Mémoire présenté pour l’obtention du MASTER PROFESSIONNEL I.G.I.S Ingénierie et Gestion des Interventions Sociales et du D.E.I.S Diplôme d’État d’Ingénierie Sociale par Claire HALLIEN Le dossier social informatisé : Un outil de management stratégique Pour le service social hospitalier Tuteur de mémoire Session Eve LAMENDOUR Octobre 2008 SOMMAIRE INTRODUCTION.............................................................................................................................. 2 CHAPITRE PRÉLIMINAIRE : MÉTHODOLOGIE .................................................................. 13 PARTIE I ­ LE DOSSIER PATIENT : LIEU DU PARTAGE D’INFORMATION ................. 19 1. Présentation du dossier patient ........................................................................................................... 19 2. Les modalités de transmission d’information........................................................................................ 22 3. La place de l’usager .............................................................................................................................. 24 4. Dimension éthique .............................................................................................................................. 26 5. L’informatisation du dossier patient ..................................................................................................... 31 PARTIE II ­ LE DOSSIER SOCIAL : UN DOSSIER PARTAGÉ OU UN DOSSIER DISTINCT ?..................................................................................................................................... 35 1. Cadre d’intervention du service social hospitalier ........................................................................ 36 2. Présentation du dossier social .............................................................................................................. 39 2.1 Définition du dossier social ......................................................................................................................39 2.2 Vie du dossier social. ...............................................................................................................................41 3. La place de l’usager .............................................................................................................................. 43 4. Dimension éthique ............................................................................................................................... 47 5. L’informatisation du dossier social........................................................................................................ 54 6. Des exemples de mise en œuvre........................................................................................................... 59 6.1 La structure du dossier social informatisé ...............................................................................................62 6.2 Les pratiques d’écriture dans le dossier social informatisé : contraintes et marges de manœuvre .......64 6.3 Les Statistiques.........................................................................................................................................70 6.4 Accessibilité du dossier social informatisé...............................................................................................71 6.5 Intérêt du dossier social informatisé .......................................................................................................72 6.6 Les limites du dossier social informatisé..................................................................................................73 PARTIE III ­ LE DOSSIER SOCIAL INFORMATISE, UNE COMPOSANTE DU MANAGEMENT STRATEGIQUE................................................................................................ 77 1. Le dossier patient unique informatisé : une démarche projet................................................................ 78 1.1‐ Exemple de structuration du dossier patient unique .............................................................................78 1.2‐ Recueil d’expériences en matière d’informatisation du dossier de soins auprès d’autres CHU ............80 1.3 ‐ Interrogations en termes de management stratégique ........................................................................88 2. Articulation entre soin et social à l’hôpital ............................................................................................ 91 2.1‐ Les préconisations de la société française de médecine physique et réadaptation...............................91 2.2 Les recommandations du jury..................................................................................................................93 2.3‐ La pratique de la pluridisciplinarité en médecine physique et réadaptation .........................................94 2.4‐ Impact de la pratique en MPR sur la conception du dossier social ........................................................95 2.5‐ Apport de cette réflexion à la construction du dossier social informatisé .............................................96 CONCLUSION ­ ENSEIGNEMENTS POUR UN MANAGEMENT STRATÉGIQUE..........100 SIGLES UTILISES ........................................................................................................................105 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................107 TABLE DES MATIERES.............................................................................................................113 ANNEXES ......................................................................................................................................116 1 INTRODUCTION Au cours des trois dernières décennies, le champ de l’action sociale et sanitaire a été traversé par un grand mouvement de réforme. Le système de santé a été en particulier marqué par la réforme de 1996 (Plan Juppé) qui visait une plus forte régulation du système d’hospitalisation dont les dépenses représentent 50 % des dépenses de santé. La réforme de 2004 (Douste-Blazy) crée des instances d’évaluation comme la Haute Autorité de Santé (HAS), le Haut Conseil de Santé Publique, la Conférence Nationale de Santé et des instances de régulation comme l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM), l’Agence régionale d’Hospitalisation (ARH). Avec les plans Hôpital 2007 puis 2012, la démarche de planification vise la modernisation des équipements, l’informatisation des systèmes hospitaliers, l’amélioration des conditions de travail des personnels et l’accueil des patients et de leur entourage, le renforcement des complémentarités entre les différents hôpitaux d’un même territoire. Le système de santé français représente 10% du PIB avec un budget de près de 150 000 milliards d’euros supporté à 90 % par l’assurance maladie. Ce secteur emploie plus d’un million de personnes. Sa place dans le système socio-économique français est indéniable. La question de la gestion de la santé est au cœur du débat de société et des choix politiques. Les tensions actuelles se situent dans un contexte global de crise culturelle, liée à des facteurs sociologiques et économiques. Responsable-adjointe du service social et socio-éducatif du CHU de Nantes depuis octobre 2005, il nous a été donné de mesurer l’impact de tous ces changements sur les organisations. Pour bien situer les lieux de ces changements, nous présentons dans cette introduction l’évolution du concept de santé et les réformes hospitalières. De ces contextes dépendent en effet les conditions du partage de l’information à l’intérieur du dossier patient au sein de l’hôpital, et particulièrement du dossier social, objet de notre travail. Nous annoncerons ensuite le plan de notre