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Universités des Maires de France
Lundi 2 juin 2008 – Antibes Juan-les-Pins
Responsabilités du maire
Annick PILLEVESSE
Conseil Juridique et Documentation
Introduction
Facteurs expliquant les mises en cause pénales d’élus
1) la décentralisation, qui a opéré, en de nombreux domaines, un transfert du
pouvoir de décision de l’Etat vers les autorités locales.
Les compétences, et par là même les responsabilités de ces autorités locales, se
sont trouvées accrues.
2) la complexité croissante de la gestion publique locale, due à l'évolution de la
réglementation et aux moyens dont disposent les élus locaux.
La décentralisation a généré une inflation de textes.
Quant aux moyens financiers, techniques, humains dont disposent les élus, ils ne
sont pas toujours suffisants pour assumer les obligations qui sont les leurs, et qui
ne cessent de croître avec la protection de l'environnement notamment.
3) la pénalisation accrue des rapports sociaux : notre société tend à vouloir
systématiquement identifier un coupable, mettre un visage sur ce coupable. En
outre les victimes agissent de plus en plus au pénal pour obtenir une indemnisation
qu'elles auraient pu rechercher par d'autres voies.
I.
LA RESPONSABILITE CIVILE DU MAIRE
Dans l’exercice de leurs fonctions, les élus sont susceptibles d’encourir :
1.
Une responsabilité civile
(entraînant le versement de dommages et intérêts
aux personnes qui ont subi un préjudice)
• Du fait des de décisions illégales
• Du fait d’actes matériels
• Du fait d’instruction aux agents les conduisant à commettre des fautes
Une faute mettant en cause la
responsabilité civile est commise
dans le cadre de :
 La fonction
d’administration locale
et de représentant
de la commune
 La fonction
d’officier de police judiciaire
 La fonction
d’officier d’état civil
- faute de service
Distinction possible entre :
Pas de distinction possible :
- faute personnelle détachable
- faute personnelle
- faute personnelle détachable
mais non dépourvue de tout lien
avec le service
- faute de service
la faute engage toujours la
responsabilité personnelle de son
auteur
Distinction possible entre :
Fautes : Exemples
•
Faute de service : un maire qui ne fait pas usage de ses pouvoirs de police
pour faire cesser des bruits de voisinage
•
Faute personnelle non détachable du service : détournements de
deniers publics
•
Faute personnelle : manquements au devoir de probité, commission d’un
délit de faux et d’escroquerie
Mise en cause
selon la faute
Faute de service
Faute personnelle non
dépourvue de tout lien
avec le service
Faute personnelle
La collectivité publique en assume
la responsabilité et le coût de la
réparation
La responsabilité personnelle
aussi bien que la responsabilité
communale peuvent être
recherchées mais, dans ce cas, la
commune pourra se retourner
contre son agent
L’intéressé
en répond personnellement
Critères de distinction entre ces catégories de fautes :
> les circonstances de temps et de lieu
> les mobiles de l’agent
> les moyens utilisés et leur lien avec le service
> les compétences de l’agent
Déroulement de la procédure
Devant le juge administratif
Devant le juge judiciaire
en cas de faute de service ou
comportant un lien avec le service
en cas de responsabilité
personnelle ou si la faute (quelle
que soit sa nature) est commise dans
le cadre de la fonction d’OPJ
Garantie
des condamnations civiles
En cas de faute personnelle
En cas de faute de service
l’agent public doit supporter la
condamnation sur ses biens propres
l’agent peut prétendre au
remboursement des sommes qu’il a
dû verser au titre de sa
condamnation. La collectivité doit
donc souscrire une assurance pour
couvrir ce risque
Dans l’exercice de leurs fonctions, les élus sont susceptibles d’encourir :
2.
Une responsabilité comptable ou financière
(débouchant sur des amendes et éventuellement la démission d'office)
Le maire est l’ordonnateur de la commune, c’est-à-dire la personne habilitée à
donner au comptable public l’ordre de percevoir ou de verser des fonds au nom
d’un organisme public.
