12.Résultats,part5 CopI

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Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
IV.4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue :CopI.
IV.4.1. Analyse bioinformatique de la protéine CopI.
Selon l’analyse bioinformatique, la protéine CopI (voir point IV.2.1) serait une protéine
bleue à cuivre dont la localisation serait périplasmique.
Les protéines bleues à cuivre.
Les protéines bleues à cuivre sont une grande famille de protéines impliquées dans le
transport des électrons. Les centres bleus à cuivre se rencontrent dans des petites protéines qui
portent un ion cuivrique unique (Lippard & Berg, 1997) et dans des protéines plus grandes
liant plus qu’un ion Cu, les oxydases multicuivre.
Les protéines bleues à cuivre ont des fonctions variées : nitrite réductase d’Achromobacter
xylosoxidans (Ho et al., 2003), auracyanin impliquée dans le transport d’électrons de la chaîne
photosynthétique de la bactérie Chloroflexus aurantiacus (Bond et al., 2001), laccases
localisées dans les hyphes d’ Aspergillus nidulans (Scherer et Fischer, 2001), galactose
oxydase (Taki et al., 2004), rusticyanine qui est un des principaux transporteur d’électrons de
la chaîne respiratoire d’Acidithiobacillus thiooxydans (Botuyan et al., 1996). Certaines sont
de fonction inconnue comme la protéine majoritaire des chloroplastes des feuilles d’épinards
et du concombre (Battistuzzi et al., 1998, Guss et al., 1996).
Alors que les composés simples du cuivre ont des coefficients d’extinction molaire de 5 à 10
M-1.cm-1, les protéines bleues à cuivre sont caractérisées par des bandes d’absorption aux
alentours de 600 nm beaucoup plus intenses, avec des coefficients d’extinction molaire
supérieurs à 3000 M-1.cm-1. Cette bande caractéristique aux alentours de 600nm est due à un
transfert de charge entre le ligand thiolate d’une cystéine, donneuse d’électrons, et le Cu(II)
qui est le receveur d’électrons. Elle est caractéristique des sites de liaison au cuivre de type I.
Le centre cuivre de type I est caractérisé par un seul atome de cuivre, coordonné par deux
histidines donneuses d’azote, une cystéine donneuse de soufre, et une longue liaison axiale
avec un ligand variable. Dans l’amicyanine et la plastocyanine par exemple, le ligand axial est
une méthionine (dont l’unité thioéther est reliée au cuivre). C’est une glutamine pour d’autres
protéines. D’autres protéines encore possèdent, en plus de la méthionine, un deuxième ligand
axial (un groupe carbonyle ou un résidu glycine par exemple). Nous retrouvons dans cette
troisième classe l’azurine (Lippart & Berg, 1997). Toutes ces protéines montrent pour la
coordination du cuivre un environnement tétraédrique déformé, des potentiels de réduction
relativement hauts (>250 mV) et comme expliqué ci-dessus, une bande intense d’absorption à
600nm caractéristique.
Plusieurs structures de protéines bleues à cuivre sont connues : l’azurine d’Alcaligenes
denitrificans (Baker, 1988), l’azurine de Pseudomonas putida (Chen et al., 1998), la
plastocyanine de Cyanobacterium phormidium laminosum (Bond et al., 1999) ou encore la
plastocyanine de Synechococcus sp. (Inoue et al., 1999.).
86
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
En dehors des centres de liaison de type I, on connaît d’autres sites de liaison au cuivre (figure
IV.38) :
•
Les centres cuivre de type II : leur géométrie est essentiellement plane, avec le cuivre
coordonné à l’azote de deux ou trois histidines et à un ligand oxygène (de l’eau). Ces
sites de type II sont plus ioniques que les types I et apparaissent dans des enzymes
catalysant des oxydations ou oxygénations. Le Cu(II) est lié dans un site de ce type
dans CzcE de C. metallidurans CH34 au Cu(II) (Zoropogui et al., 2008), et dans une
protéine qui lie la riboflavine (aussi appelée vitamine B2) (Smith et al., 2006).