recherche. Le concept de santé évolue au fil du temps. La santé renvoie étymologiquement à la notion de salut (salus). Autrefois la religion valorisait en occident le salut de l’âme au détriment de la santé physique, puis celle-ci est devenue une valeur de première importance. D’abord attachée au concept de maladie et de normalité, sa 2 définition est liée à l’histoire des pathologies mais elle est également traversée par les modèles culturels et les rapports à l’organisation sociale. Le préambule de la Constitution de 1946 de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) précise que « La santé est un état de complet bien-être physique, mental, social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. La possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits de tout être humain. » La santé est une notion complexe qui peut être observée de façon objective par les soignants. Mais c’est aussi une notion subjective, ressentie différemment selon les personnes à titre individuel et en référence à leur contexte socioculturel. La Conférence d’Ottawa (Charte d’Ottawa, OMS, 1986) définit la santé comme « un concept positif mettant l’accent sur les ressources sociales et personnelles et sur les capacités physiques. » Elle rappelle qu’il est crucial de permettre aux gens d’apprendre à faire face à tous les stades de leur vie et de se préparer à affronter les traumatismes et les maladies chroniques, à davantage de maîtrise de leur propre santé et de moyens pour l’améliorer. La santé concerne la personne dans sa globalité. Elle touche toutes les dimensions de la vie aussi bien sur le plan physique, psychique, social ou spirituel. Elle apparait comme un processus qui peut être fait de déséquilibre, de rupture générant sentiment d’impuissance, de perte de maitrise et une difficulté à mobiliser ses propres ressources face à la maladie. L’image de la santé reflète les préoccupations des individus et des groupes sociaux. Elle est porteuse de l’image de soi dans son environnement. La fonction hospitalière s’adapte aux conceptions de la santé La fonction hospitalière était au Moyen-âge centrée sur l’accueil, au sens de la charité. La médecine était alors incapable de guérir les maux. Maladie et souffrance étaient considérées comme résultat d’un péché. L’assumer était l’occasion d’un progrès spirituel qui devait être aidé par la compassion. A la Renaissance, la politique hospitalière municipale est progressivement mise en place. Le rôle de l’Eglise disparait peu à peu en même temps que la notion de péché ne suffit plus à expliquer le mal. Parallèlement, l’Etat prend sa place dans le champ des missions de service public. Les épidémies et le paupérisme viennent modifier le modèle hospitalier. La société cherche à se protéger des lépreux et des pauvres. Une organisation policière permet de limiter 3 leur vagabondage. A défaut de guérir, il faut contenir le mal et séparer les contagieux des bienportants. Ainsi se développe la politique officielle pour résoudre les problèmes d’assistance au travers de ce qui va devenir l’Hôpital Général. Le travail, considéré comme thérapeutique, y est obligatoire. Les hospices sont de véritables manufactures. Ce sont aussi des lieux d’éducation et d’instruction. Il s’agit de construire un ordre moral, nouvelle condition de salut. Les Hôtels-Dieu sont réservés aux malades les plus pauvres et les plus misérables. Les soins sont majoritairement apportés par des religieuses. Dans les années qui précèdent la Révolution, il apparaît que l’Etat a le devoir d’intervenir dans l’organisation hospitalière. A l’idée de charité se substitue celle de bienfaisance. En 1899, une circulaire prévoit que les malades payants pourront être accueillis dans les hôpitaux. Avec l’apparition des premières sociétés de secours mutuels et des assurances sociales, la clientèle hospitalière s’élargit peu à peu à de nouvelles catégories sociales. Le coût de l’hospitalisation augmente. L’exigence de santé publique impose de trouver des solutions pour que la maladie n’engendre pas la pauvreté. L’Etat s’organise dans son rôle d’assureur. Un changement notable dans l’économie de la santé se fait jour : ce n’est plus seulement le malade qui est concerné, le bien portant cotise pour financer le système de santé. Progressivement, le corps médical s’affirme et l’Etat accepte le principe d’une médecine libérale. On observe le développement d’une médecine curative au détriment d’une médecine préventive ce qui aura pour conséquence, au fil des années, une tendance à l’hospitalo-centrisme. En 1946, la Sécurité Sociale est généralisée. Les ordonnances de 1958 renforcent les pouvoirs de gestion des directeurs d’hôpitaux et créent les centres hospitaliers universitaires (CHU) dans le but de mieux coordonner les fonctions d’enseignement, de recherche et de soins. La loi du 31 décembre 1970 institue le « service public hospitalier ». Elle instaure une planification hospitalière fondée sur la complémentarité entre le public et le privé, notamment avec la mise en place de la carte sanitaire. Cette loi étend la mission de l’hôpital à des actions de prévention, d’éducation sanitaire. Dans les années 70, la politique gouvernementale manifeste un souci d’évaluation et de contrôle. Progressivement, l’Etat ne maîtrise plus le système de santé tout en restant au centre. Il contrôle notamment directement ou indirectement le financement d’une grande partie des dépenses. 4 La santé est devenue un produit économique La santé est devenue un produit et un objet de demande et d’offre qui doit être pensé au plan individuel et collectif. « Ainsi, le rapport de la médecine à la santé se modifie. Elle n’élabore plus seulement un savoir de diagnostic et de traitement, mais un savoir de surveillance autour de profils de vie en fonction de prédisposition de chacun. Il s’agit de réduire les comportements qui augmentent les probabilités de voir survenir la maladie. »1 La santé renvoie à la préoccupation de la qualité de vie et doit répondre à des impératifs économiques. L’hôpital doit aujourd’hui développer sa productivité, affirmer ses compétences, accroitre sa place sur le marché. Pour autant, l’hôpital et particulièrement l’hôpital public a des missions différentes de l’entreprise. D’où le nécessaire travail d’élaboration pour adapter le modèle en référence aux valeurs hospitalières en tenant compte du maillage avec l’extérieur, celui-ci contribuant également à la santé. L’hôpital est attaché aux principes et aux missions du service public Notre travail se référant à l’exercice du service social hospitalier au sein des CHU, rappelons les particularités des principes et des missions du service public. Trois principes sont considérés comme constitutifs de l’organisation et du fonctionnement du service public : le principe d’égalité : égalité d’accès aux services publics pour tous les usagers, impliquant le devoir de neutralité et d’impartialité ; le principe de continuité, qui a vocation à garantir un fonctionnement régulier du service public ; le principe de mutabilité ou d’adaptation : les services publics doivent s’adapter en permanence, en fonction des besoins et des évolutions, notamment en s’organisant en conséquence. Le Code de la Santé publique énumère les missions du service public qui distinguent l’hôpital des établissements privés de santé. Au-delà de la stricte prise en charge soignante, certains établissements et plus précisément les CHU se doivent d’assurer des missions d’enseignement et de recherche, des missions de médecine préventive et d’éducation à la santé passant par l’organisation de réseaux de santé, la participation à la prise en charge des personnes 1 Bernard HONORE, l’hôpital et son projet d’entreprise, vers l’œuvre de santé, Privat, Toulouse, 1992, 200 p, p. 97. 