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Centre Africain de Formation et de Recherche
Administrative pour le Développement
Nations Unies
Département des Affaires Economiques et Sociales
La Fonction publique en Afrique : Ethique
Dr. Joseph R.A. AYEE
Professeur en Administration Publique
Rabat
Maroc
13 - 15 Décembre 1998
La Fonction publique en Afrique : Ethique
Centre Africain de Formation et de Recherche Administrative pour le Développement - CAFRAD
Département des Affaires Sociales et Economiques des Nations Unies - UNDESA
INTRODUCTION :
L'importance de l'éthique de l'administration publique a engagé l'attention des
spécialistes, des agences donatrices et des fonctionnaires. En effet, la préoccupation afférente
à l'éthique dans la fonction publique est devenue une question de taille aussi bien dans les
pays développés que ceux en voie de développement pour un certain nombre de raisons. Tout
d'abord, la réputation et le succès d'un gouvernement dépendent de la conduite des
fonctionnaires publiques et de ce que pense le public de la conduite des responsables. Par
conséquent, il est d'une importance capitale que les fonctionnaires agissent avec intégrité. Il
est impératif que chaque fonctionnaire, lorsqu'il accepte un emploi public, comprenne qu'il
doit exécuter une tâche spéciale, juste et impartiale dans ses relations avec le public. L'intérêt
personnel des fonctionnaires doit être en toutes circonstances subordonné à l'intérêt public, et
notamment dans les circonstances où la possibilité d'un conflit d'intérêt est susceptible de
devenir un dilemme d'éthique. Les activités privées des fonctionnaires doivent se caractériser
par des normes élevées telles, qu'elles ne devraient pas entacher leurs postes et discréditer le
gouvernement (Chapman 1993, Rohr, 1978, Kernaghan, 1980). Deuxièmement et plus
important encore, un service public conforme à "l'éthique" est une composante importante
d'une bonne gouvernance (une nécessité pour des prêts étrangers) préconisée par les
institutions de Bretton Woods et autres donateurs sans lesquels le développement ne peut se
produire dans les pays en voie de développement. En d'autres termes, pour disposer
d'institutions de fonction publique efficaces et effectives et de ressources publiques, la
promotion de l'intégrité nationale est essentielle et cruciale.
Bien qu'il n'existe aucun accord portant sur l'accroissement ou autre du niveau de la
conduite corruptive non professionnelle et non conforme à l'éthique, il est évident d'avancer
que davantage de publicité est accordée à une telle conduite que dans le passé. Qu'il s'agisse
des pays développés ou en voie de développement, la perception de la part du public des
mauvais agissements à une large échelle, a miné la confiance du public dans les
gouvernements. En réaction à cette préoccupation générale quant à la conduite immorale, les
gouvernements ont conçu des mécanismes visant à promouvoir et préserver une conduite
morale de la part des fonctionnaires (Dwivedi, 1987, Caiden 1981).
C'est à la lumière de cette base, que ce document examine les stratégies et les modalités
pour la promotion des valeurs, des normes et de l'éthique dans la gestion de la fonction
publique africaine. Le présent document est divisé en cinq parties :
La partie I : définit le concept de l'éthique;
La partie II : aborde les raisons se cachant derrière l'intérêt public dans le comportement des
fonctionnaires;
La partie III : discute les dilemmes d'éthique que doivent affronter les fonctionnaires Afrique;
La partie IV : est consacrée à l'examen des stratégies adoptées pour promouvoir la conduite
morale au sein de la fonction publique africaine;
La partie V : met en exergue les leçons à tirer de ce document et leurs implications pour
l'éthique et la fonction publique.
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Partie I : qu’est ce que l’Ethique ?
Il n'existe pas de définition convenue du terme "Ethique". Certains l'ont même assimilée
à la morale. La différence entre "la morale" et "I' Ethique" réside dans le fait que la morale
est liée à la conduite personnelle de l'individu, ses devoirs moraux et son respect des règles
conventionnelles. L'éthique se réfère aux principes de base de l'action juste et les règles de la
conduite (Chapman 1993). Le terme éthique peut faire référence aux caractéristiques morales,
qu'elles soient présentes ou absentes; ainsi, un administrateur ou un système administratif est
dit moral ou manquant de probité. Parfois, nous recherchons des valeurs particulières, telles
l'honnêteté ou le professionnalisme, mais souvent nous recherchons simplement une sorte de
conscience morale. Le terme éthique peut se référer, en même terme, à quelque chose de
différent, dénotant un ensemble de caractéristiques assumées être présentes et susceptibles de
prendre différentes formes. Dans ce sens, les organisations sont toujours morales; elles ne
diffèrent que dans les éthiques qu'elles représentent. Un fonctionnaire pourrait être considéré
comme manquant de probité si il ou elle s'écarte des normes morales de l'organisation, alors
que l'organisation ou l'institution, dans sa totalité, ne pourrait être considérée ainsi (Rohr,
1978). Ils ne diffèrent que dans les éthiques qu'ils représentent. Ce qui est intéressant c'est de
savoir comment un administrateur et/ou un responsable peut être considéré comme ayant une
conduite morale au sein d'un système ou une organisation dont les mécanismes opérationnels
manquent de probité. Ceci est une source importante des dilemmes d'éthique des responsables
du secteur public aussi bien dans les pays développés, que dans ceux en voie de
développement.
