Contribution à la qualité des pratiques en Education

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UNIVERSITÉ DE LIÈGE
FACULTÉ DE MÉDECINE
Contribution à la qualité des pratiques
en Education Thérapeutique du Patient
Vers une attitude éducative
dans la prise en charge de l’obésité
Benoît PÉTRÉ
Dissertation présentée
en vue de l’obtention du grade de
Docteur en Sciences de la Santé publique
2016
« Chaque patient porte en lui-même son
propre médecin. Nous donnons le meilleur de
nous-mêmes lorsque nous permettons au
médecin qui réside dans chaque malade de se
mettre au travail »
Albert Schweitzer
Remerciements
A l'issue de la rédaction de ce travail, je suis convaincu que la thèse est loin d'être la récompense d’un
seul individu. En effet, je n'aurais jamais pu réaliser ce travail doctoral sans le soutien d'un grand
nombre de personnes dont la générosité, la bonne humeur et l'intérêt manifestés à l'égard de ma
recherche m'ont permis de progresser dans cette phase délicate de « l'apprenti-chercheur».
En premier lieu, je souhaite remercier mes deux directeurs de thèse, les Professeurs Michèle Guillaume
et Rémi Gagnayre. La première pour sa confiance, l’opportunité qu’elle m’a offerte de mener ce travail,
pour les échanges soutenus et toutes les réponses patientes à l’ensemble de mes questions. Elle m'a
guidé dans mon travail et m'a aidé à trouver des solutions pour avancer. Le second pour m’avoir
accepté et accueilli chaleureusement au sein du « Temple » de l’Education thérapeutique, le
Laboratoire Educations et Pratiques de Santé (le LEPS), ce qui m’a permis de confronter mes travaux à
un ensemble de pairs mais aussi de profiter des conseils et de la supervision d’une figure de proue de
l’ETP. A tous deux, je dois l’apprentissage de la patience, de la rigueur et la recherche du dépassement
de soi.
Je remercie l’ensemble des membres de mon comité de thèse qui m’ont fait progresser dans mes
travaux par leurs réflexions, leur soutien et leurs commentaires. Je souhaiterais remercier en
particulier le Professeur Dieudonné Leclercq, qui a toujours été très encourageant, soutenant,
stimulant, avec une réactivité extraordinaire. Je remercie également le Professeur André Scheen pour
avoir toujours porté un regard bienveillant sur mes travaux et le Professeur Olivier Ziegler pour son
enthousiasme et son intérêt à l’égard de mes propositions.
i
Remerciements
ii
Mes remerciements vont également aux membres du jury qui ont accepté la lourde tâche de se
pencher sur le travail final obtenu.
J'exprime toute ma gratitude à tous mes amis – collègues – chercheurs ou logisticiens, de Liège ou de
Paris, qui par des échanges, des constructions communes, des commentaires, des questions, ont
participé de près ou de loin à la conception et à l’enrichissement du travail final. Une pause-café peut
parfois être plus productive que le reste de la journée.
Merci aux statisticiens, informaticiens, logisticiens, … sans qui le travail, le vrai, n’aurait pu être opéré.
Je pense ici au Professeur Anne-Françoise Donneau, à Nadia Dardenne et Eddy Husson. Merci à Nicolas
Gillain et Vanessa Simons pour le travail final apporté à la thèse et sa mise en valeur. Merci au
Professeur Albert pour avoir joué le rôle de relecteur du document final et pour ses conseils de sagesse
et d’expérience tout au long du processus. Je remercie aussi mes autres collègues qui ont accepté de
m’alléger de certaines activités. Merci à Sylvie Streel, Céline Crutze, Axelle Hoge et Sophie Degrange
pour leur solidarité. Merci également à Vanessa Strauven pour toute la préparation et la mise en
oeuvre des démarches logistiques qui ont encadré la recherche.
Ces remerciements seraient incomplets si j’oubliais ma famille et les amis qui, avec cette question
récurrente, « quand est-ce que tu la soutiens cette thèse ? », bien qu’angoissante en périodes
fréquentes de doutes, m’ont permis de ne jamais dévier de mon objectif final en étant des ressources
et en permettant des moments d’extraction pour mieux y revenir .
Une pensée tout particulière va pour ma maman qui, à de multiples reprises, m’a interrogé sur le
contenu « exact » de ma thèse. J’espère qu’elle trouvera dans ce manuscrit satisfaction à ses
questions. Merci à mes parents de m’avoir toujours soutenu dans mes choix et d’avoir toujours cru en
moi. Je leur dois beaucoup et les remercie pour ce que je suis et ce que je fais. Merci à Anne-Cécile et
Manon qui m’ont permis de prendre la juste distance au moment où il le fallait, qui ont toujours été là
dans les moments d’hésitation, merci à elles de m’avoir donné le courage d’avancer un peu plus, tous
les jours, vers la finalisation du travail de recherche. Merci aussi à mes amis proches pour qui la thèse
est et restera peut-être toujours un obscur travail, mais qui pourtant ont toujours manifesté un intérêt
certain pour ce travail.
Merci à toutes les personnes qui ont participé aux différentes enquêtes et études. C’est d’abord grâce
à vous que ce travail a pu être mené. Merci à elles d’avoir accepté de partager un morceau de leur
histoire de vie. J’espère les avoir comprises et avoir pu, à travers l’analyse, contribuer, modestement
à les aider dans leur mission compliquée pour accompagner ou vivre avec la maladie obésité. C’est
aussi à vous que je dédie ce travail.
iii
Remerciements
Merci à tous les étudiants que j’ai croisés et qui, par leur curiosité, leur questionnement, parfois
dérangeant mais pertinent, ont participé indirectement à clarifier mes propos.
Je remercie également les Fonds Européens et les autorités wallonnes qui ont financé le programme
de recherche duquel sont issus les premiers résultats de cette thèse.
Finalement, merci à tous ceux qui liront cette thèse et qui en retiendront l’une ou l’autre réflexion. La
rédaction de la thèse n’étant pas une fin en soi, c’est bien sûr son utilisation qui peut être
déterminante, même si modeste, dans la recherche d’une meilleure préparation des professionnels de
santé pour affronter la maladie obésité.
Résumé
Introduction
Par sa prévalence et ses conséquences socio-sanitaires, l’excès de poids représente un défi de santé
publique sans précédent. Le manque de solutions durables pour favoriser la perte de poids oblige à
revoir les stratégies de prise en charge des individus en les orientant vers la recherche d’une meilleure
santé et qualité de vie. Cette thèse s’est intéressée particulièrement à l’Education Thérapeutique du
Patient (ETP) comme force de proposition face à cette problématique. L’ETP poursuit cette idée forte
qu’éduquer le patient, soit lui permettre de développer des compétences d’autosoins et d’adaptation
à la maladie, contribue à améliorer sa santé et qualité de vie. La réflexion s’est inscrite dans une
recherche de meilleure intégration d’une ETP de qualité dans les pratiques de soins des professionnels
de santé, impliqués dans la prise en charge de l’obésité. Dans cette perspective, deux questions de
recherche ont guidé l’ensemble du travail mené :
(1) Quelle est l’intégration actuelle et souhaitée de l’ETP dans les pratiques professionnelles et
la relation de soins dans le domaine de l’obésité qui réponde aux besoins et attentes des
différents acteurs (y compris les patients et leur entourage) de la prise en charge?
(2) Quelles sont les conditions d’une formation qui favorisent l’intégration de l’ETP dans les
pratiques des professionnels de santé prenant en charge les patients obèses?
v
vi
Résumé
Matériel et méthodes
Trois phases exploratoires ont permis de mener les investigations relatives aux deux questions de
recherche définies. Ce travail s’est intéressé à la triade « patient, soignant et entourage » dans le cadre
du problème de l’obésité en Wallonie, partie francophone de la Belgique, caractérisée par une absence
de cadre légal et de reconnaissance de l’ETP comme acte de soins. Une approche à dominance
qualitative, suivant les prescrits de méthodologie et de rigueur scientifique propres à cette approche,
a été opérée.
Résultats/discussion
Faute de connaissances du terrain, la première étape exploratoire a visé à approcher les pratiques en
matière d’ETP ainsi que les besoins et attentes des différents acteurs impliqués dans la prise en charge
des patients obèses. L’analyse des résultats, basée sur la perception des acteurs, rend compte d’une
situation relativement éloignée des guides de bonnes pratiques tels que dictés par l’Organisation
mondiale de la santé ou la Haute Autorité de Santé française. L’approche des patients obèses demeure
prescriptive et orientée vers l’atteinte d’objectifs biomédicaux, laissant peu de place à l’expression des
besoins plus psychosociaux des individus concernés. L’interrogation de ces derniers témoigne parfois
d’une insatisfaction par rapport à la prise en charge et d’une préoccupation majeure pour leur qualité
de vie. Le périmètre de discussion, implicitement construit entre les acteurs de prise en charge, se
trouve restreint à une pathologie instrumentalisée, rendant difficile, voire hypothétique, une
rencontre authentique entre les personnes. L’entourage est souvent confronté à l’incapacité de
prendre une place active dans le processus. Cette première phase a également permis de pointer des
opportunités à soutenir pour améliorer la situation, à savoir le souhait et la volonté de différents
soignants de s’ouvrir aux dimensions plus psychosociales et de qualité de vie de l’individu. L’analyse
des données recueillies auprès des individus obèses soutient cette proposition par l’identification de
variables modératrices de la relation entre l’indice de masse corporelle et la qualité de vie, relevant du
domaine psychosocial (à savoir la distorsion de l’image corporelle et l’importance accordée au regard
des autres). Ces paramètres pourraient ainsi constituer de nouveaux objectifs de la relation éducative.
Toutefois, faute de capacités à accueillir et gérer ces éléments psychosociaux, les professionnels de
santé se retrouvent vite limités dans leurs possibilités d’action.
La deuxième phase exploratoire s’est dès lors orientée vers la formation des professionnels de santé
en ETP à travers l’identification plus précise de leurs besoins de formation et la proposition d’un
référentiel de co-compétences en ETP. L’analyse des besoins de formation tels que déclarés par les
professionnels de santé, lorsqu’ils sont comparés à des référentiels existants comme celui de l’Institut
Résumé
vii
National de Prévention et d’Education pour la Santé (France), rend compte d’un décalage entre la
demande et les compétences nécessaires pour mettre en œuvre l’ETP. S’ils demandent à avoir de
meilleures compétences dans le domaine relationnel, par contre, l’approche pédagogique,
l’organisation des soins et la prise en compte de l’environnement du patient sont délaissées. Cela pose
problème pour le développement d’une approche éducative répondant aux recommandations de
bonnes pratiques. Une manière d’aider les professionnels à mieux percevoir les compétences
nécessaires consisterait à mieux identifier à quoi servent ces compétences, à savoir le développement
des compétences des patients eux-mêmes dans la gestion de leur maladie. Dans ce cadre, un
référentiel de co-compétences patients-soignants en ETP a été défini, mettant en évidence que les
compétences en ETP développées chez les soignants sont au service du développement des
compétences des patients, les dernières devenant la finalité des premières.
Enfin, la troisième phase exploratoire a été consacrée à l’aspect attitudinal des compétences
éducatives dans l’ETP, dénommé attitude éducative. Tant les résultats des deux étapes exploratoires
que la revue de la littérature scientifique rendent compte de la nécessité de travailler de manière
approfondie les représentations et les dispositions mentales des sujets, relatives à leur rôle, leur
identité, et les objectifs de la relation de soins. Ces constats font de ce concept d’attitude éducative
un des fondamentaux pour le développement d’une pratique d’ETP de qualité. En effet, si cette
attitude éducative (parfois appelée posture éducative) fait couler beaucoup d’encre quant à son
intérêt, elle manque de clarification précise quant à son contenu. Le travail de caractérisation de cette
attitude éducative a permis de mettre en évidence sept dimensions sur lesquelles une formation en
ETP peut prendre appui, de manière à ce que les professionnels développent une attitude éducative
propice à la mise en œuvre d’actions éducatives dans le soin (par exemple, la relation au temps et la
reconnaissance de l’ETP comme acte thérapeutique, la reconnaissance des bénéfices pour le soignant
de la pratique d’ETP ou encore la reconnaissance de véritables compétences pour mettre en œuvre
l’ETP).
Conclusions
Ce travail de recherche a permis de démontrer que l’ETP offre une réponse de choix en agissant comme
un levier de changement de la situation observée en matière de prise en charge des patients obèses.
L’ETP permet de retrouver une capacité d’action et de rencontre entre les individus. En ciblant la
recherche d’une meilleure santé et qualité de vie à travers les apprentissages des patients, elle favorise
également un changement dans l’approche de soins. Si le manque de stimulation liée à l’absence de
cadre et de formation en ETP était connu en Wallonie, cette analyse en profondeur montre l’intérêt
de développer, structurer et formaliser ces pratiques d’ETP dans l’organisation du système de santé.
viii
Résumé
La formation s’avère nécessaire au vu des compétences qu’exige l’exercice d’une pratique d’ETP de
qualité. L’accès à la formation doit être favorisé à travers la sensibilisation des professionnels à ce type
d’approche et à la plus-value que l’ETP peut leur apporter dans leur pratique professionnelle en termes
de mesures tant préventives que curatives. Dans le contenu des formations, le soutien au
développement d’une attitude éducative, telle que définie dans le présent travail, est considéré
comme une pierre angulaire des dispositifs pédagogiques au vu du caractère transversal, indépendant
des autres conditions de l’exercice de l’ETP, et de la valeur ajoutée qu’elle constitue au service de la
santé et qualité de vie du soignant et du patient.
Summary
Introduction
Due to its prevalence and social and health impacts, overweight represents an unprecedented public
health challenge. The lack of a sustainable weight loss solution requires that we revise our
management strategies for individuals, focusing them on the pursuit of better health and quality of
life. This thesis looks specifically at therapeutic patient education (TPE) as a positive force in dealing
with this issue. TPE is based on the idea that educating patients – that is, enabling them to develop
self-care and adaptation-to-disease skills – helps improve their health and quality of life. What is at
issue is how to better incorporate quality TPE into the practices of healthcare professionals involved
in obesity management. With that in mind, two research questions guided all of the work:
(1) How is TPE currently incorporated into professional practices and how would we like it to
be incorporated, and what type of care relationship meets the needs and expectations of the
various stakeholders in obesity management (including patients and their families)?
(2) Which training conditions facilitate incorporation of TPE into the practices of healthcare
professionals treating obese patients?
Material and methods
The examination of these two research questions involved three exploratory phases. The study looked
at the patient/family/caregiver triad in the context of the obesity problem in Wallonia, a Frenchspeaking part of Belgium, where there is no legal framework for or recognition of TPE as a healthcare
ix
x
Summary
act. It used a primarily qualitative approach following the prescribed methodology and scientific rigor
specific to this approach.
Results/discussion
To gain field knowledge, the first exploratory step was aimed at learning about TPE practices and the
needs and expectations of the various actors involved in obese patient care. The analysis of the results,
based on the actors’ perceptions, showed a situation that is relatively far from best practice guidelines
like those issued by the World Health Organization and France’s Haute Autorité de Santé. The approach
to obese patients is still prescriptive and focused on achieving biomedical objectives, leaving little room
for the expression of more psychosocial needs by the individuals concerned. When questioned, those
individuals sometimes expressed dissatisfaction with their care and serious concern about their quality
of life. The scope of discussion, implicitly defined by those providing care, is limited to an
instrumentalized pathology, rendering authentic encounters between people difficult, even
hypothetical. Families often find it impossible to play an active role in the process. The first phase also
helped identify opportunities that should be supported in order to improve the situation – that is,
caregivers’ desire and determination to be open to the more psychosocial and quality-of-life aspects.
An analysis of the data from obese individuals supports this proposition by identifying psychosocial
factors that modulate the relationship between body mass index and quality of life (that is, body image
distortion and the importance accorded to how one is seen by others). Those parameters might also
become new objectives of the educational relationship. Unable to make room for and manage such
psychosocial factors, however, healthcare professionals quickly find themselves limited in what they
can do.
The second exploratory phase focused on TPE training for healthcare professionals by more precisely
identifying their training needs and proposing a reference standard for co-competencies in TPE. When
compared to existing reference standards such as those from the Institut National de Prévention et
d’Education pour la Santé (France), the analysis of training needs as reported by healthcare
professionals shows that there is a gap between what they ask for and the competencies actually
needed for implementing TPE. Though they ask for better relational skills, the educational approach,
organization of care and consideration of the patient’s environment are neglected. This is a problem
when attempting to develop an educational approach that meets best practice recommendations. One
way to help professionals acquire the competencies they need would be to better identify the purpose
of those competencies, which is to improve the competencies of the patients themselves in managing
their disease. In that context, we defined a reference standard for patient-caregiver co-competencies
Summary
xi
in TPE, emphasizing that TPE competencies developed by caregivers serve to improve patient
competencies, the latter being the purpose of the former.
The third exploratory phase was devoted to the attitudinal aspect of educational competencies in TPE,
which we called "educative attitude.” The results from the first two exploratory phases, together with
the literature review, demonstrated the need for an in-depth investigation of the subjects’
representations and mental states regarding their role, their identity and the objectives of the care
relationship. Those findings show that the concept of educative attitude is fundamental to the
development of quality TPE practices. And though much ink has been spilled over the value of
educative attitude, there is little clarification of exactly what it consists of. The effort to characterize
educative attitude enabled us to identify seven dimensions upon which TPE training can be based, so
that professionals develop an educative attitude conducive to implementation of educational actions
in the care setting (for example, the relationship with time and the recognition of TPE as a therapeutic
act, the recognition that TPE practice offers benefits to the caregiver, and the recognition that real
competencies are required for implementing TPE).
Conclusion
This research showed that TPE offers an excellent solution, by acting as a lever for changing the
situation observed in the management of obese patients. TPE helps restore the capacity for action
and engagement between individuals. By targeting the pursuit of better health and quality of life
through patient learning, it also facilitates change in the approach to care. While the lack of stimulus
due to the absence of any TPE framework or training was well-known in Wallonia, this in-depth analysis
shows the value of developing, structuring and formalizing these TPE practices in the healthcare
system. Training is necessary, given the competencies required for quality TPE practice. Access to
training should be facilitated by making professionals more aware of this kind of approach and of the
added value that TPE can bring to their professional practice in terms of both prevention and
treatment. In the training itself, support for the development of educative attitude, as defined in the
present work, is considered a cornerstone of the educational program, given its transversality,
independent of the other conditions of TPE practice, and the added value it represents for the health
and quality of life of both caregivers and patients.
Table des matières
Remerciements ............................................................................................................................. i
Résumé
.............................................................................................................................. v
Summary
..............................................................................................................................ix
Table des matières ..................................................................................................................... xiii
Liste des abréviations ................................................................................................................ xvii
Préambule
............................................................................................................................ xix
Chapitre 1.
L’obésité comme problème de santé publique ........................................................ 1
1.1.
Introduction ............................................................................................................................. 1
1.2.
Définition de l’obésité ............................................................................................................. 1
1.3.
L’obésité comme problème de santé publique ....................................................................... 2
1.3.1.
Une pandémie ................................................................................................................. 2
1.3.2.
Les complications de l’obésité......................................................................................... 4
1.3.3.
Complexité de la prise en charge .................................................................................... 8
xiii
xiv
Table des matières
1.3.4.
1.4.
Attitudes des professionnels de santé et des patients par rapport à l’obésité ............ 13
Conclusion ............................................................................................................................. 14
Chapitre 2.
Education thérapeutique du patient et obésité ..................................................... 15
2.1.
Introduction ........................................................................................................................... 15
2.2.
Origine de l’ETP ..................................................................................................................... 15
2.3.
Définition de l’ETP et du soignant éducateur........................................................................ 16
2.4.
Efficacité de l’ETP .................................................................................................................. 19
2.5.
Critères de qualité de l’ETP ................................................................................................... 20
2.6.
Développement de l’ETP ....................................................................................................... 24
2.7.
Spécificités de l’ETP dans le domaine de l’obésité ................................................................ 28
2.8.
Efficacité de l’ETP dans le domaine de l’obésité ................................................................... 32
2.9.
Des soignants formés ............................................................................................................ 32
2.10.
Conclusion ......................................................................................................................... 33
Chapitre 3.
De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative ............... 35
3.1.
Introduction ........................................................................................................................... 35
3.2.
Formation en ETP : un état des lieux réflexif ........................................................................ 35
3.2.1.
Des recommandations................................................................................................... 36
3.2.2.
Mise en œuvre............................................................................................................... 39
3.3.
Attitude éducative – un acquis particulier ............................................................................ 41
3.4.
Conclusion ............................................................................................................................. 45
Chapitre 4.
Matériel et méthodes ........................................................................................... 47
4.1.
Introduction ........................................................................................................................... 47
4.2.
Finalité ................................................................................................................................... 47
4.3.
Population d’étude ................................................................................................................ 47
4.4.
Design général ....................................................................................................................... 48
4.5.
Méthodologie : une approche majoritairement qualitative ................................................. 52
Table des matières
xv
4.6.
Validité des données ............................................................................................................. 53
4.7.
Aspects éthiques et réglementaires ...................................................................................... 54
4.8.
Conclusion ............................................................................................................................. 55
Chapitre 5.
Principaux résultats .............................................................................................. 57
Chapitre 6.
Discussion générale .............................................................................................. 65
6.1.
Introduction ........................................................................................................................... 65
6.2.
Discussion .............................................................................................................................. 66
6.2.1.
Une rencontre impossible ? .......................................................................................... 66
6.2.2.
Vers d’autres objectifs et indicateurs de la prise en charge ?....................................... 68
6.2.3.
Vers la formation des professionnels de santé ............................................................. 70
6.2.4.
Le développement des compétences comme objectifs de formation .......................... 71
6.2.5.
Une formation pour quelles compétences ? ................................................................. 71
6.2.6.
Faire connaitre de nouveaux besoins en ETP ................................................................ 72
6.2.7.
L’attitude éducative comme ressource fondamentale des compétences en ETP ........ 73
6.3.
Limitations ............................................................................................................................. 76
6.4.
Implications pratiques ........................................................................................................... 78
6.5.
Perspectives de recherche .................................................................................................... 79
Chapitre 7.
Conclusion ........................................................................................................... 81
Chapitre 8.
Bibliographie ........................................................................................................ 85
xvi
Table des matières
PARTIE 2 : COMPILATION DES ARTICLES
Article 1 : Pétré B, Degrange S, Tittaferante S, Legrand C, Vanmeerbeek M, Froidcoeur X,
Err
Guillaume, M. Etat des lieux des pratiques en éducation thérapeutique dans les
eur
institutions hospitalières et chez les médecins généralistes – exemple dans la prise
!
en charge du diabète et de l’obésité en Belgique. Santé publique. (sous presse).
Sig
net
no
n
déf
ini.
Article 2 : Pétré B, Donneau AF, Crutze C, Husson E, Scheen A, Guillaume M. Obese subjects
Err
involvement in a population-based survey: the use of information and
eur
communication technologies (ICT) to avoid stigmatization. Qual Life Res.
!
2015;24:1131-5.
Sig
net
no
n
déf
ini.
Article 3 : Crutze C, Pétré B, Streel S, Dardenne N, Donneau AF, Albert A, Scheen A, Husson E
Err
et Guillaume M. Etude populationnelle de la compréhension des difficultés dans la
eur
prise en charge de l’obésité par l’exploration des perceptions relatives à l’excès de
!
poids. Revue d'Epidémiologie et de Santé Publique. (soumis).
Sig
net
no
n
déf
ini.
Article 4 : Pétré B, Scheen A, Ziegler O, Donneau AF, Dardenne N, Husson E, Albert A,
Err
Guillaume M. Body image discrepancy and subjective norm as moderators of the
eur
relation between BMI and quality of life. Journal of Patient Preference and
!
Adherence. (soumis).
Sig
Table des matières
xvii
net
no
n
déf
ini.
Article 5 : Degrange S, Legrand C, Pétré B, Scheen A, Guillaume M. Représentations
Err
individuelles et attribuées de la prise en charge de l’obésité au sein de la triade
eur
patient/soignant/famille. Médecine des Maladies Métaboliques. 2015; 9:559-565.
!
Sig
net
no
n
déf
ini.
Article 6 : Pétré B, Ketterer F, Vanmeerbeek M, Scheen A, Lair ML, Ziegler O, Böhme P et
Err
Guillaume M. Etude transfrontalière des besoins de formation en Education
eur
Thérapeutique du Patient souffrant de diabète et/ou d’obésité pour le personnel
!
médical et paramédical : enquête par méthode du groupe nominal. Presse Médicale.
Sig
(sous presse).
net
no
n
déf
ini.
Article 7 : Pétré B, Guillaume M, Legrand C, Scheen A, Lair ML, Ziegler O and Leclercq D. Un
Err
synoptique des co-compétences patients-soignants en éducation thérapeutique.
eur
Educ Ther Patient/Ther Patient Educ. 2014;6:10202.
!
Sig
net
no
n
déf
ini.
xviii
Table des matières
Article 8 : Pétré B, Gagnayre R, De Andrade V, Ziegler O, Guillaume M. Educative attitude in
therapeutic patient education : an exploratory approach! PLOS One. (soumis).
Err
eur
!
Sig
net
no
n
déf
ini.
Liste des abréviations
ACP
Approche Centrée sur la Personne
DM
Disease Management
EDUDORA²
EDUcation thérapeutique et préventive face au Diabète et à l’Obésité à Risque chez
l’Adulte et l’Adolescent
ETP
Education Thérapeutique du Patient
FEDER
Fonds Européens de Développement Economique et Régional
HAS
Haute Autorité de Santé
IMC
Indice de Masse Corporelle
INPES
Institut National de Prévention et d’Education pour la santé
NICE
National Institute for health and Care Excellence
OMS
Organisation Mondiale de la Santé
OS
Objectif Spécifique
QR
Question de Recherche
xix
Préambule
Différents changements ont affecté simultanément les soins de santé en Europe les 50 dernières
années, le plus marqué étant l’évolution du profil sanitaire des populations. Les maladies chroniques
sont actuellement considérées comme la principale cause mondiale de mortalité et de morbidité,
incitant à leur meilleure gestion par les autorités de santé publique. L’expansion de ces maladies
chroniques s’accompagne de différents changements touchant la relation de soins : le patient dispose
d’un accès simplifié et en masse aux informations sanitaires ; le modèle médical a évolué d’une vision
biomédicale vers une vision holistique du patient ; les questions éthiques et déontologiques sont au
cœur des réflexions de l’action sanitaire (réflexions portant notamment sur le patient informé et la
reconnaissance de l’autonomie et de liberté de choix du patient). Vu le profil de ces pathologies, de
leurs conséquences à long terme sur la vie des individus, des attentes et besoins qu’elles engendrent,
il est nécessaire de reconsidérer la prise en charge sanitaire vers des objectifs non plus limités à la
santé physique mais ouverts à la qualité de vie des individus. L'obésité, maladie sociétale par
excellence, illustre particulièrement ces propos par l'échec de l'approche biomédicale classique qui la
caractérise. Par sa prévalence et ses conséquences sanitaires et socioéconomiques, l'obésité constitue
une préoccupation prioritaire et un défi de santé publique sans précédent. La recherche sur la prise en
charge de l’obésité devrait viser la recherche de solutions durables vers un poids acceptable pour la
santé, incluant le « vivre au mieux » avec cette maladie chronique.
L’éducation thérapeutique du patient (ETP) constitue une voie d’approche intéressante dans la prise
en charge de l’obésité. Elle soutient l’idée forte selon laquelle éduquer un patient, c’est-à-dire favoriser
le développement de ses compétences vis-à-vis de la gestion de sa maladie, lui permet d’améliorer sa
xxi
xxii
Préambule
santé et sa qualité de vie. Des premières études suggèrent une certaine preuve d’efficacité des
interventions en ETP. Aussi, l’ETP paraît constituer une force de proposition novatrice et porteuse mais
qui nécessite de revoir la politique, la gestion et l’organisation des soins de santé, ainsi que les
pratiques des professionnels de santé. L’application sur le terrain reste complexe et limitée, et
demande de questionner les meilleures conditions de développement et de mise en œuvre d’une ETP
de qualité.