•
Les centres cuivre de type III sont composés de deux atomes de cuivre, chacun
coordonné par trois résidus histidine. Ces centres sont présents dans certaines
oxydases et dans des protéines transporteuses d’oxygène, comme les catéchol
oxydases (Klabunde et al., 1998). Les sites de types III sont parfois à proximité d’un
site de type II, comme chez l’oxydase multicuivre CueO d’E. coli (qui porte aussi un
site de type I) (Li et al., 2007). CueO montrent un pic d’absorption autour de 300 nm,
ce pic étant dû aux sites de type III de liaison au cuivre (Sakurai & Kataoka, 2007)
Type I
Figure IV.38 : Types de liaison protéine-Cu.
Type II
Type II + III
Dans les oxydases multicuivre, la fonction du site de type I est de retirer un électron du
substrat grâce au potentiel élevé du site de type I, qui dépend en fait du ligand variable
impliqué dans ce site. Cet électron est alors transféré aux cuivres de type II/III avant d’arriver
à l’oxygène qui est l’accepteur final d’électrons (figure IV.39).
87
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Figure IV.39 : diagramme des potentiels redox des multicuivre-oxydases
(Sakurai & Kataoka, 2007).
Légende : les flèches pleines représentent les transferts électroniques du substrat à l’oxygène
et la modification du potentiel du site de type I lorsque la Met (qui est le ligand variable) est
remplacée par une Gln ou une Phe/Leu (flèches en pointillés).
Alignement multiple de CopI avec ses homologues proches :
Présence d’un motif MIEHEM chez CopI uniquement.
L’existence d’homologues de CopI, dans d’autres organismes, est révélée par le résultat d’un
NCBI blastP. Lorsque les homologues les plus proches de CopI, annotés comme des protéines
bleues à cuivre dans les bases de données, sont comparées à CopI de CH34 dans un
alignement multiple, certains résidus apparaissent très conservés (figure IV.40).
88
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Figure IV.40 : Alignement multiple de CopI à ses homologues proches considérés comme des
protéines bleues à cuivre.
Légende : une astérisque indique une conservation de l’acide aminé dans toutes les
séquences ; le code couleur évolue de l’absence de correspondance (bleu) à une
correspondance moyenne (vert) vers une correspondance élevée (orange) et parfaite (rouge) ;
les acides aminés de CopI de C. metallidudans CH34 sont notés en majuscules ; de haut en
bas, les organismes sont Polaromonas naphthalenivorans, Photobacterium profundum SS9,
Acidovorax sp., Aeromonas veronii bv sobria, Cupriavidus metallidurans CH34 et
Nitrosomonas eutropha C71.
89
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
L’alignement multiple de CopI montre que :
1. La région du signal d’expulsion périplasmique situé à l’extrémité N-terminale n’est
pas conservée (les sites de clivage de CopI sont schématisés par deux flèches rouges,
après deux Ala consécutives dans la structure primaire en position 20 et 21).
2. La cystéine et les acides aminés adjacents sont bien conservés dans toutes les
protéines homologues (encart noir). Cette cystéine est unique dans chacune des
protéines homologues à CopI.
3. Le motif MIEHEM de C. metallidurans (encart turquoise) n’est pas complètement
conservé chez ses homologues, seuls l’His31 et le Glu32 sont conservé. Ce motif a été
identifié dans l’analyse de la séquence primaire comme potentiellement impliqué dans
la liaison au cuivre (voir point IV.2.1).
IV.4.2. Purification de CopI.
Deux protocoles de purification ont été utilisés, ils sont décrits en détail au point III.4.2.
L’objectif de ces purifications était d’obtenir un minimum de 10 mg de protéine pure afin de
pouvoir réaliser des études fonctionnelles et structurelles.