Une autre question conceptuelle nécessitant de la considération quant à l'éthique est
celle de la droiture et la responsabilité. La droiture fait référence à l'honnêteté individuelle, et
dans le cas de la conduite administrative, à la norme quasi universelle voulant que la fonction
publique en soi, ne doit pas être utilisée pour des gains privés. En se basant sur le concept de
la droiture, il semble que c'est bien l'éthique en tant que droiture qui définit les frontières de la
littérature comparative traditionnelle de corruption et fournit généralement le contexte pour
les débats portant sur la portée, le contenu et l'applicabilité générale des codes d'éthique
(Heidenheimer, 1970, Klitgaard, 1988). Cependant, la rectitude administrative n'est pas un
problème qui se prête à l'analyse systématique, et ce car tel que l'affirme Lippmann (1930, 61)
"nous ne pouvons jamais étudier la corruption en elle même, mais simplement la mise à nu de
celle-ci".
L'éthique en tant que responsabilité fait référence à la question de savoir auprès de qui
ou de quoi, l'administrateur cherche-t-il la conduite morale, en établissant, à titre d'exemple,
des choix politiques complexes et dans l'exercice des directives administratives. Vu la grande
différence qui existe entre les systèmes et les cultures à cet égard, il semble être bien plus
difficile d'établir des critères d'éthique qui englobent la responsabilité que de s'appuyer sur la
droiture. Et ce car : Une fois que l'on quitte le monde ordonné de la justice sociale et
administrative, l'ambiguïté règne. Dans la plupart des cas, le bien et le mal baignent dans la
confusion en raison des interprétations litigieuses souvent ancrées dans des clivages sociaux
politiques bien établis (Ajuogu, 1983: 387).
Le terme éthique revêt un sens étendu ou macro à même d'être appliqué a toutes les
cultures et à tout moment. Mais il a également un sens restrictif ou micro en relation à une
société spécifique ou groupe sociétaire. La perception macro appartient au bien ou au mal, au
bon ou au mauvais, alors que la perception micro fait référence à la manière d'interpréter le
bien ou le mal, le bon ou le mauvais, par une société spécifique, groupe sociétaire ou même
un individu (Dwivedi, 1978).
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Pour des raisons propres au présent document, le terme éthique est lié au caractère et à
la conduite ainsi qu'à la morale d'un être humain, en tant qu'employé public. Concernant la
conduite d'affaires publiques par un responsable public, le terme Ethique concerne la bonne
ou mauvaise gestion des affaires publiques et détermine la bonne ou la mauvaise conduite du
responsable public au moment de l'exercice de ses fonctions officielles. L'Ethique évalue la
conduite à la lumière des critères supposés absolus et impose des valeurs positives ou
négatives eu égard. Ces critères peuvent être établis par écrit (législation) ou être simplement
l'interprétation par un individu de ce qui est acceptable et de ce qui ne l'est pas (Chapman,
1993).
Partie II : Intérêt public dans la conduite des responsables publics :
Etant donné que les responsables occupent des postes de confiance, il est tout naturel
que le public accorde de l'intérêt à leur comportement moral et leur conduite officielle. Il est
cependant vrai aussi que l'intérêt du public augmente et décroît en fonction de la survenance
d'une mauvaise conduite des responsables publics et de l'information qu'ils diffusent au public
par les médias. Il arrive rarement que le public lui même sonde activement la conduite
officielle des responsables publics désignés. En fait lorsqu'il devient connu généralement
qu'un responsable public a agi d'une façon immorale par exemple, dans l'utilisation de l'argent
de l'état, des réclamations d'indignation s'élèvent pour un redressement de la situation, mais
avec le temps, les cris de réprobation se tassent et seules des références sporadiques à la
mauvaise conduite demeurent. Malgré l'amélioration au fil des années des critères d'éthique
des responsables publics, le public et la presse ne sont pas nécessairement confiants dans la
fonction publique (Chapman, 1993, Kamto, 1977).