La réalisation de la recherche doctorale s’est incrite dans le cadre du programme EDUDORA²
(EDUcation thérapeutique et préventive face au Diabète et à l’Obésité à Risque chez l’Adulte et
l’Adolescent), financé par les Fonds Européens de Développement Economique Régional (FEDER) et
des autorités locales (Région wallonne). Ce programme regroupait 3 régions d’études : la Lorraine
française, le Grand-Duché de Luxembourg et la partie francophone de la Belgique. Ces 3 régions sont
caractérisées par un développement de l’ETP à géométrie variable. Si la France dispose d’un cadre
législatif et d’une reconnaissance officielle, s’appuyant sur des recommandations de bonnes pratiques,
des pays voisins tels que la Belgique et le Luxembourg sont caractérisés par une absence de cadre légal,
laissant libre place aux initiatives propres des acteurs impliqués. Dans le cadre de cette thèse, seules
les données collectées au niveau wallon ont été exploitées dans le but de neutraliser, dans la
comparaison des résultats, les biais possibles liés aux différences dans l’organisation des soins de santé
propre à chaque région.
Le travail doctoral se structure en trois grandes phases exploratoires répondant à deux questions de
recherche. Le design général est schématisé à la figure ci-contre.
L’ETP constituant un champ peu connu et étudié en Belgique, la première phase exploratoire a été
consacrée à une compréhension du terrain pour mieux appréhender le ressenti, le vécu et l’expérience
des acteurs clés du terrain. La question de recherche était :
« Quelle est l’intégration actuelle et souhaitée de l’ETP dans les pratiques
professionnelles/la relation de soins dans le domaine de l’obésité qui réponde aux besoins
et attentes des différents acteurs (y compris les patients) de la prise en charge ?»
Cette question de recherche s’est opérationnalisée en 3 objectifs spécifiques (OS) qui visaient,
respectivement l’exploration de la perception des pratiques éducatives des professionnels de santé en
matière de prise en charge des patients obèses (OS1), l’exploration des représentations, valeurs,
besoins et attentes de la population générale vis-à-vis du poids (OS2), et l’analyse de la perception de
Préambule
xxiii
Design général de la recherche doctorale
la dynamique relationnelle dans la triade « patient, soignant et entourage » en matière de
communication autour de la prise en charge de l’obésité (OS3). Cette première phase exploratoire a
permis de faire émerger une série de besoins afin de faire progresser les pratiques des professionnels
de santé et spécifiquement le besoin de formation de ces professionnels en matière d’ETP. Cela a
amené à poser la seconde question de recherche :
« Quelles sont les conditions d’une formation qui favorisent l’intégration de l’ETP dans les
pratiques des professionnels de santé prenant en charge les patients obèses? »
Cette question de recherche a été déclinée en deux objectifs spécifiques : l’identification des besoins
de formation en ETP exprimés par les professionnels de santé impliqués dans la prise en charge des
patients obèses (OS4), et la définition d’un référentiel de co-compétences patients/soignants en ETP
(OS5).
Sur base des réponses aux deux questions de recherche, un élément majeur a été mis en évidence :
l’attitude éducative. La revue de la littérature rapportant peu d’informations structurantes sur ce
xxiv
Préambule
concept, il est apparu comme fondamental, vu son positionnement central dans nos résultats, d’en
tenter une approche de caractérisation (OS6).
In fine, les enseignements tirés des trois phases exploratoires du travail de recherche aboutissent à
l’élaboration de recommandations pour le développement des pratiques en ETP des professionnels de
santé et plus spécifiquement des recommandations pour la formation des soignants prenant en charge
des patients obèses, et plus largement des patients chroniques. Ces recommandations ont pour
avantage d’être ancrées dans un processus d’attention approfondie du terrain sur lequel ont été
menées les recherches dans le cadre de cette thèse.
Cette thèse à « compilation d’articles » se structure en deux parties.
La première partie présente l’assise théorique et la synthèse de résultats. Le Chapitre 1 propose une
définition de l’obésité, présentée en tant que problème de santé publique, à travers la définition du
profil épidémiologique de la maladie (ampleur du problème, complications et déterminants) et la
complexité/difficulté de prise en charge. Ensuite, le Chapitre 2 présente le concept d’éducation
thérapeutique du patient (ETP) et le situe comme levier de changement dans la prise en charge des
maladies chroniques, et plus spécifiquement dans le domaine de l’obésité. Enfin, cette assise théorique
se termine dans le Chapitre 3 par l’état des connaissances relatives aux formations en ETP, leurs
contenus, leurs objectifs et leurs évaluations. Un focus particulier est apporté à la notion de l’attitude
éducative. Ensuite, le Chapitre 4 relatif au matériel et aux méthodes pose les questions de recherche
de la thèse, en définit ses objectifs spécifiques, la population étudiée, le schéma général et sa
contribution dans le champ d’investigation concerné. Les lignes directrices méthodologiques qui ont
guidé le travail de recherche sont également présentées. Les résultats sont ensuite présentés dans le
Chapitre 5 à l’aide de 6 fiches synthétiques reprenant les éléments clés des différentes études menées.
Pour chaque fiche, les éléments de méthode et les résultats principaux sont décrits et résumés. Enfin,
dans le Chapitre 6, l’ensemble des résultats sont discutés de manière intégrative mettant en évidence
la contribution de cette thèse vis-à-vis de l’ETP et plus particulièrement dans l’ingénierie des
formations en ETP. Les spécificités des résultats sont discutées dans le domaine de l’obésité et plus
largement des maladies chroniques. Les limites, implications pratiques et perspectives en termes de
santé publique sont présentées.
La seconde partie renvoie à la compilation des huit articles portant sur les résultats obtenus.
PARTIE 1
Assise théorique
et
synthèse des résultats
CHAPITRE 1
Chapitre 1.
1.1.
L’obésité comme problème de santé publique
Introduction
La prise en charge de l’obésité est complexe sans offrir de solution durable, facile et évidente. Le
présent chapitre vise à préciser l’ampleur du problème en termes de santé publique. Pour y arriver,
une définition de l’obésité sera proposée. L’obésité en tant que problème de santé publique sera alors
expliquée à travers la présentation du profil épidémiologique de la maladie (ampleur du problème,
complications et déterminants) et la complexité/difficulté de prise en charge.
1.2.
Définition de l’obésité
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS, 2000) définit l’obésité comme « une maladie caractérisée
par un excès de masse grasse qui affecte négativement la santé d’un individu ».
La masse grasse peut être définie comme l’abondance des tissus adipeux dans lesquels l’énergie est
contenue sous forme de cellules graisseuses (Bjorntorp, 2002). Cet excès de masse graisseuse et sa
répartition dans le corps vont être déterminants de l’ampleur des problèmes de santé.
L’excès de masse grasse représente un danger pour le bien-être physique, psychique et social des
individus affectés.
L’indice de masse corporelle (IMC) ou « body mass index (BMI) » en anglais est reconnu
internationalement pour définir l’excès de poids chez l’adulte. Il est défini comme le rapport entre le
poids (exprimé en kilogrammes) et le carré de la taille (exprimée en mètres) (World Health
1
2
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
Organization, 2000). L’IMC permet une classification graduelle du problème étudié en 6 classes
(Tableau 1.1) qui se distinguent en fonction du risque de morbidité/mortalité s’y référant.
Tableau 1.1. Catégorisation de l’Indice de Masse Corporelle (World Health Organization, 2000)
Category
BMI, kg/m²
Underweight
< 18.5
Healthy weight
18.5-24.9
Pre-obese state
25.0-29.9
Obesity grade I
30.0-34.9
Obesity grade II
35.0-39.9
Obesity grade III
≥ 40
L’utilisation de l’IMC offre l’avantage d’utiliser des informations simples à fournir (le poids et la taille
pour son calcul). Il est considéré comme indicateur de l’obésité dans la majorité des études
épidémiologiques sur le sujet. Plusieurs études ont montré que l’IMC représente une mesure
satisfaisante de l’adiposité étant donné la simplicité et l’accessibilité de sa mesure, son caractère nonintrusif et sa sécurité (Gallagher et al., 1996; World Health Organization, 2000; Garrow et Webster,
1985; Deurenberg, Weststrate et Seidell 1991). L’utilisation de l’IMC est utile dans les études de
populations et continue à jouer un rôle majeur en termes de santé publique (facilité de comparaisons
intra et inter groupes, identification de groupes à risque, définition des priorités de santé).
Chez l’enfant et l’adolescent, ce sont les valeurs percentiles de cet IMC, ajustées pour l’âge et le sexe,
qui ont été établies et reconnues (Cole et al., 2000).
L’IMC fait cependant l’objet de diverses critiques pour une utilisation au niveau individuel. L’approche
clinique demande, pour estimer le risque du sujet, l’intégration d’autres caractéristiques, telles que la
localisation de la masse grasse, les comorbidités associées, le niveau de qualité de vie (Gallagher et al.,
1996; Sharma et Kushner, 2009; Padwal et al., 2011b).
1.3.
L’obésité comme problème de santé publique
1.3.1. Une pandémie
Dès 1998, l’OMS indiquait que l’obésité serait la première épidémie non infectieuse du XXIe siècle.
Quinze ans plus tard, cette prédiction est devenue réalité. Contrairement à d’autres facteurs de risque
tels que le tabac ou la malnutrition infantile, l’obésité est loin de décroitre, aucune baisse n’ayant été
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
3
observée depuis 33 ans (Ng et al., 2014). Sa progression rapide et généralisée (l’obésité touche
aujourd’hui toutes les régions du monde) permet de parler aujourd’hui d’une réelle pandémie
(Swinburn et al., 2011).
La mesure de la prévalence de l’obésité et de son suivi peut être biaisée par l’absence de
standardisation de mesures effectuées. Ainsi, les informations auto-déclarées peuvent conduire
jusqu’à une sous-estimation de 50% de la prévalence réelle de surcharge pondérale (Branca et al.,
2007). C’est une des raisons pour lesquelles l’OMS parle d’un problème sous-estimé. Toutefois, la
plupart des études actuelles prennent en considération dans leurs analyses les biais d’auto-déclaration
et ajustent les résultats en fonction de ces biais potentiels (Ng et al., 2014).
La récente publication dans le Lancet de Ng et collègues (2014) dresse un tableau complet des données
disponibles dans le monde. La prévalence de l’excès de poids a considérablement augmenté les trois
dernières décennies même si la rapidité de la progression tend à diminuer au cours des 10 dernières
années. Ainsi, d’un nombre estimé à 857 millions de personnes en excès de poids en 1980, on passe à
2,1 milliards en 2013. Les pires projections atteignent 3,3 milliards de personnes en excès de poids
pour 2030 (Kelly et al., 2008). De 1980 à 2013, on a constaté une hausse de 27,5% du nombre de
personnes en excès de poids chez les adultes et de 47,1% chez les enfants. Ainsi, en 2013, 36,9%
d’hommes seraient en excès de poids contre 38% de femmes. Chez les enfants, les chiffres se situent
légèrement en dessous du quart de la population (23,8% chez les garçons contre 22,6% chez les filles).
Des variations sont observées entre pays et entre sexes. Ainsi, on observe par exemple que plus de
50% des femmes au Koweït, en Libye ou encore au Qatar sont obèses alors qu’il s’agit de moins de 5%
des femmes en Inde. La prévalence d’excès de poids est plus élevée dans les pays dits développés,
même si les derniers chiffres témoignent d’un accroissement plus rapide dans les pays en
développement (Popkin, Adair et Ng, 2012). De manière globale, on observe une prévalence d’obésité
plus élevée chez les femmes.
Par ailleurs, les dernières tendances montrent que l’augmentation d’obésité extrême est plus sévère
que les autres formes d’obésité. Autrement dit, la proportion d’individus obèses augmente et la
proportion d’obésité sévère augmente encore plus (Sturm et Hattori 2013).
Les chiffres pour la Belgique sont résumés dans le Tableau 1.2. Ainsi, 58% des hommes et 47,1% des
femmes sont en surpoids ou obèses. Chez les enfants, les chiffres atteignent 20,5% chez les garçons et
18,8% chez les filles.
4
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
Tableau 1.2. Prévalence du surpoids et de l’obésité en Belgique (Ng et al., 2014)
Age
<20
≥20
Hommes
Surpoids
Obésité
15,9%
4,6%
37,9%
20,1%
Femmes
Surpoids
Obésité
14,6%
4,2%
25,4%
21,7%
Une récente étude menée sur un échantillon représentatif de la population liégeoise adulte en termes
d’âge et de sexe, sur base de données mesurées, montre des chiffres un peu plus faibles avec
respectivement 43,5% des hommes et 23,6% des femmes en surpoids. 18,3% de la population ciblée
était obèse (19,2 % d’hommes contre 17,4% des femmes) (Streel et al., 2015). Les chiffres de ces deux
études (Ng et al., 2014 ; Streel et al., 2015) situent la Belgique au-dessus de la moyenne mondiale mais
dans la tendance européenne.
1.3.2. Les complications de l’obésité
L’obésité exerce des effets importants sur la morbidité, la mortalité et l’économie des populations.
a. Mortalité
L’obésité raccourcit l’espérance de vie. L’étude de Framingham réalisée aux Etats-Unis démontre que
l’obésité réduit l’espérance de vie de 6 à 7 ans pour une obésité développée à l’âge de 40 ans (Peeters
et al., 2003). C’est la première fois que l’on observe depuis des centaines d’années (outre des crises
inattendues) une espérance de vie qui tend à diminuer (Department of Health, 2004; Olshansky et al.,
2005) dans des pays dits développés. On estime en Europe qu’un décès sur 13 peut être attribué à
l’excès de poids (Banegas et al., 2003). Plus d’un million de décès sont attribuables en 2000 à l’excès
de poids et à ses complications (James WP et al., 2004). La relation entre l’IMC et la mortalité est
curvilinéaire : la mortalité est plus élevée chez les adultes ayant un IMC inférieur à 18,5 et chez ceux
avec un IMC supérieur à 35 (Flegal et al., 2005). Il faut dédramatiser le surpoids et l’obésité mineure.
Le risque provient plus à ce stade de prévenir l’entrée dans des stades supérieurs de surpoids et
obésité car le risque de devenir obèse quand on présente un IMC compris entre 25 et 29,9 est plus
élevé (World Health Organization, 2000; James, 2008).
b. Morbidité
Les dépôts ectopiques de lipides entrainent une lipotoxicité, responsable de perturbations
métaboliques et cardiovasculaires, conduisant à une association entre l’obésité et le tableau des
complications médicales (Zhu et al., 2002; Dulloo et al., 2010).
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
5
L’obésité constitue ainsi un facteur de risque pour le développement de nombreuses maladies
chroniques dont les mécanismes de relation sont plus ou moins bien connus. Contrairement à la
mortalité, plus la classe d’IMC augmente (excepté pour la classe <18,5), plus le risque de développer
ou d’avoir des comorbidités existe (World Health Organization, 2012). L’obésité affecte tous les
systèmes humains, favorisant ainsi d’autres pathologies comme le diabète, des problèmes
respiratoires et cardiaques, des difficultés articulaires, mais aussi la cataracte, des cancers et des
troubles gynécologiques (Malnick et Knobler, 2006; Arterburn, DeLaet et Schauer, 2008; Segula, 2014)
(Figure 1.1).
Figure 1.1. Les complications médicales de l’obésité (source : www.obesityonline.org)
Au-delà de l’aspect biomédical, les dimensions sociale et psychologique de la santé sont également
directement ou indirectement affectées. Pour certains auteurs, les conséquences psychosociales
causeraient plus de souffrance aux obèses que les complications d’ordre physique.
L’obésité est ainsi associée à un risque de dépression (Geier et al., 2007; Petry et al., 2008; Luppino et
al., 2010), d’anxiété (Anderson et al., 2007; Petry et al., 2008), de mauvaise estime de soi (McClure et
al., 2010), d’insatisfaction par rapport à son image corporelle (Neumark-Sztainer et al., 2002), de
troubles alimentaires (Neumark-Sztainer et al., 2002; Haines et al., 2006), de toxicomanie (Barry,
Clarke et Petry, 2009; Farhat, Iannotti et Simons-Morton, 2010), de discrimination sociale et de
6
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
stigmatisation (Puhl et Latner, 2007; Puhl et Heuer, 2010), de discrimination et de souffrance au travail
(Puhl et Brownell, 2001) ou à l’école (Bethell et al., 2010), d’absentéisme (Trogdon et al., 2008) et de
perturbations professionnelles, familiales et sociales (Rodbard et al., 2009).
Il est remarquable de constater que les adolescents obèses tendent à conserver certains stigmates de
ces complications psychosociales à l’âge adulte (mauvaise estime de soi, troubles de l’image
corporelle, moins d’années d’études, vie sociale réduite), et ce même si leur poids est revenu dans la
normalité (Gortmaker et al., 1993; Sargent et Blanchflower, 1994; Must et Strauss, 1999).
Lim et ses collègues (2012) estiment par ailleurs que l’excès de poids est responsable de la perte de
4% d’années de vie en bonne santé (DALYs). Jia et Lubetkin (2010) estiment quant à eux que les effets
du surpoids et l’obésité sont plus délétères aujourd’hui que ceux du tabac en termes d’années de vie
ajustées sur la qualité (QALYs).
c. Obésité et qualité de vie
L’excès de poids affecte l’ensemble des composantes de santé des individus. Considérant cette
morbidité globale, la qualité de vie de ces individus s’en trouve affectée (Tessier et al., 2012). Les
personnes obèses expérimentent de nombreux troubles dans leur vie quotidienne liés à leur obésité,
les empêchant de mener une vie aussi pleine, active et épanouissante que ce qu’elles désirent
(Kolotkin, Meter et Williams, 2001; Furber et McGowan, 2011; Lewis et al., 2011). La qualité de vie est
un concept large et multidimensionnel qui inclut l’évaluation subjective des aspects positifs et négatifs
de la vie. Cette évaluation subjective porte sur différents domaines de vie: santé perçue, état
psychologique, niveau d’indépendance, relations sociales, croyances personnelles, relations avec
l’environnement (The World Health Organization Quality of Life Assessment, 1998).
L’intérêt de l’étude de la qualité de vie s’est intensifié au cours des dernières décennies (Kolotkin,
Meter et Williams, 2001). Taylor et collègues (2013) posent que c’est la capacité de la maladie obésité
d’affecter autant de domaines de la vie des individus qui augmente davantage l’intérêt multiple pour
lutter contre cette problématique de santé. Le terme de “Weight-related quality of life (WRQL)” a
émergé, manifestant le poids de l’obésité sur la capacité des individus à mener une vie épanouissante
(Bullinger et al., 1993). Alors que traditionnellement les résultats en médecine et soins de santé étaient
déterminés par l’évaluation d’objectifs biomédicaux, il est devenu évident que les perspectives des
patients devenaient un nouveau point d’intérêt (Fontaine et Barofsky, 2001). La qualité de vie est
maintenant de plus en plus utilisée comme indicateur pour l’évaluation de l’efficacité d’une
intervention thérapeutique.
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
7
La recherche d’une meilleure qualité de vie devient d’ailleurs un aspect privilégié des prises en charge.
Fontaine et Barofsky (2001) proposent de déplacer le focus de la prise en charge des patients obèses
du « curing » vers le « monitoring and preventing », incluant la recherche d’une meilleure qualité de
vie du patient. En effet, au vu des difficultés à perdre du poids de manière durable pour les individus
(Curioni et Lourenço, 2005; Wing et Phelan, 2005), et de l’expérience de vie négative des individus en
lien avec leur obésité (Furber et McGowan, 2011; Lewis et al., 2011), il est intéressant de bien
comprendre le lien entre obésité et qualité de vie, dans le but de mieux intervenir et promouvoir la
qualité de vie des individus obèses (Taylor et al., 2013). L’idée est de viser l’amélioration de la qualité
de vie des sujets sans passer nécessairement par une action sur l’IMC de ces derniers.
Or, les facteurs qui affectent la qualité de vie des individus obèses restent à préciser (Tessier et al.,
2012). Certaines études estiment que l’IMC n’explique qu’un tiers de la variance de la qualité de vie
relative au poids. Des facteurs tels que l’âge, le genre, la race, la douleur, la dépression ou encore la
stigmatisation ne semblent avoir qu’un rôle partiel sur la qualité de vie. D’autres facteurs déterminants
sont à identifier (Kolotkin, Crosby et Williams, 2002; Kolotkin et al., 2004). Par ailleurs, plusieurs études
récentes suggèrent que ce n’est pas parce les individus obèses perdent du poids qu’ils améliorent
proportionnellement leur qualité de vie (Laxy et al., 2014; Döring, de Munter et Rasmussen, 2015).
Une variabilité interindividuelle dans cette relation entre IMC et qualité de vie est également observée
(Cox et al., 2011; Hayward et al., 2014), ce qui suggère qu’il existe des médiateurs de cette relation.
Baron et Kenny (1986) définissent la médiation dans une chaine de relation causale hypothétique dans
laquelle une variable (X) affecte une seconde variable (M) qui à son tour affecte une variable (Y). « A
mediating variable transmits the effect of an independent variable on a dependent variable »
(MacKinnon, Fairchild et Fritz, 2007). Identifier ces variables médiatrices représente un enjeu essentiel
en termes de santé publique car cela pourrait aider au développement d’interventions mieux ciblées
dans le cadre de la prise en charge des individus obèses (Fairchild et MacKinnon, 2009).
Les recherches restent donc ouvertes dans ce domaine. De plus, notons que le lien connu entre la
qualité de vie et l’obésité est réalisé à partir d’individus inscrits dans des activités thérapeutiques,
plutôt qu’en population générale, limitant ainsi la portée des résultats mis en évidence (Kolotkin,
Meter et Williams, 2001; Cox et al., 2011).
8
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
d. Impacts économiques de l’obésité
La mortalité prématurée et les années de vie perdues en bonne santé dues à l’obésité ont un impact
économique important sur les sociétés. Les coûts relatifs à l’excès de poids sont compris entre 0,09 et
0,61% du PIB des pays européens, pouvant atteindre 10 milliards d’euros (Müller-Riemenschneider et
al., 2008). Ces chiffres sont comparables à ceux du Canada et de la Nouvelle-Zélande mais inférieurs à
ceux des Etats-Unis où ils peuvent monter jusqu’à 0,95 (Colditz, 1999) voire 1,34% (Wolf et Colditz,
1998) du PIB selon les sources d’information. Aux Etats-Unis, les chiffres de dépenses représentent
plus de 10 % des soins de santé dus à l’obésité (Wolf et Colditz, 1998) contre 6% dans la Région Europe
(Branca et al., 2007). La différence de coût estimée entre Europe et USA peut s’expliquer par une
prévalence de l’excès de poids moins élevée en Europe. L’ensemble de ces chiffres sont certainement
sous-estimés car ils ne considèrent pas toujours dans le cadre des études le surpoids et la tendance
croissante du développement de l’obésité. Les coûts indirects ne sont pas toujours non plus pris en
considération (Müller-Riemenschneider et al., 2008).
1.3.3. Complexité de la prise en charge
a. Des déterminants multiples
Les causes de l’obésité sont à la fois simples et complexes ; simples puisqu’elles peuvent se résumer à
un mauvais équilibre dans la balance énergétique des individus ; complexes car un ensemble de
facteurs d’ordre biologique, psychologique, social et environnemental interagit sur la régulation de
cette balance énergétique. Chambouleyron et collègues (2012) expriment bien ce raisonnement :
« Dans une vision comptable et presque irréfutable, l’obésité apparait très simplement, comme la
conséquence d’un mauvais équilibre entre entrées et dépenses caloriques. Cependant, les anomalies
pondérales s’inscrivent le plus souvent dans une problématique globale où s’enchevêtrent facteurs
psychologiques et comportementaux dont les troubles du comportement alimentaire, tentatives
d’adaptations aux épreuves de la vie (coping), facteurs familiaux, sociaux et culturels (la nourriture et
l’acte de manger sont profondément ancrés dans toutes les cultures). Le surpoids n’est alors que le
signe le plus visible de ces désordres. C’est l’ensemble de cette problématique qui fait la maladie
obésité ». Ainsi, les causes de l’obésité sont multifactorielles et complexes. La Figure 1.2 inspirée des
travaux de Booth et collègues (2001) et de Davison et Birch (2001) proposent une vue synoptique et
schématique de ces déterminants. Cette figure renseigne sur la diversité des déterminants à prendre
en considération pour comprendre et expliquer l’obésité. Il n’est plus envisageable aujourd’hui de
considérer les seuls facteurs individuels. Ils doivent être considérés de manière intégrée dans un
réseau de facteurs interindividuels et environnementaux (Booth et al., 2001; Swinburn et al., 2004). Il
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
9
s’agit véritablement d’un réseau au vu des multiples connexions possibles entre les différents
déterminants (Government Office for Science et Department of Health, 2012). L’individu doit ainsi être
considéré dans la niche écologique dans laquelle il évolue.
Figure 1.2. Déterminants de l'activité physique et des choix alimentaires (d'après Booth et al.,
2001 ; Davison et Birch, 2001)
Ainsi, si les facteurs génétiques, psychologiques (image de soi, plaisir stress), biologiques (sexe, âge) et
de comportement (activité physique et consommation alimentaire) peuvent avoir un effet direct ou
indirect sur l’obésité, les aspects sociaux (attitudes et modes d’activité des parents, amis, collègues) et
structurels (offre de loisirs, politique de transport et aménagement urbain) de l’environnement proche
(micro) de l’individu vont influencer les comportements de ce dernier. De façon similaire, l’offre
alimentaire, l’impact des médias et de la publicité ou les aspects réglementaires sont des exemples
d’éléments sociétaux, politiques et législatifs qui vont affecter directement nos choix et
comportements de santé. Dès lors, ces différents facteurs plus ou moins proximaux de l’individu,
doivent faire prendre conscience des déterminants individuels et collectifs de l’obésité, ce qui permet
de montrer la part de la responsabilité sociétale de la maladie (James 2008).
10
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
Dans ce contexte, on s’aperçoit que les stratégies de lutte contre l’obésité devraient préconiser une
approche globale du problème. Or, souvent, les politiques de prévention s’appuient sur des discours
moralisateurs et sur un modèle individualiste (Poulain, 2009).
La lecture de la Figure 1.2 permet finalement de mieux comprendre pourquoi certains chercheurs ou
représentants du monde politique parlent d’inégalités sociales de santé en évoquant l’obésité. En
effet, il a été observé depuis des années que l’obésité ne touche pas de la même façon les différentes
catégories socio-économiques, l’obésité étant plus fréquente dans les classes les moins favorisées ; on
parle également de gradient social de l’obésité (Law et al., 2007; Bambra et al., 2013). Ce phénomène
est marqué chez les femmes mais l’évidence est moins consistante chez les hommes avec des résultats
mixtes qui ont été rapportés (Mackenbach et al., 2008). Ce constat est à mettre en regard des
nombreux déterminants qui sont sous l’influence de ce statut socio-économique et qui deviennent
facteurs de risque de l’obésité quand les conditions socio-économiques s’appauvrissent (Loring et
Robertson, 2014). Toutefois, la relation n’est pas aussi simple et le monde scientifique se questionne
pour mieux appréhender dans quelle mesure l’obésité doit être considérée comme conséquence ou
cause des inégalités sociales de santé (Sørensen, 1995). La majorité des études menées de manière
transversale ne permettent aucune conclusion sur le sens de la relation. Toutefois, plusieurs études
prospectives longitudinales suggèrent que les mauvaises conditions socio-économiques prédisent le
gain de poids et le risque d’obésité (Ball, Mishra et Crawford, 2002).
A la lecture de ces déterminants, il est plus aisé de comprendre pourquoi l’histoire de l’obésité est
importante à prendre en considération chez un individu et pourquoi la prise en charge de l’obésité
nécessite une approche globale du patient. Il faut se rappeler que chaque cas d’obésité est unique
selon l’histoire du patient, ses facteurs de risque personnels et que tout acte thérapeutique doit
considérer la personne dans son contexte biomédical et de vie.
b. Des approches thérapeutiques complexes et peu convaincantes
Les mesures de prévention et de prise en charge de l’obésité doivent s’adapter à la réalité complexe
et plurifactorielle des déterminants de l’obésité. L’obésité est plurielle : les formes sévères sont
difficiles à soigner mais les formes modérées, plus nombreuses, ne sont pas incurables (Wing et Phelan,
2005). Les recommandations visent non seulement les protocoles de suivi clinique, au niveau de
l’individu, mais aussi des éléments plus environnementaux, au niveau de la communauté (Centre for
Public Health Excellence at National Institute for Health and Care Excellence (NICE) et National
Collaborating Centre for Primary Care, 2006; Branca et al., 2007). Le traitement vise la perte de poids
mais aussi et surtout la réduction des risques et l’amélioration de la santé. Chez l’adulte, ces objectifs
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
11
peuvent être atteints par une perte de poids modeste : de 5 à 10 % du poids initial (Tsigos et al., 2008).
