Sensibilité aux antibiotiques des Escherichia coli isolés dâ

Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 555–559
Article original
Sensibilité aux antibiotiques des Escherichia coli isolés d’infections
urinaires communautaires
Susceptibility to antibiotics of Escherichia coli isolated from community-acquired
urinary tract infections
R. Fabrea,, A. Mérensb, F. Lefebvrec, G. Epifanoffa, F. Ceruttia, H. Pupina,
D. Tardifa, J.-D. Cavallob, I. Ternois a
aLabel Bio, 36, rue du Neubourg 76500 Elbeuf, France
bHôpital d’instruction des armées Bégin, 69, avenue de Paris, 94160 Saint-Mandé, France
cDrass de Haute-Normandie, Haute-Normandie, 76040 Rouen, France
Rec¸u le 17 octobre 2009 ; accepté le 8 mars 2010
Disponible sur Internet le 22 avril 2010
Résumé
Objectifs. – Surveillance de la sensibilité aux antibiotiques des souches d’Escherichia coli isolées d’infections urinaires communautaires au
niveau d’Elbeuf et de son agglomération (57 000 habitants).
Patients et méthodes. – Étude prospective de novembre 2007 à octobre 2008, à partir de trois laboratoires de ville. Suivi trimestriel et global de
la sensibilité de E. coli aux principaux antibiotiques utilisables en ville. Antibiogramme par méthode automatisée (Vitek 2 Biomérieux).
Résultats. – Les taux de sensibilité globaux des 1636 souches d’E. coli collectées sont : ampicilline : 57 % ; amoxicilline + acide clavulanique :
73 % ; céfixime : 96 % ; ceftriaxone : 98 % ; gentamicine : 96 % ; acide nalidixique : 82 % ; ciprofloxacine : 89 % ; fosfomycine : 98 % ; nitrofuran-
toïnes : 96 % ; cotrimoxazole : 81 %. La sensibilité à la ciprofloxacine est de 94 % chez la femme de 15 à 65 ans, 85 % chez la femme de plus de
65 ans et de 80 % chez l’homme.
Conclusion. – À Elbeuf et son agglomération, les céphalosporines de troisième génération, la gentamicine, la fosfomycine et les furanes ont
une excellente activité sur les E. coli isolés d’infection urinaire. Les fluoroquinolones ont une meilleure activité dans les infections urinaires de
la femme de 15 à 65 ans comparé aux infections de l’homme et de la femme de plus de 65 ans. Les résistances acquises sont liées au niveau de
prescription des antibiotiques dans les populations étudiées.
© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Escherichia coli ; Infections urinaires communautaires ; Sensibilité aux antibiotiques
Abstract
Objective. – The authors had for aim to determine the distribution of bacterial isolates and the antibiotic susceptibility patterns of Escherichia
coli from community-acquired urinary tract infections in an area covering 57,000 people (Elbeuf, Normandie, France).
Design. – From November 2007 to October 2008, three private French laboratories consecutively collected 2344 bacteria including 1636 E. coli
from outpatients. The antibiotic susceptibility of E. coli was determined using an automatized method (Vitek 2 Biomerieux).
Results. – The global susceptibility of E. coli was: ampicillin: 57%; amoxicillin + clavulanic acid: 73%; cefixim: 96%; ceftriaxone: 98%;
gentamycin: 96%; nalidixic acid: 82%; ciprofloxacin: 89%; fosfomycin: 98%; nitrofurantoin: 96% and cotrimoxazole: 81%. The susceptibility of
E. coli to ciprofloxacin was higher in 15- to 65-year-old female patients (94%) than for older female (85%) or male patients (80%).
Conclusions. – In the Elbeuf area, third generation cephalosporins, aminoglycosides, nitrofurantoin, and fosfomycin were the most effective on
E. coli isolated from community-acquired urinary tract infections. Fluoroquinolones were more active in 15- to 65-year-old female patients than
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (R. Fabre).
0399-077X/$ – see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.medmal.2010.03.002
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in male patients and in female patients over 65 years of age. The rates of acquired resistance were related to the level of antibiotic prescription in
the various populations.
© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Escherichia coli; Community-acquired urinary tract infections; Antibiotics susceptibility
1. Introduction
L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) est la
principale activité microbiologique des laboratoires d’analyses
médicales libéraux. En 2007, près de sept millions d’ECBU
ont été prescrits, représentant la troisième analyse en termes
de remboursement d’après les données de la Caisse nationale
d’Assurance maladie de travailleurs salariés [1]. Le biologiste
de ville peut aider le prescripteur à mettre en œuvre ou à adapter
un traitement antibiotique par l’isolement des bactéries res-
ponsables et la mise en évidence des résistances bactériennes
acquises aux antibiotiques à l’aide d’un antibiogramme. Il peut
aussi contribuer efficacement à la surveillance des résistances
bactériennes aux antibiotiques par sa participation à des réseaux
de surveillance nationale et en suivant localement sur le long
terme les fréquences de ces résistances. Trois laboratoires pri-
vés d’Elbeuf et son agglomération (57 000 habitants) ont décidé
de suivre trimestriellement la répartition des bactéries isolées
d’infections urinaires communautaires ainsi que la sensibilité
aux antibiotiques d’Escherichia coli en fonction en fonction du
sexe et de l’âge des patients.
2. Patients et méthodes
Cette enquête prospective s’est déroulée sur 12 mois, de
novembre 2007 à octobre 2008. Trois laboratoires ont colligé
toutes les souches bactériennes isolées d’infections urinaires
communautaires chez les patients ambulatoires non sondés de
l’agglomération d’Elbeuf, les ECBU et les antibiogrammes étant
effectués dans un seul des trois centres.
Les critères microbiologiques d’infection urinaire retenus ont
été : une leucocyturie supérieure ou égale à 104/ml avec une
bactériurie supérieure ou égale à 103UFC/ml pour les infections
à entérobactéries et à Staphylococcus saprophyticus, supérieure
ou égale à 105UFC/ml pour les autres bactéries chez la femme
et supérieure ou égale à 104UFC/ml chez l’homme [2–3].
L’antibiogramme a été effectué par une méthode automati-
sée (Vitek 2 Compact Biomérieux). Treize antibiotiques ont été
testés :
ampicilline (AM) ;
amoxicilline + acide clavulanique (AMC) ;
céfixime (CFM) ;
ceftriaxone (CRO) ;
ceftazidime (CAZ) ;
céfépime (FEP) ;
gentamicine (GM) ;
acide nalidixique (NAL) ;
norfloxacine (NOR) ;
ciprofloxacine (CIP) ;
fosfomycine (FOS) ;
nitrofurantoïnes (FT) ;
cotrimoxazole (SXT).
Chaque semaine les souches E. coli ATCC 25922 et Provi-
dencia stuartii CIP 107808 ont été utilisées comme contrôle de
qualité interne. La catégorisation clinique en sensible (S), inter-
médiaire (I) ou résistant (R) a suivi les recommandations du
Comité de l’antibiogramme de la Société franc¸aise de micro-
biologie (CA-SFM) 2008 [4]. Toutes les souches classées I ou
R aux céphalosporines de troisième génération (CRO, CAZ
ou FEP) ont fait l’objet d’une recherche de -lactamase à
spectre élargi (BLSE) par le test BLSE Vitek 2 compact et ont
été gardées en culot de conservation pour envoi à un centre
hospitalier de référence. Les mécanismes de résistance aux
-lactamines y ont été précisés : vérification de l’antibiogramme
par la méthode de diffusion en gélose en l’absence ou en pré-
sence de cloxacilline 250 mg/L, recherche d’une synergie entre
un disque chargé d’AMC et des disques de céphalosporines
de troisième génération, puis identification des BLSE par PCR
(PCR de groupe pour les BLSE de type CTX-M). Les résultats
ont été saisis sur fichier Excel chaque trimestre. Les souches
répétitives pour un même patient ont été éliminées. La compa-
raison des variables a été effectuée par la méthode du Chi2de
Pearson.
Pendant les 12 mois de l’étude, la consommation globale
de quatre familles d’antibiotiques (quinolones, triméthoprime-
sulfaméthoxazole, FOS, furanes) ainsi que celle du CFM ont
été colligées auprès de la Caisse primaire d’Assurance maladie
pour les dix communes de l’agglomération d’Elbeuf. Les résul-
tats sont exprimés en nombre de bénéficiaires différents par sexe
et classes d’âge ainsi qu’en doses délivrées journalières (DDJ)
correspondant à la posologie quotidienne nécessaire pour traiter
un adulte de 70 kg. La consommation en DDJ est rapportée à
1000 personnes et par jour.
3. Résultats
Au total 2344 souches bactériennes isolées d’infections
urinaires communautaires, dont 1636 E. coli, ont été col-
lectées entre novembre 2007 et octobre 2008. Le sex-ratio
femme/homme était de 4,9 avec des variations importantes selon
la tranche d’âge : cinq pour les moins de 15 ans, 44 pour les 15 à
29 ans, huit pour les 30 à 44 ans, trois entre 45 et 74 ans et cinq
pour les plus de 74 ans.