5 en situation de précarité. Ils assurent également une fonction de sécurité sanitaire; une mission d’organisation de l’accueil des urgences et de permanence des soins. La question de la qualité du service rendu apparaît de plus en plus visible avec le développement des référentiels de soins, les protocoles thérapeutiques, la définition de normes de sécurité. Le Législateur a mis en avant la notion de projet d’établissement ou de projet de service. On passe ainsi, d’une vision tutélaire de la puissance publique à une vision contractuelle. « A la garantie apportée au citoyen contribuable que les fonds alloués sont régulièrement dépensés s’ajoute la garantie donnée au citoyen consommateur ou usager que le service rendu a la qualité requise ».2 Les établissements de santé dispensent différentes catégories de soins Nous présenterons ici les différentes catégories de soins, le partage d’information se déclinant différemment selon les secteurs. Les soins de courte durée correspondent à une durée moyenne de séjour (DMS) du patient inférieur à 10 jours. On parle de secteur de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO) incluant le service d’accueil des urgences. Les établissements publics ont souvent un large éventail de spécialités. Ces services mobilisent des moyens techniques et humains élevés. Les soins de suite et de réadaptation (SSR) prennent en charge des patients après le traitement de la phase aigue de la maladie, en vue de consolider leur état, de les réadapter à la vie courante, de faciliter ainsi leur réinsertion sociale. Le séjour peut être autorisé pour une période de 3 mois, éventuellement prolongée, mais la durée moyenne des séjours est d’environ 1 mois. Le secteur de rééducation fonctionnelle mobilise également des moyens élevés avec des durées de séjours qui peuvent être importantes. Les soins de longue durée (SLD) sont destinés aux personnes sans autonomie de vie et dont l’état nécessite une surveillance médicale constante, sans exigence d’actes techniques complexes mais avec des soins de nursing importants. La vocation de ces services est d’accueillir des personnes âgées dépendantes en fin de vie. 2 Bernard MAROT, Eléments de droit des institutions sanitaires et sociales, Cours de Master de management de la santé, université de Nantes, 289 p, p.131. 6 La filière de soins en psychiatrie repose sur une sectorisation : un découpage territorial constitue le cadre géographique de l’intervention de l’équipe médico-psycho-sociale à une échelle permettant une prise en charge à proximité du lieu de vie du patient. Les modes de prise en charge pour adultes et enfants sont diversifiés. Le centre médico-psychologique est le pivot de la sectorisation. L’organisation hospitalière est modifiée par quatre réformes indissociables qu’il nous paraît important de présenter en raison de leur impact sur les organisations de travail. Une réforme des pouvoirs En application de l’ordonnance du 24 avril 1996 sur la réforme de l’hospitalisation publique et privée, les établissements de santé se sont progressivement organisés en pôles correspondant au regroupement de services médicaux et basés sur le principe de subsidiarité, à savoir que toute décision susceptible d’être prise sur le terrain avec plus de pertinence doit être déconcentrée. Cette gestion décentralisée permet un management plus participatif, un investissement progressif des professionnels dans le fonctionnement de l’hôpital et le développement d’une culture institutionnelle. L’ordonnance du 2 mai 2005 consacre le mouvement de réforme organisationnelle et institue ce qu’on appelle la nouvelle gouvernance hospitalière. Celle-ci impose, au sein des hôpitaux, la création de pôles d’activité et d’un conseil exécutif. L’objectif est de favoriser un meilleur dialogue et un partage de compétences entre l’administration et les composantes médicales et soignantes. Les missions du conseil d’administration sont recentrées sur des missions stratégiques et de contrôle. Une réforme de la tarification Le financement était jusqu’alors fondé sur le budget global et l’hôpital percevait une enveloppe de l’assurance maladie. Aujourd’hui, c’est l’activité qui génère les ressources. Des indicateurs déterminent des échelles de coûts pour chaque pathologie avec des dispositifs de correction pour les séjours extrêmes. Certaines missions propres au service public et ne relevant pas des règles du marché bénéficient de financements spécifiques, c’est le cas pour l’accueil d’urgence, la prise en charge des personnes en situation de précarité, la permanence des soins. 7 Une réforme budgétaire La réforme du régime budgétaire et comptable des établissements publics de santé et des établissements privés antérieurement financés par dotation globale est entrée en vigueur en 2006. Elle se caractérise, en lieu et place du budget, par l'instauration d'un état des prévisions de recettes et de dépenses (EPRD). En liaison étroite avec la réforme du financement des établissements de santé, la réforme du régime budgétaire et comptable introduit un nouveau partage des responsabilités entre les établissements de santé et les agences régionales de l'hospitalisation. Une réforme de la planification La circulaire du 5 mars 2004 définit l’élaboration des Schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS) qui ont été rénovés sur la forme et sur le fond par le plan Hôpital 2007. Les objectifs affichés par les schémas sont quantifiés en volume d’activité et non plus en nombre de lits, la réglementation les rend désormais opposables aux établissements à travers leurs contrats d’objectifs et de moyens. Les SROS « troisième génération » entérinent la disparition de la carte sanitaire et donc celle des secteurs sanitaires qui sont remplacés par des territoires de santé. Les SROS 3 déclinent quatre priorités : une meilleure évaluation des besoins de santé, une plus grande prise en compte de la dimension territoriale, une association plus étroite des établissements, des professionnels, des élus et des usagers, et une véritable animation de leur mise en œuvre au sein de chaque territoire de santé. Ces nouveaux SROS se voient donc confier deux objectifs principaux : assurer une organisation sanitaire territoriale permettant le maintien ou le développement d’activités de proximité et la mise en place d’une organisation graduée des plateaux techniques ; veiller à ce que cette organisation des soins réponde aux objectifs de santé publique et développer des réseaux de santé. Le service social hospitalier s’inscrit dans une culture sociale et sanitaire Le service social hospitalier s’inscrit dans le contexte global qui vient d’être décrit. Sa mission générale est précisée à l’intérieur du décret n° 93-652 du 26 mars 1993 : les assistants sociaux « ont pour mission de conseiller, d’orienter et de soutenir les personnes accueillies et leurs familles, de les aider dans leurs démarches et d’informer les services dont ils relèvent pour l’instruction 8 d’une mesure d’action sociale. Ils apportent leur concours à toute action susceptible de prévenir les difficultés sociales et médico-sociales rencontrées par la population ou d’y remédier. Ils assurent, dans l’intérêt de ces personnes, la coordination avec d’autres institutions ou services sociaux et médicosociaux ». Le service social intervient à la demande des malades et/ou de leurs familles, à la demande des médecins et des équipes soignantes, des bureaux des admissions, des services sociaux extérieurs ou de sa propre initiative. L’assistant social n’appartient pas au corps des professionnels de santé. Son métier se réfère en permanence à un double champ d’appartenance : le champ sanitaire et le champ social, sa double culture représentant une plus-value dans la prise