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Site Présence de la littérature - Dossier Beckett © SCÉRÉN-CNDP, 2010.
Objectifs
- Sans a priori, travailler sur la structure de la pièce, son morcellement en unités signifiantes,
à partir d’éléments choisis, du plus traditionnel au plus stylistique, afin d’établir un
programme de répétitions. Travail de régie qui devrait mener à l’esquisse de voies
dramaturgiques.
- Chaque élément portera un titre significatif, soit une citation de Beckett, soit un titre
inventé par les élèves.
- Objectif méthodologique : apprendre à parcourir plusieurs fois une œuvre, rapidement,
à en retrouver les moments clefs, à maîtriser sa structure.
On proposera donc aux élèves (individuellement ou en groupe) de travailler sur la structure
de la pièce à partir des éléments repérables suivants :
- soit les entrées et les sorties de Clov, de Nell et de Nagg. : si Clov est le seul à sortir de scène,
Nell et Nagg s’abolissent de la scène dans leurs poubelles, métaphore des coulisses de la vie ;
- soit la nature de la prise de parole des personnages, monologues ou dialogues, avec ou sans
tirades ;
- soit les répétitions : de thèmes et leitmotiv. On sera particulièrement attentif aux thèmes
suivants : la fin, la faim, la famille, le corps et ses manifestations ; ces différents ensembles,
non exhaustifs, devraient permettre de faire saillir les effets de symétrie et de répétitions avec
variations constitutives de la pièce.
Bilan
Une structure musicale et rythmique
Contrairement aux idées reçues, qui viennent le plus souvent d’une lecture des œuvres
ultérieures de Beckett, et qui conduisent à surinterpréter Fin de partie comme une pièce
circulaire et fermée sur elle-même, on pourra remarquer que c’est une œuvre organisée sur
un système de symétries, d’analogies et de répétitions. La composition de Fin de partie est
peut-être avant tout musicale, rythmique, ce qui lui permet une avancée du début à la fin, par
un système de variations subtiles.
Structure physique et métaphysique de la pièce
Le travail sur la structure devrait aussi révéler une composition qui prend en compte la
contingence humaine : chacun de nous est un être-pour-la-mort (cf. la terminologie utilisée
par le philosophe Heidegger), dépendant du temps qui passe (Nell semble mourir, de
vieillesse, en scène), un être qu’use le frottement d’un rapport qui patine : Clov ne passe-t-il
pas subrepticement de l’obéissance à la désobéissance ?
Structure imaginaire et fantasmatique de la pièce
Enfin, pièce d’un écrivain qui savait quelque chose de l’inconscient, Fin de partie déploie
aussi des possibilités dans les récits de la pièce : peut-être Clov va-t-il partir pour rejoindre,
ou non, l’enfant, qui n’est peut-être qu’un double de lui-même égaré dans un espace-temps
improbable, et dont a parlé Hamm ? Hamm, qui est peut-être lui-même cet enfant ?
Les répétitions, le mélange des discours de rêve, des narrations, des bribes de souvenirs, font
advenir cette « inquiétante étrangeté » sur laquelle Freud a écrit un article célèbre, et qui
déploie ce qu’est le fantastique, cette perception biaisée, erronée mais pourtant vécue par
chacun d’entre nous par moments, de la réalité.
Peut-être Hamm va-t-il, sous son suaire, continuer son calvaire, ou finir. Rien n’est arrêté,
rien n’est dénoué, mais un certain nombre de possibilités sont ouvertes, la partie n’est pas
finie, et peut, sous la même forme ou une autre, se poursuivre ou recommencer.