La répartition des espèces bactériennes en fonction de l’âge
et du sexe est présentée sur le Tableau 1. Chez la femme et
l’enfant, la répartition des espèces bactériennes montre une
très forte prédominance de E. coli, qui représentait environ les
trois quarts des isolats. Chez la femme jeune, S. saprophyticus
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Tableau 1
Espèces bactériennes isolées d’infections urinaires communautaires en fonction de l’âge et du sexe.
Bacterial species isolated from community-acquired urinary tract infections (UTIs) according to age and sex.
Total
n= 2344 (100 %)
Enfants < 15 ans
n= 119 (5,1 %)
Femmes 15–65 ans
n= 959 (40,8 %)
Femmes 15–29 ans
n= 176 (7,5 %)
Femmes > 65 ans
n= 752 (32,1 %)
Hommes 15–65 ans
n= 242 (10,3 %)
Hommes > 65 ans
n= 272 (11,6 %)
E. coli 69,8 79,8 75,3 71,3 74,3 61,2 41,2
P. mirabilis 5,0 6,7 4,2 3,2 3,7 5,4 10,7
K. pneumoniae 2,6 0,8 2,2 2,0 3,7 1,2 2,6
C. kooseri 1,8 0,0 1,5 0,0 2,1 0,8 3,7
Autres entérobactéries 5,6 2,5 3,4 2,4 5,3 8,7 12,4
Staphylococcus saprophyticus 1,8 2,5 4,0 9,7 0,1 0,0 0,0
S. aureus 0,9 0,0 0,6 0,8 0,7 1,7 1,8
Enterococcus faecalis 6,5 3,4 3,4 5,3 4,5 12,8 18,4
Streptocoque B 3,2 3,4 4,2 3,6 2,7 2,1 1,5
Autres 3,0 0,8 1,3 1,7 2,8 6,1 7,7
Fig. 1. Sensibilité de 1359 souches de Escherichia coli à six antibiotiques isolées
d’infections urinaires communautaires chez la femme en fonction de l’âge.
Susceptibility to six antibiotics of 1359 Escherichia coli strains isolated from
female community acquired urinary tract infections (UTIs) according to age.
arrivait en deuxième position en fréquence d’isolement avec
10 % des isolats chez les 15 à 29 ans (p< 0,001). Chez l’homme,
E. coli ne représentait qu’un isolat sur deux. Enterococcus
faecalis et les entérobactéries autres que E. coli étaient iso-
lés plus fréquemment chez l’homme que chez la femme
(p< 0,001 ).
La sensibilité aux principaux antibiotiques disponibles en
pratique de ville pour les 1636 souches de E. coli, en fonction
de l’âge et du sexe des patients est présentée sur le Tableau 2.
Chez les femmes, la FOS, la FT, les C3G (y compris le CFM),
et la GM avaient une excellente activité sur E. coli, avec plus de
95 % de sensibilité dans toutes les tranches d’âge. Chez l’enfant,
parmi les antibiotiques conseillés dans le traitement des cystites
simples ou en relais dans les pyélonéphrites, le CFM gardait une
excellente activité (96,5 % de sensibilité) alors que E. coli n’était
sensible au SXT que dans 80 % des cas. La CRO et la GM, avec
près de 98 % de sensibilité, étaient les produits les plus actifs in
vitro.
Chez l’homme adulte, parmi les antibiotiques utilisables pour
le traitement des prostatites, seules les céphalosporines de troi-
sième génération injectables (96,1 % de sensibilité à la CRO) et
la GM (93,1 % de sensibilité) avaient une activité supérieure à
90 % sur E. coli. Les taux de sensibilité de la CIP (80,1 %) et du
SXT (74,2 %) étaient plus bas.
Sur les 1636 souches de E. coli, 34 étaient I ou R aux cépha-
losporines de troisième génération (2,1 %). Il s’agissait de
21 E. coli producteurs de BLSE (1,3 %) et de 13 E. coli pré-
sentant une hyperproduction de la céphalosporinase constitutive
bétalactamase chromosomique de classe C (AmpC) (0,8 %). Sur
les 21 BLSE retrouvées, 20 étaient des enzymes de type CTX-M
(19 CTX-M du groupe 1 et un CTX-M du groupe 9). Une seule
souche présentait une BLSE de type SHV.
