (1840). Dans ses
deux récits de la vie quotidienne, Jean Rivard, le défricheur et Jean
Rivard, économiste (1864), Gérin-Lajoie veut inculquer aux jeunes
Canadiens l'amour de la patrie. Le point culminant de son œuvre est
Dix ans au Canada, de 1840 à 1850.
Mentionnons que, dans ce « peuple sans culture », circulaient quand
même des œuvres récemment écrites en France. Les livres français
étant très chers, ce sont les journaux de l'époque qui diffusent ces
récits à travers les feuilletons. Ainsi Le Canadien publie Paroles d'un
croyant du Père Lamennais, où l'écrivain traite de la séparation de
l'Église et de l'État. De même, Le Père Goriot de Balzac paraît en 1835.
Romantisme et
anticléricalisme
Après la pendaison et la déportation de nombreux Patriotes, les
survivants de la Rébellion de 1837-1838 tentent de se faire oublier.
Toutefois, l'esprit de ces « Fils de la liberté » n'est pas mort. Il va
ressurgir en 1844 au sein de l'Institut canadien de Montréal, où les
idées libérales et anticléricales vont germer. L'institut tente d'abolir
l'esprit de résignation et de soumission prôné par l'Église et invite à une
action sociale qui donnera accès au progrès. Ces libres-penseurs que
l'on appellera « Les Rouges » laisseront leur marque à la postérité.
Louis-Antoine Dessaules dirige l'Institut canadien. Esprit libéral, il
entre en conflit avec Monseigneur Bourget contre lequel il multiplie les
critiques. Son Discours sur la tolérance (1868) rappelle celui de
Voltaire, rédigé en 1763 en France. Louis-Antoine Dessaules défend
aussi la cause de son oncle Papineau dans Pamphlet Papineau et Nelson
en 1848. Arthur Buies, libéral et anticlérical, fonde La Lanterne
canadienne en 1868, journal interdit par les autorités cléricales et
L'Indépendant en 1870, pamphlet politique et littéraire.
Textes parallèles
en France
234
Sous la direction de Diderot, paraît entre 1751 et 1772, en France, un
vaste recueil de connaissances humaines, ouvert à la liberté et à la
pensée rationnelle : l'Encyclopédie. Semant la controverse politique et
religieuse, cette œuvre collective de libres-penseurs tels que Voltaire,
d'Alembert et Rousseau, sera fortement discréditée par la censure
Français langue première
40S : Littératures francophones
royale. Cette œuvre gigantesque du XVIIIe siècle français est devenue
le symbole de la lutte philosophique et influera profondément sur les
mentalités de l'époque. L'Encyclopédie condamne la religion d'État et
sa hiérarchie. Elle promeut une religion tolérante qui respecte la liberté
et la raison individuelles. Un siècle plus tard, l'Institut Canadien
reprend l'esprit et les idées libérales des philosophes français du siècle
des Lumières.
Après la défaite des Patriotes, le libéralisme est minoritaire et le clergé a
repris son rôle de domination d'après la Conquête. Son action permet la
non-assimilation des Canadiens français mais stagne dans une période
ultramontaine et conservatrice que certains qualifieront de « grande
noirceur ». Le pouvoir religieux l'emporte sur le pouvoir civil. La foi étant
gardienne de la langue, on s'évertue à protéger la foi catholique. Le
clergé a le dernier mot sur tout. La littérature, « arme principale des
ennemis de l'Église », se verra contrainte à délaisser le domaine de
l'esthétique pour défendre les valeurs établies : culte d'un passé idéalisé,
de la patrie, de la langue, de la foi. Ainsi entravée, la littérature de cette
époque végète. On se méfie de tout : romantisme français mélancolique
et maladif, romans et pièces de théâtre trop réalistes ou imaginatifs, qui
ne conviennent pas à une attitude chrétienne. Barricadés derrière les
traditions, la langue et la foi, les critiques littéraires censurent et
interdisent à tour de bras ce romantisme étranger inconvenant qui
exhibe le « mal du siècle ». Henri-Raymond Casgrain est le censeur
de la littérature canadienne-française de son époque et fait l'apologie
d'une littérature « propre, saine et noble ». Dans Œuvres complètes
(1896), Jules-Paul Tardivel promeut le rôle évangélisateur et
civilisateur des Français en Amérique. Dans son roman, Pour la patrie
(1895), il dénonce la fonction destructrice du roman, en prenant La
Comédie humaine de Balzac pour exemple et en notant tous les vices et
passions qui ne peuvent qu'influencer négativement le lecteur.
Romantisme
et esprit
ultramontain
Ce mouvement littéraire, baptisé « le mouvement immobile » par la
critique d'aujourd'hui, veut mettre les œuvres littéraires au service
d'une vie simple et saine, par la pratique de l'agriculture. Malgré les
balises imposées, certains écrivains vont cependant percer en
composant avec ces impératifs. Ainsi, Octave Crémazie avec son
poème Le Drapeau de Carillon (1858), est consacré poète national. Au
nombre des nombreux écrivains « empêchés » de la littérature
québécoise, Crémazie sera exilé en France.
Romantisme
figé
Quant à Patrice Lacombe, avec son roman unique La Terre paternelle
(1846), prototype de la littérature régionaliste au Québec, il est à
l'origine du courant du terroir.
Français langue première
235
40S : Littératures francophones
Le terroir et l’anti-terroir
Contexte
historique
À la naissance de la Confédération canadienne en 1867, le Québec est
une société majoritairement rurale : 80% des Québécois habitent la
campagne; 75% d'entre eux sont francophones, en grande majorité
catholiques. Mais la vie agricole étant toujours difficile, nombreuses
sont les personnes qui déménagent vers les villes ou les États-Unis
pour y trouver du travail dans les manufactures.
Inquiétude de
l'Église et
tentative de
colonisation
Bien établie dans la population rurale, l'Église ressent cet exode vers la
ville comme une atteinte à son autorité morale, sociale, politique et
idéologique. Elle continue à prouver haut et fort la supériorité des
valeurs traditionnelles, telles que la famille, la religion, la langue
française et la terre, que seule la vie saine de la campagne peut
préserver. Pour l'Église, la ville est le lieu de la perdition.
Pour conserver son ascendant sur le monde rural, l'Église lui propose
son aide. Ainsi se dessine un vaste mouvement de colonisation vers les
régions éloignées (Laurentides avec le curé Labelle, Lac Saint-Jean); de
nouvelles paroisses sont fondées (Hébertville par le curé Hébert). Ce
mouvement devient une œuvre nationale qui, on l'espère, assurera le
maintien de la présence française et de la foi catholique au Québec.
Malgré cet effort de colonisation, le surplus de population ne trouve pas
toujours sa place dans les campagnes et l'exode vers la ville, Montréal
en particulier, se poursuit inexorablement. Les anciennes structures
socio-économiques du Québec se dégradent.
La littérature
du terroir
Encore une fois, la littérature est mise à contribution. Au XIXe siècle, on
lui avait donné pour mission d'assurer la survivance des Canadiens
français. Au début du XXe siècle, on lui demande de se faire le chantre
de l'agriculture et de la terre, seules voies de salut pour le peuple
canadien. Ainsi seront préservés la cohésion de la société et le maintien
des valeurs traditionnelles conservatrices. Laissons les affaires et les
finances aux Anglais et occupons-nous de choses nobles : la culture de
la terre! Cependant, à l'ère de l'urbanisation et de l'industrialisation,
l'attrait de la ville semble être le plus fort : le pourcentage de Canadiens
français habitant les villes passe de 36 à 60% entre 1901 et 1931.
On utilise encore la littérature dans un esprit de propagande nationale.
Il faut à tout prix valoriser le terroir, c'est-à-dire marquer son
attachement profond à la terre de ses ancêtres, revenir aux traditions
et coutumes des pionniers, et rester garant de leur langue et de leur
foi. C'est la littérature « terroiriste »; l'œuvre du terroir est dite
« régionaliste » quand elle s'efforce de valoriser une région particulière.
L'écrivain du terroir se voit contraint de dépeindre une vision idyllique
de la terre et la vie agricole ou de sublimer la vie des ancêtres,
236
Français langue première
40S : Littératures francophones
omettant intentionnellement les difficultés qu'ils ont connues. Ce
faisant, on cache une réalité pénible : l'agriculture ne suffit plus à
nourrir les familles…
Mais, parmi les auteurs, certains opposent un refus à ces contraintes.
Ils écriront selon leur bon vouloir, selon la discussion esthétique de la
littérature, au nom de l'art pour l'art, sans soumission à cette
propagande sclérosante.