L’approche thérapeutique de l’enfant et de l’adolescent est particulière étant donné que ce public est
toujours en phase de croissance et de développement. Le maintien du poids pendant 6 à 12 mois peut
ainsi être considéré comme un critère de réussite dans le traitement des enfants obèses (Reilly et
Wilson, 2006).
L’atteinte de ces objectifs passe, selon les recommandations (Centre for Public Health Excellence at
NICE et National Collaborating Centre for Primary Care, 2006; Tsigos et al., 2008), par une combinaison
d’interventions selon la situation personnelle du patient : modification du style de vie (activité
physique, alimentation), traitement comportemental, pharmacothérapie, méthode chirurgicale. Les
recommandations fournissent les informations nécessaires à la prise de décision concernant le
traitement le plus approprié tout en se rappelant que le patient doit rester acteur prioritaire dans les
choix posés (Affaires sociales, santé publique et environnement, 2002), et que l’entourage et le milieu
de vie du patient doivent être pris en considération dans le traitement proposé (Centre for Public
Health Excellence at NICE et National Collaborating Centre for Primary Care, 2006; Spear et al., 2007).
Les études relatives aux différentes solutions thérapeutiques actuelles restent peu convaincantes. Au
niveau de traitements non chirurgicaux, seules les études multicomposantes, c’est-à-dire combinant
des interventions sur différents paramètres du style de vie (activité physique, modification alimentaire,
compléments pharmacologiques, intervention psychologique) montrent une certaine efficacité sur la
perte de poids et les indicateurs de santé (Avenell et al., 2004; Franz et al., 2007; Södlerlund, Fischer
et Johansson, 2009). Toutefois, les bénéfices durables de telles interventions restent modestes, et ce
quelle que soit la stratégie utilisée (Lambert et al., 2006) : la littérature scientifique suggère, de
manière générale, que seulement 20 % de la population obèse parvient à conserver une perte de 10%
de leur poids initial à un an, les chiffres se réduisant davantage lorsqu’on augmente la durée de suivi
(Wing et Phelan, 2005).
La chirurgie bariatrique offre des perspectives nouvelles : perte de poids plus importante et plus
durable par rapport aux autres interventions (Lambert et al., 2006), et amélioration des conditions
fonctionnelles, métaboliques, psychosociales et de la qualité de vie (Padwal et al., 2011a; Neff, Olbers
et le Roux, 2013). Ces effets positifs ne doivent cependant pas cacher les risques réels de
complications, notamment nutritionnelles et métaboliques (Kushner, 2000; Malinowski, 2006) mais
aussi de réhospitalisation et de mortalité (Encinosa et al., 2006; Buchwald et al., 2007). Il est important
que les recherches continuent pour examiner la balance risques-bénéfices à long terme de la chirurgie
bariatrique. Par ailleurs, la chirurgie ne doit pas être considérée comme la seule cause du succès, ni
comme la solution miracle. Il s’agit uniquement d’un tremplin dans une transformation plus globale
12
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
de l’individu dans ses différents domaines de vie, sans quoi l’individu risque de reprendre du poids, et
ce malgré la chirurgie (Magro et al., 2008; Odom et al., 2010). Chez les enfants et adolescents, la
chirurgie n’est pas indiquée car elle soulève des questions éthiques (Lambert et al., 2006; Hofmann,
2013). Utilisée dans des conditions exceptionnelles et encore expérimentales, elle devrait être
réservée à des cas exceptionnels et réalisée par des équipes hautement spécialisées (Lambert et al.,
2006).
Si l’intervention individuelle est nécessaire, elle peut être considérée à risque d’échec si
l’environnement reste « obésogène ». Aussi, les recommandations concernant le management de
l’obésité proposent également des considérations en vue de réduire la nocivité de l’environnement
dans lequel évolue l’individu qui souhaite contrôler son poids. La NICE et l’OMS prônent une stratégie
intersectorielle et concertée entre tous les acteurs ayant potentiellement une influence sur la
prévention ou la gestion de l’obésité : les employeurs, l’enseignement, les loisirs, le monde de
l’industrie, les commerces, les communes (notamment via l’aménagement des territoires),… Une
approche intégrée des soins cliniques et de l’approche environnementale est à préconiser pour
soutenir les efforts individuels.
Bien que de nombreux programmes d’intervention soient développés au niveau d’une communauté
pour prévenir ou gérer le poids, peu d’entre eux font l’objet d’une évaluation rigoureuse, ce qui illustre
la complexité d’évaluer de telles interventions, comparées à celle d’un suivi individuel (World Health
Organization, 2000 ; James, 2008). Les seules études disponibles de prévention et d’intervention en
communauté sont réalisées chez les enfants (Wolfenden et al., 2014). Ces études montrent des
résultats modestes en termes de réduction de gain de poids (Bleich et al., 2013; Wolfenden et al.,
2014). Des recherches complémentaires sont nécessaires pour comprendre et évaluer l’efficacité de
ces interventions.
c. Un manque d’engagement politique dans la prise en charge
Si les instances de santé internationales telles que l’OMS reconnaissent l’obésité comme maladie
chronique (l’OMS a reconnu l’obésité comme maladie chronique depuis 1997), ce n’est pas toujours le
cas des politiques de santé nationales. Ainsi, l’American Medical Association (2013) a récemment
reconnu l’obésité comme maladie à part entière, motivant son choix comme suit : « Recognizing
obesity as a disease will help change the way the medical community tackles this complex issue that
affects approximately one in three Americans ». Jusqu’à aujourd’hui, l’obésité n’est pas reconnue
comme une maladie chronique en Belgique entrainant une prise en charge lacunaire et empêchant la
mise sur pied d’un véritable parcours de soins pour les patients obèses; seule la chirurgie bariatrique
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
13
fait l’objet d’un encadrement légal qui en fixe les diverses prestations et conditions d’accès (arrêtés
royaux (AR) des 3 août 2007 et 13 juin 2010).
1.3.4. Attitudes des professionnels de santé et des patients par rapport à l’obésité
Les difficultés rencontrées pour faire face à ces problèmes de surpoids et d’obésité ne sont pas sans
influence sur les populations atteintes et sur les professionnels de santé qui le gèrent. Si l’obésité ne
semble pas affecter la relation de soins de manière générale (Wadden et al., 2000), la situation est
différente quand l’obésité devient l’objet des soins.
Les soignants perçoivent la prise en charge de l’obésité comme étant difficile avec peu d’espoir de
perte de poids. Ils sont souvent pessimistes vis-à-vis de leur capacité à prendre en charge l’obésité.
Cela peut aller jusqu’à ressentir un sentiment d’impuissance (Evans, 1999; Teixeira, Pais-Ribeiro et
Maia, 2012). Ces perceptions peuvent les conduire à des sentiments ambivalents, voire à des attitudes
négatives envers les patients obèses qui sont alors décrits comme non motivés, paresseux (Foster et
al., 2003; Teixeira, Pais-Ribeiro et Maia, 2012). Toutefois, certains auteurs rapportent que la situation
tend à s’améliorer avec le temps (Budd et al. 2011). Les soignants attribuent ces constats, de manière
générale, à un manque de formation pour faire face aux patients obèses et au manque de traitements
efficaces disponibles (Foster et al., 2003; Epstein et Ogden, 2005). Ces éléments peuvent conduire les
soignants à éviter d’aborder le sujet de l’obésité avec leurs patients (Frank, 1993; Teixeira, Pais-Ribeiro
et Maia, 2012).
Actuellement, peu d’études se sont penchées spécifiquement sur la manière dont les individus obèses
perçoivent, vivent et expérimentent ce problème de poids au quotidien (Lewis et al., 2010). Toutefois,
il est connu que les personnes obèses présentent un fort sentiment de culpabilité, de responsabilité
personnelle et d’auto-stigmatisation. Elles sont également relativement insatisfaites des réponses
offertes par les services de santé (Brown et al., 2006). Les patients qualifient les attitudes de leurs
soignants de « positives mais pas utiles » à « négatives et dédaigneuses » (Edmunds, 2005). D’autres
études se sont focalisées sur les pertes de poids souhaitées des individus, démontrant, fréquemment
le grand fossé entre les recommandations de santé publique et les souhaits des individus (Wadden et
al., 2003; Dalle Grave et al., 2005).
Il serait incorrect de conclure que les données indiquent que les attitudes sont toutes négatives. Les
résultats des études menées sur ce sujet mettent souvent en avant les aspects négatifs des résultats
(Harvey, 1999). De plus, ces études sont généralement réalisées sur un groupe de patients qui se
situent dans une démarche « médicale » pour perdre du poids (par rapport à une approche d’une
14
Chapitre 1. L’obésité comme problème de santé publique
population générale) car ils sont plus facilement accessibles. Quoi qu’il en soit, les difficultés existent
et sont ressenties dans le couple soignant-patient.
1.4.
Conclusion
L’incidence et la prévalence de l’excès de poids constituent un défi sans précédent étant donné les
conséquences socio-sanitaires engendrées par la maladie. Ce problème oblige les autorités de santé
publique à surveiller de manière efficace cette épidémie menaçante pour la santé des populations
(Branca et al., 2007). Cette tâche exige un système de surveillance systémique utilisant les indicateurs
qui permettront de suivre au plus près l’ampleur du problème. Etant donné les risques encourus, il est
temps de reconnaitre l’obésité comme une maladie chronique à part entière (et non simplement un
facteur de risque) et que les professionnels de santé reconnaissent leur responsabilité dans le
traitement de cette maladie (Tsigos et al., 2008).
L’orientation des politiques de santé sera déterminante dans la lutte contre l’obésité et devra intégrer
l’ensemble des déterminants relatifs à la maladie. Dans ce contexte, seule une approche globale du
problème doit être envisagée. Cependant, force est de constater que les solutions thérapeutiques à
l’échelle d’une population concernant la prise en charge de l’obésité sont manquantes. Si certaines
études apportent des résultats encourageants, il reste difficile pour la majorité des individus obèses
de perdre du poids de manière durable, entrainant une certaine insatisfaction et souffrance, tant chez
les patients que chez les soignants. Aussi, en paraphrasant Fontaine et Barofsky (2001), il va bien falloir
admettre que le problème de surpoids et d’obésité doit être monitoré plutôt que traité. Des efforts
devront être effectués, non seulement pour régler la perte de poids, mais aussi pour assurer le meilleur
niveau de qualité de vie aux personnes obèses. Cette proposition appelle des solutions thérapeutiques
novatrices et des recherches associées, reconnaissant l’humain au cœur de la maladie et la recherche
d’une vie meilleure avec la maladie.
CHAPITRE 2
Chapitre 2.
2.1.
Education thérapeutique du patient et
obésité
Introduction
L’obésité appelle à une prise en charge questionnant la santé et la qualité de vie de l’individu. Durant
les dernières années, plusieurs stratégies de soins ont été développées visant le renforcement des
capacités du patient à prendre en charge l’affection dont il est atteint. Ces stratégies se différencient
selon le contenu, les valeurs, les orientations et les techniques qu’elles recouvrent. Le présent chapitre
propose de clarifier le concept d’éducation thérapeutique du patient (ETP) comme levier de
changement dans la prise en charge des maladies chroniques, spécifiquement dans le domaine de
l’obésité, parce que l’ETP est orientée vers la double recherche de santé et qualité de vie. Cette
clarification conceptuelle est nécessaire pour asseoir l’orientation donnée aux travaux de recherche
réalisés dans le cadre de cette thèse.
2.2.
Origine de l’ETP
Aucune analyse historique de l’ETP n’a été réalisée à ce jour (Gagnayre, 2002). Toutefois, d’Ivernois et
Gagnayre (2011), Deccache et Aujoulat (2001) identifient différents changements qui ont affecté
simultanément les soins de santé en Europe durant les 50 dernières années. Ceux-ci appellent à une
remise en question des pratiques professionnelles et la nécessité de les adapter aux nouveaux besoins
et demandes des patients. L’allongement de la durée de vie et de la qualité qui l’accompagne, le
développement des maladies chroniques, l’augmentation du nombre de patients porteurs d’une
affection et la nécessité d’une délégation partielle des missions de soins au patient, l’accès simplifié et
en masse aux informations sanitaires (correctes ou non), la volonté de ne plus subir le soin et de
15
16
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
disposer d’une relative autonomie, sont autant de raisons qui demandent à modifier les pratiques
professionnelles.
Ces évolutions entrainent inexorablement un besoin de changement de positionnement du soignant
qui devrait dès lors s’inscrire dans une relation de soins dans laquelle le patient est considéré comme
un véritable acteur du système de santé. L’objectif de cette relation de soins ne peut rester focalisé
sur l’observance, c’est-à-dire le résultat aléatoire d’une attente médicale liée à la prescription, mais
devrait tendre vers un véritable processus d’appropriation par le patient (Anderson and Funnell 2010).
2.3.
Définition de l’ETP et du soignant éducateur
En 1998, l’OMS publie un rapport d’un groupe de travail européen qui contient la définition suivante
de l’ETP :
« L'éducation thérapeutique du patient a pour but de former les patients à l'autogestion, à l'adaptation
du traitement à leur propre maladie chronique, et à leur permettre de faire face au suivi quotidien...
L'éducation thérapeutique du patient doit être réalisée par des soignants formés à l'éducation du
patient, et doit être conçue pour permettre au patient (ou à un groupe de patients et aux familles) de
gérer le traitement de leur maladie et de prévenir les complications, tout en maintenant ou en
améliorant leur qualité de vie ».
Dans cette définition, la nature de l’ETP est clairement posée et situe l’ETP dans le domaine de la
formation des patients. Il n’est en effet question d’ETP que si l’activité réalisée est une activité
d’apprentissage. L’ETP vise ainsi le développement de compétences, entendues comme un savoir-agir
efficacement en situation complexe (Beckers, Poumay et Leclercq, 2007). L’acquisition d’une
compétence nécessite la mobilisation d’un ensemble de ressources. Tardif et collègues (2006)
définissent la compétence comme « un savoir-agir complexe prenant appui sur la mobilisation et la
combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de
situations ». Le terme « ressource » est préféré à celui de «connaissance » car permet de s’ouvrir à
tout ce qui relève des domaines social, affectif et expérientiel, et pas seulement aux domaines cognitif
et sensori-moteur (les connaissances et savoir-faire). Le terme «ressource » permet ainsi d’intégrer
différents types de composantes. C’est la combinaison de ces ressources vis-à-vis d’une situation
donnée qui permet le passage à l’action, c’est-à-dire une réponse adaptée et judicieuse à une situation.
La Haute Autorité Sanitaire française (HAS, 2007) propose de distinguer les compétences d’autosoins
des compétences d’adaptation. Les compétences d’autosoins renvoient aux savoirs et savoir-faire
nécessaires pour modifier les effets de la maladie sur la santé physique (Tableau 2.1), tandis que les
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
17
compétences d’adaptation sont davantage d’ordre psychosocial, aidant le patient à vivre au mieux de
manière quotidienne avec la maladie (Tableau 2.2). Ces compétences sont complémentaires et
s’inscrivent dans les deux finalités de l’ETP au bénéfice des patients : la santé de l’individu et sa qualité
de vie, l’un ne primant pas sur l’autre (World Health Organization, 1998).
Tableau 2.1. Les compétences d’autosoins selon la HAS (2007)
Les compétences d’autosoins
 Soulager les symptômes.
 Prendre en compte les résultats d’une autosurveillance, d’une automesure.
 Adapter des doses de médicaments, initier un autotraitement.
 Réaliser des gestes techniques et des soins.
 Mettre en oeuvre des modifications à son mode de vie (équilibre diététique,
activité physique, etc.).
 Prévenir des complications évitables.
 Faire face aux problèmes occasionnés par la maladie.
 Impliquer son entourage dans la gestion de la maladie, des traitements et des
répercussions qui en découlent.
Tableau 2.2. Les compétences d’adaptation, selon d’Ivernois et Gagnayre (2011)
Compétences
1- Faire connaître ses besoins, informer
son entourage
2- Comprendre, s’expliquer
3- Repérer, analyser, mesurer
4- Faire face, décider
5- Résoudre un problème de
thérapeutique quotidienne, de
gestion de sa vie et de sa maladie,
résoudre un problème de prévention
6- Pratique, faire
7- Adapter, réajuster
8- Utiliser les ressources du système de
soins, faire valoir ses droits
Objectifs spécifiques ou composantes (exemples)
Exprimer ses besoins, ses valeurs, ses connaissances, ses projets, ses
attentes, ses émotions (diagnostic éducatif)
Comprendre son corps, sa maladie, s’expliquer la physiopathologie, les
répercussions socio-familiales, de la maladie. S’expliquer les principes du
traitement.
Repérer des signes d’alerte, des symptômes précoces, analyser une situation
à risque, des résultats d’examen. Mesurer sa glycémie, sa pression artérielle,
son débit respiratoire de pointe, etc.
Connaître, appliquer la conduite à tenir face à une crise (hypoglycémie,
hyperglycémie, crise d’asthme…).
Décider dans l’urgence.
Ajuster le traitement, adapter les doses d’insuline. Réaliser un équilibre
diététique sur la journée, la semaine. Prévenir les accidents, les crises.
Aménager un environnement, un mode de vie favorable à sa santé (activité
physique, gestion du stress…).
Pratiquer les techniques (injection d’insuline, auto-contrôle glycémique,
« spray », chambre d’inhalation, débitmètre de pointe). Pratiquer les gestes
(autoexamen des oedèmes, prise de pouls, etc.). Pratiquer des gestes
d’urgence.
Adapter sa thérapeutique à un autre contexte de vie (voyage, sport,
grossesse).
Réajuster un traitement ou une diététique.
Intégrer les nouvelles technologies médicales dans la gestion de sa maladie
et de son traitement.
Savoir où et quand consulter, qui appeler : rechercher l’information utile.
Faire valoir des droits (travail, école, assurances…).
Participer à la vie des associations de patients…
L’approfondissement de cette réflexion sur les buts poursuivis par l’ETP demande une mise en
perspective avec les modèles d’apprentissage de référence qui déterminent l’orientation des
pratiques. Selon le modèle dominant, les buts de l’ETP vont s’orienter vers : l’instruction des patients,
18
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
leur acquisition des savoirs en santé ; la compliance ; l’autonormativité ; l’alliance thérapeutique ; le
transfert de compétences du soignant au patient ; la connaissance de soi et l’accompagnement des
choix et décisions des patients ; la construction de sens par rapport aux problèmes de santé, aux
thérapeutiques, aux risques en santé, le partage de significations entre patients et entre patients et
professionnels de la santé ; l’autonomie du patient ; la socialisation (Eymard, 2010). Ces différents buts
doivent être considérés au service de la santé et de la qualité de vie du patient.
Former les patients se situe dans cette idée forte qu’éduquer peut contribuer à mieux soigner. C’est
dans ce contexte que le rôle du professionnel de santé évolue vers une mission de soignant-éducateur,
exigeant la capacité à développer chez son patient des compétences lui permettant de vivre au mieux
avec la maladie (d’Ivernois et Gagnayre, 2011). Le professionnel devient un médiateur ou facilitateur
des apprentissages du patient par le développement de situations d’apprentissage. « Celles-ci sont
liées aux apprentissages développés par le patient tout au long de sa vie, à son rapport à la temporalité
(depuis l’annonce du diagnostic jusqu’à l’appropriation du problème de santé) et à la confrontation
avec l’évolution de sa maladie » (Eymard, 2010). Dans cette perspective, l’ETP ne peut être réduite à
l’instruction, au développement du sujet psychique ou à son formatage culturel et social. Il s’agit d’un
véritable processus de construction par l’individu. Cependant, comme le rapporte Eymard (2010), « les
pratiques se réduisent encore trop souvent à de l’information, de la transmission de savoirs et de savoirfaire ne prenant que partiellement en compte les facteurs sociaux, environnementaux et personnels qui
interagissent dans les problèmes de santé ». Cette vision réductrice de l’ETP peut notamment être
causée par le mot « thérapeutique » qui ne signifie pas que l’éducation cible uniquement le traitement
médical mais qu’elle est réalisée par des soignants formés à l’ETP, comme décrit au Chapitre 3.
De nombreuses autres définitions de l’ETP existent mais sont généralement plus vagues et englobent
d’autres activités de natures différentes. Ainsi, l’ETP se distingue notamment des notions
d’information, d’accompagnement, de coaching et de conseil en santé (counseling). La différence
majeure entre ces stratégies et l’ETP est qu’elles ne mobilisent pas le patient de manière active dans
le développement ou le renforcement de compétences en santé. Ces stratégies sont plutôt entendues
comme des processus bienveillants, externes à l’individu et qui reflètent une sorte de dépendance
alors que la finalité même de l’ETP tend vers une plus grande autonomisation du patient. Ainsi,
information, accompagnement, coaching et counseling ne peuvent se substituer à l’ETP mais, au
contraire, s’inscrivent en complémentarité vers une meilleure santé et qualité de vie du patient.
Bien qu’inscrite historiquement en réponse aux défis inhérents au développement des maladies
chroniques, l’ETP n’est pas réservée exclusivement aux maladies chroniques et peut se révéler
bénéfique dans une prise en charge de courte durée (World Health Organization, 1998).
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
2.4.
19
Efficacité de l’ETP
Les études de type méta-analyse apportent aujourd’hui une série d’informations appuyant la preuve
d’une relative efficacité de l’ETP dans différentes maladies chroniques (Lagger et al., 2010), et ce sur
de nombreux critères d’ordre pédagogique, bioclinique et psychosocial (d’Ivernois, 2004). Dans la
revue systématique menée par Lagger et collègues (2010), les résultats de l’analyse de méta-analyses,
rassemblant plus de 360 études et plus de 61.000 patients, ont montré un effet positif de l’ETP sur la
santé des individus pour 64% d’entre eux. Par contre, 30% de ces études ne montrent aucun effet et
6% rapportent un effet délétère sur les paramètres de santé des individus. Ce dernier chiffre doit
cependant être considéré avec précaution vu le caractère multifactoriel de la santé et l’effet lié à des
activités d’éducation, difficile à isoler dans cet ensemble de déterminants. Une revue de littérature
menée par Albano et ses collègues (2010) identifie une série d’indicateurs des plus variés en matière
d’ETP: souffrance, fatigue, activité physique, statut de santé, dépression, anxiété, sentiment
d’efficacité, connaissances, satisfaction, compliance, motivation, réduction du nombre de visites chez
le médecin, notamment. Toutefois, ces résultats encourageants doivent être traités avec précaution
au vu du manque de description des interventions éducatives et des éléments méthodologiques dans
les publications traitant de l’évaluation de l’ETP (Albano et al., 2014). Les indicateurs économiques
quant à eux sont moins étudiés et appellent à des développements (D’Ivernois, 2008, citant la HAS).
Plusieurs travaux récents (notamment See et al., 2014; McAlpine et al., 2015; Skelton et al., 2015;
Vanhaudenhuyse et al., 2015) tentent de répondre aux différentes critiques/limites des études
réalisées jusqu’aux années 2010 en améliorant les protocoles de recherche et en ciblant davantage les
indicateurs d’évaluation, permettant une lecture plus fine des résultats correspondants. Ces études,
bien qu’appelant à de nouvelles synthèses, renforcent les résultats globalement positifs obtenus dans
les premiers travaux.
20
2.5.
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
Critères de qualité de l’ETP
L’ETP repose sur un certain nombre de principes qui permettent d’assurer le développement de sa
qualité et de conserver sa nature première, c’est-à-dire ciblée sur l’apprentissage du patient. D’Ivernois
(2001) propose les critères repris dans la Figure 2.1.
CRITÈRES DE QUALITÉ
DE L’ÉDUCATION
Centrée sur le patient
et son entourage
Partenariat
soignant/soigné
 Processus d’adaptation à la maladie
 Besoins objectifs et subjectifs
Personnels
formés
Continue
Evaluée
 Processus
 Effets
Structurée
Formalisée
Intégrée aux soins
Multiprofessionnelle
Multidisciplinaire
Figure 2.1. Les critères de qualité de l’ETP selon JF d'Ivernois, Laboratoire Educations et
Pratiques de Santé, 2001.
1er critère - Centrée sur le patient et son entourage.
Carl Rogers, célèbre psychologue américain, a développé cette notion d’approche centrée sur le
patient (ACP). Ce type d’approche suppose de se centrer sur la personne plutôt que sur la maladie.
Pour lui, 3 attitudes fondamentales du soignant sont à trouver dans une ACP (Rogers, 2005):
-
la congruence : le professionnel de santé doit être authentique et ses faits et gestes doivent être
en adéquation avec ce qu’il pense et ce qu’il ressent.
-
la compréhension empathique : il s’agit de se rapprocher au plus près de la réalité vécue par le
patient, d’entrer dans son propre cadre de référence en essayant de ne pas se laisser envahir par
ses propres conceptions et représentations sur le sujet abordé.
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
-
21
l’acceptation positive inconditionnelle : il s’agit d’accepter la personne telle qu’elle est avec les
choix de santé qu’elle réalise. Il ne convient pas de porter un jugement de valeur sur la manière
d’agir ou de penser du patient.
Au-delà du patient lui-même, l’entourage doit être considéré comme une ressource importante pour
le patient et le soignant. Le patient est inscrit dans un environnement social qui peut constituer autant
de ressources que de freins dans la gestion de la maladie par le patient. C’est la raison pour laquelle
l’entourage devrait faire partie intégrante des acteurs de la prise en charge et son implication dans la
vie quotidienne du patient devrait être prise systématiquement en considération (Boise, Heagerty et
Eskenazi, 1996; Fisher et Weihs, 2000).
Dans ce contexte, l’approche traditionnelle paternaliste (le médecin sait ce qui est bon et décide pour
le patient), qui domine toujours le modèle de soins actuel, devient obsolète et demande à être revue
en profondeur (Coucke, 2014). Le Centre belge d’Expertise des Soins de Santé (Paulus, Vand den Heed
et Mertens, 2012) appelle à l'organisation future des soins chroniques basée sur une approche
intégrative en positionnant de façon centrale les besoins et attentes du patient.
2ème critère - Structurée, formalisée
Certains auteurs parlent d’une approche systémique (d’Ivernois et Gagnayre, 2011) pour décrire
l’activité d’ETP qui s’articule, selon la HAS, en 4 étapes itératives (Figure 2.2). Celles-ci constituent un
modèle permettant d’opérationnaliser la démarche éducative et ainsi en formuler une proposition
structurée et formalisée. Ces 4 étapes se situent chacune dans le prolongement naturel de l’autre.
« L’éducation thérapeutique vient donc formaliser une activité qui était jusqu’à présent considérée
comme allant de soi : dans leur pratique quotidienne, les soignants délivrent aux patients des conseils
qu’ils répètent avec constance mais sans véritable méthode » (Sandrin-Berthon, 2009). Ces différentes
étapes sont indispensables pour rendre la démarche d’ETP scientifique et en assurer sa pleine valeur
ajoutée pour le patient.
Figure 2.2. La démarche d’ETP en 4 étapes selon la HAS (2007)
22
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
3ème critère - Continue
L’ETP représente une stratégie de soins privilégiée des maladies chroniques qui, par définition,
s’inscrivent dans la durée. Une éducation continue, accompagnant le patient sur l’ensemble de son
parcours de vie, avec un renforcement particulier dans les phases critiques de la maladie, est
nécessaire (par exemple, lors d’un changement de traitement). La continuité des soins consiste ainsi à
proposer un continuum de services préventifs et curatifs, adaptés aux besoins des individus mais aussi
dans le caractère de suivi extra-, intra- et transmural des soins. Ce critère de continuité reste souvent
limité dans les systèmes de soins, à cause d’un manque de coordination, mais surtout par une
fragmentation de l’offre de soins axée soit sur un groupe spécifique de patients, soit sur un épisode
spécifique de la maladie (Ministères de Santé publique belges, 2015).
