101-NE2-LG Microbiologie et biotechnologies - ESP Culture cellulaire et virologie Doc 2. Les Chroniques DBT – No 1 MOT DE L’ÉDITEUR : Bienvenue en culture cellulaire à Lionel-Groulx. Les « Chroniques DBT » serviront à vous informer et à vous donner des précisions sur des éléments du labo de culture cellulaire que vous êtes en train de réaliser. Pourquoi “DBT”? Hum… LA BANQUE DE LIONEL Voici un aperçu des cellules faisant partie de la banque de Lionel 1. Elles ont toutes été fournies gracieusement par le Dr Pierre Talbot, chercheur et directeur de la division Santé Humaine à l’IAF (Institut Armand Frappier, Laval). Le Dr Pierre Talbot effectue des recherches sur la sclérose en plaques et il n’est donc pas surprenant que nos cellules soient toutes d’origine cérébrale. Quant aux secrets entourant leur culture, ils nous ont été livrés par Francine Lambert, technicienne à l’IAF. # 1 2 3 4 5 6 7 Lignée DBT U-373 MG MO3.13 SK-N-SH B-104 CHME-5 N-11 Type cellulaire Astrocytes murins Astrocytes humains Oligodendrocytes humains Neurones humains (non-disponibles actuellement) Neurones de rat Microglies humaines Microglies murines Origine Institut Neurologique de Mtl American Type Culture Collection Institut Neurologique de Mtl American Type Culture Collection Institut Armand Frappier Université de Paris, Labo neurovirologie Université Louis-Pasteur de Strasbourg, Immunologie 8 MHV A59 Virus de l’Hépatite Murine Institut Armand Frappier Note : toutes les cellules sont des cellules adhérentes. 1. Lignée DBT - Des astrocytes murins (= souris) : les “stars” du cerveau En plus des neurones, le cerveau contient plusieurs types de cellules “gliales”. Ces cellules ne peuvent transporter l’influx nerveux mais elles sont essentielles au fonctionnement normal des neurones; ce sont des cellules de soutien qui entourent, protègent et alimentent les neurones. Les cellules gliales les plus abondantes sont les astrocytes qui constituent près de la moitié du tissu nerveux! Ils sont de forme étoilée, possédant de nombreux prolongements dont les extrémités s’attachent aux capillaires sanguins et aux neurones, participant aux échanges entre ces deux compartiments. Ils contribuent à former la 1 NDLR : Pour plus de détails sur l’origine des lignées, on peut consulter le document «Origine et groupe de risque de nos lignées» sur http://mapage.clg.qc.ca/pierremasse Département de biologie Page 1 sur 4 Collège Lionel-Groulx 101-NE2-LG Microbiologie et biotechnologies - ESP barrière hémato-encéphalique, i.e. un filtre entre le sang et les neurones. Ils effectuent le recyclage des neurotransmetteurs et régissent le milieu chimique qui entoure les neurones, par exemple en tamponnant les ions K+. Des travaux récents tendent à démontrer qu’ils jouent un rôle important au niveau des synapses entre les neurones. Nos astrocytes sont issus d’une lignée cellulaire de “fabrication maison” qui s’appelle DBT (pour « Delayed Brain Tumor »). Ces cellules sont extraites de tumeurs astrocytaires qui apparaissent avec un certain délai, après avoir été provoquées chez des souris (de la lignée génétique CDF1) avec le rétrovirus du sarcome de Rous, par une équipe de recherche de l’Institut Neurologique de Mtl. 2. Lignée U373MG - Des astrocytes humains. Nos astrocytes humains ont été commandés par le Dr Talbot à l’ATCC (American Type Culture Collection) dont le catalogue « Human Tumor Bank » fournit quelques précisions telles : o Patient d’origine : homme de 61 ans, caucasien, type A+ o Lignée mise en culture à l’Université d’Uppsala en Suède en 1969. o Don à l’ATCC en 1973, après 156 passages. 3. Lignée MO3.13 - Des oligodendrocytes humains Les oligodendrocytes sont un autre type de cellules gliales qui ont de longs prolongements et qui ressemblent beaucoup aux astrocytes. Le rôle de leurs prolongements est d’aller s’enrouler autour des axones neuronaux du système nerveux central (cerveau et moelle épinière) pour former des manchons isolants appelé “gaine de myéline” (voir Campbell, pp. 984-985). Cette gaine sert à isoler les axones les uns des autres et à augmenter la vitesse de l’influx nerveux. C’est elle qui est attaquée dans la sclérose en Gaines de myéline plaques; les neurones impliqués ne peuvent plus transmettre d’influx normalement. Nos oligodendrocytes proviennent de l’Institut Neurologique de Montréal. La lignée est constituée d’hybridomes humain-humain : des oligodendrocytes primaires adultes fusionnés à des cellules tumorales musculaires squelettiques. 4. Lignée SK-N-SH - Des neurones humains (non-disponibles actuellement) Nos neurones humains ont été commandés à l’ATCC. Ils appartiennent à la lignée “SK-N-SH” : o Patient d’origine : fillette de 4 ans, type A+ o Lignée isolée en 1971 après 14 passages o Les 1ères cellules furent extraites d’une tumeur métastasique au niveau de la moelle osseuse s’étant propagée à partir d’un neuroblastome cérébral. 