Présents : François Chabanes ; Henri Chaffiotte ; Bertrand Collomb ; Bernard Descreux ; Michel Didier ; Jean-Paul Gauzès ; Amiral Jacques Lanxade ; Claude Mandil ; Christian de Perthuis ; Serge Pujol Alain Gerbaldi ; Jacques Ninet ; Patrick Rivière ; Pierre Schoeffler Invités : Pascale Auclair ; Pascale Cheynet ; Thierry Gortzounian Absents excusés : Michel Cicurel ; Philippe Desfossés ; Xavier Lépine ; Dominique Moïsi ; Philippe Vasseur 1 Exposé de Christian de Perthuis (Chaire de l’économie du climat. Université Paris-Dauphine). Le résumé ci-dessous reprend les principaux points qui ont été présentés par Ch. De Perthuis. Une information complète est accessible avec le livre que celui-ci a publié avec Raphael Trottignon : « Le Climat, à quel prix » (Odile Jacob). Historique 1988 Création du GIEC, réseau scientifique placé sous la tutelle de l’ONU, à l’initiative des gouvernements pour les informer de l’état des connaissances sur le climat. 1 1990 Premier rapport d’évaluation du GIEC. L’accumulation des gaz à effet de serres dans l’atmosphère est la cause des dérèglements climatiques. Ce rapport débouchera sur la conférence de Rio (1992) et la CNUCC (convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques) signée par 195 pays +UE. Principe : responsabilité commune mais différenciée : les pays avancés y compris Europe de l’Est, Russie et Ukraine (Annexe1) sont responsables de 75% du stock de GES contre 25% pour les PVD (Hors annexe 1) ayant droit au développement. Création de la COP. Conference Of the Parties (signataires de la CNUCC). La COP se réunit une fois par an, depuis Berlin 1995. Les décisions doivent être prises au consensus. 1997 Protocole de Kyoto : application de la convention. Engagement des pays de l’annexe 1 de réduire leurs émissions de 6%. Les Etats-Unis ne ratifient pas. 2009 Copenhague. Substitue aux engagement contraignants top-down établis par consensus le principe de « pledge review » : Chaque Etat dépose sa contribution (Intended Nationally Determined Contributions). Certains pays émergents/émergés rompent la binarité en s’engageant aux côtés des pays avancés. Une enveloppe de 100 Mds USD par an est prévue (qui finance ? qui gère ?) pour aider les PVD à financer la transition énergétique sans freiner leur développement. L’accord n’est pas adopté (119 pays signataires sur 195). Ces dispositions seront toutefois intégrées à la convention un an plus tard. 2011 Lima. Fixe à 2015 l’échéance pour la conclusion d’un l’accord climatique, applicable en 2020. Climat et géopolitique. Les années 2010 marquent la fin du monde binaire. Il y a en fait quatre groupes de pays avec des contraintes et des enjeux différents. 1 Groupe . Les pays « riches ». 1 milliard d’habitants. Ils ont pris des engagements importants mais non garantis. Leur défi est de montrer que l’on peut s’engager dans une transition énergétique de rupture, au-delà des améliorations, sans baisser le niveau de vie. 2 Groupe . Pays les moins avancés. 1 milliard d’habitants. Ils émettent 2% des GES avec moins de 2t de CO2 par habitant/an. Ils sont les plus exposés aux effets du réchauffement. Leur double enjeu est donc de réussir l’adaptation au changement climatique et le décollage économique sans passer par la phase d’industrialisation carbonée. 3 Groupe . Pays intermédiaires. 5 milliards d’habitants. Ils sont les principaux responsables de l’augmentation des GES depuis 2000 et au nœud de la négociation (Inde). A la fois très exposés aux effets de leur modèle de développement et disponibles pour les solutions technologiques (photovoltaïque en Chine). 2 4 Groupe . Pays producteurs et exportateurs d’hydrocarbures. 