L’analyse de l’évolution trimestrielle de la sensibilité aux
antibiotiques montre une stabilité pour tous les antibiotiques
sur les 12 mois de l’étude. La Fig. 1 présente l’évolution de la
sensibilité de E. coli chez la femme en fonction de l’âge. La
CIP, active sur 98 % des souches de E. coli avant 30 ans voit
son activité diminuer progressivement avec l’âge et seulement
83 % des E. coli étaient sensibles à cet antibiotique après l’âge
de 74 ans. Les E. coli isolés chez la fillette et la femme de plus
558 R. Fabre et al. / Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 555–559
Tableau 2
Sensibilité aux antibiotiques de 1636 Escherichia coli isolés d’infections urinaires communautaires en fonction de l’âge et du sexe (novembre 2007à octobre 2008).
Susceptibility to antibiotics of 1636 Escherichia coli isolated from community-acquired urinary tract infections (UTIs) according to sex and age (Novem-
ber 2007–October 2008).
Total
n= 1636
(%)
Enfants (< 15 ans)
n=95
(%)
Femmes
(15–65 ans)
n= 721
(%)
Femmes (> 65 ans)
n= 558
(%)
Hommes
(15–65 ans)
n= 147
(%)
Hommes
(> 65 ans)
n= 115
(%)
Ampicilline 54,6 51,6 59,1 52,1 47 51
Amoxicilline + acide clavulanique 72,5 76,8 75,5 70,8 68 65
Céfixime 96,0 96,5 97,0 96,2 96 87
Ceftriaxone 97,9 97,8 98,6 97,7 98 94
Gentamicine 96,0 97,9 97,2 95,7 92 95
Acide nalidixique 82,3 96,8 89,1 74,8 78 70
Ciprofloxacine 88,9 100 93,5 85,1 83 77
Fosfomycine 98,1 98,8 98,7 97,3 99 96
Nitrofurantoïne 95,7 100 97,2 95,2 93 90
Cotrimoxazole 80,7 80,0 85,5 77,6 74 75
Tableau 3
Consommation de céfixime, fosfomycine, quinolones, furanes, triméthoprime-sulfaméthoxazole au niveau de l’agglomération d’Elbeuf entre octobre 2007 et
novembre2008, chez la femme en fonction de l’âge.
Consumption of cefixim, fosfomycin, quinolones, furanes, trimethoprim-sulfamethoxazole in Elbeuf between October 2007 and November 2008, in female patients
according to the age.
Antibiotiques Femmes < 15 ans
n= 5300
Femmes
15–65 ans
n=19500
Femmes > 65 ans
n= 5100
Nombre de
bénéficiaires différents
DDJ Nombre de
bénéficiaires différents
DDJ Nombre de
bénéficiaires différents
DDJ
Cefixime 283 0,69 361 0,53 155 1,10
Fosfomycine 6 < 0,01 722 0,13 410 0,22
Fluoroquinolones 13 0,05 1635 1,84 530 2,86
Acide pipémidique 0 0 57 0,1 35 0,32
Furanes 4 0,02 141 0,27 124 1,17
Cotrimoxazole 116 0,66 195 0,29 83 0,53
DDJ : doses délivrées journalières pour 1000 habitants et par jour.
de 75 ans étaient moins sensibles au SXT que chez les femmes
de 15 à 65 ans.
La consommation chez les femmes des principaux antibio-
tiques utilisables par voie orale dans les infections urinaires
au niveau de l’agglomération d’Elbeuf est présentée sur le
Tableau 3. Le CFM et le SXT sont principalement utilisés chez
l’enfant. Chez la femme de 15 à 65 ans, les quinolones dominent
très largement. Chez les plus de 65 ans, la consommation aug-
mente pour toutes les familles d’antibiotiques, en particulier
pour les furanes.
4. Discussion
E. coli est la principale espèce impliquée dans les infections
communautaires de l’adulte, et en particulier de la femme, quel
que soit l’âge [5]. La prévalence de S. saprophyticus, espèce
naturellement résistante à la FOS et de sensibilité diminuée
au fluoroquinolones (CMI50 CIP : 0,5 mg/L et lévofloxacine :
0,25 mg/L) est élevée dans notre étude chez les adolescentes
et les jeunes femmes. Cette espèce doit être prise en compte
dans le traitement probabiliste des infections urinaires commu-
nautaires, plus particulièrement chez les 15 à 29 ans. Elle est en
revanche beaucoup moins fréquente chez les femmes de plus de
30 ans [5–6]. Cependant elle est rarement à l’origine de pyélo-
néphrites et d’infections urinaires compliquées. Dans tous les
cas, un échec thérapeutique doit conduire à la pratique d’un
ECBU pour isoler l’agent en cause et adapter le traitement à
l’antibiogramme.