4ème critère - Intégrée aux soins et interdisciplinaire
L’ETP est considérée comme intégrée à la prise en charge thérapeutique si «elle est réellement
complémentaire et indissociable des traitements et des soins, du soulagement des symptômes en
particulier de la douleur, et de la prévention des complications ; si elle tient compte des besoins
spécifiques, des comorbidités, des vulnérabilités psychologiques et sociales et des priorités définies
avec le patient » (HAS, 2007). L’ETP ne constitue pas une discipline nouvelle à juxtaposer à côté des
différentes disciplines en fonction. Elle se veut au contraire orientée vers l’intégration des pratiques
existantes. Dans cette acceptation, l’ETP nécessite une réelle interdisciplinarité des soignants mais
peut aussi la favoriser par le partage des principes qui la constituent. Une réelle interdisciplinarité
suppose que les soignants « prennent en compte les contributions des autres membres de l'équipe »
(Curley, McEachern et Speroff, 1998). L’interdisciplinarité commence par la connaissance des
interventions de chacun des contributeurs aux soins des patients. La prise en charge de malades
chroniques nécessite un apprentissage de la collaboration multidisciplinaire et de coordination, point
dont l’importance est documentée depuis longtemps (Mazur, Beeston et Yerxa, 1979) et qui pourtant
reste difficile à mettre en œuvre par les professionnels de santé. Il conviendrait de travailler avec les
soignants sur les éléments qui favorisent une réelle interdisciplinarité. De la Tribionnière et Gagnayre
(2013) proposent une liste de 36 critères d’interdisciplinarité dans le champ de l’ETP classés en 4
domaines : le projet, sa construction et son déploiement – structuration et vie de l’équipe –
communication autour de l’ETP – formation en ETP.
5ème critère - Evaluée
Les enjeux de l’évaluation en ETP sont multiples selon le point de vue du bénéficiaire choisi. En
considérant ici les différents acteurs de la prise en charge, les effets de l’ETP sont à observer tant au
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
23
niveau du patient et de son entourage que du soignant, et finalement, plus globalement, vis-à-vis du
système de santé.
Concernant la relation de soins, l’évaluation ne doit pas être à visée répressive mais elle doit tenter de
rendre compte des différentes modifications d’ordre biologique, clinique, pédagogique, psychologique
et social (d’Ivernois et Gagnayre, 2007). Jaffiol et collègues (2013) pointent la difficulté de définir des
critères d’évaluation en prenant l’exemple du diabète : « faire reposer l’évaluation sur un critère
simple, le taux d’HbA1c, méconnaîtrait des éléments essentiels de l’impact de l’ETP, sur la perception
d’utilité par les soignants et les patients des compétences acquises, la qualité de vie, la relation sociale,
le recours pertinent au système de soins pour éviter des complications aiguës ».
Le caractère multidimensionnel de l’ETP appelle à de nouveaux modèles d’analyse de ces systèmes
complexes via la mobilisation de disciplines complémentaires.
6ème critère – Menée par du personnel formé
Condition sine qua non d’un développement de qualité et du passage en soignant-éducateur, la
formation des professionnels de santé doit être assurée. Toutefois, force est de constater que si les
besoins des pratiques des professionnels de santé se sont modifiés, la formation de ces mêmes
professionnels peine à suivre le même chemin (Assal, 1997). Ce constat reste toujours vrai aujourd’hui
(Paulus, Vand den Heed et Mertens, 2012). La formation continue peut constituer un levier de
changement favorable, à condition qu’elle fasse l’objet d’une réelle ingénierie. Le développement et
l’analyse de la qualité de ces formations doivent être interrogés (Gagnayre et d’Ivernois, 2014). Ces
points seront abordés spécifiquement au Chapitre 3.
7ème critère – basée sur un partenariat soignant/soigné
Considérer le patient comme un partenaire de soins (Lorig, 2002) est une description du patient lourde
de sens car elle requiert la pleine participation active du patient dans chacune des étapes du processus
d’ETP. On parlera d’alliance thérapeutique à condition que les règles du système soient construites et
respectées par les deux acteurs : principe de réciprocité, négociation et concessions constituent
quelques maitres-mots de ce critère de qualité (Consoli, 2013). Toutefois, cette situation peine à être
rencontrée sur le terrain. Considérer le patient comme un partenaire de soins est un projet
relativement novateur dont les modalités pratiques demandent à être définies et organisées (Bassleer,
Boulanger et Menozzi, 2014).
24
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
Ces différents critères de qualité amènent de nouveaux défis pour l’organisation et la mise en œuvre
des pratiques des professionnels de santé. Le « Plan conjoint belge » en faveur des malades chroniques
de 2015 (Ministères de Santé publique belges, 2015) montre que la situation en Belgique est loin de
garantir l’ensemble de ces conditions, nécessaires dans un développement d’ETP de qualité. On peut
notamment y lire que « notre système de soins de santé a besoin de changements pour offrir des
réponses plus performantes aux défis du futur ». Ces critères de qualité pourraient servir de ligne de
conduite pour guider les changements souhaités.
2.6.
Développement de l’ETP
Plusieurs étapes ont marqué l’évolution de la prise en charge des maladies de longue durée. Assal
(1997) illustre ce développement sur la thématique du diabète insulino-dépendant (Figure 2.3).
Figure 2.3. Historique du développement de l’ETP (Assal, 1997)
Les deux premières phases correspondent aux progrès biomédicaux qui ont permis de réduire de
manière importante la mortalité et la morbidité liées à la maladie.
C’est à l’étude de Miller et Goldstein (1972), portant sur l’éducation de patients diabétiques mexicoaméricains, que l’on doit la première preuve épidémiologique démontrant que l’intégration d’une
démarche pédagogique dans le soin pouvait jouer un rôle thérapeutique de première importance, au
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
25
même titre que les outils thérapeutiques biomédicaux ; la prise en charge s’ouvre aux sciences
humaines.
Actuellement, pour de nombreux soignants, l’ETP n’est pas une pratique nouvelle mais une posture de
bon sens pratiquée, à l’instar de Monsieur Jourdain réalisant de la prose, de manière spontanée.
Néanmoins, c’est suite aux expériences de Miller, dans les années 80-90, que ce domaine se développe
dans une forme plus conceptualisée (Baudier et Leboube, 2007).
Le développement de la pratique d’ETP a pris deux orientations différentes selon que l’on observe son
évolution dans le monde anglo-saxon ou francophone. Aux Etats-Unis par exemple, on parlera
essentiellement de « disease management (DM) ». Si l’ETP est le fruit de la rencontre de l’éducation
pour la santé et du soin, le DM est centré sur l’efficience de la prise en charge des maladies chroniques
dans un cadre budgétaire contraint (Baudier et Leboube, 2007). Ce sont essentiellement les
entreprises pharmaceutiques qui sont porteuses des programmes de DM, avec comme objectif central
l’amélioration de l’observance thérapeutique. Le DM se rapproche davantage de l’accompagnement
et du coaching et s’écarte des principes fondamentaux de l’ETP (Gaspoz et Rutschmann, 2005). Les
enjeux sous-tendus par chacune des pratiques sont donc complémentaires : la santé et l’économie
pour le DM, la santé et la qualité de vie pour l’ETP. Une vision plus globale consisterait à regrouper ces
objectifs (santé, qualité de vie et économie), sachant qu’ils sont intimement liés.
Si les études de type méta-analyse tendent aujourd’hui à apporter des preuves d’une relative efficacité
de l’ETP, et ce sur de nombreux critères d’ordre bioclinique, pédagogique et psychosocial et dans
différentes maladies chroniques, force est de constater que cette pratique de soins n’a pas été intégrée
de manière généralisée et uniforme dans les politiques de santé. Ainsi, en Europe, « chaque pays a
développé sa propre approche, en fonction de l’organisation de son système de soins et des
expérimentations qui ont été conduites» (Jacquat, 2010).
Ainsi, on constate des réalités fortement différentes entre pays. La France, la Suisse et la Belgique,
trois pays reconnus pour avoir initié le développement de l’ETP en Europe (World Health Organization,
1998), permettent d’illustrer ce constat.
La France est le pays de référence en Europe, qui s’est doté d’un cadre législatif pour favoriser
l’intégration de l’ETP dans les pratiques professionnelles. L’ETP est inscrit dans le code de la santé
publique depuis 2009 (article L1161-1). Les modalités pratiques de mise en œuvre sont définies par
des arrêtés d’application (décrets n°2010-904 et 2010-906). L’ETP s’organise en programmes
composés de séances individuelles et/ou collectives dédiées à l’éducation du patient. Ces programmes
sont autorisés par les instances régionales de santé. Toutefois, le rapport de l’Académie Nationale de
26
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
Médecine française (Jaffiol et al., 2013) amène certaines critiques dans la mise en œuvre : « Force est
de constater que l'ETP est encore réservée, en France, à un trop petit nombre de patients et que les
moyens restent insuffisants, à tous les niveaux, pour faciliter son développement. Malgré de nombreux
travaux et rapports sur le sujet, l'ETP reste trop souvent théorique, mal connue des patients, qui ne font
pas la différence avec l'éducation à la santé, et peu intégrée dans la pratique médicale en ville,
l'essentiel de sa pratique restant du domaine hospitalier ».
En Suisse, le développement de l’ETP a été initié par les professeurs Assal et Golay dans le service
d’enseignement thérapeutique pour maladies chroniques, au sein des hôpitaux universitaires de
Genève (HUG). La Suisse a été pionnière en Europe pour la mise en place de l’ETP dans les années 80.
Le développement s’est poursuivi, à partir des HUG, qui ont largement contribué au développement
de l’ETP dans toute la Suisse. Il n’existe cependant pas de politique nationale en matière d’ETP et
aucune réglementation n’encadre les pratiques. Ainsi, le développement s’est fait de façon non
structurée, à l’initiative des équipes hospitalières et de professionnels de santé convaincus de cette
nouvelle approche.
En Belgique, on parlera plutôt d’une pratique clandestine, qui demande à être reconnue et valorisée
pour en développer sa pleine qualité. En effet, l’ETP ne fait l’objet d’aucune politique nationale, ni
d’aucune reconnaissance légale spécifique. Van Ballekom-van de Ven (2009) explique cette difficulté
par le changement constant des responsabilités politiques entre les différents niveaux de pouvoirs.
Seule la loi du 6 octobre 2002 sur les droits des patients (Affaires sociales, santé publique et
environnement, 2002) tente de replacer le patient au centre du processus (notamment en exigeant
une information complète et utile du patient, un droit de consentement éclairé). Quelques expériences
pilotes éducatives existent, notamment dans le cadre du diabète – « trajets de soins », système de «
conventions » (Association Belge du Diabète) – qui permettent aux patients diabétiques de bénéficier
d’une prise en charge éducative pour gérer eux-mêmes leur maladie et le traitement. Bien qu’ayant le
mérite d’exister, ces initiatives restent centrées sur les aspects biomédicaux et ne bénéficient qu’à un
nombre limité de patients. Aussi, l’ETP fait l’objet d’un développement plus ou moins hasardeux sans
cadre permettant un développement organisé des pratiques d’ETP sur le terrain.
Plus spécifiquement en Wallonie, Pirard (2010) indique que des traces d’activité d’Education
Thérapeutique du Patient se retrouvent dans les outils de gestion des activités des professionnels de
santé comme le résumé infirmier minimum ou la nomenclature INAMI. De manière plus générale,
Pirard indique que l’Education du Patient fait partie intégrante des missions de l’hôpital et que
différentes structures viennent soutenir le développement de l’ETP en Wallonie : le centre d’Education
du Patient comme centre de ressources et de formations, le comité interinstitutionnel pour l’éducation
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
27
à la santé du patient (qui est une structure de rencontre entre professionnels pour stimuler les
échanges sur la pratique d’ETP), les Ecoles de Santé publique qui sont en charge de la formation des
professionnels de santé et les associations de patients dans leur fonction de soutien et d’aide aux
patients en vue d’une meilleure participation dans la prise de décisions. Toutefois, cette étude
n’indique pas ce qui se passe réellement sur le terrain en termes d’Education Thérapeutique.
Le dernier accord de Gouvernement d’octobre 2014 (au niveau fédéral) prévoit « la stimulation des
initiatives qui encouragent la prise en charge et la gestion par soi-même ». Les prochaines années
informeront sur la manière dont cette déclaration a été mise en œuvre. Vu la dernière réforme de
l’Etat en cours de procédure et vu le fait que l’ETP s’inscrit dans une démarche de soins préventifs pour
la partie francophone du pays, c’est la Région Wallonne qui devra assumer le développement de l’ETP ;
suite au transfert de compétences dans le cadre de la dernière réforme de l’état (Service public de
Wallonie, 2014). Tout récemment (fin 2015), les ministères de Santé publique belges ont proposé un
« Plan conjoint en faveur des malades chroniques – Des soins intégrés pour une meilleure santé » qui
situe l’empowerment du patient (dans lequel s’inscrit l’ETP) et la formation des professionnels de santé
à l’empowerment du patient comme des priorités. Il est attendu que ce nouveau plan permette la
définition d’un meilleur cadre pour soutenir les pratiques d’ETP en Belgique.
Ainsi, la France est le seul pays à avoir inscrit l’ETP dans une législation donnant une impulsion
significative à son développement. Toutefois, on regrettera que les politiques françaises aient favorisé
un modèle d’ETP prenant la forme de programme (« ensemble coordonné d’activités d’éducation,
animées par des professionnels de santé ») (Bourdillon et Collin, 2008). En effet, bien que favorisant le
suivi et l’évaluation, les conditions de reconnaissance règlementaire de l’éducation thérapeutique ont
fait prévaloir des modes programmés sur les approches non incluses au sein de programmes,
conduisant à une trop grande standardisation dans la mise en place des activités d’ETP proposées
(Saout, 2015). L’ETP risque alors de se rapprocher d’une programmation d’une liste d’objectifs à
atteindre ne laissant que peu de place à l’imprévisible (Eymard, 2010). Dans ce cadre, les séances
consacrées à l’ETP s’écartent d’une ETP réellement intégrée aux soins.
28
2.7.
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
Spécificités de l’ETP dans le domaine de l’obésité
L’obésité est considérée comme le parent pauvre de l’ETP (Ziegler, 2009). Plusieurs explications sont
possibles quant à ce constat :
1) l’obésité n’est pas toujours considérée comme une maladie chronique en tant que telle mais
comme un simple facteur de risque (Vacheron et Nordmann, 2010);
2) la prise en charge de l’obésité appelle peu de compétences d’autosoins et beaucoup plus de
compétences d’adaptation à la maladie. Ces dernières sont moins fréquemment développées dans
les démarches d’ETP, certainement parce qu’elles demandent une plus grande remise en question
de l’approche de soins, toujours trop orientée vers le modèle biomédical. La personne obèse n’a
pas besoin de développer de grandes compétences d’autosoins si ce n’est quelques éléments sur
la balance énergétique et la diététique. Par contre, l’enjeu véritable pour le patient obèse est
souvent d’apprendre à vivre mieux avec la maladie. On sort de la technique pour entrer dans
l’humain (Ziegler, 2009).
Or, Chambouleyron et collègues (2012) déclarent que « l’ETP a surtout été développée dans des
maladies dont la gestion nécessite de nombreuses compétences d’auto-soins comme la réalisation
de mesures et l’adaptation des thérapeutiques, ou encore le repérage des signes précoces de
complications ». Les modèles développés pour ces maladies telles que le diabète et l’asthme ne
peuvent se transposer tels quels dans le domaine de l’obésité qui révèle des spécificités
éducatives. D’autres propositions sont ainsi à trouver/développer. Ce constat est renforcé en
considérant l’obésité comme « une problématique globale où s’enchevêtrent facteurs
psychologiques, comportementaux,…, familiaux, sociaux et culturels » (Chambouleyron et al.,
2012). Une prise en charge qui ne viserait que la correction du déséquilibre énergétique est ainsi
vouée à l’échec.
L’objectif général de l’ETP dans le domaine de l’obésité vise évidemment la perte de poids durable ou
l’absence de prise de poids, qui peut d’ailleurs déjà être considérée comme un succès de prise en
charge, et ce en accord avec les recommandations dans le domaine de la prise en charge de l’obésité
(Tsigos et al., 2008). Toutefois, le deuxième objectif général concerne le vivre au mieux avec la maladie.
En bref, ces objectifs s’inscrivent dans les deux finalités de l’ETP décrites ci-avant : santé et qualité de
vie. Aussi, les objectifs d’une démarche d’ETP dans la maladie obésité s’ouvrent à des critères
pédagogiques et biopsychosociaux sur lesquels la maladie a un impact (Albano et al., 2012a, 2012b).
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
29
Ces objectifs généraux exigent des modifications importantes et durables des modes de vie de la
personne. Ces modifications requièrent à leur tour le développement de compétences spécifiques.
L’intérêt pédagogique de la prise en charge prend alors tout son sens et l’ETP va tenter d’aider le
patient dans ces modifications de modes de vie. Ziegler et collègues (2014) proposent une vue
d’ensemble des compétences d’auto-soins et d’adaptation spécifiques que la personne obèse peut
acquérir pour travailler sur ces modifications de style de vie. Le Tableau 2.3 en donne quelques
illustrations.
Il conviendra bien sûr de définir avec le patient les objectifs prioritaires en vue de construire un plan
d’actions éducatives personnalisé à la situation du patient. Ces objectifs peuvent être déclinés en
différents axes du projet thérapeutique : construction d’une vision partagée du projet de soins,
compréhension de son état de santé, construction d’un sens à donner à la maladie, questionnement
sur son mode alimentaire et son rapport à la nourriture, développement du plaisir de manger, de
bouger, aide psychologique (Chambouleyron et al., 2012 ; Gaillard et al., 2011).
Un aspect transversal dans ce projet thérapeutique doit concerner le travail sur les représentations de
la personne et son expérience de vie (Charmillot et et al., 2011 ; Barthassat, Lagger et Golay, 2008). Il
est connu depuis longtemps, en référence aux modèles de santé (Robichaud-Ekstrand et al., 2001),
que les représentations pilotent les comportements et prises en charge. Aussi, connaitre les
représentations du patient sur la maladie, son vécu, ses difficultés, ses obstacles en fonction de
l’expérience de vie de l’individu est essentiel pour ancrer une démarche d’ETP qui fasse sens pour le
patient et qui l’aide à faire progresser ses représentations et les reconstruire.
Ces différentes dimensions de l’éducation du patient obèse sont difficiles à mener simultanément.
Toutefois, Golay insiste sur la nécessité, en termes d’ETP, d’une prise en charge globale du patient
obèse, en proposant un modèle intégrant 4 dimensions. « Ce modèle prend ainsi en compte la personne
obèse avec ses connaissances, ses conceptions (dimension cognitive), son vécu émotionnel (dimension
émotionnelle), ses raisonnements intimes, ses distorsions cognitives (dimension infracognitive) et son
auto-perception, son estime de soi, son image de soi (dimension métacognitive) » (Golay, Lagger G et
Giordan, 2007) (Figure 2.4). Selon Golay, ce modèle offre au patient un environnement motivationnel
propice pour le développement d’une démarche active du patient. « A travers ce début de dynamique,
le patient peut alors évoluer, en s’éloignant de plus en plus d’une vision d’aide miraculeuse externe ».
30
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
Tableau 2.3. Compétences d’ETP spécifiques pour l’obésité (inspiré de Ziegler et al., 2014)
Compréhension de la maladie et compétences d’autosoins
Connaissance de la maladie et de son traitement
• Admettre que les causes de l’obésité sont multiples et connaître les conséquences de l’excès de poids ;
• Etre capable de distinguer et de comprendre les objectifs du traitement : perte de poids, stabilisation, qualité
de vie, comorbidités ;
Alimentation
• Savoir repérer les aliments denses en énergie et adapter la quantité et/ou la fréquence de consommation ;
• Savoir interpréter la composition nutritionnelle d’un aliment sur un emballage (lecture des étiquettes) ;
Activité physique
• Connaître les effets bénéfiques de l’activité physique sur la santé et les inconvénients de la sédentarité ;
identifier les freins et les leviers à une activité physique régulière ;
• Connaître les conditions de sécurité à la mise en place d’une activité physique adaptée (APA) à sa situation ;
Comportements et mode de vie
• Identifier les éléments faisant obstacle à des modifications de son mode de vie (HAS) ;
• Repérer les comportements ou situations qui favorisent la prise de poids ;
Gestion des comorbidités
• Utiliser un appareil respiratoire à pression positive continue pour le traitement de l’apnée du sommeil ;
• pratiquer une autosurveillance glycémique et faire ses injections d’insuline en cas de diabète ;
Compétences d’adaptation ou psychosociales
Comprendre et accepter l’excès de poids
• Repérer et analyser les déterminants de sa prise de poids ou de ses fluctuations pondérales ;
• Comprendre que l’obésité est potentiellement une maladie chronique et qu’il existe des facteurs de résistance
à la perte de poids mais aussi à la stabilisation pondérale ;
Alimentation, comportement alimentaire et ses différentes finalités
• Comprendre les finalités du comportement alimentaire et le rôle important des facteurs psychologiques ou
sociaux dans le déterminisme des prises alimentaires (applicable au-delà de l’adulte à l’adolescent obèse) ;
• Prendre conscience du lien entre émotions et conduites alimentaires (applicable aussi à l’adolescent obèse) ;
• Concilier plaisir alimentaire et gestion de son poids, à travers le respect des signaux physiologiques (applicable
au-delà de l’adulte à l’enfant préadolescent et à l’adolescent obèse) ;
Relation au corps
• Identifier les effets de l’activité physique sur le bien-être et comprendre l’intérêt d’investir son corps (d’en
prendre soin au lieu de le rejeter à cause de sa grosseur) ; repérer les bienfaits de l’activité physique (en termes
d’équilibre psychique via le lien social, l’amélioration de la relation à soi, la décharge d’agressivité…) ;
• Identifier les sensations corporelles dues à des tensions psychiques (stress…) ;
Connaissance de soi et développement de ses capacités
• Apprendre à chercher un soutien familial ou social ; comprendre la nature de certains modes relationnels ;
• Favoriser l’expression de ses difficultés et la mise en mots de ses affects et émotions ;
• Faire le lien entre les fluctuations de poids et les événements de vie.
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
31
Figure 2.4. Les quatre dimensions pour changer de comportement
(selon Golay, Lagger et Giordan, 2007)
Pour favoriser ces apprentissages, plusieurs méthodes peuvent être mobilisées, des plus classiques au
moins conventionnelles. Ainsi, l’ETP peut comporter des explications basiques sur la balance
énergétique, comment mieux manger et pourquoi bouger (Gaillard et al., 2011). Les interventions
peuvent également utiliser le récit de vie pour aider le patient à construire du lien entre son histoire
de vie et la maladie, permettant ainsi de donner un sens à la maladie (Pétré, Degrange et Guillaume,
2014). La danse thérapie peut également être utilisée dans le développement des perceptions
sensorielles, des représentations du corps, de l’estime de soi et de la qualité de vie du patient (Albano
et al., 2012b). Citons également les techniques cognitivo-comportementales qui vont aider le patient
à agir sur les déterminants cognitifs et émotionnels du comportement en cause (Golay et al., 2008).
Cette liste d’activités, d’interventions n’est pas exhaustive mais vise à se faire une idée sur le large
éventail des activités possibles en ETP. Ces activités partagent l’idée selon laquelle la prise en charge
du patient obèse doit renforcer les capacités de l’individu à agir pour sa santé via des apprentissages.
32
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
D’autres types d’intervention, notamment anglo-saxons, telles que le « Diabetes Prevention Program »
ou Look AHEAD (Delahanty et Nathan, 2008), ne sont pas considérés dans ce document car ils
s’écartent des définitions de l’ETP données dans ce chapitre pour se rapprocher d’une perspective de
coaching et d’accompagnement.
2.8.
Efficacité de l’ETP dans le domaine de l’obésité
Concernant la recherche dans ce domaine, Albano et collègues (2012a) ont réalisé une revue de la
littérature (articles publiés entre 2005 et 2010) afin d’analyser les caractéristiques des programmes
d’ETP liés à l’obésité. Leur recherche montre que la littérature dans ce domaine reste pauvre puisque
seuls 24 articles ont été retrouvés où l’ETP constitue une intervention majeure dans le programme
proposé. Il est observé des effets favorables de ces programmes tant sur le plan clinique (IMC et
comorbidités) qu’éducationnel, psychologique, voire économique. Cependant, aucun résultat chiffré
n’est apporté. Deux critiques majeures, amenées par ces auteurs, sont à considérer dans les articles
retrouvés : premièrement, la faible description des interventions proposées pour le programme et,
deuxièmement, la cible réductrice des interventions d’ETP ne considérant que l’apprentissage de
connaissances et de compétences au niveau de l’alimentation et de l’activité physique. Lagger, Pataky
et Golay (2010) étaient plus critiques encore deux ans plus tôt en soulignant la quasi-absence de
description du type d’intervention éducative et la centration de l’évaluation sur la perte de poids des
individus. Même si les travaux sur la question de l’évaluation liée à l’ETP dans le champ spécifique de
l’obésité doivent continuer, les éléments connus permettent de réunir un consensus sur l’enjeu
stratégique que constitue l’ETP dans la prise en charge des patients obèses. Gagnayre et Lombrail
(2015) vont d’ailleurs en ce sens en exposant que la question de l’efficacité en matière d’ETP doit
évoluer vers la question des meilleurs moyens de mise en œuvre.
2.9.
Des soignants formés
Cette approche de l’ETP nécessite une approche concertée et interdisciplinaire. Au vu des différents
déterminants de l’obésité, qui constituent autant de cibles d’interventions éducatives, il est important
que l’encadrement des activités d’ETP soit réalisé par des professionnels compétents dans le champ
d’action dans lequel ils se situent respectivement. Aussi, la mobilisation du médecin traitant, du
médecin spécialiste, du psychologue, des infirmiers, des diététiciens, du kinésithérapeute et du
pharmacien est nécessaire dans cette prise en charge éducative. Toutefois, cette dernière nécessite
de véritables compétences chez chaque soignant intervenant dans le parcours d’ETP de l’individu. Ce
constat est renforcé par les difficultés exprimées par les professionnels de santé dans le suivi des
patients obèses et notamment, plus particulièrement, la perception d’un manque de formation dans
ce domaine spécifique.
Chapitre 2. Education thérapeutique du patient et obésité
2.10.
33
Conclusion
L’ETP s’inscrit dans le nouveau paysage thérapeutique comme une pratique innovante qui tente de
répondre à une série de problèmes soulevés par le développement des maladies chroniques.
Selon Jaffiol et collègues (2013), « développer l'ETP, c'est donc le moyen le plus évident aujourd'hui
pour que s'opère enfin la mutation de notre système de santé dans le sens de la transition
épidémiologique trop longtemps retardée vers une prise en charge prioritaire et adaptée des maladies
chroniques ».
Si cette approche semble prometteuse, elle appelle à être formalisée et structurée sur notre territoire.
Son développement passe par l’évolution de plusieurs éléments du système de soins en vue d’en
assurer sa pleine valeur ajoutée : définition d’un cadre législatif, renforcement de la collaboration des
professionnels de santé, financement des activités, structuration de la prise en charge (parcours de
soins à définir), formation des professionnels de santé et son évaluation (Jacquat, 2010 ; Jaffiol et al.,
2013).
Par les finalités qu’elle poursuit, les critères de qualité sur lesquels elle s’appuie, les résultats des
études menées, l’ETP peut être considérée comme un levier important à explorer et à développer en
tant que stratégie thérapeutique dans le cadre de la prise en charge des patients obèses et dans une
perspective de santé et de qualité de vie. Aujourd’hui, la question de l’efficacité de l’ETP est largement
dépassée et la recherche doit s’orienter vers les modèles et processus les plus adéquats d’ETP compte
tenu des contextes et conditions dans lesquels l’ETP est entreprise (Gagnayre et Lombrail, 2015).
CHAPITRE 3
De la formation en ETP vers le
développement d’une attitude éducative
Chapitre 3.
3.1.
Introduction
Plusieurs conditions ont été identifiées dans le chapitre précédent pour faire évoluer l’intégration de
l’ETP dans les pratiques professionnelles : définition d’un cadre législatif, renforcement de la
collaboration des professionnels de santé, financement des activités, structuration de la prise en
charge (parcours de soins à définir) et formation des professionnels de santé (Jacquat, 2010). Nous
soutenons l’idée selon laquelle la formation des professionnels doit être vue comme une priorité. Les
répercussions potentielles de telles formations peuvent avoir un effet direct sur la relation de soins et
les indicateurs des patients, indépendamment de l’évolution d’autres paramètres. Cette priorité est
renforcée par la carence majeure de dispositifs de formation en ETP en Région wallonne, comme décrit
en détail dans ce chapitre. Par ailleurs, le paysage des formations en santé est actuellement en cours
de réforme en Belgique. Il s’agit donc d’une opportunité pour un institut de formation tel que
l’Université de Liège dont les missions sont l’enseignement et la recherche, que de s’orienter dans une
réflexion à propos de ces formations. Dans ce chapitre, nous souhaiterions étendre et discuter les
enjeux liés à ces formations.
