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REVUE DE PRESSE
FALK RICHTER
STANISLAS NORDEY
Je suis Fassbinder
26 – 04.05.2016
REVUE DE PRESSE - SOMMAIRE
Je suis Fassbinder
Presse écrite
•
22.02.2016
La Terrasse
Manuel Piolat Soleymat
JE SUIS FASSBINDER
•
27.02.2016
DNA
Christine Zimmer
Je suis Fassbinder
•
01.03.2016
Théâtral Magazine
HC
Stanislas Nordey L’esprit Fassbinder
•
03.03.2016
Le Monde
Brigitte Salino
Fassbinder est de retour à Strasbourg
•
03.03.2016
Poly
Thomas Flagel
Je suis Falkbinder
•
04.03.2016
20 Minutes (Strasbourg)
Aurélie Marmu
Nordey acte I scène 1
•
07.03.2016
SceneWeb.fr
Stéphane Capron
Falk Richter : « La scène est le
témoin de notre temps
•
07.03.2016
Mediapart
J.-P. Thibaudat
Nordey & Richter créent «
Je suis Fassbinder », beau
balbutiement d’un théâtre d’action
directe
•
08.03.2016
L’OBS
A Strasbourg, Stanislas
Nordey convoque Fassbinder pour
éclairer les crises de l’Europe
•
09.03.2016
DNA
Christine Zimmer
Le miroir du monde
•
10.03.2016
Les Echos
Philippe Chevilley
Nordey et Richter conjugent
Fassbinder au plus que présent
•
11.03.2016
La Croix
Didier Méreuze
Le théâtre libre de Stanislas Nordey
•
12.03.2016
Le Monde
Brigitte Salino
Être ou ne pas être
Fassbinder
•
14.03.2016
Le grand théâtre du monde
Armelle Héliot
Allemagne, retour arrière et
travelling
•
14.03. 2016
L’Humanité.fr
Marie-José Sirach
Stanislas Nordey, un théâtre d’utilité
démocratique
•
14.03. 2016
Théâtre du Blog
Véronique Hotte
Je suis Fassbinder de Falk Richter
•
15.03. 2016
Badische Zeitung
Bärbel Nückles
« Einen starken Führer müsste es
geben »
•
16.03. 2016
Les Inrocks
Patrick Sourd
Action directe
•
19.03. 2016
Télérama
Fabienne Pascaud
Je suis Fassbinder Chronique
d’aujourd’hui
Télévision
•
16.02.2016
France inter
Je suis Fassbinder
•
04.03.2016
France TV Info
Stéphanie Loeb
« Je suis Fassbinder » : la première
création de Stanislas Nordey à
Strasbourg
•
05.03.2016
ARTE
Falk Richter, un auteur engagé dans
une Europe en crise
France Culture
Fabienne Pascaud
Spectacles vivants : « La Mer » à la
Comédie Française et « Par-delà les
marronniers » au Rond-Point
Radio
•
21.03. 2016
N° 241 – 22 février 2016
Théâtre national de Strasbourg / de Falk Richter / mes Stanislas Nordey et Falk
Richter
JE SUIS FASSBINDER
Publié le 22 février 2016 - N° 241
Pour sa première création au Théâtre national de Strasbourg en tant que directeur,
Stanislas Nordey a commandé une pièce à son complice allemand Falk Richter*.
Ensemble, ils mettent en scène Je suis Fassbinder. Une rêverie autour de la figure
tutélaire du cinéaste allemand.
Stanislas Nordey Crédit : Jean-Louis Fernandez
Comment pourriez-vous définir la relation qui vous unit à l’écriture de Falk Richter, à
laquelle vous êtes fidèle depuis de nombreuses années ?
Stanislas Nordey : Ce que j’aime dans le théâtre de Falk Richter, c’est qu’il écrit sur
aujourd’hui. Un aujourd’hui à lui, car ses textes partent finalement toujours de son
rapport personnel au monde et à l’actualité. Ce n’est donc pas un théâtre strictement
politique, un théâtre d’agitprop ou de dénonciation, mais plutôt un théâtre qui
regarde à la fois autour de soi et en soi. Et ça, ça me touche beaucoup. Une autre
chose qui me paraît importante, c’est que Falk Richter est un auteur de ma
génération, un auteur qui vit aujourd’hui. J’ai donc quelqu’un, en face de moi, qui
écrit en direct. C’est très stimulant…
Quelqu’un avec qui, comme c’est le cas aujourd’hui, ou comme ça l’a été pour votre
spectacle My Secret Garden, en 2010, vous inventez d’autres formes de collaboration
artistique…
S. N. : Exactement. Des formes partagées de création pour lesquelles nous mettons
en scène à deux, avec la particularité qu’il écrit et que moi je n’écris pas, que moi je
joue et que lui ne joue pas. Cette relation crée, dans mon chemin de théâtre, un écart
qui me fait énormément de bien. Car je trouve cette question du partage très belle. Il
n’est d’ailleurs pas anodin que mon premier spectacle au Théâtre national de
Strasbourg soit la création d’un texte qui était encore en train de s’écrire alors que
nous étions en répétition. Je crois qu’il est très important de savoir prendre ce risquelà.
Est-ce que ce processus de création a supposé une part d’écriture « au plateau » ?
S. N. : Oui, on a beaucoup travaillé par improvisations. Et comme le matériau premier
était l’univers de Fassbinder, on a rejoué des scènes de certains de ses films. On s’est
beaucoup documentés. On a relu pas mal de textes… Il y a eu, ainsi, un mouvement
d’allers-retours entre Falk Richter et nous. Tout cela a donné corps à des choses très
diverses sur le plateau : à des chansons, des premiers plans d’adresse assez directs,
mais aussi à d’autres types d’informations qui arrivent et parfois se superposent, par
exemple des choses qui se passent dans des téléviseurs… Cette façon de procéder a
laissé beaucoup de place pour que chaque acteur puisse proposer et inventer son
propre chemin…
« Fassbinder et Falk Richter ont en commun une même volonté de parler de tout sans
jamais céder à la peur. »
Que pourriez-vous dire de ces différents chemins ?
S. N. : Thomas Gonzalez, par exemple, qui aime chanter, s’est très vite inscrit dans le
projet en travaillant avec le musicien Matthias Grübel. Moi, j’ai pris assez
naturellement la figure de Fassbinder, du metteur en scène. Eloise Mignon a un peu
le rôle d’un électron libre, qui vient d’ailleurs et pose beaucoup de questions… Judith
Henry, elle, est plutôt la figure de l’actrice, de la muse. Elle retraverse les figures
d’Hanna Schygulla, de Margit Carstensen… Quant à Laurent Sauvage*, il joue un peu
tous les personnages en marge, de la mère de Fassbinder à Elvira, dans L’Année des
treize lunes…
Quels liens pouvez-vous établir entre l’univers de Falk Richter et celui de Rainer
Werner Fassbinder ?
S. N. : Ces deux univers n’ont rien et tout à voir à la fois. Ce qui est intéressant, c’est
que, pour Falk Richter, Fassbinder est un peu le même type de figure que Pasolini est
pour moi. C’est-à-dire que c’est une espèce de terreau dans lequel il n’arrête pas de
piocher. Dans un certain nombre de ses textes, il y a des choses empruntées à
Fassbinder, des choses qu’il a revisitées, de façon plus ou moins reconnaissables…
Fassbinder et Falk Richter ont en commun une même volonté, en tant qu’écrivain, de
tout dire, de regarder le monde et de parler de tout sans jamais céder à la peur. Mais
sur d’autres points, ils sont vraiment différents. Fassbinder, par exemple, avait cette
nécessité de se mettre en scène perpétuellement, de s’écrire soi-même, qui ne
correspond pas du tout à la personnalité de Falk Richter. C’est quelqu’un de
beaucoup plus discret, de beaucoup plus introverti. Quant à leur écriture, elles sont
très différentes. C’est ce qui, je crois, rend ce projet très intéressant. Je suis
Fassbinder est une sorte de rêverie, à travers l’écriture de Falk Richter, autour de la
figure tutélaire de Fassbinder, autour de ce qu’il en reste aujourd’hui, de la façon
dont il nous a marqués, ou pas…
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
* Artiste associé au projet du Théâtre national de Strasbourg.
Date : 27 FEV 16
Journaliste : Christine Zimmer
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 163692
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Reflexion
Groupe
Esquisses (PHOTOS JEAN LOUIS F E R N A N D E Z )
THÉÂTRE du 4 au 19 mars au Théâtre national de Strasbourg
3e suis Fassbinder
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Stanislas Nordey et FalkRichtertravaillentàquatremainspourinterrogerlesévolutions et les interrogations
auxquelles sont confrontéesles sociétés actuelles. Avec sérieuxmais sans se prendre au sérieux.
Tous droits réservés à l'éditeur
STRASBOURG 1041017400505
Date : 27 FEV 16
Journaliste : Christine Zimmer
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 163692
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P
our sa premiere creation a
Strasbourg, Stanislas Nordey le
dit tout net il voulait «un geste
risque » En tandem avec Falk
Richter, artiste associe au TNS et horn
me de theâtre allemand, auteur, met
leur en scene, il a choisi de bâtir ex
mhilo un spectacle consacre au défunt
cinéaste d'Outre Rhin, l'immense Rai
ner Werner Fassbinder
Le texte s'est élabore au fil des repeti
lions Falk Richter mettait par ècrit cha
que soir ce qui avait surgi en journee sur
le plateau, ce texte ètait ensuite traduit
par Anne Monfort, mis )our apres jour
bout a bout, revu avec le dramaturge
Nils Haarmann et retravaille m vivo Le
spectacle, explique Stanislas Nordey ne
s'est pas ècrit collectivement maîs les
acteurs portent une ècriture immedia
te » Si le propos de Falk Richter n'est
« pas proprement dit politique », il porte
un regard sur le monde d'aujourd'hui,
« sur notre maniere de vivre les fa
milles recomposées, notre façon
d'avancer intimement et de croiser le
collectif » Le theâtre de Falk Richter,
poursuit le directeur strasbourgeois,
complètement au serieux, parfois drôle,
parfois dote de zones d'ombre » Les
deux hommes, qui ont déjà collabore en
2010 sous d'autres «eux pour My secret
garden, ont retenu Fassbinder parce
que c'est « une figure de l'Allemagne
Le spectacle ne sera pas un hommage
a Fassbinder, ne sera « ni nostalgique,
ni politique, maîs déjante, drôle,
profond, bordelique, gènereux »
Emportement
n'est pas didactique maîs c'est un thea
tre qui questionne, ne se prend )amais
contemporaine, qui a laisse une impor
Un regard acéré derrière la caméra
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Dans Ramer Werner Fassbinder,
identite allemande et mse du
sujet Claire Kaiser enseignante
chercheur à l'université Bordeaux
Montaigne décrypte I œuvre du
cinéaste Détails
RAINER WERNER Fassbinder est ne le
31 mai 1945 a Munich ou il passera son
enfance II quitte l'école avant la fin des
etudes secondaires travaille un temps
comme journaliste, rejoint un groupe
de theâtre expérimental puis fonde
l'An theater, met en scene des pieces, les
adapte pour le cinema, fait des
réalisations pour la television, cree une
boîte de production II tournera une
quarantaine de films pour le cinema et
la television, dont Le mariage de Maria
Braun, Lola, une femme allemande, Le
secret de Veron;to Vois qui lui vaudra
l'Ours d'or au festival de Berlin II
décède en 1982 a Munich laissant
Tous droits réservés à l'éditeur
derrière lui une œuvre majeure, tres
appréciée ou tres critiquée « Tous ses
films traitent de la societe allemande »
explique l'universitaire Claire Kaiser
« Le sujet que Fassbinder met en scene
se construit comme tel au moment ou
l'Allemagne elle même se constitue en
démocratie, a partir des soubresauts de
son passe traumatique La crise du
sujet ne saurait donc s'envisager sans
prendre en compte la spécificité de
l'histoire allemande contemporaine »
Pour Fassbinder, c est en eux memes
que « les Allemands doivent chercher la
responsabilite de la barbarie national
socialiste II leur faut s'interroger sur
les idéaux et valeurs qui ont conduit a
cette catastrophe historique et assumer
ce statut de bourreaux revele par la
défaite de 1945 » Son cinema
s'attachera a souligner, analyser,
mettre en perspective « ce déni évident
d'un passe qui, suite a la capitulation et
Ramer Werner Fassbinder
a l'effondrement du regime hitlérien,
renvoie aux Allemands une image
dépréciée d'eux mêmes » Une serie de
ses films placera « dos a dos terrorisme
d'extrême gauche et terronsme d'Etat »
dans l'Allemagne de ['apres guerre ou
le cinéaste voit « sous les apparences
trompeuses de la démocratie, la
survivance d un Etat dictatorial
L'homme pointe de même « au niveau
des individus une persistance d'as
pirations autoritaires » Resultat, selon
Fassbinder pour échapper a cette
fragilite de l'identité nationale, les
Allemands « se détournent d'eux
memes, abandonnant leur identite
culturelle qui les renvoie a leur
culpabilité et leur défaite, au profit
d'une identite de substitution
l'identité américaine et ses valeurs
économiques »
La contre culture qui tentera de se
mettre en place sera, selon le cinéaste
un èchec II continuera de defendre la
dimension contestataire de sa
demarche « face a I impasse d'une
pratique révolutionnaire ayant
dégénère en violence terroriste et
reaffirme sa croyance dans la fonction
critique du cinema j è ne lance pas des
bombes, je fais des films », dira t il i
cz
STRASBOURG 1041017400505
Date : 27 FEV 16
Journaliste : Christine Zimmer
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 163692
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tante œuvre, et ne faisait pas de différence entre l'art et le vécu », souligne
Falk Richter. Le film L'Allemagne en
automne, bâti en 1977 à partir de plusieurs courts-métrages - dont un de Fassbinder, a servi comme point de départ.
