16 2015automne septembre à décembre 2015 www.theatreducapitole.fr Le Château de Barbe-Bleue Le Prisonnier D'ombre et de lumière rigoletto un rire tragique Giselle chef-d’œuvre du ballet romantique sommaire P.4 édito 4Le Château de Barbe-Bleue Le Prisonnier Entretiens Tito Ceccherini directeur musical Aurélien Bory metteur en scène Tanja Ariane Baumgartner soprano 8Rigoletto P.8 Entretiens Daniel Oren directeur musical Nicolas Joel metteur en scène Saimir Pirgu ténor Portraits Ludovic Tézier baryton Nino Machaidze soprano 12Midis du Capitole Récital Dmitry Ivanchey ténor 13Présences vocales #2 Récital L’Nfer (un point de détail) Entretien François Sarhan compositeur 13Concert de Noël Chœur du Capitole Maîtrise du Capitole 14Giselle P.14 Entretiens Kader Belarbi directeur de la danse Philippe Béran chef d’orchestre Thierry Bosquet décorateur Portrait Olivier Bériot costumier 22Calendrier 23Informations pratiques Prix Sacem de l’Académie du disque lyrique C'est une fois encore sous le signe de la diversité que se place cette nouvelle saison 2015-2016, diversité que le premier trimestre résume à lui seul : grands classiques du XXe siècle avec les chef-d’œuvres lyriques de Bartók (Le Château de Barbe-Bleue) et Dallapiccola (Le Prisonnier), modernité romantique avec Rigoletto de Verdi et Giselle côté ballet, deux ouvrages profondément novateurs dans leur manière de traiter la psychologie des personnages, l'intemporel Mozart dont les célèbres Vêpres du confesseur ouvriront le traditionnel concert de Noël tandis que, plus près de nous, L'Nfer de François Sarhan illustrera la création contemporaine. Diversité des titres, donc, mais aussi des propositions scéniques puisque ces spectacles seront tour à tour signés Aurélien Bory, Nicolas Joel ou Kader Belarbi, trois esthétiques on ne peut plus personnelles. Mais la diversité au Théâtre du Capitole, c'est aussi celle des propositions culturelles auxquelles je ne saurais trop vous inviter : conférences, présentations d'avant-spectacle (« Parlons-en », « Un Thé à l'Opéra » etc.), ateliers pour tous les publics et tous les âges, journées d'études et autres « Carnets de danse ». Mille et une façons de voir et d'entendre la musique et la danse, mille et une façons d'en aborder les différents aspects, de se les approprier. Je vous souhaite à tous, chers spectateurs, une excellente rentrée. Frédéric Chambert directeur artistique du Théâtre du Capitole 3 opéra / présences vocales #1 – Le Château de Barbe-Bleue / Le Prisonnier Le Château de Barbe-Bleue Le Prisonnier Créés respectivement en 1918 et 1949, Le Château de Barbe-Bleue de Béla Bartók et Le Prisonnier de Luigi Dallapiccola sont rapidement devenus des classiques de l'opéra de la première moitié du XXe siècle. Il est vrai que, d'emblée, par leurs sujets, par leur efficacité de traitement, par la beauté même de leur mise en œuvre musicale, ces deux ouvrages courts s'imposaient avec la force et l'évidence du chef-d’œuvre. Tous deux montrent des êtres humains contraints à aller au bout d'eux-mêmes, puisant dans les ressources de leur volonté le dépassement de toute vie « normale », paisible, mesurée. Le metteur en scène Aurélien Bory et Tito Ceccherini à la baguette nous proposent leurs propres clés pour entrer dans ces deux imaginaires sombres, et pourtant si porteurs de lumière. Le résumé Le Château de Barbe-Bleue Le Prince Barbe-Bleue vient d'enlever Judith à sa famille pour en faire sa nouvelle épouse. Dans l'obscurité de sa vaste et antique demeure, sept portes fermées. Cette obscurité surprend la jeune femme, qui tentera d'ouvrir toutes ces portes pour faire entrer la lumière, malgré l'interdiction de Barbe-Bleue. Un prisonnier de l'Inquisition, seul dans sa cellule, confie à sa Mère venue lui rendre visite que, malgré les tortures infinies, il a repris espoir car le Geôlier l'a appelé : « Frère ». Cet espoir jouera sur lui comme un poison. Dans une ultime tentative de fuite, le Prisonnier se rend compte en effet que ce n'était qu'un raffinement supplémentaire dans la torture qu'on lui infligeait : la torture par l'espérance. Le Château de Barbe-Bleue Béla Bartók (1881-1945) Opéra en un acte et un prologue sur un livret de Béla Balázs créé le 24 mai 1918 à l’Opéra de Budapest Le Prisonnier (Il Prigioniero) Luigi Dallapiccola (1904-1975) Opéra en un acte avec prologue sur un livret du compositeur, d’après Villiers de l’Isle-Adam créé en concert le 1er décembre 1949 à Turin (création scénique : 20 mai 1950, Florence) Tito Ceccherini direction musicale Aurélien Bory mise en scène Taïcyr Fadel collaborateur artistique Vincent Fortemps artiste plasticien Aurélien Bory, Pierre Dequivre scénographie Sylvie Marcucci costumes Arno Veyrat lumières dernières années des œuvres conçues comme possibles couplages avec Le Château. Il s’agit de Judith (Fénelon, 2007) et Senza sangue (Eötvös, 2015). Ces deux opéras attendent d’être mis à l’épreuve de la scène. Ils n’ont été donnés jusqu’à présent qu’en version de concert et jamais avec Le Château. Sur ce point ma curiosité est très vive. Il Prigioniero a donc des caractéristiques idéales. Je pense qu’en plus il est très important de faire connaître cet opéra. Pour toutes ces raisons, ce couplage est très heureux. n Propos recueillis par Robert Pénavayre, juillet 2015 traduits de l’Italien par Robert Gonnella (découvrez l'intégralité de l'entretien dans le programme de salle) Entretien Aurélien Bory, mise en scène Le Château, Vincent Fortemps Entretien Tito Ceccherini, direction musicale 4 Comment ne pas penser ici à la catastrophe qui suit les questions interdites d’Elsa à Lohengrin ? Que faire de ces références dans une œuvre aussi profondément gothique en même temps que symbolique ? Ont-elles lieu d’être ? Personnellement j’ai toujours perçu comme très suggestif le lien dialectique qui existe entre Lohengrin et Le Château de Barbe-Bleue. Il est clair que, au fond, les deux opéras et leurs personnages mettent en cause, en dernière analyse, les mêmes thèmes, non seulement la friction entre les interdits et la curiosité, mais surtout et très profondément la fragilité de l’Homme et de la Femme au moment où ils se mettent en jeu dans leur rapport de couple. Dans leur traitement cependant ressort pour moi surtout la grande distance entre le monde romantique de Wagner et celui complètement moderne de Bartók. Il est clair que l’opéra de Balazs et Bartók ressent, comme les modèles qui l’ont conditionné, la sensibilité d’un monde nouveau, celui de Freud. Quel est votre regard sur le couplage de ces deux œuvres dans une même soirée ? Je le considère comme très efficace. L’opéra de Bartók pose un défi complexe dans le choix d’un couplage. On cherche une pièce qui ait naturellement les proportions justes et qui, en quelque chose, soit en mesure d’établir une certaine forme de « dialogue » avec l’ouvrage de Dallapiccola. Au moins deux compositeurs importants ont écrit au cours des dix Le Prisonnier Vous revenez au Théâtre du Capitole après y avoir dirigé la création mondiale des Pigeons d’argile en avril 2014. S'il ne s’agit plus de créations cette fois-ci, les deux opéras qui composent cette soirée d’ouverture de la saison 2015/2016 n’en sont pas moins donnés pour la première fois à Toulouse dans une version scénique. Les avez-vous déjà dirigés ? J’ai déjà dirigé l’opéra de Bartók. C’est une de mes partitions les plus chères dans l’absolu, celle que j’ai la plus fréquentée. Je l’ai achetée alors que je n’avais que 12 ans et j’ai passé ma jeunesse à l’étudier. Aujourd’hui, Bartók est un des compositeurs que je dirige le plus volontiers. Dans Le Château de Barbe-Bleue, je trouve fascinante la fusion entre un langage très personnel et déjà arrivé à quasi maturité, car de nombreuses idées musicales utilisées pourraient appartenir à ses compositions postérieures, et un climat poétique qui est encore en grande partie celui du jeune Bartók. L’héritage de Liszt, Strauss, Dans Il Prigioniero, je suis frappé par la qualité changeante de l’orchestration qui, riche dans la complexité de l’effectif employé et des différentes manières de l’organiser, montre avec une fréquence fascinante une approche chambriste. J’aimerais dire qu’en cela, et uniquement en cela, on entend chez Dallapiccola des échos mahlériens venus tout droit, ou du moins initiés par le biais de l’École de Vienne. Et quelle efficacité dans le dialogue qui se noue entre les voix sur scène et les nombreux soli instrumentaux ! Et malgré la présence de modèles, le son global est inimitable et personnel (…), avec une qualité lumineuse qui, elle, ne descend pas des Viennois, mais peut-être, éventuellement et au-delà d’une certaine italianité, de modèles français toujours très présents à l’esprit de Dallapiccola. Dohnanyi et Brahms est ici transfiguré en une harmonie teintée parfois de nostalgie et de douceur qui sont miraculeusement intégrées dans une partition fièrement et résolument moderne. En revanche, je dirigerai Il Prigioniero à Toulouse pour la première fois. Cela me fait particulièrement plaisir car c’est une composition que j’aime beaucoup et qui mériterait d’être plus connue. Si les personnages ne sont guère nombreux, il semble que l'orchestre joue un rôle prépondérant. Qu’en pensez-vous ? Le traitement de l’orchestre dans Le Château est certainement la composante la plus fascinante et surprenante de l’œuvre. Il est en même temps visionnaire et formidablement efficace. La sixième porte en est un parfait exemple : la qualité des timbres définit à elle seule l’idée musicale, dans un contexte d’écriture d’une originalité absolue. Le Château de Barbe-Bleue Bálint Szabó Barbe-Bleue Tanja Ariane Baumgartner Judith Le Prisonnier (Il Prigioniero) Tanja Ariane Baumgartner La Mère Levent Bakirci Le Prisonnier Gilles Ragon Le Geôlier / L’Inquisiteur Dongjin Ahn, Jean-Luc Antoine Deux Prêtres Orchestre national du Capitole Chœur du Capitole Alfonso Caiani direction Nouvelle production Comment est venue l'idée de joindre en un même spectacle ces deux œuvres apparemment si différentes ? Frédéric Chambert a imaginé ce programme. J'ai travaillé sur les deux œuvres, d'abord indépendamment, en cherchant à les éloigner le plus possible, et ensuite en les associant, de façon à former un diptyque. J'ai fait une plongée dans chaque livret, en essayant d'en extraire la question essentielle qui puisse m'amener à concevoir un dispositif scénographique. Comme dans chacune de mes créations, la scénographie constitue le point de départ de la mise en scène. Je cherche à comprendre l'espace par son mouvement, par ses transformations, par les phénomènes physiques qui sont en jeu. L'ouvrage de Bartók est aujourd'hui un classique du répertoire, mais il n'en garde pas moins sa part de mystère. Comment le comprenez-vous ? Qui sont Judith et BarbeBleue pour vous? C'est effectivement son mystère qui rend l'œuvre passionnante. Béla Balázs a écrit un livret fascinant, qui place la lumière au premier plan. Les sept portes suivent la décomposition de la lumière. Judith veut ouvrir les portes pour faire entrer le vent et la lumière dans ce château – qui n'est autre que Barbe-Bleue lui-même. Elle veut faire toute la lumière Spectacle présenté dans le cadre du cycle Présences vocales par le collectif éOle, Odyssud, le Théâtre du Capitole et le théâtre Garonne Spectacle en langues hongroise et italienne surtitré en français Théâtre du Capitole 2, 6 et 9 octobre à 20h 4 et 11 octobre à 15h Durée 2h10 Tarif A de 20,50 à 109 € Carnet opéra 26 septembre à 18h Théâtre du Capitole, Grand foyer Conférence Charlotte Ginot-Slacik : « Deux contes cruels ? » 1er octobre à 18h Théâtre du Capitole, Grand foyer Parlons-en rencontres d’avant spectacle 2, 6 et 9 octobre à 19h Théâtre du Capitole, Grand foyer 5 de façon à respirer à nouveau, à faire taire la rumeur étouffante. Elle veut connaître Barbe-Bleue, et cette connaissance est un acte d'amour. BarbeBleue préfère l'opacité et le silence. Il cache dans son cœur les femmes qu'il a aimées et qu'il a rendues muettes. Barbe-Bleue et Judith sont d'une certaine manière l'histoire de l'échec de l'amour. Certains commentateurs pensent parfois que l'apparition de La Mère, au prologue, n'est pas réelle, mais n'est