A) Le patrimoine : illusion mythique de la terre
Initiateurs du courant du terroir, les poètes peignent « l'âme du peuple »,
chantant, avec la noblesse des travaux de la ferme, les beautés de la
campagne québécoise. Les poètes se regroupent autour de la revue Le
Terroir, fondée en 1909. William Chapman, influencé par le mouvement
romantique et parisien du XIXe siècle français, fait, dans Les Aspirations.
Poésies canadiennes (1904), l'éloge du cultivateur, collaborateur de Dieu
pour faire donner à la terre son fruit. Nérée Beauchemin est le meilleur
poète du terroir (Patrie intime, 1928). Alfred Desrochers, écrivain
régionaliste des Cantons de l'Est, est le poète du terroir le plus important
né au XXe siècle (À l'ombre de l'Orford et Œuvres poétiques).
Le récit narratif s'efforce de relater les « petites histoires » du passé, les
traditions et croyances des ancêtres et tout ce qui se rattache à la terre
et aux mœurs ancestrales. Le passé est magnifié et dépeint dans les
moindres détails à travers les travaux agricoles, forestiers ou de la chasse.
La poésie
La prose
On trouve deux catégories de récits : ceux qui se rattachent à la
colonisation du XIXe siècle, ces romans de la terre qui créent et
perpétuent le mythe de la terre paternelle nourricière et féconde, celle
qui libère l'homme la traitant avec amour, et ceux qui sont constitués
de souvenirs empreints de bonheur champêtre, décrivant toujours
l'attachement du paysan à ses champs et à son clocher de village.
Quoi qu'il en soit, l'idéologie du terroir ne reflète pas la réalité de la vie
paysanne qui reste laborieuse et ingrate. Le « terroirisme » ou
« agriculturisme » s'inscrit dans une vision nationaliste qui manque
d'objectivité. Ce courant littéraire oppose radicalement deux modes de
vie : celui de la campagne idéalisé à l'extrême et celui de la ville,
condamné à outrance. Adjutor Rivard, qui a fondé « La société du
parler français au Canada », décrit les mœurs de la vie paysanne dans
Chez nos gens (1918). Frère Marie-Victorin/Conrad Kirouac, auteur
d'un traité de botanique Flore laurentienne, ouvrage scientifique le plus
répandu au Québec, est un écrivain de talent du terroir (Récits
laurentiens).
Georges Bouchard fait l’éloge du passé avec nostalgie ainsi que la
comparaison entre les mœurs urbaines et rurales, à l’avantage très net
des dernières (Vieilles choses... vieilles gens, 1926).
Français langue première
237
40S : Littératures francophones
B) Un patrimoine controversé : l'anti-terroir
La poésie
Certains poètes réagissent à cette pression exercée par l'Église et se
refusent à écrire dans une visée patriotique. La poésie, pour eux, doit
rester un art au service du progrès social. Ils se veulent libres et
anticonformistes, se laissent imprégner par l'esprit parisien et la poésie
symboliste du Paris de l'époque. Ainsi, Guy Delahaye/Guillaume
Lahaise, poète psychiatre dont Émile Nelligan fut le célèbre patient,
avec Les phases (1910); ainsi, Paul Morin, poète « exotiste », grand
voyageur : dans son œuvre rayonnent le dépaysement et le thème
oriental :Œuvres poétiques, le Paon d'émail, Poèmes de cendre et d'or
(1911).
La prose
D'autres écrivains se rebellent encore à travers les romans. S'élevant
fermement contre les contraintes imposées, ils se verront exclus de
l'église catholique, pour avoir osé décrire la grande misère de la vie
paysanne et pour s'être posé des questions sur le sort de la vie. Ainsi,
Albert Laberge dont le roman La Scouine (1903) reste plus ou moins
interdit jusqu'en 1918, car il y décrit la noirceur physique et morale
d'une famille de la terre; Laberge sera fortement réprouvé par l'évêque
de Montréal. Laberge écrit dans la veine des romanciers naturalistes
français du XIXe siècle, dont Emile Zola était le chef de file.
Parfois il n'en faudra pas plus pour pousser un homme à l'exil. C'est ce
qui arrivera à Rodolphe Girard après qu'il eut décrit les mœurs
cléricales à la campagne et la vie d'une servante au presbytère dans
Marie Calumet (1904). La vision réaliste de l’être humain rapproche
Jean-Aubert Loranger de l’œuvre de Maupassant en France, avec ses
Contes et son roman Joë Folcu.
Textes parallèles
en France
Emile Zola dans son roman La Terre (1887) entreprend l'observation
« objective » de l'être humain. À lui aussi, on reprochera d'être
« descendu au fond de l'immondice » et d'avoir peint la déchéance de
l'homme, face à l'ingratitude et l'indifférence d'une terre mauvaise.
C) Le patrimoine
régionalistes
se
dissout
:
décadence
des
romans
Peu à peu, on assiste au déclin des romans de la terre. Alors, apparaît
en 1914 le roman Maria Chapdelaine de Louis Hémon, roman qui
connaît un succès fulgurant. Tout en étant une œuvre du terroir, ce
roman révèle tout de suite une portée universelle. Après lui, les
écrivains vont continuer à décrire la vie rurale mais dans un registre
différent. La réalité aride de cette vie fait surface; l'idéalisation n'a plus
sa place; l'écrivain ose dire la misère du peuple agricole. C'est la fin du
rêve agriculturiste et des romans de la terre.
238
Français langue première
40S : Littératures francophones
Claude-Henri Grignon s'éloigne du terroir en décrivant un avare,
Séraphin Poudrier, dans Un homme et son péché (1933).
Ringuet/Philippe Panneton brosse le portrait de la décadence de la
société rurale avec Trente arpents (1938). Germaine Guèvremont
marque le point final du roman de la terre avec En pleine terre,
Paysanneries (1942), Le Survenant (1945) et Marie-Didace (1947).
D) Le terroir populiste
Longtemps, la vie urbaine est l'image de la corruption et le lieu du vice
par rapport à la campagne salvatrice. Progressivement, certains
auteurs populistes font le portrait de sa petite bourgeoisie mesquine et
la décrivent telle une paroisse aux multiples facettes. Ainsi, Jean
Narrache/Emile Coderre dénonce, à travers les valeurs ancestrales,
les mensonges de la classe riche et la déchéance du monde prolétaire.
Ce poète et monologuiste, à la conscience sociale toute nouvelle,
devient célèbre grâce à la radio : Jean Narrache chez le diable! Il
annonce les Raymond Lévesque et Yvon Deschamps. La Bolduc/Mary
Travers, tout en turlutant, dépeint elle aussi une société ouvrière
miséreuse. Avec sa turlute, elle propose l'espoir.
E) Terroir et penseurs
Pour certains, la littérature doit se mettre au service de la sauvegarde
de la foi et de la langue. Pour l'abbé Camille Roy (Manuel d'histoire
de la littérature canadienne française longtemps enseigné à l'école), la
littérature doit accompagner le peuple dans son évolution. ClaudeHenri Grignon, polémiste, insiste sur le fait que langue et littérature
ont le devoir de faire valoir les régionalismes, marquant ainsi leur
propre identité et se démarquant de la France d'alors (Notre culture
sera paysanne ou ne sera pas, 1941). Pour d'autres, on se doit de
pratiquer une langue française universelle, oubliant ses particularités
locales ou régionales. Depuis le XIXe siècle, cette vision divergente de
la « qualité » de la langue reste sujet à controverse.
Français langue première
239
40S : Littératures francophones
Les Idéalistes
Contexte
historique :
l’acheminement
vers l’ère
moderne.
Le Canada prend peu à peu place dans le monde économique. En 1900,
Montréal répond à elle seule à près de la moitié des besoins
économique du Québec, grâce à ses industries multiples. Le libéralisme
économique, annoncé dès 1860 et fruit du développement industriel,
évince progressivement le discours agriculturiste. Alors, et jusqu’à la
Première Guerre mondiale, la province jouit d’une prospérité
croissante.
Au moment de la guerre, grâce aux exportations vers les États-Unis, la
croissance économique s’accentue, attirant toujours davantage les
paysans vers la ville. Ce qui inquiète fort le clergé qui continue sa
propagande de colonisation des régions éloignées. Cependant, la vie à
la ville n’est pas chose facile : salaire, habitat et conditions générales
demeurent aléatoires malgré l’aide de l’État aux plus démunis.
Les subventions des collèges donnent accès aux études scientifiques
qui vont aider les Canadiens français à gravir les échelons de cette
société nouvelle. Des signes de modernisme se multiplient : cinéma,
radio, automobile...