en charge des patients et dans la coordination avec les institutions médico-sociales. Il est cependant le plus souvent membre de l’équipe soignante à part entière du fait de son implication dans la définition et la réalisation des projets de soins. L’assistant social fait ainsi partie de l’équipe pluridisciplinaire. A ce titre il recueille des informations auprès de la personne hospitalisée. Certaines de ces informations sont utiles aux soins et peuvent être partagées avec les équipes soignantes. D’autres sont plus strictement liées à l’accompagnement social et n’ont pas à être transmises. Les pratiques professionnelles se construisent en référence à des règles professionnelles, les missions des uns et des autres étant distinctes et complémentaires. L’objectif est pour chacun d’apporter la meilleure prise en charge à l’usager. Cela passe par la mise en œuvre d’une cohérence d’intervention visant la continuité dans le processus de soin. Pour cela, il est nécessaire de définir le cadre du partage d’information afin de respecter l’usager. Nous verrons que la tension entre ces deux dimensions est sans cesse présente. Quelles informations partager dans l’intérêt de l’usager ? Dans son parcours de soins la personne hospitalisée est amenée à rencontrer différents professionnels à qui elle livre des éléments de sa vie personnelle. Ces informations sont réputées confiées à l’ensemble de l’équipe, sous réserve qu’elles soient utiles à la prise en charge soignante. Il appartient aux professionnels de transmettre avec discernement ce qui a été recueilli à un moment donné afin de préserver l’intimité de la personne malade et de son entourage. Dans cet 9 esprit, c’est la nature de l’échange entre professionnels et usagers qui est à définir, en termes d’espace de parole et de co-construction. Dans ce contexte, des réflexions éthiques portent sur la façon de concourir au mieux à l’intérêt de l’usager tout en prenant en compte les besoins des professionnels. Se posent notamment des questions sur le type d’information utile à l’exercice des missions et sur les modalités de traçabilité de ces renseignements. La pertinence du recueil et de l’enregistrement des données est particulièrement questionnée, d’autant que la loi du 4 mars 20023 relative aux droits des malades et de la qualité du système de santé réaffirme la place de l’usager au cœur de la prise en charge. Ainsi, les patients et leurs ayants droit peuvent désormais accéder directement à leur dossier. Celui-ci est donc un outil de communication important. Quelles informations partager dans l’intérêt de l’institution ? Pour les professionnels de santé, le dossier patient est l’outil privilégié du partage d’information. Il est à relier à la qualité et à la continuité des soins et garantit la traçabilité des interventions. Un des enjeux du dossier patient porte sur l’amélioration du codage des actes réalisés dans des délais réduits, essentiel dans la chaine de facturation, notamment avec le passage à la tarification à l’activité. L’amélioration du dossier patient et du codage exhaustif s’inscrit ici dans une visée de recette pour l’établissement. Les données collectées dans les dossiers patients sont également utiles dans la démarche qualité, par exemple pour ce qui concerne l’évaluation des pratiques professionnelles. Quelles informations partager dans l’intérêt du service social ? La loi du 4 mars 2002 réaffirme le principe d’une reconnaissance du sujet citoyen, la promotion du droit des bénéficiaires et de leur entourage. Le respect de la personne et de ses choix est renforcé. Ses droits se réfèrent aux droits fondamentaux de la personne humaine : respect de l’intégrité, de la dignité, de la liberté individuelle, de la vie privée, de l’intimité ainsi que le droit à sa sûreté. Cette visée déontologique de l’action sociale rejoint celle du travail social, dont la vocation première est d’aider les personnes à accéder aux droits sociaux que la société leur 3 Loi n° 2002-203 du 4 mars 2002, article 1111-7. 10 confère, en les considérant dans leur dimension citoyenne. Il s’agit de les accompagner dans leur projet en visant leur autonomie et en les plaçant au cœur de l’action, de les soutenir pour créer ou recréer des liens sociaux.4 L’assistant social propose une réponse médico-sociale à partir d’une demande a priori médicale, en tenant compte de la volonté et du consentement du patient et/ou de son entourage. L’accompagnement social se construit à partir de l’évaluation de la situation de la personne malade et du respect de ses choix, notamment lorsqu’il s’agit de son retour à domicile ou de son orientation vers une autre structure. L’assistant social a un rôle de médiation entre le patient et les équipes médicales et soignantes sur ces questions de sortie d’hospitalisation. Cependant, le temps médical ne s’ajuste pas toujours au temps du travail social. Le temps nécessaire au patient et à sa famille pour se préparer à faire des choix après une annonce de maladie, de handicap, de perte d’autonomie est de moins en moins accordé. L’assistant social met ainsi ses compétences au service des usagers, en référence aux objectifs institutionnels et aux droits fondamentaux. La complémentarité des compétences professionnelles est au service de l’usager. C’est pourquoi la question du partage d’information est essentielle. Elle renvoie aux missions communes et spécifiques de chaque métier. Le dossier patient met en évidence les questions techniques et éthiques qui se posent aujourd’hui dans un environnement en pleine mutation. L’informatisation du dossier social constitue-t-elle un outil de management stratégique ? Le service social est concerné par tous ces changements. L’évolution du dossier de soins, notamment dans sa version électronique, et la question du dossier social permettent d’interroger les pratiques professionnelles autour du partage de l’information. Dès lors que l’on évoque l’informatisation et le partage d’information avec des professionnels de cultures différentes, des questions sur l’éthique et le sens de l’action apparaissent : chaque groupe professionnel doit-il avoir une autonomie ? Y a-t-il des espaces de partage possibles pour l’information ? Comment et sur quelles bases se négocient ce partage de l’information ? 4 En référence à la conception du travail social fournit par l’ONU reprise par le Conseil économique et social. 11 Dans ce contexte, on peut alors se demander en quoi l’informatisation du dossier social constitue un outil de management stratégique pour l’encadrement d’un service social hospitalier ? Au cours du travail qui va être présenté, nous situerons, dans une première partie, le dossier patient tel que défini par la Haute Autorité de Santé et nous préciserons les modalités de transmissions d’information à l’hôpital. L’usager étant au cœur de la prise en charge soignante, nous rappellerons que l’éthique professionnelle vise la qualité des soins. Nous verrons ensuite que les projets d’informatisation du dossier patient s’inscrivent dans une perspective d’amélioration des pratiques au regard de ce qui a été énoncé précédemment. Ce préalable sur le dossier patient situe le contexte du travail pluridisciplinaire dans lequel s’inscrit le travail social hospitalier. Nous consacrerons la deuxième partie de cette étude au dossier social. En préambule, nous rappellerons le cadre d’intervention du service social hospitalier et présenterons le dossier social à l’hôpital. Nous verrons que travail social fonde son action sur le respect de la demande de l’usager et se réfère à une déontologie professionnelle. Ce chapitre, plus développé, s’appuiera principalement sur l’exemple du service social de Brest, qui a mis en place le dossier social informatisé il y a plus de dix ans et plus succinctement, à l’expérience récente du service social des Hospices civils de Lyon. Nous préciserons alors en quoi l’informatisation du dossier social interroge la pratique de l’assistant social en termes de partage d’information. Ceci nous amènera à proposer des recommandations pour la constitution du dossier social informatisé et à repérer que cet outil est une composante du management stratégique. Au regard de cette dernière question, nous nous attacherons, dans un troisième temps, à regarder de plus près l’articulation entre le soin et le social. Nous décrirons les différents points d’impact des pratiques médicales sur le travail social hospitalier, notamment en l’illustrant à partir d’un focus sur les pratiques en service de rééducation fonctionnelle. Nous en dégagerons des enseignements qui permettront de proposer quelques préconisations pour l’encadrement du service social. 