3.2.
Formation en ETP : un état des lieux réflexif
La formation professionnelle à la méthodologie de l’ETP conditionne son efficacité. « Une éducation
thérapeutique de qualité devrait être dispensée par des soignants ayant acquis, grâce à une formation
méthodologique, des compétences spécifiques » (d’Ivernois et Gagnayre, 2002). La maitrise de ces
compétences devrait mener les professionnels de santé à une évolution dans l’approche du patient.
35
36
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
En effet, l’expression de ces nouvelles compétences devrait se traduire par un changement des
comportements ou pratiques spécifiques du soignant, c’est-à-dire les manifestations et actions
extérieures de ces soignants devenus éducateurs. Il est attendu que ces changements de
comportements et de pratiques des soignants conduisent à mieux soutenir les patients dans leurs
apprentissages et ainsi favoriser leur meilleure santé et qualité de vie.
Le développement de compétences spécifiques en ETP, permettant le passage du soignant en
soignant-éducateur, exige une formation spécifique (Deccache et al., 2009 ; d’Ivernois et Gagnayre,
2011). Nous tentons de faire une double analyse de ces formations : description théorique et mise en
œuvre sur le terrain.
3.2.1. Des recommandations
Dès 1998, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) publiait un rapport en faveur du développement
des formations continues en Education Thérapeutique du Patient (ETP) pour les professionnels de
soins (World Health Organization 1998). L’OMS y décrit les lignes directrices que ces formations
doivent suivre.
L’OMS propose deux niveaux de formation qui doivent coexister:
(1) la formation « fondamentale » en ETP du soignant de terrain qui applique directement l’ETP dans
son activité quotidienne. L’OMS stipule que cette formation devrait s’étendre sur 50-80h.
(2) la formation « avancée » qui « concerne la capacité à coordonner plusieurs activités d'éducation
au sein d'une institution de formation ou d'un ensemble de services de soins ». Il s’agit ici d’un
niveau Master, entre 400h et 900h.
Ces deux niveaux de formation sont complémentaires. Si les formations courtes devraient permettre
à tout professionnel de santé de disposer des compétences nécessaires à une approche éducative des
soins, le niveau de Master offre une formation qui ouvre la voie à l’acquisition de compétences de
coordination, d’encadrement et d’évaluation (Bourdillon et Collin, 2008).
a. Public cible
La formation devrait être proposée aux différents soignants « impliqués à des degrés divers dans la
relation de soins avec les patients souffrant de maladies chroniques » : des médecins, des infirmières,
des
diététiciens,
des
pharmaciens,
des
kinésithérapeutes,
des
ergothérapeutes,
des
psychiatres/psychologues, des travailleurs sociaux, des spécialistes en santé du travail et des
podologues (World Health Organization, 1998).
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
37
b. Objectifs de la formation et contenu
Le profil attendu des soignants-éducateurs (soit les objectifs de la formation) doit être
scrupuleusement défini en vue d’y accorder les contenus et modalités d’apprentissage et d’évaluation.
L’approche contemporaine de la pédagogie, y compris dans le secteur de la santé, consiste à préciser
les buts à atteindre via la définition des compétences attendues à la fin de la formation (Institut
National de Prévention et d’Education pour la santé (INPES), 2011).
Différentes propositions existent, des plus générales aux plus spécifiques, des plus simples aux plus
complexes (Pétré et al., 2014).
Leclercq (2014) fait une proposition des compétences de 1er niveau que le soignant-éducateur doit
maitriser sous l’acronyme AADOPEASE (Tableau 3.1). Ce travail s’inspire des propositions du Centre
d’Education du Patient belge, de l’INPES, du JO (le Journal officiel "Lois et Décrets" français) du
2/6/2013 et de l’expérience accumulée au LEPS (Laboratoire Educations et Pratiques de Santé, Paris
13) sur base de leurs différents travaux sur les compétences des participants aux formations en ETP.
Les compétences des éducateurs-soignants sont formulées selon le processus temporel de l’éducation
thérapeutique : de l’annonce/l’accueil à l’évaluation du patient. Dans ce sens, cette proposition est en
phase avec la définition de la compétence donnée au Chapitre 2 et qui se caractérise par des
situations : chacune des phases du processus d’ETP est bien une situation que peut rencontrer le
soignant. Cette proposition est également intéressante puisqu’elle permettra de mieux définir les
ressources nécessaires à mobiliser dans chacune des situations et celles qui seront transversales.
Toutefois, on regrette le manque de liens entre les compétences attendues chez les soignants et celles
que ces derniers sont chargés de développer chez leurs patients, autrement dit la finalité du
développement des compétences des soignants. Dans ce sens, les compétences à développer chez le
soignant peuvent être qualifiées de compétences éducatives.
Pour les compétences de coordination, nous faisons référence aux travaux de l’INPES de 2011. A leur
lecture (Tableau 3.2), il est plus facile d’identifier que ces compétences correspondent à des activités
de 2ème ligne. Toutefois, nous estimons que ce 2ème niveau est de nature intégrative : il faut connaitre
les spécificités pour dispenser l’éducation thérapeutique du patient pour pouvoir assurer la
coordination de ces activités d’ETP.
38
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
Tableau 3.1. AADOPEASE et trois des documents qui l’ont inspiré (Leclercq, 2014)
CEP
INPES (2007)
JO (2/6/2016)
AADOPEASE
Annonce (de la maladie)
Accueillir
(1) Créer
favorable
un
climat
Accueil (du patient)
1. Le diagnostic Elaborer un diagnostic (2) Analyser la situation Diagnostic éducatif (des
éducatif
éducatif
et les pratiques
besoins en ETP)
Définir un programme
personnalisé d'ETP avec
Objectifs
(2) Convenir des besoins
des
priorités
négociation)
2. La négociation d'apprentissage
d'objectifs
Planifier les séances (3) S'accorder avec le
(leur
d'ETP individuelle ou patient et son entourage Planification
collective,
ou
en sur
un
projet (coordonnée)
alternance
(4) Se coordonner
Eduquer (les actions du
soignant)
3. L'intervention
et les mettre en œuvre (5) Mettre en œuvre
éducative
Apprentissage
(organiser
apprentissages
patients)
les
des
Suivi de la conduite
(à domicile) du patient
Réaliser
une
évaluation:
4. L'évaluation
(6)
Co-évaluer
les
compétences acquises,
des résultats
pratiques et les résultats
déroulement
du
programme
Evaluation (avec le
patient et l'entourage)
du vécu et des effets de
l'ETP
Tableau 3.2. Les compétences de coordination en ETP (INPES, 2011)






Constituer une équipe transversale autour d’une démarche d’ETP
Analyser le contexte et concevoir une démarche d’ETP
Organiser et conduire une démarche d’ETP
Animer et coordonner les acteurs de l’ETP, suivre le déroulement de la démarche d’ETP
Evaluer et faire évoluer la démarche et les pratiques d’ETP
Communiquer sur l'expérience de l'équipe, par oral et écrit
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
39
c. Principes pédagogiques
Les considérations fondamentales suivantes peuvent être retenues sur base des écrits de l’OMS (1998)
et de Gagnayre et d’Ivernois (2014):
-
l’expérience professionnelle des participants doit être sollicitée ;
-
les modalités pédagogiques reposent sur un apprentissage actif ;
-
les participants sont soumis à des problèmes concrets (mise en situation) ;
-
les participants sont véritablement considérés comme des partenaires dans le processus
pédagogique, notamment pour la négociation des critères d’évaluation de la réussite du
programme ;
-
le programme est construit en réunissant des disciplines complémentaires ;
-
l’adaptation du programme de formation aux besoins spécifiques ;
-
la formation prépare au transfert des acquis de formation par des activités dédiées ;
-
la formation mobilise la créativité des participants ;
-
la formation permet une évaluation du projet personnel des participants ;
-
la satisfaction des participants est systématiquement mesurée et l’organisme de formation devrait
évaluer formellement les compétences acquises par les participants.
On lit à travers ces lignes une forme du principe d’isomorphisme dans le sens où la formation des
soignants devrait respecter les mêmes critères pédagogiques que la formation attendue des patients
vis-à-vis de leur maladie.
3.2.2. Mise en œuvre
a. Quel développement ?
Le développement de ces formations a été opéré avec plus ou moins de succès et selon l’organisation
du système de soins et les expérimentations qui ont été conduites dans les différents pays (Jacquat,
2010). L’intégration de l’ETP dans la formation médicale et paramédicale et dans les pratiques cliniques
des pays européens a été jusqu’ici plus ou moins formalisée.
En France, suite à l’inscription de l’ETP dans le Code de la santé publique (2009), de nombreuses
formations sont aujourd’hui organisées sur le territoire. L’arrêté du 2 août 2010 relatif au cahier des
charges des programmes d’éducation thérapeutique exige qu’« Un intervenant au moins doit justifier
des compétences en éducation thérapeutique … ou d’une expérience rapportée par écrit d’au moins
deux ans dans un programme d’éducation thérapeutique ». Le décret du 2 août 2010 relatif aux
compétences requises pour dispenser l’éducation thérapeutique du patient recommande « une
40
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
formation d’une durée minimale de 40 heures d’enseignements théoriques et pratiques, pouvant être
sanctionnée notamment par un certificat ou un diplôme universitaire » (article 2 du décret). C’est ainsi
qu’une vingtaine de formations (Diplômes Universitaires ou DU) existent sur le territoire français
(INPES, 2015). Quelques formations universitaires de type Master existent également en France afin
de préparer les coordinateurs de programmes d’ETP. L’intégration de l’enseignement de l’ETP dans les
formations de base semble également favorable. Par exemple, l’étude de Van Rooij et collègues (2012)
relative à l’enseignement de l’éducation thérapeutique auprès de 30 instituts de formation en soins
infirmiers de la région Île-de-France montre une bonne intégration de l’enseignement dans les
formations des futurs infirmiers (proposé par 100% des IFSI). Toutefois, on relève une grande
hétérogénéité des contenus et volumes d’enseignement. Gagnayre et d’Ivernois (2014) regrettent à
ce point de vue que le législateur français ne se soit pas étendu davantage sur les contenus
d’enseignement en ETP.
En Belgique, la situation est moins favorable. Selon les résultats de l’enquête EDUDORA² menée dans
la partie francophone de la Belgique (Scheen et al., 2010), un manque cruel d’enseignement aux
pratiques éducatives est observé dans les formations tant initiales que continues des soignants
(Böhme, 2013). Au niveau de la formation continue, l’offre est limitée ; seules deux formations
existent : une formation courte organisée par le Centre d’éducation du Patient et un certificat
universitaire proposé par l’Université de Liège. Il existe également une formation d’infirmier spécialisé
éducateur en diabétologie avec un volet important dédié à l’ETP. Depuis lors, un niveau de Master est
également proposé par l’Université de Liège depuis 2015. En ce qui concerne la formation initiale,
l’enseignement de l’ETP reste anecdotique. Quelques notions d’ETP sont intégrées dans des cours
d’Education pour la Santé. Les enseignants qui dispensent ces cours n’ont pas de formation spécifique
en ETP (Böhme, 2013).
b. Quelle qualité ?
Dans une analyse récente de la littérature scientifique du domaine, l’INPES met en évidence
l’hétérogénéité des référentiels d’ETP existants en termes de concepteurs, formes, publics cibles,
pathologie orientée ou non, voire même de la définition de la compétence elle-même parfois réduite
à des buts, des connaissances ou encore des thèmes (INPES, 2011).
Si l’existence de ces formations constitue une avancée importante pour l’évolution des pratiques de
soins, il est légitime, d’un point de vue de santé publique, de s’interroger sur la qualité de ces
formations. L’offre de formation est critiquable à plusieurs titres : trop de niveaux différents de
formation alors que l’OMS en prône deux ; hétérogénéité ou absence de formalisation des
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
41
compétences attendues ; peu de description et hétérogénéité des contenus et modalités
d’apprentissage ; manque ou variabilité des compétences des formateurs et manque d’évaluation des
formations (Gagnayre et d’Ivernois, 2014 ; Foucaud et al., 2008 ).
Dans une revue récente de la littérature, Pétré (2014) met en évidence le faible nombre d’études
publiées sur l’évaluation d’un dispositif de formation en ETP où celle-ci est considérée comme une
intervention majeure (la recherche en ETP s’étant essentiellement focalisée sur la recherche de
preuves d’efficacité de la mise en place de programmes d’ETP chez les patients). Selon l’auteur, « Peu
d’études sont publiées sur l’évaluation d’un dispositif de formation en ETP où celle-ci est considérée
comme une intervention majeure. De nombreuses études se rapportent à des sous-principes de l’ETP.
Les sujets abordés dans les formations et les méthodes d’apprentissage sont très ciblés et favorisent
peu une démarche globale de prise en charge. Or, il parait important d’agir sur l’ensemble des
ressources qui concourent au développement de la posture éducative : savoirs, savoir-faire, attitudes
et représentations ».
Gagnayre et d’Ivernois (2014) rappellent que ces formations en ETP devraient être systématiquement
évaluées. L’ingénierie des formations en ETP, tant initiales que continues, demande ainsi à être
interrogée.
3.3.
Attitude éducative – un acquis particulier
Nous avons constaté un besoin de formation des professionnels de santé en matière d’ETP, qui doit
être orientée vers le développement des compétences éducatives. La notion de compétence a été
définie précédemment dans ce travail, caractérisant cette notion par la mobilisation de ressources de
natures différentes : connaissances, savoir-faire et attitudes.
L’INPES (2011) propose une liste de ressources nécessaires pour le développement des compétences
pour dispenser l’ETP (Tableau 3.3). Force est de constater dans ce travail que les ressources identifiées
sont exclusivement de l’ordre des connaissances et savoir-faire, ce qui donne à l’ETP une vision
réductionniste et ne répond pas au projet d’ETP dans sa globalité.
Pourtant, la théorie du comportement planifié d’Ajzen (1991) indique que les attitudes influencent et
prédisent fortement les comportements. C’est pourquoi l’aspect attitudinal des compétences
éducatives, que nous appellerons désormais « attitude éducative », est considéré comme central dans
le développement des compétences en ETP puisqu’il permet de s’ouvrir au côté social, émotionnel et
expérientiel des ressources susmentionnées.
42
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
Cette considération est relativement importante lorsqu’on la met en perspective de la pratique
professionnelle. La terminologie de « posture éducative » (voir à ce titre la description des programmes
des
formations
diplômantes
en
ETP
en
France
à
partir
du
lien
URL
:
http://www.inpes.sante.fr/FormationsEpS/liste.asp ) est fréquemment utilisée comme objectif de
formation dans la majorité des programmes. Néanmoins, cette posture éducative reste le plus souvent
absente de définition dans les descriptifs des programmes de formation. Comme le dit Tourette-Turgis
(2011): « La fameuse posture éducative, devenue la posture à la mode dans les articles de vulgarisation
sur la pratique de l’Education Thérapeutique ». Cela est vrai aussi pour les personnes qui dirigent les
formations en ETP et qui utilisent ce terme pour mieux promouvoir leur programme. Ceci illustre le
fait qu’aucun travail n’a été réalisé pour mieux asseoir de manière scientifique ce terme. Par contre,
lors de nos recherches, différents travaux ont été identifiés en lien avec la notion d’attitude des
professionnels de santé. Dès lors, le terme d’« attitude éducative » a été privilégié à celui de « posture
éducative » car il renvoie à des travaux scientifiques antérieurs sur lesquels il est possible de se baser
pour entamer une réflexion scientifique.
Plusieurs définitions de l’attitude peuvent être données. Dans une vision assez large, Rosenberg (1980)
définisse l’attitude comme une prédisposition à répondre à certaines classes de stimuli avec certaines
classes de réponses. Une telle vision de l’attitude révèle un contenu en 3 composants de l’attitude :
cognitif, affectif et comportemental. D’autres auteurs ont donné une définition plus focalisée, basée
sur l’idée que les composantes cognitives et comportementales sont en fait des résultantes des affects
et des croyances sous-jacentes (Fazio et Olson, 2009). Eagly et Chaiken (1993) renforcent cette vision
de Fazio et collègues en définissant l’attitude comme « une tendance psychologique qui s’exprime par
l’évaluation d’une entité particulière avec un certain degré de faveur ou de défaveur ». Cette définition
permet une clarification du concept basée sur 3 caractéristiques : (1) Tendance psychologique,
l’attitude étant un état d’esprit ; (2) Evaluation, les individus font un jugement de valeur ; (3) Objet
attitudinal, cette réponse évaluative est adressée envers une entité ou une chose : une personne, une
idée ou une autre entité (Eagly et Chaiken, 2007). Cette dernière définition enrichit particulièrement
l’approche en ETP puisqu’elle permet d’ouvrir aux aspects attitudinaux manquants dans le champ des
ressources vis-à-vis des compétences en ETP.
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
43
Tableau 3.3. Liste des ressources à acquérir pour dispenser l’ETP (selon l’INPES, 2011)
Les ressources
Le référentiel de compétences pour dispenser l’ETP pose comme principe que chaque situation
nécessite pour les acteurs des connaissances, des techniques, méthodes, appelées globalement
« ressources ».
La liste sert à repérer les ressources présentes sur lesquelles l’équipe peut s’appuyer ou celles qui
sont à acquérir.
Types de ressources
Connaissances liées aux
pathologies
Connaissances liées à la
démarche ETP
Connaissances liées aux
publics reçus
Connaissances
techniques et méthodes
liées aux situations et
activités exercées
Contenu
 Connaissances biomédicales sur les pathologies, les médicaments, les
traitements, la santé
 Notion d’épidémiologie, d’anthropologie, de sociologie
 Connaissance des principes, valeurs et finalités de l’ETP
 Connaissance du programme ou de la démarche d’ETP
 Connaissance du réseau (interne et externe) des professionnels de santé et
praticiens de l’ETP, notamment patient expert et patient ressource
 Connaissance des associations de patients et de leur rôle
 Connaissance des publics reçus
 Connaissance de la sociologie et démographie relative aux publics de patients
concernés par les interventions d’ETP
 Connaissance des facteurs psychosociaux et culturels et des caractéristiques
territoriales pouvant avoir des incidences sur la santé ou la prise en charge des
patients
 Connaissance des aides concernant l’accès aux soins des patients, au niveau
de l’hébergement, de l’alimentation ou des ressources financières et autres
 Connaissances des principes et démarches utilisables dans l’éducation
thérapeutique
 Connaissance des postures relationnelles et pédagogiques
 Connaissances des phases d’acceptation de la maladie
 Connaissances des théories du changement de comportement
 Connaissances des principes d’accueil, de communication, d’écoute active, de
relation d’aide
 Méthodes de création, animation et motivation de réseau
 Techniques de communication écrite et orale
 Méthode d’animation de réunions, groupes de travail, groupes d’expression,
groupes d’échanges de pratiques
 Gestion de public en situation défavorable
 Connaissances des modèles pédagogiques, démarches, méthodes et
techniques pédagogiques
 Méthodes de résolution de problèmes
 Connaissance des principes de base de l’organisation et de la planification
 Connaissance et utilisation des fonctions usuelles des outils bureautiques,
bases de données et outils collaboratifs
44
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
Des études précédentes ont porté sur ce sujet. Au vu des maigres résultats de la recherche centrée sur
l’ETP, la revue de littérature a été étendue aux concepts de self-management et self-care (Tableau
3.4). Bien que ces concepts ne recouvrent pas toujours les mêmes réalités que l’Education
Thérapeutique du Patient, c’est sous ces termes que nous trouvons les études les plus proches de notre
sujet de recherche.
Tableau 3.4. Méthode de revue de littérature effectuée sur la notion d’attitude éducative
Medline via PUBMED :
("patient education as topic"[MH] OR "patient education"[TIAB] OR "patient education"[OT] OR "self
care"[MH] OR "self care"[TIAB] OR "self care"[OT] OR "self management"[TIAB] OR "self
management"[OT]) AND ("attitude"[OT] OR "attitude"[TI] OR "staff attitudes"[TIAB] OR "health
personnel attitude"[TIAB])
PsycINFO AND EMBASE via OVID :
(health personnel attitudes/) AND (client education/ OR self management/ OR self care skills)
Un premier versant de la revue de littérature comprend des articles relatifs aux pratiques et barrières
reliées au self care ou Education Thérapeutique du Patient (Cianciara et Miller, 2003; Blakeman et al.,
2006; Merle et al., 2007; Aghakhani et al., 2012). Le manque de temps est par exemple souvent
identifié comme une barrière importante. Cependant, ces études n’explorent pas l’aspect attitudinal
comme le définissent Eagly et Chaiken, c’est-à-dire en tant que disposition mentale.
D’autres études sont plus proches de notre objet de recherche et explorent ce concept d’attitude
éducative via une approche plus qualitative. Par exemple, Bos-Touwen et collègues (2005) ont mis en
évidence la nécessité de reconnaissance des capacités du patient à prendre soin de lui-même comme
un facteur qui influence les pratiques de self care et d’évaluation globale du patient par les infirmiers.
Clark et collègues (2010) ont montré la vision de professionnels de santé qui associaient l’Education
Thérapeutique du Patient à un meilleur bien-être des équipes de soins. Norris et Killbride (2014)
pointent le challenge perçu par les professionnels de santé pour renforcer la capacité d’action de leurs
patients et le risque de perdre une position de contrôle.
Finalement, il est possible de trouver un troisième type d’étude plus axé sur le volet évaluatif de
l’attitude dans le domaine du self care et de l’ETP. Ici, il est observé le développement et l’utilisation
d’échelles attitudinales. Par exemple, la « Diabetes Attitude Scale (DAS) », développée par Anderson
et collègues (1998), permet de mesurer les attitudes des professionnels de santé par rapport à une
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
45
formation spécifique pour prodiguer les soins aux diabétiques, la gravité du diabète, la valeur accordée
au contrôle du glucose ou encore l’impact psychosocial du diabète pour le patient. Toutefois, la limite
majeure de ce type d’échelles est qu’elles sont orientées vers une composante précise de l’attitude ou
vers un public spécifique et/ou une pathologie particulière. Elles n’appellent pas à considérer
l’ensemble des possibilités de l’attitude au vu des résultats présentés précédemment.
Ces études illustrent le caractère multidimensionnel de l’attitude éducative, qu’elles renseignent
cependant de manière « éclatée ». De plus, elles sont basées sur la vision de professionnels de santé
de terrain non nécessairement formés à l’Education Thérapeutique du Patient. Donc bien que les
résultats soient intéressants, ces professionnels peuvent avoir une vision tronquée de l’ETP et
retourner également une image réduite de l’attitude éducative.
Pour mettre en lumière plus explicitement les différentes dimensions de l’attitude éducative et en
obtenir une approche globale, il y a un besoin de se centrer sur des professionnels de santé entraînés
à l’ETP qui partagent une vision élargie des attitudes. Une approche plus qualitative est également
requise pour cette exploration. A notre meilleure connaissance, une seule étude de Mikkonen et
Hynynen (2012) a exploré d’une manière ouverte les perceptions des professionnels de santé qui
avaient reçu un cours d’éducation thérapeutique du patient online. Les résultats de cette étude ont
montré l’importance de la reconnaissance par les professionnels de santé de l’égalité entre les patients
et les soignants, le besoin de soins centrés sur le patient et le rôle d’accompagnement que les
professionnels de santé ont à faire dans le self-management. Les perspectives de cette étude appellent
à de nouvelles investigations pour mieux caractériser l’attitude éducative tout en les contextualisant
dans les situations dans lesquelles elles sont exprimées. L’intérêt d’avoir un groupe de professionnels
de santé en formation est leur naïveté, leur honnêteté et leur motivation comme participants à ce type
d’étude.
3.4.
Conclusion
Si les formations en ETP tendent à se développer les dernières années, une réflexion approfondie sur
la qualité s’impose. La conception et la mise en œuvre de formations en ETP ne s’improvisent pas et
doivent faire l’objet d’une réelle ingénierie s’appuyant notamment sur les données les plus récentes
de la recherche dans le champ de l’ETP.
Les enjeux actuels de la formation en ETP sont multiples, notamment assurer sa diffusion la plus large
aux acteurs de la santé et réfléchir sur ce qui y est traité, soit les contenus de la formation.
46
Chapitre 3. De la formation en ETP vers le développement d’une attitude éducative
Cette deuxième proposition est importante pour assurer un réel contenu aux notions véhiculées dans
les programmes de formation et ainsi éviter l’utilisation de mots « valise », soit des mots qui
n’appellent aucun contenu spécifique.
Les constats sur le manque de littérature scientifique disponible sur ce sujet autorisent et devraient
stimuler la recherche ou la communication des travaux et expériences existant dans ce domaine.
Dans l’éventail des recherches à mener, l’attitude éducative est certainement un axe prioritaire à
considérer puisque les modèles relatifs à la psychologie de la santé montrent depuis longtemps que
les comportements d’un individu possèdent un ancrage profond dans le monde des pensées et
croyances de ce même individu.
Les formations en ETP qui visent le développement des compétences pour dispenser l’ETP ne peuvent
nier la nécessité de travailler cette attitude éducative. Aussi bonne une formation soit-elle sur le plan
de l’apprentissage des connaissances et savoir-faire techniques, si elle ne prend pas en considération
cette dimension attitudinale, le risque est que la mise en œuvre de la compétence soit dénaturée de
son sens profond, voire même considérée comme non acquise puisqu’il lui manque une composante
essentielle. On pourrait alors être confronté à des dérives telles que, par exemple, le fait que le
diagnostic éducatif soit réduit à une checklist d’items à cocher sur un ordinateur, dénaturant l’essence
même de l’action devant mener à une meilleure connaissance de l’individu, de ses besoins et de ses
souhaits.
CHAPITRE 4
Chapitre 4.
4.1.
Matériel et méthodes
Introduction
Sur base de l’argumentaire scientifique présenté dans les chapitres précédents, ce chapitre précise la
contribution de cette thèse dans le champ d’investigation concerné ainsi que les choix
méthodologiques posés pour y répondre. Il n’est pas question de traiter des méthodes spécifiques
développées pour répondre à chacun des objectifs précités. Pour ce faire, le lecteur est renvoyé à la
Partie 2 relative à la compilation des articles. Il s’agit ici de rendre compte des lignes directrices
méthodologiques qui ont guidé l’ensemble du travail de recherche. Sont présentés : la finalité de la
recherche, la population ciblée, le design général, les objectifs spécifiques, l’approche méthodologique
et les aspects éthiques et réglementaires.
4.2.
Finalité
La recherche doctorale porte sur la compréhension des meilleurs moyens, tenant compte du contexte
local, pour favoriser l’intégration de l’ETP dans les pratiques des professionnels de santé impliqués
dans la prise en charge de l’obésité. Ainsi, la présente thèse vise à contribuer au développement d’une
ETP de qualité dans les pratiques des professionnels de santé prenant en charge des patients obèses,
et plus largement atteints de maladies chroniques.
4.3.
Population d’étude
Les travaux de recherche ont porté sur la triade : patient, soignant et entourage. Il faut entendre par
soignant, un professionnel de santé impliqué dans la prise en charge du patient obèse. Il s’agit donc
d’une entité hétérogène pouvant inclure différents types de professionnels (médecins spécialistes ou
47
48
Chapitre 4. Matériel et méthodes
généralistes, diététiciens, psychologues et infirmiers). La diversité des milieux d’intervention des
soignants est également prise en compte. Pour les patients, le public considéré cible les adultes. Pour
la famille ou l’entourage, il s’agit des personnes de référence/confiance désignées par le patient.