Le comptable public est un agent nommé par le ministre des Finances dont la
mission est d’assurer le maniement (perception, versement) des fonds publics et
de tenir la comptabilité des opérations effectuées.
Un principe important gouverne les finances publiques, celui de la séparation
de l’ordonnateur et du comptable :
UNE MEME PERSONNE NE PEUT PAS LEGALEMENT CUMULER LES
FONCTIONS D’ORDONNATEUR ET DE COMPTABLE DES DENIERS
PUBLICS
Responsabilité pour gestion de fait :
La gestion de fait consiste, pour un ordonnateur, à ne
pas respecter la séparation des ordonnateurs et des
comptables en s’immisçant dans la manipulation ou la
détention des deniers publics
Gestion de fait relative aux recettes :
Elle revient à encaisser – même pour les reverser
dans un délai très court - des recettes destinées à
l’organisme public
Gestion de fait relative aux dépenses :
Elle consiste à délivrer pour une dépense un mandat qui
est qualifié de fictif :
- parce que le service auquel elle correspond est fictif,
- parce que le créancier n’est pas le véritable créancier,
- parce que la date de la prestation n’est pas la date
réelle,
- parce que le montant de la dépense ne correspond pas
au montant réel
Responsabilité devant la cour de discipline
budgétaire et financière :
Elle n’est pas la même selon que le maire agit en tant
qu’ordonnateur dans le cadre de l’exercice de son
mandat, ou dans le cadre de fonctions qui ne sont pas
obligatoirement exercées par un maire
Dans l’exercice de ses
fonctions de maire ou de
fonctions liées à son mandat
(par exemple président du
CCAS)
Dans le cadre de d’autres fonctions (par
ex : président de SEM ou
d’association para-administrative)
les maires ne sont responsables devant la CDBF
que dans deux cas :
- s’ils ne s’acquittent pas de l’obligation de mandater ou
d’ordonnancer dans les quatre mois le paiement d’une
somme d’argent que la commune a été Condamnée à verser,
- s’ils donnent l’ordre au comptable d’effectuer une opération
ayant pour effet de procurer un Avantage injustifié à autrui.
La CDBF sanctionne les irrégularités financières qu’ils
peuvent commettre en tant qu’ordonnateurs :
infractions aux règles à l'exécution des recettes et des
dépenses, imputations irrégulières de dépenses destinées à
masquer un dépassement de crédit, omissions de
déclarations devant être faites aux administrations fiscales,
avantages octroyés de façon injustifiée, etc.
II.
GESTION DE FAIT ET ASSOCIATION
Si plusieurs des
critères ci dessous
sont réunis,
il y a probablement
gestion de fait
Absence
d’existence réelle
Absence ou insuffisance
d’autonomie de
fonctionnement
par rapport à la
collectivité publique
L’association :
- n’est pas déclarée
- ou n’a pas de réelle activité
statutaire (pas de membres, pas
d’organe délibérant)
- ou ne fonctionne pas
conformément à ses statuts
- modalités d’adhésion : nécessité
d’un parrainage ou d’un accord
préalable de la commune
- assemblée générale : composée
majoritairement d’élus
- exécutif : majoritairement
composé d’élu et d’agents
communaux
Absence ou insuffisance
d’autonomie financière :
- les ressources de l’association
proviennent essentiellement de
subventions
- l’association ne détermine pas
librement
l’utilisation de ces subventions
III.
FORMALISATION DES RELATIONS
COMMUNES – ASSOCIATION :
LA CONVENTION
Contenu d’une convention
- objet de la convention
- objectifs de la convention
- obligations réciproques des parties
- moyens de contrôle (production des comptes et de pièces justificatives)
Mise à disposition de locaux
Elle constitue une subvention en nature, correspondant à une dépense qui devrait être payée
par l’association, mais qui est prise en charge sur le budget communal
- la convention règle les droits et devoirs des parties, notamment en matière de paiement des charges (EDF,
téléphone, etc.), d’entretien, de responsabilité
- l’objet poursuivi par l’association doit présenter pour la commune un intérêt
général suffisant
- cas particulier : mise à disposition d’équipement sportif
Si cette mise à disposition est liée à la dévolution à l’association d’une mission de service public
de la compétence de la commune
- une convention particulière doit porter sur ce service, qui ne peut être simplement mentionné dans la convention
de mise à disposition des locaux
- selon la nature de la convention, la commune devra suivre la procédure du code des marchés publics ou celle de
dévolution de délégation de service public
- s’il s’agit d’un SPIC (service public industriel et commercial), la commune doit tenir compte du principe de
l’équilibre budgétaire, et du fait qu’elle ne peut, sauf exception, prendre en charge les dépenses de ce service (ce
qu’elle fait en mettant des locaux à disposition de l’association)
IV.