Il y est question des actions
violentes de la Fraction armée rouge (extrême gauche)
qui avait notamment pris en
otage un avion pour demander la libération de la bande à
Baader alors emprisonnée.
Le cinéaste s'y filme discutant (de la question du pouvoir et de la démocratie) avec
son compagnon puis sa mère, femme démocrate, qui en
vient à dire qu'il faudrait
« un maître autoritaire qui
serait gentil et juste ».
Le spectacle strasbourgeois
fe suis Fassbinder se propose
d'interroger l'époque actuelle : comment le politique influe-t-il sur le privé, comment réagit-on au politique,
quelles sont les attitudes face à la question des réfugiés, pourquoi l'extrémisme de droite monte-t-il, comment défendre la démocratie ?
L'idée du spectacle Je suis Fassbinder,
confie Stanislas Nordey, est né peu
après l'attaque en France contre Charlie
Hebdo qui pose la question de la liberté
de parole des artistes, de la tentation de
l'autocensure et alors qu'en Allemagne
des groupuscules d'extrême droite ont
attaque en justice la Schaubûhne pour
une création appelée Pear.
Personnage complexe voire excessif,
Fassbinder, expliquent les deux hommes de théâtre, a en son temps cherché
d'autres manières d'être, a utilisé sa vie
comme « matériau d'art ».
Le spectacle strasbourgeois, poursuit en
substance Nordey, ne sera pas un hommage à Fassbinder, ne sera pas « nostalgique, ni politique, mais déjanté, drôle,
profond, bordélique, généreux ». Il y
aura, ajoute Richter, quelque chose
d'inachevé, de brut, d'improvisé. On
croise les perspectives ». •
CHRISTINE ZIMMER
» Du 4 au 19 mars au TNS, salle Koltès.
0388248800;www.tnsfr
Tous droits réservés à l'éditeur
STRASBOURG 1041017400505
Date : MARS / AVR 16
Page de l'article : p.4,27
Journaliste : HC
Pays : France
Périodicité : Bimestriel
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enda
2-fév
Cyrano de Bergerac avec Philippe Torreton
Porte Saint Martin, 75010 Paris 01 42 08 00 32
3 fev
Traces, par la Compagnie des 7 doigts de la mam
Bobmo, 75014Paris,01 43 27 24 24, jusquau 23/04
12-f ev
La Candidate, avec Amanda Lear
La Michodière, 75002 Pans, 01 47 42 95 22
27 fev
Didier Bénureau et les cochons dans l'espace Theâtre
Antoine 75010 Paris 01 42 08 77 71, jusqu'au 7/05
I-mars
Phèdre(s), mise en scène Warlikowski, avec Isabelle Hupperi, Odéon75006 Paris, jusqu'au 13/05, et en tournée
I mars
L'Art de la comédie, mise en scene Patrick Pineau
I 5/03 Theâtre Dijon Bourgogne, 8/03 Epernay et tournée
I mars
Les affaires sont les affaires, avec François Marthouret
Celestins à Lyon, du I 26/03 et 3 7/05, et en tournée
I mars
Richard lll Loyaulté me lie, avec Jean Lambert Wild et
Elodie Bordas Le Havre dul au 10/03 , et tournée
3 mars
Figaro Divorce, mise en scène Christophe Rauck
Theâtre du Nord à Lîlle, du 3 au 20/03 et tournée
3-mars
La Ménagerie de verre, mise en scene Daniel Jeanneteau,
3 5/3 Besançon, 8 12/3 Rennes, 31/3 28/4 La Colline
3 mars
Les Cens d'Oz, mise en scene Câlin Stoev,
La Colline, 75020 Pans, du 3/03 au 2/04
4-mars
Je suis Fassbinder, mise en scène Falk Richter et Stanislas
Nordey, 4 au I 9/03 TNS, 10/05 au 4/06 La Colline
5 mars
La Mer, d'Edward Bond, mise en scène d'Alain Françon
Comedie Française 75001 Paris, du 5/03 au I 5/06
7 mars
Natura è origine délia mente, conception Romeo
Castellucci T2C Cennevilliers du 7 au 13/03
8 mars
Notre crâne comme accessoire, mise en scène Igor
Mendjmsky, Bouffes du Nord 75010 Pans, du 8 au 26/03
9 mars
Attends, attends, attends Trois soies chorégraphiés par
Jan Fabre Théâtre de la Bastille, 75011 Paris du 9 au 23/03
9 mars
Le Sacre du printemps et Henri Michaux : Mouvements,
de Marie Choumard, Mac de Creteil, du 9 au 12/03
9 mars
J'ai dans mon cœur un Gèneral Motors, mis en scene] Villa
TNBA Bordeaux 9 19/03, Bastille 29/3 3/4, et tournée
9 mars
Nous sommes repus... conception Séverine Chavrier
Lausanne 9 20/3, Besançon I 7-29/4, Odéon 13-29/5
10 mars
Noos, par Frederi Vernier et Justine Berthillot
Monfort 7501 5 Paris, du 10 au 20/03
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Spectacles recommandés
,
f
**•
STRASBOURG 5138217400506
Date : MARS / AVR 16
Page de l'article : p.4,27
Journaliste : HC
Pays : France
Périodicité : Bimestriel
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à partir du
JE SUIS FASSBINDER
Théâtre National de Strasbourg et tournée
Stanislas Nordey
L'esprit Fassbinder
Après Dos System et My Secret Garden, Stanislas
Nordey poursuit son compagnonnage avec l'auteur
allemand Falk R\c^\teL Je suis Fassbinder est un
pamphlet contre l'auto censure, un regard sur notre
époque et ses travers.
Théâtral magazine : En quoi la figure de Fassbinder vous inspire-telle?
Stanislas Nordey C'est moi qui ai
lancé Falk Richter sur la piste Durant My Secret Garden, on a beaucoup évoqué Fassbinder qui pour
Falk a été une figure inspiratrice
comme l'a été Pasolini pour moi À
l'âge de I 7 ans il avait vu une retrospective de ses films qui avait
fait naïtre en lui le feu de l'écriture
Quelles sont les thématiques
abordées dans le spectacle ?
On parle de Fassbinder à travers des
scènes de ses films qui sont rejouées
Maîs aussi de tout ce qui vient de
nous arriver, des migrants, de ce qui
s'est passé a Cologne le 31 décembre,
de la confusion du monde et de la
confusion de nos vies Au début on
avait appelé le spectacle Fassbinder
Et puis apres les attentats de Charlie,
Falk m'a dit que cela aurait davantage de sens que ce soit Je suis Fassbmder puisque c'est quelqu'un qui ne
s'est jamais autocensure Ce qu'on interroge c'est aussi ça est-ce que Fassbinder aujourd'hui pourrait être ce
qu'il a été, est-ce que les artistes ne
sont pas face au danger de ne pas
tout dire à cause d'une forme d'autocensure sur des sujets brûlants? ll y a
une peur liée à ce qui s'est passé avec
Michel Houellebecqsur5ouffl/5s/cw.
Qu'en pensez-vous ?
Qu'il faut toujours tout dire, que le
Tous droits réservés à l'éditeur
rôle des artistes, c'est de ne surtout
pas baisser la garde. Il ne s'agit pas de
provoquer, maîs de continuer à dire et
a questionner Falk lui-même m'a demande s'il pouvait écrire tout ce qu'il
voulait après ce qui s'était passé Surtout que le dernier spectacle qu'il a
créé à la Schaubuhne Fire, "la peur"
en français, a eté violemment attaque par les reseaux d'extrême droite
pour avoir parlé de la montée des extrémismesen Europe
N'est-ce pas une menace qui bride
les auteurs français peu enclins à
écrire sur l'actualité ~>
C'est plus parce qu'en France, on a
une tradition assez littéraire, nourrie
de Racine, de Claudel Et les rares
pièces écrites sur des sujets brûlants
ne trouvent pas forcément preneur
Fabrice Melquiot avait par exemple
écrit un texte sur Sarkozy, Cécilia
Sarkozy et Jacques Martin, Tasman/e, qui n'a jamais été monté.
Comment avez-vous travaillé avec
Falk Richter?
Il assiste aux répétitions ll y a six
mois, on a fait trois ou quatre jours de
travail à Berlin à la table pendant lesquels il nous a interrogés sur notre
rapport à Fassbinder Puis il nous a
demande de regarder ses films et de
choisir des scènes qui nous touchaient On a fait ensuite une semaine d'improvisations début janvier
dont il s'est inspire pour écrire
• Je suis Fassbinder, de Falk Richter, mise en scène
de Falk Richter et Stanislas Nordey
4 au 19/03 TNS, I avenue de la Marseillaise
67000 Strasbourg, 03 88 24 88 00
24/03 au 2/04 la MC2 de Grenoble
15 au 20/04 TNB de Rennes
26/04 au 4/05 Théâtre Vidy Lausanne en Suisse
J 0/05 au 4/06 La Colline a Paris
Propos recueillis par HC
STRASBOURG 5138217400506
Date : 03/03/2016
Heure : 06:51:37
Journaliste : Brigitte Salino
www.lemonde.fr
Pays : France
Dynamisme : 320
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Fassbinder est de retour à Strasbourg
Fin février, les portes de la grande salle sont fermées. Le public viendra le vendredi 4 mars, jour de la première
de Je suis Fassbinder. Et l’on regrette qu’il n’ait pas la chance d’être là, dix jours avant, pour assister aux
répétitions de la première création de Stanislas Nordey au Théâtre national de Strasbourg, que ce dernier
dirige depuis 2014, mais dont il n’assure la programmation que depuis cette saison.
Car le public verrait ce qui, toujours, fait rêver : la mise en place d’un spectacle, dans l’effervescence de la
dernière ligne droite où tout se joue « au plateau », comme l’on dit dans le langage du théâtre. Surtout pour
cette création, totalement particulière : l’auteur, Falk Richter, est dans la salle. Il cosigne, avec Nordey, la
mise en scène d’un texte qu’il écrit au jour le jour, et que les cinq comédiens – dont Nordey – découvrent et
apprennent juste avant d’aller répéter.
Si l’on ajoute que ce texte est écrit en allemand et que la traductrice, Anne Monfort, traduit chaque matin ce
que Falk Richter a écrit la veille au soir, on mesure mieux encore que l’on sort de l’ordinaire. Il arrive même
à Anne Monfort de mettre au point, pendant les répétitions, une nouvelle version de ce qui est en train de se
jouer. Car le texte évolue à l’épreuve de la répétition, où l’on voit à l’œuvre, dans la salle, une belle alliance
franco-allemande.
Mode seventies
Côté allemand, Falk Richter (46 ans), le grand blond aux lunettes à monture noire, façon Calvin Klein. Côté
français, Stanislas Nordey (49 ans), le grand brun aux lunettes sans monture, à la Tchekhov. Chacun est venu
avec son équipe : un dramaturge et une scénographe pour Richter, une assistante et un créateur lumière pour
Nordey. Mais ils sont unis dans le travail comme les doigts d’une main.
Tous droits réservés à l'éditeur
STRASBOURG 270881722
Date : 03/03/2016
Heure : 06:51:37
Journaliste : Brigitte Salino
www.lemonde.fr
Pays : France
Dynamisme : 320
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Ils sont là, passent d’une table de régie, dans la salle, au plateau, où le décor est en place. Il y a beaucoup
de tapis blancs à la mode des années 1970, dans ce décor qui laisse le champ libre aux comédiens, eux
aussi vêtus à la mode seventies : pattes d’éléphant, petit blouson de cuir serré, jupe cloche, manteau en
fausse fourrure.
Des rappels discrets, mais efficaces, du temps où vivait Rainer Werner Fassbinder (1945-1982). Et de celui
où le terrorisme de la « bande à Baader » glaçait la République fédérale allemande. C’est de là que tout est
parti. De L’Allemagne en automne , ce film collectif de 1977 dans lequel intervient Fassbinder. Il se filme,
avec son amant et sa mère. Trois jours et trois nuits de discussion sur ce qui est en train de se passer. Un cut
sur une phrase de la mère de Fassbinder disant que, pour régler la situation, il faudrait « un gentil Führer » .
Ce film a été déterminant pour Falk Richter. Il était adolescent quand il l’a vu, à Hambourg, où il a grandi dans
une famille très aisée. Une famille pour qui il y avait deux diables : « Fassbinder, à cause de son horrible
vie, et Peter Zadek, à cause de ses horribles mises en scène. » Mises en scène que Falk Richter se pressait
d’aller voir, au Schauspielhaus, où officiait Peter Zadek, grande figure du théâtre allemand. Alors Richter a
rompu avec la tradition familiale, qui aurait fait de lui un marchand ou un médecin, et il a étudié le théâtre.
Puis il s’est mis à écrire, en faisant sienne la leçon de Fassbinder dans L’Allemagne en automne : chroniquer
l’époque en partant de soi.
Ainsi est née une œuvre qui a vite largement dépassé les frontières de l’Allemagne. Stanislas Nordey l’a
découverte au début des années 2000 et, aussitôt, il s’est senti chez lui, avec Falk Richter. D’une part, parce
qu’il a toujours mis en scène des auteurs contemporains. D’autre part, parce qu’il n’aime pas le théâtre
politique, ni didactique, mais le théâtre poétique qui parle d’aujourd’hui.