Par ailleurs, une délimitation géographique a également été posée. Notre choix a porté dans ce travail
sur une région d’étude, la partie francophone de la Belgique (Wallonie), caractérisée par l’absence de
cadre légal, laissant la place aux initiatives propres des acteurs impliqués. La recherche souhaite
s’inscrire dans le contexte local dans lequel les résultats étaient produits. Ce contexte local est
primordial car il réunit des acteurs de santé évoluant dans un même système, neutralisant ainsi les
effets liés aux différences dans l’organisation des services de santé (notamment entre niveaux régional
et fédéral). Ce choix est renforcé par le fait que l’ETP s’inscrit dans une démarche de soins préventifs
qui relève désormais des Régions pour la Belgique. Suite au transfert de compétences dans le cadre de
la dernière réforme de l’Etat belge (Service public de Wallonie, 2014), la Région Wallonne a hérité de
cette responsabilité.
4.4.
Design général
Une approche inductive et exploratoire a été privilégiée: les résultats de chaque étude ont alimenté
de nouveaux objectifs de recherche. Les différents objectifs de recherche se sont construits au fur et
à mesure de la lecture des premiers résultats et d’une confrontation aux données de la littérature. Les
résultats de ces différentes études ont permis de définir des objets de recherche plus précis pour aller
vers une compréhension de plus en plus fine et plus ciblée des processus à l’œuvre dans l’ETP.
Comme présenté à la Figure 4.1, deux questions de recherche principales ont guidé le travail qui s’est
organisé chronologiquement en 3 grandes phases exploratoires (A, B et C), s’étalant de 2010 à 2015 et
ayant répondu à 6 objectifs spécifiques (OS). Ces recherches ont permis la production de 8 articles
repris dans la Partie 2 de ce manuscrit.
Chapitre 4. Matériel et méthodes
49
Figure 4.1. Design général de la recherche doctorale
1) Etape exploratoire 1 : analyse du terrain (Figure 4.1, phase A)
Au vu de la situation du développement informel de l’ETP en Belgique, rappelée dans les chapitres
introductifs, mieux appréhender comment la prise en charge de l’obésité était vécue et souhaitée sur
le terrain, à travers le prisme de l’ETP, s’imposait. L’interrogation générale de départ consiste à mieux
comprendre comment les acteurs fonctionnent autour de la prise en charge de l’obésité. La première
question de recherche a été formulée comme suit :
Quelle est l’intégration actuelle et souhaitée de l’ETP dans les pratiques professionnelles et la
relation de soins dans le domaine de l’obésité qui réponde aux besoins et attentes des différents
acteurs (y compris les patients et leur entourage) de la prise en charge?
50
Chapitre 4. Matériel et méthodes
Cette question de recherche a été déclinée en 3 objectifs spécifiques (OS) :
OS1 : Explorer la perception des pratiques éducatives des professionnels de santé impliqués dans la
prise en charge des patients obèses en Wallonie
Approcher les pratiques éducatives à travers les perceptions des pratiques existantes est une manière
d’apprécier les manques, les besoins, les leviers, … des pratiques actuelles en la matière, d’apprécier
l’ampleur des efforts à fournir pour atteindre les standards nouveaux et de tirer des recommandations
enracinées dans les pratiques. Il s’agit d’un état des lieux préalable à des investigations
complémentaires.
OS2 : Explorer les représentations, valeurs, besoins et attentes de la population générale vis-à-vis du
poids en fonction de la catégorie d’IMC des individus
Le point de vue exprimé par les patients a été croisé à celui des soignants vis-à-vis de leurs attentes,
besoins et vécu de la maladie, et ce en fonction de la catégorie d’IMC des individus.
OS3 : Analyser la dynamique relationnelle entre « patient, soignant et entourage » à travers la
comparaison des représentations individuelles et attribuées de chacun des acteurs vis-à-vis des
attentes et besoins de prise en charge dans le domaine de l’obésité
Alimentée par les enseignements des précédents travaux, une troisième étude a été menée
permettant d’investiguer, de manière originale, les représentations individuelles (« ce que je pense
de… ») et attribuées (« ce que je pense que l’autre pense de… ») de ces acteurs vis-à-vis des attentes
et besoins relatifs à la prise en charge de l’obésité. Considérant l’entourage comme le troisième acteur
incontournable, l’étude a intégré ce troisième acteur.
2) Etape exploratoire 2 : focalisation sur la formation en ETP (Figure 4.1, phase B)
La première phase exploratoire a permis de dégager les facteurs inhibiteurs et facilitateurs de
l’intégration d’une démarche d’ETP dans la relation de soins, sur base d’une analyse de terrain selon
la perception des acteurs. De ces résultats, confrontés et étayés par la littérature scientifique, a émergé
le besoin de développer la formation en ETP pour les professionnels de santé. La seconde question de
recherche a ainsi été formulée :
Quelles sont les conditions d’une formation qui favorisent l’intégration de l’ETP dans les pratiques
des professionnels de santé prenant en charge les patients obèses?
Chapitre 4. Matériel et méthodes
51
Cette question de recherche a été déclinée en 2 objectifs spécifiques :
OS4 : Identifier et analyser les besoins en ETP exprimés par des professionnels de santé impliqués dans
la prise en charge des patients présentant une obésité
Il s’agit de partir de la demande en formation des professionnels, autrement dit d’identifier
l’expression de leur besoin, afin d’ancrer le processus dans la vie quotidienne des professionnels.
Roegiers, Wouters et Gerard (1992) reprennent l’idée de Barbier et Lesne (1977) selon laquelle il existe
deux types de besoins de formation : les besoins objectifs qui reflètent la nécessité sociale ou naturelle
et les besoins subjectifs qui reflètent la perception qu’en ont les acteurs concernés, à savoir, dans le
cas présent, les professionnels de santé. Aussi, il peut y avoir un écart entre ce vers quoi veut tendre
un processus de formation de manière idéale (les référentiels de compétences) et la perception ou les
attentes qu’en ont des professionnels de santé. Il devient alors nécessaire de prendre en considération
quels sont les besoins perçus afin de créer la motivation et susciter l’intérêt chez les professionnels de
santé pour s’ouvrir à l’ETP dans toute sa complexité.
OS5 : Définir un référentiel de co-compétences patients/soignants en ETP
Le travail d’identification de la demande ne pouvant suffire à lui seul pour définir des formations visant
le développement des pratiques professionnelles, il a été nécessaire de se pencher sur les objectifs
poursuivis par une formation qui vise l’évolution des pratiques professionnelles en ETP. En parallèle à
l’identification des besoins exprimés, un travail d’exploration de la littérature scientifique a été réalisé
pour déterminer les objectifs d’une telle formation en ETP, exprimés en termes de compétences.
L’originalité de ce travail a consisté à rapprocher les compétences en ETP attendues chez les soignants
avec leur finalité, c’est-à-dire les compétences attendues chez les patients.
3) Etape exploratoire 3 : caractérisation de l’attitude éducative (Figure 4.1, phase C)
Les résultats obtenus relatifs aux deux premières phases exploratoires ont mis en évidence le besoin
d’approfondissement d’un élément émergent considéré comme fondamental d’un processus de
formation en ETP : l’attitude éducative. Tant l’exploration de la littérature scientifique que les résultats
obtenus dans les premières études, soulignent l’importance à accorder aux éléments qui sous-tendent
les actions dans lesquelles les soignants sont engagés (par exemple les valeurs, la signification et
l’importance que les professionnels de santé portent à leur activités, leur rôles et objectifs de la prise
en charge). Découlant des résultats des travaux menés précédemment et permettant d’affiner les
réponses aux deux questions de recherche posées, l’objectif ultime posé dans ce travail était de :
OS6 : Caractériser l’attitude éducative comme objet d’apprentissage des formations en ETP
52
4.5.
Chapitre 4. Matériel et méthodes
Méthodologie : une approche majoritairement qualitative
Il a toujours été question de mieux comprendre les processus de prise en charge autour de l’obésité à
la lueur des principes de l’ETP. Il s’agit d’une analyse approfondie des perceptions, représentations,
vécus et besoins des individus et non pas d’une quantification des activités proposées. Il s’agit de mieux
comprendre pour mieux intervenir.
Dans cette visée compréhensive, l’approche qualitative est recommandée (Pope et Mays, 2006 ;
Mucchielli, 2009; Miles et Huberman, 2003).
Aussi, ce mode d’approche a été privilégié pour la majorité des recherches menées, leur attribuant un
certain nombre de caractéristiques:
(1) L’approche qualitative poursuit « un intérêt central pour la signification donnée par les acteurs aux
actions dans lesquelles ils sont engagés ». En d’autres termes, il s’agit de percevoir les réalités
subjectives des individus, soit le sens qu’ils donnent aux actions dans lesquelles ils sont engagés.
(2) L’étude des personnes se réalise dans leur milieu naturel, en contexte réel de vie ; ce qui signifie
qu’on interroge les acteurs sur des extraits de leur vie quotidienne et qu’on ne crée pas de situation
expérimentale.
(3) Les résultats ne se veulent pas généralisables. Ils sont contextualisés et concernent l’échantillon
dont les informations sont issues. Conformément à l’approche qualitative, l’échantillonnage a été
réalisé de façon non probabiliste mais une recherche de diversité dans les profils des répondants
a été opérée afin d’offrir une richesse maximale dans les réponses apportées aux différentes
questions de recherche (Miles et Huberman, 2003).
(4) Le discours des individus constitue le matériau de base pour la collecte et le traitement des
données. Wolcott (1990) reconnait 3 grands modes de recherche qualitative : l’observation,
l’interview et l’analyse documentaire. La stratégie d’interview a été privilégiée puisqu’il s’agissait
de mieux comprendre le sens que portent les individus aux actions entreprises. Grâce à une
véritable posture d’empathie (dans son acceptation moderne, telle que décrite par Rogers (2005)),
le chercheur qualitatif tente de se rapprocher au plus près de la réalité vécue par les personnes
qu’il interroge, d’entrer dans son propre cadre de référence en essayant de ne pas se laisser
envahir par ses propres conceptions et représentations sur le sujet abordé.
(5) L’intérêt dans les recherches de nature qualitative consiste à croiser les regards des différentes
parties prenantes. Fortin et Gagnon (2016) parlent à ce titre de triangulation, entendue comme
l’emploi d’une combinaison de méthodes et de perspectives permettant de tirer des conclusions
valables à propos d’un même phénomène.
Chapitre 4. Matériel et méthodes
53
Une seule recherche s’est inscrite dans une dimension quantitative interrogeant toutefois des
indicateurs qualitatifs à travers la perception des personnes obèses de leur vécu de la maladie et de
leurs attentes.
4.6.
Validité des données
Au cours des dernières années, la recherche qualitative a gagné en termes de validité grâce
notamment à la publication de nombreux guidelines qui ont rendu possible une garantie de qualité et
de rigueur scientifique dans la recherche (O'Brien et al, 2014 ; Mays et Pope, 2000 ; Malterud, 2001).
Ceci a permis à la recherche qualitative de s’immiscer dans les communautés scientifiques de
nombreuses disciplines, notamment en santé publique où la recherche qualitative est aujourd’hui
largement reconnue et utilisée (Pope et Mays, 2006).
Divers critères de qualité ont été poursuivis afin d’assurer à la recherche tout la validité requise.
Validité interne
Lors de la collecte des données, soit les interviews, un certain nombre de critères ont été poursuivis
pour contrôler les effets du chercheur : une attitude empathique et d’ouverture de la part du
chercheur ; une curiosité suffisante pour montrer un intérêt sincère au discours de la personne ; une
mise en confiance des participants en leur montrant l’importance de leurs opinions ; un évitement de
tout jugement de valeur ; une non induction des réponses via la formulation de question les plus
neutres possibles et ouvertes ; la production d’un guide d’entretien pour chacune des études et la
formation des enquêteurs à leur utilisation, un nombre limité de questions et une utilisation souple
des guides d’entretien.
Lors de l’analyse des données, plusieurs stratégies de validation des résultats ont été appliquées : une
retranscription intégrale des discours a été réalisée ; une distinction entre la présentation des résultats
et la discussion a été opérée ; la voix des répondants a été conservée via des extraits de leur discours
(verbatim) ; les faits surprenants ont été traqués pour éviter, comme l’appelle Quivy et Van
Campenhoudt (1995), la recherche de l’illusion de la transparence, soit la confirmation des hypothèses
propres au chercheur; une triangulation dans la lecture des résultats a été opérée grâce à l’analyse
menée conjointement par des chercheurs indépendants et de disciplines variées.
Un cadre théorique a été déterminé : la définition de l’ETP et la manière de la considérer ont été
décrites dans le chapitre 3, qui doit ainsi être considéré comme le chapitre de référence pour
déterminer l’angle d’approche théorique des travaux de recherche. Cette description de la vision de
54
Chapitre 4. Matériel et méthodes
l’ETP permet également de répondre au critère de réflexivité, c’est-à-dire à la description des éléments
susceptibles d’avoir influencé la collecte ou l’analyse des données (Malterud, 2001).
Validité externe
Se pose ici la question de la portée des résultats obtenus. Les résultats proposés ci-après ne se veulent
pas généralisables ni représentatifs de la population ciblées mais peuvent tout au plus être considérés
comme transférables à des échantillons qui disposent de contextes similaires à ceux proposés dans
nos études, notamment en termes de non-reconnaissance de l’ETP au niveau politico-légal et de
l’organisation des services de santé, du point de vue de la prise en charge de l’obésité (Chapitres 1 et
2).
4.7.
Aspects éthiques et réglementaires
Le consentement libre et éclairé de chaque acteur a été apporté pour chaque recherche menée.
Aucune pression n’a été exercée sur les participants. Il a bien été expliqué que la participation ou non
aux enquêtes, ne modifiait en rien les processus de soins. La participation aux études était donc
volontaire et libre de toute contrainte.
Le Comité d'éthique Hospitalo-Facultaire Universitaire de Liège a été sollicité pour les études les plus
sensibles et délicates. Chaque protocole soumis a reçu un avis favorable.
Les informations collectées ont été rendues anonymes dès l’étape de retranscription intégrale des
entretiens. Le contenu des informations a été conservé de manière confidentielle par l’investigateur
principal. Les documents sont conservés de manière sécurisée.
En ce qui concerne la diffusion des résultats, des précautions particulières ont été prises afin qu’aucun
participant ne puisse être identifié. Une attention particulière a été portée dans les diverses études
menées pour éviter la stigmatisation de la personne obèse. En effet, le recrutement des personnes
obèses peut être considéré comme à haut risque au vu des conséquences physiques et mentales de la
stigmatisation de ces individus (Puhl et Heuer, 2009 et 2010). Pour ce faire, nous avons privilégié une
approche volontariste des participants : ce sont les personnes qui se considèrent en surpoids ou
obèses qui sont venues vers nous et pas l’inverse. Les messages pour favoriser le recrutement étaient
rédigés de manière à ne pas blesser les personnes mais en les invitant à s’exprimer s’ils avaient des
problèmes de poids. Cette attention particulière apportée à la non-stigmatisation a d’ailleurs fait
l’objet d’un article de méthodologie dans la revue Quality of Life Research (cf. Partie 2 – Compilation
d’articles, Article 2).
Chapitre 4. Matériel et méthodes
4.8.
55
Conclusion
Il résulte de la démarche de recherche proposée ci-avant une compilation de huit articles. Ces articles,
de prime abord, hétérogènes selon les différentes disciplines auxquelles les études empruntent des
éléments conceptuels et des approches méthodologiques sélectionnées, ont permis une lecture
plurielle du phénomène étudié. L’ETP est interdisciplinaire et exige la contribution d’une série de
disciplines différentes concourant à faire de l’ETP une réelle plus-value aux soins de santé. Le
phénomène étudié est complexe et appelle une lecture plurielle du chercheur.
Ce chapitre donne également un éclairage général sur la manière dont les informations ont été
collectées et traitées. Dans le décours du travail, l’accent a été mis sur la rigueur afin de satisfaire aux
critères de validité de la recherche qualitative.
L’objet de ce travail de rédaction consiste bien à proposer une synthèse qui rapproche ces différents
travaux et qui en réalise une lecture globale. Aussi, si la lecture de chaque étude peut être éclairante
en soi, les 8 articles renvoient vers un tout, une recherche de sens en lien avec les objectifs de cette
thèse.
CHAPITRE 5
Chapitre 5.
Principaux résultats
Introduction
Ce chapitre présente, étude par étude, les résultats principaux de la partie empirique du travail de
recherche.
Les études sont présentées en conservant la même structure de présentation, à savoir une fiche
synthétique qui reprend : l’objectif spécifique – le type de recherche – l’outil de collecte des données
– les paramètres étudiés – la population et l’échantillon d’étude – la méthode d’analyse – les
principaux résultats.
L’intérêt de ce travail de résumé consiste à donner au lecteur une vue d’ensemble des résultats. Pour
approfondir et affiner cette présentation, le lecteur est renvoyé à la Partie 2 - Compilation d’articles.
Les résultats de ces travaux de recherche seront discutés de manière globale dans le prochain chapitre.
57
58
Chapitre 5. Principaux résultats
Objectif spécifique 1
Explorer la perception des pratiques éducatives des professionnels de santé impliqués dans la prise en
charge des patients obèses en Wallonie
Méthode
Etude qualitative exploratoire
Outil de collecte des données
Guide d’entretien semi-structuré basé sur les recommandations de bonnes pratiques de la HAS
Paramètres étudiés
Définition de l’ETP – Structuration des activités (diagnostic éducatif – établissement des objectifs –
planification et mise en œuvre des activités – évaluation – collaboration interprofessionnelle – implication de
l’entourage – facteurs adjuvants et inhibiteurs de la prise en charge)
Population et échantillonnage
Professionnels de santé des équipes hospitalières et des médecins généralistes intervenant dans l’éducation
des patients diabétiques et/ou obèses, adultes et/ou adolescents sur le territoire des provinces de Liège et de
Luxembourg (Belgique).
Echantillon raisonné de 62 professionnels hospitaliers (20 infirmières, 18 diététiciens, 12 diabétologues,
7 psychologues, 5 pédiatres) issus de 16 équipes différentes, et de 20 médecins généralistes.
Analyse
Analyse thématique
Principaux résultats
Concept d’ETP flou et polysémique pour les professionnels de santé interrogés
Manque de formalisation des activités d’ETP
Démarche d’ETP réduite à une éducation liée essentiellement à l’explication de la maladie, ses facteurs
de risque, ses complications et le traitement de la maladie
Prise en charge éducative essentiellement liée à la dimension physique et objective de la santé
Diagnostic éducatif très fréquemment résumé à une anamnèse en lien avec le domaine du soignant Objectifs et évaluation du patient correspondant aux normes biomédicales attendues
Stratégie éducative centrée sur l’information du patient
Manque de reconnaissance et de planification des activités éducatives dès lors diluées dans les séances
de soins
Patient peu mobilisé tout au long du processus éducatif : les patients sont suivis grâce à des consultations
d’informations et de conseils sur la maladie, sans réel développement de compétences et par conséquent
sans possibilité réelle d’évolution dans l’autonomie du patient par rapport à sa maladie
Evaluation rarement formalisée et/ou se résumant à des paramètres biologiques objectivables (IMC,
HbA1c)
Outils d’éducation réduits à des outils d’information
Pas de procédure de remédiation ou d’adaptation au patient si ce n’est la reprise de l’information
Entourage peu mobilisé/exploité par les soignants dans la relation de soins
Facteurs inhibiteurs perçus provenant des caractéristiques du patient (manque de motivation, de
compréhension, croyances erronées,…)
Collaboration entre professionnels réduite à la pluridisciplinarité : chaque professionnel mène ses actions
dans le domaine qui lui est propre en vue d’atteindre un objectif commun à tous : la norme médicale.
Pratique cloisonnée entre soignants, sans réel échange sur le patient
Article correspondant
Article 1 : Pétré B, Degrange S, Tittaferante S, Legrand C, Vanmeerbeek M, Froidcoeur X, Guillaume, M. Etat
des lieux des pratiques en éducation thérapeutique dans les institutions hospitalières et chez les médecins
généralistes – exemple dans la prise en charge du diabète et de l’obésité en Belgique. Santé publique. (sous
presse).
Chapitre 5. Principaux résultats
59
Objectif spécifique 2
Explorer les représentations, valeurs, besoins et attentes de la population générale vis-à-vis du poids en
fonction de la catégorie de l’IMC des individus
Méthode
Etude quantitative descriptive basée sur un questionnaire online auto-administré
Paramètres étudiés
caractéristiques de la méthode de recrutement
caractéristiques de la population répondante
évolution du taux de participation selon le moment de l’enquête
qualité de remplissage du questionnaire
source de connaissance de l’étude (comment les participants ont pris connaissance de cette étude)
caractéristiques sociodémographiques des répondants
qualité de vie perçue par les individus : santé perçue et évaluation subjective de 14 items en lien avec la
santé physique et psychosociale des individus
perception des régimes
objectifs de prise en charge de leur poids (poids souhaité – rêvé – décevant)
inscription dans une démarche par rapport à leur poids
distorsion de l’image corporelle
importance accordée au regard des autres
Population et échantillonnage
Toute personne désireuse de s’exprimer sur son poids. Echantillonnage non probabiliste sur base d’une
participation libre et spontanée
Méthode de recrutement : campagne de communication multimédias en 3 niveaux :
1) le premier niveau consistait en un questionnaire online comprenant 31 questions (la majorité sous forme
de QCM) qui pouvait être complété rapidement (temps estimé 15 minutes) et anonymement.
2) Le second niveau est constitué d’un ensemble de documents d’information (flyers, posters et courrier)
permettant d’assurer la promotion du site web à travers l’ensemble de la région concernée par l’étude.
3) Le troisième et dernier niveau concerne le réseau d’acteurs établis pour relayer l’étude : hôpitaux,
centres de soins, médecins généralistes, communes, institutions publiques et privées, associations de
patients, services d’assurance santé.
Finalement, la campagne de communication a démarré par une conférence de presse réalisée lors de la
journée européenne de lutte contre l’obésité. Cette conférence a été couverte par les radios et télévisions
locales/nationales ainsi que par les journaux écrits et les médias sociaux.
Analyse
Distribution des répondants selon le temps, leurs caractéristiques démographiques et socioéconomiques, et
selon le nombre de réponses manquantes dans le questionnaire online.
Traitement statistique des données :
Etudes des différents paramètres d’étude en fonction de l’IMC des répondants
Recherche de l’effet modérateur de la distorsion corporelle et de l’importance accordée au regard de
l’autre sur la relation entre IMC et Qualité de vie
Principaux résultats
4155 sujets ont participé à l’étude : les femmes sont deux fois plus nombreuses, 12,5% des sujets ont un
IMC normal, 32,2% sont en surpoids et 55,3% sont obèses. L’âge moyen est 46,3 ans. 56,7% ont un
diplôme de l’enseignement supérieur et 43,3% ressentent des difficultés financières dans leur ménage.
plus d’un quart de l’échantillon final a participé dans les 5 premiers jours qui ont suivi la conférence de
presse pour le lancement de l’étude.
42,8% des participants déclarent avoir connu l’étude grâce aux médias, 23,1% via un professionnel de
santé ou un centre de santé, 14,7% via leur compagnie d’assurance santé et les 20% restants via d’autres
sources.
60
Chapitre 5. Principaux résultats
-
plus de 80% des sujets ont rempli le questionnaire online de manière complète ou avec seulement une
seule réponse manquante.
la catégorie de l’IMC influence l’ensemble des paramètres étudiés :
 le risque de rapporter une mauvaise santé est quasi sextuplé pour une obésité de classe II par rapport
à une population normopondérale ;
 les participants avec des classes d’IMC élevées rapportent plus de problèmes physiques et
psychosociaux que les autres. Les individus normopondéraux ou en surpoids rapportent davantage
de problèmes psychologiques alors que la situation s’inverse pour les sujets extrêmement obèses ;
 la proportion de sujets qui ont une vision négative des régimes augmente en fonction de la classe
d’IMC, et ce quelle que soit la caractéristique étudiée (notamment régime perçu comme inefficace,
frustrant,…) ;
 les objectifs de perte de poids (en termes de % du poids actuel) augmentent de manière irréaliste.
Le pourcentage de perte de poids atteignant respectivement 34% et 43% (poids souhaité et rêvé)
pour les obèses de classe 3 ;
 finalement, les individus sont d’autant plus découragés à entreprendre une démarche vis-à-vis de
leur poids que leur IMC augmente.
la relation entre l’IMC et la qualité de vie (que ce soient les aspects physiques, psychosociaux ou globaux)
(indiquée par le coefficient de régression) est renforcée quand la relation est ajustée aux paramètres de
distorsion corporelle et d’importance accordée au regard des autres  il existe un effet modérateur de
la distorsion de l’image corporelle et de l’importance accordée au regard des autres sur la relation entre
l’IMC et la qualité de vie.
Articles correspondants
Article 2 : Pétré B, Donneau AF, Crutze C, Husson E, Scheen A, Guillaume M. Obese subjects involvement in a
population-based survey: the use of information and communication technologies (ICT) to avoid
stigmatization. Qual Life Res. 2015;24:1131-5.
Article 3 : Crutze C, Pétré B, Streel S, Donneau AF, Albert A, Dardenne N, Scheen A, Husson E et Guillaume M.
Etude populationnelle de la compréhension des difficultés dans la prise en charge de l’obésité par
l’exploration des perceptions relatives à l’excès de poids. Revue d'Epidémiologie et de Santé Publique.
(soumis).
Article 4: Pétré B, Scheen A, Ziegler O, Donneau AF, Dardenne N, Husson E, Albert A, Guillaume M. Body image
discrepancy and subjective norm as moderators of the relation between BMI and quality of life. Journal of
Patient Preference and Adherence. (soumis).
Chapitre 5. Principaux résultats
61
Objectif spécifique 3
Analyser la dynamique relationnelle entre patient, soignant et entourage à travers la comparaison des
représentations individuelles et attribuées de chacun des acteurs vis-à-vis des attentes et besoins de prise
en charge dans le domaine de l’obésité
Explorer les enjeux liés aux représentations de chaque acteur de la prise en charge de l’obésité (patient,
soignant et entourage) via l’étude des représentations personnelles (« qu’est-ce que je pense de ») et
attribuées (« qu’est-ce que je pense que l’autre pense de ») de chaque acteur par rapport à l’obésité et à la
prise en charge, la recherche de discordances ou concordances au sein des représentations de la triade, la
communication ou non de ces représentations entre les acteurs, et les éventuelles conséquences du système.
Méthode
Approche qualitative par entretien individuel basé sur la technique du récit de vie : chaque sujet interrogé
devait répondre à la question « Racontez-moi l’histoire de votre poids » (pour les individus obèses ou
« Racontez-moi l’histoire du poids de M./Mme XX » pour le membre de l’entourage ou le soignant.
Paramètres étudiés
Représentation de la maladie et impact perçu sur la vie quotidienne - Représentation du traitement - Rôle de
chacun des acteurs - Attentes quant à la prise en charge
Population et échantillonnage
La population d’étude consiste en des triades composées :
d’un adulte en surpoids/obèse depuis au moins un an, quel que soit le traitement suivi ;
d’un membre de la famille désigné par le patient (conjoint(e)) ;
d’un soignant de référence également choisi par le patient (médecin généraliste, médecin spécialiste, ou
diététicien).
Echantillon raisonné sur base de la variation des profils des répondants.
Les patients ont été renseignés au départ par des associations de patients ou des professionnels de santé.
Analyse
Analyse thématique sur le matériau retranscrit - Thèmes émergents du discours des individus
Les représentations individuelles et attribuées des acteurs de chaque triade ont été comparées.
Principaux résultats
- Echantillon final composé de 5 triades adultes, soit 15 personnes interviewées.
- Manque de partage des représentations, tant individuelles qu’attribuées, au sein des protagonistes de la
triade patient, soignant et entourage ; Périmètre de discussion restreint autour de la dimension
biomédicale du problème, prescrit par la norme sociale et implicitement admis par le patient.
- La perte de poids à travers l’activité physique et l’alimentation saine apparait comme l’objectif de la
relation thérapeutique par le soignant alors que le patient le considère comme un moyen pour améliorer
sa qualité de vie.
- La discussion est restreinte autour de la pathologie instrumentalisée, devenant objet au centre des prises
en charge : le patient se sent peu intégré comme personne à part entière dans la prise en charge et le
soignant est tenu à l’écart des contraintes quotidiennes vécues par le patient ; d’où un risque
d’essoufflement de la prise en charge sur le long terme.
- Les familles/entourages sont peu impliqués dans la relation thérapeutique et sont mis dans l’incapacité
de prendre une place active dans le processus.
- Si les professionnels de santé en sont conscients, ces éléments sont pourtant peu intégrés dans la
discussion lors des rencontres entre les acteurs.
