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Quel est l’impact de la crise sur l’économie réelle ?
Le chômage en hausse. La crise financière mondiale qui sévit depuis plus d'un an provoque le ralentissement de l'économie
française et le chômage s'est brutalement dégradé au mois d'août, enregistrant sa plus forte hausse mensuelle depuis mars
1993 : 41 300 demandeurs d'emplois en plus. "La crise financière a des conséquences, elle en a déjà sur la croissance et en
aura forcément dans les mois qui viennent sur le niveau de l'emploi, c'est directement lié", a confirmé Luc Chatel, porte-
parole du gouvernement, mardi 30 septembre. [...]
La croissance française a déjà été négative au deuxième trimestre (-0,3 %) et l'activité a fortement décéléré cet été. Pour
Marc Touati, directeur des études économiques de la société de Bourse Global Equities, la "triste réalité" est que "la France,
l'Allemagne et plus généralement la zone euro dans son ensemble sont en train de connaître leur pire ralentissement
économique depuis la récession de 1993", écrit-il dans une note du vendredi 26 septembre. Il prévoit en France une
croissance de 1,1 % en 2008 et 1 % en 2009, le taux de chômage remontant de 7,8 % à 8,1 %. [...].
Un accès au crédit plus difficile. Les difficultés des banques portent en germe un accès au crédit nettement plus difficile. Les
enquêtes de la Banque centrale européenne (BCE) montrent que, depuis l'été 2007, les banques ont nettement resserré les
conditions auxquelles elles accordent leurs prêts aux entreprises ou aux ménages. Les établissements sont confrontés depuis
un an à des difficultés pour accéder à des liquidités sur le marché interbancaire, compliquant leur refinancement. [...]
Les investissements suspendus. L'incertitude économique et les difficultés de financement, actuelles ou à venir, ont rendu les
entreprises très attentistes. Les opérations de rachats d'entreprise se sont raréfiées, tandis que les investissements sont retardés
ou suspendus. [...]
Au deuxième trimestre, l'investissement productif des entreprises non financières a chuté de 1 % par rapport au trimestre
précédent tandis que le recul de l'investissement des ménages a pris de l'ampleur (-2,9 %).
Pour Olivier Bizimana, économiste au Crédit agricole, "le climat d'incertitude ambiant ne sera guère favorable aux décisions
d'investissement", écrit-il dans une note du mardi 30 septembre. La tendance devrait donc se prolonger : il prévoit seulement
0,3 % de hausse de l'investissement en 2009 après 1 % en 2008 et 5 % en 2007.
Des marges de manœuvre budgétaires limitées. Les marges de manœuvre du gouvernement français en matière fiscale sont
proches de zéro, puisqu'il anticipe un déficit budgétaire de 2,7 % du Produit intérieur brut (PIB) cette année et l'an prochain,
très proche déjà de la norme européenne des 3 % de déficit public autorisé. Le financement du RSA a nécessité de chercher
de nouvelles recettes comme le plafonnement des niches fiscales.
Toutefois, si la France rentrait en récession et que la crise bancaire dégénérait, ces normes pourraient être mises entre
parenthèses, comme le pacte de stabilité et de croissance européen le prévoit dans des circonstances exceptionnelles.
Mais la hausse attendue du chômage risque de dégrader les recettes de la sécurité sociale. Le déficit prévu du régime général
de la sécurité sociale est de 8,9 milliards en 2008 et 8,6 milliards en 2009. Pour le contenir, le gouvernement a notamment
prévu de s'attaquer aux "niches sociales" : réduction des allègements de charges sociales pour les particuliers employeurs,
taxation à hauteur de 2 % des versements des entreprises pour l'intéressement, la participation, l'abondement des plans
d'épargne et de retraite…
Adrien de Tricornot
Le Monde, le
01/10/2008