Falk Richter et lui se sont rencontrés, et ils ont créé leur premier spectacle ensemble au Festival d’Avignon,
en 2008. Il s’appelait Das System ( Le Système ) et il tournait violemment autour de George W. Bush et de
la politique qu’il menait. Parmi les pièces qui constituaient ce matériau, il y avait Electronic City et Unter Eis
( Sous la glace ), devenues des classiques de notre époque, et souvent reprises.
« Frère de théâtre »
Depuis cette aventure, Stanislas Nordey, qui a toujours rêvé d’un travail auteur-metteur en scène, comme
l’ont fait Giraudoux et Jouvet ou Koltès et Chéreau, voit en Falk Richter un « frère de théâtre ». Le projet Je
suis Fassbinder est né de leurs discussions après l’attentat contre Charlie Hebdo , en janvier 2015. Ils se
sont posé la question de la censure, de l’autocensure, de la place de l’artiste dans la société.
Alors est revenue la figure de Rainer Werner Fassbinder. Le hasard – mais en est-ce un ? – de la vie veut que
la première pièce qu’a montée Stanislas Nordey ait été Du sang sur le cou du chat. Il s’intéressait beaucoup
à l’Anti-Théâtre fondé par Fassbinder. Il avait vu la plupart de ses films… mais pas L’Allemagne en automne .
On pourrait se demander ce qu’elle vient faire aujourd’hui, cette Allemagne d’il y a quarante ans. La réponse
est dans le texte, que Falk Richter ne veut pas révéler avant la première. Pour lui, une pièce doit être
découverte le jour où elle est jouée. Nous en avons entendu des passages pendant les répétitions qui
réunissaient toute la distribution, une belle distribution : Thomas Gonzalez, Judith Henry, Eloise Mignon,
Stanislas Nordey et Laurent Sauvage.
Mais, chut ! on ne dira rien. Pas pour garder le secret, mais parce que tout prendra sens quand la pièce sera
vue dans son intégralité. Il suffit de savoir, comme le dit Stanislas Nordey, que « ce n’est pas un hommage
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STRASBOURG 270881722
Date : 03/03/2016
Heure : 06:51:37
Journaliste : Brigitte Salino
www.lemonde.fr
Pays : France
Dynamisme : 320
Page 3/3
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à Fassbinder ». Et Falk Richter de préciser : « C’est une pièce qui met en relation la terreur d’aujourd’hui
et celle des années 1970. » Aucun doute : nous l’avons bien perçu, dans cette salle de répétition où l’on
parlait français, allemand, anglais – où l’on parlait théâtre, au-delà des frontières de la langue. Et où du théâtre
naissait notre monde, et nous dans ce monde.
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STRASBOURG 270881722
Jeudi 3 mars 2016
Je suis Falkbinder
Jeudi 3 mars 2016 à 16h24 • Thomas Flagel
© Jean-Louis Fernandez
Pour sa première création au TNS, Stanislas Nordey partage la mise en scène avec Falk
Richter. Je suis Fassbinder, pièce engagée et grinçante, s’attaque au racisme et aux
nationalismes ré-émergeants en Europe dans un mélange d’extraits de films et d’autofiction passés au tamis du cinéaste Rainer Werner Fassbinder.
Des alter ego, à l’instar de Chéreau / Koltès, rien de moins. Le duo Nordey / Richter
s’est découvert il y a quelques années avec pour point d’orgue My Secret garden (2010).
Celui qui n’était pas encore directeur du TNS avait lu « 600 pages du journal intime
tenu depuis des années par Falk Richter. J’ai tout de suite voulu le monter et être lui
sur scène, parce que je m’y reconnaissais à tous points de vue : les réflexions sur le
monde, le théâtre, l’amour… » Ayant pris la tête de l’institution strasbourgoise,
Stanislas Nordey proposa immédiatement à Richter d’en devenir un des auteurs
associés et de construire, à quatre mains, sa première création maison. « Il écrit tout,
mais c’est moi qui lui ai glissé la thématique de Fassbinder, comme un aiguillon qui le
pique pour aller en des terrains inhabituels », confie-t-il, malicieux, se rappelant du
plaisir pris par l’auteur allemand dans cette pièce, de son propre avis « l’une des choses
les plus importantes qu’il ait écrite dans sa vie, sûrement parce qu’il était alors loin de
chez lui. Je suis Fassbinder sera une sorte d’autoportrait croisé de Falk, de Fassbinder
et de moi. »
© Jean-Louis Fernandez
Collectif
Les équipes se mêlent (scénographe, dramaturge et compositeur allemands ;
comédiens et traductrice français) et se retrouvent à Berlin avant d’investir le TNS pour
bâtir ce projet. Ensemble, ils lisent de nombreuses interviews de Fassbinder, regardent
ses films en boucle comme Les Larmes amères de Petra von Kant, discutent de
l’incroyable actualité des thématiques dont il s’emparait : la question du groupe et la
place de l’immigré (Tous les autres s’appellent Ali 1974), le genre dans L’Année des
treize lunes (1978)… En Allemagne, il est une figure tutélaire, le premier à donner des
rôles principaux à des personnages qui était des immigrés, de très vieilles femmes, des
homosexuels, des femmes au foyer, les habituels oubliés du cinéma. Symbole des
artistes engagés des années 1960-70, créateur provocant et tout en démesure,
Fassbinder a tourné 42 films en 17 ans. Un bourreau de travail dont la vie était
entièrement dédiée à son œuvre, inspirant à Stanislas Nordey une réflexion sur la place
actuelle des artistes, question hantant ses discussions soutenues avec Falk Richter :
« S’autorise-t-on à dire tout ce qu’on veut en tant qu’artiste ? Où commence
l’autocensure ? »
Stanislas Nordey & Falk Richter © Jean-Louis Fernandez
La France en automne
Richter aime croiser différents modes d’écriture et de langage, nourrissant son
processus de création du collectif : citations de Fassbinder, réactualisation de scènes
de films choisies par les comédiens, extraits intimes et monologues introspectifs d’un
être angoissé et déboussolé par l’évolution d’une société dont il ne cachera aucun des
bouleversements actuels. Frontières, nationalisme, racisme, migrants, montée de
Marine Le Pen, sexualité, terrorisme, homophobie… « Mon processus vise à relier ce
que Fassbinder disait dans les années 1960 et 1970 à aujourd’hui, à regarder notre
monde par ses yeux », explique-t-il. L’auteur et metteur en scène prend pour fil rouge
une réactualisation de L’Allemagne en Automne, film regroupant des courts métrages
de différents réalisateurs autour des années de plomb. Celui signé et interprété par
Fassbinder évoque la Bande à Baader et l’état d’urgence. Il y questionne notamment sa
propre mère avec virulence, la poussant à exprimer son désamour pour la démocratie
et le sentiment, partagé à l’époque, souhaitant un dictateur éclairé à la tête du pays.
Richter retravaille cette scène en fonction du contexte français, Nordey jouant
Fassbinder et Laurent Sauvage sa mère. « La situation m’a fait penser à celle de la
France après les attaques du 13 novembre à Paris, explique-t-il. Je me souviens de ce
sentiment premier de peur quand j’ai appris ces événements, me demandant comment
cela pourrait changer nos vies… »
FEAR, son dernier spectacle créé à la Schaubühne de Berlin, parlait de ce même
sentiment collectif : « La peur des réfugiés, l’Allemagne se divisant entre ceux qui
veulent les accueillir et les aider, et d’autres très opposés, suspicieux, gagnés par la
crainte, sans parler de l’extrême droite et notre propre Front National qui se construit
à son tour de manière encore plus dangereuse car vraiment reliée à une pensée nazie.
Où allons-nous ? Vers quoi pensons-nous que nous devrions aller ? J’essaie aussi de
rendre compte des angoisses actuelles en France pour questionner ce qu’il est possible
de dire, ici, sur une scène de théâtre. Comment traitez-vous de la situation politique
actuelle ? Que taisez-vous au théâtre ? »
© Jean-Louis Fernandez
Radikal
Compagnon de route de Nordey depuis ses 20 ans, Laurent Sauvage était déjà de
l’aventure Das System (2008) et My Secret garden (2010). L’acteur évoque « le plaisir
de travailler en direct avec l’auteur, sa vision précise de ce qu’il écrit et son engagement
total » pour plonger dans les maux gangrénant le vivre ensemble. « Je suis Fassbinder
ressemble à un grand rêve – ou un cauchemar – peuplé de traces, dans le trouble de
qui parle et en quel nom mais avec une acuité sans concession. » Cigarettes, alcool,
nuits blanches et nudité créent une “ambiance Fassbinder” qui prend corps au plateau,
les comédiens portant beau : manteaux seventies au col évasé, Ray-Ban bouffantes,
chemises en flanelle et pantalons pattes d’eph’ dans un décor sur trois niveaux avec
tables et immense canapé noir en skaï. Des scènes collectives sont projetées sur le mur
du fond, deux écrans tombent des cintres. Stanislas Nordey et Falk Richter parlent
beaucoup en dehors du plateau, tissant les fils permettant à ce dernier d’écrire la mise
en scène sur le vif, à grand renfort d’improvisations, une de ses marques de fabrique.
Si vous avez aimé l’engagement de Small Town Boy, vous ne serez pas déçus car vous
n’avez encore rien vu…
Au Théâtre national de Strasbourg, du 4 au 19 mars – www.tns.fr
> Projection du film Les Larmes amères de Petra von Kant de Fassbinder, lundi 7 mars
à 20h, au cinéma Star
> Rencontre avec l’équipe artistique à la Librairie Kléber, samedi 12 mars à 14h30
Au Théâtre Vidy-Lausanne (Suisse), du 26 avril au 4 mai – www.vidy.ch
Au Théâtre national de La Colline (Paris), du 10 mai au 4 juin – www.colline.fr
20 MINUTES (STRASBOURG)
Date : 04 MARS 16
Page de l'article : p.28
Journaliste : Aurélie Marmu
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 27082
Page 1/1
THÉÂTRE Début vendredi de « Je suis Fassbinder » au TNS
Nordey acte I scène I
Aurélie Marmu
S
oirée de première au TNS.
Stanislas Nordey dévoile,
dès vendredi, sa première
création pour le Théâtre national
de Strasbourg. Le directeur joue
et met en scène la pièce Je suis
Fassbinder avec son auteur, l'artiste allemand Falk Richter. Leur
idée ? Partir de la figure du cinéaste allemand pour interroger
la position actuelle de l'artiste ou
encore évoquer la question de
l'autocensure dans le domaine
artistique.
Ecrit dans l'urgence
Pour y arriver, Falk Richter
aborde sans détour le développement des nouveaux courants
d'extrême droite en Europe et la
liberté d'expression. Stanislas
Nordey précise : « Ce n'est pas
un spectacle politique, c'est un
spectacle d'aujourd'hui déjanté,
drôle, profond, bordélique et
généreux ». Le ton est donné.
Côté écriture, l'urgence est de
mise. Falk Richter a écrit en soi-
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Les comédiens de la pièce « Je suis Fassbinder » de Falk Richter.
rée au fil des répétitions. Les
textes ont été traduits le lendemain matin par Anne Monfort
avant d'être joués et ajustés
l'après-midi sur le plateau avec
les comédiens Thomas Gonzalez,
Judith Henry, Eloise Mignon, Laurent Sauvage, Stanislas Nordey et
le dramaturge Falk Richter.
A noter, une projection du film
Les larmes arrières de Petra Von
Kant de Rainer Werner Fassbinder est prévue lundi à 20 h au
Star. Et une rencontre avec
l'éguipe du spectacle est proposée samedi 12 mars à U h 30 à
la librairie Kléber. •
De 6 à 28 €. A 20 h, de vendredi jusqu 'au
19mars,età U h dimanche, au TNS,
I, avenue de la Marseillaise, www.tns.fr.
STRASBOURG 6051717400502
Date : 07/03/2016
Heure : 08:50:38
Journaliste : Stéphane CAPRON
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Pays : France
Dynamisme : 13
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Falk Richter : « La scène est le témoin de notre temps »
Falk Richter
© Jean-Louis Fernandez
Falk Richter raconte le monde d'aujourd'hui dans ses pièces. En 2003 il lance un projet intitulé Das
System, une expérience d'écriture et de mise en scène s'étendant sur plusieurs pièces. Stanislas
Nordey met en scène une version française au Festival d'Avignon. Les deux hommes collaborent
ensemble pour la première fois en 2010 dans ce même Festival d'Avignon. Falk Richter est désormais
artiste associé au Théâtre National de Strasbourg dont Stanislas Nordey est désormais directeur. Je
suis Fassinder, leur nouvelle collaboration, porte un regard aiguisé sur l'Europe d'aujourd'hui. Falk
Richter a écrit le texte, les deux compères l'ont mis en scène. Rencontre avec l'écrivain à l'issue de
la première à Strasbourg.
C'est votre deuxième collaboration avec Stanislas Nordey après My Secret Garden en 210 au Festival
d'Avignon, ici il y a en plus un autre auteur à vos côtés, Fassbinder.
Je suis très heureux de cette nouvelle collaboration très riche avec Stanislas. Il y a effectivement dans la
pièce des textes de Fassbinder Et il s'agit pour moi de dialoguer avec son œuvre. En intégrant ses mots
dans ma langue à travers certains de ses certains films je peux reformuler ses propos pour le présent. Et
formuler des questions.