Le premier protocole comportait une chromatographie d’affinité sur résine chélatée au cuivre
et un tamisage moléculaire, elle donne un rendement global de purification d’environ 500 µg
de CopI par litre de culture initiale.
Ce rendement faible s’explique par un taux d’expression bas chez E. coli. L’expression a pu
être légèrement améliorée en abaissant la température d’induction à 20°C. Plusieurs autres
facteurs ont été modulés (la biomasse initiale, le temps d’induction, la concentration en
inducteur, la concentration en antibiotique) sans amélioration de l’expression.
Un échantillon de CopI purifiée a été analysé par spectrométrie de masse (par Ruddy Wattiez,
UMH), et a permis de mesurer sa masse (14,615 kDa) qui correspond à celle de la protéine
mature clivée de son signal d’expulsion périplasmique.
Le faible rendement d’expression pourrait donc être lié à la localisation périplasmique de la
protéine CopI dans une cellule d’E. coli qui n’est pas adaptée à la surexpression d’une
protéine exogène dans son périplasme.
Lorsque la purification est effectuée à partir de la fraction périplasmique (point III.4.2), suivie
d’une chromatographie sur résine échangeuse d’ions, le rendement de purification est de 1,5
mg par litre de culture.
L’analyse par électrophorèse en conditions dénaturantes des préparations de CopI purifiée par
ces deux protocoles révèle des différences importantes. Dans la préparation provenant de la
colonne chélatée au Cu(II), la bande majoritaire correspond à la masse d’un dimère de CopI
(~30 kDa) alors que dans la préparation obtenue par chromatographie échangeuse d’ions (ou
dialysée contre de l’EDTA 200 mM), elle est à la hauteur attendue pour le monomère (~15
kDa) (figure IV.41).
90
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Figure IV.41 : Masse apparente de CopI en fin de purification.
Premie
38 kDa
28 kDa
17 kDa
14 kDa
Purification par chromatographie d’affinité
Purification par chromatographie échangeuse
pour le cuivre.
d’ions.
Légende : gel d’électrophorèse en conditions dénaturantes Bis-Tris NuPage 6-12 %
(INVITROGEN), marqueur See Blue Plus 2 (INVITROGEN), 10 µg de protéine déposée.
De plus, la préparation de CopI purifiée au moyen d’une chromatographie d’affinité pour le
cuivre a une coloration bleue intense après concentration de la protéine à 10 mg/ml. Cette
préparation a été dialysée contre du tampon contenant 200 mM d’EDTA et, après dialyse, la
solution contenant CopI concentré devient incolore.
91
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
IV. 4.3. Liaison de CopI avec le cuivre.
Mesures spectrales de CopI dans le visible :
CopI est une protéine bleue à cuivre.
Les protéines bleues à cuivre montrent un pic d’absorbance élevé à 600 nm. Ce pic est la
signature d’une liaison protéine-Cu de type I.
Comme attendu, CopI montre en présence de cuivre une bande d’absorption à 600 nm (figure
IV.42) Ceci confirme la formation d’une liaison de type I lorsque du Cu(II) est ajouté à la
protéine CopI.
Figure IV.42 : spectre de la protéine CopI en présence ou non de Cu(II).
Spectre UV-VIS de CopI à 1,6 µg/µl dans un
tampon Tris HCL 20 mM, pH 8.0., sans
Cu(II) ajouté.
Spectre UV-VIS de CopI à 1,6 µg/µl dans un
tampon Tris HCL 20 mM, pH 8.0 et 10 mM
de Cu(II) ajouté sous forme de Cu(NO3)2.
La bande à 280 nm correspond à la bande d’absorption des acides aminés aromatiques de la
protéine.
Le pic autour de 450 nm est présent dans d’autres protéines bleues à cuivre (comme la
rusticyanine). Sa présence pourrait s’expliquer par l’interaction entre le métal et un radical
phenoxyl, issu d’une tyrosine (Taki et al., 2004). CopI n’a cependant pas cet acide aminé.