PROCEDURE DE GESTION DE FAIT
La Chambre régionale des comptes (CRC) se saisit ou est saisie
d’un acte constitutif de gestion de fait.
Le délai de prescription est de 10 ans.
La CRC fixe d’abord le périmètre de la gestion de fait,
en déterminant les personnes physiques ou morales concernées,
qu’elle déclare « gestionnaires de fait ».
Puis elle examine les comptes produits par les intéressées.
IV. PROCEDURE DE GESTION DE FAIT
Déclaration de gestion de fait
1er jugement
Jugement provisoire
déclarant la comptabilité de fait :
il peut être accepté ou contesté par les intéressés
2e jugement
Jugement définitif :
- soit la CRC admet le bien-fondé de la contestation) et déclare un non-lieu,
- soit elle déclare définitivement la gestion de fait ; les intéressés deviennent
comptables publics, sont soumis aux même obligations et responsabilités, et
doivent rendre compte de leur gestion.
IV. PROCEDURE DE GESTION DE FAIT
Reddition de comptes
3e jugement
Jugement provisoire
fixant la ligne de compte : examen des comptes et des
pièces produits par les intéressés
4e jugement
Jugement définitif :
- soit la CRC constate que les sommes irrégulièrement maniées ont réintégré la
caisse de la commune, et rend un jugement de quitus,
- soit elle constate que les comptables de fait n’ont pas reversé la totalité des
sommes en cause, et elle rend un jugement de débet.
Le débet entraîne pour le gestionnaire de fait l’obligation de reverser les sommes
dans la caisse de la commune sur ses propres deniers.
C’est seulement lorsqu’il aura procédé au versement qu’il pourra obtenir un
jugement de quitus.
- la CRC peut en outre prononcer une amende, que la décision rendue soit un
quitus ou un débet.
IV. PROCEDURE DE GESTION DE FAIT
Sanctions
Depuis l’entrée en vigueur de la loi n°2001-1248 du 21 décembre 2001,
l’élu déclaré définitivement comptable de fait, est suspendu
en qualité d’ordonnateur jusqu’à ce qu’il ait reçu quitus de la gestion.
Pendant cette période, le Conseil municipal doit confier à un adjoint de son choix,
les attributions d’ordonnateur
(émettre des mandats, tenir la comptabilité de l’engagement des dépenses).
Poursuites pénales éventuelles :
- La procédure de gestion de fait peut entraîner la saisine de la CDBF
(cf. ci-dessus)
- Des poursuites pourraient être engagées pour usurpation de fonction
(immiscion dans l’exercice d’une fonction publique sans y avoir été habilité),
mais elles sont peu probables.
- Le délit d’ingérence peut par contre aller de pair dans certains cas.
V.
LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
1.
Les infractions spécifiques
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
1. Obstruction à l'application de la loi
(art. 432-1 du CP)
Il consiste, dans l'exercice de ses fonctions, à faire échec à l'exécution des lois (par une circulaire
en sens contraire adressée aux subordonnés, ou par décision de bloquer un dossier établi en
application d'une loi, ou en apportant directement et systématiquement son aide à des personnes
en situation irrégulière par rapport à la loi par exemple.
2. Atteinte à la liberté individuelle
(art. 432-4 à 432-6 du CP)
Il couvre essentiellement la liberté d’aller et venir et un certain nombre de droits (droit de propriété,
droit à la santé, droit à l’instruction…) et il est nécessaire que l’action soit arbitraire c’est-à-dire
décidée en dehors des cas légaux (interdiction arbitraire de quitter une localité ou une résidence
par exemple). .