Et l'actualité récente a nourri aussi votre texte.
Il était essentiel de parler de la situation actuelle en Allemagne, en France et de cette Europe qui se radicalise
et bascule vers l'extrême droite. Il y a de plus en plus de gouvernements quasi fascistes qui argumentent
dans une tradition populiste.
Une partie de la pièce a été écrite ici en résidence à Strasbourg. Est-ce que vous l'auriez écrite de la
même façon à Berlin ?
Effectivement c'est un peu différent quand je suis en France, mon regard se porte plus vers votre quotidien. Et
je regarde l'Allemagne avec un peu de distance. Cette création mêle des textes écrits à Berlin et d'autres écrits
pendant les répétitions. Le dernier long monologue de Stanislas est une opinion personnelle qui été écrite ici.
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STRASBOURG 271125385
Date : 07/03/2016
Heure : 08:50:38
Journaliste : Stéphane CAPRON
www.sceneweb.fr
Pays : France
Dynamisme : 13
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Il s'agit d'un passage où il est question d'une députée européen allemand Beatrix von Stroch qui siège
au Parlement européen…
Oui cette femme est de plus en plus populaire en Allemagne avec des propos radicaux de droite. Elle siège
ici à Strasbourg. Et ce qui m'a fasciné c'est qu'elle est élue démocrate mais ses positions vont à l'encontre
de l'Union Européenne et de la démocratie. C'est un grand danger.
Vous écrivez sur l'actualité, ce qui n'est pas le cas des auteurs de théâtre français. Comment vous
l'expliquez ?
Je ne sais pas en tout cas moi ce qui m'intéresse c'est d'observer notre société. Je préfère parler de cet «
ici et maintenant » avec les moyens du théâtre qui est pour moi le témoin de notre temps. Sur une scène on
doit discuter des sujets d'actualité qui ébranlent notre société. Mes textes sont des espaces pour dialoguer
de ces sujets.
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STRASBOURG 271125385
Le 7 mars 2016
Nordey & Richter créent «Je suis Fassbinder»,
beau balbutiement d’un théâtre d’action
directe
7 MARS 2016 PAR JEAN-PIERRE THIBAUDAT BLOG : BALAGAN, LE BLOG DE JEANPIERRE THIBAUDAT
Auteur associé au Théâtre National de Strasbourg, Falk Richter signe le texte et cosigne
la mise en scène de « Je suis Fassbinder » avec Stanislas Nordey, première création
maison du nouveau directeur. Une fertile complicité.
Stanislas Nordey et Falk Richter © Jean-Louis Fernandez
A la fin, ils sont assis sur un canapé en skaï des années 70 comme on en trouve encore
parfois dans des salles d’attente d’aéroports lointains conservés dans leur jus. Ils nous
regardent, ne disent rien mais leur regardnous interroge. « Que faire ? » demandent
ces yeux à la fois fatigués et tendus. Oui, que faire ? C’est la vieille question. A tout le
moins, ils en ont fait un spectacle. Le théâtre n’a réponse à rien mais c’est un agitateur
de questions, un as du dialogue musclé, contradictoire, amoureux, désabusé, osé, un
pro du monologue sentimentalo-politique. Il n’a pas froid aux yeux et aux oreilles le
théâtre, et il a plus d’un tour dans son sac à malices.
La peur et la haine
C’est que viennent de prouver crânement les quatre acteurs de « Je suis Fassbinder »
texte écrit à chaud, au fil des répétitions, par Falk Richter qui cosigne la mise en scène
avec Stanislas Nordey. Richter écrit en allemand et Anne Monfort, sa traductrice
attitrée, traduisait au fur et à mesure des répétitions. Le texte, fait d’une accumulation-
articulation de matériaux comme souvent chez Richter, n’a été finalisé que dans les
derniers jours précédant la première. Il serait séant que madame Merkel et monsieur
Hollande honorent de leur présence ce sommet franco-allemand.
Serrer au plus près la réalité de l’hyper présent comme on serre le cou d’une personne
aimée au risque de l’étouffer ou de la faire jouir. C’est l’ambition folle et noble de « Je
suis Fassbinder». Personne n’en ressort indemne. « Je suis Fassbinder » met les doigts
là où ça fait mal, là où le "j’y comprends rien" ou les "tous pourris" deviennent piètres
échappatoires. C’est un spectacle qui explore la peur et décrypte la haine qui nous
entourent et nous habitent.
De cette soirée bouillonnante et joyeusement brouillonne, le théâtre sort grandi. Et le
Théâtre National de Strasbourg sous la direction de Stanislas Nordey avec cette
première création maison hautement risquée (je veux dire risquée avec hauteur) où le
directeur est aux premières loges, concentre les ambitions magnifiques de cette
nouvelle époque du TNS qui vient de s’ouvrir.
D'une époque l'autre
Ce spectacle n’est pas sans rappeler aux vieux abonnés du TNS, « Vichy fictions » et
« Le Palais de justice » deux spectacles majeurs de la formidable époque où Jean-Pierre
Vincent dirigeait le TNS, une époque que Nordey n’a pas connue, pas plus que Richter
n’a connu la Schaubühne de Stein et Grüber. Croisement de questionnements d’une
époque l’autre. Sauf que « Je suis Fassbinder », au titre trompeur, est une pièce
d’actualité au sens strict, l’actualité en continue qui serine nos joursmédiatisés à mort.
Les émigrés, Cologne, ça commence par ça. Cela s’en éloigne pour mieux remettre les
pieds dans la gadoue.
Auteur associé au TNS, Falk Richter est aussi associé au parcours de Nordey. Dès qu’ils
se sont rencontrés, ils ne se sont reconnus. L’un écrit, l’autre joue, les deux « frères »
mettent conjointement en scène, chacun est venu avec ses collaborateurs (la
scénographe et costumière Katrin Hoffmann pour Richter, pourNordey Stéphanie
Daniel pour les lumières et Claire Ingrid Cottanceau, complice artistique de longue
date). Sur le plateau, Nordey retrouve le fidèle et fabuleux Laurent Sauvage rejoint par
Judith Henry, Eloïse Mignon (venue via Richter) et Thomas Gonzalez. Tous aux
taquets.
Fassbinder est ici autant le cinéaste et l‘homme de théâtre boulimique que l’on sait,
qu’une base de données des années 70 tenant lieu de miroir aux alouettes. Il est
d’abord un artiste total engagé dans son corps et dans son temps, une figure rebelle
d’une Allemagne non dénazifiée. Le spectacle y revient comme à une source
tumultueuse.
"Là-bas, il y a la guerre"
Aujourd’hui le fascisme gagne des parts de marché électoral, partout en Europe. La
haine de l’autre, le repli identitaire, le chacun chez soi se portent bien. Le spectacle
touille tout ça. Ouverture : Fassbinder (Stanislas Nordey) regarde sa mère (Laurent
Sauvage) allumer un clope dans le noir. Situation calquée sur un film de Fassbinder où
effectivement le rejeton joufflu interroge sa mère mais c’est autre chose. Lumière,
premières répliques :
« Fassbinder. Oui mais tu ne peux pas juste les mettre dehors comme ça ils sont censés
aller où ?
Sa mère. Là d’où ils sont venus
Fassbinder. Là-bas il y a la guerre. Il n’y a rien tout est détruit
Sa mère. Alors ils doivent reconstruire leur pays.
Fassbinder. Mais comment ? En pleine guerre
Sa mère. Je m’en fous. »
Etc. Première dispute entre la mère et son fils, premier gouffre. Après un noir, on remet
ça avec Cologne.
Plusieurs fois la langue de Laurent Sauvage fourche : il dit Stan au lieu de Fassbinder,
Nordey le reprend voire le fait reprendre plus haut : il joue un type nommé Fassbinder
(il porte le blouson de cuir noir attaché à l’image de cet artiste et bientôt tous en
porteront un), et il reste le metteur en scène. Richter, de son côté, a intégré dans
l’écriture ces probables lapsus de répétition. Et c’est ainsi que le spectacle avance,
incluant constamment son mode de production fait de discussions, d’improvisations,
d’essais. « Je voudrais que le spectateur ait une meilleure idée de ce à quoi pourrait
ressembler une vraie vie - une vie dont il aurait le désir » ditje ne sais plus qui dans le
spectacle.
Jeanne d'Arc et l'Europe
La troisième scène est un monologue. Celui d’une dénommée Europe interprétée par
la légère, gracile et pugnace Judith Henry (secondée par le chœur des trois autres via
une litanie, forme narrative dont Richter use à foison). Comment ne pas faire le
rapprochement avec le monologue de Jeanne d’Arc dans « Vichy-Fictions » dit sur cette
même scène du TNS par Bérangère Bonvoisin. Une actrice retrouvée la veille à Pars,
après une trop longue absence, dans un guet-apens tendu au Théâtre de la colline :
pièce fatiguée, montée par un metteur en scène peu inspiré. A quoi bon consacrer un
article à cette déconvenue ? Revenons au sac de nœuds « Je suis Fassbinder ».
Scène de "Je suis Fassbinder" © Jean-Louis Fernandez
« Je suis déchirée et tordue » dit l’Europe. Elle est comme les couples dont il va être
question au fil de la soirée, en passant au besoin par Margaret Von Trotta, les films de
Rainer comme « Les larmes amères de Pétra Von Kant », voire une paraphrase
inopinée de la « Musica » de Duras. La force de Richter, dans la plupart de ces textes,
c’est d’associer l’histoire d’un pays et les histoires de couples de ses habitants, dans
un jeu de tensions et un feuilletage où le spectateur peur s’adonner au plaisir de la
métaphore. Des couples (ou des pays) burinés de doute, des amants qui ont peur de
devenir étranger l’un à l’autre, des pays qui ont peur des réfugiés.
« Each man kills the thing he loves” (chaque homme tue la chose aimée) chante
merveilleusement Thomas Fernandez, bel acteur-chanteur doué en tout jusqu’à nous
faire rire en faisant tournoyer sa bite comme personne. Ici et là, des glissements
s’opèrent entre le personnage et l’identité de l’acteur. Dites donc, on dirait que ça part
dans tous le sens ? rumine le lecteur par-dessus mon épaule. Oui, et alors ? Mais ça
raconte quoi, ce machin ? Vous, moi, nous. Vous avez du feu ?
"Je suis un sismographe!"
« Stan (Fassbinder). Rien ni personne n’a aucun sens actuellement. L’Europe n’a
aucun sens. Toute la politique extérieure française n’a aucun sens. NOTRE
INTERVENTION EN SYRIE N’A AUCUN SENS. Pourquoi MOI je devrais avoir un
sens ? Je suis un chroniqueur. Je suis un sismographe ! Je perçois ce qui existe. RIEN
DE PLUS ! » Bien dit. Mais les acteurs en veulent plus. Judith trouve que ça traine,
Laurent picole et scande « Cuba libre » (nom d’un cocktail alcoolisé). Le spectacle
instruit aussi sa critique.
L’état d’urgence, l’autocensure s’inviteront dans un long monologue dit par Stanislas
Nordey face au public (sa position de prédilection). On peut penser que c’est d’abord
le nouveau directeur du Théâtre National de Strasbourg qui parle. Il cite ce que dit
Fassbinder dans « L’Allemagne en automne » (1977) : « La question la plus importante
est de savoir comment détruire cette société ? » et se demande si une telle phrase est
audible aujourd’hui, si le théâtre doit se contenter de monter « Les trois sœurs » de
Tchekhov, « comme si de rien n’était». La version qu’en donne actuellement la
brésilienne Christiane Jahaty (vue en 2014 au 104, lire ici) dans la grande salle de la
Colline contredit ces propos.
Scène de "Je suis Fassbinder" © Jean-Louis Fernandez
J’ai souvent ri en assistant à la première « Je suis Fassbinder » à Strasbourg, on se
protège ou on se libère comme on peut. En sortant, j’avais en tête ces mots du
programme de Beatrix von Storch, (petite fille du ministre des finances d’Hitler et
vice-présidente d’un parti d’extrême droite en Allemagne) que cite Falk Richter: « les
théâtres ont le devoir de promouvoir une image positive de leur propre patrie. Les
mises en scène des pièces classiques allemandesdoivent créer une identification à
notre pays ». C’est exactement ce programme que préconisent voire imposent le
gouvernent Orban en Hongrie, le gouvernement Kraczynski en Pologne et Poutine en
Russie. Trois pays de grande tradition théâtrale dont on coupe les ailes. Ici on ferme
des théâtres indépendants, ailleurs la peur gouverne le choix des pièces…D'autres
résistent, ne pactisent pas.
L'allée des droits de l'homme
Alors que la foule se pressait et s’embrassait au « pot de première », je suis sorti dehors
avec un sentiment de tristesse et de mélancolie. C’est souvent comme ça au sortir des
pièces de Richter. On rit, on s’excite pendant et, à la sortie, on a le cœur serré. Un pan
de votre vie est passé par là, quelque vieille lâcheté ou renoncement, une pincée de je
ne sais quoi. Les rails du tramway brillaient dans la nuit. Je le ai suivis jusqu’au
Parlement européen où siège Beatrix von Storch, elle y est députée. La rue qui borde
cet édifice rond comme des arènes antiques a pour nom « l’allée des droits de
l’homme ». Une allée, pas un boulevard.
