Les nerfs cluniaux inférieurs : anatomie et abord chirurgical

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UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL
MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE,
d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE
2005-2006
UNIVERSITE DE NANTES
Les nerfs cluniaux inférieurs : anatomie et abord chirurgical
Par
DARNIS Benjamin
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
•
•
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•
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Laboratoire :
Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Dr F. CAILLON
Pr. D. CROCHET
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Dr E. FRAMPAS
Dr A. HAMEL
Dr O. HAMEL
Pr. Y. HELOURY
Pr A. KERSAINT-GILLY
Dr M.D. LECLAIR
Pr. P.A. LEHUR
Pr. R. ROBERT
Pr. O. RODAT
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
1
UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL
MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE,
d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE
2005-2006
UNIVERSITE DE NANTES
Les nerfs cluniaux inférieurs : anatomie et abord chirurgical
Par
DARNIS Benjamin
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
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Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Dr F. CAILLON
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Dr. H. DESAL
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Dr E. FRAMPAS
Dr A. HAMEL
Dr O. HAMEL
Pr. Y. HELOURY
Pr A. KERSAINT-GILLY
Dr M.D. LECLAIR
Pr. P.A. LEHUR
Pr. R. ROBERT
Pr. O. RODAT
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
2
Remerciements
A nos maîtres les professeurs J LEBORGNE, JM ROGEZ, R ROBERT, O
ARMSTRONG et à l’ensemble des intervenants pour la qualité de leurs enseignements.
Un remerciement particulier au Professeur R. ROBERT pour m’avoir proposé ce
sujet intéressant, et pour m’avoir aidé tout au long de l’année.
A messieurs LAGIER et BLIN pour leurs conseils lors des dissections, pour leur
talent de photographes et pour la bonne humeur au laboratoire d’anatomie.
A l’ensemble de la promotion de ce master pour m’avoir accompagné toute
l’année.
3
SOMMAIRE
1- Introduction
2- Rappels anatomiques
3- Matériel et Méthodes
i.
Matériel
ii.
Méthode : description des dissections
4- Résultats
i.
Description anatomique des nerfs cluniaux inférieurs
1. Origine
2. Nombre et trajet
3. Rapports
ii.
Repères cutanés
iii.
Zones de conflit
iv.
Voies d’abord chirurgical
5- Discussion
6- Conclusion
7- Bibliographie
4
1- Introduction
La sensibilité cutanée de la région glutéale est assurée par plusieurs nerfs. Le
nerf pudendal interne innervant le périnée, le nerf cutané latéral innervant la partie
latérale de la fesse, les nerfs cluniaux supérieurs innervant la partie supérieure, et enfin
les nerfs cluniaux inférieurs responsables de l’innervation sensitive de la face
inférieure et médiale de la fesse.
Les nerfs cluniaux inférieurs forment un ensemble de nerfs, issus du nerf
cutané postérieur de la cuisse, et possédant des ramifications vers le périnée.
Ainsi, on comprend aisément qu’un traumatisme ou une compression de ces
nerfs, puisse être à l’origine de douleurs tant au niveau de la face inféromédiale de la
fesse, qu’au niveau périnéal, en particulier au niveau de la marge anale, du scrotum ou
des grandes lèvres.
Etudier l’anatomie de ces nerfs, leurs trajets, leurs rapports, et leurs variations
vont nous permettre de déduire le mécanisme de ces algies périnéoglutéales d’origine
cluniale inférieure, ainsi que les moyens de les aborder chirurgicalement.
5
2- Rappels anatomiques1,2,5
Gluteus
maximus
Ligament
sacro tuberal
Ischion
Semi
tendineux
Chef long
du biceps
femoral
Semi
membraneux
D’après F. NETTER
21- Gluteus maximus
Muscle postérieur de la région glutéale, s’insérant médialement du
sacrum et des crètes iliaques, et latéralement sur le grand trochanter et le fascia lata. Il
est extenseur, rotateur externe de la cuisse et stabilisateur du bassin en station debout.