qu'une hallucination du Prisonnier. C'est aussi votre point de vue ? Oui, comme le rêve de la Mère, le discours du Geôlier, le couloir, tout est illusion. Et l'opéra finit sur une terrible désillusion. Pouvez-vous nous dire comment cette lecture vous a guidé dans la mise en scène du spectacle ? Le point central est évidemment le motif de la porte. Même si je voulais que ces portes rappellent l'architecture d'un château, j'ai pensé à une structure légère qui puisse être sensible au vent. J'ai ainsi imaginé un mobile de portes encastrées, dont la forme évoque le spectre lumineux, l'arc-en-ciel. J'essaie toujours de convoquer sur le plateau les lois physiques. Le spectre renvoie alors à Isaac Newton, et le mobile à la gravité. Vous parlez d'illusion. Comptez-vous l'utiliser au plateau ? Cette réflexion sur l'illusion m'a amené à choisir l'artiste Vincent Fortemps comme collaborateur. Son travail de dessin en direct, dessins qui se forment et s'effacent au fil de l'action convient parfaitement à la suite d'illusions dans cet opéra. De plus, Le Prisonnier est traversé par de multiples références à Victor Hugo, qui était lui-même un dessinateur étonnant. Dont Vincent Fortemps ne manquera pas de s'inspirer. Quant au Prisonnier, le sujet semble davantage politique. Cette « torture par l'espérance » n'est-elle pas, peut-être aussi, une métaphore de la condition de l'homme sur terre ? Comment comprenez-vous ce Geôlier / Inquisiteur ? Dans Le Prisonnier, la question est bien celle de la liberté, ou plutôt celle de l'illusion de la liberté qui renvoie effectivement à la question de la condition humaine. Dallapiccola place dans à peu près chaque scène une apparition, une illusion. Le Prisonnier flotte et souffre dans ces illusions. Il cherche mais ne parvient pas à regagner le réel. L'Inquisiteur est celui qui l'en empêche. Entretien Bálint Szabó, basse Vous avez appartenu pendant de nombreuses années à des troupes lyriques, non seulement en Roumanie, mais aussi plus tard en Allemagne. Quel a été leur apport dans votre carrière ? J’ai débuté ma carrière en Roumanie en 1990, à Cluj, à l’Opéra d’État hongrois. En 1996 j’ai été embauché dans l’Opéra d’Etat roumain de cette ville. Puis, en 2003 je suis parti travailler à Hambourg et en 2004 à Francfort. Toutes ces maisons m’ont beaucoup aidé à développer et à construire mon répertoire. Je crois que j’ai eu aussi beaucoup de chance de chanter alors des premiers rôles et de croiser de grands artistes, qu’ils soient pianistes, metteurs en scène ou chefs d’orchestre. Donc, pour moi et pour répondre plus spécialement à votre question, travailler en troupe a été très productif et utile. Venons-en au Château de Barbe-Bleue. Bartók utilise ici un « parlando cantando » qui est, nous dit-on, spécifiquement hongrois. Pouvez-vous nous expliquer cette écriture, vous qui êtes né en Transylvanie ? Bartók a fait beaucoup de recherches sur la musique folklorique transylvanienne. La spécificité de cette musique est le « parlando-rubato » que l’on pourrait traduire par « liberté de chanter ». Il cherchait à transposer dans ses mélodies les intonations de la langue hongroise mais aussi de les combiner avec le « parlando-rubato » des chants folkloriques. Bien sûr une grande partie de cette « liberté » a été perdue à cause des tempi de l’orchestre, mais malgré tout, l’interprétation demeure toujours très « personnelle », voilà pourquoi la durée de cet opéra peut sensiblement varier. D’ailleurs on s’en aperçoit aisément à l’écoute des enregistrements. La curiosité (de Judith) et l'espérance (du Prisonnier) sont deux des moteurs de la vie humaine ? Dans les deux cas, c'est la quête de la connaissance qui guide l'action. Plus personnellement, comment êtes-vous venu à l'opéra ? Quels sont vos rapports à ce genre théâtral si particulier ? J'aime parcourir tous les genres, tous les arts de la scène. Cela m'aide à renouveler la forme, ou du moins aborder les mêmes choses mais par un autre côté. D'une certaine façon, j'approfondis là ma démarche de création. Mais j'essaie surtout de la questionner sans cesse. n Propos recueillis par Jean-Jacques Groleau, juillet 2015 Les écueils vocaux de cette partition sont-ils entièrement dans l’ambitus très long qui est ici requis, ou bien également dans le respect des mille nuances demandées par le compositeur ? La difficulté pour chanter le rôle de Barbe-Bleue n’est pas, en effet, seulement contenue dans la tessiture très haute, tessiture réclamant, cela dit, du moins pour une basse, une attention de chaque instant. La vraie difficulté se trouve dans les millions de couleurs nécessaires pour interpréter ce texte. C’est une affaire très personnelle car le texte n’est pas conventionnel, chaque Entretien Tanja Ariane Baumgartner, soprano On vous connaît pour votre grande versatilité : récemment, on a en effet pu vous entendre à la fois dans des rôles romantiques et dans des créations contemporaines. De quelles musiques, de quels rôles vous sentez-vous la plus proche ? Difficile à dire… Habituellement, l’œuvre que je préfère est toujours celle sur laquelle je suis en train de travailler ! J'essaie de garder autant que faire se peut Verdi et la musique italienne à mon répertoire, ce qui me permet de maintenir ma voix dans un état de fonctionnement aussi belcantiste que possible, ce qui est essentiel, même pour chanter du Strauss ou du contemporain. Et puis, vous savez, j'ai une formation de violoniste ; je suis donc habituée à passer d'une époque à une autre, cela fait vraiment partie du métier. Quel est votre portrait personnel de Barbe-Bleue, un rôle que vous avez mis à votre répertoire en 1997 ? J’ai fait mes débuts dans ce rôle effectivement à Budapest en 1997. Je l’ai beaucoup interprété, y compris en version de concert, version qui est très présentable au demeurant. Pour moi, cet opéra est une analyse psychologique de la relation homme-femme, un homme et une femme se cherchant mutuellement, ou plutôt se croisant sans se trouver. C’est un ouvrage qui sonde les profondeurs extrêmes des mystères et de la souffrance. J’ai joué à Budapest dans une production très intéressante dans laquelle je chantais l’opéra deux fois, avec deux mises en scène différentes. Dans un premier temps, l’œuvre était présentée du point de vue de l’homme, ensuite, du point de vue de la femme. Ce fut une expérience incroyable, car non seulement il fallait chanter le rôle deux fois, l’un après l’autre, mais aussi jouer deux histoires différentes dans la même soirée. Ces deux rôles sont parfois confiés à des sopranos, parfois à des mezzosopranos. Quel est votre sentiment ? Les tessitures sont très tendues dans l'aigu, c'est un fait, mais il leur faut aussi une profondeur et une réelle projection dans le grave. Tout dépend des ©Dario Acosta Les rôles de La Mère du Prisonnier et de Judith du Château de Barbe-Bleue sont assez différents, en psychologie, mais aussi en vocalité. Judith est un rôle merveilleux. Si l'on se replace dans le contexte de la création de l’œuvre, on voit ce que cela suggère sur les enjeux de la relation hommes-femmes dans la société de l'époque, avec ses règles d'une rigidité de fer. Si l'on creuse le sillon psychologique de Judith, ou celui de toutes les épouses de Barbe-Bleue d'ailleurs, on peut se demander s'il ne convient pas de voir là l'expression incarnée de son subconscient, ses voix intérieures. Mais ce ne sont là que mes propres pistes de lecture, mes propres réflexions. Le rôle est d'une telle richesse, d'une telle complexité ! Et puis j'aime attendre aussi de voir ce que me propose le metteur en scène, sa vision du personnage, la compréhension qu'il en a. Il ne faut surtout pas arriver avec une vision trop déterminée pour laisser la place à cette interaction essentielle entre le metteur en scène et le chanteur. La Mère du Prisonnier est parfois perçue elle aussi comme une émanation de la psychè de son fils incarcéré. Oui, cette scène pourrait tout à fait être perçue comme un cauchemar du Prisonnier, c'est une option tout à fait défendable. Là encore, j'attends de voir le parti pris par Aurélien Bory. moment est différent de l’autre, en permanence changeant d’humeur et de vibrations. Et puis, avec chaque Judith, la pièce est spécifique, comme dans la vraie vie, il s’instaure chaque fois une relation différente. couleurs voulues, finalement. La musique de Dallapiccola, en outre, est très exigeante du point de vue rythmique ; finalement, le rôle de La Mère, quoique bref, est intense. Quant au rôle de Judith, il est d'une terrible complexité émotionnelle. Le défi est ici de garder la tête froide et de ne pas se laisser emporter par les émotions. n Propos recueillis par Jean-Jacques Groleau, juillet 2015 C’est votre quatrième invitation au Capitole, mais cette fois dans un rôle de premier plan. À quelques semaines de la première, quelles sont vos attentes ? Après trois grandes productions (Don Carlo, Rigoletto et La Dame de Pique), je suis très heureux de chanter à nouveau sur la scène du Capitole ! De plus j’ai hâte d’interpréter encore une fois Barbe-Bleue et aussi de présenter un opéra hongrois au public de mélomanes de Toulouse. Je suis sûr que ce sera une très belle production, de haut niveau et que nous allons pouvoir nous enrichir, si l’on peut dire, d’un nouveau et grand Château de Barbe-Bleue. n Propos recueillis par Robert Pénavayre, août 2015 (retrouvez l'intégralité de l'entretien sur notre site internet : www.theatreducapitole.fr) La Porte, Vincent Fortemps 6 7 OPÉRA – Rigoletto Rigoletto même du mélodrame romantique est liée à des changements dans la technique vocale. Il est possible en effet que la première Gilda, Teresa Brambilla, ait chanté Nabucco (Abigaille) et Ernani (Elvira), mais il est parfaitement documenté aujourd’hui que Verdi l’a choisie après l’avoir entendue dans Luisa Miller, un opéra qui réclame dans son 1er acte, de la part du rôle-titre, une remarquable agilité vocale. N’oublions pas encore au sujet de cette cantatrice qu’elle chantait dans la Beatrice di Tenda de Bellini et dans Le Cantatrici Villane de Fioravanti, des titres très exigeants dans le respect d’un style vocal néoclassique. Ajoutons que pour son retour à la Scala en 1921, justement avec Rigoletto, Toscanini fait chanter Gilda à Toti dal Monte, une soprano dont les coloratures pyrotechniques sont aujourd’hui difficiles à imaginer. Toutes ces extrapolations vers le haut des tessitures sont influencées par la tradition. Nous pouvons les écouter avec un sentiment nuancé, mais il faut respecter cet état de fait parce qu’il est le fruit de l’expérience de très grands chanteurs. Verdi a toujours eu à cœur de puiser aux sources les plus nobles de l'art théâtral pour créer ses opéras. De Victor Hugo, il a déjà mis en musique le célèbre Hernani – qui perd son « h » initial en traversant les Alpes. Dix ans après le succès de ce formidable Ernani (1844), Verdi s'enflamme pour une autre pièce historique du dramaturge français : Le Roi s'amuse. Pour lui, Hugo y atteint des sommets dignes de Shakespeare. Le résumé Le Duc de Mantoue, coureur de jupons invétéré, confie à l'un de ses courtisans qu'il a récemment entrevu une jeune fille, à l'église. Et qu'elle ne le laisse pas de marbre ! Pendant ce temps, Rigoletto, bouffon de la cour, moque les courtisans qui, à de trop rares exceptions près, font mine de ne pas voir que le Duc séduit leurs épouses et leurs filles. Il ne sait pas encore que la jeune fille dont le Duc s'apprête à faire la conquête est sa propre fille, qu'il élève pourtant dans le plus grand secret, loin de la cour et de ses mœurs délétères. Malgré ses mises en garde, Rigoletto verra sa fille tomber sous le charme du séducteur, qui l'abandonnera sitôt conquise. Il médite sa vengeance, mais elle se retournera contre lui. Rigoletto Giuseppe Verdi (1813-1901) Opéra en trois actes sur un livret de Francesco Maria Piave d’après le drame de Victor Hugo Le Roi s’amuse créé le 11 mars 1851 au Teatro La Fenice, Venise Daniel Oren direction musicale Nicolas Joel mise en scène Carlo Tommasi décors, costumes Vinicio Cheli lumières Le rôle du Duc est également très délicat à chanter car il ne doit être ni trop spinto ni trop di grazia. Son