Des Parlements au parlementarisme - Histoire du Parlement de 1789 à nos jours.
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Jean Garrigues (Dir.)
Jean Garrigues (Dir.)
Des Parlements au parlementarisme - Histoire
Des Parlements au parlementarisme - Histoire
du Parlement de 1789 à nos jours.
du Parlement de 1789 à nos jours.
Paris, Armand Colin, 2007.
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Mise en ligne : lundi 13 août 2007
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Des Parlements au parlementarisme - Histoire du Parlement de 1789 à nos jours.
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Cet ouvrage de plus de 500 pages est appelé à faire date : première synthèse sur l’histoire du
Parlement, il en propose une lecture globale, pluridisciplinaire par l’appel aux historiens, politistes,
historiens du droit, tous éminents spécialistes de l’histoire parlementaire. Edité sous l’égide du
Comité d’Histoire Politique et Parlementaire, il manifeste le dynamisme de l’équipe réunie autour
de Jean Garrigues, éditrice de la revue Parlements et dotée d’un site, http://.
http://www.parlements.org/
Les apports de cette histoire sont nombreux, vont du rappel des évènements, de l’évocation
d’assemblées méconnues (le tribunat napoléonien est ainsi rappelé à la mémoire collective), au
portrait de groupe des députés, à l’évocation du décor des Assemblées, si important pour une
histoire de la représentation nationale. Cette multiplicité s’agrège dans une histoire longue de
l’imposition du parlementarisme au cœur de la vie politique française, rythmée par la construction
longue des procédures parlementaires de contrôle des gouvernements.
Assemblées et révolutions
Assemblées et révolutions
De manière particulièrement heureuse, l’ouvrage débute par un rappel des Assemblées d’Ancien
Régime, cette tradition met à mal l’idée que la première Assemblée Nationale Constituante soit
issue de l’évènement, de la contrainte historique, qu’elle puisse être considérée comme une intruse
dans le processus révolutionnaire. Est mise en évidence le rôle des Parlements d’Ancien Régime
dont les remontrances au pouvoir royal sont commentées par l’opinion publique. Ce rôle
d’éducateur politique, les Parlements de Paris et de province en usent pour imposer leur vision
d’une représentation de la nation face au "despotisme royal". Le roi peine à mettre un frein à cette
contestation, née dans les années 1750, par l’alternance de mesures d’autorité, l’enregistrement
des décisions royales par lit de justice et de laisser aller, laissant démunis les partisans de la
monarchie absolue au sein des Parlements. La réelle popularité des Parlements cesse avec leur
acceptation de la convocation des Etats Généraux par ordre en septembre 1788. Le récit de la
convocation des Etats Généraux, de leur tenue amène quelques précisions bienvenues.
Traditionnellement, l’historiographie rappelle la floraison de libelles, de textes, de pamphlets dont
celui de Sieyès, Qu’est ce que le Tiers Etat ? est présenté comme le plus remarquable. De fait,
l’écho de ce texte fut relativement faible :
sur 638 pamphlets publiés de janvier à juin 1789 seuls 8 ont été influencés par le libelle. Avec les
Etats Généraux, se place le premier portrait de groupe, fouillé, des représentants des ordres,
lesquels constatent la vacuité du programme royal, ce qui laisse au Tiers Etat toute latitude pour
imposer le sien. Le récit de la transformation des Etats Généraux en Assemblée nationale est
classique mais débouche sur un point fondamental dans le parlementarisme tel qu’il se déploie
dans les siècles suivants, l’abandon du mandat impératif le 8 juillet 1789. Cet abandon marque la
reconnaissance de l’importance de la délibération dans la prise de décision des parlementaires. Les
aléas de la vie des Assemblées révolutionnaires, la lente construction du pouvoir des Assemblées
dans la rivalité avec la Commune insurgée, sont situées dans une géopolitique parisienne, au sein
d’un palais, les Tuileries dont les aménagements sont décrits avec minutie.
Cette présentation des décors, des paysages, donne le ton de la séquence révolutionnaire avec la
radicalisation des débats au sein des Assemblées qui se succèdent, Constituante, Législative,
Convention. Cette dernière est particulièrement étudiée avec une succession de portraits,
individuels et de groupes, une présentation des enjeux liés à la guerre civile et étrangère à partir
du point de vue des Assemblées. L’affrontement girondins/montagnards est restitué dans sa
complexité avec la présence de la Plaine dont un des membres, Barrère, théorise le gouvernement
d’exception. Après la chute de Robespierre, la nouvelle Constitution de l’an III instaure un
bicaméralisme qui devient la règle jusqu’à aujourd’hui. De même, la Chambre des députés trouve
son palais, le Palais Bourbon, devenu le lieu du parlementarisme en France. Avec la conjuration de
Saint Cloud, la centralité législative disparaît au profit du pouvoir exécutif autoritaire incarné par
Napoléon. Les Assemblées demeurent sous le Premier Empire, réduites à un rôle de consultation,
elles jouent un rôle à la fin de l’Empire puisqu’elles destituent l’Empereur en 1814. Avec l’arrivée
au pouvoir de Louis XVIII, se met en place un régime politique libéral très influencé par le modèle
britannique. Si le suffrage censitaire réduit le rôle de représentation de la nation, les débats à la
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Chambre entre ultras, modérés, libéraux manifestent la présence d’une vie politique médiée par
l’Assemblée.
Charles X refuse d’accepter ce fonctionnement, manifeste par les ordonnances de 1830 sa volonté
de revenir à un régime autoritaire sans délibération ce qui précipite la Révolution de juillet. De
nouvelles pratiques parlementaires naissent au sein de l’Assemblée de la monarchie de Juillet, le
droit d’interpellation, la question de confiance sans que cela procède de groupes de députés
structurés, les fidélités évoluent en fonction des évènements, des propositions. La Révolution de
1848 se fait sous les auspices du Suffrage universel, qui est utilisé immédiatement par les français
avec 84% des inscrits qui participent aux élections. L’Assemblée marque sa souveraineté sur le
processus révolutionnaire jusqu’à l’écrasement de la classe ouvrière en juin à Paris ce qui la laisse
face au pouvoir personnel de Louis-Napoléon Bonaparte, élu président de la République. Son coup
d’Etat renvoie les Assemblées à un rôle croupion dans la vie politique. Cet abaissement de la
fonction parlementaire n’empêche pas le jeu des influences au sein des bureaux, des commissions.
La fin de l’Empire est marquée par la montée des oppositions dans le jeu parlementaire, concédé
par l’Empereur.
L’âge d’or du parlementarisme
L’âge d’or du parlementarisme
Avec la chute de l’Empire, la proclamation de la République, la défaite militaire face à la Prusse,
commence une période d’incertitude qui prend fin avec la crise du 16 mai 1877 qui voit le
Président de la République reconnaître la prééminence du Parlement. Alors débute l’âge d’or du
Parlement, l’âge du parlementarisme absolu, l’âge de l’éloquence reine des séances, capable de
renverser les ministères. L’avocat est la figure majeure du Parlement, représentatif des nouvelles
élites parlementaires. Avec les années 1900-1910, le travail parlementaire connaît ses dernières
évolutions, avec la mise en place des Commissions, la création des groupes et une
professionnalisation des élus. De manière symétrique la naissance de l’antiparlementarisme
témoigne de la centralité du Parlement au sein de la vie politique. La première guerre mondiale
marque une parenthèse dans ce parlementarisme absolu quand bien même l’Assemblée garde des
prérogatives. Revenu en session en décembre 1914, l’Assemblée aura désormais un
fonctionnement normal, sans que le gouvernement use de son autorité pour mettre fin aux
délibérations. Surtout, si les séances publiques consacrent l’unanimité de l’Union sacrée, les débats
ont lieu dans les commissions et surtout dans les Comités secrets, dont le premier a lieu en juin
1916, qui permettent aux députés d’avoir des informations sur le déroulement des opérations et
d’émettre des critiques. A la fin du conflit, si le gouvernement Clemenceau est présenté comme
une dictature par ses opposants, le président du Conseil rend compte devant le Parlement de son
activité, est très présent aux séances et sollicite régulièrement l’investiture de l’Assemblée. La fin
du conflit voit le Parlement reprendre sa place, on assiste à un "retour à la normale". Durant les
années 1920, la critique du parlementarisme se fait mezza voce avant de reprendre de la vigueur à
la faveur de la crise économique, sociale et politique qui saisit la France en 1931-1934. La
thématique de la réforme de l’Etat gagne des cercles intellectuels et politiques, de droite et de
gauche. Cette critique de l’inefficacité du parlementarisme absolu débouche sur un renforcement
de l’exécutif, dont la structuration du gouvernement de Front populaire témoigne avec le
secrétariat de la Présidence du Conseil, la discipline demandée aux groupes parlementaires de la
coalition majoritaire dans le respect du programme. Si Léon Blum refuse de pousser cette logique
au bout puisqu’il démissionne devant l’obstruction du Sénat, ses successeurs continuent
l’émancipation de l’exécutif avec la pratique des décrets-lois contraires à la tradition de contrôle
parlementaire. Inaugurée par Pierre Laval en 1935, cette pratique devient très fréquente sous
Daladier en 1938, 1939.
Rééquilibrages
Rééquilibrages
Sous cet aspect, le vote du 10 juillet apparait comme une conséquence de cette délégation à
l’exécutif ; cependant les facteurs circonstanciels dominent dans le vote des pleins pouvoirs à
Pétain. Lors de la deuxième guerre mondiale, l’analyse se porte à la fois sur l’organisation des
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assemblées à Alger et à Vichy. La disparité des propositions constitutionnelles de la Résistance
s’exprime dans l’Assemblée Nationale Consultative, se retrouve dans la France libérée. Si la
rupture entre De Gaulle et les partis politiques de gauche n’est pas uniquement liée aux
divergences sur la nature du régime, elles contribuent à en accroître le fossé. D’une manière
inédite, socialistes et communistes s’entendent pour proposer une Constitution basée sur le
monocamérisme, solution refusée par les français au printemps 1946. Le deuxième projet, adopté à
l’automne restaure le bicamérisme par la création du Conseil de la République qui prend de plus
en plus d’importance dans le fonctionnement des institutions.
La Chambre est au cœur de la vie politique, fait accéder un nouveau personnel aux affaires, si les
femmes ne connaissent pas une promotion très forte, si d’anciens parlementaires sont élus. Il est à
noter que c’est sous la IV République que l’Assemblée nationale fut la plus représentative de la
diversité de la société française. La chute du régime, la prise du pouvoir par De Gaulle débouche
sur une rationalisation du parlementarisme avec une nouvelle hiérarchisation du pouvoir plus
favorable au président de la République.
Malgré l’extrême richesse de l’ouvrage, demeure un regret qui n’est qu’un encouragement à
poursuivre, le manque de place laissée à la vie politique dans ses liens avec le Parlement.
Commencé sous les auspices de l’opinion publique, les auteurs délaissent cette piste laissant
parfois supposer que le politique se réduit au parlementaire. Cependant, cet ouvrage apparait
comme un instrument de travail utile aussi bien aux professionnels de l’histoire qu"aux simples
citoyens. Il introduit de la complexité dans des récits souvent convenus, l’instabilité de la IV
République gage d’inefficacité par exemple, sans sacrifier la clarté de l’exposition si certaines
parties sont parfois austères dans les explications du fonctionnement des Assemblées.
Thiery Hohl
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