Chez E. coli, les deux principaux phénomènes émergents sont
les taux de résistance aux fluoroquinolones qui concernent plus
de 10 % des souches isolées d’infections urinaires communau-
taires dans plusieurs pays d’Europe comme l’Espagne et l’Italie
[7–8] et la présence de souches productrices de BLSE, essentiel-
lement des E. coli produisant des enzymes de type CTX-M, en
particulier CTX-M 15 [9]. À Elbeuf, les résistances aux fluoro-
quinolones sont beaucoup moins élevées chez les femmes de 15 à
65 ans que chez celles de plus de 65 ans ou que chez les hommes,
ce qui avait déjà été décrit dans une étude récente menée par
l’Association de formation continue en pathologie infectieuse
des biologistes (AFORCOPI-BIO) [10]. Globalement les taux
de sensibilité aux fluoroquinolones sont plus élevés qu’en Italie
ou qu’en Espagne mais plus faibles qu’en Belgique [11]. Le taux
des E. coli producteurs de BLSE est encore faible à Elbeuf. Pour
les 21 souches retrouvées, des investigations complémentaires
R. Fabre et al. / Médecine et maladies infectieuses 40 (2010) 555–559 559
sont en cours pour déterminer celles qui proviennent de patients
n’ayant eu aucun contact avec le milieu de soins et qui pour-
raient être qualifiées réellement de « BLSE communautaires ».
L’acquisition de ces souches au cours d’un séjour antérieur à
l’hôpital ou dans une institution de soin privée est en effet pos-
sible. Le portage au niveau de la flore digestive des patients est
possible pendant des périodes très prolongées.
La stabilité globale de la sensibilité de E. coli aux prin-
cipaux antibiotiques utilisables en ville et en particulier aux
fluoroquinolones est plutôt rassurante. Les recommandations de
prise en charge éditées par l’Afssaps respectivement en 2007 et
2008 chez l’enfant et l’adulte visent à épargner cette classe
d’antibiotique. La diminution progressive de sensibilité à la CIP
que l’on observe bien avec l’âge chez la femme et probablement
liée à l’augmentation de la pression antibiotique avec l’âge, par-
ticulièrement marquée avec les fluoroquinolones (Tableau 3).
L’absence d’utilisation de quinolones explique des taux de sen-
sibilité de 100 % à cette famille antibiotique chez l’enfant. En
revanche, le SXT largement utilisé chez l’enfant est moins actif
sur les souches de E. coli isolées chez les moins de 15 ans que
dans la tranche des 15 à 65 ans ou il est moins utilisé au profit
des quinolones. Après 60 ans l’augmentation significative de la
résistance aux quinolones conduit à une plus grande utilisation
du SXT qui est corrélée à une baisse de sensibilité à cet anti-
biotique. Quels que soient l’âge et le sexe, les furanes et la FOS
conservent une excellente activité sur E. coli comme le montrent
de plusieurs études franc¸aises et européennes [5–8]. Cependant
ces molécules, jusqu’alors moins utilisées que les quinolones
[6], sont maintenant recommandées en première intention dans
la cystite aiguë non compliquée de la femme, y compris chez
la femme de plus de 65 ans qui ne présente pas de comorbi-
dité [2]. Notre étude relève déjà une diminution significative de
la sensibilité de E. coli aux furanes chez la femme de plus de
74 ans (p< 0,001), même si les taux de sensibilité restent encore
supérieurs à 90 %.
5. Conclusion
À Elbeuf et dans son agglomération, les céphalosporines de
troisième génération, la GM, la FOS et les furanes conservent
une excellente activité sur les E. coli isolés d’infections urinaires.
Les fluoroquinolones sont très actives sur les souches d’E. coli
responsables d’infections urinaires de la femme âgée de 15 à
65 ans alors que les taux de résistance acquise à ces molécules
peuvent poser problème chez l’homme et chez la femme de plus
de 65 ans.
Les nouvelles recommandations de l’Afssaps pour le traite-
ment des infections urinaires communautaires visent à limiter
la pression antibiotique exercée par les fluoroquinolones dans la
communauté. Elles incitent à une plus grande utilisation de la
FOS et des furanes dans les cystites aiguës simples de la femme
au détriment des fluoroquinolones. L’impact de ces recomman-
dations sur la prescription et la fréquence de répartition et la
sensibilité de E. coli aux antibiotiques mérite d’être surveillé
régulièrement.
Conflit d’intérêt
Les auteurs n’ont pas transmis de conflit d’intérêt.
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