Sa vascularisation s’effectue par les vaisseaux glutéaux (supérieurs et inférieurs) et son
innervation par le nerf glutéal inférieur.
22- Muscles ischiojambiers
Muscles extenseurs de la cuisse et fléchisseurs de la jambe, s’insérant
proximalement sur la tubérosité ischiatique. On distingue trois muscles : le semitendineux qui s’étend de la partie médiale de l’ischion à la face médiale du tibia ; le
chef long du biceps fémoral qui s’insére sur la partie latérale de la tubérosité
ischiatique et, distalement, sur la tête de la fibula, le condyle latéral du tibia et le
fascia crural ; plus profondément, le semi-membraneux, recouvert par les deux
muscles précédents, s’insère sur l’ischion et sur le condyle médial du tibia.
6
Artère glutéale
inférieure
Nerf sciatique
Nerf cutané
postérieur de
la cuisse
D’après F. NETTER
23- Vaisseaux glutéaux inférieurs
Artère et veine(s) à destinée du muscle gluteus maximus principalement
(mais aussi de l’articulation coxofémorale, des muscles jumeaux supérieur et inférieur,
de l’obturateur interne, du carré fémoral, du semi-membraneux et du long chef du
biceps fémoral). L’artère glutéale inférieure naît de l’artère iliaque interne, sort de la
cavité pelvienne par le canal infra-piriforme, et circule dans la région glutéale avec le
nerf sciatique et le nerf cutané postérieur de la cuisse. La ou les veine(s) glutéale(s)
inférieure(s) chemine(nt) avec l’artère
24- Nerf sciatique
Nerf mixte constitué des fibres de L4, L5, S1, S2 et S3. Long et
volumineux, il quitte le pelvis par le canal infra-piriforme, et circule dans la région
glutéale en avant du mucle gluteus maximus, entre la tubérosité ischiatique et le grand
trochanter.
7
3- Matériel et Méthodes
31- Matériel
Une pièce anatomique, prélevée chez un sujet frais de sexe masculin
sectionné au niveau de L5 et du milieu du fémur, conservée dans une solution
de formol.
Une pièce anatomique, prélevée chez un sujet frais de sexe féminin
sectionné au niveau de L5 et de l’articulation du genou, conservée dans une
solution de formol.
32- Méthodes
• Sujet numéro 1 fesse droite : dissection antérograde
Cette dissection a consisté à suivre le trajet des nerfs cluniaux
inférieurs de leur origine à leur extrémité.
Une incision verticale passant par le grand trochanter et rejoignant la
tranche de section supérieure a été effectuée, ce qui a permis de disséquer le
gluteus maximus avant de le désinserrer en partie au niveau du sacrum puis du
grand trochanter. Sous ce muscle, le nerf sciatique a été repéré, et en arrière de
celui-ci le nerf cutané postérieur de la cuisse et les éléments vasculaires
glutéaux inférieurs. Du nerf cutané postérieur, on a suivi les différentes
ramifications destinées à la région glutéale : les nerfs cluniaux inférieurs et un
rameau périnéal. Après repérage du niveau cutané du passage des principaux
nerfs cluniaux inférieurs sous le gluteus maximus (fig.12), le gluteus maximus,
a été retiré, puis les ramifications des nerfs cluniaux inférieurs disséquées, sans
respecter la vascularisation (fig.3 et 4).
• Sujet numéro 1 fesse gauche : dissection rétrograde
Sur ce sujet, une dissection plan par plan a été effectuée.
Après avoir incisé verticalement au niveau du gros trochanter de bas en
haut de la pièce anatomique, la peau a été retirée, tout en respectant
l’aponévrose des plans musculaires sous-jacents et les éléments nerveux
(fig.5). Une fois la face inférieure de la fesse et la partie supérieure de la cuisse
disséquées, l’aponévrose a été supprimée afin de mettre en évidence le plan
musculaire superficiel (fig.6). Ensuite, le gluteus maximus a été coupé en son
milieu, afin de suivre le trajet des nerfs cluniaux inférieurs sous celui-ci,
jusqu’à leur origine (fig.7 et 14).
