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maquette :
Viviane Vuilleumier
imprimé sur les presses de
PETRUZZI - Città di Castello, Italie
scènes
magazine
Vidy-TKM: le derby peut commencer
Aux oubliettes l'histoire d'amour entre Vidy et Kléber-Méleau. Leurs
capitaines (René Gonzales† et Philippe Mentha), jadis alliés, sitôt
disparus, les deux formations se distinguent, vont s'affronter.
Première conséquence : il faudra désormais choisir entre l'abonnement Vidy et
l'abonnement TKM.
Deux styles
En se profilant comme le défendeur du texte et du théâtre populaire, Omar
Porras construit un programme aux antipodes de la programmation de
Baudriller à Vidy. Jugée exigeante, abstraite, choquante, voire incompréhensi-
ble pour certains, la ligne artistique du nouveau directeur a secoué les habituels
abonnés – ce qui n'est pas sans mérite. Mais, à force de trop viser le coup d'é-
clat ou la polémique (entendez le 5HMM), Vidy risque de perdre en crédibilité et
ne garder que l'avant-garde intellectuelle, trop petite pour être rentable et sou-
vent infidèle. Ambitieux, le Théâtre au bord de l'eau s'autoproclame “espace
théâtral européen“. Mais, au contraire de celui du Festival d'Avignon, le public
de Vidy n'est pas constitué de vacanciers festoyeurs, suffisamment détendus
pour avaler une performance par soir sur une semaine. Aujourd'hui, Vidy convie
à consommer (autant à la Kantina que dans les salles) et à enchaîner les specta-
cles (jusqu'à pouvoir les cumuler afin d'en voir plusieurs en une soirée). Le
public que Gonzales a réussi à fidéliser était autre. Il s'était forgé une vision du
théâtre, savait écouter puis réfléchir, et était entraîné à la digestion. Après 20
ans, le public de l'ère Gonzales était certes vieillissant, mais cela ne l'empêchait
guère de goûter aux productions les plus novatrices et pointues (Goebbels,
Lupa…).
Deux tactiques
Alors ? Miser sur un rajeunissement du public ? Cela paraît légitime à l'heu-
re où la fréquentation est en baisse (de 85% de fréquentation en 2011 à 77%
aujourd'hui pour Vidy, alors qu'il est arrivé de voir la salle à moitié vide à
Kléber-Méleau). Le problème est que cette clientèle est devenue de plus en plus
consommatrice – et à moindre coût - du Tube, qui accapare toujours plus son
esprit, se préoccupant de moins en moins de théâtre. Il n'y a qu'à voir le peu de
succès que remporte l'initiative Passculture auprès des écoles vaudoises, ainsi
que la politique tarifaire très avantageuse pratiquée par Vidy auprès des jeunes
ces dernières années. Si Vidy vise l'élite, les écoles et les jeunes (jusqu'à pro-
grammer cette saison trois spectacles pour enfants), TKM mise sur le spectateur
de tous les jours, le travailleur lambda, le IH?:H@C86HF, pour qui le théâtre n'est
ni épreuve ni performance, mais poésie et artisanat. TKM risque donc bien de
récupérer les anciens de Vidy laissés sur la touche.
Alors, développer les alliances ? Vidy a grappillé l'audience de l'Arsenic
pour lui voler sa place de scène d'avant-garde (si l'Arsenic et Vidy renouvellent
leur programme commun en 2016, Sandrine Kuster a déjà annoncé son départ
pour 2017), est en train de phagocyter le Festival la Bâtie (un partenariat initié
par l'Arsenic) et a ratissé large avant l'arrivée de Porras au TKM en multipliant
ses collaborations tous azimuts (Art Brut, Cinémathèque, Manufacture, UNIL,
Sévelin 36, Musée de l'Elysée…), quitte à bouleverser le paysage théâtral