Quand la bourse de New York s’effondre, en octobre 1929, le Québec
se trouve particulièrement affecté. Activités commerciales et
industrielles sont considérablement ralenties. En 1932, le chômage
atteint 25%, c’est un record! Toronto supplante alors Montréal,
métropole économique depuis 130 ans.
La littérature
240
Après des décennies de nostalgie d’un passé illusoire, la littérature
prend son envol vers d’autres cieux, ceux de la modernité littéraire.
Abandonnant les thèmes champêtres et religieux, elle vise désormais
l’univers intérieur, mystérieux et profond de l’être humain. Grâce à des
thèmes universels et au libre choix de leur inspiration, ces poètes et
écrivains font passer la pratique littéraire d’une vision passéiste
aliénante à la pratique de l’art pour l’art. L’écrivain a choisi de peindre
l’âme et, malgré le choc que cette innovation fait naître chez les
adeptes du terroir, il ira jusqu’au bout de son œuvre, au mépris de l’exil
qui l’attend et de la marginalisation qui le menace.
Français langue première
40S : Littératures francophones
A) La poésie et l’expérience de la solitude
En 1895, quelques jeunes poètes se lancent dans l’arène de la poésie
moderne, ce qui les situe en marge de la société. Ils devront en payer
le prix fort. C’est par l’École littéraire de Montréal qu’ils se font
reconnaître. Avec Émile Nelligan à leur tête, ces « poètes sacrifiés »
sont les premiers à dire les sentiments, les émotions vraies, les
tourments intérieurs que la littérature officielle avait jusqu’alors
interdits. La rançon de cette liberté d’expression, c’est l’exclusion du
poète, l’exil intérieur ou extérieur, celui que décrit Nelligan quand il
parle de son « cœur cristallisé de givre ». À la suite des Romantiques,
du Parnasse, de Baudelaire et de Verlaine, Nelligan incarne le mythe
du poète maudit.
Grâce à ces poètes qui sauront assumer leur discours, la littérature du
Québec peut accéder à la modernité littéraire : Émile Nelligan avec
Poésies complètes, Hector de Saint-Denys Garneau avec Regards et
jeux dans l’espace (1937), Rina Lasnier dont la production littéraire
étendue et diverse montre un lyrisme empreint de spiritualité : Images
et prose (1941), Présence de l’absence (1956).
B) Le roman qui dérange
Deux romanciers ressortent de ce courant idéaliste, pour avoir
transgressé l’idéologie de cette époque en dénonçant avec indignation
les valeurs d’une société conservatrice et sclérosante. Jean-Charles
Harvey fera scandale en 1934 avec Les Demi-civilisés qui sera censuré
par le clergé. Parce qu’il attaque la puissance de l’église qui retarde le
développement intellectuel du peuple canadien français, Harvey sera
considéré comme le grand-père de la Révolution tranquille, en 1960.
Félix-Antoine Savard dont le roman Menaud, maître-draveur (1937)
a une dimension prophétique et que l’on considère comme le roman
d’une possible indépendance ou celui d’une mort annoncée.
C) Inquiétudes pour une nation
La société canadienne française vit sous l’effet de tensions diverses.
Pour survivre, le Canadien français a le choix entre trois options :
défricher (La Terre paternelle), rejoindre la ville (Bonheur d’occasion)
ou émigrer aux États-Unis (Nord-Sud ou Le Survenant). Quel sera le
destin national? Quelle solution porter à ce mal-être collectif?
Plusieurs historiens ou penseurs constatent la pauvreté de la culture du
peuple et l’appauvrissement sensible de la langue française. L’aspect
économique n’est pas meilleur. La suivie de la nation est en danger.
Dans un élan patriotique, des historiens tel Lionel Groulx tenteront de
réveiller la fierté nationale. L’Appel de la race en 1922 et l’Histoire du
Canada français font de l’abbé Groulx un maître à penser.
Français langue première
241
40S : Littératures francophones
Le réel et l’au-delà du réel, l’automatisme
Contexte
historique
Entre les deux guerres, la société canadienne française du Québec
commence une mutation qui va en s’accentuant après la Deuxième
Guerre mondiale. Le Québec se refait alors une image, grâce à la
prospérité acquise à l’occasion de ces événements. De 1948 à 1975
vont s’opérer, dans cette société des changements profonds.
Anticommuniste et anti-syndicaliste, le gouvernement de l’Union
nationale, dirigé par Maurice Duplessis et appuyé par le clergé, censure
de façon arbitraire la libre expression. Supplantée pendant six ans par
le Parti libéral (qui accordera le droit syndical, le droit de vote aux
femmes - en 1940 - ainsi que l’école obligatoire jusqu’à quatorze ans,
et créera la société Hydro-Québec), l’Union national reparaît en 1944,
avec Duplessis à sa tête. Toujours soutenu par l’église et le monde
rural, son régime conservateur et nationaliste freine la modernisation
des institutions. L’église conserve le contrôle de l’éducation (réservé
presque exclusivement aux hommes), de la santé et des services
sociaux. Duplessis s’applique à assurer l’autonomie du Québec par
rapport au gouvernement fédéral. En 1948, il fait adopter le drapeau
québécois. Malgré l’attachement aux valeurs du passé, l’économie de la
province se développe rapidement et le revenu du citoyen triple en
vingt ans. Toutefois, les francophones n’ont que rarement accès à la
direction de leurs institutions. Cet état de fait, ainsi que le nouveau
prolétariat animé par le syndicalisme, entraînent un mécontentement
général dès 1940. À travers un manifeste, Le Refus global, les
intellectuels critiquent le gouvernement, l’influence de l’église et
dénoncent « la grande noirceur » de l’ère Duplessis qu’ils jugent stérile
et stagnante.
La littérature
Les changements profonds de la société sont effectués sans transition.
Le passage soudain de la campagne à la ville crée de nombreux
malaises. Les nouveaux citadins perdent leurs points de repère; ils sont
lâchés dans les grandes villes où électrification, radio puis télévision
contribuent à une mutation des mentalités.
Plusieurs revues se prononcent fermement contre le contexte politique
et social. Des peintres, tel Borduas influencé par la littérature
surréaliste française, suivent dans les traces de l’expressionnisme
abstrait. La littérature française perce et influence aussi les écrivains du
Québec : le personnalisme de Mounier, le catholicisme de Péguy,
Bernanos, Mauriac puis l’existentialisme de Sartre et Camus. Mais c’est
surtout le surréalisme de Breton (Manifeste du surréalisme, 1924)
défini comme « la victoire du merveilleux sur le monde réel », qui
provoque un emballement extrême. C’est avec la parution du Refus
global que ce courant surréaliste, appelé l’automatisme au Québec, va
atteindre son sommet.
242
Français langue première
40S : Littératures francophones
À travers ce courant, le Québec remet en question ses valeurs
passéistes : famille et religion. La recherche des valeurs du terroir
laisse la place à la recherche de l’espace intérieur, du moi profond et
divers. Les thèmes ont changé. Le roman de la terre cède le pas au
roman de la ville. La littérature du Québec est en train d’éclore. Le
terrain est propice à l’avènement de la Révolution tranquille.
A) Roman de la ville, roman de mœurs
Deux écrivains vont exceller à faire ressortir les états d’âme du
nouveau citadin, du paysan exilé dans la ville. Gabrielle Roy et Roger
Lemelin vont dépeindre, avec réalisme, le désarroi physique et moral
des transplantés, qui ont tenté en vain de recréer, en ville, leur paroisse
rurale. Tous les deux, ils auront réussi à démontrer le fossé qui sépare
les nantis de l’ouest de la ville des défavorisés de l’est. Dans Bonheur
d’occasion (1945) chez elle et Les Plouffes (1948) chez lui, on ressent
vivement les conflits du francophone, tel un immigrant dans son propre
pays, dominé de surcroît par l’étranger riche et parlant une autre
langue. Yves Thériault sera le premier écrivain à mettre les autres
minorités en scène. Avec Aaron (1954), il brosse un tableau sombre
des Juifs orthodoxes de Montréal. Agaguk en 1958 décrit la vie
perturbée des Inuits à l’arrivée des Blancs tandis qu’Ashini dépeint en
1960 la détresse des Amérindiens écartés par les colonisateurs.
Écrasée par les valeurs étrangères d’autres peuples, chacune de ces
minorités s’apparente fortement à la société canadienne française.
La littérature
face à la réalité
B) Le théâtre
Désapprouvé depuis 1694, le théâtre se remet en scène. En 1948, TitCoq de Gratien Gélinas est la première des pièces québécoises.
