PARTIES PRENANTES, QUELS ENJEUX ?
Par Robert Spencer et Frédéric Prévot, 
Titulaires de la chaire Achat Responsable, 
Euromed Management.
Par Anne Catherine  
Husson Traoré,
Directrice Générale,  
Novethic.
Par Jean-Paul Bailly, 
PDG du groupe  
La Poste.
A. TUDELA
DR
DR
Aujourd’hui, près de 75 % 
des  entreprises  parlent 
de développement dura-
ble. Dès 2003, j’avais la conviction 
qu’engager le Groupe La Poste sur 
la voie du développement durable, 
c’était  se  doter  d’un levier  d’amé-
lioration  de  son  ecacité  écono-
mique.  La  performance  durable 
suppose la bonne santé de l’entre-
prise, des postiers, de la planète et 
la construction de la confiance de 
toutes les parties prenantes. La né-
cessaire transformation de l’entre-
prise se fait en étroite collaboration 
avec elles. Au sein de notre conseil 
d’administration,  de  nombreuses 
parties  prenantes  sont  représen-
tées : nos actionnaires, l’Etat et la 
Les  actionnaires  sont  eux 
aussi des parties prenantes, 
rarement associés à des exi-
gences de développement durable 
envers les entreprises, mais plutôt 
à celles des rendements financiers 
considérés  comme  directement 
ou indirectement responsables  de 
dommages  environnementaux  et 
sociaux. Et pourtant… 
ESG est le sigle de ralliement des 
actionnaires  qui  se  coalisent  pour 
demander  des  comptes  aux  en-
treprises  sur  les  dimensions  En-
vironnementales,  Sociales  ou  de 
La  fonction  Achats  est  sans 
conteste au cœur de la mise 
en place réussie des stratégies de 
développement durable. Les pra-
tiques et la stratégie achats sont 
non seulement impactées par les 
agissements  de  multiples  parties 
prenantes  internes  et  externes  à 
l’entreprise, mais ces mêmes prati-
ques conditionnent à leur tour les 
comportements de ces acteurs. 
L’acheteur se trouve ainsi confron-
té à la nécessité d’intégrer la com-
plexité  de  ses  interdépendances 
dans  sa  démarche  de  tous  les 
jours. 
Ceci  n’est  pas  sans  poser  pro-
blème, car il s’agit de marier  des 
considérations  concernant  les 
normes  et  régulations  mises  en 
œuvre par l’état par exemple, avec 
les  besoins  des  fournisseurs  de 
l’entreprise,  les  exigences  (sou-
vent plus ou moins « responsables 
») des clients directs ou finaux, les 
principes  des  ONG  (relatifs  par 
exemple aux conditions de travail 
de la main d’œuvre, à l’empreinte 
ET SI ON ÉCOUTAIT L’AUTRE VOIX DES ACTIONNAIRES ?
LA FONCTION ACHAT AU CŒUR DES ENJEUX
CDC, les communes et leurs grou-
pements, les usagers et les 7 repré-
sentants du personnel. 
Pour  répondre  aux  attentes  de  nos 
clients, nous avons pris des engage-
ments après identification de leurs ir-
ritants majeurs. Nos bureaux de poste 
évoluent notamment pour réduire le 
temps  d’attente  et  être  accessibles 
au plus grand nombre, la qualité de 
service du courrier n’a jamais été aussi 
haute, et ceci tout en améliorant no-
tre  productivité,  La  Banque  Postale 
est la banque accessible à tous. Nous 
travaillons  également  à  l’intégration 
progressive  des  préoccupations  so-
ciales  et  environnementales  dès  la 
conception et tout au long du cycle 
de vie de nos ores. 
SUPPLÉMENT AU N° 4728 DU 20 MAI 2011  PAGE V
Gouvernance, ESG donc, de leurs 
activités.  S’ils  restent  minoritaires, 
ils obtiennent progressivement de 
vrais succès qui génèrent  des  dé-
bats sur des sujets comme la rému-
nération  des  dirigeants,  l’équilibre 
des pouvoirs, les émissions de CO2 
ou l’exploration des sables bitumi-
neux pour le secteur pétrolier. 
15 % c’est le score obtenu à l’AG de 
BP en avril par les actionnaires qui  
appelaient  à  refuser  le  rapport  an-
nuel parce qu’ils estiment qu’elle n’a 
pas  tiré  les  leçons  stratégiques  du 
désastre lié à l’accident de sa plate-
carbone…), et les intérêts des ac-
tionnaires et du personnel.