12 CHAPITRE PRÉLIMINAIRE : MÉTHODOLOGIE C’est à partir de notre expérience professionnelle d’assistante sociale et de cadre que nous avons choisi de questionner le dossier social. Qu’en est-il aujourd’hui de ce document de travail qui est la trace écrite de l’intervention sociale ? En quoi l’informatisation vient-elle réinterroger cet outil et le partage d’information qui y est associé ? Dans une phase exploratoire, nous avons rencontré un cadre social d’une collectivité territoriale et secrétaire de l’ANAS 5 (ex-président) : à titre professionnel, il s’est particulièrement impliqué dans la mise en place du dossier informatisé au sein de son institution et à titre associatif, il a écrit plusieurs articles sur le dossier social. L’ANAS a organisé des journées d’étude et publié sur les questions du dossier social et de l’informatisation en travail social. Nous avons aussi réalisé une revue de littérature sur ce sujet en France mais aussi à l’étranger. Une synthèse sera présentée dans la partie 2, sur le dossier social. Un corpus de référence, distinct de la bibliographie, présentera en annexe (annexe 1, p.99-103) ce premier recueil des ouvrages, articles et mémoires recensés lors du travail préliminaire et qui nous a permis de dégager les approches théoriques inhérentes à ce thème. Dans un second temps, nous avons souhaité donner la parole aux acteurs : connaître leur pratique et leurs difficultés. C’est pourquoi, il nous a semblé pertinent d’interroger des professionnels ayant déjà l’expérience du dossier social informatisé dans un contexte hospitalier. Nous avons choisi de rencontrer les professionnels du service social du CHU de Brest qui a mis en place le dossier social informatique en 1994. En référence aux attentes et aux objectifs, les critères suivants ont été définis pour établir le panel des assistants sociaux que nous avons souhaité interviewer : Ancienneté dans le métier : jeunes professionnels et professionnels ayant une ancienneté supérieure à 10 ans. 5 ANAS : Association nationale des assistants de service social créée en 1949 13 Ancienneté par rapport au dossier social informatisé : professionnels ayant participé à l’élaboration du projet et professionnels en poste depuis la mise en place dossier social informatisé. Diversité des services d’hospitalisation (soins aigus, soins de suite et gériatrie, psychiatrie) car les durées d’accompagnement et les modalités de travail en équipe pluridisciplinaire varient selon les secteurs. Nous avons conduit 8 entretiens à Brest les 10 et 11 janvier 2008 : 7 auprès du service social (voir tableau ci-dessous) et 1 avec le cadre de santé chargé de coordonner le projet du dossier patient informatisé. Les entretiens ont été enregistrés et ont fait l’objet d’une retranscription sous forme de tableau par thèmes abordés. Deux assistantes sociales ont souhaité être interviewées ensemble. Le guide d’entretien (voir en annexe) a été testé au préalable auprès d’une assistante sociale du CHU de Nantes. Acteurs Ancienneté Participation Types de supérieure à services à l’élaboration 10 ans Particularités du dossier social informatisé Secrétaires Cadre socioéducatif Assistante sociale Assistante sociale X A participé à la création de bases de données X Référente du dossier sociale informatisé En poste de cadre depuis 2001 X X Exerçait auparavant comme assistante sociale dans le service Soins aigus Exerce sur plusieurs sites Soins de suite et soins de Exerce sur plusieurs sites longue durée A exercé dans une autre collectivité où elle Assistante sociale Psychiatrie utilisait un dossier social informatisé sur la base de ce qui avait été élaboré au CHU de Brest 14 Depuis 1 an utilise un dossier informatisé Assistante sociale spécifique à ce service avec un espace partagé et X X Urgence un espace confidentiel pour le service social Exerce dans plusieurs services au titre de la mission « Précarité ». Assistante sociale Assistante sociale X X Psychiatrie A exercé plusieurs années en soins aigus X X Psychiatrie A toujours exercé en psychiatrie 15 Ces interviews ont été complétées par 2 entretiens avec des professionnels exerçant dans un autre établissement de santé : - Le 23.01.08 avec le cadre de santé du CHU de Nantes impliquée dans la coordination des groupes de travail sur le dossier patient. Cet échange, enregistré, visait à clarifier la situation au regard du dossier patient dans l’établissement où nous exerçons et d’y interroger le partage d’informations. - Le 20.02.08, avec un cadre socio-éducatif des Hôpitaux civils de Lyon. Cet échange, téléphonique, a fait l’objet d’une prise de note complétée par un diaporama transmis par mail. Cet entretien permettait de recueillir un point de vue complémentaire sur une expérience récente de mise en place du dossier social informatisé (démarrage effectif en janvier 2007). Les deux cadres socio-éducatifs enquêtées (de Brest et Lyon) sont membres d’une association professionnelle AProSSHeS6 et participent à une commission de travail « informatique » qui a élaboré un guide de recommandations, diffusé sur le site internet de l’association en août 2008. Les trois établissements de santé cités sont des CHU. Dans l’analyse des données, il sera fait référence à l’hôpital de Brest en raison de son expérience du dossier social informatisé (depuis 14 ans) et de son engagement dans l’élaboration du dossier patient informatisé. Lorsqu’il sera fait référence à Lyon, il s’agira de considérer la situation d’un CHU venant d’introduire le dossier social informatisé et utilisant le dossier patient sous format papier. Quand il sera fait référence à Nantes, il sera question d’un établissement n’utilisant que le support papier pour ses dossiers sociaux et médico-soignants, avec un recueil électronique pour les renseignements administratifs. Après avoir analysé ces entretiens auprès de professionnels, il nous est apparu essentiel de recueillir la parole des usagers : ils sont en effet au cœur de l’accompagnement en travail social comme le souligne la législation et son évolution. Aussi, nous avons donc réalisé 4 entretiens (mai 6 L'Association Professionnelle des Services Sociaux Hospitaliers et de la Santé a été crée le 18/12/2001 en remplacement de la délégation nationale de l'Association Européenne des Assistants sociaux Hospitaliers et de la Santé dissoute en juin 2001. 16 2008) auprès de représentants des usagers, membres de l’Espace des Usagers du CHU de Nantes7 (entretiens enregistrés et retranscrits pour les trois premiers) : 7 L’association Espace des Usagers du CHU de Nantes a été créée en juin 2002. Elle est aujourd’hui composée d’une trentaine d’associations et d’usagers individuels qui participent activement à la vie de l’hôpital. Elle travaille en partenariat avec la direction des usagers et les services, à l’amélioration de la prise en compte des usagers du CHU de Nantes. 