créateur, Raffaele Mirate, chante aussi Manrico d’Il Trovatore. Quel est donc le format vocal idéal pour cet emploi ? Vous dites, à juste titre d’ailleurs, que Mirate, le premier Duc de Mantoue, chantait aussi Manrico d’Il Trovatore. Permettezmoi d’ajouter qu’avant de chanter Verdi, ce ténor chantait Rossini et était un très fameux Almaviva. Fraschini, le ténor favori de Verdi, célèbre Manrico également, chantait Bellini et Pacini. Il venait donc aussi d’une vocalité néoclassique. Le quatuor du dernier acte est un monument musical, vocal et dramatique, mais aussi un monument de difficulté à mettre en place. Comment le travaillez-vous ? Vous avez raison, ce quatuor est difficile à mettre en place, mais cela dépend aussi de la qualité des chanteurs. Je voudrais ajouter qu’il y a des morceaux dans les opéras de Verdi bien plus délicats, comme par exemple la fugue finale de Falstaff : « Tutto nel mondo e burla ». L'important est de bien comprendre ce que Verdi a écrit et ensuite de très bien le préparer, le répéter. Le piège stylistique du rôle-titre ne réside-t-il pas dans une puissance dramatique qui peut entraîner l’interprète vers des accents véristes ? En ce qui concerne la vocalité du rôle-titre, nous savons que Verdi attribue avec beaucoup de conviction le rôle de père dans ses opéras à la voix de baryton. Pour ce compositeur, le timbre barytonnant est idéal pour cet emploi, c’est la voix qui s’accorde le mieux à l’écriture musicale, indépendamment de la fonction dramaturgique. Mais tout cela dépend aussi du talent de l’artiste et de l’attention du chef d’orchestre quant aux exigences stylistiques. Quelle est la place de Rigoletto dans l'évolution de l'écriture verdienne ? Vous me demandez quel est le morceau de Rigoletto qui, plus que les autres, laisse entrevoir ce que deviendra Verdi ? Je pense que c'est l'orage du dernier acte qui laisse entrevoir celui, beaucoup plus complexe et capital dramaturgiquement, qui ouvre l'action d'Otello. n Propos recueillis par Robert Pénavayre, août 2015 (découvrez l'intégralité de l'entretien dans le programme de salle) Entretien Daniel Oren, direction musicale 8 Trovatore, il est dramaturgiquement un retour à l’antique, qui s’appuie en l’occurrence sur le romantisme espagnol. Nous pouvons dire cependant que ces trois opéras constituent une trilogie car ils sont comme une ligne de partage des eaux dans la production verdienne. Il est incontestable qu’il y a un avant et un après à cette trilogie dans le regard de la critique et du public. Venons-en à Rigoletto et plus particulièrement à Gilda. Teresa Brambilla, qui crée le rôle, est également connue pour ses Abigaille (Nabucco) et Elvira (Ernani). La partition originale de Rigoletto ne dépasse pas, la concernant, le contre ut. Toscanini lui-même choisit Zinka Milanov pour être sa Gilda en Amérique. Pourquoi alors ce rôle a-t-il longtemps été l’apanage de sopranos leggieri ? Il faut bien se rendre à l’évidence que l’histoire de la vocalité est extrêmement dynamique, que chaque âge a son propre style de chant, que l’évolution ©Julien Benhamou On parle souvent de trilogie à propos de Rigoletto, Il Trovatore et La Traviata, trois œuvres créées entre 1851 et 1853. Giuseppe Verdi a-t-il tissé des liens intimes entre ces opéras ? Je ne pense pas que Verdi avait programmé de composer une trilogie. Il a écrit trois opéras, l’un après l’autre, de 1851 et 1853. Ce rythme de production lui était habituel. Faut-il rappeler qu’en trois ans également, entre 1842 et 1844, il a composé Nabucco, I Lombardi, Ernani et I due Foscari ? Et entre 1845 et 1847, il en a produit cinq : Giovanna d’Arco, Attila, Macbeth, I Masnadieri et le remake pour l’Opéra de Paris d’I Lombardi : Jérusalem ! (…) La différence avec les œuvres précédentes, et ceci plus particulièrement pour Rigoletto et La Traviata, réside dans le choix inattendu de thématiques en prise avec son temps. Il s’agit alors de traiter de la condition humaine de personnages oppressés par le pouvoir, c’est Rigoletto face au Duc de Mantoue, ou bien des effets dévastateurs des conventions sociales, c’est Violetta. (…) Quant au Orchestre national du Capitole Chœur du Capitole Alfonso Caiani direction Production du Théâtre du Capitole (1992) Spectacle en langue italienne surtitré en français Théâtre du Capitole 17, 20 et 26 novembre à 20h 22 et 29 novembre à 15h Durée 2h50 Tarif A de 20,50 à 109 € Audiodescription pour les personnes déficientes visuelles 20 novembre à 20h, 22 novembre à 15h Entretien Nicolas Joel, mise en scène Staunch Friends (1859) - William Frederick Yeames (1835-1918) - Detroit Institute of Arts, USA - Bridgeman Images Ludovic Tézier Rigoletto Saimir Pirgu Le Duc de Mantoue Nino Machaidze Gilda Sergey Artamonov Sparafucile Maria Kataeva Maddalena Cornelia Oncioiu Giovanna Dong-Hwan Lee Le Comte Monterone Orhan Yildiz Marullo Dmitry Ivanchey Matteo Borsa Igor Onishchenko Le Comte Ceprano Marie Karall La Comtesse Ceprano Marga Cloquell Un Page Le caractère général de cet ouvrage, que ce soit l’original de Victor Hugo ou bien la transposition lyrique de Giuseppe Verdi, est-il profondément ancré dans la Renaissance, que ce soit en termes de couleurs, de costumes, de mœurs ? J’en suis parfaitement persuadé et c’est d’ailleurs le projet scénographique et dramaturgique que j’ai alors développé avec le décorateur italien Carlo Tommasi. Pour moi, en tant que récent Directeur du Théâtre du Capitole à cette époquelà, c’est-à-dire en 1992, c’est un spectacle très important car, d’une certaine manière il installait l’esthétique que j’ai par la suite développée durant tout mon mandat, une esthétique classique respectueuse des livrets et de la musique. Vous parlez de couleurs et vous avez parfaitement raison. Je me souviens d’une réflexion du maestro Maurizio Arena qui conduisait la première de cette production. Dès qu’il vit les décors et les costumes, il me dit : « C’est la couleur de Rigoletto ». L’œuvre est totalement ancrée dans la Renaissance, même si elle est ici revue et corrigée par le XIXe siècle bien sûr. Nous l’avons fait avec des moyens scénographiques traditionnels, c’est-à-dire en mélangeant les décors construits et les décors peints. Ce qui vraiment m’importait était de trouver cette couleur. Journée d’étude Victor Hugo, le drame romantique français et l’opéra Contact Institut Irpall : Christine Calvet, Institut Irpall [email protected] 19 novembre de 9h à 17h Théâtre du Capitole, Grand foyer Conférence Michel Lehmann : « Un laboratoire musical et dramaturgique » 12 novembre à 18h Théâtre du Capitole, Grand foyer Parlons-en rencontres d’avant spectacle 17, 20 et 26 novembre à 19h Théâtre du Capitole, Grand foyer 9 Peut-être. Quoi qu’il en soit, Victor Hugo était un vrai « fracasseur » de conventions sociales et l’intervention de la censure a dû profondément lui déplaire. Quelles sont les différences qui éloignent Rigoletto de Verdi et Le Roi s’amuse de Victor Hugo ? En fait il n’y en a pas tellement. Le livret de Piave est une très bonne adaptation de l’œuvre de Victor Hugo. Certes il y a des changements qui ont été nécessités par la censure car il était alors impossible de représenter un Roi aussi pervers que ne l’est le Duc de Mantoue. Sinon, je le répète l’adaptation est assez fidèle. Le metteur en scène ne doit-il pas, exceptionnellement, adapter sa vision du personnage au potentiel dramatique de son interprète ? Bien sûr que oui et c’est même son devoir. Que ce soit clair, on ne peut chanter Rigoletto si l’on n’est pas un grand artiste. Ce rôle réclame des qualités de comédien et des ressources vocales gigantesques. Vu les exigences en tous genres de ce rôle, j’ai toujours essayé d’aider l’interprète. Tout en le guidant dans ce que j’estime être la vérité de l’ouvrage, je me suis constamment placé à ses côtés, que ce soit Alain Fondary ou Juan Pons, pour ne citer qu’eux au Capitole. Aujourd’hui je me réjouis d’avoir à travailler avec Ludovic Tézier sur ce rôle. C’est pour moi un partenaire de longue date et le voir accéder à cet Everest du répertoire pour baryton est pour moi une grande joie. n Propos recueillis par Robert Pénavayre, août 2015 Y avait-il une raison particulière pour que Victor Hugo ne soit pas favorable à l’adaptation de son œuvre dans le cadre lyrique ? Tout d’abord, est-ce que Victor Hugo aimait le théâtre lyrique ? Je crois qu’il n’y a rien de moins sûr. Peut-on ensuite parler de jalousie d’auteur ? Le personnage de Rigoletto est l’un des plus fascinants composés par Verdi, l’un des plus complexes aussi. Tracez-nous le portrait que vous en donnez sur scène. Je vous disais en liminaire que j’essaie toujours de rester le plus fidèle à la lettre de l’ouvrage. Je montre donc un père déchiré, obligé par des conventions sociales de jouer un rôle, celui d’un bouffon. On apprend très vite qu’il vit dans le souvenir de sa femme disparue et dans l’amour qu’il porte à sa fille. Tout cela, le compositeur le montre avec un génie sans égal de la caractérisation musicale. Portrait Ludovic Tézier, baryton ©Cassandre Berthon Est-il réellement besoin de présenter Ludovic Tézier au public du Théâtre du Capitole ? En 1998 déjà, il était ici même un mémorable Zurga (Les Pêcheurs de perles, Bizet), imposant d'emblée une noblesse de style, une élégance qui devaient faire de lui l'un des plus grands noms du chant français de sa génération. Le Théâtre du Capitole devient dès lors un peu sa deuxième maison, puisqu'il y enchaîne ensuite bon nombre de rôles de tout premiers plans, Wolfram de Tannhäuser (Wagner), le Comte des Noces de Figaro (Mozart), Onéguine (Eugène Onéguine, Tchaïkovski), un Posa d'anthologie (Don Carlo de Verdi) – quel souffle, quelle ligne il y déployait ! –, parvenant même à redonner vie à Hamlet, ce chef-d’œuvre d'Ambroise Thomas trop longtemps délaissé des scènes hexagonales par manque de baryton capable d'endosser ce rôle vocalement et psychologiquement si exigeant. Mais si l'artiste a toujours su rester fidèle au Capitole, les plus grandes scènes du monde se l'arrachent également : Vienne et Munich lui demandent par exemple Les Noces de Figaro (Mozart), Don Carlo et La Force du destin (Verdi), Carmen (Bizet) ou encore Werther (Massenet), Salzbourg lui propose d'explorer quelques horizons moins fréquentés, comme cette rarissime Cléopâtre de Massenet en 2012, le Metropolitan de New York rajoutant à cette moisson Lucia di Lammermoor (Donizetti) ou La Bohème (Puccini) aux côtés de Natalie Dessay et d'Angela Gheorghiu respectivement, sans parler de ses nombreuses apparitions à la Scala de Milan, à l'Opéra de Paris et au Covent Garden de Londres. Malgré cette carrière au sommet, Ludovic Tézier a su rester fidèle à ses racines, et il continue à chanter dans les théâtres de France, profitant de l'occasion pour s'essayer à de nouveaux rôles. On a ainsi pu l'entendre à Marseille dans une des œuvres les plus injustement oubliées de Bellini, La Straniera, et à Montpellier dans L'Étranger de Vincent d'Indy, ouvrage encore plus confidentiel. Parmi les raretés, signalons en outre que Ludovic Tézier a également remis au goût du jour la version pour baryton de Werther, version remaniée par Massenet lui-même pour le grand baryton de l'époque, Mattia Battistini – belle filiation d'artiste ! L'impact physique de son chant, les couleurs moirées de son timbre, font de chacune des apparitions de Ludovic Tézier un moment bouleversant. On ne peut que déplorer la maigreur de sa discographie, même si le Théâtre du Capitole a contribué à réparer cette injustice en publiant en DVD La Favorite de Donizetti donnée ici même en février 2014. Son Rigoletto sera, assurément, l'un des moments forts de cette saison. n Jean-Jacques Groleau 10 Entretien Saimir Pirgu, ténor Votre emploi du temps est désormais celui d’un ténor de niveau international et ne vous laisse que peu de place pour des prises de rôle, si ce n’est, au mois de mai de cette année, celle du Berger dans Le Roi Roger de Karol Szymanowski à Londres. Comment, à 34 ans, se gère personnellement et professionnellement une telle carrière ? La vie d’un chanteur est pleine de sacrifices. Avant d’entreprendre ce métier, il faut être sûr d’en avoir la vocation. Et même la passion ! Je vis 