3. Discrimination
(art. 432-7 du CP)
Il vise les discriminations qui consistent à refuser sciemment à quelqu'un le bénéfice d'un droit
accordé par la loi, ou à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque au motif
que cette personne à telle origine (ethnie, nation, race ou religion) ou à raison de son sexe, de sa
situation de famille, de son état de santé, ou handicap, de ses mœurs ou opinions politiques ou
activités syndicales. Un maire s'est ainsi trouvé condamné pour avoir rejeté une demande de
logement en se fondant uniquement sur la race et la religion du demandeur).
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
4. Atteinte à l’inviolabilité du domicile
(art. 432-8 du CP)
Cette infraction suppose la conscience de s’introduire dans l’habitation d’une personne contre son
gré et hors les cas où la loi l’autorise. (Le domicile, au sens de cet article, n’est pas seulement le
lieu d’habitation, c’est aussi tout endroit où la personne, qu’elle y habite ou non, peut se dire chez
elle (résidence secondaire, appartement loué en meublé, chambre d’hôtel, camping-car ou
caravane) y compris les dépendances (balcon, garage, débarras, cours et jardins attenants et clos).
La tentative est également punissable.
5. Concussion
(article 432-10 du CP)
Le commet celui qui
- soit reçoit ou ordonne de percevoir, « à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics
une somme qu'il sait ne pas être due ou excéder ce qui est dû », même s'il agit dans un autre
but que son profit personnel,
- soit accorde une exonération injustifiée.
6. Corruption passive et trafic d'influence
(article 432-11 du CP)
La corruption passive consiste pour un élu à solliciter ou accepter, directement ou indirectement,
des « offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques » pour accomplir, ou au
contraire s'abstenir d'accomplir, un acte qui est de sa compétence ou qui est facilité par sa
fonction. Il suppose un accord préalable entre les deux personnes.
Le trafic d'influence est le fait d'abuser de son influence, réelle ou supposée, pour faire obtenir de
la part d'une administration, une décision favorable, un emploi, un marché, une décoration,
à une personne.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
7. Détournement de biens
(articles 432-15 et 432-16 du CP).
II consiste, pour une personne exerçant une fonction publique, à détruire, détourner ou soustraire,
volontairement ou par négligence, un acte ou un titre (arrêté municipal, délibération, pièces de
comptabilité, registre d’état civil…) ou des fonds publics ou privés, ou tout autre objet qui lui avait
été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission.
A noter que l’article 12122-21 du code général des collectivités territoriales impose au maire la
conservation et la gestion du patrimoine de la commune.
8. Favoritisme ou avantages injustifiés
(article 432-14 du CP)
Ce délit concerne tous les élus locaux, mais peut également impliquer des agents administratifs ou
techniciens ayant participé à la mise en œuvre et à l'attribution d'un marché public ou d'une
délégation de service public conclus par une personne publique ou une SEM.Il consiste à procurer
ou à tenter de procurer à autrui un avantage injustifié, par un acte contraire aux dispositions
législatives ou réglementaires qui garantissent la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les
marchés ou contrats de délégation de service public.
9. Ingérence (ou prise illégale d'intérêt)
(article 432-12 du CP)
Aux termes de l'alinéa 1 de l’article visé ci-contre, c’est "Le fait, par une personne dépositaire de
l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un
mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectemen4 un intérêt
quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou
partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement"
2.
Précisions concernant le délit d’ingérence
A.
Trois conditions doivent être simultanément remplies
au moment des faits
pour que le délit d'ingérence soit constitué
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
1.
l'intéressé devait être dépositaire de l'autorité publique,
être chargé d'une mission de service public
ou être investi d'un mandat électif
Les maires sont considérés remplir la première condition au sens de l'article 432-12 du code
pénal pendant toute la durée de leur mandat.
En outre, de par leur fonction, ils ont la surveillance de toutes les affaires de la commune.