L’addition d’ascorbate (qui réduit le Cu(II) en Cu(I)) à l’échantillon avec Cu(II), fait
disparaître les bandes d’absorption à 450 et 600 nm.
Lorsque l’échantillon qui contient du Cu(II) est dialysé , le spectre redevient plat (résultat non
présenté) : la liaison de type I disparaît ce qui montre que celle-ci est réversible.
92
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Degré d’oligomérisation de CopI : CopI dimérise en présence de Cu(II).
Nous avons observé par gel d’électrophorèse en conditions dénaturantes que CopI pouvait
montrer des masses différentes suivant qu’il soit ou non en contact avec du Cu(II) (voir figure
IV.41).
Il semble que la concentration en Cu(II) joue un rôle dans l’oligomérisation apparente de
CopI (figure IV.43).
Figure IV.43 : influence de la concentration en Cu(II) sur l’oligomérisation de CopI
0 mM
Cu(II)
10 mM
38 kDa
28 kDa
17 kDa
14 kDa
Légende : gel d’électrophorèse en conditions dénaturantes Bis-Tris NuPage 6-12 %
(INVITROGEN), marqueur See Blue Plus 2 (INVITROGEN), 1 µg de protéine déposée dans
chaque puit.
La proportion de la forme dimérique de CopI augmente graduellement avec la concentration
en Cu(II).
Lors de l’électrophorèse, nous observons systématiquement une bande inférieure à 14 kDa qui
correspond en fait des produits de protéolyse (voir « Spectrométrie de masse de CopI » cidessous). Ces produits de protéolyse dimérisent comme la protéine complète.
Après addition de DTT ou de β-mercaptoéthanol à un échantillon de CopI qui contenait du
Cu(II), le dimère de CopI disparaît totalement (résultat non présenté). Ceci suggère qu’un
pont disulfure pourrait se former entre les cystéines uniques de deux monomères.
Cependant, nous avons observé que la proportion monomère/dimère ne variait pas avec
l’exposition à l’oxygène de l’air. La cystéine de CopI est donc trop enfouie dans la structure,
trop peu accessible donc pour qu’il y ait formation spontanée de pont disulfure entre les 2
monomères par oxydation des cystéines.
Outre un pont disulfure, la dimérisation peut être due à une interaction très forte entre acides
aminés à l’interface entres sous-unités, cette interaction étant générée par l’addition de Cu(II).
L’agent réducteur qui agit indistinctement sur le Cu(II) et CopI réduit le Cu(II) en Cu(I) ce
qui empêche alors la formation du dimère. Un exemple de ce type d’interaction existe dans la
protéine PcoC qui dimérise en présence de Cu(I) via sa région hydrophobe riche en Met/His
qui est à la surface de la protéine (Wernimont et al., 2003).
93
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Un argument n’est pas en faveur de la formation d’un pont disulfure en présence de Cu(II) : il
y a une bande d’absorption à 600 nm caractéristique de l’échange d’électrons entre le thiolate
de la cystéine (qui ne peut être dans un pont disulfure dans sa forme ionisée) et le Cu(II).
Il faut en déduire que l’addition de Cu(II) à CopI provoque donc un remaniement structurel
important. Suite au déplacement de la cystéine vers l’extérieur de la protéine, soit il se forme
un pont disulfure, soit il se forme un domaine d’interaction protéine-protéine.
En l’état actuel de nos études, il n’est pas possible d’établir quel type d’interaction permet
l’oligomérisation de CopI.
Spectrométrie de masse de CopI :
Détermination de la masse de CopI.
Les études par spectrométrie de masse ont été réalisées en collaboration avec Guy
Vandenbussche (ULB). Ces études sont encore préliminaires et feront l’objet d’une répétition
pour validation avant publication.
