Les Monographies
de Contribuables Associés
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La TVA, un impôt
discret mais néfaste
par Pierre Bessard, délégué général, Institut Constant de Rebecque
42, rue des Jeûneurs - 75077 Paris 02 - Tél. : 01 42 21 16 24 - Fax : 01 42 33 29 35 - www.contribuables.org
Pour
que vive
le débat
3
Sommaire
INTRODUCTION .......................................................................................................................... p.4
I. UN MOYEN DE PONCTION REDOUTABLE
I. 1. UNE CONSTRUCTION TECHNOCRATIQUE ............................................................ p.5
I. 2. EFFICACE… POUR L’ÉTAT ...................................................................................................... p.6
I. 3. UN CASSE-TÊTE ADMINISTRATIF POUR LE CONTRIBUABLE .......... p.8
I. 4. UNE INCITATION À L’ÉCONOMIE PARALLÈLE .................................................. p.9
II. LE MYTHE DE LA « TVA SOCIALE »
II. 1. L’IMPOSSIBILITÉ DE NE TAXER QUE LA CONSOMMATION ............p.10
II. 2. L’IMPACT SUR L’EMPLOI ET LES INVESTISSEMENTS ..........................p.11
II. 3. UN IMPÔT PRÉFÉRABLE À UN AUTRE ? ..............................................................p.12
III.
UN CHANTIER PERMANENT AU NIVEAU
EUROPÉEN
..................................................................................................................................p.14
CONCLUSION ..................................................................................................................................... p.17
RÉFÉRENCES ......................................................................................................................................... p.18
La TVA, un impôt
discret mais néfaste
par Pierre Bessard Délégué général, Institut Constant de Rebecque
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INTRODUCTION
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a le vent en poupe. Bien que cet
impôt soit déjà prélevé à un taux de 19,6 %, il est à nouveau question
de le relever pour faire face aux besoins insatiables de financement
de l’État et de ses programmes de dépendance sociale. Dans son rap-
port sur la « TVA sociale » au Premier ministre François Fillon, le secrétaire
d’État chargé de la Prospective et de l’Évaluation des politiques publiques,
Éric Besson, estime que remplacer une partie des prélèvements salariaux par
cette taxe aurait l’avantage d’accroître, « à long terme », le pouvoir d’achat1.
Une fois de plus, un impôt semble donc détenir la solution aux
problèmes de financement de la Sécurité sociale, faute d’une réforme
de celle-ci. Il est vrai que la TVA néficie néralement d’une bonne
réputation. Elle fait figure d’impôt « indolore », puisque le contribuable l’ac-
quitte souvent sans rendre compte. Mieux, prélevée sur la consommation
et exonérant les exportations, elle ne pénaliserait ni l’emploi ni la compéti-
tivité : pour Éric Besson, elle serait, au contraire, « favorable à la compétitivité
de l’économie française » et « créerait des emplois »2. À croire que la TVA serait
non seulement indolore, mais gratuite !
Qu’en est-il en réalité ?
En 2006, la TVA a extrait 153 milliards d’euros de l’économie française et
fourni 47 % des recettes fiscales de l’État3. Autant dire qu’elle joue un rôle
clef dans l’ampleur excessive de l’État, dont les conséquences néfastes sur le
bien-être économique et social ont été bien étudiées4. À la lumière de l’ana-
lyse, il apparaît très vite que cette taxe ne constitue, ni la panacée aux pro-
blèmes de financement des programmes étatiques de dépendance sociale, ni
une alternative crédible aux prélèvements salariaux aussi nocifs soient-ils
pour l’emploi, ce qui semble désormais reconnu par le gouvernement.
La présente étude se penche d’abord sur la nature et l’impact de la
TVA : elle examine les raisons qui ont poussé à son introduction dans les
années cinquante, puis considère les difficultés administratives parfois inso-
lubles engendrées par cet impôt dans une économie complexe et ouverte
sur le monde. Nous examinerons ensuite plus à fond la notion controversée
de « TVA sociale » avancée par le gouvernement.