Contestataire et réaliste, Gélinas dépeint, en utilisant langue populaire
et anglicismes, le prolétariat urbain et la famille québécoise. Les
auteurs de ce théâtre dénoncent l’artifice des neutralités religieuses et
morales où l’être humain ne se retrouve pas toujours. Marcel Dubé
écrit Zone (1953) et Un simple soldat (1957). Dans ces pièces
symboliques, on assiste, entre autres recherches, à la quête
désespérée de l’amour.
C) Roman psychologique
Après la description de la vie sociale et des mœurs des ruraux en ville,
la littérature se tourne vers la vie intérieure et ses tourments. Le héros
du roman, c’est l’être nouveau, déchiré entre différentes tensions :
celles de la famille et de la religion avec leurs interdits et celles que la
vie moderne urbaine lui fait découvrir. Le héros prend conscience que
les certitudes qui, de toujours, ont régi sa vie, s’écroulent. La peur de
la faute, de sa sexualité, du jugement de l’autre, a laissé ses
empreintes. Et c’est la révolte. On assiste alors à l’expression d’un
désarroi intérieur, d’un malaise social, où le héros, exilé dans sa propre
solitude, rejette toutes ses anciennes valeurs, bien qu’il lui soit difficile
Français langue première
243
40S : Littératures francophones
extraire complètement. Cette crise existentielle, ce vide intérieur font
du héros du roman de l’intériorité un être qui prend conscience de sa
solitude originelle.
On retrouve ici l’esprit du courant existentialiste (Sartre et Camus) qui
affirme que « l’existence est absurde, sans raison, sans cause et sans
nécessité » (l’Être et le Néant, Jean-Paul Sartre). François Loranger
avec Mathieu (1949) remet en cause le rôle de la mère. Anne Hébert
avec Le torrent (1950) dénonce l’absolutisme accablant de la religion.
André Langevin avec Poussière sur la ville (1953) aborde la solitude
et le sens de la vie.
D) Le théâtre de l’absurde
En Europe le « nouveau théâtre » ou « théâtre d’avant-garde », avec
Beckett et Ionesco, bouscule les idées établies et pose un regard
satirique sur la société. La nouvelle vision du monde se veut le rejet de
la logique, du réalisme et de la psychologie : Jacques Languirand, les
Grands Départs (1957).
L’automatisme
et la surréalité
Progressivement, l’écrivain se libère du carcan des valeurs périmées. Il
n’est plus l’esclave de la raison, qui faisait de lui un être soumis. Il
prend la tête d’un nouvel esprit, mû par l’intuition, où l’acte créateur va
révéler la nature profonde de l’humain. Exprimé d’abord par la peinture
(Borduas, Leduc, Riopelle), ce courant « surrationnel » déborde en
littérature. On le nomme « automatisme ». Parallèlement à son frère
français le « surréalisme », l’automatisme, c’est la pratique qui, laissant
libre cours au rêve, au hasard et souvent à l’humour noir, utilise toute
pensée et tout geste spontanés, libérés du rationnel. L’écrivain se veut
au service de l’émotion, l’imagination, l’impulsion créatrice.
A) La poésie
C’est le poète surtout qui innove. À l’aide d’associations libres, de jeux
de fantaisies diverses, le poète est plus à la recherche de la sonorité
des mots que de leur sens réel. La réalité perd sa place au profit d’une
liberté nouvelle où l’homme nouveau trouve son compte. Tout éclate de
l’académisme contraignant pour donner naissance à la surréalité et
l’authenticité que seuls les mots libérés peuvent permettre.
Outre le Refus global (1948), signalons Gilles Hénault (Totem, 1953
et Sémaphore, 1962) et Roland Giguère (l’Âge de la parole, 1965),
peintre et poète, qui dénonce, par la force des mots et des images,
l’oppression politique d’une époque; Claude Gauvreau (Œuvres
créatrices complètes, 1977), découvre l’expression « l’image
exploréenne ».
244
Français langue première
40S : Littératures francophones
B) Théâtre
Ce domaine, lui aussi, veut réveiller l’imaginaire et se lancer dans la
création à l’état pur. Liberté des mots, du langage, de la forme. Son
message? Le rejet des idées rétrogrades, de la censure et de
l’oppression de toute sorte. Les masques tombent (Claude Gauvreau,
Œuvres créatrices complètes).
C) Le manifeste du Refus global
Signé en 1948 par plusieurs auteurs, peintres et écrivains, ce texte
tente de réveiller la conscience collective soumise à trop de contraintes
diverses. C’est un appel à la révolte, dans l’espoir de faire basculer les
valeurs désuètes de la société afin d’accéder à une révolution culturelle.
Le Refus global portera fruit dans le courant suivant.
Français langue première
245
40S : Littératures francophones
Maîtres chez nous : la Révolution tranquille
À partir de 1960, « c’est le temps que ça change ». Avec les Libéraux
Contexte
et Jean Lesage, la « Révolution tranquille » va permettre au Québec
historique :
de devenir ce qu’il est; le Québec flotte alors au vent du
émergence d’un moderne
nationalisme. Plusieurs partis pour l’indépendance se rallient pour
Québec moderne - donner le Parti Québécois qui prend le pouvoir en 1976, avec succès
mais non sans accroc (Crise d’octobre en 1970, assassinat de Pierre
Vers
l’indépendance Laporte). On assiste alors à l’avènement de l’État providence qui prend
la relève du clergé et des communautés religieuses pour la santé et
l’éducation. L’État vise aussi au développement économique des
francophones, se lance dans l’exploitation gigantesque des ressources
naturelles et crée diverses sociétés d’état.
Art et culture
La Révolution
tranquille
Dénatalité et assimilation mettent en péril la langue française. Après la
création du Ministère des affaires culturelles, le Parti libéral fait du
français la première langue du Québec. Un nouveau sentiment
d’identité québécoise voit le jour. Financées directement par l’État, les
institutions culturelles connaissent alors une vitalité étonnante, dans un
esprit nouveau de nationalisme. Le Québec décide de sortir du silence
et de prendre son destin en main.
La société québécoise traverse alors une période de bouleversements
extrêmes. Les valeurs séculaires, familiales, politiques et religieuses
s’écroulent. La peur fait place à l’audace et la confiance, le repli sur soi
à l’ouverture aux autres. Règne alors un sentiment national de liberté
individuelle et collective. Le Québec veut s’affranchir du statut de
peuple colonisé, qui l’a opprimé pendant deux siècles, pour devenir
libre et autosuffisant, à l’intérieur d’un espace géographique qui lui est
propre. Le vocable de « Canadien français », marginalisant en soi, fait
place au terme « Québécois ». Une nouvelle conscience de soi apparaît.
Avec le Parti libéral, les foules clament que « c’est l’temps qu’ça
change », parce qu’ « on est capable ». Le mot d’ordre du jour :
« Maître chez nous! »
Bien vite, artistes et écrivains s’emparent de cette pensée
révolutionnaire. Littérature, chanson, cinéma, théâtre, télévision
entrent dans le vent de renouvellement des valeurs ancestrales
sclérosantes. La libération religieuse et morale suit et l’on assiste à la
naissance d’un pluralisme de pensée. Le clergé abandonne tous ses
pouvoirs non religieux et l’État se met à l’heure de la réalité urbaine et
industrielle. Ce vaste mouvement de remise en cause des institutions
et des valeurs dans un esprit de modernisation, confirme le désir
246
Français langue première
40S : Littératures francophones
profond d’indépendance et d’affirmation du peuple québécois. C’est la
période qu’on appelle la Révolution tranquille.
De 1960 au référendum de 1980, la question nationale est au cœur de
tous les projets. Très sensibilisés, les écrivains utilisent leurs écrits pour
éveiller la conscience québécoise et la diriger vers son avenir. Leur
engagement va les conduire à un rôle social et politique dont le but est
d’inscrire le Québec dans l’histoire, tel que le ferait un peuple
souverain. Intimement liées, littérature et politique procèdent à la fiche
d’identité du Québécois, nécessaire à la constitution de son pays. Dans
l’imaginaire collectif, on célèbre déjà le pays à naître. Une vision
nouvelle est en train d’apparaître : celle de soi, celle du monde.
La littérature
A) La poésie recherche l’identité : « l’Âge de la parole »
Le poète dénonce la réalité québécoise : manque d’audace, crainte due
aux dominations diverses, carences, contradictions culturelles allant
jusqu’à la perte de la parole et de l’identité. Il accuse les conditions de
vie de ce peuple colonisé, responsables de la coupure d’avec soi-même
et prône un retour urgent à la ré-identification personnelle et collective.