Figure IV.44 : Spectre de masse de la protéine CopI, après désalage de l’échantillon par
chromatographie en phase inverse (ZipTip C18, Millipore).
Un premier spectre de masse de CopI a été enregistré dans des conditions dénaturantes (50 %
acétonitrile/ 1 % acide formique (v/v) - figure IV.44). Deux pics principaux apparaissent :
l’un à 14615 Da, qui correspond à la masse théorique de CopI dans sa forme maturée, l’autre
à 14685 Da, correspondant à une masse supplémentaire de 70 Da, soit une alanine qui est
clivée en position 20 (voir figure IV.40). Il semble donc que le clivage puisse avoir lieu après
l’une ou l’autre des Ala adjacentes.
94
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Les pics de plus faible masse (correspondant vraisemblablement à la bande de poids
moléculaire apparent plus bas que celle de CopI, figure IV.44) résultent d’une protéolyse
partielle : le pic à 13402,8 Da correspond à une perte des 12 premiers acides aminés Nterminaux, à 13332,1 Da des 13 premiers, à 13244,8 Da des 14 premiers et à 13074,8 Da des
19 premiers. Nous pouvons en déduire que la partie N-terminale de CopI mature semble
particulièrement sensible à la protéolyse.
CopI contient un atome de Cu « endogène » et peut lier un ion de Cu(II)
supplémentaire.
Les spectres ci-dessous sont enregistrés dans des conditions non-dénaturantes (acétate
d’ammonium 10 mM, pH 6.9). Les sels de métaux lourds ont été ajoutés en concentrations
croissantes à la solution de CopI.
Figure IV.45 : Spectres de CopI en présence de concentrations croissantes de Cu(II).
Légende : A. : CopI pure ; B. : CopI en présence de 0,7 équivalent molaire de Cu(II) ; C. :
CopI en présence de 1,4 équivalent molaire de Cu(II).
Dans ces conditions pour la protéine sans Cu(II) ajouté, les deux pics principaux de CopI sont
décalés d’exactement 63 Da (Fig.IV.45.A), ce qui correspond à la masse d’un ion cuivre. La
protéine native contient donc toujours un ion cuivre. Cet ion est lié à un site de forte affinité,
puisqu’il n’est pas éliminé par une dialyse contre de l’EDTA (200 mM).
Lorsqu’on ajoute à CopI 0,7 équivalent molaire de Cu(II), il apparaît un pic important décalé
de 63 Da supplémentaires (noté CopIA+ 2 Cu, figure IV.45.B). Ce pic augmente lorsque la
concentration en Cu(II) est plus élevée (Fig.IV.45.C).
Aucun pic supplémentaire n’apparaît en présence de concentrations supérieures en Cu(II). Il
n’est donc pas possible de former une association CopIA+ 3 Cu en ajoutant plus de Cu(II) et
CopI lie donc au maximum un ion Cu(II) en plus du Cu « endogène ».
95
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
CopI peut lier jusqu’à 3 atomes de Cu(I) en plus du Cu « endogène ».
Outre la liaison de CopI au Cu(II), nous avons testé la liaison de CopI au Cu(I). Le Cu(I) est
préparé au départ de Cu(II) en y ajoutant de l’ascorbate en excès. Le milieu est aussi par
conséquent réducteur.
Figure IV.46 : Spectres de CopI en présence de concentrations croissantes de Cu(I).
Légende : A. : CopI pure (avec ascorbate ajouté) ; B. : CopI en présence de 1,4 équivalent
molaire de Cu(I) ; C. : CopI en présence de 2,8 équivalent molaire de Cu(I).
En présence d’ascorbate, sans Cu ajouté, CopI possède toujours un atome de Cu « endogène »
lié (figure IV.46.A).