De retour à l’hôtel j’ai lu les deux pièces de Falk Richter qui viennent de paraître à
l’Arche (son éditeur habituel). « Small towns boy », une commande du Théâtre
Maxime Gorki de Berlin en collaboration avec les acteurs du théâtre et « A deux heures
du matin ». Deux brassées de textes jetés sur le papier et malaxés en scène,explorant
la sphère intime de couples homos, hétéros, de solitudes, d’amours en standby. « Je
n’ai plus de langue pour exprimer CE QUE JE SUIS EN TRAIN DE RESSENTIR ET CE
QUE JE DESIRE, LA MAINTENANT» dit l’un des personnages. Deux pièces matériaux
de plus.
La forte complicité entre Nordey et Richter, la circulation entre deux langues,
l'actualité de deux pays (la France et l’Allemagne) et le mode de travail adopté par
étapes sur un laps de temps assez long (dont parle très bien Laurent Sauvage dans le
programme) portent plus avant l’écriture scénique de Nordey & Richter, vers les rives
d’un théâtre plus fragile, plus immédiat et plus à chaud, quelque chose comme un
théâtre d’action directe.
Théâtre National de Strasbourg, du mar au sam 20h, jusqu’au 19 mars. Puis MC2
Grenoble du 24mars au 2 avril, TNB Rennes du 15 au 20 avril, Vidy-Lausanne du 26
avril au 4 mai, Théâtre de la Collineà Paris du 10 mai au 4 juin, Theater Basel le 7 juin.
« A deux heures du matin » et « Small town boy » sont publiés en un volume aux
éditions de l’Arche, 154p, 15€
Le 8 mars 2016
A Strasbourg, Stanislas Nordey convoque
Fassbinder pour éclairer les crises de
l'Europe
Stanislas Nordey sur scène dans la pièce de Peter Handke "Par les villages" le 4 juillet
2013 dans la Cour d'honneur du Palais des Papes à Avignon ((c) Afp)
Strasbourg (AFP) - Crise des réfugiés, état d'urgence en France, montée de la
xénophobie en Allemagne, dictatures en Europe: avec "Je suis Fassbinder", le directeur
du théâtre national de Strasbourg Stanislas Nordey cosigne avec l'Allemand Falk
Richter une pièce qui dénonce les amalgames et les périls qui guettent le Vieux
Continent.
La pièce, écrite par Richter et co-mise en scène par Nordey et Richter, s'inspire
librement de "L'Allemagne en Automne", un film tourné en 1977 par Rainer Werner
Fassbinder, figure controversée du cinéma allemand, mort en 1982 à 37 ans.
En près de 2 heures, la pièce revisite, à la lueur des crises contemporaines, ce film basé
sur un entretien du réalisateur avec sa mère qui aborde une autre crise sociétale, celle
des "années de plomb" quand l'Allemagne cherchait des réponses au terrorisme de la
Fraction Armée rouge.
"Que sont nos familles recomposées, nos vies, nos morales, comment avance-t-on
dans nos sociétés aujourd'hui ? Que se passe-t-il après les attentats du 13 novembre
(en France) et le soir du réveillon de Cologne ?": "Je suis Fassbinder" aborde quelquesunes de ces questions, souligne Stanislas Nordey.
"Le théâtre de Falk ne cherche pas à démontrer, c'est un théâtre qui nous questionne",
estime Nordey à propos de celui qu'il surnomme "son frère de théâtre", évoquant une
écriture qui ne se prend "jamais au sérieux", "drôle" et "traversée par des zones
d'ombre".
"Nous vivons dans une société capitaliste au sein de laquelle chacun a peur de perdre
quelque chose. Avec la crise des réfugiés, cette situation est devenue encore plus
aiguë", estime Falk Richter, menacé de mort en Allemagne pour "Fear" sa dernière
création mise en scène à la Schaubühne de Berlin.
"Notre époque est traversée par une grande peur. Il y a des défis importants. L'Europe
menace d'éclater et l'Allemagne qui abrite actuellement un million de réfugiés, est en
proie à de très importants mouvements d'extrême droite", estime Richter qui
s'inquiète d'une "radicalisation de plus en plus grande" dans son pays.
- Un dirigeant "autoritaire" –
Pour leur travail, démarré après les événements de Charlie Hebdo, les deux artistes ont
choisi un décor fait de meubles contemporains.
Fassbinder, incarné sur scène par Stanislas Nordey rejoue en 2016 plusieurs de ces
entretiens dirigés par le cinéaste en 1977 avec sa mère.
Celle-ci, devant la caméra clame qu'elle ne "supporte plus" cette Allemagne "envahie"
par ces "réfugiés arabes" qui "violent nos femmes", dénonce cet Etat qui ne la "protège
plus" et ces hommes devenus "des lavettes".
Au fil des discussions à la table de la cuisine, la mère, poussée dans ses derniers
retranchements par Rainer, blouson en cuir noir, avoue du bout des lèvres qu'elle
souhaite l'arrivée d'un dirigeant "autoritaire", mais "gentil" pour remettre de l'ordre
dans le pays.
La pièce montre des personnages reclus chez eux, perdus, pris de mal-être, qui en
France et en Allemagne et ailleurs expriment leurs peurs, dans une Europe drapée de
rouge personnifiée sur scène, en proie aux "doutes", qui menace de vaciller, débordée
par les crises.
Volontairement "drôle, sérieuse et bordélique", souligne Nordey, la pièce montre des
personnages qui n'en oublient pas de vivre en partageant des moments ensemble, en
s'amusant, en chantant, et en s'aimant.
Sur la scène, les performances scéniques se succèdent: nu, un jeune homme va jusqu'à
tourner en dérision les événements de Cologne en agitant son corps devant une amie.
Présentée au public vendredi soir au TNS, la première de la pièce a été applaudie sans
discontinuer durant plusieurs minutes.
"Je suis Fassbinder" est présenté à Strasbourg jusqu'au 19 mars avant de partir en
tournée à Grenoble (24 mars-2 avril), Rennes (15-20 avril), Lausanne en Suisse (26
avril-6 mai) et Paris (10 mai-4 juin) au théâtre de la Colline.
Date : 09 MARS 16
Journaliste : Christine Zimmer
Pays : France
Périodicité : Quotidien
OJD : 163692
Page 1/1
STRASBOURG Je suis Fassbinder au TNS
Le miroir du monde
1e78d58853802f05229a41346b0f55c00a86df9ba1f463b
Je suis Fassbinder est une
analyse du théâtre lui-même, de sa force d'interpellation, mais aussi du monde
contemporain.
C'EST UNE puissante réflexion
sur ce qui est en train de se
jouer en Europe, en écho à ce
qui secoue le Moyen-Orient
mais pas seulement. Sous les
feux de la rampe, le politique,
l'éthique, le social, l'économique, l'humain se donnent à voir
sous un jour parfois blafard,
parfois grinçant souvent drôle.
Non il n'y a pas de grandes
théories, mais une dispute
d'idées, de points de vue, de
convictions, de désarrois, de renoncements, une pratique de
l'ironie, de l'outrance, du déjanté, qui stimule le rire et les
remises en question.
Sur le plateau, le décor évoque
les années 70, quèlques tapis
moutonneux blancs, une table,
quèlques chaises, un large canapé bas, des écrans qui tantôt
accueillent des scènes de films
de l'ex-enfant terrible du cinéma allemand, tantôt reflètent
ce qui se passe sur scène. Comment chacun peut-il se positionner face à la guerre et à la
Tous droits réservés à l'éditeur
Un spectacle de Falk Richter, auteur, metteur en scène et
Stanislas Nordey, co-metteur en scène, acteur. PHOTO FERNANDEZ
barbarie qui dévorent des êtres
depuis plusieurs années au
Moyen-Orient ? Comment accueille-t-on ceux qui se jettent à
corps perdu dans une traversée
à hauts risques de la Méditerranée?
Le texte a été écrit en résonance
aux films corrosifs de Fassbinder, et le spectacle apparaît
dans un jaillissement qui laisse
à penser qu'il est en constante
reformation. Et cela donne au
spectateur une liberté incroyable, celle de pouvoir adjoindre
sa propre vision des choses à la
matière brûlante qui palpite sur
le plateau.
Entre la salle et la scène, les
émotions circulent : le soir de la
première le public n'a cessé de
réagir, par des rires, à la présen-
tation volontiers provocatrice
des choses de ce monde. Le
théâtre prend tout son sens,
lieu d'expurgation des passions
humaines. Fassbinder, dans
les années 70, avait plongé ses
mains dans le c h a u d r o n
bouillonnant du passé nazi
qu'il voyait encore vivant dans
de nombreuses strates sociales. Le film L'Allemagne en
automne dans lequel le cinéaste, son compagnon et sa mère
débattent des actions terroristes d'extrême gauche et de la
réponse qu'il faudrait y apporter est un point de cristallisation.
Le spectacle fonctionne par tableaux, qui s'emboîtent, s'opposent, se superposent, évoquent
le conscient et l'inconscient, les
imbrications du politique et de
l'intime, du sexuel, du public et
du privé, la question des réfugiés et des fantasmes qu'elle
soulève, la montée de l'extrême
droite. Tout cela bouillonne,
interagit et pose la question de
la mission du théâtre. Peuton tout dire sur un plateau et
comment le dire ? •
CHRISTINE ZIMMER
I Jusqu'au 19 mars, salle Koltès au
TNS. © 03 88 24 88 24
STRASBOURG 6537227400503
Le 10 mars 2016
Nordey et Richter conjuguent Fassbinder au
plus que présent
Philippe Chevilley / Chef de Service | Le 10/03 à 07:00
Les comédiens rejouent les films de Fassbinder en les tirant vers le présent. Ici,
Thomas Gonzalez. Photo Jean-Louis Fernandez
Un plateau en désordre, entre salle de répétitions et appart trash « seventies », des
écrans qui coulissent, des acteurs qui changent d'humeur et de peau, des mots violents
qui fusent, des chansons tendres qui consolent… « Je suis Fassbinder », première
création de Stanislas Nordey depuis qu'il dirige le Théâtre national de Strasbourg, est
un spectacle-manifeste : comment faire du théâtre actuel, différent et provocant, dans
une Europe exsangue en quête de repères…
Le metteur en scène iconoclaste forme un binôme idéal avec Falk Richter. L'auteur
dramatique allemand a conçu à même le plateau un texte fracassant autour de l'oeuvre
et de la pensée du cinéaste allemand. En partant des films et des écrits de Rainer
Werner Fassbinder, Richter et Nordey nous parlent de 2016. Le terrorisme de Daech
fait écho à celui de la bande à Baader durant les années de plomb. Aujourd'hui comme
hier, l'artiste polymorphe, mort en 1982 à l'âge de trente-sept ans, aurait sans doute
fustigé l'idéologie sécuritaire, la résurgence de l'extrême droite, et plus que jamais
prôné « la destruction de la société… par l'art ».
« Je suis Fassbinder » est un chaos scénique de deux heures, bien maîtrisé, alternant
dialogues autour d'une table, monologues en solo ou dits à plusieurs, pantomimes,
chants et fausses impros comiques… Les extraits de film projetés et la répétition de
phrases clefs permettent au public de reconstituer peu à peu le puzzle « rainerien ». La
fusion entre passé et présent - le petit monde de Fassbinder confronté à l'actualité
brûlante - fonctionne parfaitement. Nordey et Richter inventent un théâtre au « plus
que présent », où l'on débat avec acuité de la crise des migrants, des événements de
Cologne et de l'état d'urgence en France. Des fulgurances émergent, entre les poncifs,
comme dans ce fascinant monologue sur l'Europe en mal d'identité.
STAN (FASSBINDER) NORDEY
Les comédiens se dépensent sans compter, avec le décalage nécessaire, pour donner
poids et rythme à la partition débridée de Falk Richter. Stan (Fassbinder) Nordey est
un « héros » magnétique et d'une grande clarté. Laurent Sauvage impressionne dans
le rôle de la mère désemparée. Judith Henry incarne avec autant de justesse une femme
stressée qu'un continent blessé. Thomas Gonzalez et Eloïse Mignon irradient de leur
fraîche insolence ce grand barnum politique et polémique. « Je suis Fassbinder », c'est
le théâtre qui dit le monde en direct. Et croit pouvoir encore le changer, peut-être.
Le 11 mars 2016
Le théâtre libre de Stanislas Nordey
Pour sa première création à la tête du Théâtre national de Strasbourg, Stanislas Nordey
signe, avec l’Allemand Falk Richter, un « spectacle-manifeste ».
La mise en scène, d’une grande vitalité, est méticuleusement réglée sur le mode d’un
joyeux chaos, qui n’est qu’apparence. / Jean-Louis Fernandez
« Je suis Fassbinder »
de Falk Richter
Théâtre national de Strasbourg
Un théâtre d’action. Un théâtre de combat. Un théâtre qui provoque, invoque,
convoque l’Histoire au plus près de son présent. Qui bouscule, dérange, interroge, sans
donner de réponses, laissant à chacun le soin de les chercher. Qui conteste le bon sens
et les certitudes, prêche le désordre contre l’ordre pour mettre à jour des vérités pas
toujours bonnes à entendre, mais toujours bonnes à dire. Un théâtre politique – ce qui
ne veut pas dire militant –, sans censure…
C’est le défi que, pour sa première création en tant que directeur du Théâtre national
de Strasbourg (TNS), s’est lancé Stanislas Nordey avec Je suis Fassbinder – une pièce
écrite par l’Allemand Falk Richter, qui en cosigne la mise en scène.
