Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
86
IV.4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue :CopI.
IV.4.1. Analyse bioinformatique de la protéine CopI.
Selon l’analyse bioinformatique, la protéine CopI (voir point IV.2.1) serait une protéine
bleue à cuivre dont la localisation serait périplasmique.
Les protéines bleues à cuivre.
Les protéines bleues à cuivre sont une grande famille de protéines impliquées dans le
transport des électrons. Les centres bleus à cuivre se rencontrent dans des petites protéines qui
portent un ion cuivrique unique (Lippard & Berg, 1997) et dans des protéines plus grandes
liant plus qu’un ion Cu, les oxydases multicuivre.
Les protéines bleues à cuivre ont des fonctions variées : nitrite réductase d’Achromobacter
xylosoxidans (Ho et al., 2003), auracyanin impliquée dans le transport d’électrons de la chaîne
photosynthétique de la bactérie Chloroflexus aurantiacus (Bond et al., 2001), laccases
localisées dans les hyphes d’ Aspergillus nidulans (Scherer et Fischer, 2001), galactose
oxydase (Taki et al., 2004), rusticyanine qui est un des principaux transporteur d’électrons de
la chaîne respiratoire d’Acidithiobacillus thiooxydans (Botuyan et al., 1996). Certaines sont
de fonction inconnue comme la protéine majoritaire des chloroplastes des feuilles d’épinards
et du concombre (Battistuzzi et al., 1998, Guss et al., 1996).
Alors que les composés simples du cuivre ont des coefficients d’extinction molaire de 5 à 10
M
-1
.cm
-1
, les protéines bleues à cuivre sont caractérisées par des bandes d’absorption aux
alentours de 600 nm beaucoup plus intenses, avec des coefficients d’extinction molaire
supérieurs à 3000 M
-1
.cm
-1
. Cette bande caractéristique aux alentours de 600nm est due à un
transfert de charge entre le ligand thiolate d’une cystéine, donneuse d’électrons, et le Cu(II)
qui est le receveur d’électrons. Elle est caractéristique des sites de liaison au cuivre de type I.
Le centre cuivre de type I est caractérisé par un seul atome de cuivre, coordonné par deux
histidines donneuses d’azote, une cystéine donneuse de soufre, et une longue liaison axiale
avec un ligand variable. Dans l’amicyanine et la plastocyanine par exemple, le ligand axial est
une méthionine (dont l’unité thioéther est reliée au cuivre). C’est une glutamine pour d’autres
protéines. D’autres protéines encore possèdent, en plus de la méthionine, un deuxième ligand
axial (un groupe carbonyle ou un résidu glycine par exemple). Nous retrouvons dans cette
troisième classe l’azurine (Lippart & Berg, 1997). Toutes ces protéines montrent pour la
coordination du cuivre un environnement tétraédrique déformé, des potentiels de réduction
relativement hauts (>250 mV) et comme expliqué ci-dessus, une bande intense d’absorption à
600nm caractéristique.
Plusieurs structures de protéines bleues à cuivre
sont connues : l’azurine d’Alcaligenes
denitrificans (Baker, 1988), l’azurine de Pseudomonas putida (Chen et al., 1998), la
plastocyanine de Cyanobacterium phormidium laminosum (Bond et al., 1999) ou encore la
plastocyanine de Synechococcus sp. (Inoue et al., 1999.).
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
87
En dehors des centres de liaison de type I, on connaît d’autres sites de liaison au cuivre (figure
IV.38) :
Les centres cuivre de type II : leur géométrie est essentiellement plane, avec le cuivre
coordonné à l’azote de deux ou trois histidines et à un ligand oxygène (de l’eau). Ces
sites de type II sont plus ioniques que les types I et apparaissent dans des enzymes
catalysant des oxydations ou oxygénations. Le Cu(II) est lié dans un site de ce type
dans CzcE de C. metallidurans CH34 au Cu(II) (Zoropogui et al., 2008), et dans une
protéine qui lie la riboflavine (aussi appelée vitamine B2) (Smith et al., 2006).
Les centres cuivre de type III sont composés de deux atomes de cuivre, chacun
coordonné par trois résidus histidine. Ces centres sont présents dans certaines
oxydases et dans des protéines transporteuses d’oxygène, comme les catéchol
oxydases (Klabunde et al., 1998). Les sites de types III sont parfois à proximité d’un
site de type II, comme chez l’oxydase multicuivre CueO d’E. coli (qui porte aussi un
site de type I) (Li et al., 2007). CueO montrent un pic d’absorption autour de 300 nm,
ce pic étant dû aux sites de type III de liaison au cuivre (Sakurai & Kataoka, 2007)
Figure IV.38 : Types de liaison protéine-Cu.