Les spectres après addition de 1,4 et 2,8 équivalent molaire de Cu(I) (figure IV.46.B et
IV.46.C) montrent que CopI peut lier au moins trois atomes de Cu supplémentaires en milieu
réducteur, en plus de l’atome endogène. Cependant, à cette haute concentration en Cu(I)
ajouté, la qualité du spectre diminue dû à la présence des ions cuivreux en solution rendant
l’analyse plus difficile. On peut cependant estimer qu’en plus du site de liaison à l’atome de
Cu « endogène » et du site de type I, CopI possèderait deux sites de liaison spécifique du
Cu(I).
La liaison CopI-Cu est spécifique.
Les protéines ayant de manières générale la capacité de lier les ions métalliques lourds, il est
important de tester la spécificité de la liaison CopI-Cu(II), Or, dans les conditions
expérimentales identiques, CopI ne lie ni le Zn(II) ni l’Ag(I) (résultats non présentés). Par
conséquent, tant la fixation du Cu(II) que du Cu(I) à la protéine CopI est liée à la présence de
sites spécifiques.
Un contrôle a été réalisé avec une autre protéine : le lysozyme (masse de 15.5 kDa) qui a
montré que les interactions entre les liens peptidiques et le Cu(II) ne se visualisaient pas par
spectrométrie de masse pour une protéine de masse identique à CopI, toujours dans des
conditions expérimentales identiques.
96
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Conclusions sur les mesures spectrales.
CopI possède un ion Cu de très grande affinité :
•
•
Cet ion ne peut être libéré que par une dénaturation partielle de CopI ; une dialyse
contre de l’EDTA ne permettant pas d’extraire cet ion Cu de la structure.
La valence de cet ion est inconnue.
L’addition de Cu(II) à CopI provoque l’apparition d’une bande d’absorption intense à
600 nm, qui correspond à une liaison de type I entre le Cu(II) et la protéine. CopI ne lie
pas plus de un ion Cu(II) en plus du Cu « endogène ».
CopI possède au moins deux sites supplémentaires de liaison au Cu capables de lier le
Cu(I) et non pas le Cu(II).
IV.4.4. Analyse structurale de CopI.
Modélisation de CopI par remplacement moléculaire :
La plastocyanine de Synechococcus sp comme modèle.
Différentes structures de protéines bleues à cuivre sont connues, la plastocyanine de
Synechococcus sp. (code pdb 1BXU) est celle qui est la plus proche de CopI.
Figure IV.47 : Alignement multiple de CopI à la plastocyanine.
Légende : une astérisque indique la conservation de l’acide aminé dans toutes les séquences ;
le code couleur évolue de l’absence de correspondance (bleu) à une correspondance moyenne
(vert) vers une correspondance élevée (orange) et parfaite (rouge) ; les acides aminés de
CopI de C. metallidudans CH34 sont notés en majuscules ; ceux de la plastocyanine de
Synechococcus sp. sont notés en minuscules.
97
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
La plastocyanine est plus courte que CopI qui possède un domaine central absent de la
plastocyanine. L’identité entre les deux protéines est de 61 % et la conservation est concentrée
dans la partie C-terminale où se trouve le domaine de liaison de type I (figure IV.47).
Ceci a permis de modéliser la protéine CopI par remplacement moléculaire au départ de la
structure connue de la plastocyanine de Synechococcus sp. Cette modélisation a été réalisée
par Cédric Beauvois (Institut de Recherche Microbiologiques Jean-Marie Wiame) au moyen
du logiciel « modeller 9v1 ».
Figure IV.48 : Alignement tridimensionnel du modèle de CopI à la plastocyanine.
Légende : CopI est en vert et la plastocyanine en rouge, l’alignement tridimensionnel est
réalisé par le logiciel PyMol.
La comparaison tridimensionnelle montre que la région en feuillet-β est bien conservée
(figure IV.48). Ce qui distingue ces protéines c’est la structure en hélice ou en boucle qui
apparaît au milieu de la séquence primaire (à droite sur les strctures ci-dessus). Cette région
correspond au domaine central de la séquence primaire de CopI qui n’est pas conservé chez la
plastocyanine (figure IV.47).