C'est dire que dès qu'il y a prise d'intérêt de leur part, le délit d'ingérence est constitué, et le fait
que le maire ait été de bonne foi est sans influence sur la constitution du délit.
En effet, l'intention délictueuse nécessaire en droit pénal à l'existence d'un délit n'est nullement
constituée par une faute morale impliquant un esprit de fraude ou de cupidité ; Il suffit que la
personne ait accompli sciemment l'acte considéré, même si elle ignorait que cet acte constituait
une prise d'intérêt.
Tout au plus le désintéressement incitera-t-il le juge à faire preuve d’indulgence
quant à la peine applicable.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
2.
il devait avoir la surveillance
ou l'administration
ou le paiement de cette affaire.
Ces dispositions concernent les élus municipaux dans la mesure où ils sont effectivement
chargés de missions d'administration active (lorsqu'ils agissent en vertu d'une délégation du
maire, d'un mandat spécial du conseil municipal, en suppléance du maire, ou encore en tant que
membres d'une commission chargée de suivre l'exécution de décisions, ou chargée d'une mission
d'étude spécifique à partir de laquelle le. conseil municipal prendra sa décision).
Le cas des adjoints – et notamment celui du premier adjoint – est à signaler, dès lors qu'ils
peuvent parfois être assimilés au maire, en dehors même des domaines où ils ont pu recevoir
délégation, par le seul fait qu'ils sont appelés, dans l'ordre du tableau, à "le remplacer sans délai
ni autres formalités en cas d'empêchement".
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
3.
il doit avoir pris, reçu ou conservé
un intérêt dans une affaire publique
Le commentaire ci-après, relevé dans une note de doctrine, expose ce qu'il faut entendre par
"prendre un intérêt personnel".
"Cette prise d'intérêt personnel peut donc être pécuniaire, morale, politique ... ; Ce peut être une
satisfaction de vanité, un intérêt d'affection. D'emblée, on voit que, concrètement, la notion de
prise d'intérêt n'est nullement liée à celle de bénéfice matériel, d'intérêt pécuniaire établi et direct.
L'intérêt peut être important, minime, insignifiant..;
ou encore :
"Il y a en réalité mise d'intérêt, au sens de l'article 175 du code pénal, du seul fait que le
fonctionnaire se met dans une position telle qu'il puisse être seulement soupçonné d'avoir une
intérêt personnel à l'affaire, même si en réalité il n'en a aucun. La "prise d'intérêt" est constituée
par le fait même de s'exposer au soupçon d'avoir un intérêt personnel à l'affaire, même si cet
intérêt est en fait inexistant".
Il faut en fait ne mêler en rien ses propres affaires avec celles de la commune,
y compris par personne interposée.
B.
Délit d’ingérence : dérogations et sanctions
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Des dérogations sont toutefois organisées pour les communes dont la population
est inférieure ou égale à 3 500 habitants.
L'article 432-12 prévoit dans ce cas deux types d'opérations possibles :
• L'élu peut passer des contrats pour la fourniture de services ou le transfert de biens avec la
commune, mais dans la limite de 100 000 F par an, et à condition de ne pas participer aux
délibérations qui s'y rapportent.
• L'élu peut acquérir un bien immobilier appartenant à la commune pour créer ou développer
son activité professionnelle ; il peut également, pour son habitation personnelle, acquérir un lot
de lotissement communal ou conclure un bail d'habitation avec la commune ; le prix du bien ne
peut être inférieur à l'évaluation des domaines dans le premier cas et, en toutes hypothèses,
l'élu ne saurait participer aux délibérations concernées.
A cet égard il convient tout de même de relever que si l'achat d'un bien communal par un élu
De commune de moins de 3500 habitants n'est pas sanctionné pénalement,
puisque l'article 432-12 du nouveau code pénal organise une dérogation pénale,
l'article 1596 du code civil, lui, demeure en vigueur.
Or ce dernier interdit de telles acquisitions sous peine de nullité de la vente.