Type I Type II Type II + III
Dans les oxydases multicuivre, la fonction du site de type I est de retirer un électron du
substrat grâce au potentiel élevé du site de type I, qui dépend en fait du ligand variable
impliqué dans ce site. Cet électron est alors transféré aux cuivres de type II/III avant d’arriver
à l’oxygène qui est l’accepteur final d’électrons (figure IV.39).
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
88
Figure IV.39 : diagramme des potentiels redox des multicuivre-oxydases
(Sakurai & Kataoka, 2007).
Légende : les flèches pleines représentent les transferts électroniques du substrat à l’oxygène
et la modification du potentiel du site de type I lorsque la Met (qui est le ligand variable) est
remplacée par une Gln ou une Phe/Leu (flèches en pointillés).
Alignement multiple de CopI avec ses homologues proches :
Présence d’un motif MIEHEM chez CopI uniquement.
L’existence d’homologues de CopI, dans d’autres organismes, est révélée par le résultat d’un
NCBI blastP. Lorsque les homologues les plus proches de CopI, annotés comme des protéines
bleues à cuivre dans les bases de données, sont comparées à CopI de CH34 dans un
alignement multiple, certains résidus apparaissent très conservés (figure IV.40).
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
89
Figure IV.40 : Alignement multiple de CopI à ses homologues proches considérés comme des
protéines bleues à cuivre.
Légende : une astérisque indique une conservation de l’acide aminé dans toutes les
séquences ; le code couleur évolue de l’absence de correspondance (bleu) à une
correspondance moyenne (vert) vers une correspondance élevée (orange) et parfaite (rouge) ;
les acides aminés de CopI de C. metallidudans CH34 sont notés en majuscules ; de haut en
bas, les organismes sont Polaromonas naphthalenivorans, Photobacterium profundum SS9,
Acidovorax sp., Aeromonas veronii bv sobria, Cupriavidus metallidurans CH34 et
Nitrosomonas eutropha C71.
Chapitre IV : Résultats, 4. Caractérisation d’une protéine Cop de fonction inconnue : CopI.
90
L’alignement multiple de CopI montre que :
1. La région du signal d’expulsion périplasmique sità l’extrémité N-terminale n’est
pas conservée (les sites de clivage de CopI sont schématisés par deux flèches rouges,
après deux Ala consécutives dans la structure primaire en position 20 et 21).
2. La cystéine et les acides aminés adjacents sont bien conservés dans toutes les
protéines homologues (encart noir). Cette cystéine est unique dans chacune des
protéines homologues à CopI.
3. Le motif MIEHEM de C. metallidurans (encart turquoise) n’est pas complètement
conservé chez ses homologues, seuls l’His31 et le Glu32 sont conservé. Ce motif a été
identifié dans l’analyse de la séquence primaire comme potentiellement impliqué dans
la liaison au cuivre (voir point IV.2.1).
IV.4.2. Purification de CopI.
Deux protocoles de purification ont été utilisés, ils sont décrits en détail au point III.4.2.
L’objectif de ces purifications était d’obtenir un minimum de 10 mg de protéine pure afin de
pouvoir réaliser des études fonctionnelles et structurelles.
Le premier protocole comportait une chromatographie d’affinité sur résine chélatée au cuivre
et un tamisage moléculaire, elle donne un rendement global de purification d’environ 500 µg
de CopI par litre de culture initiale.
Ce rendement faible s’explique par un taux d’expression bas chez E. coli. L’expression a pu
être légèrement améliorée en abaissant la température d’induction à 20°C. Plusieurs autres
facteurs ont été modulés (la biomasse initiale, le temps d’induction, la concentration en
inducteur, la concentration en antibiotique) sans amélioration de l’expression.
Un échantillon de CopI purifiée a été analysé par spectrométrie de masse (par Ruddy Wattiez,
UMH), et a permis de mesurer sa masse (14,615 kDa) qui correspond à celle de la protéine
mature clivée de son signal d’expulsion périplasmique.
Le faible rendement d’expression pourrait donc être lié à la localisation périplasmique de la
protéine CopI dans une cellule d’E. coli qui n’est pas adaptée à la surexpression d’une
protéine exogène dans son périplasme.
Lorsque la purification est effectuée à partir de la fraction périplasmique (point III.4.2), suivie
d’une chromatographie sur résine échangeuse d’ions, le rendement de purification est de 1,5
mg par litre de culture.
L’analyse par électrophorèse en conditions dénaturantes des préparations de CopI purifiée par
ces deux protocoles révèle des différences importantes. Dans la préparation provenant de la
colonne chélatée au Cu(II), la bande majoritaire correspond à la masse d’un dimère de CopI
(~30 kDa) alors que dans la préparation obtenue par chromatographie échangeuse d’ions (ou
dialysée contre de l’EDTA 200 mM), elle est à la hauteur attendue pour le monomère (~15
kDa) (figure IV.41).
1 / 17 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !