Note de recherche Note de recherche sur une question sensible Les relations puissance publique - firmes dans le secteur de l’eau et de l’assainissement Lætitia Guérin-Schneider Dominique Lorrain orsque nous avons programmé ce numéro spécial il était évident que les transformations des relations entre les collectivités locales et les firmes faisaient partie des questions sur lesquelles un bilan devait être fait. C’est un grand classique de l’histoire du pouvoir local en France que de comparer les mérites respectifs des régies et des opérateurs privés. La question n’a jamais vraiment été traitée au fond, dans sa démonstration statistique ou économétrique ; elle mérite toujours un bilan. L L’anniversaire des dix ans de la loi Sapin constituait, de plus, une puissante invitation à examiner les liens entre une procédure de sélection et ses résultats contractuels. Comment une modification du cadre institutionnel s’est-elle traduite sur les résultats de l’action ? La procédure allait-elle changer la préparation des offres, l’intensité des négociations ? Allait-on voir des opérateurs en place perdre leur contrat au profit de mieux disant ? De nouveaux acteurs allaient-ils faire leur entrée ? Comment cela se traduisait-il dans les contrats au bénéfice de l’usager final ? Nous ne sommes pas parvenus à obtenir ce type de bilan au niveau de ce que nous recherchions : des résultats nationaux complets à partir d’une base quantifiée. L’explication tient à plusieurs facteurs, au premier desquels il convient de mentionner la complexité du problème. Dans cette difficulté de la communauté scientifique à produire des résultats généralisables on peut voir aussi les conséquences d’une certaine configuration institutionnelle (1). La production du chiffre dans le secteur de l’eau est en France une question sensible car le système est fragmenté (2) et car elle s’inscrit dans des situations de compétition. - La comparaison est techniquement compliquée dès lors que l’on veut aller au-delà des données visibles (les prix) pour faire intervenir des paramètres d’économie industrielle, longueur des réseaux, densité de connexion, qualité de la ressource, paramètres de formation des coûts etc. qui permettent, en théorie, d’expliquer les différences constatées. - L’architecture institutionnelle décentralisée du système, qui repose sur un grand nombre de communes et de syndicats, a deux conséquences directes. Premièrement, elle se traduit localement dans des situations singulières qu’il n’est Dossier 35 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 pas facile de comparer, sauf à disposer d’un nombre important de points de comparaison, pour trouver des situations semblables. Si l’adaptabilité institutionnelle représente objectivement un facteur de succès du « modèle » sur le long terme, elle ne facilite pas le travail statistique ; on travaille rarement à périmètre constant (encadré 1). Deuxièmement, la décentralisation institutionnelle a pour corollaire l’absence d’un lieu central en mesure de produire une vision d’ensemble, légitime (3). De ce fait, puisque personne n’est légitime tout le monde peut l’être. Les enquêtes se multiplient : ministères et agences publiques (INSEE, DGCCRF, IFEN, Agences de l’Eau), universitaires commandités par les pouvoirs publics ou les agences de l’eau, travaux de thèse et publications d’organisations diverses (Que Choisir, NUS, SPDE, Centre d’Information sur l’Eau). Mais dans chaque cas, les critères retenus, les périmètres observés, les questions posées diffèrent, et d’autant plus que des intérêts se trouvent en compétition. - La compétition entre public et privé, et plus fondamentalement entre les logiques qu’ils sont censés incarner, est justement la troisième difficulté de la production de connaissances dans ce secteur. L’inscription des travaux statistiques dans un tel contexte, avec le risque d’oppositions partisanes, fait de la production de toute donnée un exercice difficile. Les informations se trouvent dans chaque exploitation, au niveau des collectivités locales. Or les élus locaux se sont rarement mobilisés sur ces questions, tandis que les opérateurs ont eu une stratégie très prudente car ils savent que l’information peut être une arme susceptible de se retourner contre eux. De ce fait, aujourd’hui, les travaux des uns et des autres ne sont pas agglomérables ; parfois même ils se neutralisent. On se trouve dans la situation paradoxale d’une énergie collective non négligeable consacrée à mener des enquêtes, sans parvenir à des résultats pleinement robustes, acceptables par tous. Certaines questions se répètent invariablement à vingt-cinq ans d’intervalle. Sur tous ces points, on peut mesurer l’écart entre notre système et celui de nos voisins anglais et allemands. Dans ces deux cas, leur système est politiquement stabilisé et donc il leur est normal d’en avoir une représentation quantifiée, que ce soit par l’Ofwat (régulateur économique du secteur privatisé de l’eau) ou l’association des Stadtwerke (VKU). Le parcours français est différent. Le système de la gestion déléguée est le pro- 36 Dossier duit d’un pragmatisme coutumier, d’une avancée patiente des firmes. À cela vient s’ajouter une certaine culture du secret qui habite une partie de l’action publique tout comme les sujets financiers. Ce fut pendant longtemps un ensemble en mouvement, produit de la compétition ; il n’était pas possible alors d’en figer les catégories. Peut-être ce temps est-il maintenant arrivé. Pour toutes ces raisons, puisqu’il n’était pas possible de faire un grand bilan, nous avons opté pour une note de recherche, qui s’appuie sur quelques textes majeurs publiés au cours des vingt-cinq dernières années. À défaut de disposer d’un bilan d’ensemble, il est tout de même possible d’identifier : - les critiques, - les accords, - les questions qui restent en suspens, - le bilan partiel sur la mise en œuvre de la loi Sapin. PRÉCAUTIONS Mais avant de rentrer dans ce corpus, une autre précaution s’impose. Il faut garder raison et conserver en mémoire certains ordres de grandeur. Si l’on considère que la dépense moyenne des ménages est de l’ordre de 311 Euros par an (2 040 F/an) il faut rappeler que ce budget est loin d’être le plus important comparé à d’autres services : l’énergie, le téléphone, les déplacements (encadré 2). Et l’écart est encore bien plus grand si on le compare aux autres consommations. Il y a 23 ans, Jacques Attali proposait la typologie suivante (4) : « parmi les biens de consommation dont les taux de croissance deviennent les plus rapides et où les taux de profits sont les plus élevés, on trouve de plus en plus souvent (…), les objets que j’appellerais objets puérils (…), disques, électrophones, jouets et jeux, matériel scolaire et vêtements sportifs, produits diététiques et sanitaires, restauration rapide, motocyclettes et appareils photos ; tout se passe comme si ces objets puérils venaient s’ajouter, puis succéder aux objets virils (l’automobile) et aux objets féminins (machines à laver et équipements ménagers) ». Nous ajouterons qu’au bas de cet édifice se trouvent les objets essentiels, dont fait partie le secteur de l’eau. Quel est leur poids dans les dépenses des ménages ? Quelle est la vitesse de croissance des firmes qui les gèrent et leurs profits ? L’énergie collective qui doit être consacrée, par les élus et les institutions publiques, à optimiser ce secteur doit rester à la hauteur de ces ordres de grandeur là, même si, comme on le verra plus loin, les réactions les plus fortes se justifient souvent par les écarts extrêmes par Note de recherche rapport à la facture moyenne. Ces cas, visiblement abusifs, concentrent l’attention. facilite pas le débat sur l’utilisation des fonds et la répartition de la rente, lorsque rente il y a. Manifestement, une partie des critiques ont aussi la vigueur qu’on leur connaît, non parce que les pratiques seraient condamnables, mais parce que les opérateurs sont de grandes firmes privées ; si le secteur se trouvait piloté par des établissements publics régionaux, il est probable que la vigilance sur les profits, ou le surplus, s’émousserait grandement. Dans le secteur de l’eau, les observateurs s’accordent pour dire que, à un niveau global, le profit reste raisonnable ; néanmoins la question demeure posée car il est considéré que sa baisse pourrait bénéficier aux usagers. La même question disparaît largement pour les opérateurs publics (régies, entreprises nationalisées), car ils ne font pas de profit stricto sensu, et cette vigilance ne s’applique pas non plus à la question du partage du surplus ; pourtant en économie, le profit est une des modalités du partage du surplus à côté des salaires des dirigeants, de ceux des salariés, du développement de la firme et des impôts. Cette suspicion vis-à-vis de la gestion privée entraîne souvent en réponse une stratégie d’opacité, qui ne La même asymétrie de traitement se retrouve dans la question de la vérité des prix. Dans un souci légitime de contrôle, les textes se multiplient pour avoir des documents annuels pour chaque exploitation. L’objectif est de parvenir à avoir une transparence de la formation des coûts, des prix et des investissements à ce niveau local. Nous verrons plus loin les problèmes que cela pose. Mais si l’on recommande un principe de transparence totale, pourquoi ne pas l’appliquer à d’autres firmes publiques qui, par leur tarification nationale, pratiquent de fait, des transferts très importants entre territoires et catégories d’usagers. Dans un cas, nous acceptons collectivement de considérer la grande entreprise comme une « boîte noire », de ne pas connaître la formation de ses coûts car on admet que les péréquations croisées sont une manifestation matérielle de la solidarité nationale (et c’est très bien). Dans le secteur de l’eau, le même défaut de connaissance se trouve immédiatement interprété dans le registre de « l’information cachée » et de l’abus de monopole. Encadré 1 : La répartition autorité organisatrice/opérateur (rapport Jousseaume, 1982) opérateurs Autorités organisatrices 36 400 communes communes syndicats (23 600 communes) 12 400 2 830 15 230 public privé (11 000) (500) 11 485 (1 400) (2 350) 3 745 (15 603 communes) Les chiffres entre parenthèses sur la ventilation des opérateurs selon les autorités organisatrices sont estimés. Cette répartition exacte entre autorités et opérateurs suppose qu’à chaque autorité corresponde un opérateur et que les 36 400 communes se rattachent en un seul opérateur. La réalité est plus complexe. L’eau et l’assainissement peuvent se dissocier et dans leur périmètre d’organisation et dans leur opérateur. Des choix différents peuvent distinguer ensuite la gestion des réseaux et celle de l’usine. Ceci explique la représentation de l’IFEN. Services communaux gérant l’ensemble du secteur Services intercommunaux (source DGCL) Services communaux partiels Dont gestion du réseau Dont gestion de la production Nombre de services Communes ne disposant pas du service eau potable 10 835 4 093 1 409 1 284 125 16 337 114 eau usée 12 236 2 175 3 561 3 561 17 972 15 107 Source : les données de l’environnement, ifen, n° 65, avril 2001, p. 2. Dossier 37 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Autrement dit, nous voulons rappeler au lecteur que les débats autour du secteur de l’eau se développent dans un contexte particulier. Notre hypothèse est que les écarts de traitement, entre firmes publiques et privées, nous font toucher à un point sensible de la culture politique française, toujours mal identifié. Les maires délèguent depuis fort longtemps ; ils ne cessent de le faire et le justifient mal ; on voit même poindre régulièrement des interrogations sur les mérites respectifs des différentes solutions. Tout se passe comme si l’inconscient politique était que la gestion publique serait meilleure, mais..… on finit par faire appel à la firme privée ! Plutôt que de réviser le dogme, ou d’interroger sa robustesse, notre société préfère entretenir la fiction. Cette structure d’action produit forcément des effets, sur ce qui est questionné et ne l’est pas. Autant le savoir avant de se plonger dans le corpus. CRITIQUES Un rappel historique s’impose. Les années 1954/1975 sont celles d’une intense urbanisation en France. Jusqu’à cette période, les compagnies d’eau, bien que très anciennes, restent encore des firmes de deuxième rang. En 1975, François Morin classe la CGE au 60ème rang de l’industrie, de la banque et des assurances (5). Les firmes desservent alors la moitié des Français. Leur diversification dans les autres réseaux techniques, qui semble évidente aujourd’hui, commence à la fin des années soixante : ingénierie du traitement, chauffage, déchets. Les transports, la construction viendront bien plus tard. Donc, elles étaient peu visibles dans le paysage. La facture d’eau restait faible (puisqu’il n’y avait pas d’assainissement). C’est à partir de ce tournant du milieu des années 1970, point haut dans le rythme d’urbanisation, que les critiques vont commencer. On trouve celles de la Cour des Comptes dans un rapport de 1976, puis celles de la revue Que Choisir dans des articles publiés en 1978 et 1980. Ensuite, arrivent la décentralisation et les programmes politiques des nationalisations 1982/1983, puis des privatisations 1986/1988 — qui modifient le contexte institutionnel et offrent des opportunités de développement à ces firmes. Dans le secteur de l’eau, le programme de dépollution mené par les agences financières de bassin (devenues depuis agences de l’eau) aura comme conséquence visible une hausse de la redevance d’assainissement, imputée à la facture d’eau. Donc, les factures augmentent au long des années quatre-vingt, quatre-vingt-dix. Plus généralement, la maturité urbaine, à laquelle le pays parvient, crée des besoins en équipements et en services urbains qui ne peuvent pas ne pas bénéficier à des firmes qui ont des compétences techniques et un puissant relationnel commercial construit au cours des ans. Les firmes se développent. Si l’on cherche un point symbolique, on pourrait dire qu’elles accèdent à la visibilité nationale en rentrant dans le secteur des médias CGE/Canal +, Lyonnaise/M6 et Bouygues/TF1. Il se trouve que cette entrée sur la scène publique, après des décennies de développement discret, va se faire dans le contexte des affaires qui interroge les rapports de la classe politique et de l’industrie. Encadré 2 : Estimation du budget annuel d’un ménage classique pour les services essentiels en 2000 Eau et assainissement (17 F/m3, 120m3/an) = 2 040 F = 1 500/2 000 F 250 € (500 F/2mois) = 3 000 F 457 € = 6 000 F 915 € cellulaire150 F/mois = 1 800 F Enlèvement des déchets Électricité (éclairage) Chauffage, eau chaude Téléphone Fil, 350 F/2 mois Déplacement (sans loisirs) 8 000 Km x 0,35 €/km 38 311 € = 2 100 F 594 € = 2 800 € Total 5 327 € Revenus d’un ménage : revenu médian 1 219 € + Smic 1 000 € 26 600 € Dossier Note de recherche De sorte qu’au milieu des années 1990 une insidieuse équation s’est installée qui lie : hausse du prix de l’eau, profit des firmes, croissance et affaires. Équation dangereuse pour la réputation d’un secteur, pour celle de la classe politique tout entière et pour le rapport des usagers à la politique. Cette situation a conduit, en 1993, au vote de la loi sur la prévention de la corruption et la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite loi Sapin. Celle-ci réaffirme la spécificité de la délégation par rapport au marché public, tout en imposant des règles de concurrence et de publicité en préalable à toute signature de contrat de délégation (voir la 4ème partie). Mais revenons aux critiques originelles. En 1976, la Cour des comptes s’intéresse à la gestion de l’eau et de l’assainissement ; son rapport fait suite à un précédent contrôle en 1969. Ce texte, aujourd’hui oublié, commence par les exploitations en régie et rappelle d’entrée de jeu les critiques dont elles ont fait l’objet dans le passé. « L’équilibre financier était trop souvent négligé ; les installations anciennes étaient insuffisamment entretenues et rarement renouvelées, les pertes, qu’elles résultent de pertes physiques ou de non facturation, étaient importantes » (p. 76). Pour y remédier, des instructions ministérielles intervenues depuis 1966 ont prévu la tenue d’une comptabilité distincte (elles affirment le principe de l’équilibre financier). « Cette exigence a été confirmée par la jurisprudence du Conseil d’État ». Le rapport examine l’application de la nouvelle réglementation et, manifestement, en ce milieu des années 1970, bien des lacunes subsistent. « Pour le calcul des prix de revient, quelques collectivités se sont refusées à modifier leurs pratiques antérieures ». Plus nombreuses sont les villes où l’évaluation du patrimoine n’a pas été faite. Quelques villes seulement prévoient des mises en réserve de leurs excédents. Le montant facturé pour « contribution aux charges du budget général » varie considérablement d’une commune à l’autre de 1 à 16 % des dépenses de fonctionnement (6). À Paris, la distribution d’eau est assurée par une régie et l’assainissement par un syndicat intercommunal ; ni l’une ni l’autre n’ont encore appliqué la réforme comptable. La Cour dénonce la politique de dégressivité des tarifs qui pénalise les petits consommateurs et ne constitue aucune incitation afin de réduire les consommations et plus généralement, elle relève une pratique de sous-tarification que les nouvelles règles comptables font ressortir. Globalement, les services d’eau sont dans l’ensemble « nettement bénéficiaires depuis 1970 ». La situation est moins favorable dans le cas de l’assainissement. Le taux de la redevance varie considérablement de 0,069 F/m3 à 0,92. Beaucoup de services présentent un déficit et d’autres reçoivent une subvention d’équilibre. Le rendement des réseaux semble encore loin d’être satisfaisant. Puis le rapport s’intéresse aux concessions et affermages. il rappelle en exergue que « l’intervention des entreprises privées n’est pas dénuée de justifications. Intéressées aux résultats, dotées d’une compétence éprouvée et de larges moyens, elles obtiennent souvent des rendements techniques satisfaisants » (p. 78). Puis le rapport se concentre rapidement sur la description des manquements : - Durée des contrats, le rapport critique le fait que, trop souvent, les affermages se trouvent calibrés sur les mêmes durées que les concessions alors que le fermier « a en principe engagé peu de capitaux » ; - Clauses financières, le rapport dénonce le manque d’information des collectivités locales, « l’insuffisance des éléments chiffrés dont disposent les collectivités locales, tant au moment de la conclusion du contrat qu’à la fin de chaque exercice, rend toute appréciation aléatoire sur ce point » ; - « Dans l’ensemble, les prix sont supérieurs à ceux qui ont été constatés dans les régies communales, l’écart moyen pouvant être évalué à 20 ou 30 % » ; - « Les tarifs les plus élevés sont généralement ceux des villes où les contrats sont les plus anciens » (p. 79). La Cour dénonce le mécanisme de prise de contrat qui se fait sur des prix raisonnables, suivis ensuite par une hausse régulière des tarifs grâce au jeu des formules de révision tarifaires ; - La cour dénonce les avantages annexes que les opérateurs tirent de leurs relations avec les collectivités : préférence pour l’attribution des marchés liés à l’exploitation du service. Ceci étant, le rapport rappelle que « les textes (cahier des charges types de 1951) encouragent eux-mêmes cette tendance » ; - Les facilités de trésorerie. Les opérateurs perçoivent la surtaxe et la TVA dans le cas des affermages, la redevance d’assainissement même si l’opérateur de l’eau ne gère pas ce service. La Cour constate que les délais de reversement de ces sommes importantes ne sont que trop rarement respectés. - En matière de contrôle, selon l’article 378 de (l’ancien) Dossier 39 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 code d’administration communale, « les entreprises liées aux communes par une convention financière comportant des règlements de comptes périodiques sont tenues de fournir à la collectivité contractante des comptes détaillés de leurs opérations. Les cahiers des charges types obligent les concessionnaires et fermiers à présenter chaque année, outre le compte rendu statistique de leur activité, un compte d’exploitation faisant ressortir l’ensemble des recettes et des dépenses ainsi que les résultats ». Ces dispositions sont rarement appliquées. Quinze ans plus tard la question des différences entre régies et gestions déléguée sera reprise par le rapport Mangin qui liste les principaux facteurs qui peuvent expliquer la différence : - sophistication plus élevée des traitements dans les services délégués, - part du bénéfice des firmes, - amortissements et provisions peu pratiqués par les régies ce qui entraîne une sous-évaluation, - qui est renforcée par l’imputation au budget général de certaines charges, - prise en charge de programmes de recherche par les sociétés privées. ACCORDS Les écarts de prix et leurs déterminants La question des écarts de prix a bien été traitée, dès 1982, par le « rapport Jousseaume », du nom du président d’un groupe de travail constitué à la demande du ministre de l’environnement, pour étudier les mesures à apporter aux disparités entre les prix de l’eau des différentes communes. Les associations de consommateurs réclamaient un prix unique (7). La commission, prend acte de l’architecture institutionnelle existante et de ses conséquences sur le prix. Elle réaffirme « le caractère essentiellement local de la distribution d’eau potable (…). À ce titre l’instauration d’un prix unique de l’eau sur l’ensemble du territoire national a paru devoir être écartée car susceptible d’engendrer centralisation ou bureaucratisation » (synthèse). En revanche, elle recommande une plus grande lisibilité des factures, une assistance aux villes pour la négociation des contrats et la création de fonds départementaux pour aider les communes qui veulent moderniser leur réseau. Parmi les mécanismes de péréquation du prix de l’eau, le rapport distingue les mécanismes internes et externes. Des péré- 40 Dossier quations internes sont apportées par les syndicats, qui regroupent alors environ 23 600 communes, car ils pratiquent un prix unique de l’eau. « En l’absence de cette coopération intercommunale, les problèmes de péréquation se poseraient d’une façon infiniment plus vive puisque chaque commune (36 400) aurait son prix de l’eau avec une dispersion poussée à l’extrême ». Outre les coopérations dans de grands syndicats dans les agglomérations urbaines, le rapport rappelle l’existence de syndicats dans une quinzaine de départements. Il recense aussi les péréquations externes (p. 22) : le Fonds National pour le Développement des Adductions d’Eau dans les communes rurales (8), les subventions du Ministère de l’intérieur, du Ministère de l’agriculture, les contributions des Agences de l’eau « qui perçoivent les redevances de prélèvement et de pollution (…) et octroient des subventions, avances et prêts pour l’amélioration des services d’eau potable et d’assainissement », les régions et les départements « qui octroient des subventions et prennent en charge des annuités ». Les causes de disparités de prix sont exposées dans leur principe (p. 31 et suiv.) : - la géographie, fait partie des facteurs les plus importants : quantité, qualité et disponibilité de la ressource. Viennent s’ajouter les facteurs liés à la structure de l’habitat (densité, position par rapport à la ressource) (9) ; - facteurs socio-économiques : si quelques clients consomment un très gros volume, ils créent un effet d’échelle dont bénéficient les usagers domestiques. À l’inverse, l’accueil des populations dans les zones touristiques nécessite des investissements coûteux (pour faire face aux pointes) qui ne peuvent être amortis sur des volumes élevés et se traduisent par des prix au mètre cube relativement chers ; - qualité du service : traitement à l’ozone, investissements de sécurité etc. ; - les modes de gestion entrent aussi en compte : les régies connaissent une plus forte disparité (10) (et leurs prix se trouvent diminués avec des transferts en provenance du budget communal et une absence d’amortissements), alors que les sociétés privés ont une politique plus régulière d’amortissement, complétée par des péréquations dans le temps et l’espace entre leurs différentes exploitations, (p. 33) ; - l’histoire : « le coût des ouvrages ayant été multiplié par 12 en 30 ans, les taux d’intérêts des emprunts ayant été multipliés par 3 sur la même période, la date de réalisation des investissements est une cause importante de disparités », Note de recherche p. 34. Ce qui se traduit ainsi : « lorsque le réseau est ancien, entièrement amorti, mais n’a pas besoin dans l’immédiat d’être renouvelé, les prix sont relativement faibles. Au contraire, lorsque le réseau est récent, les amortissements d’emprunt et les frais financiers sont à l’origine plus élevés. L’âge du réseau apparaît donc comme une des composantes essentielles d’explication du prix de l’eau » ; - le développement des communes : dans celles dont on prévoit une forte croissance (rural péri-urbain) les réseaux doivent être surdimensionnés pour faire face aux besoins futurs ; - la qualité de la gestion, le rapport donne de nombreux exemples. Des chercheurs ont ensuite tenté de trouver une explication de causalité entre les différences de prix (11), en privilégiant le facteur technique. Ce type d’explication ne s’impose pas, ou si la dimension technique de la fixation du prix intervient, elle le fait à côté d’autres facteurs qui, selon le contexte, jouent un rôle plus ou moins important. Autrement dit, les écarts de prix sont le résultat de plusieurs facteurs, listés, dont la pondération va varier. Faute de séries statistiques plus longues et plus précises ; il est difficile d’aller au-delà de cet énoncé de 1982 : le prix va varier en fonction de la nature technique du réseau, de son histoire et des moments de sa constitution, du développement de la ville, de la structure des consommateurs, du niveau de service, de la politique de l’opérateur qui peut pratiquer une stricte vérité des prix ou pratiquer des péréquations invisibles. Ces questions du prix vont être reprises presque dix ans plus tard par le rapport Mangin du Conseil Économique et Social (12). Il fait le constat d’un quasi-doublement des prix sur la décennie 1980/1989 ; mais cette évolution n’est pas considérée comme un problème car elle est semblable à celle de l’ensemble des services. L’indice eau (13) passe d’une valeur 100 en 1980, à 194,2 — tandis que l’indice général des services lui passe à 193,5. Le rapport souligne aussi qu’une bonne partie de la hausse « est imputable à l’accroissement des redevances d’assainissement traduisant ainsi le développement de la fonction d’épuration », p. 109. Si on résume, en ce début des années 1990, le phénomène de hausse est reconnu mais il n’est pas jugé préoccupant : on investit pour dépolluer et la variation se situe dans le trend des services. Pourtant on a de bonnes raisons de penser, rétrospectivement, que le phénomène était minoré en raison du procédé de calcul. En effet, ces données sont établies à partir de l’indice INSEE à la consommation. Les rapporteurs semblent bien conscients du problème et mentionnent que les premières enquêtes du ministère de l’environnement, sur les années 1986/1988, font ressortir des hausses plus élevées que celles enregistrées par l’INSEE. Le rapport étudie aussi les écarts de prix selon la taille (14) (p. 106). Le classement montre une courbe en « U inversé » (figure 1). Le prix est bas pour les communes de moins de 700 habitants, puis il croît jusqu’à 5 000 habitants avant de baisser. Ceci revient à dire qu’au-delà d’une certaine taille, la densité (qui se mesure dans ce domaine par le nombre d’habitants par mètre linéaire de réseau) génère des économies d’échelle. Encadré 3 : Comparaison des coûts de production Eau souterraine - pompage peu profond - forage équipé (amortissement) 0,12 0,06 eau de surface - captage - traitement 0,04 0,24 0,18 F/m3 0,28 F/m3 Source : Y. Cheret, « L’eau », Paris, 1967, actualisé par le BRGM en francs 1976, pp. 68-69, in « Rapport d’information sur les problèmes de l’eau », Assemblée Nationale, commission de la production et des échanges, MM. Cornette, Bernard, Desanlis, Dousset et Roger, document n° 2923, annexe à la séance du 25 mai 1977, 5 tomes. Selon l’IFEN, les eaux superficielles représentent une ressource pour 16 % de la population, leur prix se situe dans un indice compris entre 125 et 110. Les eaux souterraines alimentent 53 % de la population et l’indice prix se situe entre 95 et 85. Source : les données de l’environnement n° 71, nov-dec. 2001, IFEN, p. 3. Dossier 41 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Figure 1 : Prix suivant la taille des communes (source : Conseil Économique et Social) Accords généraux Le prix de l’eau a une justification ; elle se situe plus dans le service incorporé jusqu’à l’usager final que dans la ressource. Le rapport Mangin, (CES 1991) énonce que « la disponibilité de l’eau à l’usager suppose des investissements importants et la mise en place de services (…), le prix de l’eau, c’est donc le prix du service et non pas le prix de la ressource eau », (p. 105). Autrement dit, si tous les experts sont d’accord pour relever que le prix final est indépendant de la gratuité d’une ressource (l’eau) en début de cycle, il n’en demeure pas moins que les prix doivent pouvoir être rapprochés des coûts. Le rapport Tavernier (15) de 2001 rappelle que le prix global de l’eau se situe autour de 17 F/m3 (soit 2,6 €/m3) (16), soit une dépense annuelle de 305 € par an et par ménage. Si on actualise ce chiffre, on peut dire qu’en 2003, le prix moyen du mètre cube est de 3 €, soit un budget ménage de 360 € (17) par an, ou 1 euro par jour. Ce même rapport admet qu’il s’agit d’un prix raisonnable (400 fois moins cher que l’essence au litre) ; chaque famille dépense environ le prix d’une baguette de pain (18), « pour un ménage aux revenus modestes, la dépense n’est cependant pas négligeable ». Accord enfin pour reconnaître que, quelles que soient les critiques, les Français disposent d’un service de bonne qualité « pour un coût qui se situe dans la moyenne européenne » (19). 42 Dossier « En réalité, ce qui pose problème n’est pas seulement le montant de la facture (globale), mais sa forte augmentation (…) et sa trop grande disparité d’une commune à l’autre », (Tavernier, op. cité). Le rapport souligne l’existence d’un rapport de 1 à 2 d’un département à l’autre (1 400 F dans le Puy-deDôme, contre 2 600 F en Seine et Marne). Cette présentation du rapport Tavernier est illustrative des points d’accord et des interprétations possibles. En nous appuyant sur l’enquête IFEN de 1998, on pourrait aussi dire que 90 % des communes facturent, toutes taxes et redevances comprises, le service eau plus (le cas échéant) celui de l’assainissement, entre 5,20 F et 20,70 F (0,79 et 3,16 euros). Le prix moyen du premier décile de la région la moins chère et du dernier décile de la région la plus chère sont respectivement d’environ 3 à 30 F (0,46 à 4,57 €). D’autres sources (FNDAE) convergent vers une variation qui va de 1 à 5. Ce constat soulève immédiatement la question de la justification des situations extrêmes (prix très bas ou très élevés), qui sont mal ressenties, particulièrement pour les prix élevés. On en déduit immédiatement que selon le point de vue adopté (20), on peut soutenir un rapport des prix de 1 à 2, de 1 à 5, voire de 1 à 10. La macro-économie du secteur Ces accords sur le secteur s’appliquent aussi à sa macro-économie (encadré 4) et à son évolution future. Plusieurs sources convergent sur un même diagnostic. Note de recherche En 1983, le rapport Hervio (21) soulignait l’importance économique des investissements dans le secteur de l’eau ; il les estimait entre 4 et 5 GF par an, soit un ordre de grandeur analogue aux dépenses de voirie. Presque vingt ans plus tard le rapport Tavernier les évalue à 30 GF, soit 4,6 G€. La valeur totale du patrimoine, chiffrée à 198 G€ en coût de renouvellement à neuf, se décompose en trois principales composantes : eau, assainissement et coût de mise aux normes européennes (22). En 1995, Bernard Barraqué (23) évalue la valeur de remplacement des actifs sur les deux premiers postes à 50,3 G€ et 74 G€. Selon une estimation haute de l’effet des normes européennes, faite par François Valiron, 61 G€ d’investissements resteraient à faire. Comme le fait remarquer B. Barraqué ces données se trouvent certainement bien plus à la base du prix de l’eau que ne le sont les comportements « de tel ou tel syndicat, ou d’un service avant ou après la délégation à une société ». Le rapprochement du chiffre du « marché privé de l’eau et de l’assainissement », des « dépenses annuelles du secteur » (encadré 4) permet de situer la place des firmes privées dans la gestion de ce cycle urbain de l’eau. Elles sont importantes, certes, mais se trouvent impliquées pour 30 % des dépenses au maximum (leur part est moindre si on considère la gestion déléguée au sens strict). Ces ordres de grandeur doivent être conservés à l’esprit lorsqu’il est question d’une optimisation du secteur. QUESTIONS ET DÉBATS Les questions qui demeurent ouvertes, et continuent de faire l’objet de débats, résultent pour une bonne part de l’existence d’une gestion privée au côté de la gestion publique. Cette cohabitation crée une compétition qui entraîne ensuite des questions à portée multiple. Le renouvellement Ce thème, dont l’importance macro-économique n’échappe à aucun observateur, fait l’objet de plusieurs discussions : techniques et économiques. Les réseaux représentent un patrimoine estimé à environ 800 000 km pour l’eau et 250 000 km pour l’assainissement (25) soit, avec un ordre de grandeur de 100 € du mètre, un patrimoine total, en valeur à neuf, de 150 G€. Sachant que la durée de vie est de l’ordre de 85 ans, le coût annuel de renouvellement se chiffrerait à environ 1,3 G€. Si l’on ajoute que la plus grande partie des réseaux a été construite dans les années 1950 à 1980 et que, jusqu’à présent, le renouvellement est souvent resté assez réduit, le besoin de renouvellement dans les années à venir risque d’augmenter significativement. Reste à savoir, d’un point de vue technique, quand il sera pertinent de le commencer et avec quelle intensité. Deux thèses s’affrontent sur ce sujet. D’un côté, certains, dont les canalisateurs de France, qui sont à l’origine d’un vaste inventaire des réseaux réalisés sur plusieurs départements (26), prônent un renouvellement massif dans les prochaines années. Sur la base des inventaires réalisés, ils estiment le besoin à 1,5 G€ jusqu’en 2015, uniquement pour l’eau. De l’autre, les gestionnaires des réseaux, confortés dans ce choix par certains travaux théoriques (27), suggèrent qu’il est préférable d’attendre le début de la dégradation physique des canalisations avant de les remplacer, ce qui dans certain cas, prolongent très sensiblement la durée de vue effective. Encadré 4 : Macro-économie du secteur Dépenses annuelles du secteur Dépenses d’investissement Valeur du patrimoine (coût de renouvellement à neuf) Soit 21 000 F/habitant (3 200 €) Marché privé de l’eau et de l’assainissement Chiffre d’affaires de la délégation de service public (sens strict) 100 GF (15,24 G€) 30 GF (4,6 G€) 1 300 GF (198 G€) 30 GF 23 GF (24) Source : Rapport Tavernier, op. cité, 2001, p. 10. Ces chiffres convergent dans leur ordre de grandeur avec ceux du rapport annuel de la Commission des comptes et de l’économie de l’environnement, publié à la documentation française (données 2000) : Dépenses pour les services d’eau et d’assainissement : 17,8 G€, dont 6,1 G€en investissement et 11,7 G€en exploitation. Dossier 43 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Il faut bien reconnaître que, de fait, le renouvellement reste souvent limité. Pour mesurer l’écart entre renouvellement « théorique » et renouvellement « effectif », il suffit de regarder les données extraites du rapport annuel de la Commission des comptes et de l’économie de l’environnement, publié par la documentation française, qui chiffre pour 2000 le besoin de renouvellement des réseaux à respectivement 1,5 G€ pour l’eau et 0,8 à 1,3 G€ pour l’assainissement et à seulement 0,9 et 0,5 G€ les dépenses réelles. Indépendamment de ces perspectives sur le réseau, le renouvellement des branchements en plomb, sous le coup d’une nouvelle exigence européenne, pourrait également entraîner des dépenses importantes, réparties entre les services publics et les particuliers (pour la partie privative du branchement et les canalisations internes aux immeubles). Selon que les directives européennes, sur l’assainissement et le plomb, sont appliquées, totalement ou partiellement, rapidement ou sur plusieurs décennies, les estimations annuelles varient. Dans sa note de 1995, B. Barraqué pointait bien le problème. L’estimation « Valiron » était alors de 61 G€ pour avoir « un ensemble technique aux normes de l’Union Européenne ». L’Agence de l’eau Seine Normandie chiffre l’application de la directive 80/818 eau potable à 15,2 G€, mais en ajoutant que « la fourchette est très vaste : 3 à 46 G€ selon que l’on considère le remplacement des réseaux en plomb des immeubles ou non ». Quels que soient les choix techniques sur le réseau, les branchements ou les autres éléments du patrimoine, compte tenu des masses d’investissements en jeu, les opérateurs et les collectivités locales doivent se préparer. La comptabilité prévoit des techniques d’amortissement et des provisions pour renouvellement (28). Le secteur public s’y met ; c’était un des retards pointés par le rapport de la Cour des Comptes de 1976. Il faudra du temps pour transformer les pratiques. La comptabilité dite « M49 », introduite en 1992, rappelle l’obligation d’amortir les investissements neufs ; cette réforme s’applique plus mal à l’ensemble du patrimoine déjà en place car les inventaires sont souvent incomplets et sous-estiment les valeurs des actifs. Malgré tout, les méthodes comptables du secteur public se rapprochent de celles du secteur privé qui, depuis longtemps, pratique les amortissements du matériel et les provisions pour renouvellement. 44 Dossier Cette prise en compte du temps long par les collectivités locales les conduit à devoir choisir entre plusieurs solutions aux philosophies différentes. Elles font l’objet de débats, d’autant plus vifs que toutes les conséquences ne sont pas toujours bien comprises. Considérons le problème du renouvellement de long terme, dans le cas des affermages (29). - Première option, la collectivité locale n’inclut pas ces dépenses dans le prix du délégataire. Elle préfère couvrir la dépense sur son propre budget lorsque l’incident surviendra ; elle opte au fond pour une dépense certaine, constatée a posteriori. Dans ce cas, si jamais elle ne réalise pas elle-même les amortissements suffisants, elle « accepte le risque de demander aux usagers (ou aux contribuables) le montant nécessaire, le moment venu » ; - Deuxième option, la collectivité anticipe en confiant la responsabilité du renouvellement au délégataire via la mise en place d’un « compte de renouvellement », régulièrement suivi : on détermine un montant de travaux et le fonds peut être ajusté à la baisse, mais aussi abondé, en fonction de la réalisation effective des travaux ; - Une troisième option est celle de la « garantie de renouvellement », proposé par les opérateurs depuis la mise en œuvre de la Loi Mazeaud, obligeant les délégataires à produire des comptes pour chaque contrat (30). Sous ce terme l’opérateur met en place ce qu’il qualifie d’une « assurance de renouvellement » : il s’engage cette fois à faire face luimême aux dépenses quel que soit le montant, en contrepartie du paiement d’une garantie annuelle forfaitaire, incluse dans le calcul initial du prix. Cette fois, on sort de l’esprit de l’amortissement (dégager des sommes en vue d’une grosse dépense future), pour entrer dans une logique assurancielle, dont la portée n’a pas toujours été bien comprise. Si l’aléa se produit, sa couverture incombe totalement à l’opérateur, mais s’il ne survient pas avant l’expiration du contrat (et que celui-ci n’est pas reconduit), l’opérateur conserve le bénéfice de cette provision et la collectivité (ou le délégataire suivant) repart à zéro. Pourtant, la certitude que les infrastructures devront être renouvelées ne souffre pas de discussion. Si bien que cette formule a fait l’objet de critiques au motif que les collectivités (et leurs usagers) se trouvaient exposés au risque de devoir payer deux fois ce renouvellement en cas de changement d’opérateur ; - Il existe enfin une dernière possibilité ouverte par les règles comptables spécifiques de la délégation (31), mais qui, faute d’être connues, ne sont quasiment jamais appli- Note de recherche quées : le recours, dans la comptabilité du délégataire, aux amortissements de caducités et aux provisions pour renouvellement et grosses réparations : ces mécanismes comptables permettent au délégataire de financer des investissements ou des renouvellements en les amortissant sur la durée du contrat. Ils ouvrent aussi la possibilité d’un reversement des provisions non consommées à la collectivité en fin de contrat. Dans ce cas, chacun s’y retrouve. La répartition public-privé Le tableau construit depuis le milieu du XIXe siècle montre que l’essor des compagnies privées est concomitant à l’urbanisation du pays, à partir du milieu des années 1950. Dans le siècle qui précède, la population augmente peu ; la période est ponctuée par quatre conflits (guerre de 1870, deux guerres mondiales et les guerres coloniales). Donc au tournant de 1954 le taux d’urbanisation n’est que de 56 % et les firmes privées desservent moins d’un tiers des français (31,6 %). On mesure leur potentiel de développement dans un marché en croissance : hausse de la population totale, hausse plus rapide des populations urbaines et besoins liés en services urbains. En longue durée les firmes privées n’ont cessé de se développer. Aujourd’hui elles desservent 80 % de la population en eau potable et 55 % en assainissement environ. Une difficulté de mesure tient aux critères utilisables qui ont chacun leur registre d’information : - le nombre d’unités de gestion, contrats de délégation ou régies (surestime les petites régies) ; - le nombre d’abonnés (précis, se mesure par les compteurs mais met en équivalence le particulier et le gros consommateur industriel) ; - les volumes d’eau vendus (précis et actualisés) ; - la population desservie (imprécis, se calcule à partir des abonnés et de la composition des ménages extrapolée des résultats du recensement). Encadré 5 : Sur la place du secteur privé : • 1 français sur 6 en 1936 (16,9 %) • 1 sur 3 vers 1954 (31,6 %) • 1 sur 2 vers 1973 (50 % en 1975 qui minore) • 2 sur 3 en 1983 • 3 sur 4 en 1987 • 4 sur 5 en 2003 C’est ce dernier critère qui est souvent utilisé car il est parlant. Comparons les années 1975 et 1978, pour lesquelles la part du secteur privé passe de 50 % à 57,6 %. Estce le fait d’une reprise massive de régies (32) ? En fait, cette progression s’interprète largement comme un effet des données chiffrées utilisées. En 1975, année de recensement, le chiffre de « la population desservie par le secteur privé » se trouve fondé sur la dernière statistique officielle (le recensement de 1968), corrigée par des recensements complémentaires pour certaines communes. Donc on connaît le chiffre global de la population, tandis que celui des populations des communes ayant un contrat avec une compagnie d’eau, date encore. La correction se fera avec quelques années de décalage, ce dont témoigne le chiffre de 1978. On retrouve le même décalage au recensement de 1983 avec une part du secteur privé de 61,7 % alors que le chiffre réel était plutôt de 65 %. La représentation du poids de chaque firme est une autre question où les chiffres ont pu diverger en fonction de l’imputation des filiales communes à la CGE et à la Lyonnaise, et de l’inclusion des « petites compagnies » : Saur, Sobea, Sdei. Le secteur de l’eau est aujourd’hui concentré sur trois groupes privés qui desservent 47,4 millions d’habitants (encadré 6). Le numéro un est indiscutablement la CGE avec 24,2 millions ; suivie par la Lyonnaise (11,4 millions) ; leurs filiales communes dans quelques grandes villes servent 4,7 millions d’habitants. Le secteur s’est concentré avec le rachat des principaux « indépendants ». La Saur a été reprise par la famille Bouygues en 1984. Entre 1986/1988, la privatisation de Saint-Gobain et la cession de sa branche travaux (SGE qui contrôlait la Sobea et la Sablaise des eaux), à la Générale des eaux, s’accompagne d’une redéfinition des frontières. La SGE consolide toutes les activités travaux, mais elle fait apport de ses exploitations d’eau à une nouvelle compagnie, la Cise, rattachée à Saint Gobain, afin d’éviter une concentration trop grande. La Cise sera reprise par la Saur en 1997, ce qui se traduit dans la spectaculaire progression de la population desservie (encadré). La Lyonnaise avait absorbé la SDEI en 1991 (33). Plus récemment, l’introduction de mécanismes de compétition au moment de la passation des contrats va permettre à quelques entreprises locales de se créer ; elles servent moins d’un million de consommateurs : entreprises Ruas (contrats à Alès, dans la région de Nice), Cholton, Soaf… Dossier 45 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Les profits Si on exclut la rhétorique d’usage sur « les émirs de l’eau », tout le monde est d’accord pour dire que les profits du secteur sont raisonnables (41). L’ouverture européenne, la mondialisation des affaires apportent même des données massives à l’appui de cette affirmation. Il faut 150 ans à la CGE pour atteindre l’importance d’aujourd’hui. Des performances analogues sont obtenues en une génération par Vodaphone ou Microsoft ; c’est aussi sur cette durée que M. Li Ka Shing a construit son groupe à Hong Kong. On peut penser que les pentes des courbes de profits ne sont pas les mêmes. L’étude des stratégies des firmes pendant les années 1990 (voir l’article sur l’offre dans ce numéro) montre que les électriciens ont disposé de cash flows confortables leur permettant de mener des stratégies de diversification. Aujourd’hui le problème n’est pas là. Il se trouve dans le décalage entre la profitabilité mesurée au niveau groupe et celle que génèrent les exploitations, au niveau des collectivités, base de tout l’édifice. La dernière est bien plus importante que les 710 % évoqués. Mais est-ce une surprise ? Dans tous les secteurs industriels, (alimentation, habillement etc) le prix final est sans commune mesure avec celui payé au niveau de la production (industriel du textile, agriculteur). L’analyse de la chaîne de la valeur dans ces secteurs explique des écarts de 5 à 1. Cet écart des profitabilités groupe et exploitations, est aujourd’hui mal traité, largement tabou car au fond, le profit n’est jamais totalement légitime. À cela s’ajoutent les questions d’imputation des coûts divers (amortissements, provisions, emprunts, taxes) qui changent la lecture d’un compte. Comme le montre le compte Population française, urbanisation et part des firmes privées dans la distribution d’eau potable 1ère ligne la population totale (34) 2ème ligne la population urbaine 3ème ligne « la population desservie par les compagnies d’eau » (35). 1851 1900 1911 1929 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1978 1982 1990 1999 40,9 38,5 41,5 41,6 41,9 40,5 42,7 46,5 49,7 52,6 53,0 54,3 56,5 58,5 9,0 17,5 22,0 23,9 29,4 34,8 38,4 39,9 41,0 45,0 7,1 (36) 13,5 16,9 22,2 26,0 30,5 (37) 33,5 42,4 46,2 50 % 57,5 % 61,7 % 75 % 79 % 16,9 % 31,6 % 36,3 % 44,7 % Encadré 6 : La décomposition du secteur privé entre les firmes - CGE - SLE - SAUR - Filiales communes - Sobea, - SDEI - indépendants Total privé Population totale 46 Dossier 1975 (38) 1979 (39) 2001(40) 11,0 7 ,0 1,5 5,0 1,5 (cf Sobea) —26 millions 52,6 millions 50 % 11,0 7,6 3,2 5,0 2,1 2,0 —30,5 millions 53 millions 57 % 24,2 11,4 6,2 4,7 ——0,9 47,4 millions 60 millions 80 % 51 % 24 % 13 % 10 % ——2% Note de recherche simplifié que nous tirons d’une exploitation réelle, il y a loin entre les 40 % du profit d’exploitation brut et les 9,75 du profit net après impôts. Aborder ces questions de manière « froide » serait certainement un grand progrès dans le contexte d’une décentralisation étendue. capacité et les informations liées font partie de ses compétences et constituent un actif invisible. Si on résume le point, il y a une limite à vouloir déconstruire la firme multi-divisionnelle pour la rendre transparente comme si on se trouvait dans un marché atomistique. Mais une fois le problème posé, on voit bien toute la difficulté d’une mise en œuvre. D’un côté, le souci de transparence dans une activité publique peut conduire à vouloir mieux connaître l’usage qui est fait des surplus dégagés à partir des exploitations locales et dans ce cas, à rechercher des informations sur l’utilisation des sommes consacrées au renouvellement, sur le degré de mutualisation entre les contrats gérés dans l’eau et d’assainissement en France, sur la séparation entre une activité nationale et internationale (ring fencing). Or cette liste de ce que la firme pourrait fournir n’est pas limitative. L’exemple de la régulation anglaise, conçue au départ pour être légère et qui n’a cessé de s’étendre, est là pour nous rappeler qu’il s’agit bien d’un processus sans fin, qui finit, de fait, par se rapprocher des formules de contrôle de type cost plus, dans laquelle la firme présente tous ses coûts, et on lui garantit son profit. En formulant ainsi le problème on en voit aussi les limites. Que resterait-il du principe de gestion déléguée, si tous les coûts et tous les choix étaient connus de tous ? Cela pose deux problèmes : économiques et politiques. Il y a aussi un problème politique. La maturité des échanges entre puissance publique et firme n’est pas celle des relations firme-firme (dans les procédures d’outsourcing), sur de nombreux sujets, dont la question du profit. En économie, cela revient à vouloir la transparence du marché, présupposé de l’optimum de l’échange en théorie économique. Or il se trouve, si on admet l’argument de Coase sur les coûts de transaction, que la grande firme s’est précisément développée en offrant une solution autre que le marché à la coordination des échanges. Sa supériorité (dans certains cas) vient de sa capacité à arbitrer entre des ressources ; mais cette Encadré 7 : Compte d’exploitation Chiffre d’affaires Coûts d’exploitation Excédent brut d’exploitation Amortissements Provisions Résultat d’exploitation Dette Profit avant impôt Impôts (35 %) Profit net après impôts 100 60 40 13 2 25 10 15 5,25 9,75 Autrement dit, s’il est légitime, sur un certain nombre de points, de rechercher plus d’information, la limite n’est pas toujours facile à trouver et il n’est pas certain que l’excès de contrôle sur l’affectation des moyens facilite le fonctionnement du secteur, dans l’intérêt des parties. DE LA COMPÉTITION Bilan de la loi Sapin Pour finir ce panorama des données disponibles dans le secteur de l’eau et des débats en cours, il est intéressant de boucler sur la question de départ, relative à l’impact réel de la Loi Sapin. Si, comme nous l’avons dit en introduction, il n’existe pas de bilan complet et exhaustif, nous pouvons néanmoins apporter certains éléments de réponse grâce à un observatoire mis en place par le laboratoire GEA de l’ENGREF, avec le soutien du Ministère de l’Écologie et du Développement Durable (42). La loi Sapin du 29 janvier 1993 introduit plus de transparence, de publicité et de concurrence dans la signature de contrats de délégation de service public. Elle ne remet pourtant pas en cause le principe de libre choix par l’autorité publique de l’opérateur (principe d’intuitu personae), reconnu essentiel dans un partenariat local basé sur la durée et la confiance. Après 10 ans d’application et 4 ans d’observation, on peut dégager de grandes tendances (43), et mettre en lumière certains points clés sur lesquels pourrait porter le débat, en vue d’une éventuelle évolution réglementaire. Le premier objectif de la loi Sapin était de moraliser la vie publique et de rétablir un climat de confiance ; il convergeait par ailleurs avec les exigences communautaires et les prescriptions économiques. Cette loi a été complétée par la loi Barnier du 2 février 1995 (introduction du rapport annuel du maire sur la qualité et le prix du service) et la loi Mazeaud du 8 février 1995 (introduction du rapport annuel du délégataire). Dossier 47 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Modalités de mise en œuvre : mise en concurrence formelle et libre choix de l’exécutif. La mise en œuvre de la loi Sapin repose sur deux éléments: d’une part, obligation de publicité dans des journaux d’annonce légale et mise en concurrence des offres, et d’autre part, création d’une commission d’ouverture des plis devant laquelle l’exécutif doit motiver son choix. De plus, les contrats sont limités dans le temps (la durée maximale sera fixée à 20 ans par la loi Barnier). La liberté de choix de l’exécutif reste entière. La commission consultative des plis, qui établit la liste des candidats admis à présenter une offre, après réception des candidatures, n’a ensuite qu’un rôle consultatif dans l’examen des offres. Dans quelle mesure, la loi introduit-elle alors une réelle concurrence supplémentaire ? Plusieurs éléments conditionnent l’exercice effectif de la concurrence : la position des élus dans la négociation face aux entreprises, le nombre d’offres remises et le contenu de ces offres (le prix n’étant pas l’unique facteur décisif). La base de données constituée par l’observatoire permet de fournir des éléments d’analyse pour évaluer si la loi a réellement conduit à une amélioration de la concurrence, et, si oui, dans quelles conditions. Impact dans le domaine de l’eau : les grandes tendances. La durée des contrats diminue nettement, avec le passage de 16 ans à 11 ans en moyenne. Les évolutions de prix constatées, services d’eau et d’assainissement confondus, ont conduit en 2001 à une baisse du prix moyen global perçu par le délégataire (recettes totales divisées par volumes totaux) de 7,8 % (ce qui représente 5,7 centimes d’euros). Toutefois cette baisse profite essentiellement aux moyennes et grosses collectivités (figure 2). Elle atteint 15 % pour les collectivités de plus de 20 000 habitants, tandis que les petites collectivités (moins de 4 000 habitants) connaissent une diminution de seulement 1 %, voire une hausse de cette part délégataire. Cette baisse du prix délégataire est compensée en partie par une hausse de la part versée à la collectivité (44) (de 2,4 centimes d’euros en moyenne) ce qui traduit peut-être un transfert de certaines tâches (notamment le renouvellement) vers la collectivité au moment du renouvellement du contrat. La majorité des collectivités prend un conseil auprès d’organismes publics (services déconcentrés de l’État), notamment les collectivités de petite taille. La concurrence directe, entre les entreprises n’est pas toujours assurée : en 2001, une procédure a généré en moyenne 3,8 candidatures et 2,2 offres et dans 28 % des cas, une unique offre a été reçue. Une procédure sur dix aboutit à un changement de délégataire. On observe l’émergence de nouveaux délégataires, indé- Figure 2 : Évolution du prix moyen délégataire par taille de service, 2001 48 Dossier Note de recherche petits services traduit à la fois des conditions de négociation plus difficiles pour des collectivités souvent dépourvues de services spécialisés dans la délégation, mais aussi un changement dans les mécanismes de péréquation. Jusqu’à présent, dans une logique de développement géographique, les entreprises avaient intérêt à accepter de petits services proches de leur zone d’implantation en les tarifant au coût marginal. L’obligation de produire des comptes par contrat depuis 1995 conduit à une approche par coûts complets, et à un rééquilibrage entre les prix pratiqués dans les grands et les petits services (45). Ici, l’exigence de transparence s’est traduite par un rééquilibrage au détriment de petites communes, proches des agglomérations et qui bénéficiaient d’économie d’envergure. pendants des trois grands groupes et qui sont généralement des entreprises régionales. Il n’y a pas eu encore d’implantation d’entreprise exploitant étrangère, malgré plusieurs tentatives. Le tableau suivant fournit l’évolution de ces chiffres depuis 1998. Si les évolutions moyennes sont encourageantes, les résultats de la loi doivent tout de même être nuancés en fonction notamment de la taille de la collectivité. Si l’on raisonne cette fois en terme de nombre de services, en 2001, sur les procédures eau et assainissement renégociées, 50 % subissent une hausse du prix, 44 % une baisse et pour les 7 % restant, le prix reste identique. Ce succès mitigé en termes de prix pour les Année 1998 1999 2000 2001 Nombre de procédures recencées 582 684 509 477 Nombre de procédures exploitables de notre échantillon pour le calcul du prix * 333 195 211 208 Évolution de la durée des contrats avant/après en année 17³11 16,8³11 15,2³10,8 15,7³10,9 Pourcentage de délégataires renouvelés (taux de reconduction) 92 % 82 % 88 % 89 % 20 37 8 11 Évolution du prix moyen ** eau et assainissement confondus -9 % -10 % -12 % -8 % Évolution du prix pour les collectivités de moins de 10 000 habitants eau et assainissement confondus 4% -4 % -3 % -3 % Évolution du prix pour les collectivités de plus de 10 000 habitants eau et assainissement confondus -16,5 % -14 % -17 % -12 % Nombre moyen de candidatures/offres reçues par la procédure Indisponible 3,6/2,4 3,5/2,1 3,8/2,2 90 % 82 % 85 % 86 % Gain des délégataires indépendants des trois groupes en nombre de contrats Pourcentage de collectivités conseillées par un organisme public * d’autres informations (taux de reconduction, durée…) sont calculées à partir d’un échantillon plus large. ** prix moyen délégataire : total des recettes perçues divisées par le total des volumes vendus, c’est à dire que cette moyenne est pondérée par les volumes. Dossier 49 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 Compétition, régulation Le développement de la concurrence dans ce secteur (comme dans d’autres réseaux) pose plusieurs questions d’économie. L’implicite est que la limitation du pouvoir des firmes serait obtenue par plus de compétition. Et inversement, un taux élevé de renouvellement de contrat au délégataire sortant est interprété comme l’indicateur d’une complaisance publique, ou d’une capture par les firmes. L’horizon intellectuel est celui des marchés publics et suppose une abondance de l’offre. La loi MURCEF du 11 décembre 2001 a apporté des précisions pour mieux détacher la gestion déléguée des marchés publics (critère de la rémunération substantiellement liée aux résultats de l’exploitation), mais de nombreuses incertitudes demeurent. Qu’en est-il sur ces points ? Que ce soit dans les renouvellements de contrats en France, ou dans les appels d’offres internationaux, le nombre des compétiteurs reste souvent limité, comme on l’a vu, à un ou deux. À cela deux raisons. Premièrement, la compétition a un coût pour la firme. Elle va donc se mobiliser sur les opérations où elle considère avoir une chance raisonnable de l’emporter. Deuxièmement, l’économie des réseaux urbains ne peut être confondue avec celle des travaux publics ; elle a des propriétés spécifiques : coûts élevés (sunk costs), temps long, prestation qui relève du service. De ce fait, le nombre de firmes capables de s’engager dans cette voie ne sont pas nombreuses (à nouveau la comparaison internationale entre secteurs en apporte la preuve). Ce n’est peut être pas un hasard si ces marchés s’organisent par grandes régions du monde sur une structure oligopolistique. Ce qui importe, ce n’est donc pas de créer la compétition au sens strict, mais de créer un équilibre dans la négociation du prix entre la collectivité et la ou les entreprises. Pour ce faire, une condition nécessaire est l’existence d’un point de comparaison indépendant de l’offre remise par l’entreprise pressentie, qu’il s’agisse d’une offre d’un autre compétiteur, d’une comparaison basée sur la compétition statistique (comme celle mise en œuvre par l’Ofwat) ou encore d’une estimation contradictoire des coûts produite par la collectivité (souvent avec l’aide de consultants spécialisés indépendants). Ainsi, le fait de retrouver « les mêmes » lors des mises en compétition ne signifie pas forcément un défaut de compétition. Dans un marché d’oligopole, il suffit d’un seul challenger (crédible) pour obliger le sortant à améliorer son offre. Pour 50 Dossier obtenir des résultats, il n’est pas nécessaire d’organiser toujours et partout une mise en compétition. Une compétition à la marge, fringe competition, comme ce fut le cas en Angleterre dans le cas célèbre de Mercury versus British Telecom, suffit à exercer une menace crédible sur les opérateurs historiques. Le secteur de l’eau, dans les années à venir, sera avant tout marqué par une pression concurrentielle plus forte : d’abord par l’arrivée à échéance de gros contrats (Metz, Rennes, ClermontFerrand) avant 2010, sur lesquels des entreprises internationales encore non implantées en France pourraient proposer des offres (cela s’est fait dans quelques cas, mais les offres n’ont jusqu’à présent pas été retenues), ensuite par l’augmentation de la fréquence des renouvellements due à la diminution de la durée des contrats signés, enfin par la menace plus crédible du retour en régie lors du regroupement de collectivités. Cette même question de la compétition dans une structure oligopolistique se retrouve dans les choix en matière de régulation (46). Le choix spontané conduit à la création d’une agence et au renforcement des contrôles. Quel serait le coût du dispositif et les gains potentiels ? Pour le contrôle, dans la ligne des rapports Barnier-Mazeaud, l’idée est de faire remonter de l’information depuis chaque exploitation, avec une mise en équivalence des recettes et des dépenses à ce niveau là (47). Mais est-ce cohérent avec le choix d’opérateurs organisés en firmes multi-divisionnelles (Chandler) dont la valeur ajoutée est de faire des arbitrages des ressources humaines, technologiques et financières, dans le temps (au long d’un contrat) et dans l’espace (entre plusieurs exploitations). La voie de réforme (Agence et contrôles renforcés) a sa logique. Qu’il nous soit permis en conclusion d’aller au bout de la logique d’un secteur en oligopole, pour esquisser une autre voie de la régulation. On pourrait très bien considérer, afin de tenir compte de la logique multi-divisionnelle des groupes que l’obligation de fournir des informations aux collectivités locales ne s’organise pas sur une base annuelle et communale mais par grande exploitation et sur un cycle de 5/7 ans, selon la durée du contrat. L’Angleterre, ou d’autres contrats internationaux, prévoient ainsi une clause de « revoyure » dont l’avantage est qu’elle permet un examen approfondi, multi-critères de l’exécution de la mission. Une agence nationale est certainement utile. Nos remarques introductives sur le manque d’informations en sont la première justification. Mais, ce principe admis, sur quelles Note de recherche missions positionner ce genre d’institution ? Du contrôle, comme le font déjà des cours régionales des comptes, ou autre chose ? Dans un marché oligopolistique, une compétition statistique, bien organisée, a une efficacité. Cela passe par la mise en place d’indicateurs ; en nombre limité ils permettent d’avoir un suivi du secteur ; s’ils sont bien calibrés ils peuvent se comparer à ceux d’autres pays européens (48). À partir de là les acteurs peuvent se concentrer sur les points critiques. Organiser une compétition statistique ne signifie pas accumuler des formulaires.Cette architecture serait, de plus, cohérente avec le « modèle » français dans lequel une grande partie de la régulation s’organise déjà localement autour du contrat et des échanges triangulaires du maire, de la firme et de l’usager (49). Ceci étant, dans cette approche qui laisse une liberté à la firme, on ne peut pas exclure des comportements opportunistes. L’équilibre des forces se boucle par l’existence d’une « arme de dissuasion » aux mains de la puissance publique : l’option d’une rupture anticipée du contrat. Cette approche représente certainement une voie nouvelle des rapports entre puissance publique et firme. Dans laquelle la première prend acte de la structure d’une offre et se concentre sur le pilotage de tout l’ensemble. Lætitia Guérin-Schneider (Laboratoire GEA de l’ENGREF) Dominique Lorrain (CNRS/EHESS) NOTES (1) En 1984, le rapport Hervio, sur « le cycle urbain de l’eau », Ministère de l’Équipement, STU, constatait que si la recherche technique existe, il n’en est pas de même pour les sciences sociales : « on se trouve là devant un vide pratiquement complet », p. 3. Mais plutôt que de développer des programmes qui auraient permis d’avoir une vision macro-économique et globale de ces questions, très rapidement l’ambition de connaissance se tournera vers des thèmes plus techniques et pour la partie socio-économique, le rapport recommandera « des études de cas judicieusement choisis », p. 27. (2) P. Roussel, M. Blanc, « Évaluation du système statistique public pour la gestion des services publics locaux », Inspection générale de l’INSEE, Paris, octobre 2002. (3) On remarquera que le secteur des transports urbains, où les opérateurs privés sont depuis très longtemps majoritaires, est en mesure de produire une vision d’ensemble. Dès 1975, la direction des Transports Terrestres a commencé par produire des « fiches » par réseaux. Mais interviennent deux différences majeures par rapport à « notre » secteur. Premièrement, les nombres diffèrent. Lorsque la DTT et le GART (Groupement des autorités responsables des transports) rassemblent des données sur 200 réseaux, il en faudrait plusieurs milliers dans le secteur de l’eau et de l’assainissement. Deuxièmement, dans le secteur des transports, le pôle public est plus en mesure de se faire entendre en raison de son apport financier ce qui se traduit par des contrats de type régie intéressée - gérance. (4) Jacques Attali, « L’argent de poche », Le Monde, 17 janvier 1980, cité par Monique Dagnaud, « Enfants, consommation et publicité télévisée », notes et études documentaires n° 5166, Paris, la documentation française, 2003, p. 18. (5) F. Morin (dir.), « La banque et les groupes industriels à l’heure des nationalisations », Paris, Calmann-Levy, 1977. (6) Depuis cette date, le budget de l’eau et de l’assainissement est devenu un budget annexe, indépendant du budget général. (7) Les avis qui se sont exprimés dans le groupe de travail ont été suffisamment différents pour que le rapport débute par un avertissement qui renvoie le lecteur sur les annexes. (8) FNDAE, il est alimenté à l’époque par un prélèvement de 6,5 centimes sur tout mètre cube prélevé et par le Pari Mutuel (PMU). (9) « Les prix les plus élevés relevés sont ainsi essentiellement dus à des réseaux particulièrement longs pour la desserte d’un habitat très dispersé. Ce phénomène est également souvent la cause de hausses brutales des prix lorsqu’un réseau nouveau s’étendant sur plusieurs kilomètres, pour relier seulement quelques abonnés, doit être supporté financièrement par un petit nombre d’usagers », p. 32. Nous ajouterons qu’un vrai problème est en train de poindre en zones rurales, dans les régions de grande culture (donc affectées par les nitrates et les pesticides). Le prix, cette fois, n’est plus autour de 20 F/m3, mais peut être de 50 F/m3. Si on croise cela avec la carte des revenus (salaires, IRPP, ISF) il y a problème. (10) La mise en œuvre de la nomenclature comptable M 49, qui oblige les collectivités (en régie, comme en délégation) à avoir un budget annexe indépendant pour l’eau et l’assainissement et qui rappelle l’obligation de réaliser des amortissements, est venue atténuer cet argument à partir des années quatrevingt-dix. (11) Voir les études sur le prix de l’eau, pour l’Agence LoireBretagne menées par J-R. Barthélémy (Fondation des Villes) et M. Tsanga (Laboratoire GSP, ENGEES-CEMAGREF). (12) « L’eau : gestion des ressources et protection de la qualité », avis et rapports du Conseil Économique et Social, présenté par M. P. Mangin, séance des 12 et 13 mars 1991. Il prolonge un « Rapport d’information sur la gestion de l’eau », G. Malandain, Assemblée nationale, 1990, n° 1460. (13) Dans la suite de ce texte lorsque nous mentionnons le prix de l’eau il s’agit toujours de ce qui est rattaché