Retrouver l’acuité du regard de Fassbinder
Malgré ce que le titre peut laisser entendre, il ne s’agit en rien d’une biographie narrant
par le menu la vie et l’œuvre de Rainer Werner Fassbinder (1945-1982). Sans doute cet
auteur, acteur et metteur en scène, aussi prolifique que génial, d’une vingtaine de
pièces, du double de films et de séries est-il présent sur la scène, interprété par un
acteur (Stanislas Nordey lui-même). Il apparaît, aussi, démultiplié en vidéos et en
photos. Ses portraits jonchent le sol. Des extraits de ses films sont projetés (Les Larmes
amères de Petra von Kant…). Les références et citations sont nombreuses.
Cependant, l’entreprise ne saurait se réduire à un simple exercice de copier-coller. Son
ambition est autre : retrouver, à travers ces reprises, l’acuité du regard que portait
Fassbinder sur la décennie 1970-1980 pour l’appliquer aux années 2010.
Hier et maintenant en résonances
D’entrée, le ton est donné avec une première séquence, adaptée de L’Allemagne en
automne. Dans ce film, réalisé en 1978, Fassbinder s’oppose à sa mère dans une longue
discussion sur la démocratie et le terrorisme, au lendemain des « suicides » dans leur
prison d’Ulrike Meinhof et d’Andreas Baader.
Sous la plume de Richter, la confrontation demeure, mais à partir d’une réalité autre :
l’« affaire » du viol des femmes de Cologne et des discours de haine qui lui ont succédé.
Discours de rejet de l’immigré, du réfugié accusé d’abuser grassement de l’accueil qui
lui est offert. C’est ce que proclame à son tour la « mère » de Fassbinder, avant d’en
appeler au retour d’un chef « autoritaire », mais « qui soit gentil » !
Hier et maintenant entrent en résonances, sans raccourcis factices. Habilement, le
spectacle maintient, de bout en bout, un rien de distance. Ce n’est pas un hasard si
Stanislas Nordey se fait appeler tantôt « Rainer » comme Fassbinder, tantôt « Stan »
comme Stanislas. Il en est de même pour Laurent Sauvage qui joue la mère, devenant
tour à tour « maman » et « Laurent ».
Tableau d’une Europe en crise
Il en est ainsi tout au long des quatre chapitres et vingt séquences peignant peu à peu
le tableau d’une Europe renfermée sur elle-même, en butte à la crise et au nouveau
terrorisme djihadiste. Partout, l’antisémitisme et l’extrême droite relèvent la tête. En
France, avec Marine Le Pen et son Front national ; en Allemagne, avec Pegida, le parti
de Kathrin Oertel, élue européenne. Partout l’atmosphère est délétère, jusque dans les
relations entre les êtres. L’individualisme règne en maître. Et, par voie de conséquence,
la méfiance et la solitude.
Une bande de comédiens fabuleuse d’invention
Face à un tel état des lieux, on pourrait craindre une course morbide au nihilisme
dépressif. C’est compter sans la vitalité de la mise en scène, volontiers « trash »,
méticuleusement réglée sur le mode d’un joyeux chaos (qui n’est qu’apparence), digne
des plus riches heures de l’underground contestataire.
La bande de comédiens est fabuleuse d’invention, de liberté et d’énergie (Nordey luimême, Laurent Sauvage, Thomas Gonzalez, Éloïse Mignon et Judith Henry, divine en
Europe).
Quant au texte, il s’est construit en même temps que le spectacle. Précédée de séances
réunissant toute l’équipe du spectacle, l’écriture s’est élaborée, à partir d’une page
blanche, en même temps que le décor, les lumières, la mise en scène, le jeu des acteurs.
Le tout en quatre semaines seulement de répétitions et d’improvisations. C’est-à-dire
dans l’urgence du théâtre.
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Une vie de théâtre
1966 : naissance à Paris. Fils de la comédienne Véronique Nordey et du cinéaste JeanPierre Mocky.
1987 : à peine sorti du Conservatoire de Paris, signe sa première mise en scène, La
Dispute de Marivaux.
1994-1997 : artiste associé au Théâtre des Amandiers de Nanterre.
1998-2001 : codirecteur, avec Valérie Lang, du Théâtre Gérard-Philipe, CDN de SaintDenis.
2000-2012 : responsable de l’école du Théâtre national de Bretagne.
2008 : rencontre avec Falk Richter. Créations de Sept Secondes et de Das System.
2010 : création de My Secret Garden de Falk Richter.
2013 : artiste associé, avec Wajdi Mouawad, du festival d’Avignon.
2014 : directeur du Théâtre national de Strasbourg.
Didier Méreuze
20 heures, jusqu’au 19 mars. Rens. : 03.88.24.88.00. tns. fr. À Grenoble du 24 mars au
2 avril, Rennes du 15 au 20, Paris, au Théâtre national de la Colline, du 10 mai au 4 juin.
12 mars 2016
Etre ou ne pas être Fassbinder
LE MONDE | 12.03.2016 à 11h09 • Mis à jour le 13.03.2016 à 21h59 | Par Brigitte
Salino
C’est un spectacle-choc, qui parle de ce que l’on vit en Europe aujourd’hui, avec au
centre la France et l’Allemagne. La montée des nationalismes, les poussées de
l’extrême droite, les attentats de Paris, la manifestation contre le mariage pour tous,
les viols de Cologne, la crise des réfugiés… tout y est abordé d’une manière frontale,
dans une ambiance souvent proche de l’implosion et sous un titre en forme de
manifeste : Je suis Fassbinder.
Au départ, il était question du cinéaste Rainer Werner Fassbinder (1945-1982), à qui
le dramaturge allemand Falk Richter et le metteur en scène français Stanislas Nordey
voulaient consacrer un spectacle. Ils en étaient aux prémices quand a eu lieu la
fusillade de Charlie Hebdo, en janvier 2015. Comme tout le monde, ils se sont posé la
question : un artiste peut-il tout dire ? Oui, répond Je suis Fassbinder, dont Falk
Richter a écrit le texte au jour le jour, en tenant compte des cinq interprètes et de
l’actualité, qu’il confronte à celle des années 1970.
Un film est central dans le spectacle : L’Allemagne en automne. Sorti en 1977, il est
signé de plusieurs cinéastes, dont Rainer Werner Fassbinder, qui se filme avec son
amant et sa mère, avec laquelle il parle de la situation induite par les attentats
terroristes de la Fraction armée rouge (RAF). Tension extrême, opinions opposées : la
mère pense qu’il faudrait « un gentil Führer » pour mettre fin au chaos, quand
Fassbinder voudrait voir détruit le système qui a créé ce chaos.
UN THÉÂTRE QUI COGNE, CONVOQUE FRANÇOIS HOLLANDE, ANGELA
MERKEL, VIKTOR ORBAN, MARION MARÉCHAL LE PEN
Partant de là, Falk Richter écrit son « Allemagne en automne » , version 2016. Il se fait
le chroniqueur du temps, en s’octroyant une liberté qu’il rapproche de celle de
Fassbinder : mettre à nu ce que nous avons dans la tête, sans toujours vouloir nous
l’avouer. Pour Falk Richter, il s’agit d’exorciser ce qui se passe quand on est
bouleversé, perdu et angoissé, comme c’est le cas aujourd’hui. Il y a une forme de
sauvagerie existentielle dans sa pièce, où la libération de la parole s’autorise tout, et
où s’affrontent deux camps, comme dans le film de Fassbinder.
Cette sauvagerie envahit le plateau, où Thomas Gonzalez, Judith Henry, Eloise
Mignon, Stanislas Nordey et Laurent Sauvage, habillés façon seventies , jouent le vaet-vient entre hier et aujourd’hui. Ils se donnent totalement, comme dans une
bacchanale incendiaire, évidemment sexuelle, qui ne faiblit pas un instant. Ils vont
même jusqu’à rejouer des scènes de films – ce qui ne passe pas du tout –, à se livrer,
dans le cas de Thomas Gonzalez, à une « bite danse » fort goûtée du public ou à
chanter, en faisant fondre d’amour les spectateurs.
La peur à l’œuvre
Mais ce rapprochement entre hier et aujourd’hui est aventureux. Le terrorisme
suscitait dans les années 1970 une empathie ou une sympathie des artistes
impensable en 2016. Falk Richter ne l’ignore évidemment pas, mais, malgré lui, il
entretient entre les époques une confusion que l’on peut regretter. Ce qu’il montre
bien, en revanche, c’est la peur qui est à l’œuvre, le repli sur soi qu’elle suscite, les
instincts bas qu’elle réveille, les clivages qu’elle génère entre ceux qui cherchent les
moyens de la combattre, et ceux qui s’en remettent à un pouvoir autoritaire, au
risque de causer la perte de la démocratie.
Pour ce faire, Falk Richter va jusqu’au bout. Pas en choisissant la voie d’un théâtre
politique, qu’il récuse, mais en chroniquant à voix haute l’Europe d’aujourd’hui. C’est
un théâtre d’actualité qu’il écrit et co-met en scène avec Stanislas Nordey. Un théâtre
qui cogne, convoque François Hollande, Angela Merkel, Viktor Orban, Marion
Maréchal Le Pen ou Beatrix von Storch, petite-fille du ministre des finances d’Hitler,
qui siège au Parlement européen à Strasbourg, où est créé Je suis Fassbinder , et
déclare qu’on devrait tirer sur les réfugiés qui tentent de passer les frontières,
femmes et enfants compris.
Mais c’est aussi un théâtre qui a ses limites : contrairement à Fassbinder, qui dans
ses films inventait un monde en partant de l’état du monde, Falk Richter ne crée pas
un monde dans sa pièce. Il reproduit le nôtre, en faisant entendre ce que l’on peut se
dire entre amis, ou glaner dans les médias ou au café. Poncifs compris, mais
heureusement sauvés par l’interprétation des comédiens qui incarnent nos troubles
d’Européens, comme il se doit, d’une manière intempestive et généreuse.
Je suis Fassbinder , de Falk Richter. Mise en scène : Stanislas Nordey et Falk
Richter. Avec Thomas Gonzalez, Judith Henry, Eloise Mignon, Stanislas Nordey,
Laurent Sauvage. Jusqu’au 19 mars au Théâtre national de Strasbourg. Tél. :
03-88-24-88-00. De 6 € à 28 €. Durée : 1 h 55. A partir du 24 mars en tournée à
Grenoble, Rennes, Lausanne, Paris.
Le 14 mars 2016
Allemagne, retour arrière et travelling
Par Armelle Héliot le 14 mars 2016 14h23
L’Allemand Falk Richter et le Français Stanislas Nordey mettent en scène ensemble
« Je suis Fassbinder » au Théâtre national de Strasbourg. Réflexion sur la destinée d’un
grand artiste inscrit dans une époque qui peut évoquer la nôtre. Et leur permet de poser
des questions très actuelles.
Ils étaient trop jeunes. Trop jeunes ? Etaient-ils nés ? Oui bien sûr. Mais ils n’avaient
pas l’âge : Richter est né en 69, Nordey en 69. Ils auraient pu, petits garçons, croiser
Rainer Werner Fassbinder, homme encore bien jeune et qui allait mourir trop tôt :
1945-1982.
Complices, l’Allemand écrivain et metteur en scène, et le Français, comédien et
metteur en scène, le sont depuis longtemps. On a vu d’eux des spectacles très
intéressants, dans des configurations diverses : l’un mettant en scène le texte de l’autre
ou tous deux jouant, le texte de l’un mis en scène par l’autre avec le renfort non
négligeable d’une fille sans doute plus forte qu’eux, Anne Tismer.
Au Théâtre national de Strasbourg, qu’il dirige, Stanislas Nordey frappe un grand coup
en choisissant, comme premier geste personnel d’incarner Fassbinder lui-même en
montant, avec son ami allemand cette « pièce » faite de bric et de broc, écrite en
quelques semaines, montée en moins de temps encore. « Je suis Fassbinder » ne
prétend pas être un manifeste, même si la reprise, sans ironie à ce que l’on en a compris
de « Je suis Charlie » a quelque chose, mine de rien, de très ambitieux.
Mais ainsi va Stanislas Nordey : mine de rien avec beaucoup d’orgueil et plus encore
d’intelligence.
« Je suis Fassbinder » est évidemment dominé par la couleur orange et les tapis en
laine à grandes mèches des années 70. Du PVC blanc et de l’aluminium, une mode
épouvantablement laide –de celle d’ailleurs qui triomphe avec « Les Larmes amères de
Petra von Kant »- mais dont, évidemment, quand on la vit, quand on en est le
contemporain, on l’accepte.
Donc, premier point, dans « Je suis Fassbinder », le décor est laid, très laid.
Volontairement. Il est dans le goût des années 70. Des plates formes, des plateaux qui
se chevauchent –plusieurs hauteurs, plusieurs tailles- pourraient glisser comme
glissent les écrans. Il y a l’horizontal, le vertical, il y a les canapés, les sièges et le
désordre sans nom qu’inspire l’espace. Des photos, des écrans, des trucs aux murs,
des trucs par terre, des machins qu’on ne range jamais, bref, une impression de bordel
qui évoque très bien ce que l’on savait de Fassbinder, ce que l’on voit dans ses films ou
dans les reportages qui ont été quelquefois réalisés chez lui ou encore des entretiens
dans lesquels il s’exprime.