8
• Sujet numéro 2 fesse droite : abord chirurgical
Ce nouveau sujet fut l’occasion d’effectuer un premier abord
chirurgical, puis de compléter le travail par une nouvelle dissection complète
de la région.
Une incision horizontale de 6cm de long à deux travers de doigt sous
l’ischion a été réalisée (fig. 15). On a ensuite cherché dans la graisse le passage
du rameau périnéal (fig.16). Une fois celui-ci retrouvé, il a été
progressivement suivi jusqu’à son origine. Pour cela il a fallu élargir l’incision
vers la droite. Puis, les différents éléments (fig.11 et 17), à la fois nerveux
(nerfs cluniaux inférieurs, nerf cutané postérieur de la cuisse) et vasculaires
(vaisseaux glutéaux inférieurs) ont été disséqués.
Quand les les nerfs cluniaux inférieurs ont été tous repérés , la peau des
fesses a été incisée en passant au niveau de l’ischion, puis on a disséqué les
différents muscles, coupé le gluteus maximus en son milieu afin de mettre en
évidence les nerfs cluniaux inférieurs, les éléments nerveux de la région
glutéale, ainsi que les éléments vasculaires que ce muscle recouvre (fig.2).
• Sujet numéro 2 fesse gauche : abords chirurgicaux
Sur le dernier sujet ont été réalisés trois abords chirurgicaux à
différents niveaux.
Le premier a suivi le même protocole que celui réalisé sur la fesse
droite (fig. 10, 13, 18 et 19). Le second a consisté en une incision horizontale
au niveau du pôle supérieur palpable de l’ischion, puis une incision a travers le
gluteus maximus afin de retrouver le passage des nerfs cluniaux inférieurs et
du nerf cutané postérieur de la cuisse à proximité de l’ischion. Enfin, le
troisième abord, transglutéal comme le second, a permis de repérer les
éléments vasculo-nerveux passant à proximité du ligament sacro-tubéral, après
incision horizontale à deux travers de doigt au dessus du niveau de palpation
de l’ischion (fig.20).
9
4- Résultats
41- Description anatomique
411- Origine
Les nerfs cluniaux inférieurs naissent du nerf cutané postérieur de la
cuisse, à quelques centimètres de son origine. Celui-ci est composé de fibres
provenant des racines sensitives S1 S2 et S3 (fig.1 et 2), et est situé en dedans
et en arrière du nerf sciatique. Les branches cluniales inférieures naissent sur le
bord médial et latéral du nerf cutané postérieur. On peut trouver des branches
très proximales s’individualisant à partir des racines sensitives, avant même la
formation du nerf cutané postérieur . Les branches les plus distales, quant à
elles, se séparent du nerf en regard du bord inférieur de l’ischion.
Fig.1 : variations de l’origine des nerfs cluniaux inférieurs
Nerf cutané postérieur de la cuisse
Branche cluniale inférieure
10
Fig.2 : fesse droite, vue postérieure ;
origine du nerf cutané postérieur, rapports proximaux
S1
S2
S3
ischion
Ligament
sacrotubéral
Pédicule
pudendal
interne
Nerf cutané
postérieur de la
cuisse disséqué et
écarté latéralement
Branche cluniale
médiale formant un
rameau périnéal
11
412- Nombre, trajet
Le nombre et le trajet des nerfs cluniaux inférieurs sont soumis à des
variations interindividuelles, et, chez un même sujet, à des variations entre les
deux cotés.
Généralement, on retrouve deux à trois principales branches3,4. Les
branches naissant sur le bord latéral du nerf cutané postérieur de la cuisse
(deux en moyenne), cheminent vers le bas, le long du nerf cutané postérieur et
des vaisseaux glutéaux inférieurs, dans un pédicule vasculonerveux situé dans
une zone de glissement graisseuse entre le gluteus maximus en arrière, le nerf
sciatique en avant, et l’ischion en dedans (fig.7). Elles se détachent
progressivement de ce pédicule pour rejoindre le bord inférieur du gluteus
maximus, qu’elles contournent afin de gagner la face postérieure du muscle.