300 jours par an de par le monde. Bien sûr j’ai quand même quelques jours chez moi, mais le plus souvent je suis loin de mes proches et de ma famille. D’un point de vue strictement professionnel, ce métier exige une étude quotidienne de la technique vocale, du phrasé, de la projection et en plus de la gestion des émotions. Le développement de la carrière d’un artiste lyrique dépend, au cours des années, de la manière dont il a pris soin de son instrument vocal. On comprend bien ici que le rôle du professeur est crucial. Contrairement à tous les autres instruments de musique, pour lesquels le son qui sort de l’instrument arrive identique aux oreilles de l’artiste comme à celles du public, un chanteur n’entend pas exactement sa voix comme elle est perçue par les spectateurs. Nous avons donc toujours besoin d’une oreille aguerrie dans la salle qui nous fera faire les bons choix. Malgré toutes les contraintes de ce travail, les récompenses sont si grandes qu’elles nous font vite oublier les sacrifices que j’évoquais plus haut. Le seul test professionnel pour un chanteur demeure la scène, en particulier pour les débutants. C’est grâce à l’expérience scénique que nous faisons les bons et surtout les plus importants choix, que nous prenons aussi conscience de nos erreurs, que nous nous améliorons et qu’ainsi nous pouvons nous projeter plus avant dans notre carrière. Vous évoquez mes nouveaux rôles. La question est très importante et sensible car aborder un nouvel emploi requiert la pleine connaissance de sa voix et une excellente préparation en amont, bien longtemps avant la prise de rôle. C’est typiquement le cas du Duc de Mantoue que j’ai étudié pendant des années avant de l’aborder enfin en… 2007 ! L’important est de ne jamais arrêter, se relâcher et de toujours se remettre en question. Venons-en à Rigoletto et à ce personnage peu recommandable qui est celui du Duc de Mantoue. À mi-chemin entre le ténor di grazia et le spinto, sollicité sur des vocalises et un phrasé au style qui se doit d’être parfait, ce rôle est long et particulièrement difficile. Comment vous préparez-vous à chanter un tel emploi que vous connaissez à présent depuis de nombreuses années ? Je veux commencer par dire que, contrairement à la vision la plus communément partagée, le Duc n’est pas un être négatif, méchant et peu fréquentable. Il s’agit plutôt d’un homme qui a toujours vécu dans l’opulence, il n’a jamais regardé « en bas » et ne s’est jamais intéressé aux problèmes des gens normaux. C’est une personne qui a toujours pris la vie à la légère, qui aime s’amuser, capable de « fun-loving », mais capable également, de brefs moments certes, de s’interroger sur ses propres sentiments, se demandant parfois si ce qu’il ressent ne serait pas de l’amour (Parmi veder le lagrime). Je suis persuadé que c’est plutôt un gars qui a peur de céder à ses sentiments et c’est pour cela qu’il prend la voie du libertinage. Pour en venir à sa typologie vocale, le Duc ne réclame ni un ténor di grazia ni un spinto. Toutefois, il nous faut bien constater qu’à travers l’histoire de ses interprètes, ce rôle a été chanté par tout type de ténor : di grazia, léger, lyrique, spinto et même dramatique. Ma réflexion sur ce sujet est que cet emploi est celui d’un lyrique. Ce n’est pas un hasard si les grands Duc s’appelaient Di Stefano, Pavarotti, Carreras et Kraus, tous des ténors au timbre solaire et à la technique infaillible. Les ténors di grazia et les dramatiques n’ont jamais été crédibles dans ce rôle. J’ai chanté le Duc sur les plus grandes scènes du monde, du Covent Garden de Londres jusqu’au Staatsoper de Vienne, dans des productions parfois classiques, parfois modernes, et je suis vraiment enthousiaste à l’idée de le chanter au Capitole. C’est un rôle que j’aime particulièrement, qui s’adapte parfaitement, en le mettant en valeur, à mon potentiel vocal et scénique, un rôle dans lequel je peux m’exprimer pleinement. Cela dit, c’est une partition qui tient en alerte permanente car elle réclame un contrôle technique, expressif et vocal de tous les instants. Le créateur du Duc de Mantoue, Raffaele Mirate, chante également, avec l’accord de Verdi, Manrico du Trovatore. Quelle réflexion cela vous inspire ? Heureusement pour nous, Verdi n’était pas qu’un grand musicien, il était aussi un fin connaisseur de la voix humaine et de l’appareil vocal. Cela veut dire que son écriture peut s’adapter facilement aux diverses vocalités. Les partitions ©Fadil Berisha Il est commun d’entendre affirmer que Rigoletto marque une vraie rupture dans l’histoire de l’opéra. Comment se matérialise cette rupture ? C’est l’apparition de la psychologie dans l’opéra. Ce qui passionne ici Verdi, ce n’est pas l’intrigue en elle-même, mais plutôt la nature profonde des personnages, au premier rang desquels bien sûr Rigoletto. Ce personnage illustre à merveille ce que l’on appellera plus tard, en termes de typologie vocale, le « baryton Verdi ». Il y en a eu avant certes, mais avec Rigoletto, le compositeur trouve le paradigme de ce type de voix. Cette rupture que vous évoquez, et qui est réelle, on la trouve également dans l’abandon de la structure traditionnelle de l’opéra, et plus particulièrement des airs qui font place ici à des scènes. originales de Rigoletto et du Trovatore ne sont pas musicalement très différentes. Rien donc d’étonnant à ce que Verdi approuve Mirate pour chanter le Duc. L’écart aujourd’hui entre les deux œuvres vient de la tradition. En effet, les goûts au XXe siècle ont conduit le public à préférer une vocalité plus tendue vers le registre aigu. Cette tradition a modifié, en termes d’interprétation, la partition originale et a creusé l’écart entre les deux œuvres. Demeure cependant le fait que même en tenant compte d’expériences récentes, les deux rôles continuent d’appartenir au répertoire de nombreux ténors, le Duc devant être, normalement, plus jeune que Manrico. Si le Duc de Mantoue vivait aujourd’hui, quel serait le portrait que vous en traceriez ? Un Duc contemporain, je l’imagine vivant dans une grande ville comme Paris, Berlin, Tokyo ou New York. Je le vois bien comme un entrepreneur intelligent ou un golden boy, un jeune homme qui sait comment exploiter les faiblesses des autres, insouciant du monde qui l’entoure, vivant dans le luxe, mais avec une différence, l’actuel Duc, si l’on peut dire, a fait fortune lui-même. La tradition lyrique a considérablement rehaussé par le haut l’ambitus de ce rôle. Quelle est votre sentiment sur ce sujet ? Convient-il de s’en tenir à la partition originale, ou bien sacrifier à la coutume ? Personnellement je n’ai pas de préférence. J’ai chanté l’original et le traditionnel et j’avoue apprécier les deux. Toutefois il est difficile d’imaginer une représentation « originale » qui remportera du succès. Il est clair qu’il est délicat de s’éloigner de la tradition. Je pense par contre qu’il serait utile, à l’initiative des théâtres et des chefs d’orchestre, d’éduquer le public à cet effet. Il est aussi clair que le public est en attente de prouesses vocales et c’est sûr qu’il n’apprécierait pas un Caro nome ou une Donna è mobile sans les aigus ajoutés par la coutume, une coutume qui a quasiment réécrit ces airs. Quels sont vos grands projets de ces prochaines années ? Je vais continuer à travailler avec mon répertoire actuel en ayant en ligne de mire, pour les dix prochaines années, le répertoire français avec des titres tels que Faust, Werther, Manon, Roméo et Juliette. Mes prochains engagements m’amèneront à chanter le Requiem de Verdi au Concertgebouw d’Amsterdam, puis ce sera un récital à Paris, La Traviata à Londres et bien sûr Rigoletto à Toulouse. n Propos recueillis par Robert Pénavayre, août 2015 11 présences vocales #2 – L’Nfer Portrait Nino Machaidze, soprano Festival de Salzbourg, été 2008 : Anna Netrebko, enceinte, se voit contrainte d'annuler une représentation de Roméo et Juliette. Une jeune soprano géorgienne, Nino Machaidze, la remplace alors, au pied levé. Son nom sera désormais sur toutes les lèvres : une étoile était née. Les plus grandes scènes se l'arrachent immédiatement, Berlin, Munich, Londres, Paris, Milan et Vienne, où ses Gilda (Rigoletto de Verdi), ses Juliette (Roméo et Juliette, Gounod), ses Thaïs aussi (Massenet), l'imposent rapidement comme la soprano colorature la plus recherchée de sa génération. Le disque a immédiatement compris quel trésor il avait là, et l'on peut ainsi retrouver la voix de Nino Machaidze dans Fedora de Giordano (où elle chante aux côtés d'Angela Gheorghiu et Plácido Domingo), dans Rigoletto aussi (DVD-Blu-ray, avec Leo Nucci) et Sony lui a même fait enregistrer un disque récital entièrement consacré aux grands airs d'opéras de Rossini, Bellini, Donizetti, Gounod et Massenet. L'année 2016 sera pour elle celle des prises de rôles plus lyriques, avec une Desdemone d'Otello (Verdi) très attendue à Vienne, le rôle-titre de Luisa Miller (Verdi) à Hambourg, et une première Mimi de La Bohème (Puccini) – mais il faudra alors traverser l'Atlantique pour l'y entendre, puisque ce sera à Los Angeles cette fois. n J.-J. G. L’Nfer (un point de détail) L’Nfer (un point de détail) François Sarhan (né en 1972) L'Nfer (un point de détail) est né de mon envie de mélanger la voix parlée, narrative, avec de la musique instrumentale. Le texte est un simple récit dont la quotidienneté permet des dérives, des développements imprévisibles. Ceux-ci sont des œuvres originales, ainsi que quelques pièces empruntées au « rock progressif des années 70 », le tout composant une soirée apparemment légère, libérée de tout diktat moderniste. Il s’agit de renoncer une nouvelle fois au conflit qui oppose une musique légitime et savante à la ritournelle qu’on retient sans y penser, le jingle publicitaire, la dramatique-radio. On trouvera donc dans cet Nfer : un narrateur, un demi-morceau de Zappa, malmené et finalement recomposé, une chanson de Robert Wyatt (chantée par lui-même), diverses pièces de mon cru - certaines anciennes, comme Hell, (a small detail), d'autres nouvelles, comme Missing, ou Hell on line. En passant, on assistera à la transcription intégrale d'un feuilleton radiophonique chrétien du Nebraska, adapté et présenté ici en français, qui raconte la vie de Linda jusqu'à sa révélation religieuse. Dans le même ordre d'idées, un montage de prêcheurs américains, une petite fille chantonnant « Pirouette Cacahuète ». J'aime imaginer cette soirée comme un recueil de moments musicaux au plaisir immédiat, et assemblés sans direction apparente. Le seul fil, fragile, est le narrateur, qui nous guide dans sa mémoire. L'hétéroclite vitalise : il donne vitesse et projection. Ce qui m'intéresse ici, c'est l'hétéroclite des écoutes : attentives, distanciées, ironiques, à fortes références visuelles (dessins animés, télévision), etc. Je ne donne donc pas les détails ni l'ordre des pièces ; sachez simplement que la soirée trouve son rythme dans une alternance de récits et de pièces (ou chansons). Je considère en effet toutes les œuvres de ce programme comme une seule. Qu'elles soient de moi, de première ou de seconde main, peu importe, elles font toutes main basse sur des idées communes. Citation, emprunt, réappropriation, superpositions, rencontres impromptues : délice de la dissolution vers l'anonyme, où rien ne se signe, où tout fait signe - l'enfer des puristes, des romantiques et de leurs successeurs modernistes, autrement dit le pop. n François Sarhan Pour narrateur, ensemble et électronique (création à l’Arsenal de Metz en 2006) François Sarhan voix principale, texte et musique Ensemble SCENATET Jakob Bloch Jespersen baryton Igor Semenoff violon Stefan Baur saxophone Andras Olsen trombone Sven Micha Slot piano / synthétiseur Frederik Munk Larsen guitare Anders Bjerregaard basse Matias Seibæk percussions Spectacle présenté dans le cadre du cycle Présences vocales par le collectif éOle, Odyssud, le Théâtre du Capitole et le théâtre Garonne, en collaboration avec le Théâtre national de Toulouse Spectacle en langue anglaise surtitré en français Théâtre national de Toulouse 20 novembre à 20h Durée 1h10 Tarif de 10 à 20 € (placement libre) CONCERT DE NOËL – Chœur du Capitole Concert de Noël midis du capitole – Dmitry Ivanchey Dmitry Ivanchey a commencé sa carrière de chanteur lyrique en 2008, faisant ses débuts dans Lo Speziale de Haydn. Il a ensuite interprété Marco dans la rare Monna Vanna de Rachmaninov sous la baguette de Vladimir Ashkenazy à Moscou, Almaviva du Barbier de Séville (Rossini) en Estonie, puis Pierre Bezukhov dans Guerre et Paix de Prokofiev à Glasgow et Edimbourg. En 2012, il intègre la troupe de l'Opéra de Zurich, tout en faisant ses débuts français à Lyon dans le rôle du Ténor italien dans Capriccio de Richard Strauss. Il alterne alors les rôles aussi divers que Belfiore du Voyage à Reims (Rossini) au Festival Rossini, le Jeune Comte des Soldats de Zimmermann, Basilio dans Les Noces de Figaro (Mozart), Trin de La Fanciulla del West (Puccini), Flavio dans Norma (Bellini) ou encore le Messager d'Aida de Verdi (tout cela à Zurich). Cette saison, il ajoutera à son répertoire zurichois le Remendado de Carmen (Bizet), Pang dans Turandot (Puccini) et Bardolfo de Falstaff (Verdi), et continuera à se faire connaître dans les autres grandes scènes européennes : le Ténor italien de Capriccio à La Monnaie de Bruxelles et le Pilote du Vaisseau fantôme (Wagner) avec l'Orchestre national d'Espagne par exemple. n J.