Mais l’identité personnelle doit passer, d’abord et avant tout, par
l’identité du pays. C’est à travers le pays que les aspirations
personnelles et collectives pourront être satisfaites.
En 1953, la maison d’édition l’Hexagone regroupe les écrivains qui se
donnent pour mandat la cause nationale. Leurs thèmes de bataille :
fraternité, solidarité, appartenance et espérance, sans oublier la femme
et l’amour, le tout sur fond de pays et de liberté. Le Québec accède
enfin à l’« Âge de la parole ».
En 1976, l’influence sociale de ces poètes permet au Parti québécois de
prendre le pouvoir, s’engageant ainsi à combler les attentes du pays à
venir. Gaston Miron chante l’être, la vie et l’aliénation de l’homme; il
tente d’examiner le pays possible dans l’imaginaire québécois,
(L’Homme rapaillé, 1970). Roland Giguère représente la conscience
sociale et décrit sa révolte (L’Âge de la parole, 1965). Les poèmes de
Jacques Brault évoluent entre violence et tendresse, colère et
réconciliation, lyrisme et mémoire (Mémoire, 1965).
En 1963, les militants de gauche s’associent autour de la revue Parti
pris dans un esprit de démocratisation et d’égalité. Avec Paul
Chamberland (L’Afficheur hurle, 1964) et Gérald Godin, les
membres de Parti pris gratifiés d’une force conscience sociopolitique,
dénonçaient les défaites historiques et les conditions de vie
subséquentes qui ont interdit au vaincu de vivre debout, mais sous la
tutelle d’un autre qui a lui-même défini sa propre identité. Affrontons
la réalité d’aujourd’hui, assumons le présent! Dans un texte parallèle,
L’Aube transparente d’un jour nouveau, le Sénégalais Léopold Sédar
Français langue première
247
40S : Littératures francophones
Senghor dénonçait les méfaits de la colonisation de l’Afrique par les
puissances d’Europe.
B) Le roman se révolte
Après le constat de l’aliénation sociale et culturelle des romans
précédents, les romanciers passent à un esprit de combat, fulminant
contre les conditions responsables de l’incertitude identitaire,
individuelle et collective. Ils ouvrent le débat sur une vision du monde
différente, mettant l’accent sur l’individu qui remplace la famille ou la
paroisse. À travers ces « romans-poèmes » ou ces « romanssymboles », on part à la recherche de résolution de problèmes
individuels. Souvent déconcertants, ces romans à la forme éclatée sont
à l’image de la confusion identitaire québécoise.
Les procédés techniques, le style et la langue habituels sont dévolus.
L’histoire linéaire n’apparaît plus et la trame à rebonds traduit le trouble
intérieur de l’individu et de la société. La langue employée est la langue
populaire, le joual, démontrant ainsi la dépression totale de l’être, y
compris au niveau de sa parole et de sa grammaire. Les thèmes
privilégiés sont ceux de la révolte : haine et violence. Le personnage le
plus riche, c’est l’adolescent qui étouffe et conteste tout ce qui
l’empêche d’être indépendant, la famille ne faisant pas exception. Le
clergé est remis à sa place et on le tient responsable de la honte
ressentie face à son propre corps. L’érotisme est le fruit de cette
libération, qui n’atteint pas encore à la liberté. Quant à la ville, elle est
comparée à un enfer. Signalons Jacques Ferron (Contes du pays
incertain, Le Paysagiste, 1962), Gérard Bessette (Le Libraire, 1960),
Réjean Ducharme (L’Avalée des avalés, 1966), Marie-Claire Blais
(Une saison dans la vie d’Emmanuel, 1965).
C) Le théâtre argumente
Moyen de contestation par excellence, le théâtre connaît un
développement particulier. Bien sûr, lui aussi remet en question les
fondements de la société et, plus précisément, ceux de la famille qu’il
décrit comme « l’entrave » à l’épanouissement collectif. Le rôle du
dramaturge est alors de démasquer tous les abus de pouvoir, les
dépendances imposées, et de partir en guerre contre les résignations
héréditaires transmises d’une génération à l’autre. Parfois, les deux
options politiques se partagent la scène : les tenants d’un pays à naître
et ceux d’un pouvoir fédéral fort. Signalons Françoise Loranger
(Double jeu, 1969), Jean-Claude Germain (Un pays dont la devise
est je m’oublie, 1976).
D) L’essai invite au changement
L’essai, dans le contexte de remise en question du peuple québécois,
est en plein essor. Genre littéraire propice à décrire l’esprit d’une
248
Français langue première
40S : Littératures francophones
société, il se lance vers la libre expression du pluralisme des idées et
invite les lecteurs à prendre position. L’essayiste, qui s’interroge sur la
réalité historique, politique, sociale et intellectuelle des Québécois, est
à la recherche de l’identité d’un peuple qu’il pousse à reprendre une
évolution
arrêtée
dans
le
temps.
Signalons
Jean-Paul
Desbiens/Frère Untel (Les insolences du Frère Untel, 1960), Pierre
Vallières (Nègres blancs d’Amérique, 1968), Pierre Vadeboncoeur
(La Dernière heure et la Première, 1970).
E) La chanson chante le pays
À la fin des années 50, la chanson explose. Elle devient le moyen
privilégié de la jeunesse pour exprimer son espoir, ses joies, ses rêves,
ses angoisses. Ce lyrisme en musique séduit la société et les boîtes à
chansons foisonnent. Avec la chanson, naît la conviction d’une identité,
d’une culture qui devient propre au peuple québécois. La chanson, qui
rallie le peuple, est essentiellement nationaliste. Tel un outil de
réappropriation de son pays, que le Québécois veut reconquérir, la
chanson devient un moyen sympathique et puissant de libération
nationale.
Les thèmes, nombreux, vont de l’angoisse existentielle à l’amour, en
passant par les îles exotiques. Mais c’est le thème de l’appel du pays à
naître, celui auquel on appartient, qui revient toujours. La chanson
québécoise garde donc son public toujours proche de la chose politique.
Signalons Félix Leclerc, chef de file des chansonniers québécois (Le
tour de l’île), Gilles Vigneault (Mon pays), Raymond Lévesque
(Quand les hommes vivront d’amour), Claude Léveillée (Les
Patriotes) et Claude Gauthier (Le plus beau voyage).
Français langue première
249
40S : Littératures francophones
Où la littérature fait fi du passé
Contexte
historique
La période de 1960 à 1980 porte la marque de profonds
bouleversements dans la société québécoise. L’Église a perdu son
autorité, les églises se vident, les vocations religieuses sont en perte de
vitesse. Les valeurs sociales subissent, de ce fait, de sérieux
changements : unions libres, divorces, familles monoparentales,
diminution de la pratique religieuse. Un des résultats tangibles et
inquiétants de cette société en mutation, c’est la baisse notable de la
natalité et le vieillissement de la population.
Dans cette société sécularisée, un autre mouvement de fond se
précise : l’arrivée des femmes sur le marché du travail et l’ascension
du féminisme qui, malgré tout, confère encore à la femme un statut
précaire (travail mal rémunéré, emplois subalternes, violence, pensions
alimentaires insuffisantes...)
Malgré les signes extérieurs de réussite et de reconnaissance,
(Exposition universelle de 1967, Jeux Olympiques de 1976, accession
du Parti Québécois au pouvoir en novembre 1976), des perturbations
sociales démasquent la fragilité de la nouvelle société : contestation
étudiante en 1968, crise d’Octobre 1970 et Front de Libération du
Québec qui amènent l’armée canadienne à occuper le Québec. Des
grèves intersyndicales des secteurs publics, le taux de chômage élevé
et la hausse des prix sont parmi les événements qui dénotent un
malaise de fond de la société québécoise. Mais, en 1980, c’est avec le
non au référendum que le Québec subit sa pire défaite. L’heure est à
l’abattement et au désengagement. Ayant rejeté valeurs et structures
par-dessus les clôtures, le Québec continue à perdre ses points de
repère mais s’entête, dans un esprit de transgression irrévocable, à
renier tout ce qui l’entrave dans sa progression vers l’avenir. Ce rejet
de toutes les barrières, à travers lequel le Québec entend s’engager
dans la voie de la modernité, cette liberté totale et à tout prix,
s’inscrivent dans un mouvement général de contre-culture. Cette
contre-culture, qui vient des États-Unis, influence profondément la
jeunesse québécoise qui remet tout en question, en particulier la
société de consommation qui ne lui apporte que le vide à l’âme. D’où
le succès foudroyant du mouvement hippie dont les valeurs marginales,
séduisantes, chantées par Bob Dylan, Jimmy Hendrix, Jack Kerouac et
autres contestataires, seront très vite adoptées par une jeunesse en
plein désarroi. Cette société de rêve, basée sur la non-violence et
l’amour, se déploiera dans le rock, le sexe, l’alcool et la drogue, afin de
s’éloigner d’un quotidien maussade et de s’ouvrir à un monde
merveilleux, plein de promesses...