Il a vécu vite. Ardemment. Il pressentait-il cette fin prématurée. Ou bien est-il mort de
s’être trop usé ? Ce n’est pas ce qui intéresse Falk Richter et Stanislas Nordey. Ils
s’appuient sur un film qui a beaucoup marqué à l’époque, « L’Allemagne en automne »,
une suite de témoignages très personnels d’artistes, cinéastes, metteurs en scène,
comédiens qui parlent de leur pays. Ce n’est plus cette « mère blafarde » dont parlait
Brecht (expression qui sera reprise en titre par Helma Sanders-Brahms, décédée il y a
moins de deux ans). C’est une Allemagne tiraillée entre une vitalité, une créativité
profonde, une Allemagne de l’Ouest opulente mais déchirée par le terrorisme, et
notamment la bande à Baader, cette « Fraction armée rouge », si violente. Une
Allemagne de la génération des enfants de la guerre, ployant sous la culpabilité.
Revenons aux plateaux du TNS. On voit arriver les comédiens par le fond de la scène.
Ils s’installent à une table. Une télé marche. On est trop loin pour distinguer ce qu’elle
diffuse. Et ça commence. Les fils narratifs ne vont cesser de s’enchevêtrer une heure
trente à peu près, durant. On a le sentiment d’un théâtre qui naîtrait devant nous. A
mi-chemin des recherches des deux concepteurs et de leurs amis embarqués dans ce
chantier qu’ils laisseront ouvert, nous incitant à toujours plus de réflexion, de lectures,
d’engagement. De courage aussi sans doute. Car rien, ici, à aucun moment n’est
complaisance. Tout est sincérité mais aussi distance, humour, ironie, on l’a dit.
Rien que l’on puisse résumer. Des morceaux, des éclats. Des archives. Et des extraits
de ce film « L’Allemagne en automne » dans lequel Fassbinder dialoguait d’une
manière très frontale avec sa mère. Ici, cela donne des scènes Nordey-Laurent Sauvage,
toujours formidable, des scènes qui valent le détour. Mais leurs camarades sont eux
aussi sur la crête. Judith Henry, aigüe et fine, portant et ce passé récent et cet
aujourd’hui déroutant, avec une profonde clairvoyance, Eloïse Mignon, charmeuse et
nuancée, Thomas Gonzalez, énergie canalisée avec esprit.
Théâtre National de Strasbourg jusqu’au 19 mars, MC2 de Grenoble du 15 au 20 avril,
Théâtre de Vidy-Lausanne, du 26 avril au 4 mai. Théâtre national de la Colline, du 10
mai au 4 juin.
Le Lundi 14 mars 2016
Stanislas Nordey, un théâtre d’utilité
démocratique
MARIE-JOSÉ SIRACH
LUNDI, 14 MARS, 2016
La mise en scène kaléidoscopique sans faille de Nordey et Richter utilise le plateau
dans toute sa complexité, créant des espaces où les acteurs se métamorphosent à vue.
Photo : Jean-Louis Fernandez
C’est la première création de Stanislas Nordey depuis qu’il a pris la direction du TNS.
Avec la complicité active du dramaturge allemand Falk Richter. Je suis Fassbinder fera
date.
Strasbourg (Bas-Rhin),envoyée spéciale.
C’était le spectacle que l’on attendait. Un spectacle manifeste. Un spectacle qui n’a pas
froid aux yeux, qui prend l’actualité brûlante à bras-le-corps, la décortique, l’interroge,
cherchant avec effervescence, avec entêtement, des ébauches de réponses à une
multitude d’interrogations, d’incertitudes, de doutes. L’Europe, les réfugiés, Merkel,
les attentats, Cologne, l’état d’urgence… Comment en est-on arrivé là ? C’est quand
qu’on va où ? Pour sa première création au Théâtre national de Strasbourg, dont il est
directeur depuis septembre 2014, Stanislas Nordey a travaillé avec Falk Richter, son «
frère de théâtre », auteur, metteur en scène, artiste associé au TNS mais aussi à la
Schaubühne de Berlin. Ensemble, ils ont imaginé Je suis Fassbinder, un théâtre qui
parle d’aujourd’hui en temps réel, sans passer par la case répertoire et toquer à la porte
des maîtres anciens pour évoquer notre présent. Falk Richter a écrit sur le vif, dans
cette urgence de raconter, de tenter de démêler les fils de notre époque, sacrément
emmêlés, les fils… Et ils sont tombés d’accord sur Fassbinder, Rainer Fassbinder. Il fut
l’une des figures de proue de la scène artistique allemande et européenne des années
1970, un artiste qui ne prenait pas de gants pour dénoncer les tabous et les non-dits
de la société allemande, la présence de l’idéologie nazie dans un pays qui n’avait pas
hésité à réintégrer dans les rouages de l’industrie comme de l’administration quelquesuns des dignitaires du Troisième Reich. En toute discrétion. Dans ces films, que ce soit
les Larmes amères de Petra von Kant, Tous les autres s’appellent Ali, le Mariage de
Maria Braun, Fassbinder révèle les soubassements de l’idéologie présente jusque dans
les rapports intimes où la femme, l’étranger, l’homosexuel sont méprisés, maltraités,
humiliés.
Comment résister à cette vague ? Comment redonner du sens quand tout est confusion ?
Mais c’est principalement à partir du canevas de l’Allemagne en automne que Falk
Richter et Stanislas Nordey ont conçu Je suis Fassbinder. Dans ce film, le dialogue
d’une violence inouïe entre le réalisateur allemand et sa mère revient sur le délitement
de la société allemande, le glissement progressif de l’idéologie nazie vers l’idéologie
libérale. La question du terrorisme alors se pose. La Fraction armée rouge (Die Rote
Armee) revendique des attentats contre des institutions et des bâtiments militaires
américains. La police allemande est sur les dents. L’état d’urgence est déclaré.
Quarante ans après, c’est cette même question de la restriction des libertés dans
l’espace public au nom de « l’éradication » du terrorisme qui nous est posée. Dans
quelle mesure peut-on dénoncer ces mesures coercitives sans être accusé d’être proterroriste ? La marge de manœuvre est plus qu’étroite. Quand Manuel Valls déclare
sans vergogne après les attentats du 13 novembre au Bataclan que tenter d’expliquer,
c’est déjà excuser… Et puis il y a eu Cologne, ces centaines de femmes sexuellement
agressées. Que s’est-il passé le 31 décembre 2015 ? Pourquoi, comment ces hommes
ont-ils pu agir ? Chaque année, lors des fêtes de la bière, des femmes allemandes sont
violées derrière les stands sans que cela n’émeuve ni la police, ni la presse, ni les
journalistes, rappelle Falk Richter. Est-ce parce qu’ils sont arabes ? Est-ce à cause de
ce climat malsain entretenu sur la question des réfugiés et le choix de Merkel de les
accueillir que, soudain, tous les yeux se sont braqués sur cette nuit terrible ? En
Allemagne, l’extrême droite passe à l’acte. Des groupuscules nazillons incendient des
foyers de réfugiés. En France, en Pologne, en Hongrie, dans toute l’Europe, les
populistes et autres nationalistes ne prêchent plus dans le désert. Jouant sur la peur,
toutes les peurs, ils engrangent des bénéfices, qu’ils soient électoraux ou non.
Comment résister à cette vague ? Comment reprendre la main ? Comment redonner du
sens quand tout est confusion ? Si le théâtre n’apporte pas de solutions, il est un des
lieux où la parole circule encore librement à condition de prendre la parole. La
démarche artistique de Nordey et Richter se situe là, dans cet interstice démocratique
qui permet encore de s’exprimer, de mettre en jeu et en lumière une parole politique et
poétique. Leur mise en scène kaléidoscopique sans faille utilise le plateau dans toute
sa complexité, créant des espaces où les acteurs se métamorphosent à vue, jouant de
l’intemporalité, se glissant d’un personnage l’autre sans le moindre accroc. Des
extraits de films de Fassbinder sont projetés et font écho aux questionnements actuels.
C’est vif, pertinent, culotté, dansé, chanté. Laurent Sauvage, Judith Henry, Éloïse
Mignon, Thomas Gonzalez et Stanislas Nordey sont époustouflants. Nordey et Richter
posent là un geste théâtral d’utilité démocratique.
Le 14 mars 2016
Je suis Fassbinder de Falk Richter
Posté le 14 mars, 2016 dans critique.
Je suis Fassbinder de Falk Richter, traduction d’Anne Monfort, mise en scène de
Stanislas Nordey et Falk Richter
Comme en écho à l’appel identitaire: Je suis Charlie, lors des manifestations qui
suivirent les attentats de janvier 2015 à Charlie-Hebdo, résonne aujourd’hui cette
pièce-laboratoire de Falk Richter, écrite au jour le jour et sur le vif des répétitions qu’a
menées sur le fil du rasoir, le metteur en scène et directeur du Théâtre National de
Strasbourg, Stanislas Nordey, qui a élaboré la mis en scène en compagnonnage avec
l’auteur.
Résonance en effet des plus immédiate avec les actes terroristes et leurs menaces qui
nous questionnent tous en Europe,après ceux des Etats-Unis, et ceux d’hier au Mali et
en Côte d’Ivoire; résonance enfin avec les courants de populations déplacées qui
fuient les régimes tyranniques et fanatiques du Moyen-Orient.
Cette écriture théâtrale est aussi comme une plongée symbolique et esthétique dans
l’art de Rainer Werner Fassbinder (1945-1982), cinéaste et metteur en scène de
l’Allemagne terroriste de la Bande à Baader-Meinhof. Il avait su en son temps poser
des questions subversives : terrorisme, xénophobie, homophobie, antisémitisme,
violence faite aux femmes jusque dans le mariage codifié.
À partir de l’analyse de l’Allemagne post-fasciste faite par Rainer Werner Fassbinder
en 1977, Falk Richter évoque les nouveaux courants d’extrême-droite qui se
développent partout en Europe, avec une vision rétrograde de la famille et une place
réductrice assignée à la femme: un point de vue plutôt dépassé en Allemagne…
Le léger décalage, historique et culturel, entre l’Allemagne et la France, instaure
comme une distanciation brechtienne judicieuse et permet de mieux comment de
nouveaux dirigeants anti-démocrates veulent prendre le pouvoir outre-Rhin et en
France.
«La Pologne, dit Falk Richter, n’est déjà plus une démocratie, la Hongrie
devient un régime de plus en plus fasciste, la Russie est redevenue avec Wladimir
Poutine une dictature guerrière où les artistes et journalistes critiquant le régime, sont
poursuivis, emprisonnés, ou exécutés.» Il évoque aussi les trois viols commis à
Cologne par des migrants du Proche Orient.
Des images extraites de L’année des treize
lunes, La troisième génération, Le droit du plus fort, L’Allemagne en automne de
Rainer Werner Fassbinder défilent sur trois écrans suspendus. Les relations
existentielles sont ici répertoriées par le cinésate: l’homme avec l’amant, l’amante,
l’épouse, et la mère: une figure fascisante en pleine Allemagne terroriste, etqui exprime
la pensée d’une majorité d’ Allemands en 1977.
« Doit arriver au pouvoir, écrit Falk Richter, un dirigeant autoritaire et gentil, un
souhait comparable à ceux de Marine Le Pen, Viktor Orban, Jaroslaw Kaczynski, «pour
débarrasser les pays des réfugiés, étrangers et musulmans… sans guerre, sans que
l’Europe se retrouve encore en cendres. »
Sur le plateau d e ce théâtre-laboratoire, une
reconstitution des décors des films de Rainer Werner Fassbinder, comme le tapis de
laine blanc-cassé et les grands canapés des Larmes amères de Petra von Kant, avec
des photos glamour de magazines de mode, musique et cinéma des années 70,
accrochées çà et là, ou jonchant le sol et les marches d’escalier. Les scènes des uns
sont filmées par les autres acteurs, et il y aussi des reprises de séances de
répétition : dégradé chatoyant de théâtre dans le théâtre, en une mise en abyme à
plusieurs degrés.
Avec un collectif de comédiens, surarmé de talent : Thomas Gonzalez en fieffé histrion
et bon chanteur ; Éloïse Mignon, gracieuse, et posant les questions avec tact; Laurent
Sauvage jouant avec sincérité la mère de Fassbinder ; Judith Henry, en Europe radieuse,
malgré les réserves que l’on peut faire sur l’allégorie, et Stanislas Nordey incarnant le
maestro avec brio.
La pièce, au-delà de raccourcis simplificateurs, accapare à bon
escient et dans un souffle dévastateur et vivifiant, l’attention des jeunes générations
inquiètes.
Véronique Hotte
Le 15 mars 2016
"Einen starken Führer müsste es geben"
Falk Richters Collage "Je suis Fassbinder" in Straßburg.
von: Bärbel Nückles
Bleierne Jahre: Lauren Sauvage (l.) und Stanislas Nordey Foto: fernandez
"Ich will, dass die Dinge unter Kontrolle sind." Dieser Gedanke kehrt im Laufe von Falk
Richters zweistündiger Theatercollage "Je suis Fassbinder" in Variationen wieder.
Köln, Charlie Hebdo, Brandsätze gegen Asylbewerber, der islamistische Terror überall:
Die Krux der gegenwärtigen Politik ist, dass es die saubere, die respektvolle Lösung
nicht gibt. Wer zögert, den strafen die Wähler. Oder doch nicht? Jeder ist hier ein
bisschen Fassbinder. Falk Richter zitiert ihn subtil und zugleich plakativ. Er ist der
Ausgangspunkt dieser, in enger Zusammenarbeit mit dem Ensemble entstandenen
Auftragsarbeit am Théâtre National de Strasbourg.