On ne peut donc que conseiller de s'abstenir pour l'instant.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Quant au délai de prescription du délit, il était de 3 ans à compter du jour
où il avait été commis (jour de signature du marché par exemple). Il s'agissait en effet d'une
infraction instantanée qui se trouvait réalisée au moment précis de la prise d'intérêt.
Les dispositions du nouveau code pénal ont ajouté à la notion de "prise d'intérêt"
deux autres notions, puisqu'elle sanctionne le fait de prendre, recevoir ou conserver un intérêt.
Or, conserver n'est pas une action instantanée mais durable,
qui fait du délit une infraction continue.
On peut dès lors penser que le délai de prescription de 3 ans ne commencera à courir
que du jour où la personne aura cessé de conserver l'intérêt qu'elle a pris ou reçu,
ce qui est beaucoup plus long.
Les sanctions du délit peuvent être assorties de peines complémentaires :
déchéance des droits civils, civiques et de famille (donc inéligibilité) pour une durée maximale
de 5 ans, confiscation des sommes irrégulièrement perçues...
Enfin, il convient de noter qu'outre les peines principales et peines complémentaires
prévues au code pénal, qui peuvent être infligées par le juge, l'article L 7 du Code Electoral
(réintroduit par la loi n°95-65 du 19 janvier 1995) interdit l'inscription sur les listes électorales,
pendant un délai de 5 ans, des personnes condamnées définitivement pour l'une
des infractions prévues aux articles 432-10 à 432-16 et 433-1 à 433-4 du nouveau code pénal,
c'est-à-dire pour les délits de concussion, corruption passive ou trafic d'influence, ingérence,
favoritisme, détournement de biens ou pour le recel de l'une de ces infractions.
3.
Cette responsabilité pénale générale peut être
rangée en deux grandes catégories
A.
Celle où la responsabilité est encourue
à l'occasion des fonctions de gestion du patrimoine
et des services de la commune
(fonctionnement défectueux des ouvrages ou des services)
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Délit de pollution de l'eau
Le déversement de substances pouvant porter préjudice à la vie des poissons ou à leur milieu
donne lieu à une responsabilité pénale.
Les opérations, installations, ouvrages et activités qui entraînent des prélèvements d'eau, des
modifications de niveau ou d'écoulement, ou des déversements, rejets, dépôts dans les eaux.
(article L 232 2 du code rural – art. 22 et 23 de la loi sur l'eau)
Délit d'homicide ou blessures involontaires
-
Concernant des équipements sportifs
Concernant le service d'éclairage public
Concernant la voirie
Concernant des travaux communaux
Concernant d’autres ouvrages communaux (banc public, élément d'ornement sur un monument
aux morts, puits communal…)
Délit de mise en danger d’autrui
L’article 223-1 du code pénal réprime les manquements graves et délibérés
à une obligation particulière de sécurité et de prudence imposée par la loi ou les règlement
qui pourraient être de nature à exposer quelqu'un à un risque immédiat de mort ou de blessure,
même si aucun accident n'en est résulté en réalité.
Malgré l'emploi du terme « délibéré » (qui signifie « en connaissance de cause »,
c'est à dire connaissance du risque que l'on fait courir en agissant ainsi ou en s'abstenant d'agir)
il s'agit d'un délit non intentionnel.
Le maire qui, sachant que les travaux envisagés sont périlleux, parce que situés à 10 mètres du
sol par exemple, prends le risque de les faire exécuter sans respecter les règles particulières
édictées en matière de sécurité du travail (harnais de sécurité, casque...) commet le délit.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Délits de faux en écriture
Le faux est une « altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice
et accomplie par quelque moyen que ce soit dans un écrit ou dans tout autre support
d'expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d'établir la preuve
d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques » (art 441 1 du code pénal).
- Le faux en écriture publique ou authentique (art. 441 4 du code pénal).
Les documents concernés sont essentiellement les actes d'état civil, y compris les extraits,
les délibérations de conseils municipaux, les listes électorales et les procès verbaux adressés
par les présidents des bureaux de vote, les livres, registres et pièces de comptabilité publique.
- Les faux documents administratifs (art 441 2 du code pénal).