La littérature
250
L’idéologie sociopolitique et la fuite du pays sont alors ravalées au rang
des autres valeurs. La littérature revient à des enjeux plus esthétiques.
On en revient au pouvoir de la langue et l’écrivain s’engage maintenant
dans son texte, à travers lequel il va vivre différentes sortes
d’expérimentations et de transgressions.
Français langue première
40S : Littératures francophones
En littérature, les règles canoniques tombent l’une après l’autre. Ce qui
importe, c’est de rompre avec la culture des générations précédentes,
d’écrire au présent pour le présent, afin de s’éclater et d’y découvrir,
par de nouveaux moyens d’accès, les facettes les plus enfouies de son
âme. C’est la recherche de l’inédit, défiant toute censure.
Culture et
contre-culture.
La modernité
Les écrivains de cette époque s’ouvrent à divers courants de pensée,
extérieurs au Québec : les théories linguistiques, psychanalytiques,
marxistes, structuralistes et l’écriture avant-gardiste. Du fond à la
forme, la littérature se renouvelle. Elle devient, elle-même, un univers
de signes qu’il faut apprendre à décoder. On parle alors d’une
« esthétique de la rupture et de la transgression, » où la valeur de
l’œuvre réside dans l’inédit, au mépris de toutes les règles
traditionnelles.
Un des nouveaux territoires à conquérir et exploiter est celui de la
femme, illustre opprimée de l’histoire. La femme éprouve l’urgent
besoin de se libérer de l’homme et des injustices millénaires. La
femme, qui se découvre sexuée, va le dire, va le crier. La révolution des
corps passe par la plume. La langue s’écrit désormais au féminin et
l’écrivaine renouvelle son rapport à l’écriture.
Littérature
au féminin
A) La poésie se questionne
À travers les Nuits de la poésie et les diverses représentations de
« Poèmes et chants de la résistance » de 1968 à 1973, la poésie
renoue avec un public qui l’accueille avec ferveur. Cette poésie de
l’après-Révolution tranquille est le miroir d’une société qui, déchirée
entre son rêve d’authenticité et sa réalité matérialiste, s’interroge.
Les poètes de la contre-culture, toujours à la recherche d’un bonheur
fuyant, sont mus par un désir extrême de changement. Dans une
langue spontanée qui cherche à provoquer, ils espèrent la restauration
de leur société. Les titres eux-mêmes sont révélateurs de cet esprit :
« Le clitoris de la fée des étoiles », « Lesbiennes d’acide ». Thèmes
privilégiés : désir sexuel et plaisir textuel sur la linguistique.
Sur les valeurs
Le poème devient désarticulé, fragmenté, souvent en prose; sa syntaxe
éclatée, jointe aux parenthèses, tirets ou blancs et à la fusion de
différents discours, est la manifestation d’une exploration sauvage qui
déroute le lecteur. La forme devient l’objet de la recherche en soi.
L’égarement de la syntaxe est à l’image de celui des mentalités.
Certains poètes mettent en exergue les valeurs marxistes, d’autres
celles de la libération de l’être, d’autres encore prônent une démarche
féministe. On pratique l’intertextualité, la fusion des genres et on laisse
libre-cours à la trivialité des mots pour traduire les pulsions
irrationnelles et la richesse du désir du corps, enfin révélé. Signalons
Denis Vanier (Hôtel Putama, 1991), Josée Yvon (Filles-commandos
Français langue première
Sur l’idéologie
251
40S : Littératures francophones
bandées, 1976), Claude Beausoleil (Motilité, 1975) et Madeleine
Gagnon (Autre, 1978).
B) Le roman se modernise
Le roman, lui aussi, enfreint les codes habituels et se démarque de ses
ancêtres, à travers une rupture complète d’avec les règles canoniques
traditionnelles. L’écriture devient une aventure en soi, prenant la place
de l’intrigue des romans d’autrefois. La syntaxe libérée de ses règles
habituelles, la ponctuation débridée et les tons superposés dans un
même texte laissent le lecteur déconcerté, traduisant ainsi un esprit qui
se veut « moderne » mais qui dénote le vide du temps présent. Diffuse
et confuse, l’intrigue n’est plus linéaire et le sens en est dispersé, au
gré des mots. On y trouve une hétérogénéité des styles, des tons, des
époques et des genres narratifs. La narration en « Je » multiformes
peut donner voix à plusieurs personnages et plusieurs visions du
monde, imbriqués dans le temps et dans l’espace. La forme du roman
peut être celle d’un journal intime, d’une littérature épistolaire, d’un
conte, d’un poème ou d’un ensemble de ces genres. L’intextualité
permet des apartés et le roman peut alors se faire biographie ou
critique littéraire. On est aussi témoin d’un retour en force du
fantastique, du roman policier et des débuts de la science-fiction
québécoise. Quant à la langue, c’est celle de l’oralité. On écrit comme
on parle, et on parle comme tout le monde. Mots du terroir et
anglicismes sont la marque de ces romans impertinents et désinvoltes.
Le thème n’en est plus le passé ou le pays. L’écrivain de cette époque
présente la vision personnelle se son pays propre, vision qui réside
dans sa propre écriture et d’où le lecteur va devoir dégager la sienne.
Ces romans sont généralement tristes et désespérés. Signalons
Yolande Villemaire (La vie en prose, 1980), Madeleine
Ouellette-Michalska (La Maison Trestler, 1984), Michel Tremblay
(Thérèse et Pierrette à l’école des Saints-Anges, 1980) et Victor-Lévy
Beaulieu (Monsieur Melville, 1978).
C) Le théâtre s’écarte de sa voie
Le théâtre se redéfinit et fait peau neuve. Les frontières entre auteur
et acteurs, acteurs et spectateurs, disparaissent. L’homme de théâtre
extrait le spectateur de ses attentes conformistes habituelles. Totale
liberté d’expression et langage populaire inédit et spontané, farfelu et
ridicule, tout est mis au service d’un genre qui veut libérer la femme et
les couches prolétaires et marginales.
252
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le jeune théâtre des années 70 expérimente, improvise, innove dans
des créations collectives, dans le but de réveiller le spectateur et de
conscientiser les jeunes travailleurs. Le dialogue cède le pas au
monologue qui dénonce la solitude de tout un chacun et les difficultés
de communication. Signalons Michel Tremblay (Les Belles-sœurs,
1968), Antonine Maillet (La Sagouine, 1972) et Denise Boucher
(Les Fées ont soif, 1978).
D)
L’essai change de style
L’essayiste abandonne son rôle d’observateur et de dénonciateur de la
réalité coupable. Sa réflexion n’a plus teneur d’idéologie. Le regard
devient subjectif et se porte à l’intérieur de soi. De nombreuses
femmes font ainsi état de leurs revendications et interrogations. Ainsi,
Nicole Brossard (La Nouvelle Barre du jour, 1980) et Suzanne Lamy
(D’Elles, 1979).
E) La chanson se fait entendre
La chanson devient prétexte à la solidarité collective. De nombreux
groupes se forment et l’on innove le rock en français. La chanson
féminine connaît ses heures de gloire. Les monologuistes apparaissent,
tels qu’Yvon Deschamps, qui viennent dire leurs blessures, leur mal
de vivre, et auxquels le public s’identifie, s’y attachant comme à une
thérapie. Robert Charlebois (Qué-Can Blues, 1974), Plume
Latraverse, Clémence Desrochers, Louise Forestier, Raoul
Duguay, etc.
Deuxième génération (1983) du chanteur français Renaud qui y
dénonce les préjugés et les injustices réservés aux immigrés.
Français langue première
Texte parallèle
253
40S : Littératures francophones
L’individualisme, héritage de la contre-culture
Contexte
historique
À partir des années 1980, la fin du XXe siècle est marquée par
l’uniformité de la culture et l’extinction des particularismes. Les effets
escomptés de la Révolution tranquille de 1960 n’atteignent pas la
nouvelle génération. Sous le poids des difficultés financières, l’État
providence s’essouffle. Vieillissement de la population, gratuité des
services, régimes de pension, crise des soins de santé, crise de
l’enseignement, taux de chômage élevé, coûts supplémentaires de
l’assistance sociale... autant de points de litige qui font de la nouvelle
réalité sociale une source permanente et croissante d’angoisse. La
Révolution tranquille est déjà loin.