L’accessibilité des acides aminés au solvant (déterminée grâce au logiciel pdb view) montre
que la région la plus structurée de CopI (en feuillet-β) est la moins accessible au solvant.
Inversement, la boucle de CopI est très accessible au solvant (résultat non présenté).
98
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Mise en évidence des acides aminés qui pourraient être impliqués dans la
liaison au Cu(II) ou au Cu(I).
La littérature décrit que la liaison entre une protéine et l’ion Cu(I) ou Cu(II) impliquait des
acides aminés spécifiques comme des Asp, His, Met, Glu, Tyr (Arnesano et al., 2003), des
Gly, Cys, His (Chen et al., 1998) ou encore des cystéine seules (Solioz & Stoyanov, 2003).
La figure IV.49 montre la chaîne C-α et uniquement les chaînes latérales des résidus d’intérêt
afin de mieux les visualiser (image pdb view).
Figure IV.49 : Acides aminés potentiellement impliqués dans les liaisons au Cu.
Légende : les acides aminés d’intérêts sont colorés de façon différenciées : Cys en vert, Asp et
Glu (aa acides) en rouge, Gln et Asn (aa amidés) en jaune, His en bleu. La position des
acides aminés dans la séquence primaire est indiquée à côté de l’aa correspondant.
Lorsque les acides aminés potentiellement impliqués dans la liaison au Cu sont mis en
évidence par coloration (figure IV.49), deux régions apparaissent : la première est celle
avoisinant la cystéine (Cys 86) où apparaissent deux histidines (His 31 et His 91), deux
glutamines (Gln 22 et Gln 69) et deux méthionines (Met 96 et Met 33), cette région est celle
du site de liaison de type I. Une seconde zone, la plus accessible au solvant, forme une boucle
riche en Met, His et Glu (de Glu 40 à Asn 60), cette région pourrait être celle de liaison au
Cu(I).
99
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Recherche des acides aminés participant au site de type I.
Une autre approche pour visualiser les sites potentiels de liaison entre une protéine et un ion
est d’utiliser un logiciel (PyMol) qui suggère quels résidus sont impliqués dans la liaison au
ligand (figure IV.50).
Figure IV.50 : Recherche des acides aminés de CopI impliqués dans une liaison au ligands.
Légende : les acides aminés d’intérêts sont colorés de façon différenciée : Cys en bleu, Glu en
orange, His en rouge, Met en turquoise.
Autour de la cystéine, les histidines 31 et 91 sont impliquées dans la liaison de type I. Le 4ème
ligand prédit être une méthionine, qui peut être la Met 96 ou la Met 28 toutes deux pouvant
entrer dans la structure tétraédrique du site de type I.
La figure IV.50 montre aussi que deux Glu en position en 30 et 32, à proximité spatiale du
site de type I, sont présumées impliquées dans une interaction avec le Cu. L’orientation des
chaînes latérales est telle qu’il n’est pas concevable que les chaînes latérales de ces deux
acides aminés interviennent directement dans la stabilisation du site de type I. Ils pourraient
donc être impliqués dans la stabilisation du Cu « endogène ».
Recherche des acides aminés participants aux sites de liaison CopI-Cu(I).
L’étude structurale de CopC de P. Syringae a montré que cette protéine de masse similaire à
CopI (10535 Da) porte un site spécifique de liaison au Cu(I) (motif MXXMXXMXHXXM)
distinct du site de liaison au Cu(II) (motif His1-Glu27-Asp89-His91) (Arnesano et al., 2003).
La boucle propre à CopI est riche en acides aminés impliqués dans la liaison aux ions Cu(I)
(figure IV.49). La structure tertiaire de cette boucle présente d’ailleurs des similitudes avec le
motif riche de liaison au Cu(I) de CopC de P. syringae (voir figure I.16, Arnesano et al.,
2003). Le logiciel pyMol permet de sélectionner cette boucle de CopC et de l’aligner avec la
structure complète de CopI (figure IV.51).