Ce contournement s’effectue à un niveau variable sur le bord inférieur du
gluteus maximus (fig.3).
A cet endroit, elles perforent l’aponévrose du gluteus maximus, et
cheminent à l’intérieur de celle-ci, en se divisant. Les différentes branches
cluniales inférieures réparties sur la face postérieure du gluteus maximus,
rejoignent la peau de la région glutéale inférieure, en perforant l’aponévrose.
Elles se divisent encore en plus petites branches innervant toute la surface
cutanée (fig.5).
La branche naissant sur la face médiale du nerf cutané postérieur va être
commune à deux types de nerfs : des nerfs cluniaux inférieurs, et un rameau
périnéal. Après un bref trajet (quelques centimètres) dans le pédicule
vasculonerveux, cette branche (fig.4) va passer dans l’angle formé par le
gluteus maximus en haut, et l’insertion des muscles ischiojambiers sur
l’ischion en dedans, puis va globalement avoir un trajet horizontal, longeant le
bord inférieur de l’ischion et rejoignant le périnée. Dans cette portion
horizontale, ce nerf est situé dans une boutonnière plus ou moins définie, de
texture graisseuse et fibreuse (voire aponévrotique). Proximalement, des nerfs
cluniaux peuvent naître et avoir un trajet récurrent sur la face postérieure du
gluteus maximus à proximité de l’ischion. Plus distalement, ce rameau périnéal
se divise en branches destinées à la marge anale, et d’autres destinées au
scrotum (fig.8)ou aux grandes lèvres (fig.9)
12
Fig 3 : fesse droite, vue postérieure
Trajet des nerfs cluniaux inférieurs
Gluteus
maximus
Nerf cutané
postérieur
de la cuisse
Nerfs
cluniaux
inférieurs
Nerf sciatique
13
Fig. 4 : fesse droite, vue postérieure
Rameau périnéal
Insertion
des ischio
jambiers
Rameau
périnéal
Nerfs
cluniaux
inférieurs
Nerf cutané
postérieur
de la cuisse
14
Fig.5 : fesse gauche, vue postérieure
Niveau de sortie des nerfs cluniaux inférieurs
Périmètre de sortie
des nerfs cluniaux
inférieurs à travers
l’aponévrose
du
gluteus maximus
Branches
issues du nerf
pudendal
interne
15
Fig. 6 : fesse gauche, vue postérieure
Aponévrose réclinée
Nerfs
cluniaux
inférieurs
Rameau
périnéal
Nerf cutané
postérieur
de la cuisse
16
Fig.7 : fesse gauche, vue postérieure
Gluteus maximus récliné
Gluteus maximus
Nerf sciatique
Branche cluniale
inférieure médiale
Nerf cutané postérieur
de la cuisse
Veines et artère glutéales
inférieures (sectionnées pendant
la dissection du gluteus maximus)
Ligament
sacrotubéral
ischion
17
Fig. 8 : fesse gauche, vue postérieure
Rameau périnéal destiné au scrotum
Rameau périnéal
scrotum
Fig.9 : fesse droite, vue postérieure
Rameau périnéal destiné à la grande lèvre droite
et à la marge anale
Niveau de
projection
de l’anus
vulve
Rameau
périnéal
18
413- Rapports
Au niveau de leur trajet initial, les nerfs cluniaux inférieurs sont dans un
pédicule (fig.10) contenant le nerf cutané postérieur de la cuisse, et les
vaisseaux glutéaux inérieurs. Médialement nous retrouvons l’ischion et le
ligament sacrotubéral, en avant se trouve le nerf sciatique, et en arrière le
gluteus maximus.
Fig.10 : fesse gauche, vue postéroinférieure
Pédicule vasculonerveux
Gluteus
maximus écarté
Pédicule vasculo nerveux
contenant le nerf cutané
postérieur de la cuisse,
les vaisseaux glutéaux
inférieurs et la naissance des
nerfs cluniaux inférieurs
19
Lorsque les branches cluniales inférieures s’individualisent du nerf
cutané postérieur, des vaisseaux glutéaux inférieurs les accompagnent jusqu’au
bord inférieur du muscle gluteus maximus. A cet endroit, les vaisseaux
pénètrent le muscle pour le vasculariser, tandis que les nerfs le contournent
afin de rejoindre la surface cutanée (fig.11).
