Réponses détaillées interview LUXE Christine Delétang

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CARACTERISTIQUES ET NOUVELLES STRATEGIES DES MARQUES DE LUXES
Développement détaillé des réponses apportées par Chistine Delétang lors de son interview
avec le Labo Des Tendances
« Si l’on cherche des critères qui définissent ce qu’est une marque de luxe, nous en
trouverions des multiples :
- Un prix relatif largement supérieur
- La puissance de l'image des marques
- La sélectivité de la distribution
- Le prestige de la clientèle
- L'enracinement historique dans une culture singulière
- La préservation d'un savoir-faire traditionnel
- La localisation de la fabrication
- La créativité qui donne naissance à de nouveaux produits
En les reprenant 1 par 1, on peut considérer qu’ils sont tous, à des degrés divers, avérés.
- Le prix: Il fait partie intégrante de la notion de luxe. Un prix fort orientera une
clientèle aisée, et cette sélection par le prix, en empêchant l’accès à la clientèle de
masse, rendra le produit rare, et donc souvent phantasmé.
Ex : Pourquoi certaines gammes de produits ne seront jamais soldées ?
Pourquoi, des marques telles que Christian Dior ou autres créateurs de renommée
internationale, ne réservent leurs promotions qu’à ce qu’elles nomment très
officiellement « soldes privées », et qui restent uniquement accessibles à leur
clientèle habituelle, conviée par bristol à accéder à leurs magasins.
-
L’image de la marque : Souvent apportée par la publicité, elle-même relayée par des
vedettes internationales de préférence, vedettes elles-mêmes choisies pour ce qu’elles
représentent auprès du public.
On orientera alors cette tête d’affiche qui deviendra l’image de la marque, selon la
clientèle-cible visée par le service commercial …. Tel grand sportif dûment médaillé
se retrouvera emblème d’une marque de sport, une autre actrice deviendra l’égérie
d’un grand joaillier, etc…
-
La sélectivité de la distribution : Pour être distributeur d’une marque de luxe, les
critères sont drastiques. Ainsi, une petite ville comme Saint-Tropez pourra obtenir
sans problème réel des antennes des plus grands noms, tandis que telle autre ville de
banlieue sera de fait éliminée. La sélection, à ce niveau se poursuivra sur le nombre
de dépositaires de la marque. Deux parfumeurs positionnés géographiquement dans un
secteur réduit, devront se partager les marques. (Toujours cette obsession de rareté).
Avant d’autoriser la vente de sa marque, un représentant se rendra sur place afin
d’estimer si le magasin correspond aux critères commerciaux de l’enseigne.
Le design et la notoriété seront autant de paramètres pris en considération pour l’octroi
ou non du dépôt de cette même marque.
-
Le prestige de la clientèle : Peut-être le critère le plus significatif dans la classification
« Luxe » d’une marque. Ainsi, celles-ci sont prêtes à prêter leurs produits à des
célébrités, simplement pour le retentissement de la photo qui paraitra le lendemain
dans la presse.
Les grandes manifestations, tel le Festival de Cannes, voient la venue des plus grands
joailliers de la Place Vendôme qui proposent leurs parures et autres bijoux de très
grand prix, gratuitement aux vedettes montant le fameux tapis rouge. Cela leur vaut
parfois de vivre des situations cocasses, telle grande vedette refusant de rendre ces
prêts sous prétexte de la retombée économique de la publicité qu’elle leur a apportée.
On verra aussi les grands noms initier des soirées dûment orchestrées au cours
desquelles les plus célèbres personnages de tous bords (cinéma, politique ou finances)
seront conviés, des cadeaux somptueux seront également offerts, la condition d’entrée
restant la notoriété des invités.
-
La localisation de fabrication : efficace à plus d’un titre. De façon quasi endémique
dans certains secteurs. Ainsi l’Allemagne reste fer de lance pour ce qui concerne
l’automobile, la Suisse pour l’horlogerie, la France pour la Haute Couture ….
Et peu importe la gamme du produit, son origine de fabrication apportera la notion de
luxe et il sera important que cette origine soit visible.