Natürlich zitieren auch Bühnenbild und Kostüme (Katrin Hoffmann) die späten
1970er-Jahre und Fassbinders Filme. Richter setzt vor allem aber an bei Deutschland
im Herbst, einem Episodenfilm von 1978, für den neben Fassbinder selbst Edgar Reitz,
Alexander Kluge, Volker Schlöndorff und andere Filme beisteuerten. Rainer Werner
Fassbinders Beitrag läuft gleich nach dem Prolog, der die Beerdigung Hans-Martin
Schleyers zeigt. Darin erlebt man einen Fassbinder, der die Stimmung in einem von
dem Terror der RAF verwundeten Deutschland aufnimmt und im Angesicht dessen als
Bürger und Künstler um eine Position ringt. In dokumentarischen Einstellungen
diskutiert er mit seiner Mutter Liselotte Eder verzweifelt über Demokratie und Freiheit.
Der Autor schickt den Terror durch sein Dramatikerhirn. Den Terror, der die liberale
Gesellschaft in die Defensive treibt und zermürbt. Genauso die Flüchtlingskrise, die
hierzulande die Demokratie auszuhebeln beginnt. Beides treibt den Rechtspopulisten
die Verunsicherten in die Arme. 2016. Frankreich im Ausnahmezustand: Wie soll man
Theater machen? Was dürfen wir sagen? In Deutschland durchdringen die
Flüchtlingskrise, Köln und die Massenbelästigungen der Silvesternacht mediale wie
private Debatten. Frankreich hat seinen Front National und die Le Pens. Deutschland
seine Höckes, Petrys und von Storchs. Richter führt diese Gegenwart und die bleiernen
Jahre in einer virtuosen Versynapsung der Zeitstränge und Gedankenfetzen parallel.
Zwischen reichlich Flokati und anderen Attributen der Fassbinder-Zeit arbeitet sich so
das brillante Ensemble – neben Nordey sind es Judith Henry, Laurent Sauvage, Eloise
Mignon und Thomas Gonzalez – in sarkastischen Rollenspielen und in szenischen
Versatzstücken an den hysterisch aufgewühlten Debatten und den Scheinargumenten
der Populisten ab. "Merkel hat sie hierher geholt." "Unsere deutschen Männer
schützen uns nicht mehr." Aber auch (sinngemäß): Dort sind Krieg, Tod, Zerstörung.
Wir Europäer berufen uns auf unsere Hochkultur und schotten uns am liebsten ab.
Der Ohnmacht der Mächtigen stellt der Text provozierende Thesen entgegen: Europa
werde von den Kriegen heimgesucht, die es anderswo geführt hat. Wie klebrig und
verlogen klingt Freddy Quinns Schlager "Unter Fremden", wenn Laurent Sauvage ihn
sich mit der Aura eines jungen Otto Sander in lasziver Männlichkeit einverleibt. Der
Song, natürlich auch ein Fassbinder-Zitat.
Ich will, dass die Dinge unter Kontrolle sind. Jeder würde das unterschreiben. "Alles
wird gut", vergewissert Eloise Mignon sich unaufhörlich selbst, während sie im
pinkfarbenen Minikleid die Szene umrundet. Eine andere Stimme wird da konkreter:
Einen starken Führer müsste es jetzt geben, aber einen der nett ist, ein guter Mensch
eben, der alles richtet, lässt der Text Laurent Sauvage die zynische Konsequenz ziehen.
Am Ende von Falk Richters Stück legt Stanislas Nordey, der als Co-Regisseur neben
Richter mit "Je suis Fassbinder" seine erste Inszenierung als Straßburger Intendant
abliefert, einige etwas zähe Lehrminuten über den gesellschaftlichen Kontext und
Fassbinders Engagement nach – die Botschaft soll ja beim französischen Publikum
ankommen. Aber selbst wer Fassbinder kaum oder gar nicht kennt, setzt sich aus
Zitaten, Sprache, Stimmung und dem Wissen um die einerseits bedrückende Wirkung
des Terrors und wie dieser Wahnsinn doch irgendwie besondere Kräfte freizusetzen
vermag, ein stimmiges Bild zusammen.
Nordey glaubt, Fassbinder erklären zu müssen. Richter, der deutsche Autor, Jahrgang
1969, gebraucht Fassbinder als Projektionsfläche, gerade weil er für die Franzosen eher
ein unbeschriebenes Blatt ist. Der Beifall gibt beiden Recht.
Weitere Aufführungen: Théâtre National de Strasbourg, bis 19. März, in französischer
Sprache, tgl. 20 Uhr. http://www.tns.fr
Le 16 mars 2016
Mardi 16 février 2016
Je suis Fassbinder
du 4 au 19 mars à 20h Théâtre national de Strasbourg
Je suis Fassbinder, un texte de Falk Richter, mis en scène par Stanislas Nordey
et Falk Richter au Théâtre National de Strasbourg.
Je suis Fassbinder © Jean Louis Fernandez - 2016
Après avoir découvert, en 2007, l’écriture de Falk Richter, Stanislas Nordey a
réuni un groupe de comédiens pour travailler pendant six mois sur l’intégralité
de ses textes. De là est né Das System, créé au Festival d'Avignon 2008. Ils ont
alors décidé de bâtir ensemble My Secret Garden, dont le matériau de base
était le « journal » de l’auteur. À cette occasion, ils ont inventé une manière
d’écrire un spectacle « à quatre mains » : Falk Richter écrit et met en scène,
Stanislas Nordey met en scène et joue, et c’est ensemble qu’ils composent
l’équipe artistique.
Stanislas Nordey et Falk Richter © Jean Louis Fernandez - 2016
Après Small Town Boy, présenté en janvier au TNS, Falk Richter, auteur
associé, revient pour la première création de Stanislas Nordey à Strasbourg.
Bien qu’ayant chacun un rapport différent au plateau, les deux metteurs en
scène ont en commun leur goût pour un théâtre « frontal » et une parole en
prise directe avec les questionnements de la société contemporaine.
Distribution
Création du TNS
Texte Falk Richter
Mise en scène Stanislas Nordey, Falk Richter
Avec Thomas Gonzalez, Judith Henry, Éloise Mignon, Stanislas Nordey, Laurent
Sauvage
Traduction française Anne Monfort
Collaboration artistique Claire-Ingrid Cottanceau
Dramaturgie Nils Haarmann
Scénographie et costumes Katrin Hoffmann
Assistanat aux costumes Juliette Gaudel
Assistanat à la scénographie et aux costumes Oria Steenkiste (élève de l’École du
TNS)
Lumière Stéphanie Daniel
Musique Matthias Grübel
Vidéo Aliocha Van der Avoort
Décor et costumes réalisés par les ateliers du TNS
Production Théâtre National de Strasbourg
Coproduction Théâtre national de Bretagne - Rennes, Théâtre Vidy-Lausanne,
MC2:Grenoble
Création le 4 mars 2016 au Théâtre National de Strasbourg
Le 4 mars 2016
"Je suis Fassbinder" : la première création de Stanislas Nordey à Strasbourg
Par Stéphanie Loeb @Culturebox
Stanislas Nordey dans "Je suis Fassinder" © France 3 Alsace
Pour sa première création en tant que directeur du Théâtre National de Strasbourg,
Stanislas Nordey présente "Je suis Fassbinder", une pièce de l'auteur allemand Falk
Richter dont il co-signe avec lui la mise en scène. Le spectacle ne retrace pas la vie du
sulfureux cinéaste allemand mais part de cette figure tutélaire pour parler de notre
époque.
Reportage : Cécile Poure et Xavier Ganaye
En succédant à Julie Brochen à la tête du Théâtre National de Strasbourg en 2014,
Stanislas Nordey a tout de suite annoncé la couleur : il souhaite défendre la création
contemporaine. C'est donc tout naturellement que pour sa première mise en scène au
TNS, il a choisi de monter une pièce de Ralk Fichter, son "frère de théâtre" allemand
avec qui il a déjà collaboré à plusieurs reprises.
Un théâtre à quatre mains
En janvier dernier, Richter a déjà monté l'une de ses pièces à Strasbourg, "Small town
boy". Avec Stanislas Nordey, ils ont inventé une façon de créer un "spectacle à quatre
mains", qui évolue au fil des répétitions.
Rainer Werner Fassbinder, figure underground du nouveau cinéma allemand des
années 60-70, est un artiste décisif dans le parcours de Richter. Dès l'âge de 17 ans, il
s'est plongé dans son oeuvre en lisant toutes ses pièces et en voyant tous ses films.
« Ce qui fait la singularité de Fassbinder, c'est son ouverture d'esprit, son honnêteté.
Il a beaucoup parlé de lui et de ses expériences, de ses tentatives pour mener à bien sa
vie d'artiste, ses relations... Il a beaucoup parlé de ses relations intimes, mais aussi de
la réalité allemande, de l'histoire, de la politique en Allemagne. Il a observé combien
le fascisme s'était immiscé dans les relations humaines, combien le contexte, le
système politique avaient influencé les relations amoureuses, le mariage, et c'est ce
qu'il a montré dans ses films. »
Falk Richter
Rainer Werner Fassbinder à Munich en juillet 1977 © ISTVAN BAJZAT / DPA
Le projet "Je suis Fassbinder" est né des discussions entre Richter et Nordey après
l'attentat contre Charlie Hebdo, en janvier 2015. En s'interrogeant sur la censure,
l'autocensure et la place de l'artiste dans la société, la figure du réalisateur du "Mariage
de Maria Braun" et de "Lili Marleen" s'est tout de suite imposée.
A l'image de Fassbinder qui analysait l'Allemagne post-fasciste, Richter évoque dans
la pièce les nouveaux courants d'extrême-droite qui se développent partout en Europe.
Il a poursuivi l'écriture du texte alors que la pièce était en répétition !
Stanislas Nordey et Falk Richter pendant une répétition © Jean-Louis Fernandez
Stanislas Nordey, qui est également comédien, a choisi de jouer dans la pièce. Il
partage l'affiche avec Judith Henry, Thomas Gonzalez, Eloïse Mignon et Laurent
Sauvage.
La troupe de "Je suis Fassbinder" © Jean-Louis Fernandez
Je suis Fassbinder, de Falk Richter
Mise en scène : Stanislas Nordey et Falk Richter
Du 4 au 19 mars au
Théâtre National de Strasbourg
Salle Koltès
1 avenue de la Marseillaise
67 000 Strasbourg
La pièce partira ensuite en tournée : du 24 mars au 2 avril à la Maison de la Culture de
Grenoble, du 15 au 20 avril au Théâtre National de Bretagne à Rennes, du 26 avril au 4
mai au Théâtre Vidy de Lausanne, en Suisse, puis du 10 mai au 4 juin au Théâtre de la
Colline à Paris
ARTE Journal – samedi 5 mars 2016
Falk Richter, un auteur engagé dans
une Europe en crise
ARTE Journal - samedi, 5 mars, 2016 - 19:45
Pays : France
Tags : théâtre national de Strasbourg, Rainer Werner Fassbinder
Outre-Rhin, les pièces politiques de l'auteur et metteur en scène allemand Falk Richter
créent des remous ; en France il rend hommage à Fassbinder. Portrait.
Falk Richter, portrait d'un auteur engagé, lien de la vidéo http://tinyurl.com/zjss2c2
Falk Richter, l'invité d'ARTE Journal samedi 5 mars à 19h45
Falk Richter contre l'extrême droite : Lien de la vidéo : http://tinyurl.com/jt3ntka
Pour sa première création en tant que directeur du théâtre national de Strasbourg, le
metteur en scène Stanislas Nordey s'est associé à un auteur contemporain allemand
qu'il apprécie tout
particulièrement
et
avec lequel il a déjà
travaillé, Falk Richter.
Ensemble, ils montent
Je suis Fassbinder,
une pièce moderne dans laquelle ils évoquent, l'un en tant qu'auteur et co-metteur en
scène, l'autre en tant que co-metteur en scène et acteur, la figure de Rainer Werner
Fassbinder, grand réalisateur allemand, toujours concerné par la marche du monde.
Ils se demandent comment il aurait réagi face à la montée de la haine et du racisme en
Europe.
"Je suis Fassbinder", naissance d'une pièce de théâtre :
La rencontre
Au départ du projet "Je suis Fassbinder", il y a la rencontre entre deux hommes, un
metteur en scène français et un auteur allemand, Stanislas Nordey et Falk Richter.
Le 21 mars 2016 – La Dispute / Arnaud Laporte
Spectacles vivants : "La Mer" à la Comédie
Française et "Par-delà les marronniers" au
Rond-Point
58 min
Lien de l’émission : <iframe src="http://www.franceculture.fr/player/exportreecouter?content=e3f73138-6d40-4e04-b946-c964125656a4"
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Alain Françon, Jean-Michel Ribes... C'est le rendez-vous de ce soir, pour "La Mer", et
"Par-delà les marronniers", en compagnie de Fabienne Pascaud et Philippe Chevilley.
On passera également un coup de fil à Pauline Laidet, chorégraphe de "Fleisch" à la
Scène Nationale d'Aubusson.
"La mer" d'Edward Bond mis en scène Alain Françon •
La revue de presse culturelle d'Antoine Guillot :
Pour écouter la revue de presse culturelle et quotidienne d'Antoine Guillot, cliquez ici
Théâtre post-migratoire en Allemagne, loin des statistiques de masse.
A Berlin et à Munich, les théâtres et leurs directeurs s'engagent très concrètement
pour soutenir les demandeurs d'asile et les populations issues de l'immigration.
L'Invité de la Dispute, Clément Hervieu Léger :
Spectacles vivants : retrouvez les choix de Clément Hervieu Léger, ici
Intervenants
• Fabienne Pascaud
• Philippe Chevilley : chef du service culture des Echos
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