Fig.11 : fesse droite, vue postérieure
Vaisseaux collatéraux des nerfs cluniaux inférieurs
Peau de la
région
glutéale
Bord inférieur du
Gluteus maximus
Pédicule vasculo
nerveux (non visible
sur la photo)
Nerf clunial
inférieur
contournant le
muscle
Vaisseau
glutéal
inférieur
20
La branche médiale, commune à des nerfs cluniaux inférieurs et au rameau
périnéal, est en rapport étroit avec le ligament sacrotubéral et l’ischion (fig.2 et 7)
Dans le trajet horitontal, ce nerf chemine seul dans son conduit fibrograisseux.
42- Repères anatomiques cutanés
En raison de l’adiposité de la région, les répères et projections cutanées sont
rares (fig.12).
L’ischion est le principal élément palpable6. Le rameau périnéal passe à deux
travers de doigts sous ce relief. Entre l’ischion et le grand trochanter, nous pouvons
palper, sur le sujet maigre et ou musclé, la limite inférieure du gluteus maximus6, au
niveau de laquelle les nerfs cluniaux inférieures contournent le muscle à des niveaux
variables.
Le territoire cutané d’innervation des nerfs cluniaux inférieurs et de leurs
branches (rameau périnéal) correspond à la partie inféro médiale de la fesse, une zone
de la cuisse supérieure, la marge anale, et la peau du scrotum ou des grandes lèvres.
Fig.12 : fesse droite, vue postérieure
Repères cutanés
Relief de
l’ishion
scrotum
Zone innervée
par les nerfs
cluniaux
inférieurs
Limite
inférieure
du gluteus
maximus
21
43- Zones de conflit
La recherche des zones de conflit sur les nerfs cluniaux inférieurs peut nous
permettre de comprendre les mécanismes physiopathologiques aboutissant aux algies
périnéoglutéales d’origine cluniale inférieure, puis, de trouver le geste chirurgical le
plus adapté à leur traitement.
J’ai identifié lors de mes dissections deux zones particulièrement
problématiques.
La première est située lors du passage du rameau périnéal du bord inférieur de
l’ischion jusqu’au périnée. A cet endroit, le nerf est dans une zone de glissement
(fig.13), une boutonnière plus ou moins fibreuse, graisseuse, voire aponévrotique. Or
chez certains patients, il n’est pas rare de voir un assèchement et une fibrose des zones
de glissement. Ceci pourrait provoquer dans cette zone, une compression du nerf par
l’ischion contre les muscles ichiojambiers en position assise, et des étirements du
rameau notamment en rotation interne de cuisse. Il serait donc nécessaire d’explorer ce
couloir, de son origine depuis l’angle formé par le gluteus maximus et les ischiojambiers, jusqu’à sa terminaison (division du rameau à environ un ou deux centimètres
du périnée)
Fig.13 : fesse gauche, vue postérieure
Passage du rameau périnéal dans sa boutonnière
Rameau
périnéal
Graisse de
la cuisse
postérieure
22
La deuxième zone de conflit est située beaucoup plus haut, au niveau de la
naissance des nerfs cluniaux inférieurs sur le nerf cutané postérieur de la cuisse.
A ce niveau, le ligament sacrotubéral (rapport médial du pédicule
vasculonerveux) peut se dédoubler sur sa face médiale, permettant le passage d’un
nerf clunial inférieur (notamment la branche la plus médiale) entre le ligament et son
dédoublement (fig.14). Cette pince ligamentaire peut réaliser une véritable
compression du nerf responsable d’algies. Cette compression est renforcée en position
de flexion de hanche (position assise par exemple), où le ligament et son
dédoublement sont étirés en longueur et rapprochés.