L’ordre social est remis en question. La société québécoise connaît de
profondes mutations et ne se reconnaît plus. Les valeurs du passé
ayant été balayées, il faut les remplacer par des valeurs
contemporaines. L’ère de la technologie va s’en charger. Ce village
global remplace la paroisse, le pays et la planète. Oubliés les
nationalisme, marxisme et moralisme. Le dieu d’aujourd’hui, c’est le
dieu-économique qui utilise savamment le vide existentiel, dû à la
désillusion de la société de consommation à outrance.
L’unité familiale et sociale est dégradée. L’être humain a de plus en plus
de mal à orienter son destin. Il fuit, victime consentante de la publicité,
dans un hédonisme où la sexualité occupe une part privilégiée. L’être
et l’avoir sont confondus dans un temps où le fantasme du confort et
des plaisirs faciles fait illusion.
Des idéologies optimistes qui sous-tendaient les générations
précédentes, rien ne subsiste. De plus, dans ce climat de désarroi,
s’ajoute la crise de l’autorité : parentale, politique, religieuse. On
choisit de faire cavalier seul. L’ère de l’individualisme émerge
lentement.
Dans cet esprit nouveau, corps et sexualité tiennent une place de
choix. Pour être, on doit paraître, l’image se met au service du corps.
Le culte de l’apparence remplace le vide psychologique et l’identité
nouvelle réside au niveau du corps, vu comme objet de désir.
La littérature
254
L’affirmation du « Je » confirme l’accession à l’individualisme, héritage
de la contre-culture. Une ère nouvelle s’ouvre sur l’ego, l’intime, et
cette vision intériorisée de soi et du présent, où chacun se doit, pour
survivre, de trouver SA vérité, se reflète dans la littérature. À la suite
de l’écriture féministe du courant précédent, ressurgit l’esprit de
Socrate « Connais-toi toi-même » et celui de Montaigne qui écrit « Je
suis moi-même la matière de mon livre. » Cette vision de soi et du
présent, parce que lucide, est souvent sombre. La ville est devenue le
lieu avoué d’une nouvelle solitude psychologique et physique, mais
aussi celui de tous les espoirs. L’imaginaire urbain naît de cette époque,
fusionnant décor extérieur et intimité nouvelle.
Français langue première
40S : Littératures francophones
Les thèmes sont divers, passant par un retour vers le passé que l’on
réinvestit dans un vécu au quotidien. L’amour, plus particulièrement
sous la forme érotique, est exploité sous tous ses aspects. Tentant de
combler un mal de vivre nostalgique, l’érotisme est présenté comme le
nouvel art de vivre.
Le poète se place au centre de ses écrits, revenant à un imaginaire plus
intime. Si la société a perdu le sens de l’existence, le poète va découvrir
le sien. L’émotion retrouve sa place. Le lieu de la poésie, c’est l’intérieur
de l’être, lieu à sonder pour y déceler, à travers l’instant qui passe, le
bonheur possible. L’amour, l’enfance et la mort, qui menace jusque
dans l’amour, sont les thèmes privilégiés de ce nouvel exercice lyrique.
Signalons Fernand Ouellette (Les Heures, 1986), Michel Garneau
(La Plus Belle Île, 1988) et Marie Uguay (Autoportraits, 1982).
La poésie
Si le roman excelle à se faire le miroir de son époque, le résultat est
encore concluant en cette fin de siècle. Dans cette société dont la trame
n’intéresse plus, le héros est en quête de lui-même. Il s’agit plutôt d’un
anti-héros, être souvent marginal, sans racines et sans espoir,
désillusionné et résigné, indifférent ou presque. Jean-Yves Soucy a
dépeint ces êtres lucides mais fatalistes, qui se rejoignent à travers une
détresse commune qu’ils cherchent à noyer dans le sexe et l’alcool,
dans son roman Bof génération.
Le roman
Ces récits se situent à Montréal, lieu de toutes les tendresses et de tous
les désespoirs, où la solitude se dissimule facilement derrière les
plaisirs épidermiques, mais où l’être peut se perdre, loin de l’humain.
D’autres romanciers, donnant un espace culturel nouveau au roman
québécois, tentent de se trouver des racines nord-américaines et une
nouvelle identité. Certains romans enfin recourent aux discours
freudiens et à un recul vers le passé, pour mieux comprendre le
présent. Signalons Jacques Poulin (Volkswagen blues, 1984), Yves
Beauchemin (Le Matou, 1981), Robert Lalonde (Le Fou du père,
1988), Jacques Savoie (Les Portes tournantes, 1984), Monique
Proulx (Homme invisible à la fenêtre, 1993) et Arlette Cousture (Les
Filles de Caleb, 1985).
Le théâtre fait appel à différents moyens pour extraire le spectateur de
sa langueur et le faire vibrer à des émotions fortes. On assiste
maintenant à des spectacles solos où acteur et public sont en face à
face, l’acteur incarnant son propre vécu, d’ici et maintenant (Pol
Pelletier, Louisette Dussault). Le spectateur y retrouve sa propre
intimité, puisque le mal-être et l’espoir sont partagés également.
Le théâtre
Les préoccupations du « village global », celles des marginaux et des
amoureux en peine de rupture, se partagent la scène, tout comme
l’ennui des amours passagères. L’éclectisme caractérise cette époque
du théâtre où l’on retrouve cependant une base de difficulté des
communications, l’impuissance à vivre, la quête d’un sens à la vie,
Français langue première
255
40S : Littératures francophones
appartenant plus particulièrement aux enfants des « baby-boomers ».
Ces jeunes, à la fois cyniques, désabusés et désorientés, n’hésitent pas
à tout bousculer : autorité et société de consommation dont ils
profitent « au boutte » pour occulter la peur du vide qui les habite.
Signalons Gilles Maheu (Les Âmes mortes, 1990). Marie Laberge
(L’Homme gris, 1984), Normand Charrette (Fragments d’une lettre
d’adieu lus par des géologues, 1987).
L’essai
L’essayiste de cette époque individualise, lui aussi, la vision du réel.
Toute réflexion passe par la conscience intime et personnelle. À la suite
des essayistes féministes du courant précédent, celui d’aujourd’hui
renoue avec Montaigne qui, le premier, s’est placé au cœur de sa
réflexion. Ainsi, Gilles Archambault (Les plaisirs de la mélancolie,
1980) et Jean Larose (La Petite Noirceur, 1987).
La chanson
Explorant, elle aussi le « Je » sous toutes ses facettes, la chanson
devient plus lyrique. L’humoriste va supplanter le chanteur. Le rire
devient objet de consommation. Usant d’ironie et de dérision,
l’humoriste cherche à plaire en masquant le tragique dans le ludique.
Signalons Jean-Pierre Ferland, Sylvain Lelièvre, Paul Piché,
Richard Desjardins et Les Cow-boys fringants.
256
Français langue première
40S : Littératures francophones
Le Québec, société de la pluralité. Une
littérature de l’altérité
De longue date, le Québec a connu d’autres cultures sur son territoire.
Peuples autochtones, population originale de la colonie, Noirs dès le
début de la colonie, anglophones après la Conquête, Juifs dès 1760 et
Italiens à partir de 1860, etc. Dans les années 1970, l’immigration
change de visage et se diversifie : l’Amérique de Sud, l’Asie du Sud-Est,
les Antilles sont les grands pourvoyeurs de ces nouveaux immigrés qui,
concentrés surtout à Montréal, forment des îlots ethnolinguistiques qu’il
est impossible d’ignorer. La menace de la perte éventuelle de la langue
française se pose et le Québec ressent le besoin de franciser ces
nouveaux venus. En 1977, le français devient langue première et
l’affichage devient obligatoirement unilingue dans le but avoué de
préserver la langue du patrimoine. La loi 101, tout en assurant la
sécurité au niveau de l’enseignement des immigrés, fait du français le
lieu des convergences culturelles.
Contexte
historique
Aujourd’hui, le Québec, terre d’accueil, s’est engagé dans la voie du
multiculturalisme et les communautés culturelles diverses font partie
du projet de société. Pour ce faire, les Québécois auront dû traverser
leur peur de l’autre et reformuler les tenants de leur propre identité.
Dorénavant, la société québécoise doit compter avec son
hétérogénéité.
Cette ouverture sur le monde se fait aussi à d’autres niveaux :
exploration du Québec à l’étranger à travers les Maisons du Québec,
tourisme, projets internationaux divers, exportation des artistes d’ici,
évènements qui, après l’Exposition universelle de 1967 et les Jeux
Olympiques de 1976, placent le Québec à l’échelle planétaire, dès les
années 1980. Après le repli sur soi des années 1960, le nationalisme
étroit fait place au phénomène mondial d’internationalisation.