5. Lignée B104 - Des neurones de rat. Nos neurones de rat sont de la lignée “B-104”. Cette lignée origine de neuroblastomes induits en période prénatale par injection d’un agent chimique mutagène, le NEU (nitroso-éthyl-urée). Département de biologie Page 2 sur 4 Collège Lionel-Groulx 101-NE2-LG Microbiologie et biotechnologies - ESP 6. Lignée CHME-5 - Des microglies humaines Les microglies constituent le système immunitaire du cerveau. Ce sont des globules blancs «en résidence» qui assurent la défense contre les microbes. Leur forme est variable : arrondie, étoilée (semblable à un astrocyte) ou très ramifiée. Nos microglies ont été données au Dr Talbot par le Dr L. Atanassov (Université Louis Pasteur de Strasbourg) qui lui-même les avait obtenues du Dr Tardieu, collègue du Dr Luc Montagnier, découvreur du virus du sida (VIH)! Elles ont été développées pour étudier les mécanismes d’action du VIH contre les cellules immunitaires du cerveau. Ce sont des microglies d’origine embryonnaire transformées avec un plasmide porteur d’un gène du virus SV-40, un virus oncogène simien (= de singe). 7. Lignée N11 - Des microglies murines. Nos microglies de souris sont de la lignée “N-11”. Cette lignée de type glioblastome est issue d’une culture primaire de microglies murines transformées au moyen d’un rétrovirus murin recombinant porteur de l’oncogène v-myc du virus aviaire MH2. Ce rétrovirus murin recombinant est appelé VN11 et est lui-même issu d’une recombinaison entre le virus du carcinome aviaire MH2 et un virus de la leucémie murine (souche AKR)! 8. Un virus. Le virus que nous utilisons est le virus MHV, souche A59 (Murine Hepatitis Virus). Comme son nom l’indique, il cause une hépatite chez les souris. De plus, il peut infecter des cellules cérébrales de la souris et causer une maladie «démyélinisante» s’apparentant à la sclérose en plaques. C’est pour cette raison qu’il est utilisé par le Dr Talbot pour effectuer ses recherches à la fois sur un modèle expérimental animal (des souris) et sur un modèle cellulaire in vitro. Caractéristiques. o Le virus MHV est une espèce appartenant au genre Coronavirus («en |-----100 nm-----| forme en couronne») et est utilisé depuis plusieurs années en recherche. o Les Coronavirus sont des virus enveloppés à symétrie hélicoïdale et à ARN monocaténaire positif. Outre le MHV, le genre Coronavirus englobe une grande variété d’espèces qui infectent les oiseaux et Coronavirus beaucoup de mammifères, y compris les humains. Les voies respiratoires, les organes gastro-intestinaux, ainsi que les tissus neurologiques sont leurs cibles les plus fréquentes, mais d'autres organes incluant le foie, le cœur, les reins et les yeux peuvent être également affectés. Des exemples d’autres Coronavirus sont: péritonite féline, gastroentérite bovine; et chez l’humain : rhume, SRAS. En termes de biosécurité, le MHV est classé à un niveau de risque assez bas par le Bureau de Sécurité des Laboratoires de Santé Canada. Il est cependant associé à un groupe de risque de niveau 2, en raison de sa pathogénicité pour les souris, mais non pour l’humain2. Ce virus n’est pas connu pour produire de zoonose (infection transmise à l’humain via un pathogène animal) 3. 2 Masse P., Groupes de risque des lignées cellulaires et du virus utilisés dans les laboratoires de biologie, Collège L.-Groulx, 2012. Santé Canada, Évaluation de la sécurité virologique, tableau 3 : http://www.hc-sc.gc.ca/dhp-mps/prodpharma/applicdemande/guide-ld/ich/qual/q5a-fra.php#TABLEAU_3 3 Département de biologie Page 3 sur 4 Collège Lionel-Groulx 101-NE2-LG Microbiologie et biotechnologies - ESP L’action démyélinisante du virus MHV chez les souris pourrait être due à une action directe suite à une infection des oligodendrocytes 4, ou à une action indirecte suite à une infection des astrocytes qui auraient un rôle de régulation dans le fonctionnement des oligodendrocytes, et donc des processus de myélinisation et de démyélinisation 5. En effet, la spécificité d’action du virus MHV in vitro ne semble pas limitée aux seuls oligodendrocytes, mais elle pourrait s’étendre à plusieurs types de cellules cérébrales murines. Cependant son action semble très spécifique à l’espèce, le MHV n’affectant que les cellules murines. La sclérose en plaques chez l’humain est une maladie auto-immune, i.e. provoquée par un dysfonctionnement du système immunitaire. D’autre part, on sait que plusieurs virus, dont des virus «inoffensifs» du rhume de type Coronavirus, finissent par se retrouver dans le cerveau. Voici une des hypothèses du Dr Talbot pour expliquer la sclérose en plaques chez l’humain: les cellules immunitaires détruiraient les gaines de myéline des oligodendrocytes par erreur en confondant une protéine qui s’y trouve avec une des protéines d’un coronavirus. Ce type de virus, tout comme d’autres genres viraux identifiés comme des facteurs favorisant l’apparition de la maladie, constituerait dans ce cas une cause très indirecte de la sclérose en plaques. DBT 4 5 Bergman C.C. et al, Coronavirus infection of the central nervous system, Nature Reviews, Vol. 4, fév. 2006. Sun N. et al., Spread of a neurotropic coronavirus, Journal of virology, Vol. 69, Fév. 1995. Département de biologie Page 4 sur 4 Collège Lionel-Groulx