- Cette situation peut conduire à un sentiment d’impuissance chez les acteurs de la prise en charge.
Article correspondant
Article 5 : Degrange S, Legrand C, Pétré B, Scheen A, Guillaume M. Représentations individuelles et attribuées
de la prise en charge de l’obésité au sein de la triade patient/soignant/famille. Médecine des Maladies
Métaboliques. 2015; 9:559-565.
62
Chapitre 5. Principaux résultats
Objectif spécifique 4
Identifier et analyser les besoins en ETP exprimés par des professionnels de santé impliqués dans la prise
en charge des patients présentant une obésité
Méthode
Approche qualitative par la méthode des groupes nominaux.
Paramètres étudiés
Besoins de formation exprimés par les professionnels de santé pour améliorer leur approche des patients
diabétiques et/ou obèses et pour tenir compte de leur diversité et les aider à intégrer de façon durable les
adaptations nécessaires dans leurs habitudes de vie et leur(s) mode(s) de vie.
Population et échantillonnage
Professionnels de santé (médecins généralistes, diététiciens et infirmiers) de la Grande Région. Les MG ont
été rencontrés lors d’une des réunions pluriannuelles de formation continue. Les infirmiers et diététiciens ont
été recrutés soit dans les services hospitaliers ou extrahospitaliers spécialisés dans la prise en charge des
patients diabétiques ou obèses, soit à travers les associations professionnelles, ou encore lors de formations
continues.
Analyse
Les besoins exprimés par les participants ont été classés dans les catégories du référentiel de compétences
pour dispenser l’ETP proposé par l’INPES (2013).
Le classement des propositions a été réalisé par deux chercheurs, de manière indépendante. Les conflits
d’interprétation ont été résolus avec le concours d’un troisième chercheur, jusqu’à obtention d’un consensus.
Les indices de priorité et de popularité ont été calculés conformément à la méthode des groupes nominaux.
Principaux résultats
Quinze groupes nominaux regroupant un total de 105 professionnels de santé, médecins généralistes (MG)
(n=57), diététiciens (n=18) ou infirmiers (n=30), répartis entre les 3 régions, ont été réalisés.
Parmi les besoins exprimés par les PS, 52% des votes ciblent des compétences relationnelles, 30% des
compétences relatives aux techniques biomédicales et pédagogiques et 11% celles liées à l’organisation et la
coordination. Sept pourcents des propositions sont hors-champ des catégories de l’INPES. Plus
spécifiquement, parmi les compétences jugées prioritaires, celles liées à la mise en place d’une relation
singulière avec le patient émergent : écoute et compréhension, échange et argumentation,
accompagnement. En revanche, une moindre demande est exprimée concernant la capacité à appréhender
l’environnement du patient, ce qui ne sera pas sans poser problème par rapport aux critères de bonnes
pratiques.
Les résultats sont homogènes entre les régions, mais semblent plus variables dans les différents groupes de
professionnels. La reconnaissance de l’ETP par la législation française n’influence pas de façon majeure les
données.
Si les professionnels de santé sont conscients d’un besoin de formation dans certaines dimensions
psychologiques et pédagogiques, il serait nécessaire de les sensibiliser à l’acquisition d’autres compétences
complémentaires.
Article correspondant
Article 6 : Pétré B, Ketterer F, Vanmeerbeek M, Scheen A, Lair ML, Ziegler O, Böhme P et Guillaume M. Etude
transfrontalière des besoins de formation en Education Thérapeutique du Patient souffrant de diabète et/ou
d’obésité pour le personnel médical et paramédical : enquête par méthode du groupe nominal. Presse
Médicale. (sous presse).
Chapitre 5. Principaux résultats
63
Objectif spécifique 5
Définir un référentiel de co-compétences patients/soignants en ETP
Méthode
Analyse de la littérature et travail de modélisation
Paramètres étudiés
compétences du patient en ETP
compétences du soignant en ETP
modèle des facteurs de production d’un comportement
logique temporelle
Population et échantillonnage
6 articles majeurs de langue française précis et fréquemment cités dans la littérature, portant sur les
compétences génériques des patients et des soignants en ETP, ont été sélectionnés sur base d’un consensus
entre deux chercheurs.
Analyse
Les listes de compétences ont été comparées et les doublons ont été supprimés.
Les compétences patients ont été organisées selon une double logique : verticale selon le modèle de facteurs
de production de la conduite (ASCID, soit les ressources à mobiliser) et horizontale selon la temporalité des
compétences à acquérir.
Les compétences soignants, définies de manière transversale, ont été intégrées dans les compétences des
patients.
Principaux résultats
Les compétences des soignants peuvent être résumées sous l’acronyme AADOPEASE :
(Accueillir le patient, Annoncer la mauvaise nouvelle, réaliser le Diagnostic éducatif et négocier les Objectifs,
Planifier les activités d’Enseignement/Apprentissage, réaliser le Suivi de la conduite et Evaluer avec le patient
l’ETP).
Les compétences des patients peuvent être organisées selon une logique horizontale et verticale :
horizontale : le premier temps correspond à la période de latence où l’activité principale du patient
consiste à gérer l’annonce de la maladie et à réorganiser ses valeurs et son image de soi. Le second temps
correspond au développement des compétences de sécurité qui lui permettent d’éviter de mettre sa vie
en danger. Le troisième temps correspond au développement des compétences d’adaptation pour
apprendre à vivre au mieux avec la maladie.
verticale : sept domaines ont été identifiés (affectivité – savoir-faire – cognition – image de soi – décision
– relationnel – matérialité/normes) qui constituent les différents facteurs de production de la conduite
d’un patient et ainsi autant de domaines d’intervention pour le praticien d’ETP.
Le lien entre les compétences soignants et patients est étroit. Par exemple, lors du diagnostic éducatif, le
soignant devra tenir compte des différents domaines d’intérêt (ASCID) du patient et reconnaitre la
temporalité dans laquelle se trouve le patient pour définir au mieux les objectifs d’apprentissage à un moment
donné.
Article correspondant
Article 7 : Pétré B, Guillaume M, Legrand C, Scheen A, Lair ML, Ziegler O and Leclercq D. Un synoptique des
co-compétences patients-soignants en éducation thérapeutique. Educ Ther Patient/Ther Patient Educ.
2014;6:10202.
64
Chapitre 5. Principaux résultats
Objectif spécifique 6
Caractériser l’attitude éducative comme objet d’apprentissage des formations en ETP
Méthode
Etude qualitative exploratoire sur base d’instruments inspirés d’enquêtes narratives.
Paramètres étudiés
L’attitude éducative entendue comme l’état d’esprit qui traduit (résulte de) la manière dont un individu
évalue des objets particuliers et qui va prédisposer à l’action, en l’occurrence les activités ou pratiques
d’éducation thérapeutique du patient. Plus précisément, il s’agit d’explorer les éléments qui la caractérisent.
Population et échantillonnage
Professionnels de santé engagés dans un processus de formation continue en ETP (sites de Liège et de
Nancy).Tous les participants de ces deux formations (n=33) ont pris part à la présente étude.
Analyse
Analyse thématique inductive. Découpage des corpus en unités de sens (verbatim). Regroupement des
verbatim et proposition d’une première grille d’analyse. Calcul du taux de fidélité interjuges à partir de la
première grille d’analyse. Précision de la grille d’analyse. Taux de fidélité interjuges satisfaisant. Classement
final. Traduction des propositions des participants sous forme d’énoncés de caractérisation de l’attitude
éducative. Retour vers les participants pour validation.
Principaux résultats
33 personnes ont participé à l’étude, essentiellement des femmes (n=29), diététiciennes (n=8) ou infirmières
(n=17), et travaillant en milieu hospitalier (n=28).
7 catégories d’assertion ont été identifiées lors de l’analyse. Ainsi, l’attitude éducative dans le champ de l’ETP
tend à faire reconnaitre :
la perception d’une modification de la relation au temps (la perspective de chronicité de la maladie
accompagnée d’une possibilité de mieux redéfinir les moments opportuns pour l’éducation, la nécessaire
prise de temps pour certaines activités essentielles telles que le diagnostic éducatif)
les bénéfices personnels professionnels de l’intégration de l’ETP dans les pratiques (motivation, efficacité
et capacité à agir)
les mécanismes psycho-sociaux sous-jacents à l’ETP (la reconnaissance de l’importance et de la gestion
des émotions du soignant et du patient dans la relation de soins et les mécanismes de projection
potentiels des objectifs et attentes vis-à-vis de la prise en charge)
le caractère professionnel de la pratique d’ETP (l’ETP nécessite des soignants compétents, formés, qui
ont intégré des modèles théoriques nécessaires à une mise en pratique optimale d’un processus d’ETP)
l’approche globale et interdisciplinaire nécessaire à l’ETP (nécessaire ouverture au modèle
« écobiopsychosocial » de la santé mobilisant un ensemble d’acteurs de manière interdisciplinaire)
la nature éducative sur laquelle se base le processus d’ETP (le rôle de soignant-éducateur que prend le
soignant et en face, le patient qui devient acteur reconnu dans sa capacité à faire des choix et à agir pour
se prendre en charge)
les enjeux éthiques liés à la relation de soins en ETP (la reconnaissance de l’être humain au cœur de la
relation, de la nécessité d’agir en partenaire de soins, sur base de critères de confiance, de nonjugement,
de respect de liberté et de singularité du patient).
Article correspondant
Article 8 : Pétré B, Gagnayre R, De Andrade V, Ziegler O, Guillaume M. Educative attitude in therapeutic
patient education : an exploratory approach! PLOS One. (soumis).
CHAPITRE 6
Chapitre 6.
6.1.
Discussion générale
Introduction
Les chapitres introductifs de cette thèse ont montré le caractère complexe de la prise en charge de
l’obésité, avec la plupart du temps des résultats décevants en termes de perte de poids durable,
pouvant conduire à une souffrance des acteurs de cette prise en charge. Comme le dit Poulain (2009),
l’obésité renvoie à un échec de notre société pour faire face à la maladie. Aussi, de nouvelles
propositions de prise en charge doivent être opérées, axées sur le développement de la santé et de la
qualité de vie des individus. Par ses caractéristiques et les principes qu’elle sous-tend, l’ETP constitue
un levier de changement important pour aider les acteurs de la prise en charge autour de l’obésité
(patient, soignant et entourage), pour redéfinir le moyen d’aborder et de considérer la maladie. L’ETP
dans cette thèse doit être considérée dans sa nature première, à savoir, qu’éduquer le patient
contribue à le soigner et prendre soin de lui ainsi qu’à sa qualité de vie, soit une ETP centrée sur
l’apprentissage du patient. Il ne s’agissait pas de s’interroger sur le « est-ce que cela marche ? », mais
sur le « comment cela marche-t-il ? ».
Les 3 phases exploratoires menées ont abouti à une série de résultats. Une lecture plus transversale
des résultats est à ce moment indispensable pour assurer une juste prise de recul et une recherche de
sens entre les résultats issus de ces différents travaux. Ce dernier chapitre se focalise sur les messages
principaux et leur mise en perspective avec la littérature scientifique.
65
66
6.2.
Chapitre 6. Discussion générale
Discussion
Dans un contexte marqué par l’absence de reconnaissance légale et financière de l’ETP, il n’était pas
attendu d’observer un développement de programmes d’ETP (comme c’est le cas en France suite à la
mise en place d’une politique d’ETP). Il s’agissait tout d’abord d’observer, indirectement puisque
s’appuyant sur le discours des acteurs, la réalité de terrain, les pratiques professionnelles et la relation
interpersonnelle thérapeutique afin d’identifier les aspects éducatifs qui s’en dégageaient.
6.2.1. Une rencontre impossible ?
Les résultats de l’enquête relative aux perceptions des pratiques des professionnels montrent que
celles-ci restent guidées par un modèle biomédical du soin, avec une approche aiguë d’une maladie
chronique. La stratégie de soins est prescriptive et non éducative, axée sur des indicateurs de résultats
cliniques répondant aux normes scientifiques (l’IMC) et laissant peu de place à l’expression des besoins
plus psychosociaux du patient. Finalement, une pratique cloisonnée entre intervenants a été observée.
Par ailleurs, l’enquête sur la perception et le vécu de l’obésité en population générale a montré que
les individus sont insatisfaits de cette offre de prise en charge et sont en souffrance. Les résultats
permettent d’affirmer que l’obésité affecte la qualité de vie des individus, rend une perception
négative des régimes et conduit à une forme de résignation à la maladie, ce qui est confirmé dans les
écrits de Lacroix et Assal de 2011. De plus, les individus se fixent des objectifs de poids irréalistes alors
que les recommandations de santé publique parlent d’un abaissement de 5 à 10% du poids (Tsigos et
al., 2008).
L’analyse de cas réalisée sur les triades renforce cette idée et va même au-delà. Si plusieurs études ont
pu démontrer l’intérêt d’une bonne communication entre le soignant et le patient en termes de
satisfaction et d’engagement des patients obèses dans le changement pour adopter des
comportements plus sains (Bennet et al., 2015 ; Gudzune et al., 2012), les études de type triades
apportent un éclairage original sur le défaut de partage des représentations des différents acteurs
basée sur une approche des comparaisons de représentations entre groupes interrogés. Les résultats
de ces études rendent compte d’un périmètre de discussion restreint entre les acteurs impliqués dans
la prise en charge, y compris l’entourage, et appellent à une communication plus authentique.
Si les professionnels de santé sont conscients des déterminants biopsychosociaux qui entourent la
maladie obésité, ce qui est conforme aux résultats de l’étude de Roussel, Libion et Deccache (2012),
ils se sentent démunis pour aborder ces éléments avec le patient et referment la prise en charge sur
les déterminants de mode de vie (alimentation et activité physique). Le patient, quant à lui, témoigne
Chapitre 6. Discussion générale
67
d’une vision où l’obésité affecte les éléments de sa vie et l’associe à l’ensemble des dimensions
biopsychosociales. Toutefois, lorsque le patient entre en contact avec le soignant, il ne s’autorise pas
à évoquer ces éléments et entre dans la zone de dialogue « autorisée » par la norme sociale selon
laquelle on s’adresse à son soignant pour des problèmes de santé limités à la dimension physique. Or,
Aujoulat (2007) appelle à ce que les professionnels de santé ouvrent un espace de rencontre et de
négociation, de mise à l’écoute qui tienne compte du contexte et des priorités de vie du patient. Cet
échange est nécessaire au vu des nombreux non-dits et de l’absence de représentations partagées
entre ces acteurs. L’entourage, quant à lui, est rendu incapable de prendre une réelle place active dans
le processus. Si les familles et l’entourage social sont autorisés à prendre part aux mesures d’hygiène
et de diététique conseillées, peu de travail est réalisé lorsqu’ils représentent un frein pour le patient
dans la gestion du poids. Leur rôle de ressource, quand bien même perçu par certains patients, n’est
pas souvent utilisé, ni renforcé par les soignants. Pourtant, ce rôle des familles, en tant que soutien
éducatif et psychologique des patients aux soins de longue durée, est souligné dans les
recommandations en ETP de l’OMS (1998). L’OMS indique que les membres de la famille doivent
comprendre les difficultés vécues par le patient et doivent réaliser que leur aide peut avoir une valeur
considérable pour le patient.
La situation est ainsi rendue difficile par l’absence de partage des objectifs de prise en charge, la santé
restant le but ultime pour les soignants tandis que les patients veulent tendre vers des objectifs de
poursuite d’une vie « normale », soit de qualité de vie (Brignon et Gallouj, 2011), et le manque de
moyens pour y arriver ; on prescrit sans soutenir et accompagner le changement.
La situation observée rend compte davantage d’une situation basée sur la recherche d’observance
plutôt que celle d’adhésion. Lamouroux, Magnan et Vervloet (2005) expliquent la différence entre les
deux notions : soit on s’intéresse aux conduites effectives des patients (on parlera alors d'observance
aux traitements), soit on s'intéresse aux facteurs psychosociaux impliqués dans les conduites de soin
(on parlera alors d'adhésion thérapeutique). Cette distinction entre observance et adhésion
transparait profondément dans le tableau des résultats observés dans notre étude, la relation
thérapeutique étant plutôt orientée sur les buts et comportements recherchés que sur ce qui explique
et détermine ces comportements.
Cette situation, qui renvoie alors à l’idée du bon et du mauvais patient suivant son degré de bon suivi
ou non des recommandations médicales (Lamouroux, Magnan et Vervloet, 2005), peut conduire à un
blocage et un sentiment d’échec dans la situation tels que rapportés dans les attitudes des soignants
et patients décrites dans les chapitres introductifs.
68
Chapitre 6. Discussion générale
De plus, Scheen et Giet (2010) indiquent que la notion d’adhésion reconnait le rôle actif du patient
dans le processus de soins. Dans la situation présentée, on est loin d’un travail du soignant qui vise à
renforcer les capacités du patient à prendre des décisions et agir pour sa santé, y compris sa qualité
de vie. Pourtant, c’est bien ce vers quoi la relation de soins doit aujourd’hui évoluer : l’objectif de cette
relation de soins ne peut plus se focaliser sur l’observance, c’est-à-dire le résultat aléatoire d’une
attente médicale liée à la prescription, mais bien sur un véritable processus d’appropriation par le
patient (Anderson et Funnell, 2010). Aussi, la position de Haynes et collègues (2002) est renforcée au
terme de ces premiers travaux : « accroître l'efficacité des interventions vis-à-vis de l’adhésion pourrait
avoir un impact beaucoup plus important sur la santé de la population que toute amélioration dans les
traitements médicaux spécifiques ». Ces constats sont d’autant plus vrais dans le contexte de la prise
en charge de l’obésité.
Si le tableau des pratiques décrit ci-avant est assez chaotique en termes d’ETP, il faut noter des
opportunités dans les déclarations des soignants qui peuvent être utilisées comme autant de leviers
de changement. Tout d’abord, il existe une réelle volonté de certains soignants de mettre en place de
nouvelles actions, ce qui témoigne d’une motivation au changement. La plupart des soignants citent
la nécessité d’un apprentissage chez le patient, et les mesures d’aide et de soutien s’y inscrivant, ce
qui est encourageant puisque ces activités constituent le cœur de l’ETP. Par ailleurs, il est observé, à
travers la réalisation d’anamnèses, des tentatives des soignants de s’approcher du contexte de vie et
de l’expérience du patient mais rapidement, par manque d’interdisciplinarité, la vision globale de l’être
humain devient segmentée selon le domaine spécifique dans lequel le soignant va mener ses activités.
Finalement, les difficultés déclarées par les soignants doivent être vues comme des opportunités :
l’ETP, en redonnant un moyen d’actions aux soignants et aux patients, participe à dépasser les
résistances et le sentiment de blocage ou d’impuissance évoqué par les professionnels de santé.
6.2.2. Vers d’autres objectifs et indicateurs de la prise en charge ?
Face à cette situation, les travaux d’exploration de la base de données de 4.000 sujets relative à
l’obésité ont permis de dégager des voies réelles de rencontre entre les acteurs.
Si les individus situent leurs objectifs de prise en charge dans une amélioration de leur qualité de vie,
de récentes études montrent qu’une diminution de perte de poids n’est pas associée, au niveau
populationnel, à une amélioration significative de la qualité de vie (Laxi et al., 2014 ; Döring, de Munter
et Rasmussen, 2015). Ce constat renforce la proposition de Fontaine et Barofsky (2001) qui tend à
orienter la prise en charge vers l’amélioration de la qualité de vie de l’individu en passant par d’autres
moyens que la réduction de l’IMC.
Chapitre 6. Discussion générale
69
Les résultats de notre étude sont révélateurs dans cette perspective puisqu’ils ont permis de mettre
en évidence l’existence de variables modératrices de la relation entre IMC et qualité de vie, à savoir la
distorsion de l’image corporelle et l’importance accordée au regard des autres. Ces deux variables ont
été considérées comme d’intérêt au vu de l’importante stigmatisation à laquelle les patients sont
soumis (Puhl et Brownell, 2001 ; Puhl et Heuer, 2010). Nos résultats sont conformes à ceux d’autres
études qui identifient d’autres variables de perception, telles que le sentiment de stigmatisation,
comme des éléments modérateurs de la relation entre IMC et qualité de vie (Vilhena et al., 2014). Ces
résultats suggèrent que l’amélioration de la qualité de vie, perçue comme un objectif prioritaire par
les individus, pourrait être soutenue à travers la modification des perceptions d’un individu sur son
image corporelle et le regard des autres. Toutefois, des études de type longitudinal demandent à être
réalisées pour confirmer cette hypothèse, ce qui pourrait déboucher sur la recommandation de
nouvelles cibles thérapeutiques, particulièrement intéressante en termes d’ETP.
En réponse à la première question de recherche rappelée en début d’encadré ci-après, nous pouvons
retenir les éléments suivants :
Quelle est l’intégration actuelle et souhaitée de l’ETP dans les pratiques professionnelles et la
relation de soins dans le domaine de l’obésité qui réponde aux besoins et attentes des différents
acteurs (y compris les patients et leur entourage) de la prise en charge?
L’ETP a été identifiée comme absente des pratiques de soins reposant sur un modèle de prise en charge
des patients obèses jugé insatisfaisant, tant par les patients que les professionnels de santé. La
situation nécessite une évolution importante, une migration du focus de la prise en charge du
symptôme aux déterminants.
L’ETP semble s’inscrire parfaitement pour répondre aux problèmes rencontrés en proposant un
dialogue, la construction d’une démarche basée sur un apprentissage du patient et orientée vers des
buts de santé et de qualité de vie (Saout, 2008). Comme le recommandent Jaffiol et collègues (2013) :
« Développer l'ETP, c'est donc le moyen le plus évident aujourd'hui pour que s'opère enfin la mutation
de notre système de santé dans le sens de la transition épidémiologique trop longtemps retardée vers
une prise en charge prioritaire et adaptée des maladies chroniques ».
Il s’agit ainsi d’ouvrir un espace de dialogue avec le patient lui permettant d’identifier, de manière
singulière, quels sont les objectifs du soin et les moyens à se donner. Si ce travail a permis d’identifier
certaines variables de perception pouvant constituer des objectifs de la relation éducative, nous
supposons, sur base de modèles existants (Golay, Lagger et Giordan, 2007), qu’il en existe d’autres
(notamment émotionnelles, cognitives) et que d’un point de vue clinique, chaque patient accorde plus
70
Chapitre 6. Discussion générale
ou moins d’importance à chacune de ces variables. Chaque objectif va demander des apprentissages
particuliers et recourir à des pratiques éducatives spécifiques. Il est dès lors plus aisé de comprendre
la diversité des modes d’intervention éducatifs repérés dans la littérature (Chapitre 2) et la nécessité
de l’approche interdisciplinaire.
Ainsi, l’ETP peut permettre de renforcer la capacité d’action des acteurs. Toutefois, l’introduction de
l’ETP dans les pratiques doit d’abord passer par une sensibilisation à ce nouveau mode de pratique car
ni les patients, ni les soignants, ne semblent conscients de cette possibilité de changement. Les
représentations profondes des objectifs de soins, des moyens d’action, des rôles de chacun,…
demandent à être questionnées.
La mise en place d’une ETP telle qu’inspirée des résultats de notre étude ne s’inscrit pas forcément
sous la définition de programmes tel qu’il en a été le choix en France. Au contraire, la construction
d’un plan de soins personnalisés au patient, intégrant l’ETP, ne peut se faire que de manière singulière.
Aussi, l’orientation des politiques publiques sera déterminante dans le soutien du développement de
prises en charge au plus proche des besoins du patient.
6.2.3. Vers la formation des professionnels de santé
Plusieurs voies d’approche doivent être empruntées de manière systémique afin de favoriser le
développement de l’ETP dans les pratiques de soin (Jacquat, 2010 ; Jaffiol et al., 2013). Nos résultats
ont fait émerger en particulier les besoins de formation, comme la littérature le rapporte également.
Les premières recommandations européennes en ETP ont été rédigées par l’OMS en 1998. Celles-ci
plaident pour la généralisation des pratiques éducatives chez les professionnels de santé pour soutenir
les efforts des patients dans leurs apprentissages pour faire face à la maladie.
Au vu de l’approche des pratiques évoquées ci-avant, les propos d’Assal (1997) concernant le manque
d’évolution de la formation des professionnels de santé, qui demeure ancrée sur le modèle traditionnel
de la médecine et du soin, restent d’actualité. L’ETP est d’ailleurs peu intégrée dans la formation
initiale en Wallonie et il faut attendre la formation continue pour voir apparaitre quelques formations
axées sur l’ETP (Böhme, 2013). Le centre d’expertise des soins de santé belge (Paulus, Vand den Heed
et Mertens, 2012) souligne à ce titre que les formations des professionnels de santé ne sont
actuellement pas orientées vers ces nouveaux rôles dont l’ETP fait partie.
Chapitre 6. Discussion générale
71
6.2.4. Le développement des compétences comme objectifs de formation
Gagnayre et d’Ivernois (2014) appellent à s’interroger sur ces formations en ETP au vu du caractère
hétérogène de leur programme et de leur mise en œuvre. S’interroger sur le programme des
formations, c’est s’interroger sur les objectifs de ceux-ci en termes de compétences à atteindre
(Leclercq, 2014).
La suite de la réflexion concernant ces formations n’est pas spécifique au domaine de l’obésité. Bien
que cette pathologie soit le point de départ de nos travaux de recherche, il a été décidé d’ouvrir la
réflexion à partir du moment où le travail de recherche s’est orienté vers la formation. En effet, une
économie d’échelle en termes de formation doit être réalisée et il n’est pas envisageable de
développer autant de formations en ETP qu’il existe de pathologies. De plus, le courant de recherche
actuel en ETP tend à réfléchir à une approche décloisonnée de l’ETP, voire une ETP pour la
polypathologie (Deccache et al., 2014), l’idée étant de rechercher les invariants nécessaires à la
pratique de l’ETP, et ce quelle que soit la pathologie traitée. Nous reviendrons toutefois en aval dans
ce chapitre sur les implications en termes de prise en charge de l’obésité.
6.2.5. Une formation pour quelles compétences ?
La revue de littérature effectuée par l’INPES (2011) sur les référentiels de compétences en ETP montre
un aspect hétérogène des outils disponibles. Le travail effectué sur les compétences dans le cadre de
cette thèse a abouti à un outil adaptif au milieu de travail en proposant une modélisation des
compétences en ETP. Cet outil possède plusieurs particularités qui lui sont propres et jugées
fondamentales : il réunit les compétences des soignants et celles des patients (les compétences
patients devenant ce pourquoi il faut développer les compétences des soignants) ; les compétences
des soignants sont structurées selon la démarche éducative et sont mises en situation, ce qui aide le
soignant à se projeter en termes de transfert ; il tient compte de toutes les dimensions de soins
(modèle ASCID) alors qu’il est justement reproché aux prises en charge d’être orientées
spécifiquement sur le domaine biomédical ; il introduit une notion temporelle dans la prise en charge,
notamment par la mise en évidence d’un temps d’appropriation de la maladie par le patient avant
d’entrer dans des processus éducatifs plus poussés.
Trop de référentiels ont été proposés de manière complexe, n’incitant pas à leur utilisation. Il ne s’agit
pas ici de simplifier les compétences attendues mais de les rendre accessibles et de s’accorder sur les
objectifs d’une formation en ETP entre formateurs. Posséder une définition claire de ce qui est attendu
au terme d’une formation et savoir comment chacun y contribue est un élément fondamental, en ce
y compris l’évaluation de cette formation.
72
Chapitre 6. Discussion générale
Ce référentiel demande toutefois à être complété en termes de ressources qui composent les
compétences. Il s’agit d’un enjeu important puisque ces ressources vont constituer autant d’éléments
qui vont être mobilisés dans l’exercice d’une compétence (Nagels et Lasserre Moutet, 2013) et ainsi
donner l’orientation des pratiques professionnelles et de la relation thérapeutique. Il s’agit ainsi d’un
outil simple et évolutif que chaque équipe éducative peut adapter à ses pratiques dans son contexte.
Bien que nous ayons fait le choix du terme « référentiel », il s’agit ici d’une approche théorique. Dans
ce cadre, notre approche théorique n’a pas été précédée par une analyse des métiers et des activités
qui entourent un domaine d’activités (Parent et Jouquan, 2013). Ces préalables n’ont pas été posés
dans le cadre de notre travail, notre but étant de contribuer à la clarification des compétences que
soignants et patients ont à mobiliser dans le contexte de soins.