L’étude récuse notamment la notion superficielle d’un impôt « sur la
consommation », qui laisserait suggérer l’absence d’effet de la TVA sur
l’épargne et l’investissement. Elle examine pour finir l’uniformisation de la
TVA au niveau de l’Union européenne, en évaluant les réformes en cours
et leurs conséquences possibles pour les contribuables.
4
En 2006,
la TVA
a extrait 153
milliards
d’euros de
l’économie
française.
1. Éric Besson, « TVA sociale », Secrétariat d’État chargé de la Prospective et de l’Évaluation des politiques
publiques, septembre 2007, p. 155.
2. Ibid., p. 9.
3. Source : budget de l’État au 31 décembre 2006.
4. Voir, par exemple, à ce sujet Nicolas Lecaussin, « Cet État qui tue la France », Paris, Plon, 2 005.
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I. UN MOYEN DE PONCTION REDOUTABLE
La TVA est généralement considérée comme un impôt « efficace » et « pro-
ductif », dans le sens elle prélève des recettes fiscales importantes de
manière relativement indolore pour le contribuable. Ainsi nère-t-elle une
moins forte résistance fiscale, à l’inverse de l’impôt sur le revenu. En d’autres
termes, comme l’a dit l’économiste Jacques Garello, cette taxe facilite
« l’anesthésie fiscale »5. En parallèle, elle réduit les possibilités de contourne-
ment de l’imt en reqrant une déclaration à tous les stades du processus
de production et de distribution. Or ces considérations sont précisément à
l’origine de la conceptualisation de la TVA.
I. 1. UNE CONSTRUCTION TECHNOCRATIQUE
La taxe sur la valeur ajoutée a été coue dans les années cinquante, lors de
la transition du capitalisme monopolistique d’État à un système moins diri-
giste6. Dans le cadre des réformes structurelles que connaissait le pays après
la Libération, ses concepteurs souhaitaient en effet que l’impôt, considé
jusqu’alors comme un simple instrument budgétaire servant avant tout au
financement de l’État, devienne un ritable outil de politique économique.
Cette lente transformation du fisc passe par la création, en 1948, de la direc-
tion générale des Impôts, destinée à regrouper les anciennes régies finan-
cières. La nouvelle génération d’inspecteurs des finances ambitionne alors
de remodeler en profondeur le système fiscal. Mais la réalité budgétaire la
conduit à procéder une nouvelle fois à une forte augmentation des impôts,
avant de reprendre ses efforts de réformes.
C’est le fonctionnaire Maurice Lauré, alors jeune inspecteur des finances,
quicrira pour la première fois, en 1952, le mécanisme de la TVA dans un
rapport7. Le ministre des Finances, Antoine Pinay, dépose un projet de loi la
même année. Adoptée en 1954, la nouvelle taxe permet au gouvernement
de défiscaliser les immobilisations des entreprises industrielles : de même
que l’on étudie actuellement l’opportunide compenser une baisse des
charges salariales par un relèvement de la TVA pour favoriser l’emploi, on
envisageait alors de mettre en place une politique de forte incitation à l’in-
vestissement. Cette mesure se rattachait à une stratégie de désengagement,
certes très partiel, de l’État dans l’économie. La TVA en vint ainsi, de façon
tout à fait paradoxale, à se voir qualifier de « libérale », car son introduction
était perçue comme l’expression politique d’un interventionnisme étatique
moins dominant dans le financement des investissements.
Impôt
« indolore »,
la TVA génère
une moins forte
résistance fiscale
que l’impôt sur
le revenu.
5. Jacques Garello, « La TVA à 5,5 % : c’est pour bientôt », éditorial, La Nouvelle Lettre, n° 864, 28 janvier 2006.
6. Cf. Frédéric Tristram, « Une fiscalité pour la croissance. La direction générale des Impôts et la politique fiscale en
France de 1948 à la fin des années 1960 », Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2005.
7. Maurice Lauré (1917-2001), qui deviendra directeur adjoint de la direction générale des Impôts, est également
à l’origine de l’idée d’une taxe protectionniste sur les importations en provenance des pays à main-d’œuvre bon
marché, connue sous le nom de taxe Lauré et récupérée par les mouvements socialistes « altermondialistes » ;
cf. Bernard Cassen, « Inventer ensemble un protectionnisme altruiste », Le Monde diplomatique, février 2000.
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