Il doit s'agir d'un document délivré par une administration publique pour constater un droit,
une identité, une qualité, ou lorsqu'il s'agit d'accorder une autorisation. Les documents
concernés sont : la carte d'identité, de séjour, carte grise, permis de conduire, certificat
d'immatriculation, carte d'électeur, récépissé constatant l'accomplissement d'une formalité (de
déclaration d'exercice d'une activité ambulante par exemple), permis de construire, de
chasser...
- Les faux certificats et attestation (art 441 7 du code pénal).
Ce sont des écrits « contenant l’affirmation d'un fait, formulée par une personne qui en assume
la responsabilité et qui, par là même, prétend entraîner l'adhésion des tiers » (M. Vitu).
il faut en outre que le document soit signé, et établi au profit d'un tiers.
Le maire pourra se voir appliquer cette incrimination particulière lorsque sciemment il établit
un certificat ou une attestation relatant des faits matériellement inexacts, ou falsifie une
attestation ou certificat sincères à l'origine, ou fait usage d'une attestation ou certificat falsifiés
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Les infractions relatives à l'informatique et aux libertés
Toute information de données nominatives, et toute utilisation de fichier
de personnes physiques doit respecter les dispositions de la loi n°78 17 du 6 janvier 1978
relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
• Collecte des données :
l'article 27 de la loi impose une information des personnes auprès desquelles des données
nominatives sont recueillies.
• Mise en œuvre du fichier automatisé d'informations nominatives :
avant toute mise en œuvre le maire doit effectuer certaines formalités et en particulier
obtenir un avis préalable de la CNIL (Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés).
• Protection et confidentialité du fichier :
nécessité de « prendre toutes les précautions utiles pour préserver la sécurité
de ces informations et notamment empêcher qu'elles ne soient déformées, endommagées,
ou communiquées à des tiers non autorisés ».
Aussi convient il :
De bien recenser les traitements envisagés, mais aussi les utilisations d'appareils
faisant appel à des procédés informatiques de traitement de l'information
(autocommutateurs téléphoniques, cartes magnétiques d'accès ou de gestion des horaires,
messageries ou services télématiques...) ;
D'actualiser régulièrement la déclaration à la CNIL ;
Ne pas utiliser les données à des fins autres que celles déclarées, et imposer cette obligation
dans les conventions conclues avec des prestataires en cas de sous-traitance.
B.
celle où la responsabilité est liée
à l'exercice des pouvoirs de police
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
En application des articles L. 2212 1 et suivants
du code général des collectivités territoriales (C.G.C.T.),
le maire est chargé de la police municipale et de la police rurale
sur le territoire de la commune.
Au titre de ses pouvoirs de police générale,
il doit notamment assurer la sécurité publique dans les lieux publics
et réprimer les atteintes à la tranquillité publique.
Il est également chargé de la salubrité publique
et du soin de prévenir et de faire cesser les fléaux calamiteux
et les pollutions de toute nature.
En outre, le premier élu dispose de pouvoirs de police
portant sur des domaines particuliers (police des baignades, de la circulation,
des établissements recevant du public, immeubles menaçant ruine...)
Le domaine d'élection de cette responsabilité est l'environnement,
mais les maires l'encourent aussi dans d'autres secteurs.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Environnement et risques majeurs
- Réseaux d'assainissement et stations d'épuration :
Les rejets polluants d'un réseau d'assainissement communal exploité en régie
peuvent conduire un maire à être pénalement condamné pour pollution de l'eau
en tant que gestionnaire du réseau.
Mais le défaut ou l’insuffisance d'utilisation de ses pouvoirs de police pour prévenir
ou mettre fin à cette pollution peuvent également être retenus séparément
ou concomitamment pour l'incriminer.
- Déchets :
Les décharges irrégulières constituent un risque pénal important dès lors que le maire
ne prends pas les mesures nécessaires pour les rendre conformes à la réglementation
ou les supprimer, sachant que les décharges d'ordures, même sauvages,
constituent des installations classées.