à la facture d’eau, soit l’ensemble du service (eau, assainissement, agences de bassin, FNDAE, TVA). (14) Source : enquêtes du ministère de l’environnement (service de l’eau, sondage auprès de 1 000 communes), juillet Dossier 51 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 1989, années 1986, 1987, 1989. (15) Mission d’évaluation et de contrôle, M. Y. Tavernier, « De l’opacité à la transparence : le prix de l’eau », 2001, 53 p. (16) Le rapport produit trois courbes sur la période 19901999, à partir des données de la DGCCRF, de l’INSEE et du SPDE. (17) Les calculs se font sur un standard de 120 m3/an, par ménage, soit 330 litres par jour. (18) L’auteur aurait pu dire 4 fois moins qu’un paquet de cigarettes, ou comparer aux jeux à gratter ou au loto. (19) « Le prix de l’eau. Les tendances dans les pays de l’OCDE », 1999. National Utility Service France, « l’Observatoire international des coûts énergétiques, Étude internationale sur le prix de l’eau (juillet 1999-juillet 2000) », octobre 2000. (20) Il faut s’empresser de dire qu’il n’y a pas ici des chiffres justes et des chiffres faux, mais des manières différentes de présenter la même réalité. En effet, le rapport Tavernier, compare des moyennes départementales qui sont donc lissées alors que les autres sources citées analysent la disparité des prix entre collectivités. (21) Rapport Hervio sur les actions de recherche à mener pour « le cycle urbain de l’eau », juin 1984, rapport au Ministre de l’industrie et de la recherche et au Ministre de l’urbanisme et du logement. (22) Efforts à faire en matière d’assainissement pour respecter la directive communautaire n° 91/271 du 5 mai 1991 et pour améliorer la qualité de l’eau potable (directive n° 98/83). Selon le rapport Tavernier, p. 37, la seule réduction par cinq de la teneur maximale en plomb entraînera des coûts de mise aux normes compris entre 3,05 G€ et 4,57 G€, p. 37. (23) Barraqué B., « Les données économiques à connaître dans le domaine de l’eau », dactylo, LATTS-CNRS, mars 1995. (24) Données transmises par le président de la Lyonnaise des Eaux-France à la Mission (p. 19 du rapport) ce chiffre d’affaires ne comprend par les prestations de services aux collectivités locales, aux industries et les travaux pour compte de tiers. (25) source : enquête IFEN portant sur 1998. (26 Une synthèse de ces inventaires a été faite par JeanMichel Cador, de l’université de Caen Basse-Normandie, en juin 2002, sous le titre « le renouvellement du patrimoine en canalisations d’eau potable en France » (communication personnelle). (27) Cf. par exemple les travaux de l’équipe de Bernard Bremond, au CEMAGREF de Bordeaux. (28) Les provisions pour renouvellement, destinées à couvrir à la fois les écarts d’inflation par rapport à la valeur historique des équipements et les augmentations de coût de renouvellement liées aux évolutions des exigences n’est possible que dans la comptabilité privée. La comptabilité publique, et c’est une de ses limites actuellement, doit utiliser d’autres mécanismes indirects pour constituer des réserves. (29) Association des Maires de France, « Guide de l’affermage du service de la distribution d’eau potable », Paris, juin 2001. Voir aussi, SPDE, journée d’information sur « le renouvellement des installations », 4 décembre 1997. (30) L’entrée en vigueur de nouveaux contrats a souvent été l’occasion d’affiner ces concepts de comptes de renouvelle- 52 Dossier ment ou de garantie, en explicitant, mieux que par le passé, les mécanismes de gestion et de financement du renouvellement à la charge du délégataire. (31) Pour une vision détaillée de ces mécanismes comptables, on pourra se reporter au « Mémento pratique comptable Francis Lefebvre ». (32) On pourrait même dire que ces années 1975/1977 se caractérisent plutôt par une faible progression du développement privé car ce sont des années d’élections locales, marquées par la victoire de l’Union de la gauche et dans un premier temps les équipes municipales gèlent leurs décisions. (33) D. Lorrain, « France, le changement silencieux », in D. Lorrain et G. Stoker (dir.), La privatisation des services urbains en Europe, Paris, la Découverte, 1995, pp. 113 suiv. (34) Sources pour 1851 et 1900 : Barrère P. et CassouMounat M., « Les villes françaises », Masson Géographie, Paris, 1980, chap. 2, p. 90. Beaujeu-Garnier (dir.), « Images économiques du monde 1966 », Paris, Sedes. Pour les chiffres des recensements de 1936 à 1982 Laborie J-P., Langumier J-F. et P. De Roo, « La politique française d’aménagement du territoire de 1950 à 1985 », Paris, la documentation Française, 1985, p. 23. Pour 1990, Insee Première, n° 81, juin 1990. Pour 1999, Le Monde 10 novembre 1999, p. 18, « La France dans le miroir de l’INSEE ». (35) Source : « 40 ans de politique de l’eau en France », Paris, Economica, 1987. Voir aussi C. Pezon, « la gestion du service de l’eau en France (analyse historique et par la théorie des contrats (1850-1995) », thèse pour le doctorat de gestion, Paris, janvier 1999. (36) En fait les chiffres sont ceux de 1938, 1956, 1970, 1983 ; ils se trouvent décalés par rapport aux dates des recensements de la population. Baguenier et Faisandier, « Les services publics de distribution d’eau potable et d’assainissement », in Loriferne (dir.) « 40 ans de politique de l’eau en France », Paris, Economica, 1987, p. 190. (37) Rapport d’activité, Lyonnaise des eaux, Paris, 1978. (38) Vie Publique, juillet-août 1976. (39) Source : document multigraphié, fondation de l’eau. (40) Rapport Tavernier 2001, p. 19, pour la partie des abonnés desservis en pourcentage. Valeur absolue calculée à partir de la population totale. (41) Un document non publié de chercheurs du LEREPS, D. Baudru et F. Morin, « La rente de l’eau », 1997, établit que les profits se situent entre 5 % et 10,5 % sur la période 1982-2002 ; ce texte est convoqué dans un article du Monde diplomatique au titre quelque peu différent « L’appétit vorace des multinationales », B. Maris, Manière de voir, n° 65, septembre-octobre 2002, p. 74. Les chiffres cités sont congruents avec nos propres travaux qui établissent un ratio profit d’exploitation rapporté au chiffre d’affaires de 7,2 % pour la CGE et la Lyonnaise sur 20 années (avec des variations entre 4,7 % et 11 %). D. Lorrain, « L’oligopole compétitif : la régulation des réseaux techniques urbains ». Réalités industrielles, Annales des Mines, octobre 1994, n° spécial, pp. 85-90. « L’économie paradoxale des réseaux techniques urbains », Note de recherche in C. Henry et E. Quinet (dir.) Concurrence et service public, textes des Conférences Jules Dupuit, Paris, L’Harmattan, 2003, pp. 163-194. (42) Pour la synthèse qui suit, les auteurs tiennent à remercier Frédéric Bonnet et Lise Breuil pour leur contribution. (43) Voir http://www.engref.fr/labogea. Une analyse plus poussée est à paraître : Guérin-Schneider L., Bonnet F. et Breuil L. « Dix ans de loi Sapin dans les services d’eau et d’assainissement: évolutions et perspectives du modèle de délégation à la française » Responsabilité et environnement, Annales des Mines. (44) Rappelons que le prix est composé de multiples éléments (part délégataire, part collectivité, redevances des agences et d’autres organismes publics, TVA). Nous parlons ici de la part délégataire, fixée dans le contrat et qui revient aux entreprises et de la part collectivité, fixée par elle, et qui est facturée par l’entreprise pour être reversée intégralement à la col- lectivité et abonder les recettes de son budget annexe de l’eau. (45) À ce sujet, voir L. Guérin-Schneider et M.Nakhla, « Le service public d’eau délégué : du contrôle local des moyens au suivi de la performance », Politiques et Management Publique volume 18, n° 1, (2000). (46) Voir D. Lorrain, dans le chapitre du livre Henry et Quinet, op. cité 2003, et le débat avec le député D. Baert, Sociétal, n° 30, 4ème trimestre 2000, pp. 67-72. (47) Question qui se pose en particulier dans le cadre des provisions pour renouvellement. (48) Voir L. Guérin-Schneider et M. Nakhla dans ce numéro et les travaux d’un groupe de travail de l’Institut de la Gestion Déléguée sur les indicateurs auquel nous participons au côté de l’AFNOR, de la FNCCR, du SPDE (à paraître). (49) D. Lorrain, in Gestions urbaines de l’eau (dir.), Paris, Économica, 1995, pp. 12 suiv. BIBLIOGRAPHIE Assemblée des Départements de France, Association des Maires de France, Association des Régions de France, Institut de la gestion Déléguée, « Charte des Services Publics Locaux », Paris, janvier 2002. 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Dossier 53 Flux n° 52/53 Avril - Septembre 2003 TEXTES LÉGISLATIFS « Loi 93-3 du 3 janvier 1992, “sur l’eau“ », Journal officiel du 4 janvier 1992, pp. 187-193. « Loi 92-125 du 6 février 1992 », relative à l’administration territoriale de la République. « Loi 93-122 du 29 janvier 1993 », relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin ». « Loi 95-101 du 2 février 1995 », relative au renforcement de la protection de l’environnement, dite « loi Barnier » « Décret 95-365 du 6 mai 1995 », relatif aux rapports annuels sur le prix et la qualité des services de l’eau potable et de l’assainissement, repris dans le code général des collectivités territoriales à l’article L 2224-5. « Loi 95-127 du 8 février 1995 », relative aux marchés publics et délégations de service public, dite « loi Mazeaud ». « Loi 99-586 du 12 juillet 1999 », relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite « loi Chevènement ». « Directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 », établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l’eau, JOCE du 22/12/00. « Loi 2001-1168 du 11 décembre 2001, portant diverses mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier », dite « loi MURCEF ». Code des marchés publics, Les éditions des journaux officiels, Paris, 2002. 54 Dossier