-J. G. 12 Dmitry Ivanchey Mélodies et airs de Haendel, Schubert, Donizetti, Glinka, Bixio, Curtis, Tchaïkovski et Rachmaninov Mélodies folkloriques russes Dmitry Ivanchey ténor Christophe Larrieu piano Théâtre du Capitole 24 novembre à 12h30 Durée 1h environ Tarif unique, placement libre : 5€ Chœur du Capitole Concert de Noël Rendez-vous désormais incontournable de la période des fêtes de fin d'année, le Concert de Noël du Chœur du Capitole ne se contentera pas de réexplorer les chants de Noël et autres cantiques britanniques, les fameux « Christmas Carols ». La première partie du concert fera place à l'une des plus belles œuvres de Mozart : Les Vêpres solennelles du confesseur. À vingt-quatre ans à peine (nous sommes alors en 1780), Mozart déborde des cadres habituels de la musique religieuse pour faire entendre, à son habitude, toutes les émotions humaines possibles. Il est vrai qu'à cette époque, le jeune compositeur rentre d'un long voyage de 18 mois, voyage durant lequel il découvre la cour de Versailles et la musique de la cour de France. Ces expériences se feront immédiatement sentir dans la musique du jeune Salzbourgeois, qui laisse courir sa verve et son inventivité avec une fraîcheur toute nouvelle – surtout en matière de musique sacrée ! Le destinataire, le très austère Prince-archevêque Colloredo, n'appréciera d'ailleurs que fort modérément ce style nouveau, précipitant la rupture avec Mozart. Ce dernier ne tardera pas en effet à vouloir désormais voler de ses propres ailes. Ces Vêpres sont ainsi, d'une certaine manière, une œuvre pivot dans sa carrière, point d'orgue de ses années à Salzbourg, et signal d'un nouveau départ : Vienne. n J.-J. G. Wolfgang Amadeus Mozart Vêpres solennelles du confesseur K.339 Chants traditionnels de Noël Chœur et Maîtrise du Capitole Orchestre de Chambre de Toulouse Alfonso Caiani direction Théâtre du Capitole 8 décembre à 20h Durée 1h20 environ Tarif de 10 à 20 € Wolfgang Amadeus Mozart vers 1780 peinture de Johann Nepomuk della Croce (1736-1819) 13 Ballet – Giselle Giselle, Entretien Kader Belarbi chef-d’œuvre du ballet romantique C’est le 28 juin 1841, à l’Académie Royale de Musique de Paris que fut créé l’ouvrage qui allait être considéré comme l’apothéose du ballet romantique : Giselle d’Adolphe Adam. Certes, il avait été précédé neuf ans plus tôt de La Sylphide (1832), véritable prototype et archétype du genre. Mais, pour aussi réussie que soit La Sylphide, elle n’est en quelque sorte que l’esquisse indispensable à la réalisation du chef-d’œuvre que sera Giselle. Non seulement, sa « trame dramatique est plus clairement structurée que celle de tout autre ballet classique » comme l’affirme Merce Cunningham, mais encore la relation entre la musique, la chorégraphie et l’action est parfaitement équilibrée, aucun de ces éléments ne dominant les autres. Carlotta Grisi dans l'acte II de Giselle, gravure de 1842 Giselle par Alexandre Gouliaev© Quelques uns des plus éminents personnages du temps prirent part à sa création : Théophile Gautier, écrivain, critique d’art, chroniqueur de danse, et JulesHenry Vernoy de Saint-Georges, alors célèbre dramaturge, unirent leurs talents pour en rédiger le livret d’après, excusez du peu, Heinrich Heine ; Adolphe Adam en composa la musique ; Jean Coralli, alors Premier maître de ballet de l’Opéra, et Jules Perrot en dessinèrent la chorégraphie ; Pierre Ciceri, le spécialiste des décorations romantiques à l’Opéra, en conçut les décors, les éclairages (au gaz) et les machineries et Paul Lormier, les costumes. Et n’oublions pas les deux artistes d’exception qui interprétèrent les rôles des deux protagonistes : Carlotta Grisi (Giselle) et Lucien Petipa (Loys/Albrecht). L’ouvrage raconte l’histoire d’une jeune paysanne, Giselle, amoureuse d’un certain Loys qui, très vite, s’avère être un grand seigneur travesti en paysan, le duc Albrecht de Silésie. Ne supportant pas d’avoir été dupée, Giselle perd la raison et meurt au cours d’une poignante scène de folie. Elle renaît à l’acte II parmi les « Wilis », ombres blanches immatérielles qui, nuitamment, condamnent les mortels à danser jusqu’au trépas. Giselle n’a pas l’âme vengeresse et protège son bien–aimé, éploré sur sa tombe, en lui pardonnant son imposture dans un dernier adieu. Personnages éternellement insatisfaits, héros poursuivant des chimères, amour plus fort que la mort, pléthore de créatures fantastiques, vaporisées de tissus arachnéens, donnant lieu au « ballet blanc » du deuxième acte, dualité marquée entre rêve et réalité, scène de la folie, couleur locale… : autant de thèmes qui vont être savamment traités dans Giselle, faisant de cette pièce, le chef d’œuvre incontesté du ballet romantique et la plus haute expression dansée de ses idéaux. Dans sa version, Kader Belarbi souhaite renforcer le dualisme entre monde terrestre et surnaturel. Il cherche, notamment, à accentuer la veine populaire des danses du monde paysan de l’acte I, en lui opposant la pointe qui envole les créatures éthérées, au deuxième acte. Puisant aux sources musicales d’Adolphe Adam, en compagnie du chef d’orchestre Philippe Béran, Kader Belarbi s’empare de l’histoire de Giselle, afin de l’écrire avec ses propres mots, tout en respectant le chemin de la tradition. n Carole Teulet 14 Pourquoi proposer une nouvelle version de Giselle pour l’ouverture de la saison 15-16 du Ballet du Capitole ? Giselle est l’un des ballets les plus dansés au monde. C’est le chef-d’œuvre du ballet romantique. C’est l’un de mes ballets fétiches et j’ai eu le plaisir d’interpréter de nombreuses versions classiques ainsi que la relecture contemporaine de Mats Ek. Aujourd’hui, un Ballet d’envergure se doit d’avoir à son répertoire un Giselle de belle facture. Pour cela, il doit, entre autres, être doté d’un Corps de ballet féminin de qualité. C’est ce que je tente de mettre en œuvre au sein du Ballet du Capitole. En tant que directeur de la danse, je veux inscrire une nouvelle production de Giselle au répertoire du Ballet du Capitole, à travers ce qui m’a été transmis par les chemins de la tradition de l’école française, en étant fidèle à l’esprit et à la lettre. Pour cela, je me suis replongé dans les écrits de Théophile Gautier, dans les sources musicales d’Adolphe Adam et dans le contexte de l’œuvre, depuis sa création en 1841 jusqu’à nos jours. La question de la mémoire, de l’interprétation et de la transmission se pose toujours pour parvenir à un juste sens. Avec un grand intérêt, je suis allé à la Bibliothèque-Musée de l’Opéra de Paris pour faire mes propres recherches. J’ai été subjugué par tous ces artistes qui ont donné une pâte à ces nombreux Giselle. Pierre Vidal, directeur de la BibliothèqueMusée et son adjoint Mathias Auclair ont eu la gentillesse et la grande générosité de m’ouvrir les portes de cette mémoire gigantesque. Et c’est avec émotion que j’ai lu et vu des trésors historiques. Au cours de ces recherches, je me suis fabriqué une forme d’inventaire sur les indications de l’action, de la pantomime, de la musique originale, de la description des costumes, des accessoires et des éléments de décors, dans l’esprit de l’époque et de l’ouvrage. Mais je ne souhaite pas parler de reconstitution, car l’écueil à éviter est le ballet-pièce de musée. Il me paraît essentiel de respecter les ouvrages du passé en formulant une transmission, une tradition qui se perpétue. Mon souhait est de créer un Giselle vivant et actuel, qui s’inscrive dans le regard et le désir d’aujourd’hui. Au fil du temps et des interprètes, Giselle a évolué et les transformations respectueuses de l’esprit original de l’œuvre permettent d’inscrire encore ce chef-d’œuvre du XIXe siècle dans notre présent. Sans trop dévoiler votre vision de l'œuvre, pouvez-vous nous dire en quoi elle sera différente de ce qui a déjà été fait ? Je ne cherche pas l’originalité. Je trouve le sens et une justesse de ton après avoir rassemblé en moi tout ce qui correspond à un héritage et à une projection personnelle. Je crée une nouvelle version avec mes propres mots. Dans le 1er acte, je fais des paysans initiaux des vignerons et j’enracine les danses populaires. Pour cela, j’ai ré-agencé la musique d’Adolphe Adam afin de créer une dramaturgie musicale correspondante à cet univers. Comme il se doit dans les grands ballets, les conditions sociales des protagonistes sont très contrastées. En opposition aux vignerons, la seigneurie est plus dansante, interrompant une chasse au vol pour faire une halte dans la clairière. Pour accentuer la dualité entre monde terrestre et monde immatériel, le ballet blanc du deuxième acte retrouve une plus grande élévation avec le retour – comme à l’origine – des vols des Wilis (fiancées mortes avant leurs noces). Je donnerai un soin particulier à la virtuosité technique et à la qualité des pointes des Wilis, vaporeuses « Filles de l’air » comme disait Théophile Gautier. Le thème romantique de l'amour plus fort que la mort est évidemment ici pleinement à l'œuvre. Plus que dans tout autre ballet, dans Giselle, le mouvement se transforme en langage de l'âme. Cette nouvelle version respectera la tradition, avec le regard de ce que nous sommes aujourd’hui. Pourquoi avoir choisi Thierry Bosquet, Olivier Bériot et Sylvain Chevallot pour concevoir les décors, les costumes et les lumières de cette production ? Thierry Bosquet travaille pour l’opéra, la danse et le théâtre et réalise des décors et des costumes dans la plupart des théâtres et opéras du monde entier. Amoureux de l’art baroque et de l’art gothique flamboyant, il se consacre également à des projets de décoration au travers de nombreuses peintures murales pour des châteaux ou des hôtels particuliers. Il est avant tout un somptueux peintre raffiné qui a su créer une scénographie pour Giselle, composée principalement de toiles peintes représentant une forêt automnale au 1er acte et une forêt lunaire au 2e acte. Son sens du beau, sa sensibilité et sa finesse d’esprit éclairent tous les aspects rêvés de Giselle. Pour cette nouvelle création, je retrouve deux fidèles complices, Olivier Bériot et Sylvain Chevallot avec qui nous avons créé plusieurs ballets. Olivier Bériot est créateur de costumes pour le cinéma, la danse et le théâtre. La principale direction de travail que je lui ai indiquée a été de s’inspirer de l’univers de Pieter Brueghel l’ancien. Ses tableaux représentent la vie populaire et le peintre nous montre des paysans tels qu'ils sont dans leurs activités et leurs divertissements. À travers des scènes pittoresques, la facture des costumes d’époque transparaît et les couleurs résonnent. Ces tableaux traités avec réalisme et perspicacité sont un parfait témoignage et une grande source d’inspiration. En contraste, nous cherchons une épure pour l’univers du 2e acte. Sylvain Chevallot travaille pour le théâtre, la danse, le cirque et la marionnette. Sous son regard, la forêt devient un support pour le