Fig.14 : fesse gauche, vue postérieure
Passage du nerf dans un dédoublement ligamentaire
Gluteus
maximus
récliné
Dédoublement
du ligament
sacrottubéral
Branche
cluniale
inférieure
proximale
Ligament
sacrotubéral
23
44- Abord chirurgical
Le geste chirurgical sur les nerfs cluniaux inférieurs doit tenir compte de
plusieurs contraintes. La première est de retrouver systématiquement ces nerfs, ayant
une topographie variable, et étant situés dans une zone particulièrement adipeuse. La
seconde est d’accéder aux différentes zones de conflit bien qu’elles soient situées à des
endroits différents et éloignés. Enfin, l’abord chirurgical doit épargner au maximum
les zones d’appui pour faciliter une cicatrisation post opératoire.
L’accès le plus simple à la première zone de conflit s’effectue sur la face
postéro supérieure de la cuisse. Une incision horizontale, à deux travers de doigt sous
l’ischion (fig.15), de quelques centimètres permet de localiser le rameau périnéal dans
la graisse sous-jacente (fig.16), tout en épargnant une zone d’appui : l’ischion. Une
fois le nerf localisé, on peut le suivre dans son couloir fibro-graisseux jusqu’au
périnée, quitte à élargir la première incision. Puis, nous l’explorons de façon
rétrograde, afin trouver son passage dans l’angle gluteus maximus – ischio jambier,
puis de remonter au maximum vers son origine (fig.17). Cette étape nécessite d’une
part d’élargir latéralement la première incision, d’autre part d’écarter le gluteus
maximus (fig.18) pour suivre le trajet des nerfs dans le pédicule vasculo nerveux
(fig.19), et enfin d’être très attentif pour ne pas léser les autres éléments. En effet, c’est
à cet endroit que le chirurgien trouvera une grande densité de branches cluniales
inférieures s’individualisant du pédicule vasculo-nerveux, et migrant sous le gluteus
maximus. On trouve également des vaisseaux glutéaux inférieurs collatéraux aux nerfs
cluniaux inférieurs.
Fig. 15 : fesse gauche, vue postérieure
Incision à deux travers de doigt sous l’ischion
24
Fig.16 : fesse gauche, vue postérieure
repérage du rameau périnéal
Rameau
périnéal
Muscles
ischiojambiers
Fig.17 : fesse gauche, vue postérieure
Dissection du rameau périnéal, repérage des rameaux cluniaux inférieurs
Rameau
périnéal
Nerfs
cluniaux
inférieurs
25
Fig. 18 : fesse gauche, vue postéroinférieure
Dissection sous le gluteus maximus
Fig.19 : fesse gauche, vue postéroinférieure
Nerfs cluniaux inférieurs naissant du pédicule
cutané postérieur
Gluteus
maximus
écarté
Nerfs
cluniaux
inférieurs
Pédicule : nerf cutané
postérieur, nerfs
cluniaux inférieurs,
vaisseaux glutéaux
inférieurs
26
La deuxième zone de conflit, située au niveau du ligament sacrotubéral, est
inaccessible par l’abord utilisé initialement. L’accès le plus rapide consiste en un
passage transglutéal après incision oblique latéralement et vers le bas (sens des fibres
musculaire glutéales) à deux travers de doigt au dessus du niveau de palpation de
l’ischion (fig.20). Après identification du ligament sacrotubéral, il faut repérer en
dehors l’élément nerveux (nerf cutané postérieur de la cuisse ou branche cluniale
inférieure très proximale) et les vaisseaux glutéaux inférieurs, et les libérer le cas
échéant d’une pince formée par un dédoublement ligamentaire.
Fig.20 : fesse gauche, vue postérieure
Abord transglutéal
Vaisseaux
glutéaux
inférieurs
Nerf cutané
postérieur
de la cuisse
Ligament
sacrotubéral
27
5- Discussion
Dans la littérature, les ressources bibliographiques concernant les nerfs
cluniaux inférieurs ou le rameau périnéal (décrit par Soemmering5), sont assez rares.