17 1 permanente de l’Espace des Usagers, bénévole à titre individuel depuis 1 an ½. 1 représentante régionale de l’association François Aupetit8 depuis 3 ans, association membre de l’Espace des Usagers depuis 2 ans ½. Le président depuis 2005 de l’association ILCO Stomisés de Loire-Atlantique, association adhérente à l’Espace des Usagers. La présidente de l’UNAFAM (Union nationale des amis et familles de malades psychiques). Cet entretien s’est déroulé par téléphone compte tenu des contraintes d’agenda de notre interlocutrice. L’ensemble des entretiens visait à cerner à quel point d’intersection le dossier social informatisé peut se situer, en évaluant les impacts pour le service social. Un travail de recherche documentaire a été réalisé à ce stade de la recherche afin de mieux appréhender l’articulation entre le soin et le social et de questionner la nécessaire adaptation du service social aux pratiques médicales. Il s’agit en effet, au terme de ce travail de proposer des préconisations pour l’encadrement du service social. 8 Association François Aupetit, Vaincre la maladie de Crohn et la recto-colite hémorragique, Reconnue d'Utilité publique par décret du 14 août 1996. 18 PARTIE I - LE DOSSIER PATIENT : LIEU DU PARTAGE D’INFORMATION Dans cette première partie, nous présenterons en premier lieu le dossier patient car il est le document de référence pour le partage d’information en équipe pluridisciplinaire. Après avoir précisé les recommandations de la Haute Autorité de Santé en matière de constitution de dossier, nous développerons les modalités de transmission des informations relatives aux usagers, entre professionnels. Nous rappellerons que l’usager est au cœur de la prise en charge et qu’à ce titre le respect de sa vie privée doit être préservé. Nous verrons que le partage d’information se réalise selon une éthique commune à l’ensemble des personnels hospitaliers mais aussi selon des références déontologiques spécifiques aux professions. Au terme de cette présentation, nous nous demanderons si le dossier patient, au-delà de sa vocation de document de recueil d’information, ne constitue pas un outil de management. En seconde partie, nous prolongerons l’étude par celle du dossier social en conservant la même trame de présentation et d’analyse. 1. Présentation du dossier patient Au sein d’un établissement de santé, les informations relatives à la personne malade sont consignées dans un dossier patient, composé d’un dossier médical dédié à l’activité des médecins et d’un dossier de soins pour les éléments spécifiques à la pratique infirmière. Les informations sont partagées entre professionnels chargés de la prise en charge de l’usager, dans le but d’assurer la continuité du projet de soins. Afin de garantir le respect de la vie privée, ces acteurs sont tenus à des règles de confidentialité. L’assistant social est amené à consulter ce dossier et à y consigner des informations. Il ouvre également un dossier social, document de travail distinct réservé à l’accompagnement social. La Haute Autorité de Santé préconise un dossier unifié du patient La Haute Autorité de Santé (HAS) s’appuie sur le Code de Santé Public pour définir les règles de constitution du dossier patient : chaque pièce du dossier doit comporter l’identification du patient et chaque écrit doit être daté et mentionner l’identité du professionnel qui l’a réalisé. 19 Article R.1112-3 : « Chaque pièce du dossier est datée et comporte l’identité du patient avec son nom, son prénom, sa date de naissance ou son numéro d’identification, ainsi que l’identité du professionnel de santé qui a recueilli ou produit des informations ». Dans ses recommandations de juin 2003 pour l’amélioration des pratiques professionnelles dans les établissements de santé, la Haute Autorité de Santé (alors ANAES : Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé) invitait à la création d’un dossier unifié du patient. « La notion de dossier unifié a pour objet de permettre à tout professionnel de santé intervenant dans le processus de soins, d’accéder à tout moment, y compris en urgence, à l’ensemble des informations pertinentes concernant le patient qu’il prend en charge. Il s’agit d’un dossier regroupé et partagé.» La HAS précise le mode de classement des informations recueillies durant le séjour du patient : Les informations médicales : Les informations recueillies auprès de tiers ou concernant des tiers. Ces informations n’étant pas communicables, l’HAS recommande de les saisir sur une fiche spécifique. Les informations actualisées relatives à la prise en charge au cours de l’hospitalisation : évolution de l’état clinique, soins reçus ou devant être reçus et les examens paracliniques réalisés. Les traces de la réflexion bénéfice/risque de la stratégie diagnostique et thérapeutique menée par le médecin avec le patient. Les correspondances échangées entre professionnels de santé. Les informations spécialisées, le cas échéant : Le dossier d’anesthésie, le compte-rendu opératoire, d’accouchement, des examens complémentaires significatifs. Le consentement écrit du patient pour toutes les situations qui l’exigent légalement ou réglementairement. 20 les informations spécifiques : cas de transfusion, dépistage du VIH, greffe de tissus procréation médicalement assistée, recherche biomédicale, dossier transfusionnel, traçabilité de stérilisation interne pour le matériel médico-chirurgical recyclable, traçabilité des dispositifs implantables, le compte-rendu des synthèses pluridisciplinaires. Les informations relatives à l’exécution des prescriptions. Les informations relatives à la prise en charge globalisée du patient par les infirmières : recueil actualisé des données, observations cliniques, problèmes de santé et/ou diagnostic infirmiers identifiés, énoncé des objectifs et des actions de soins, réajustements consécutifs aux évaluations, évaluation régulière de l’autonomie et de la dépendance du patient. Les informations relatives à la prise en charge de la douleur. Les informations recueillies par divers intervenants : le diagnostic initial de kinésithérapie, le bilan de rééducation et les consignes de réadaptation, la prise en charge diabétique, les actions réalisées par un psychologue ou un travailleur social. A propos des informations à caractères sociales, la HAS précise : « Les rapports d’un psychologue ou d’un travailleur social ont un statut que la législation et la réglementation n’ont pas plus précisé que la jurisprudence. Toutefois, ils peuvent faire partie intégrante du dossier du patient s’ils ont été réalisés par un professionnel au sein d’une équipe dirigée par un médecin et qu’ils sont joints au dossier du patient dont ils sont indivisibles. Ainsi, les informations recueillies par un psychologue ou un travailleur social doivent être accessibles aux autres professionnels, si elles sont utiles à la prise en charge du patient. Dans tous les cas, la notion du contact avec le psychologue ou le travailleur social doit figurer par écrit dans le dossier médical ». Un outil complexe à améliorer Le dossier patient constitue le principal motif de réserve ou de recommandation de la HAS auprès des établissements de santé, que ce soit lors de l’accréditation ou de la certification. En fait de dossier unique ou unifié, celui-ci est composé de multiple sous-dossiers : dossier « administratif », « médical » et « soignant » notamment. Les supports informatiques coexistent fréquemment avec des supports papier. 21 Bon nombre d’établissements sont engagés dans une démarche visant la dématérialisation totale du dossier patient. Cette démarche renforce la question de la pertinence de l’information, pour les professionnels et pour les usagers. La loi du 4 mars 2002 permet aux patients et à leurs ayants droit d’accéder directement à leur dossier : celui-ci est donc un outil de communication important. Le dossier unique ne pourrait-il être le dossier minimum commun à l’établissement auquel seraient annexés des dossiers de spécialité ? 