Le  résultat  est  une  situation 
complexe  à  gérer,  composée  de 
contraintes  multiples  et  variées 
(normes,  régulations,  stratégies 
diverses,  objectifs  économi-
ques…) et présentant un nombre 
forme dans le Golfe du Mexique et 
ne remet pas en cause son modèle 
d’extraction  pétrolière.  La  pratique 
du « Say on Pay » c’est-à-dire la sou-
mission au vote des actionnaires d’un 
rapport sur le système de rémunéra-
tion des dirigeants, s’est répandu en 
Europe et aux Etats-Unis. En France, 
si le vote contestataire monte, l’enga-
gement  actionnarial  reste  modeste 
et  dicile  à  exercer.  La  tentative 
avortée de la société de gestion Phi-
trust Active Investors de déposer en 
partenariat  avec  Greenpeace  une 
résolution pour demander au groupe 
Total  d’expliquer  à  ses  actionnaires 
sa  stratégie  d’investissement  dans 
l’exploitation  de  sables  bitumineux 
au Canada l’a bien montré. Elle a failli 
obtenir le quota nécessaire (0,5 % du 
capital soit 12 millions d’euros) mais 
deux gros investisseurs se sont reti-
rés au dernier moment.  Si ces voix 
dissidentes  d’actionnaires  parvien-
nent à se faire entendre c’est parce 
que  l’idée  qu’intégrer  des  critères 
ESG  est  créateur  de  valeur  à  long 
terme.  Elle  progresse,  lentement 
mais surement.
 
!
non-négligeable  de  dilemmes  et 
de paradoxes. 
Faut-il  privilégier  des  produits  à 
faible  impact  environnementale 
ou faut-il plutôt favoriser les pro-
ducteurs dans des pays en voie de 
développement ? 
Faut-il réduire  les  coûts  à  l’achat 
en  mettant  les  fournisseurs  sys-
tématiquement  en  concurrence, 
améliorant  ainsi  la  performance 
économique, ou faut-il au contrai-
re aider certains fournisseurs à se 
développer ?
Faut-il  choisir  les  fournisseurs 
avec  les  produits  les  moins  pol-
luants, ou bien ceux qui proposent 
un processus de fabrication plus « 
propre » de ces mêmes produits ? 
Faut-il  préférer  les  ores  des 
entreprises  favorisant  l’insertion 
sociale, ou  bien celles des  entre-
prises qui conçoivent des produits 
qui  respectent  l’environnement 
lors de leurs mises en œuvre ?
Les  réponses  ne  sont  pas  évi-
dentes.  Nous  sommes  loin  ici 
de  la  conception  simpliste  des 
«  Achats »  comme  fonction  pu-
rement  transactionnel.  Il  s’agit, 
en  eet,  de  gérer  un  réseau  de 
relations avec les parties prenan-
tes internes  comme  externes. Le 
service « Achats » est en eet au 
cœur de ce réseau. Et une clarté 
stratégique  en  amont  est  es-
Scannez le QR code avec vo-
tre smartphone et découvrez 
les  interviews  des  panelistes 
de la conférence.
sentielle  pour  fixer  les  lignes  de 
conduite de la  fonction, en four-
nissant les critères de choix et les 
priorités à gérer. 
Quoiqu’il en soit une des clefs de 
la réussite est sans aucun doute la 
capacité des acteurs comprendre 
l’ensemble des points de vue afin 
de choisir en conscience.
 !
Rien  ne  se  fait  sans  les  postiers. 
Nous  développons  une  pratique 
managériale  basée  sur  la  consi-
dération et l’esprit de service pour 
donner  envie  à  tous  les  postiers 
d’accompagner  la  transformation 
de l’entreprise. Nous privilégions la 
qualité de l’emploi et des parcours 
professionnels,  en  contrepartie de 
la nécessaire évolution des organi-
sations. Nous suscitons l’innovation 
et partageons les fruits de la crois-
sance. 
Notre  politique  d’achats  respon-
sables encourage nos fournisseurs 
à  adopter  des  pratiques  plus  res-
ponsables et leur donne un accès 
facilité à nos marchés. 
L’avenir  du  groupe  La  Poste  est 
aussi intimement lié à l’avenir des 
territoires où il est implanté. Nous 
agissons aux cotés des acteurs ins-
titutionnels et économiques locaux 
en apportant notre contribution au 
déploiement  de  projets  structu-
rants (Plans Climat, PDU, Agenda 
21…).  Les  délégations  régionales 
du Groupe mises en place depuis 
3 ans jouent un rôle essentiel dans 
cette démarche.
En quelques mots, la pérennité d’un 
Groupe n’est  assurée que s’il crée 
de  la  valeur  ajoutée  économique, 
sociale et environnementale à long 
terme en la coconstruisant  et en la 
partageant avec l’ensemble de ses 
parties prenantes.
 
!
UNE STRATÉGIE GAGNANTE POUR LE GROUPE LA POSTE