100
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Figure IV.51 : Alignement de la région riche en Met/His de CopC de P. syringae à CopI.
Légende : CopI est colorée en vert et CopC en bleu.
On observe que la boucle de CopI se superpose partiellement à celle de CopC. La boucle de
CopI est en effet beaucoup plus grande que celle de CopC : ceci pourrait expliquer que CopC
lie un seul ion Cu(I) contre au moins trois à CopI.
Hypothèse de fonction de CopI.
La capacité de CopI à lier au moins quatre ions Cu dont un « endogène » en fait un cas
original par rapport aux cas connus de protéines bleues à cuivre de petite taille (Chen et al.,
1998, Bond CS et al., 1999, Guss et al., 1996, Lippard & Berg, 1997) qui ne lie
habituellement qu’un seul ion Cu. La fonction la plus courante des protéines bleues à cuivre
est le transport d’électrons, comme c’est le cas pour les ferrodoxines.
Les protéines de masse plus élevées, comme les laccases ou multicuivre oxydases, présentent
plusieurs sites de liaison au cuivre (Li et al., 2007, Piontek et al., 2002) et ont une activité
catalytique à proprement parlé comme l’oxydation du Cu(I) en Cu(II) ou l’oxydation de
sidérophores (Roberts et al., 2002, Grass et al., 2004).
Pour CueO de E. coli par exemple, le site de type I est proche de deux sites de type II et d’un
site de type III (Roberts et al., 2002 – figure IV.52).
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Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
Figure IV.52 : Géométrie des sites de liaison au cuivre de CueO de E. coli
(adapté de Roberts et al., 2002).
Légende : les atomes de Cu sont en turquoise, les atomes d’oxygène en rouge, les atomes
d’azote en bleu et les atomes de soufre en jaune. Le site Cu du site de type I (noté T1CU) est
lié à l’His-443, l’His-503, la Cys-500 et la Met 510. Le centre de type II (noté T2CU) estlié à
l’His-101, l’His-446 et une molécule d’eau. Les sites de type III noté CU2 et CU3 sont lié à l’
His-103, His-141, His-501, et His-143, His-448, His-499 respectivement.
Une hypothèse est donc que CopI porte à proximité du site de type I un autre site de liaison au
Cu, en particulier le site porteur du Cu « endogène ». Cet ion serait stabilisé par les deux
glutamates (30 et 32), connus pour pouvoir stabiliser d’autre ions divalents, comme le Pb(II)
dans la protéine PbrA (Borremans et al., 2001). Dans la structure tridimensionnelle, la boucle
potentiellement impliquée dans la liaison au Cu(I) est contiguë au site de liaison du Cu
« endogène ». Dès lors, CopI pourrait avoir un site similaire à celui rencontré dans les
laccases où les ions Cu se retrouvent tous à quelques ångström de distance (figure IV.52).
Notre hypothèse de fonction pour CopI est donc qu’elle a une activité enzymatique qui
implique des transferts électroniques, à l’image des laccases, et pas uniquement un rôle
de transport d’électrons, comme la plupart des protéines bleues à cuivre.
Une analyse structurale (par exemple par diffraction rayons-X) sera nécessaire pour identifier
les domaines de liaison au Cu « endogène » ou ajouté à CopI. Elle permettrait de positionner
le Cu « endogène » et de visualiser le site de type I occupé par un ion Cu(II) mais aussi de
vérifier si le domaine riche en Met/His est bien celui de fixation des ions Cu(I).
L’activité oxydase de CopI peut être testée de la même façon que celle de CueO a été
mesurée, soit au moyen d’un oxygraphe qui mesure la consommation de l’oxygène dissous
qui est proportionnelle à la conversion du Cu(I) en Cu(II) (Singh et al., 2004).
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