Ainsi les commerciaux d’Hermès savent bien que la clientèle asiatique, dont la culture
veut que leur visite à Paris soit suivie d’offres de cadeaux à la famille et aux amis à
leur retour, exigeront que leurs achats soient emballés avec un soin particulier, et que
la mention « Paris France » soit bien visible sur ceux-ci.
Le cadeau sera alors considéré comme prestigieux, et donc prouvera la considération
portée à son destinataire.
-
La créativité permanente : Obligatoire dans ce secteur qui bouge de plus en plus vite.
Ne pas tomber dans le vieillot, et donc attirer une nouvelle clientèle plus jeune,
exigeante, et qui a la particularité de se lasser vite.
L’exemple le plus emblématique pourrait être Karl Lagerfeld.
En charge de la maison Chanel, dont l’image du fameux tailleur restait attachée à une
dame très chic, bien sûr, mais vieillissante.
En quelques années, ce créateur de génie a résolument rajeuni l’image de Chanel,
proposant aussi bien des Moon Boots pour la neige (impensable pour Mme
Chanel),conservant sa clientèle moins avangardiste dans la poursuite de ses tailleurs
dont le style fait fureur, les petites-filles ne craignant pas de chiper la veste de leur
grand-mère pour la porter avec leur jean déchiré ….
« Même si certaines marques continuent de cibler une certaine élite sociale, la grande
majorité des représentants du luxe a élargi son champ d'investigation et tente de
démocratiser ses produits auprès du plus grand nombre. C'est le cas des griffes de Luxe
qui créent une galaxie de produits dérivés et/ou associés (parfums, accessoires de mode,
montres, maroquinerie) pour viser une clientèle plus large. Malgré l'opportunité
financière que représente ce positionnement (Les produits dérivés servent souvent à
financer la création), le risque est d'affaiblir l'image de marque telle qu'elle était perçue les
clients historiques pour viser une clientèle plus large. »
(EIEM Paris – Marketing stratégique)
En effet, de plus en plus de grands noms de la cosmétique vont créer leur propre « sousmarque », celle-ci pouvant devenir l’essentiel de leur ressource financière. Ex : Bourgeois
vendu dans toutes les grandes surfaces, et qui n’est autre que Chanel …
Ou encore Christian Lacroix, qui, désirant acquérir le label de Haute Couture, a débuté ses
premiers défilés du même nom dans des conditions financières périlleuses mais
incontournables pour accéder à cette catégorie rare mais tellement prestigieuse !
L’Oréal a réussi le tour de force de s’implanter de façon incontournable sur le marché très
fermé car très protégé, des Etats-Unis.
Débutant par l’invention de teinture pour cheveux, reprenant ensuite « Monsavon », il crée
ses propres laboratoires, possédant ses ingénieurs et laborantins, et commercialise les
premiers produits cosmétologiques à une époque où la demande était émergeante et la
concurrence quasi nulle.
Les femmes américaines se sont tout naturellement jetées sur ces produits, et le bouche à
oreille puis la publicité ont fait le reste.
Les gains ainsi obtenus ont été réinvesti dans la recherche, permettant la création de
nouveaux produits, de nouvelles cibles (les hommes, notamment)…
La marque joue avec succès sur les deux tableaux : la vente en grande surface avec des
produits qui restent abordables, et l’utilisation de publicité copiée sur les marques de
grand luxe, (Jane Fonda, égérie de la marque est le symbole type), donnant ainsi
l’impression / occasion au grand public de pouvoir acquérir ce que les célébrités de ce
monde achètent.
Alors bien sûr, les nouveaux acheteurs relancent le marketing.
Les nouveaux acheteurs venant des pays émergeants, dont chacun sait bien qu’ils sont les
marchés de demain.
La Chine, avec une nouvelle classe à fort pouvoir d’achat, la Russie et le continent indien
sont les clients vers lesquels les grandes marques se tournent. Sans oublier le continent
sud-américain dont l’économie repart et qui laisse entrevoir des possibilités de marché
jusque-là insoupçonnées. »
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