2. Les modalités de transmission d’information Les informations confiées par le malade sont réputées confiées à l’ensemble de l’équipe Dans une équipe pluridisciplinaire, le patient a plusieurs espaces de parole. Chaque professionnel reçoit cette parole selon ses missions. Chacun de sa place contribue au projet de soins et est amené à partager ces informations avec ses collègues dans l’intérêt de l’usager. « Lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins dans un établissement de santé, les informations la concernant sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe. »9 Il existe plusieurs modalités de transmissions instituées entre professionnels : sur le plan oral, les temps de transmissions aux moments des changements des équipes soignantes (3 fois par jour : équipe du matin, d’après- midi et de nuit), les staffs pluridisciplinaires ; sur le plan écrit, les transmissions ciblées. Nous préciserons ces deux dernières modalités car elles s’inscrivent plus largement dans la prise en charge pluridisciplinaire. Les staffs Les staffs sont des réunions de service à l'occasion desquelles sont présentés et discutés des dossiers de patients. L’organisation et le contenu de ces réunions sont souvent extrêmement variés et peu formalisés. La HAS souhaite valoriser ces modalités d'exercice clinique qui portent 9 Article L.1110-4 du Code de la santé publique. 22 en elles-mêmes un volet d'évaluation et permettent aux équipes médico-soignantes d'analyser leurs pratiques. « Les staffs, cela se fait maintenant de manière systématique. C’est vrai qu’avec les cadres, ce sont des habitudes de fonctionnement qui sont en train de se développer, des staffs hebdomadaires ou bihebdomadaires quelquefois plus fréquemment selon les besoins, qui nous permettent de faire le tour des patients, de repérer, grâce au recueil de données des infirmières, s’il y a des situations à risque ou problématiques. Un travail autour de ce staff, travail en concertation pour mettre en place les solutions les plus adaptées, contacter les familles. Il y a un bon travail ensemble et j’aime bien cette idée. » (Cadre de santé, Brest) Les transmissions ciblées : une culture commune Dans le contexte d’un travail en équipe pluridisciplinaire, une écriture commune a été proposée à l’ensemble des professionnels intervenant dans la prise en charge du patient. Elle permet une vision synthétique et systémique de la situation globale du malade. Les transmissions ciblées, c’est une écriture structurée résultant d’un raisonnement clinique individuel et collectif qui permet de visualiser la cohérence entre un problème de santé (la cible) et ses caractéristiques personnalisées (données). La pertinence de cette première écriture oriente le choix des interventions de soins personnalisés (actions) et l’évaluation de l’efficacité des interventions de soins (résultats). « L’idée, c’est bien d’utiliser un outil commun et un langage à peu près commun, parce qu’effectivement chaque corps de métier a son vocabulaire, sa propre terminologie, mais il faut que cela soit compréhensible par tous. » (Cadre de santé, Brest) Il s’agit de favoriser la continuité dans la transmission des informations et des soins et d’éviter de faire répéter au patient les éléments déjà recueillis. Les personnels sont formés à cette pratique dans le cadre des plans de formation institutionnels. Cependant, on observe d’une unité de soin à l’autre, des organisations pratiques souvent différentes, ce qui complexifie les modalités de transmission écrite avec les équipes médicosoignantes : 23 « Chaque service a sa propre organisation dans ses cardex10, ce n’est pas uniforme. Autant de services, autant d’organisations différentes. » (Assistante sociale en soins de suite, Brest) Un partage d’information dans la limite de ce qui est utile aux missions Il y a lieu de s’interroger pour autant, préalablement à toute écriture dans le dossier du patient, sur la nature des informations qui seront consignées et sur les habilitations des personnes amenées à consulter le dossier : « Le dossier unifié ou regroupé impose une réflexion préalable sur la pertinence des informations qui doivent le constituer et sur les niveaux d’accès ».(…) « La continuité des soins nécessite le partage des informations entre tous les professionnels prenant ou ayant pris en charge le patient à quelque titre que ce soit et dans les limites de ce qui est nécessaire à leur mission.»11 L’élaboration d’un guide ou d’une charte permet de définir la gestion et l’élaboration du dossier, les règles d’accessibilité, les règles d’échange d’information(s) entre professionnels d’un même ou de différents services. 3. La place de l’usager L’usager au cœur de la prise en charge La loi 4 mars 2002 réaffirme le principe d’une reconnaissance du sujet citoyen, la promotion du droit des bénéficiaires et de leur entourage. Le respect de la personne et de ses choix est renforcé. Ses droits se réfèrent aux droits fondamentaux de la personne humaine : respect de l’intégrité, de la dignité, de la liberté individuelle, de la vie privée, de l’intimité ainsi que le droit à sa sûreté. La loi n’innove pas fondamentalement en termes de valeurs à mettre en œuvre. Cependant, si le législateur a jugé utile de revenir sur le droit des usagers, c’est bien que dans la pratique, son application avait besoin d’être réaffirmée. 10 Cardex : classeur-dossier de soins 11 ANAES, Recommandations pour l’évaluation des pratiques professionnelles dans les établissements de santé, Le dossier patient, Amélioration de la qualité de la tenue et du contenu, Réglementation et recommandation, juin 2003. 24 L’accès à toute information ou document relatif à sa prise en charge est reconnu à l’usager, dans la limite des dispositions légales. La loi du 4 mars 2002 consacre, entre autres, le droit à un accès direct de chacun à son dossier médical, incluant des dispositions spécifiques pour les mineurs. Au même titre que le dossier patient, le dossier social peut désormais être consulté par l’usager. Cependant, le terme de « place » de l’usager, en tant qu’il évoque un problème de territoire, peut induire des tensions liées aux contours de cet espace. Les équipes pluriprofessionnelles peuvent se sentir dépossédées et la relation à l’usager associée à une intrusion. Comme le relève les rapporteurs du CSTS12, placer l’usager au cœur des dispositifs peut aussi lui donner, à contrario, l’impression « d’être la cible de … , que les différents intervenants auxquels il a affaire s’acharnent sur lui au nom de… sa propre liberté »(…) « Vouloir dépasser cette classification signifie refuser une posture de l’usager qui serait celle de l’assujetti ou celle du client-roi ». Ainsi, plus que la place, c’est le rapport entre l’institution et l’usager qui est à interroger, en termes d’échange par la parole dans un espace de débat. Ce sont les conditions de la rencontre qu’il convient de définir afin qu’elles soient acceptables pour chacun. « Il importe d’être présent à l’autre sans le réduire au prétexte qui l’amène et d’aller vers le devenir de cet individu ».13 L’entretien vise à favoriser la parole de l’usager et ainsi le recueil des informations utiles à l’accompagnement. Lors des entretiens réalisés auprès des représentants des usagers, chacun s’est accordé à reconnaître l’intérêt du dossier qui permet de ne pas avoir à décliner son histoire à plusieurs reprises, ce qui participe à se sentir reconnus en tant que personne. « L’important, ce n’est pas le dossier lui-même, c’est ce qu’on en fait » (Représentant ILCO Stomisés, Nantes). Le respect de la vie privée du patient doit demeurer constant Le respect de la vie privée du patient doit demeurer constant. L’intérêt de l’usager doit être interrogé avant tout partage d’information, tout comme doivent l’être les conditions de ce 12 L’usager au centre du travail social, Rapport du CSTS – Conseil Supérieur du Travail Social, Rennes, 2007, p.30-32. 