Anatomiquement, j’ai pu remarqué que la dichotomie entre nerfs cluniaux
inférieurs et rameau périnéal, classiquement décrite dans les atlas1,2,5, n’est pas
retrouvée chez l’homme. En effet, sur chacune de mes dissections, j’ai été amené à
voir une branche commune pour ce rameau périnéal et des nerfs cluniaux inférieurs.
Deuxièmement, le nombre et le trajet des nerfs cluniaux inférieurs n’est pas
fixé à deux ou trois se dirigeant vers le bord inférieur et médial du gluteus maximus
avant de le contourner, comme le représentent certains auteurs.
Enfin, j’ai observé que l’origine des principales branches cluniales inférieures
est assez haute sur le nerf cutané postérieur. La littérature nous montre
systématiquement ce point en regard de l’ischion. Or, je l’ai plutot repéré à son bord
supérieur, voire plus haut en regard du ligament sacrotubéral. Il est cependant
possible que j’ai créé des artefacts en disséquant les fibres cluniales inférieures à
l’intérieur du nerf cutané postérieur.
Concernant le trajet des nerfs cluniaux inférieurs à travers l’aponévrose du
gluteus maximus, des travaux menés en 20057 ont conclu à l’existence d’un ostium
dans l’angle formé par le gluteus maximus et les ischio-jambiers, où passeraient
l’ensemble les nerfs. Mes dissections n’ont jamais retrouvé ce passage, et tendent à
prouver que la traversée de l’aponévrose ne se fait pas en un point (fig.5) mais en
trois phases : la première est l’entrée des principales branches cluniales inférieures
dans l’aponévrose au niveau du bord inférieur du gluteus maximus, et généralement
à proximité (moins de cinq centimètres) de l’angle décrit précédemment ; la
deuxième est le cheminement et la division de ces branches dans le tissu
aponévrotique ; la dernière est la perforation de l’aponévrose par les petits nerfs
cluniaux inférieurs destinés à la peau de la fesse, de la cuisse et du périnée. En
conséquence, j’émets l’hypothèse d’une variation entre les sujets (certains possédant
un foramen dans l’aponévrose, d’autres non), ou d’un artefact lors de la dissection
de ces nerfs ayant abouti à un foramen à travers l’aponévrose glutéale.
Les zones de conflit sont la principale source de discussion de ce mémoire.
J’évoquerai en premier la boutonnière du rameau périnéal. Celle-ci n’est pas
décrite dans la littérature. Ses limites ne sont pas franches, et on ne la retrouve qu’en
suivant le rameau périnéal une fois celui-ci repéré. Des dissections sur d’autres
cadavres seraient nécessaires afin de confirmer son existence, et de repérer sur des
sujets de corpulence et d’âge variable les différences de composition du tissu
entourant le rameau périnéal (graisse, fibres, aponévrose). D’autre part, il est
possible qu’à ce niveau , la compression ne soit pas uniquement causée par le
matériel fibreux, mais aussi par les tendons des muscles ischio-jambiers contre le
gluteus maximus, à l’origine de la boutonnière.
28
La deuxième zone de conflit repérée est le passage d’un nerf clunial inférieur
dans un dédoublement du ligament sacrotubéral. Ce dédoublement n’a été observé
que sur une fesse d’un seul sujet. Il n’est pas décrit dans la littérature, et semble donc
être une variation anatomique. Son implication en pathologie peut être minime, mais
ne doit pas être écartée pour autant.
L’abord chirurgical des nerfs cluniaux inférieurs est un véritable problème. De
petit diamètre et noyés dans la graisse et l’aponévrose de la région glutéale, ils sont
réellement difficiles à trouver.
Le premier abord décrit, reste à mon sens, le plus simple car le rameau périnéal
(élément recherché en premier par cette technique) est relativement gros, visible et
constant. D’autre part, il permet de retrouver progressivement les autres nerfs
cluniaux inférieurs sans risquer de les traumatiser lors de l’incision. Néanmoins, il
existe deux inconvénients à cette technique :
• Le premier est l’accès à cette zone. En effet, sur un sujet agé ou corpulent, et
dans une moindre mesure chez tous les sujets, la peau de la fesse a tendance à
tomber sur l’ischion et masquer la zone d’incision. Il est donc nécessaire de la
maintenir pour bien palper les repères, et opérer.