6.2.6. Faire connaitre de nouveaux besoins en ETP
La recherche a ensuite permis d’identifier les besoins perçus par les professionnels de santé en termes
de formation. Lorsque les professionnels sont interrogés sur leur besoin en termes de formation pour
mieux accompagner les patients obèses, ils n’identifient pas forcément les besoins rapportés à l’issue
du travail d’analyse des pratiques et de la littérature scientifique. Ainsi, certaines dimensions des
compétences en ETP sont sous-investies (en termes de besoins exprimés) par les professionnels. S’ils
demandent à avoir de meilleures compétences dans le domaine relationnel, l’approche pédagogique,
l’organisation des soins et la prise en compte de l’environnement du patient sont délaissées, ce qui
n’est pas sans poser problème pour le développement d’une approche éducative répondant aux
recommandations de bonnes pratiques (HAS, 2007). Il est ainsi constaté un décalage entre les besoins
réels, les services de formation offerts et la demande des professionnels. Or, les modèles de santé
publique (Robinson et Elkan, 1996) renseignent que cette situation n’est pas optimale pour favoriser
l’attrait des professionnels vers les formations en ETP. Aussi, un travail de conscientisation, de
perturbation de la routine d’actions doit être entrepris pour stimuler les professionnels à s’investir
dans un processus de changement, notamment grâce à la formation professionnelle. Si la littérature
scientifique met aujourd’hui en avant la nécessité de travaux portant sur l’accessibilité de l’ETP aux
patients (Gagnayre et Lombrail, 2015), il ne faut pas négliger la réflexion quant à l’accessibilité de l’ETP
pour les soignants. Nous rejoignons ainsi la proposition de Jaffiol et collègues (2013) selon laquelle, au
minimum, une initiation à l’importance de l’ETP devrait être réalisée dans tous les cursus de formation
initiaux des futurs professionnels de santé. Jaffiol et collègues (2013) plaident également pour une
sensibilisation à l’ETP via les formations continues pour les soignants sortis du cursus initial pour mieux
comprendre les enjeux et avantages relatifs à l’ETP, idée que nous partageons également.
Chapitre 6. Discussion générale
73
Dans le domaine plus spécifique de l’obésité, le manque de résultats durables sur la perte de poids et
les difficultés exprimées par les professionnels de santé dans le suivi de ces patients pourraient
constituer des leviers sur lesquels s’appuyer pour stimuler les soignants à s’orienter vers de nouvelles
perspectives de soins.
6.2.7. L’attitude éducative comme ressource fondamentale des compétences en ETP
La recherche s’est finalement intéressée à l’aspect attitudinal (entendu comme une disposition
mentale de l’individu qui l’amène à poser un jugement, une valeur sur un objet particulier) des
compétences éducatives en ETP qui a été nommé « attitude éducative ». Celle-ci a été considérée
comme une ressource fondamentale à mobiliser dans les compétences en ETP au vu des résultats
obtenus dans l’exploration des pratiques professionnelles. En effet, la manière dont les professionnels
de santé rapportent leur pratique professionnelle est témoin de la manière dont ils évaluent leur rôle,
la relation de soins, ses enjeux,… Aussi, il est apparu indispensable qu’une formation en ETP puisse
travailler sur l’évolution de cette attitude. Toutefois, afin de mesurer une possible évolution de cette
attitude, encore faut-il qu’elle soit identifiée et identifiable. L’étude de caractérisation de l’attitude
éducative a permis de mettre en évidence sept dimensions sur lesquelles une formation en ETP devrait
pouvoir travailler de manière à ce que les professionnels développent une attitude éducative propice
à la mise en œuvre d’actions éducatives dans le soin. A titre d’illustration, la perception du patient
capable de faire des choix et d’agir pour sa santé est certainement un élément fondamental pour
s’engager dans une relation éducative, faute de quoi le professionnel peut rester dans un modèle de
soins dit paternaliste (Mikkonen et Hynynen, 2012). Souvent annoncée comme un objectif majeur des
formations en ETP, l’attitude éducative (parfois aussi appelée posture éducative) est peu souvent
définie. A l’heure où les formations en ETP sont critiquées quant à leur contenu (Gagnayre et
d’Ivernois, 2014), les résultats du travail de caractérisation mené dans cette thèse offrent une
proposition concrète et documentée de ce concept.
Si l’on tente alors de resituer cette avancée dans le domaine de la prise en charge de l’obésité, cette
recherche sur l’attitude éducative devient encore plus révélatrice. En effet, les représentations sociales
à l’égard des personnes obèses sont majoritairement négatives, y compris chez les soignants
(Barthassat, Lagger et Golay, 2008). Dès lors, ce système de représentations négatives à l’égard des
patients obèses peut conduire à des attitudes défavorables envers ces patients et leur prise en charge.
Prenons un exemple caricatural : si le professionnel de santé considère que l’objectif unique de la prise
en charge est la réduction de l’IMC, alors qu’on connait les difficultés liées à cette diminution, cette
attitude envers l’objectif de soins va, dès le départ de la relation thérapeutique, conduire le patient
vers l’échec. Au contraire, si le professionnel de santé ouvre les objectifs de soins vers le
74
Chapitre 6. Discussion générale
développement de compétences psychosociales et situe son rôle dans le renforcement des
apprentissages de l’individu pour atteindre ces objectifs, alors il donne une chance de construction et
de réussite à la rencontre thérapeutique. Toutefois, Wu et collègues (2014) ont montré que les
soignants ne percevaient pas les patients capables d’agir pour leur santé autant que les patients euxmêmes, ce qui suggère que l’ouverture vers de nouveaux objectifs de soins relève également de la
vision de la capacité du patient. Cet exemple illustre que les différentes dimensions de l’attitude
éducative sont connectées et appellent de futures investigations.
Cette étude vient ainsi clôturer la démarche de recherche entreprise en mettant en exergue les
éléments caractérisant l’attitude éducative, considérée comme un fondement dans l’émergence de
compétences pour une Education Thérapeutique du Patient porteuse de sens. C’est bien sur base des
perceptions des rôles de chacun, de la nécessaire considération globale du patient et autres éléments
de ce type qu’une profonde évolution dans les pratiques professionnelles, grâce à l’expression des
compétences nouvellement acquises, pourra s’opérer.
En réponse à la deuxième question de recherche, différentes conditions majeures ont été soulevées
pour favoriser l’intégration de l’ETP dans les pratiques des professionnels de santé prenant en charge
les patients obèses, à partir de la formation professionnelle. Les programmes de formation en ETP,
spécifiquement pour la Belgique francophone, devraient s’inspirer largement des résultats de cette
étude contextualisée et notamment des recommandations suivantes :
Quelles sont les conditions d’une formation qui favorisent l’intégration de l’ETP dans les pratiques
des professionnels de santé prenant en charge les patients obèses?
(1) S’accorder sur les objectifs de formation : ce travail de thèse aboutit à une modélisation des
compétences attendues au terme d’une formation en ETP qui situe la démarche éducative au
centre des préoccupations. L’acquisition de ces compétences devrait permettre de venir aider les
professionnels de santé à dépasser les difficultés exprimées dans le report de leurs pratiques
actuelles des patients obèses en renforçant leur capacité d’action grâce à l’éducation du patient ;
(2) L’attitude éducative doit être considérée comme un objectif d’apprentissage majeur des
formations en ETP. Les professionnels de santé ne sont pas toujours conscients des attitudes qui
sous-tendent leur pratique. Il convient de les aider à en prendre conscience et de soutenir leur
transformation vers un registre qui soit en adéquation avec une approche éducative. Il s’agit alors
de développer de réelles compétences d’ETP qui mobilisent les multiples ressources « savoir,
savoir-faire, attitude ». Cela forme un tout ; les dispositifs d’apprentissage doivent faire l’objet
Chapitre 6. Discussion générale
75
d’une réelle ingénierie pour que ces compétences soient identifiées en tant qu’objectifs de
formation, soutenues dans leur acquisition et évaluées ;
(3) La nécessité d’amener les professionnels de santé vers une reconnaissance du besoin de
développer une approche éducative avec le patient. C’est aussi amener le professionnel à dépasser
l’image d’une éducation basée sur une bonne communication mais qui exige une démarche
d’apprentissage structurée, organisée ;
(4) Le travail en interdisciplinarité devrait commencer dès la formation des professionnels.
L’interdisciplinarité commence par le partage de ce que chacun fait, de sa vision de la situation, de
la définition de leur rôle et de la prise en charge réalisée ;
(5) Une formation ancrée sur l’expérience des participants : à défaut d’avoir été formés, les soignants
ont développé des stratégies, avec plus ou moins d’efficacité, pour faire face aux patients
chroniques. Les formations en ETP devraient ainsi mettre au cœur des dispositifs d’apprentissage
la valorisation des acquis de l’expérience : il s’agit de partir des difficultés vécues mais aussi de
rechercher les invariants de réussite pour construire le développement d’une analyse réflexive sur
les pratiques professionnelles. L’approche réflexive pourrait conduire à un déplacement des
difficultés perçues et à une autre vision des patients difficiles ou résistants ;
(6) Il convient de déplacer le paradigme de soins basé sur le modèle biomédical vers le modèle
holistique de la santé. Considérer le patient comme un tout avec la recherche de son autonomie
et de son développement personnel à travers l’apprentissage devrait être considéré comme une
priorité. Cette vision de la situation exige un virage complet de la formation des soignants.
Ces conditions sont à rapprocher de deux grands modèles d’apprentissage pouvant guider le
développement des pratiques d’ETP : le socio-constructivisme et le néo-behaviorisme/cognitivocomportementalisme.
L’approche pédagogique constructiviste ou socio-constructiviste vise la connaissance de soi dans un
environnement social et se centre sur la capacité du patient à agir sur son environnement en
privilégiant la connaissance des autres pour construire un sens commun (Foucaud et al., 2010). Dans
ce type d’approche, les savoirs d’expérience occupent une place centrale dans l’activité
d’apprentissage qui inclut un travail sur le développement de la connaissance de soi (Foucaud et al.,
2010). Dans cette approche, les programmes éducatifs privilégient l’attention portée aux situations
inédites pour élargir les compétences, anticiper les erreurs ou les problèmes éventuels ; on place les
apprenants en situation. Les visées de l’éducation thérapeutique sont multiples et comprennent
notamment le développement de l’estime de soi (Coopersmith, 1984), de la confiance en soi (Eisen,
1994), le sentiment d’efficacité personnelle (Zimmerman, 1990), le sentiment d’autodétermination,
76
Chapitre 6. Discussion générale
afin d’accompagner l’apprenant dans le développement de compétences personnelles qui lui
permettront de retrouver des capacités d’action (« empowerment ») (Rappaport, 1987). Dans ce
modèle pédagogique, le développement des compétences psychosociales devient déterminant, en
tant qu’« aptitude d’une personne à maintenir un état de bien-être mental, en adoptant un
comportement approprié et positif, à l’occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre
culture et son environnement » (Delfraissy, 2008).
Les programmes de formation peuvent également s’appuyer sur les principes des modèles néobehavioristes et cognitivo-comportementalistes, dans lesquels les interventions éducatives prennent
en compte les croyances, les systèmes et les états émotionnels des apprenants. Les objectifs
éducationnels visent alors la transformation des représentations, des croyances et pensées, et la
gestion des émotions (Bury et Foucaud, 2009). L’accent est porté sur l’autonomie d’élaboration
conceptuelle dans les processus cognitifs, où sont en jeu les connaissances antérieures, les expériences
et les actions réalisées (Gagnayre, 2013).
Si ces différents courants de pensée ont été réfléchis pour les patients dans le domaine de l’ETP, les
résultats de nos recherches tendent à les transférer pour la formation des soignants. On parle alors
d’isomorphisme (Theux et al., 2010): il s’agit de placer les futurs soignants-éducateurs dans des
situations/expériences/modalités d’apprentissage proches de celles qu’ils devraient faire vivre à leurs
propres patients, assurant ainsi un meilleur transfert des méthodes utilisées en formation vers les
bénéficiaires ultimes.
6.3.
Limitations
Les travaux de recherche menés dans le cadre de cette thèse possèdent plusieurs limitations
considérées ici comme limitations générales du processus de recherche (pour les limitations des
travaux de recherche spécifiques, voir le contenu des articles).
Premièrement, le travail est basé essentiellement sur la perception des acteurs impliqués dans la prise
en charge de l’obésité. Il pourrait donc y avoir un décalage entre les besoins identifiés à partir de cette
perception et les besoins réels de la population. Toutefois, nous avons veillé à toujours mettre ces
informations issues de la déclaration des acteurs en perspective avec la littérature disponible.
Deuxièmement, une approche qualitative a été privilégiée tout au long du processus de recherche, ce
qui peut remettre en question la portée des résultats présentés. En effet, ces résultats doivent être
considérés dans le contexte interrogé, à savoir un cadre qui est peu favorable à l’Education
Chapitre 6. Discussion générale
77
Thérapeutique du Patient, avec une absence de reconnaissance de l’obésité comme maladie chronique
et de prise en charge formalisée qui en découle.
Troisièmement, il a été décidé de travailler dans cette thèse selon une approche « focalisante ».
Autrement dit, de nombreux choix ont été opérés, obligeant à laisser de côté certains éléments pour
la recherche sur un meilleur développement de l’Education Thérapeutique. Dès la fin de la première
phase exploratoire, la formation a été sélectionnée comme levier de changement, et les autres aspects
(notamment d’organisation du parcours de soin, de financement des activités d’ETP, la reconnaissance
de l’Education Thérapeutique,…) ont été négligés. De même, dans ces formations en ETP, nous avons
réfléchi aux objectifs de la formation (les compétences attendues) sans se soucier des autres piliers
d’un curriculum de formation, à savoir les modalités d’apprentissage et d’évaluation. Finalement, dans
la recherche sur les compétences en ETP, nous avons privilégié la dimension ou l’aspect attitudinal.
Ces différents éléments manquants constituent autant de voies de recherche possibles pour de futurs
travaux.
Une autre limite concerne l’aspect transversal des travaux menés, ne permettant pas d’affirmer que
les recommandations réalisées à l’issue des travaux de recherche permettront d’améliorer la situation
observée. De nouveau, cette constatation appelle de nouveaux travaux de recherche-action dans
lesquels une place importante devra être accordée à l’évaluation.
Finalement, certains constats ou résultats représentent des considérations assez générales et peu
spécifiques à des professions particulières. L’Education Thérapeutique du Patient étant par définition
interdisciplinaire, nous avons toujours veillé à rechercher les invariants au niveau de cette formation
professionnelle.
Malgré les limites susmentionnées, les résultats des travaux de recherche menés dans cette thèse
peuvent constituer une source utile et valide d’informations pour les professionnels de santé et les
acteurs de santé publique dans le champ de l’ETP, et notamment plus spécifiquement dans le cadre
du développement de programmes de formation en ETP.
78
6.4.
Chapitre 6. Discussion générale
Implications pratiques
Même si à partir des études disponibles, il n’est plus à démontrer aujourd’hui la place importante pour
l’intégration de l’ETP dans les pratiques de soins et la reconnaissance de celle-ci, les résultats de ce
travail de thèse soutiennent cette proposition. En effet, actuellement en Belgique, l’Education
Thérapeutique est financée et reconnue uniquement dans une seule pathologie chronique qui est le
diabète, notamment dans le cadre du trajet de soins et des conventions pour diabétiques. Or, il est
important que les soignants disposent d’un mandat d’éducateur bien défini et clair (Nagels et Lasserre
Moutet, 2013) et ce, quelle que soit la maladie considérée.
A l’heure actuelle et au vu du faisceau d’évidence sur l’Education Thérapeutique du Patient et de son
efficacité, il est difficile de comprendre pourquoi les décideurs politiques en Santé publique n’ont pas
été plus loin pour intégrer cette Education Thérapeutique dans le soin. Ce constat est d’autant plus
marqué vis-à-vis de la prise en charge de l’obésité au vu de la situation et des difficultés associées
observées sur le terrain. Cependant, il ne faudrait pas qu’une reconnaissance de l’ETP oriente la
pratique vers l’acquisition unique des compétences d’autosoins. Il faudra être vigilant, dans un
domaine tel que l’obésité, à ouvrir davantage la prise en charge vers les compétences d’adaptation,
nécessaire évolution pour tenter d’améliorer la qualité de vie des sujets qui vivent avec cette maladie.
Cette proposition dépasse l’aspect purement idéaliste dans notre travail puisque nous pouvons réaliser
des propositions concrètes pour la pratique clinique, les résultats des travaux de recherche permettant
d’aider dans le suivi du patient obèse en redonnant du pouvoir d’action au soignant. Si Ziegler (2009)
annonce que les compétences d’adaptation à la maladie sont moins saisissables et plus difficiles à
travailler avec le patient par rapport aux compétences d’autosoins, l’identification de variables
modératrices de la relation entre l’IMC et la qualité de vie proposée à l’issue de ces travaux engage de
nouvelles voies d’approche du patient obèse et de nouvelles cibles thérapeutiques.
Une autre implication pratique concerne l’intégration de l’Education Thérapeutique du Patient dans la
formation des professionnels de santé, et ce dès leur formation initiale. Dès 1998, l’OMS
recommandait que les professionnels de santé soient formés aux pratiques éducatives. Force est de
constater qu’à l’heure actuelle en Belgique, cette recommandation n’est pas encore traduite dans les
programmes de formation, entraînant un décalage entre les pratiques des professionnels de santé et
les besoins et attentes des patients chroniques (Assal, 1997). Il devient donc urgent de pallier à ce
manquement et que chacune des institutions préparant les professionnels de santé de demain
réfléchisse à mieux intégrer l’Education Thérapeutique du Patient dans leur programme de cours.
Chapitre 6. Discussion générale
79
La formation continue n’est pas à délaisser au vu de l’absence de formation initiale des professionnels
de santé en ETP. De plus, même si l’offre de formation initiale s’améliorait, la formation continue
garderait une place à part entière en vue de monitorer les pratiques de terrain. Il y a donc tout un
travail à effectuer pour attirer et faire prendre conscience à ces professionnels de santé engagés dans
le suivi de patients au long cours de la nécessité de développer une approche éducative avec le patient.
Cette conscientisation est un élément préalable nécessaire avant leur engagement dans un processus
de transformation ou de changement lié à une formation.
Les résultats permettent de proposer des recommandations de contenu ou des applications pratiques
pour les formations elles-mêmes. Il s’agit notamment d’une proposition de compétences attendues à
l’issue d’une formation en Education Thérapeutique pour les professionnels de santé et qui permet la
structuration et le partage des activités entre les formateurs pour ces formations en ETP. C’est
également la proposition et la mise en évidence d’un objectif incontournable de ces formations, à
savoir l’évolution de l’attitude éducative des professionnels de santé. Cette évolution de l’attitude
éducative nécessite un processus de déconstruction et reconstruction de l’individu. L’approche
réflexive est une solution à envisager pour travailler sur cette transformation en permettant à
l’individu de prendre de la distance par rapport à sa pratique professionnelle et en se questionnant sur
les tenants et aboutissants de cette pratique. De prochains travaux de recherche devront identifier les
modalités pédagogiques les plus appropriées pour travailler sur cette attitude éducative.
Ces propositions sont à considérer dans une situation où l’offre de formation en ETP est actuellement
remise en question (Gagnayre et d’Ivernois, 2014). Ainsi, elles prennent une place importante dans la
réflexion concernant la conception de ces formations en proposant des éléments de contenu
documentés à partir de la vision des professionnels de santé engagés sur le terrain et mis en
perspective avec la littérature disponible sur ce sujet.
6.5.
Perspectives de recherche
Ce travail de thèse offre diverses perspectives de recherche complémentaires.
La base de données relative à l’exploration du vécu et de l’expérience des sujets obèses appelle à être
exploitée, notamment en essayant de mettre en évidence d’autres modérateurs, voire médiateurs de
la relation entre l’IMC et la qualité de vie. Par exemple, il s’agirait de comprendre si les objectifs de
poids, souvent irréalistes, que projettent les patients obèses, contribuent à la détérioration de leur
qualité de vie. D’autres questions retiennent notre attention, par exemple, le fait qu’environ 500 sujets
normopondéraux aient répondu à l’enquête. Une investigation plus poussée de la base de données
80
Chapitre 6. Discussion générale
pourrait nous renseigner sur le profil spécifique de ces individus qui déclarent avoir un problème de
poids pour un IMC normal.
Les études de type triades demandent à être poursuivies. La majorité des études comparatives entre
groupes d’acteurs (patient, soignant, entourage, par exemple) comparent les résultats moyens entre
les groupes et vont rarement jusqu’à analyser les relations au sein des triades ou des dyades
individualisées, ce qui amènerait une compréhension beaucoup plus fine et instructive du
fonctionnement de la prise en charge. Ces travaux pourraient être développés dans d’autres
pathologies sur un plus grand nombre de sujets ou dans des situations plus spécifiques.
Le travail de modélisation des compétences doit se poursuivre. Dans tous les cas, l’outil doit être testé
pour connaître son utilité, son utilisation, sa validité par des équipes de terrain et voir comment ils se
l’approprient. Une piste d’action consiste à évaluer en quoi un outil de ce genre permet le
développement ou son amorce de l’interdisciplinarité dans les équipes de soins. En effet, la mise en
œuvre de l’interdisciplinarité peut passer par le partage d’outils communs.
Au niveau de l’attitude éducative, plusieurs recherches pourraient être menées suite aux premiers
développements posés dans cette thèse. Il serait intéressant tout d’abord de croiser ces aspects
attitudinaux tels qu’ils ont été perçus par des professionnels de santé engagés dans des formations
professionnelles avec la vision qu’en ont les formateurs engagés dans ces processus de formation pour
savoir si à cette attitude correspond un objectif implicite, explicite, et comment on peut (si cela est
nécessaire) mieux couvrir, à travers les différents modules de formation, le travail sur cette attitude
éducative. Les liens entre les différentes dimensions de l’attitude éducative demandent également à
être explorés. Un outil d’évaluation plus quantitatif et standardisé pourrait être développé et validé
afin de permettre des mesures, des comparaisons, par exemple, avant et après formation ou entre des
formations. Finalement, les meilleures conditions pédagogiques au développement de cette attitude
éducative demandent à être identifiées.
Chapitre 7.
Conclusion
L’obésité doit être considérée comme un problème majeur de santé publique au vu de sa prévalence,
de ses conséquences socio-sanitaires et des difficultés relatives à sa prise en charge.
L’ETP a été choisie comme angle d’approche de cette maladie, en orientant les recherches non pas sur
la question de l’efficacité mais sur celle d’une meilleure compréhension des modèles d’ETP, et ce de
manière contextualisée dans une zone d’étude marquée par l’absence de cadre formalisé et
réglementaire de l’ETP.
Le questionnement des pratiques professionnelles, des attentes et besoins des patients et de leur
famille a constitué le point de départ des investigations. Le croisement des données récoltées a permis
de mettre en évidence les difficultés de rencontre actuelles entre les différents acteurs au vu
notamment des objectifs, rôles et attentes que chacun se donne dans la prise en charge. Par ailleurs,
les résultats ont indiqué l’importance de susciter le changement d’approche, et ce vis-à-vis des 3
acteurs (patient, soignant et entourage) qui, implicitement, se renforcent les uns les autres dans une
situation de blocage. Pourtant, les perspectives d’une approche différente, basées sur la mise en
évidence de paramètres de perception (image corporelle, regard des autres), ont été identifiées pour
définir de nouvelles cibles thérapeutiques de la prise en charge.
Très tôt, à la lueur des premiers résultats observés, la formation professionnelle a émergé comme un
levier de changement de la situation car considérée comme condition sous-jacente à une pratique
d’ETP de qualité. Aussi, une modélisation des compétences attendues à l’issue d’une formation a été
proposée. De plus, dans les ressources relatives à la compétence éducative qui ont été identifiées, la
81
82
Conclusion
ressource d’attitude éducative s’est véritablement révélée. Même si ce terme est fréquemment utilisé
dans les textes traitant des formations en ETP, il apparait que l’attitude éducative restait peu
approfondie en termes de concept. Au vu de son caractère fondamental dans le développement d’une
pratique d’ETP de qualité, les travaux menés ont tenté d’en donner une première caractérisation.
S’il a été proposé une démarche focalisante en partant des pratiques vers la formation professionnelle,
et ensuite vers la notion de compétences et enfin de ressources, il est proposé d’en faire, en guise de
conclusion, une lecture inverse. Aussi, il est attendu qu’un travail sur l’attitude éducative des soignants
modifiera, grâce à la formation, leurs compétences en ETP et que cela participera à réorienter leurs
pratiques professionnelles. De futures recherches devront être menées dans ce sens.
Les résultats proposés, valorisés par une série de 8 articles scientifiques (publiés ou en voie de
publication), permettent de tirer des recommandations pour le développement de politiques de santé
publique, mais également pour la pratique clinique, et ce dans une perspective de meilleure
compréhension dans la recherche d’adhésion et de qualité de vie des sujets obèses mais aussi de leur
entourage et des soignants qui s’en occupent. Les enseignements tirés aident à revoir les stratégies de
prévention de l’obésité dont les résultats des approches traditionnelles ne montrent pas les résultats
escomptés.
Finalement, il est à noter que l’évolution dans les compétences des professionnels ne pourra pas
passer uniquement par le bon vouloir des soignants. Le modèle de soins demande à être revisité plus
globalement. Les politiques belges semblent à présent sensibilisées à cette problématique et ont
publié fin 2015, une note « Plan conjoint en faveur des malades chroniques – Des soins intégrés pour
une meilleure santé » qui situe l’empowerment du patient (dans lequel s’inscrit l’ETP) et la formation
des professionnels de santé à l’empowerment du patient, comme des priorités. Il est attendu que ce
nouveau plan permette la définition d’un meilleur cadre pour soutenir les pratiques d’ETP en Belgique.
Il faudra tenir compte des expériences des pays plus avancés pour retenir les forces et faiblesses des
dispositifs développés. Par exemple, en France, si la loi de 2009 et ses arrêtés d’exécution ont permis
de donner une base solide au développement de l’ETP, on reproche actuellement une tendance à une
trop grande standardisation dans la mise en place des activités d’ETP proposées. Une autre critique
soulevée est la limite étroite entre manipulation et éducation thérapeutique du patient. Reach (2014)
souligne l’importance de la réelle autonomie du patient. Il ne s’agit pas de faire rentrer le patient dans
le moule, dans la recherche d’observance via une manipulation de l’esprit et une certaine fausse
sympathie. Il s’agit au contraire, à partir d’une relation de confiance et d’un cheminement éthique,
d’amener la relation de soins vers un modèle délibératif (Emanuel et Emanuel, 1992), c’est-à-dire où
patient et soignant échangent, sans conflit, arrière-pensées ou jugement, leurs informations,
Conclusion
83
émotions, croyances,… pour que le patient puisse décider, sur ce construit, de l’orientation de son
projet de soins.
C’est pourquoi l’attitude éducative peut être considérée comme une ressource fondamentale, voire la
pierre angulaire, des compétences éducatives des professionnels de santé. Il s’agit en effet d’une
attitude que tout professionnels de santé devrait adopter au profit de la recherche d’une réelle plusvalue en termes de santé et de qualité de vie pour et avec le patient.
Si l’ETP recherche aujourd’hui, 20 ans après les premières recommandations de l’OMS, à mieux se
définir à l’aide de concepts structurants, l’attitude éducative apparait comme un apport substantiel
dans cette recherche. La proposition de caractérisation de cette attitude à laquelle aboutit ce travail
de thèse constitue une étape importante de par le caractère transversal (valable quelle que soit la
pathologie ou la profession de santé considérée), indépendant (des autres conditions de l’exercice de
l’ETP ; une attitude ne demande pas de moyens de mise en œuvre) et acceptable (il s’agit d’une
proposition économiquement et éthiquement recevable) de son développement et mise en œuvre.
A l’heure de la réflexion quant aux capacités du système de soins de permettre à chaque individu un
accès à des services de santé de qualité qui puissent être assurés de manière durable, fondés sur des
données scientifiques, cette thèse contribue à soutenir l’intégration de l’ETP dans les pratiques des
professionnels de santé en Belgique, et ce par des propositions concrètes visant le développement de
la formation des professionnels de santé.
Chapitre 8.
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PARTIE 2
Compilation
des articles
(SUR DEMANDE à
l’AUTEUR DE LA THESE)
99
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