- Tranquillité publique :
L'article L2212 2 du code général des collectivités territoriales charge le maire d'assurer
la tranquillité publique, en particulier en ce qui concerne les bruits de voisinage
(provenant d'activités professionnelles, de loisirs, de chantiers et les bruits domestiques)
qui troublent le repos des habitants.
- Dangers d'origine naturelle
- Risques majeurs :
Le décret n°90-218 du 11 octobre 1990 pris pour l'a pplication de l'article 21 de la loi n°87-565
du 22 juillet 1987 charge le maire d'assurer pour partie l'information des citoyens
sur les risques encourus.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
Urbanisme et construction
Le maire est le premier garant de la protection contre les risques d'incendie et de panique
dans les établissements recevant du public (ERP), et se trouve investi de responsabilités
importantes en matière d'urbanisme, aussi bien en ce qui concerne l'élaboration
de la réglementation locale que son application par la délivrance des autorisations d'occupation
du sol, ou le contrôle du respect de ces réglementations dans le cadre
des procédures instituées par le code de l'urbanisme.
• Les établissements recevant du public :
En premier lieu, l'ERP fait l'objet d'un permis de construire, délivré par le maire au nom de la commune
lorsque celle ci est dotée d'un POS.
Or ce permis sanctionne non seulement le respect des règles d'urbanisme mais aussi les règles de sécurité
propres à ce type d'établissement (art. L 421¬3, 8421 5 1, R 421 38 20, R 460 7 du code de l'urbanisme).
En outre, les modifications ou les travaux non soumis à permis de construire ne peuvent être exécutés
qu'après autorisation du maire et avis de la commission de sécurité
(art L 111 8 1 et R 123 23 du code de la construction).
Même si le constructeur n'a pas demandé cette autorisation, il suffit que le maire ait eu connaissance des travaux
et de la mise en service sans réagir, pour que sa responsabilité soit engagée en cas de sinistre.
En second lieu la responsabilité du maire peut résulter de sa compétence pour délivrer les certificats de conformité.
En troisième lieu la responsabilité du maire peut découler des pouvoirs de police spéciale dont il dispose
pour contrôler le respect de la réglementation par les ERP (art 8123 27 du code de la construction).
• Les permis de construire :
L'édification ou l'extension de bâtiments communaux est soumise, comme c'est le cas pour les particuliers,
à la délivrance d'un permis de construire.
En outre, ce permis doit être régulier.
V. LA RESPONSABILITE PENALE DU MAIRE
3. Cette responsabilité pénale générale peut être rangée
en deux grandes catégories
Equipements communaux
Citons le cas d'un maire déclaré coupable du délit de blessures involontaires au motif que,
responsable de la sécurité des skieurs sur les pistes de la station, il n'avait pas assuré
une protection suffisante à la base d'un pylône de remontée mécanique
(Cris. Crim. 18 janvier 1990 n°89 92873).
Manifestations festives
• Condamnation d'un maire à une peine d'amende pour insuffisance des mesures de sécurité
prises lors d'un tir de feu d'artifice, l'explosion intempestive d'une fusée ayant blessé
de nombreuses personnes. ( TC Montpellier23 déc. 1993).
• Mise en examen de deux maires du sud de la France pour imprudence et manquement
à une obligation de sécurité à la suite de deux accidents mortels survenus
lors d'une « abrivade » (manifestation taurine) correspondant à une tradition locale.
Conclusion
La peur du juge ne doit pas constituer un frein à l’action publique locale.
Conseils de prévention:
• la plus grande prudence quant à vos rapports d’intérêts avec votre
collectivité, ainsi que dans l’utilisation des deniers publics ;
• une surveillance attentive de l’état de vos équipements (en
particulier ceux susceptibles d’entraîner des atteintes à la sécurité
ou à l’environnement) ;
• dès la connaissance d’un dysfonctionnement : mettre en œuvre
dans les plus brefs délais, les mesures adaptées de nature à pallier
les déficiences, verbaliser les contrevenants si nécessaire en cas
d’infraction ;
• laisser des traces mêmes informelles qui montrent un plan d’action ;
• contracter une police d’assurance personnelle (payée sur les
deniers personnels du maire)
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