La conduite morale et la compétence professionnelle ne peuvent être dissociées. Le fait
d'adhérer aux normes élevées de la conduite morale, mais en menant cependant les affaires
publiques d'une manière incompétente, ne satisfera nullement le public, ne développera pas le
bien être général mais est susceptible par contre de s'avérer aussi désastreux qu'une conduite
immorale. Il existe par conséquent, différentes zones de conflits potentiels qui nécessitent
d'être examinées (Caiden, 1981).
Partie III : Dilemmes d'éthique affrontant les fonctionnaires :
Afin de promouvoir l'intérêt public, les actions des fonctionnaires, aussi bien élus que
désignés, doivent toujours être menées dans l'intérêt public. En d'autres termes, leur conduite
officielle devrait toujours être "bonne", 'juste" et "positive". On devrait, cependant, garder à
l'esprit qu'une incompatibilité peut exister entre les prescriptions d'éthique et les prescriptions
régulatoires et légales. Les fonctionnaires sont supposés adhérer a tout moment aux
règlements; et la conduite morale est - au sein de la fonction publique - toujours sujette aux
prescriptions formelles basées sur la politique du partie gouvernant, tel que stipulé en termes
de loi. Si les fonctionnaires n'adhèrent pas aux règlements, ce qui suppose agir conformément
aux prescriptions de la loi, des actions litigieuses peuvent se développer en dilemmes moraux.
Certains des dilemmes moraux les plus communs auxquels les fonctionnaires sont confrontés,
pivotent autour des aspects suivants :
Discrétion administrative ;
Corruption ;
Népotisme ;
Conformité ;
Confidentialité administrative ;
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Fuites d'information ;
Valeurs ;
Responsabilité publique ;
Dilemmes politiques ;
Relations entre les fonctionnaires désignés et les politiciens élus ;
L'influence des groupes de pression sur la conduite morale de l'administration
publique ;
Les activités politiques des fonctionnaires ;
L'intérêt révélé par le public pour la conduite des fonctionnaires (Graham, 1974,
Hanekom, 1986).
Discrétion administrative :
Les fonctionnaires ne sont pas simplement des exécuteurs de la politique publique. Ils
prennent des décisions afférentes aux vies des personnes, par exemple, portant sur les impôts
,la survie et le licenciement des personnes. En agissant ainsi, ils exercent le pouvoir
discrétionnaire. La question est ensuite de savoir comment les décisions doivent être prises
pour éviter les dilemmes moraux. En d'autres mots, la promotion du bien être général dépend
largement de l'usage ou de l'abus de la discrétion administrative (ltohr, 1978, 399). En outre
"celui qui a entre les mains la situation d'une autre personne ne devrait jamais penser à lui
même…." (Machiavelli, 1958 129), mais devrait placer la promotion du bien-être général au
dessus de son propre intérêt.
Il est vrai que dans les règles, et règlements mis en place par la législation et au sein des
procédures prescrites, le fonctionnaire dispose de plus d'une occasion d'user de son pouvoir
discrétionnaire. Face à des alternatives, le choix d'un fonctionnaire pose un problème
d'éthique: le choix peut être acceptable pour une petite tranche de la société uniquement. Le
problème consiste dans le fait que la sélection d'un chemin d'action parmi plusieurs
alternatives est souvent faite sur la base de préférences personnelles, politiques ou autres
affiliations ou encore des agrandissements personnels, négligeant ainsi des faits connus et
donc la possibilité d'une prise de décision rationnelle. Il est fort possible que l'ensemble des
règles prescrites, règlements et procédures aient été observés, mais lechoix
discrétionnaire peut être perçu comme manquant de probité, voire même corrompu
(Kernaghan, 1980 Hanekon, 1986).
Corruption :
Bien que dans la plupart des états africains, les divulgations de conduite malhonnêtes
par des fonctionnaires se font de temps à autres, le niveau général de conduite des
fonctionnaires est d'un niveau élevé. La majorité des fonctionnaires dispose de critères élevés
requis par la fonction publique et s'adonne à la promotion du bien-être général. Les normes
d'éthique des fonctionnaires sont, néanmoins, liées à la société dans son ensemble. Si le public
accepte le fait que pour garantir une réaction expéditive de la part d'un fonctionnaire, des
sommes pécuniaires ou autres procédés de motivation sont nécessaires et que ledit
fonctionnaire accepte les procédés de stimulation, les normes de conduite morale des
fonctionnaires sont donc en harmonie du point de vue du public. Cependant, ceci
peut ne pas être nécessairement le cas tel que vu par le fonctionnarisme (Klitgaard, 1 9X8,
Heidenheimer, 1989).
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