600 millions d’habitants (Canada Australie, Russie monarchies pétrolières). Très exposés à la dévalorisation de leurs actifs. L’état des lieux En 2014 a été publié le cinquième rapport du GIEC. D’un rapport à l’autre, les prévisions du GIEC se sont à chaque fois révélées trop optimistes. Le budget carbone mondial (stock) pour limiter le réchauffement d’origine anthropique à 2°C est de 3000 Md tonnes ; en 1975 le stock était de 1000 Md ; en 2015 à 2000 Mdt, deux tiers du budget ont déjà été consommés. Au rythme actuel, ce budget sera dépassé en 2040, soit en une génération. Or les émissions mondiales se sont accélérées depuis 2000 (autant d’émissions entre 2000 et 2015 qu’entre 1900 et 1975). Les GES proviennent pour 75% des énergies fossiles et pour 25% de la déforestation et des activités agricoles (autres gaz liés aux bovins, au riz etc.) Pour réduire les émissions de 60%, il faudrait limiter la consommation totale à un tiers des réserves de charbon et du pétrole, le gaz constituant l’inconnue….on a vu que l’apparition du gaz de schiste en Amérique du nord a libéré des ressources de charbon utilisées par les PVD. L’essor démographique de l’Afrique est un point crucial. L’augmentation de 1 Md d’habitants d’ici 2050, couplée avec une hausse des émissions par tête à partir d’un niveau extrêmement bas (1,5 t/hab/an) est positivement explosive. Les moyens d’un accord. Pronostic. La somme des contributions actuellement déclarées, pour autant qu’elle soit calculable, est très inférieure au niveau requis pour limiter le réchauffement à 2 degrés. Les deux points clés d’un accord sont : comment mesurer ? Comment financer les transferts liés à la transition ? Les deux sont liés à travers la confiance qu’auraient les pays « hors annexe1 » dans la réalité de l’aide financière. Tout accord passe obligatoirement par la tarification du carbone et des mécanismes du type bonus-malus pour répartir les financements et parallèlement par l’arrêt des subventions aux énergies fossiles qui expriment in fine un prix négatif pour le carbone. Le bon niveau de tarification pourrait être autour de 10 USD la tonne, les émissions à hauteur de 50 Md générant 500 MD USD de recettes. 3 2 Commentaires 2.1 C Mandil. Eléments pour une vision optimiste. Les contributions déclarées conduiraient à un réchauffement compris entre 3 et 4°. Il est donc indispensable de faire mieux. Un nouvel activisme politique est apparu : aux Etats–Unis avec opposition Obama vs Congrès mais adhésion de l’Amérique profonde ; en Chine, étouffée par la pollution locale (charbon). Des changements politiques dans les pays producteurs d’énergies fossiles (Canada Australie) Le passage du top-down au bottom-up (INDC) La montée en puissance du milieu industriel voire du monde financier. Eléments négatifs récents : l’effondrement du prix des énergies fossiles, renchérissant en comparaison les investissements de décarbonation. Eléments de pessimisme : l’effacement de l’Europe, qui fut un temps pilote avec l’adoption du « paquet énergie-climat» en 2008 ; l’échec du marché du carbone (prix tombé très bas) et de celui de l’électricité. 2.2 Bertrand Collomb. Continuité de l’engagement des entreprises plus que des Etats. Lancement du WBCSD (World business council for sustainable development.) Coopération inter-entreprises. Inclure le raisonnement au niveau des secteurs et des filières. Au-delà de la dimension “com”, il y a des gens qui travaillent malgré l’imprévisibilité de l’action publique. Celle-ci devrait être attentive à l’égalisation de la compétitivité (faire payer les externalités) malgré le refus du courant mainstream des économistes (qui y voient des mécanismes de protection). La prochaine séance sera consacrée à l’immigration. Jacques Ninet. Conseiller pour la recherche Groupe La Française. Secrétaire du Comité de prospective www.lafrancaise-group.com 4