traitement des lumières et apparaît comme l'espace frontalier entre deux mondes. Le travail des lumières va d’une lueur matinale à une lune à la transparence bleue jusqu’aux premières lueurs de l’aube. Sylvain Chevallot traite ce monde sous le mode de l'ambivalence où les ambiances scéniques resplendissent de couleur locale et s’opposent au mystère de la forêt, monde propice au surnaturel. Dans une de vos récentes interviews, vous avez dit que vous alliez étroitement collaborer avec le chef d'orchestre Philippe Béran. J’aime bien l’idée d’un compagnon musical. Cette fois, j’ai fait appel à Philippe Béran, chef d’orchestre de la Suisse romande, pour retourner ensemble aux sources de ce qu’Adolphe Adam a composé. Sa partition manifeste une écriture mélodique et obéit à une alternance entre des numéros caractérisés et des scènes de pantomime où les variations de rythme, de couleur instrumentale et l’alternance des tonalités sont d’une grande intensité dramatique. Certaines parties musicales ont subi des coupes et des compromis ont vu le jour. Philippe Béran connaît bien le ballet Giselle pour l’avoir dirigé à de nombreuses reprises. Ensemble, nous avons restitué la partition d’origine et la ré-agençons quand cela s’avère nécessaire et juste, en correspondance avec une nouvelle vision. n Propos recueillis par Carole Teulet Giselle Ballet en deux actes sur un livret de Théophile Gautier et Jules-Henry Vernoy de Saint-Georges, d'après Heinrich Heine création le 28 juin 1841 à l’Académie royale de Musique et de Danse de Paris (Salle Le Pelletier) Nouvelle version d’après Jules Perrot et Jean Coralli (1841) Adolphe Adam musique Kader Belarbi chorégraphie et mise en scène Thierry Bosquet décors Olivier Bériot costumes Marc Deloche créateur bijoutier Sylvain Chevallot lumières Nouvelle production Ballet du Capitole Orchestre national du Capitole Philippe Béran direction Théâtre du Capitole 20, 24 et 27 décembre à 15h 22, 23, 26, 29 et 31 décembre à 20h Durée 1h45 Tarif E de 8,50 à 60 € Cours de danse ouvert au public 12 décembre à 12h15 Théâtre du Capitole, Salle de spectacle Carnet de danse 12 décembre à 18h Théâtre du Capitole, Grand foyer Danse à la Cinémathèque L’Adage, Le Spectre de la danse, Yvette Chauviré une étoile pour l’exemple Trois documentaires de Dominique Delouche 15 décembre à 19h La Cinémathèque de Toulouse Rencontre Giselle et le ballet romantique Avec Monique Loudières, danseuse étoile de l’Opéra de Paris, et Kader Belarbi Animée par Florence Poudru, historienne de la danse 17 décembre à 18h Théâtre du Capitole, Grand foyer 15 Entretien Thierry Bosquet, le souci de la perfection Entretien Philippe Béran, un chef atypique décorateur Vous êtes un décorateur et un costumier de théâtre réputé. Pourquoi avoir voulu exercer cette profession ? Disons que je suis tombé dans la marmite lorsque j’étais enfant. Mon grand-père maternel, Corneille de Thoran, qui était directeur de La Monnaie de Bruxelles, m’a entraîné très jeune dans cet univers fascinant du théâtre qui m’a complètement ébloui, subjugué. Le Théâtre Royal de la Monnaie était le palais de mon enfance et, en quelque sorte, je n’ai jamais voulu le quitter. Depuis mes 6 ou 7 ans, j’ai voulu être décorateur et costumier de théâtre et je n’ai jamais changé d’avis. Concevoir des décors censés se voir de loin a-t-il influencé votre technique picturale ? On dit toujours que ce qui doit être vu de loin doit être peint en grand. En fait, il faut le peindre comme si c’était vu de près. Pour les costumes aussi, c’est la même chose. Dès qu’on ne fait pas de détails, ça se voit et c’est moche. J’ai beaucoup travaillé en Italie, ce sont eux qui m’ont appris qu’il faut détailler les choses, y mettre un soin extrême, contrairement à ce qu’on fait actuellement où il n’y a plus aucun soin. Le souci du détail, c’est quelque chose que le public sent. Votre style de prédilection, le baroque, se ressent-il dans les toiles de Giselle que vous concevez pour le Théâtre du Capitole ? Pour Giselle, non, car c’est un chef-d’œuvre du romantisme et c’est cette touche romantique que je veux lui conserver. J’ai déjà créé un Giselle pour le Ballet de l’Opéra de Paris, il y a fort longtemps. Kader l’a dansé et c’est en se rappelant ces décors qu’il m’a contacté pour concevoir ceux de sa production. C’est un ballet que je connais bien car je l’ai vu des dizaines de fois dans mon enfance, à une époque où les compagnies de ballet étaient particulièrement de qualité. Le décor, c’est le royaume de l’illusion ? Un travail de l’illusion, c’est quelque chose qui, à la fois, est vrai et pas vrai. Quand on fait des trompe-l’œil, dans les palais en Italie, l’illusion est la même que sur une scène. Au théâtre, la technique est parfois un peu plus hâtive, un peu plus épaisse. Elle demande peut-être un peu moins de soin parce que les éclairages ajoutent beaucoup. Quand on éclaire bien un décor, il est mis en valeur et alors, tout à coup, on aperçoit des choses qu’on ne voit pas d’habitude ou le contraire, on voit des choses mal fichues qui n’apparaissaient pas avant d’être éclairées. n Propos recueillis par Carole Teulet Lorsque le Ballet du XXe siècle était fixé à Bruxelles, vous avez été un des collaborateurs attitrés de Maurice Béjart. Je suppose que cette collaboration vous a beaucoup aidé dans votre compréhension de l’univers de la danse. Bien sûr. J’ai réalisé de nombreux décors et costumes pour la compagnie de Maurice Béjart. Maurice Béjart était un génie de la scène. Il m’a appris à aller jusqu’au bout de mes pensées, de mes idées, à réaliser l’impossible car c’est bien ce qu’il demandait. Il était perfectionniste, très exigeant et très drôle aussi. Son génie consistait à faire entrer le public dans un monde. Il ne créait pas des choses morcelées mais un flot, un torrent d’univers, organique, total. Le passé me ronge “ tellement je l’adore Thierry Bosquet ” Vous avez un parcours plutôt atypique puisque avant d’être chef d’orchestre, vous avez enseigné pendant dix ans les mathématiques, la musique et la physique au Collège de Genève, l’équivalent du lycée français. D’où vous est venu le désir, un jour, d’être chef d’orchestre professionnel ? Dès l’enfance, très curieux de tout, j’ai été attiré par mille choses, dont la musique et les sciences. J’ai aussi eu la chance d’avoir énormément de facilité dans mes études. Les mathématiques et la physique ont toujours été pour moi un jeu intellectuel magnifique et exaltant et c’est donc très naturellement que j’ai suivi un cursus général d’études scientifiques (j’ai même commencé un doctorat de physique théorique à l’Université de Genève ), tout en suivant parallèlement une formation musicale professionnelle (prix de clarinette aux Conservatoires de Genève et de Paris). Le choix de la direction d’orchestre est venu lui aussi naturellement car, comparée à la clarinette, la direction d’orchestre offrait un accès illimité à une infinité de splendeurs. Quant au choix de l’enseignement, il est arrivé tant par nécessité que par goût : mon épouse et moi-même nous sommes rencontrés et mariés jeunes. Ayant fait le choix d’avoir aussi rapidement des enfants (nous en avons quatre), l’enseignement offrait l’avantage d’une situation financière stable. J’ai adoré enseigner (musique, mathématiques et physique) le temps de faire mes armes en direction d’orchestre et de prendre mon envol dans cette voie. Vous dirigez de tout : aussi bien de l’opéra que du symphonique, des ciné-concerts, des concerts pédagogiques que vous concevez, dirigez et commentez et vous vous êtes aussi fait remarquer en tant que chef d’orchestre de ballet. Pourquoi cet engouement pour l’art chorégraphique ? Et quelles qualités spécifiques doit développer un chef d’orchestre qui dirige la danse ? La direction de ballet a été pour moi une révélation ! Lorsque l’Opéra de Bordeaux m’a demandé en 1997 de venir diriger mon premier ballet (Les Quatre Tempéraments, musique de Paul Hindemith, chorégraphie de Balanchine), j’ai trouvé cela absolument magnifique ! La musique et la danse, matérialisation physique de la musique, formaient un couple merveilleux ! Et depuis, je n’ai eu de cesse de travailler avec les meilleures compagnies de ballet. De plus, pour moi qui n’avais jamais dirigé de ballet, ce nouveau domaine offrait au scientifique que je suis toute une palette de nouveaux problèmes fascinants à résoudre : la gestion rigoureuse du tempo « parfait » qui permet à la danse de s’épanouir, de dégager une clarté musicale qui permette au rythme et à la pulsation de trouver leur juste place et de faciliter la danse. Bref développer la capacité de servir avec émotion et précision mais aussi faire le lien entre deux mondes exigeants aux contraintes très différentes : la musique et la danse ! En deux mots, un terrain de jeu parfait pour un Suisse (où coexistent quatre cultures très différentes) scientifique comme moi ! Pour Giselle, que vous allez diriger en décembre à Toulouse, Kader Belarbi et vous-même avez souhaité revenir aux sources de la partition. Quelles seront les nouveautés par rapport à la partition de Giselle habituellement entendue ? Giselle, comme vous le savez, a une place très particulière dans le monde du ballet : c’est le n° 1 ! (Je pense l’avoir dirigé au moins 200 fois !). Paradoxalement, il aura fallu attendre 2011 (170 ans après la création du ballet !!!) pour avoir ENFIN une vraie édition musicale critique (Lars Payne) qui livre clairement et dans son intégralité la partition originale d’Adolphe Adam ! ça semble incroyable, mais c’est vrai ! Depuis sa création en 1841, la partition a en effet subi d’innombrables outrages (coupures, inversions, ajouts, réorchestrations et autres mutilations) si bien que le montage musical du ballet, selon les choix du chorégraphe, pouvait devenir un véritable cauchemar pour les chefs et les bibliothécaires (mais aussi les orchestres !), perdus dans le dédale obscur d’éditions anciennes, illisibles et contradictoires. Le résultat, ce sera tout d’abord l’apparition de quelques nouvelles très belles pages musicales (dans le 1er acte en particulier) qui n’ont jamais été jouées car écartées dès la création en 1841 mais aussi, et surtout, une lecture plus « pure » de la musique d’Adam dans laquelle les pièces, de ce qui était auparavant un puzzle éclaté, reprendront leur place naturelle. n Propos recueillis par Carole Teulet Toile de Giselle par Thierry Bosquet 16 on vit avec la musique, “Quand on a une autre qualité de vie. Comme chef d'orchestre, vous êtes confronté en permanence à ce que la société occidentale a fait de mieux. C'est fascinant. ” Philippe Béran 17 Les décors de Giselle, pas à pas Portrait O livier Bériot, de la scène au cinéma costumier Les Garçons et Guillaume, à table ! 