Le Québec a accepté, non sans peine, en accueillant les différences
ethniques, de devenir une société à multiples visages, faisant de cette
conscience cosmopolite l’enjeu de la fin du millénaire.
Les écrivains aussi ont intégré l’idée que, selon la formule d’Albert
Jacquart, « l’Autre nous est indispensable dans la mesure où il nous est
dissemblable ». La littérature devient le témoin d’une société en
mutation qui s’interroge sur son identité, prenant pour principe que la
vraie découverte de soi passe par celle de l’autre. « L’étranger est un
ami que tu ignores encore », ami dans la mesure où il va t’aider à te
révéler à toi-même.
La littérature
Ainsi, les frontières de l’imaginaire québécois éclatent. L’action investit
des territoires hors frontières, en particulier le territoire américain.
L’étranger prend de plus en plus place à l’intérieur de l’œuvre littéraire,
Français langue première
257
40S : Littératures francophones
ainsi que les groupes identitaires minoritaires : personnes âgées,
handicapés, communautés gays...
L’accueil de l’Autre, comme agent de régénération et d’enrichissement,
donne lieu à l’émergence d’une parole néo-québécoise. La littérature
québécoise est investie de tous ces apports d’ailleurs qui lui confèrent
une dimension toute contemporaine, la vision de ces écrivains nés hors
Québec étant nécessairement différente.
Les thèmes passent par l’exil, l’errance, les difficultés d’adaptation, la
marginalité, l’appartenance, et toujours la solitude et la souffrance.
Nourrie des expériences diverses de ces écrivains comme des plus
riches patrimoines culturels de l’humanité, la littérature québécoise
contemporaine, migrante et métissée, témoigne d’une vitalité
extraordinaire qui conditionne la société québécoise à entrer de plainpied dans le troisième millénaire.
La poésie
repousse les
frontières
Depuis plusieurs décennies, l’imaginaire poétique a emprunté à des
origines autres que les siennes propres (Alain Horie, Juan Garcia,
Fluvo Caccia, Antonio d’Alfonso, Marco Micone). À travers des
traductions d’œuvres anglaises ou de poètes italo-québécois, ces
auteurs ont su intégrer l’émotion commune dans une même poésie
québécoise. Cette sensibilité à la poésie de l’Autre, venue d’horizons les
plus larges, cet accueil de la différence ont été préparés par certains
poètes francophones qui, depuis quelques années, se sont ouverts au
brassage des cultures. Ainsi, Jacques Brault qui affirme la priorité de
la poésie sur la langue dans Poèmes des quatre côtés, Gérald Godin
(Lectures plurielles, 1991), Marco Micone (Speak what, 1989), AnneMarie Plouzo (Lectures plurielles, 1991).
Le roman
raconte
l’ailleurs
Après le renfermement sur soi des années 1960 et l’ouverture
américaine des années 1970, les années 1980 voient l’éclatement total
du roman. Frontières et thèmes ont éclaté. Quelques rares écrivains
avaient déjà ouvert la voie de l’ouverture : Gabrielle Roy, Yves
Thériault et Réjean Ducharme. Mais, dans les années 1980 et
suivantes, ce multiculturalisme littéraire devient fait accompli. Les
problèmes humains traités y sont les problèmes fondamentaux,
inhérents à la condition humaine : vie, mort, amour, haine, solitude,
difficulté à vivre, auxquels s’ajoutent les réalités des exilés : errance,
adaptation, deuil, attentes, rejet. Les romanciers antillais sont parmi
ceux dont la contribution au récit québécois est la plus riche. Ainsi
Émile Ollivier (Passages, 1991), Dany Laferrière (Comment faire
l’amour avec un nègre sans se fatiguer, 1985). Signalons aussi Ying
Chen (Les lettres chinoises, 1993) et Paul Zumthor (La Fête des fous,
1987).
Le théâtre
prend du recul
Ce genre littéraire semble délaissé par les écrivains néo-québécois.
Marco Micone paraît être le seul à ressortir de la douzaine des
dramaturges relevant du Centre des auteurs dramatiques. Le cinéma,
258
Français langue première
40S : Littératures francophones
par contre, attire davantage ces auteurs . Signalons Suzanne Lebeau
(Salvador, 1996), Marco Micone (Addolorata, 1983), Pan Bouyoucas
(Le Cerf-volant, 1990) et Abla Farhoud (Apatride, 1994).
Nombreux sont les essais qui se consacrent aux visages de l’Autre, à
son errance, à sa quête identitaire et aux rapports interculturels
régissant la nouvelle société québécoise. L’accent est mis sur la
différence qui, lorsque son intégration est parfaitement assumée,
enrichit, plutôt que sur l’assimilation qui appauvrit. Signalons Doris
Lussier (Lectures plurielles, 1991), Naïm Kattan (Le réel et le
théâtral, 1970), Gérald Etienne (La Question raciale et raciste dans le
roman québécois, 1995).
L’essai intègre
la différence
Domaine longtemps réservé aux hommes, nationaliste de préférence,
la chanson reste encore insensible aux artistes autres que québécois.
Mais progressivement une fenêtre s’ouvre dans ce domaine aussi, et
certains chanteurs, chansonniers ou monologuistes s’y taillent une place.
Et depuis les années 1990, on note un renouveau des boîtes à chanson.
Kashtin, Judy Richards, Pauline Julien (L’Étranger, 1972), Michel
Rivard (C’est un mur, 1987), Jim Corcoran (Je me tutoie, 1994).
La chanson
boude encore
Dans un texte parallèle, Les amandiers sont morts de leurs blessures
(1994), Tahar Ben Jelloun auteur marocain, décrit le rejet de
l’immigrant et sa solitude.
Texte parallèle
Français langue première
259
40S : Littératures francophones
Ressources d’apprentissage possibles
• Bouvier, L. et Roy, M. (1996). La littérature québécoise du XXe
siècle, Montréal, Guérin.
• Braën, C. et al. (1997). Littérature québécoise du XXe siècle,
introduction à la dissertation critique, Ville Mont-Royal, Décarie
Éditeur.
• Collection Langue et littérature au collégial (Éditions Études
vivantes) :
- L’essai québécois (2000);
- La poésie québécoise (2000);
- Le roman québécois (2000);
- Le théâtre québécois (2000).
• Collection Les essentiels (Mondia) :
- La littérature du terroir : une littérature identitaire (1994);
- Les romans québécois du XIXe siècle : le roman historique
et le roman d’aventures (1995);
- Réalisme et réalité dans la littérature québécoise (1994).
• Erman, M. (1992). Littérature canadienne-française
québécoise, anthologie critique, Laval, Groupe Beauchemin.
et
• Gauvin, L. et Miron, G. (1998). Écrivains contemporains du
Québec, anthologie, Montréal, Éditions de l’HEXAGONE/TYPO.
• Hamel, R. (dir.) (1997). Panorama de la littérature québécoise
contemporaine, Montréal, Guérin.
• Laurin, M. (2000, 2e éd.). Anthologie de la littérature québécoise,
Anjou, Les Éditions CEC (l’ouvrage est accompagné d’un
Complément pédagogique, 2e éd., 2000).
• Mailhot, L. (1997). La littérature québécoise depuis ses origines,
essai, Montréal, Éditions TYPO.
• Mailhot, L. et Nepveu, P. (1996). La poésie québécoise,
anthologie, Montréal, Éditions TYPO.
• Protocole de l’Ouest et du Nord canadiens (2004). Textes
choisis. Auteurs marquants de la littérature canadienne,
Edmonton, Alberta Learning (l’ouvrage est accompagné d’un
Guide d’enseignement disponible sur le site Web :
« h t t p : / / w w w . e d u c a t i o n . g o v. a b . c a / f r e n c h / f r a n c a i s /
anthologies/guide.pdf » [juillet 2005]).
• Trépanier, M. et Vaillancourt, C. (1997). Français, Ensemble 3,
Méthode de la dissertation critique et littérature québécoise,
Laval, Éditions Études Vivantes.
• Un site Web, qui présente, entre autres, « plus de 260 auteurs »:
« http://felix.cyberscol.qc.ca/lq/index.php » [juillet 2005].
• Weinman, H. et Chamberland, R. (1996). Littérature québécoise.
Des origines à nos jours. Textes et méthode, Ville LaSalle,
Hurtubise HMH (l’ouvrage est accompagné d’un Guide d’enseignement).
260
Français langue première
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