• L’autre problème est l’accès à l’hypothétique zone de conflit à proximité du
ligament sacro-tubéral. Elle ne peut se faire par cette technique, et nécessite un autre
abord, de type transglutéal par exemple. Pour cet abord, les repères sont
particulièrement importants : l’incision doit se faire bien au-dessus de l’ischion, afin
de rejoindre le nerf dans son trajet à proximité du ligament sacrotubéral, et non à
proximité de l’os.
Les algies cluniales inférieures étant un diagnostic différentiel des
pudendalgies, il serait intéressant lors du traitement chirurgical de ces
pudendalgies8,9,10,11 (se pratiquant par voie transglutéale, et explorant le ligament
sacrotubéral) de vérifier la position du nerf cutané postérieur ou de nerfs cluniaux
inférieurs par rapport au ligament, leur proximité, voire l’enserrement du nerf dans
un dédoublement ligamentaire.
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6- Conclusion
Les nerfs cluniaux inférieurs, naissant du nerf cutané postérieur de la cuisse,
innervent la peau de la région glutéale inférieure, et une partie du périnée grâce à un
rameau périnéal.
Des compressions de ces nerfs, en particulier au niveau du passage dans l’angle
formé par le gluteus maximus et l’insertion des ischio-jambiers sur l’ischion, le
passage du rameau périnéal sous l’ischion, et le passage des branches cluniales
inférieures proximales à proximité du ligament sacrotubéral, peuvent être à l’origine
de douleurs intéressant l’ensemble de la zone d’innervation.
Il serait intéressant, chez les sujets présentant des douleurs sur la région
innervée par les nerfs cluniaux, de réaliser des inflitrations à ces différents niveaux,
afin de vérifier l’implication des zones hypothétiques de conflit sus citées.
Suite à ces essais, une réponse chirurgicale adaptée pourra être choisie,
notamment parmi les deux proposées dans ce mémoire.
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7- Bibliographie
1 Frank H. NETTER, MD, Atlas d’anatomie humaine 2ème édition, édition Icon
Learning System.
2 Pierre KAMINA, précis d’anatomie clinique, édition Maloine.
3 Johannes W. ROHEN, Chihiro YOKOCHI, Elke LÜTJEN DRECOLL,
Anatomie humaine, atlas photographique d’anatomie systématique et
topographique, édition Maloine.
4 THIEL, Photographical atlas of practical anatomy, 121-124, edition Springer
5 G. PATURET, traité d’anatomie humaine, Système nerveux,
édition Masson & Cie (1963)
6 JP. BEAUTHIER ,P. LEFEVRE, Traité d’anatomie, de la théorie à la pratique
palpatoire, tome I : membre inférieur et ceinture pelvienne, Editions
Universitaires
7 C. GAUDIN, Les nerfs cluniaux inférieurs, mémoire effectué dans le cadre du
master 1 d’anatomie à la faculté de medicine de Nantes, 2004-2005
8 ROBERT R., PRAT-PRADAL D., LABAT J.-J., BENSIGNOR M., RAOUL
S., REBAI R.,LEBORGNE J., Anatomic basis of the pudendal nerve, Surge
Radiol Anat, 20 (1998) 93-98.
9 LABAT J.-J., ROBERT R., BENSIGNOR M., GUERINEAU M., Approche
clinique des algies périnéales, Kinésithérapie scientifique, Juin n°434.
10 ROBERT R., BENSIGNOR M., LABAT J.-J., GUERINEAU M., La
chirurgie du nerf pudendal, Kinésithérapie scientifique, Juin n°434.
11 ROBERT R., BENSIGNOR M., LABAT J.-J., RAOUL S., HAMEL O.,
Algies périnéales chroniques et nerf pudendal, www.soo.com.fr
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