1 de Guillaume Gallienne, L'Homme qui rit de Jean-Pierre Améris, Adèle Blanc Sec, The Lady, Arthur et les Minimoys, Malavita, Lucy de Luc Besson, Lucky Luke de James Huth, Le Scaphandre et le Papillon de Julien Schnabel, Femme fatale de Brian De Palma, Le Roi danse de Gérard Corbiau, Fanfan la Tulipe de Gérard Kraczwick… Mais qu’est-ce que tous ces films ont en commun, devezvous vous demander ? Le costumier, vous répondrai-je. En effet, Olivier Bériot a réalisé les costumes de tous les films cités cidessus… et de bien d’autres. Mais il travaille aussi pour le théâtre et la danse, néoclassique et contemporaine avec Kader Belarbi, Susanne Linke, Jean-Claude Gallota ou Thierry Smits, mais aussi baroque puisqu’il est l’un des créateurs de costumes attitrés de Marie-Geneviève Massé, chorégraphe de la compagnie l’Éventail (Les Petits Riens, Le Ballet de l’Amour malade…) ; sans oublier, à mi-chemin, le « happening » déjanté de la chorégraphe sud-africaine Robyn Orlin pour le Ballet de l’Opéra de Paris, L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato de Haendel. Le Théâtre du Capitole ne programme son Giselle qu’en décembre 2015 et pourtant, cela fait déjà plusieurs mois que les toiles de ses décors sont en cours de réalisation dans les gigantesques hangars de ses ateliers provisoires, sis à Lespinasse, au nord de Toulouse. Là, sous l’œil exercé de Philippe Mandile (alias Philibert), peintre-décorateur du Théâtre du Capitole, Gonzalo Correa, Simon Algayon et une stagiaire des Arts appliqués de Paris, Rachel Floch, reproduisent avec minutie les moindres détails des peintures imaginées par le décorateur de théâtre belge, Thierry Bosquet. Mais ce que Thierry Bosquet a représenté à petite échelle, sur un format A3, eux vont devoir le rendre, avec presque autant de précision, sur une toile de fond de 16 mètres par 9. Étendue à même le sol du hangar où elle est broquetée (c’est-à-dire fixée au sol à l’aide de pointes), la vaste toile quadrillée, après avoir été encollée, est peinte par les peintres, debout, munis de pinceaux à longs manches et/ou d’aérographes. Au préalable, ils ont pris soin de reproduire le dessin de la maquette au fusain. Les techniques de peinture de décors de théâtre sont très diverses et toujours adaptées à l’effet recherché. On utilise encore des moyens et des procédés directement hérités des Anciens, notamment du savoir-faire des grands maîtres de la Renaissance. Mais pour des raisons pratiques, on tend de plus en plus à privilégier les techniques et les matériaux modernes que sont la peinture acrylique, le liant vinylique… Si le décor de l’acte I est réalisé sur une toile1, en revanche celui de l’acte II est peint sur un tulle, matériau qui permet des transparences, des jeux d’éclairage, des effets d’apparition et de disparition, indispensables à la féerie du deuxième acte de Giselle. Une fois la peinture de la toile terminée, le voilier pratique des ourlets latéraux et un fourreau au bas de la toile, dans lequel sera introduite une perche. Sur la partie supérieure, une sangle est fixée avec des œillets et des liens qui permettront de la suspendre. n Olivier Bériot a toujours voulu travailler dans la couture, la mode. Déjà enfant, sûrement émulé par sa mère qu’il aimait voir coudre, il confectionnait des marionnettes, des déguisements… Cependant, il commence des études de médecine qu’il abandonne assez vite pour les cours de la Chambre syndicale de la Haute-Couture parisienne et, à sa sortie, est engagé chez Balmain. Puis, une succession de petits hasards aidant, il va se retrouver plongé dans le monde de l’opéra où il est, un temps, l’assistant de deux grandes dames du costume de théâtre, Claudie Gastine et Franca Squarciapino. De l’opéra au ballet, il n’y a qu’un pas qu’il franchira bien vite avant d’être demandé par le cinéma. Parmi ses modèles du Septième Art, Piero Tosi, le costumier de Visconti, Dominique Borg, ou encore Anthony Powell. Son camp de base est l’Atelier Caraco, dans le 9e arrondissement de Paris, où Claudine Lachaud, la maîtresse d’œuvre, fait de ses croquis des réalités. Sur la porte de son studio est dessiné un petit caméléon au nez de clown, clin d’œil à l’une des qualités fondamentales de cette profession, la capacité de s’adapter à toutes les situations – car s’adapter aux exigences des artistes n’est pas chose facile – et aussi la diplomatie. Comme il le dit lui-même, avec humour, « je pourrais travailler aux Affaires Étrangères ». Mais pas seulement, car les séances d’essayage sont parfois de tels enjeux qu’elles ressemblent étrangement à des séances psychanalytiques. Le métier de costumier permettrait-il de soulager les âmes ? n Carole Teulet 1 - Pour ce premier film de Guillaume Gallienne, Olivier Bériot a obtenu le César 2014 des Meilleurs costumes. De même, en 2001, avec Le Roi danse. Quelques croquis pour Giselle par Olivier Bériot Simon Algayon à l'aérographe 1 - C’est le voilier (la personne en charge de la voilerie dans un théâtre, c’est-à-dire des toiles de grandes dimensions) qui prépare les toiles de fond en assemblant plusieurs lés de tissus jusqu’à l’obtention des dimensions nécessaires. « Voilerie », « voilier », « voile », des termes qui nous rappellent la communauté de langage entre le domaine du théâtre et celui de la marine, due au fait qu’autrefois, de nombreux machinistes et monteurs de décors de théâtre étaient recrutés parmi d’anciens charpentiers de marine. ©David Jugniot Thierry Bosquet (au centre) supervise les décors de Giselle. À sa gauche, Philippe Mandile ; à sa droite, Simon Algayon. Peinture de la toile de Giselle 18 19 Le Théâtre du Capitole dans la presse Revue de presse Castor et Pollux - Jean-Philippe Rameau mars / avril 2015 Mai 2015 (…) Christophe Rousset excelle toujours dans Rameau ; parfaitement construite, sans que jamais l'architecture en soit visible, sa direction intègre d'autant plus habilement les danses qu'elles sont traitées ici non comme des épisodes chorégraphiques, mais comme des flash-back racontant la vie des deux héros depuis leur enfance, et que toute rupture du discours serait fatale. Notons la qualité du Chœur du Capitole, dirigé par Alfonso Caiani (…) Michel Parouty 29 mars 2015 (…) Les installations vidéo (Momme Hinrichs et Torge Møller) sont utilisées avec pertinence et illustrent à merveille la « bulle » dans laquelle se trouve Castor alors descendu aux Enfers, mais tout de même suspendu au-dessus du reste du décor. La retrouvaille et le duo des deux frères est poignante, magnifiquement exécutée mais aussi jouée avec un humour finement tissé de subtiles allusions. Français, francophone ou étranger, le texte est toujours intelligible, rendant les surtitres superflus et permettant au public de profiter pleinement du jeu scénique sans en perdre une miette. Le décor sobre et inchangé est parfaitement utilisé et la mise en scène interdit toute lassitude tout au long des cinq actes de la pièce. Avec certitude, un des temps forts de la saison toulousaine (…) Arnaud Saura-Ziegelmeyer Mai 2015 (…) El bello timbre y la seguridad de la emisión de Antonio Figueroa (Castor) contrastó con el acento más lúgubre de Aimery Lefèvre (Pollux), creando un efecto interesante. Hélène Guilmette – Télaïre, suave y dulce pero afirmando siempre su decisión de no ceder en el amor por Castor - y Gaëlle Arquez - Phébé altiva y también decidida a ninguna renuncia - confirmaron sus cualidades escénicas y vocales en una visión del rol bien distinta de la vista en Dijon (…) (…) Le beau timbre et l'émission assurée d'Antonio Figueroa (Castor) contraste avec la tonalité plus sombre d'Aimery Lefèvre (Pollux), créant un effet intéressant. Hélène Guilmette - Télaïre, suave et douce, mais affirmant toujours sa décision de ne pas céder à l'amour de Castor - et Gaëlle Arquez - Phébé fière et déterminée à aucun renoncement - ont confirmé leurs qualités scéniques et vocales dans une vision du rôle bien différente de celle de Dijon (…) Jaume Estapà Amour, Amor avril 2015 16 avril 2015 L'Amour sorcier de Thierry Malandain (…) Sur un tapis de pétales couleurs de cendres, réminiscence du feu, de la mort, Thierry Malandain brode une chorégraphie extrêmement exigeante tant sur le plan technique que sur la coordination d’ensemble. Les formations 20 se mettent en place avec une rigueur remarquable. Les 16 danseurs de la Compagnie sont exemplaires d’homogénéité (…) Annie Rodriguez 13 avril 2015 Les Liaisons dangereuses de Davide Bombana (…) Sur la musique de Jean-Philipe Rameau, Davide Bombana déploie avec volubilité un langage classique sur pointes, ciselé, éblouissant de précision et d'expressivité narrative pour décrire une société aristocratique corrompue de perversité libertine et la déchéance morale et sociale des protagonistes des Liaisons dangereuses, le roman de Pierre Choderlos de Laclos qui fit scandale au XVIIIe. Le propos est servi avec une finesse inégalée par Maria Gutierrez et Valerio Mangianti dont on ne sait plus s'ils dansent ou s'ils vivent réellement cette liaison néfaste à tous et à eux-mêmes (…) Jeanne Cossinières 9 avril 2015 L'Amour sorcier de Thierry Malandain (…) Le chorégraphe de Biarritz évite soigneusement la reconstitution historique, tout comme il contourne le cliché de l’espagnolade (…) Au cœur de l’œuvre, une danse des foulards fait bondir le feu des corps en un brasier concentrique. L’interprétation du ballet du Capitole est impeccable et rend hommage, par sa clarté et sa lisibilité, aux qualités de la chorégraphie. Dominique Crébassol Massacre - Wolfgang Mitterer avril 2015 15 avril 2015 « Massacre » : un message fort (…) D'une durée d'1h20 sans entracte, le spectacle est d'une force expressive qui ne faiblit pas un seul instant. Peu importe que l'ouvrage bouscule les habitudes d'écoute des spectateurs : ce « Massacre » porte un message fort qui traverse les siècles et s'exprime par les voix et la musique, comme dans un véritable opéra (…) Anne-Marie Chouchan 13 avril 2015 (…) In fine, que dire sur ce spectacle, qui est une véritable performance, si ce n’est qu’il vaut incontestablement le détour, quitte à s’y fourvoyer, ceci étant l’affaire de chacun. Qu’il mette mal à l’aise par la crudité des propos et des situations relève certainement de la plus pure intention, les dérives sectaires dont il est l'illustration étant encore de nos jours, hélas, notre quotidien. Mais le travail colossal accompli par tous ces artistes pour nous restituer, en une espèce de grandiose et glaçante cérémonie funèbre proche d’une tragédie grecque ces moments lugubres de notre Histoire, mérite pour le moins le respect. Assurément une expérience que tout amateur d’art lyrique se doit de faire, de vivre, pour comprendre et s’inscrire dans l’évolution de l’opéra. Robert Pénavayre Les Fiançailles au couvent Sergueï Prokofiev mai 2015 20 mai 2015 Des Fiançailles en première classe (…) On ne change pas une équipe qui gagne. Ces Fiançailles au couvent reviennent à Toulouse quatre ans après les représentations données au Théâtre du Capitole puis à la salle Favart. L'humour décapant et décalé de la mise en scène de Martin Duncan sert à la perfection cette œuvre relativement méconnue de Prokofiev (…) Les décors d’Alison Chitty puisent dans l'imaginaire visuel du ciné-train d'Alexandre Medvedkine ou les kaléidoscopes d'un Dziga Vertov pour convertir la fausse Séville de l'intrigue en décor constructiviste soviétique. Les chorégraphies réglées par Ben Wright complètent le tableau en soulignant les angles vifs et les gestes mécaniques – la danse du poisson géant et les ouvriers de la conserverie. Les nombreux changements à vue apportent une touche dynamique et une fluidité vaguement improvisée à un spectacle par ailleurs remarquablement mis en scène (…) David Verdier Juillet/août 2015 (…) À cette incontestable réussite plastique répond, avec un génie égal du rythme, des couleurs et de la pertinence dramatique, le superbe travail de l'Orchestre National du Capitole. Il est évident que Tugan Sokhiev, son directeur musical, adore cette partition, à laquelle il apporte sa passion communicative et son sens aigu du spectacle vivant (…) Pierre Cadars Turandot - Giacomo Puccini juin 2015 25 juin 2015 (…) le Catalan quinquagénaire (Calixto Bieito), qui défraie la chronique depuis quinze ans sur la plupart des scènes européennes (notamment au RoyaumeUni, où il a débuté avec succès), n'avait encore jamais monté une production lyrique en France. La primeur en reviendra à cette Turandot de Puccini donnée au Théâtre du Capitole, à Toulouse, et l'initiative à son directeur Frédéric Chambert, successeur de Nicolas Joël en 2009 (…) Les trophées de l'« Almodovar de l'opéra » dérangent. Mais ils ne seront pas boudés par le public familial de ce dimanche après-midi du 21 juin, les frasques sanglantes, sexuelles et sadomasochistes de Turandot faisant office d'antidote aux somnolences postprandiales (…) Marie-Aude Roux Septembre 2015 (…) De grands bonheurs nous viennent aussi de la fosse. Représentant de la riche école de direction finlandaise (il fut l'élève de Leif Segerstam et Jorma Panula), Stefan Solyom détaille comme jamais la mécanique orchestrale puccinienne, mettant en lumière la mosaïque des motifs mélodiques qui s'imbriquent pour former un flux de magma continu. À ce jeu-là, tous les pupitres et les chœurs du Capitole, d'une cohésion exemplaire, se couvrent de gloire, offrant une pâte somptueuse à ce geste tout en tensions, rebonds et détentes. Si bien que l'on ressort de cette soirée troublé, dérangé - mais touché (…) Emmanuel Dupuy Eh bien, dansez maintenant ! juin 2015 7 juillet 2015 Walking mad de Johan Inger (…) Entrée en 2012 au répertoire du Ballet du Capitole, l’œuvre dégage toujours autant de force expressive. Les courses désordonnées des danseurs aux chapeaux pointus, puis leurs tremblements nerveux, ne tiennent aucun compte du géométrique Boléro de Ravel, d’ailleurs interrompu sans ménagement, et remplacé à la fin par le minimaliste Für Alina d’Arvo Part pour un duo à l’érotisme constamment évité. Défendu avec autant d’enthousiasme par les danseurs du Capitole, cet « éloge de la folie » ne peut que convaincre. Cantata de Mauro Bigonzetti (…) Quatre femmes à la voix rocailleuse, s’accompagnent qui de l’accordéon, qui de tambourins traditionnels de la Campanie ou des Pouilles (…) Dans l'ouvrage de Bigonzetti, créé en 2001 par le Ballet Gulbenkian de Lisbonne, l’énergie hors du commun qui se dégage de ces musiques se transmet sans aucun mal aux évolutions des danseurs, qui multiplient portés audacieux et déplacements exigeants. Les tableaux s’enchaînent très vite, faisant apparaître le fourmillement d’une société urbaine où on passe en un clin d’œil de la fraternité à la querelle de voisinage, puis à la liesse générale. À peine un duo apporte-t-il un peu de calme et de sérénité. Il est bientôt emporté par le flot débordant du collectif (…) Jean-Marc Jacquin Les Balletonautes 5 juillet 2015 Cantata de Mauro Bigonzetti (…) Dans ce ballet, les hommes et les femmes apparaissent d’abord dans des rôles très clivés. (…) Mais les clivages sont bientôt questionnés. Maria Gutierrez, ancrant les pieds dans le sol comme personne, change d’homme en cours de pas de deux. Commençant avec un partenaire à la virilité agressive (le puissant Avetik Katapetyan, un colosse dont on s’étonne toujours de voir la suspension aérienne des sauts), elle termine sur une note de partage avec Maksat Sydykov qui prend sa suite. (…) Plus on avance, plus la pièce estompe les clivages de genre pour laisser place à la transe de la fête (…) Vincent Burret 25 juin 2015 (…) la distribution voit briller deux artistes coréens, le ténor Alfred Kim, Calaf solide et intense, et la basse In Sung Sim en Timur. À leur côté, la soprano japonaise Eri Nakamura incarne une Liù lumineuse. Quant au Chœur du Théâtre du Capitole, il fait constamment merveille… Bruno Serrou 21 Calendrier Informations pratiques Décembre Septembre jeudi 24 17h Rencontre samedi 26 17h30 Rencontre Forum Opéra : Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Carnet Opéra : Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole, Foyer bar Théâtre du Capitole, Grand foyer Octobre jeudi 1 18h Rencontre Conférence : Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier vendredi 2 19h Rencontre Parlons-en Théâtre du Capitole, Grand foyer Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Opéra Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole dimanche 4 Ficelles du spectacle : Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole 10h45 Rencontre 15h mardi vendredi samedi 6 9 10 Opéra Théâtre du Capitole Théâtre du Capitole, Grand foyer samedi 5 14h Atelier Mon métier à l’opéra : costumier/couturière Théâtre du Capitole mardi 8 20h Concert Chœur du Capitole : Concert de Noël Théâtre du Capitole samedi 12 12h15 Cours dimanche 13 14h Atelier Atelier pantomime Théâtre du Capitole, Grand foyer Théâtre du Capitole, Grand foyer mardi 15 19h Cinéma Danse à la cinémathèque : Giselle Cinémathèque de Toulouse jeudi 17 18h Rencontre Giselle et le ballet romantique samedi 19 20h Concert Concert du Chœur Théâtre du Capitole, Grand foyer Centre culturel – Théâtre des Mazades dimanche 20 15h Ballet Giselle Théâtre du Capitole mardi 22 20h Ballet Giselle Théâtre du Capitole mercredi 23 20h Ballet Giselle Théâtre du Capitole Opéra Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole jeudi 24 15h Ballet Giselle Théâtre du Capitole samedi 26 20h Ballet Giselle Théâtre du Capitole 19h Rencontre Parlons-en Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Opéra Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole dimanche 27 15h Ballet Giselle Théâtre du Capitole 17h Atelier Chanter en chœur et en famille Théâtre du Capitole, Grand foyer mardi 29 20h Ballet Giselle Théâtre du Capitole jeudi 31 20h Ballet Giselle Théâtre du Capitole Le Château de Barbe-Bleue – Le Prisonnier Théâtre du Capitole samedi 17 14h Atelier Atelier peinture : peintre à l’opéra Théâtre du Capitole Atelier d’écoute CE Théâtre du Capitole, Foyer bar Théâtre du Capitole, Grand foyer Atelier Atelier d’écoute Centre culturel Bellegarde 15h Atelier Atelier d’écoute 18h Rencontre Conférence : Rigoletto Centre culturel AlbanMinville Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Atelier Atelier d’écoute Atelier d’écoute jeudi 5 17h samedi 7 lundi 9 17h mardi 10 jeudi 12 Rencontre 16h30 Atelier 17h Atelier Forum Opéra : Rigoletto ar téléphone au 05 61 63 13 13 P du lundi au samedi de 10h à 13h et de 14h à 17h45 n ux guichets A du Théâtre du Capitole le lundi et le samedi de 10h à 13h et de 14h à 17h45 du mardi au vendredi de 10h à 17h45 Prestige 1 Prestige 2 Le Château de Barbe-Bleue / A Le Prisonnier Rigoletto E Giselle Rencontre Parlons-en Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Opéra Rigoletto Théâtre du Capitole 19h Rencontre Parlons-en Théâtre du Capitole, Grand foyer Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Opéra Rigoletto Théâtre du Capitole 20h Concert Présences vocales #2 : L’Nfer (un point de détail) Théâtre national de Toulouse samedi 21 16h30 Rencontre Un thé à l’opéra Théâtre du Capitole, Grand foyer dimanche 22 Rigoletto Théâtre du Capitole mardi 24 12h30 Récital Opéra 109,00 102,00 100,00 81,00 51,00 41,00 20,50 Tarif réduit -10% 98,10 91,80 90,00 72,90 45,90 36,90 18,45 Tarif réduit -30% 76,30 71,40 70,00 56,70 35,70 28,70 14,35 Plein tarif 60,00 55,00 50,00 39,00 23,50 17,00 8,50 Tarif réduit -10% 54,00 49,50 45,00 35,10 21,15 15,30 7,65 Tarif réduit -30% 42,00 38,50 35,00 27,30 16,45 11,90 5,95 Plein tarif Spectacles en placement libre : Plein tarif 20,00 Tarif réduit** 15,00 Tarif - de 27 ans 10,00 Midis du Capitole 5,00 Midi du Capitole : Dmitry Ivanchey Théâtre du Capitole 15h Scolaire Récital : Dmitry Ivanchey Théâtre du Capitole 19h Rencontre Parlons-en Théâtre du Capitole, Grand foyer 20h Opéra Rigoletto Théâtre du Capitole 15h Opéra Rigoletto Théâtre du Capitole a ux abonnés du Théâtre du Capitole pour l’achat de toute place supplémentaire aux titulaires de la Carte Toulouse Culture de la Ville de Toulouse n aux collectivités pour tout achat de 10 places minimum pour une même représentation n aux seniors titulaires de la carte Mairie de Toulouse - Tisséo Un Tarif dernière minute de 10 e est accordé aux demandeurs d’emploi 15 minutes avant le lever de rideau, dans toutes les catégories de prix, dans la limite des places disponibles. n Contacts Couverture : Verrou du monastère de Karsha Gompa, Zanskar (Ladakh) - © Chinch Gryniewicz - Bridgeman Images Imprimerie municipale - Licences E.S. n°1-1078578, n°2-1078603 et n°3-1078604 - © Théâtre du Capitole 2015 Collectivités Christelle Combescot : Tél. 05 62 27 62 25 [email protected] Presse Vanessa Chuimer : 05 61 22 24 30 Katy Cazalot : 05 62 27 62 08 [email protected] Audiodescription pour les personnes déficientes visuelles Les représentations de Rigoletto du 20 novembre à 20h et du 22 novembre à 15h sont équipées d’un système d’audiodescription permettant de transmettre aux spectateurs aveugles ou malvoyants, des informations sur la mise en scène, les décors, les costumes et le livret via un récepteur audio sans fil. Rejoignez-nous sur Facebook : www.facebook.com/theatreducapitole Une brochure en braille et en gros caractères a été éditée pour informer les spectateurs aveugles et malvoyants. Cette brochure est disponible sur simple demande. Renseignements et réservations : 05 67 73 84 50 [email protected] Amplification pour les personnes malentendantes 22 Les jeunes de moins de 27 ans ne souscrivant pas à la clé Capitole jeune bénéficient néanmoins d’un tarif préférentiel de 10 e la place en 4e et 5e série en réservation immédiate et sur toutes les catégories de prix 15 minutes avant le lever du rideau. n 19h 15h 5e série Des tarifs préférentiels peuvent être accordés : 17 20 4e série Centre culturel – Théâtre des Mazades mardi vendredi 3e série Centre d’animation Soupetard Théâtre du Capitole Journée d’étude autour de Rigoletto 2e série Service culturel – Service éducatif Valérie Mazarguil : 05 61 22 31 32 [email protected] Ficelles du spectacle : Rigoletto 19 9h – 17h Rencontre 1re série La Clé Capitole Jeune permet aux jeunes de moins de 27 ans de bénéficier de 3 titres d’entrée pour 18 e. Cette Clé est matérialisée par trois contremarques valables : n soit en réservation immédiate pour des places en avant-dernière ou dernière série de prix (suivant les disponibilités) pour toutes les manifestations lyriques et chorégraphiques, ou en dernière série de prix pour les concerts symphoniques de l’Orchestre national du Capitole n soit 15 minutes avant le lever de rideau, pour toutes les catégories de prix, dans la limite des places disponibles. * Places à visibilité réduite ** Tarif réduit : abonnés et bénéficiaires des tarifs préférentiels habituels 15 10h45 Rencontre 29 Sur Internet www.theatreducapitole.fr n Relations avec le public et Associations Véronique Pichon Gbalou : Tél. 05 61 22 31 53 [email protected] dimanche jeudi Place aux jeunes ! n L’Nfer (un point de détail) Novembre dimanche Carnet de danse : Giselle 20h Opéra 26 Rencontre Parlons-en 15h jeudi 18h Rencontre 11 13 Théâtre du Capitole 19h dimanche vendredi Cours de danse public Comment réserver ? Des casques sans fil, intégrant l’amplification directe, sont mis gracieusement à la disposition des personnes malentendantes dans le hall d’accueil du Théâtre du Capitole. Abonnez-vous à la Lettre du Capitole Abonnez-vous en ligne à la Lettre du Capitole pour recevoir par email toute l’actualité du Théâtre : vidéos, reportages, interviews, regards en coulisse… www.theatreducapitole.fr/inscription 23 Rejoignez le Ballet du Capitole pour une grande saison de danse classique et abonnez-vous en ligne jusqu’à la date du premier spectacle de l’abonnement sur www.theatreducapitole.fr Giselle Kader Belarbi Du 20 au 31 décembre au Théâtre du Capitole Offrez-vous un chef-d’œuvre du ballet romantique pour les fêtes de fin d’année ! Formule Ballet matinée Toute la saison chorégraphique en matinée Giselle - dimanche 20 décembre à 15h Coppélia - dimanche 20 mars à 15h Paradis perdus - dimanche 17 avril à 15h Paquita Grand Pas – L’Oiseau de feu dimanche 12 juin à 15h Formule Ballet soirée mercredi 8 juin à 20h Capitole en famille Ballet Paradis Perdus Kader Belarbi / Angel Rodriguez Du 13 au 17 avril à l’Auditorium Saint-Pierre-des-Cuisines Trois pièces chorégraphiques sur la mémoire enfouie dans un écrin chargé d’histoire Giselle - dimanche 20 décembre à 15h Coppélia - samedi 19 mars à 15h Paradis perdus - dimanche 17 avril à 15h Paquita Grand Pas – L’Oiseau de feu dimanche 12 juin à 15h Formule Cœurs enflammés (opéra & ballet) Giselle - samedi 26 décembre à 20h Les Caprices de Marianne vendredi 29 janvier à 20h L’Italienne à Alger vendredi 20 mai à 20h Paquita Grand Pas – L’Oiseau de feu Paquita Grand Pas L’Oiseau de feu Oleg Vinogradov / Maurice Béjart Du 8 au 12 juin à la Halle aux Grains L’entrée de l’intemporel Béjart au répertoire du Ballet du Capitole : à ne manquer sous aucun prétexte ! samedi 11 juin à 20h Verrou du monastère de Karsha Gompa, Zanskar (Ladakh) - © Chinch Gryniewicz - Bridgeman Images Du 17 au 22 mars au Théâtre du Capitole Une poupée entre Jules Verne et juke-box : un ballet pantomime très hollywoodien RCS TOULOUSE B 387 987 811 Charles Jude Formule Mascarade (opéra & ballet) Rigoletto - vendredi 20 novembre à 20h Les Fêtes vénitiennes vendredi 26 février à 20h Coppélia - samedi 19 mars à 20h Paquita Grand Pas – L’Oiseau de feu samedi 11 juin à 20h www.theatreducapitole.fr 05 61 63 13 13 Licence d’entrepreneur de spectacles N° 1-1078578 , 2-1078603, 3-1078604 Coppélia Toute la saison chorégraphique en soirée Giselle - mardi 22 décembre à 20h Coppélia - jeudi 17 mars à 20h Paradis perdus - mercredi 13 avril à 20h Paquita Grand Pas – L’Oiseau de feu