13 Maëla PAUL, L’accompagnement… comme changement de paradigme, La revue française de travail social, n° 223-224, décembre 2006-2007, p.15. 25 partage : qui sont les professionnels participant à ce partage d’information ? Sont-ils soumis au secret professionnel ? Quelles sont les informations communicables et indispensables au regard de l’objectif ? L’usager est-il favorable à cette transmission et quel retour aura-t-il des conclusions de cet échange ? Ainsi se pose la question du dossier du patient. Actuellement le dossier patient est composé de plusieurs documents : dossier administratif, dossier médical, dossier de soin. Le dossier social est généralement distinct. Des transmissions sociales dans le dossier de soins contribuent à enrichir le projet de soins. L’orientation actuelle est d’aller vers la construction d’un dossier patient unique afin de permettre une vision globale de la situation du patient. Se pose alors la question de l’intégration de dossier spécifique comme le dossier social dans le dossier patient. La problématique du dossier partagé interroge la constitution du dossier unique : quelles informations recueillir ? Quelles informations tracer ? Qui peut avoir accès à ces informations ? Faut-il envisager des zones confidentielles et des zones partagées ? Sur le fond les questions éthiques sont les mêmes, quelle que soit la forme du dossier, papier ou électronique. La place de l’usager reste centrale car celui-ci est la préoccupation essentielle. En effet, si chaque professionnel contribue à la prise en charge du patient, toutes les informations qu’il recueille n’ont pas à être consignées. Il s’agit de s’interroger sur la pertinence du partage et de la traçabilité des informations au regard du projet de soins et du respect de la vie privée du malade. La référence à l’éthique vient guider les professionnels dans leur démarche. Nous proposons de nous arrêter sur cette dimension en la resituant dans son approche théorique afin de mieux cerner son impact sur les pratiques professionnelles. 4. Dimension éthique L’éthique interroge les valeurs et les règles du vivre-ensemble La question de l’éthique permet de réfléchir sur les comportements humains en s’émancipant des prescriptions morales. 26 Dans le langage actuel, on préfère parler d’éthique que de morale. Comme l’écrit Pierre VERDIER « On accepte mal qu’on nous fasse la morale ; on comprend mieux qu’on nous rappelle des règles éthiques ».14 Pour autant, on peut définir la morale comme l’ensemble des règles admises comme bonnes par et pour une société ; l’éthique relève d’une dimension plus réflexive sur les fondements de la morale, elle interroge les principes qui gouvernent les conduites de chacun. Le terme d’éthique est largement discuté dans différents champs disciplinaires : la biologie, la génétique, l’environnement, la politique, l’économie, les droits de l’homme, les sciences humaines, les entreprises, le marketing, la consommation… On parle de bioéthique, d’éthique stratégique, d’éthique sociale… Face aux changements, à l’extension du choix des possibles liés aux progrès techniques et scientifiques, l’homme se trouve confronté à des questions qui déterminent les orientations de la société. Ce sont les valeurs et les règles du vivreensemble qui sont interrogées. Et pour cela des critères sont à définir. L’éthique a une visée humaine et réaliste. A l’inverse de la morale, elle ne propose pas des normes catégoriques mais des normes hypothétiques. Elle permet à chacun de construire ses comportements en fonction de ses propres valeurs. Cela se traduit par des actes réfléchis et responsables. La réflexion éthique s’inscrit dans un contexte social et politique et à ce titre est susceptible d’évoluer. Selon Paul RICOEUR15, (1990), l’éthique « c’est la visée de la vie bonne avec et pour autrui dans des institutions justes ». Cela implique d’abord de croire pour soi en la liberté d’agir, par opposition à la résignation, au fatalisme. A partir de là, le respect de l’autre et de sa liberté s’imposent comme identique à la notre. Pour permettre l’expression et la réalisation de cet objectif, la médiation d’institutions justes est nécessaire. Le droit vise à garantir les valeurs sur lesquelles se fonde une société. Dans certains cas, l’éthique peut être supérieure au droit en se posant comme mode de régulation. Les concepts peuvent être antagonistes et complémentaires La pensée éthique contemporaine a développé des concepts dans des acceptions parfois antagonistes, parfois complémentaires : 14 Pierre Verdier, Morale, éthique, déontologie et droit, in : Les cahiers de l’Actif – N° 276/277, p.17-28. 15 Paul RICOEUR, Soi-même comme un autre, 1990, rééd. Seuil, coll. « Points essais », 1997, 424 p. 27 éthique de conviction et éthique de responsabilité (Max WEBER), éthique de discussion (K.O.APPEL, Jürgen HABERMAS). Le travail social est habité par ces mêmes questions. Brigitte BOUQUET16 et les rapporteurs du CSTS17 s’y réfèrent pour fonder l’éthique du travail social. Nous allons développer le point de vue de ces auteurs, leur conception de l’éthique rejoignant la manière dont les professionnels conçoivent leur métier, leur mission. Nous nous attacherons particulièrement à l’impact sur le travail social. L’éthique de conviction renvoie à l’attitude qui vise à se mettre inconditionnellement au service d’une fin. L’éthique de conviction renvoie à la personne comme être dans son unicité, sa singularité mais aussi comme être social, dans ses relations familiales et sociales, dans sa citoyenneté. Ici, le principe moral domine, sans se soucier des conséquences. Le travail social, en particulier, s’inscrit dans une éthique de conviction en tant qu’elle défend une vision humaniste de l’homme comme individu et comme acteur dans la société. L’éthique de responsabilité met en avant les conséquences de l’action et des efforts imputables à l’action pour arriver à ses conséquences. Max WEBER donne un sens précis au concept d’éthique de responsabilité, qu’il définit entre autres selon la maxime « nous devons répondre des conséquences prévisibles de nos actes »18. L’individu est placé devant des choix qui doivent tenir compte du principe de réalité pour atteindre un objectif. En cela, le travail social peut se référer à l’éthique de responsabilité. L’action du travailleur social s’inscrit dans un contexte historique donné. Ses actes l’engagent pour lui et pour les autres, dans une société en construction. Le travailleur social élabore un processus de délibération personnelle en référence à une éthique de conviction, qui fonde ses propres valeurs, et une éthique de responsabilité par rapport à lui-même et aux autres car il doit rendre compte de ses actes, des moyens engagés et des 16 Sociologue, professeur titulaire de la chaire du Travail social au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et vice-présidente du Conseil supérieur du travail social (CSTS) 17 CSTS : Conseil supérieur en travail social. 18 Max Weber, Le savant et le politique, trad.Julien Freund, Paris 1959, p. 172. 28 conséquences qui en découlent. Toute décision engage la responsabilité personnelle et professionnelle, pas seulement en termes de responsabilité juridique, dans son acception négative de « recherche de la faute ». La responsabilité éthique est attendue dans son acception positive à savoir rechercher à être la cause de l’autonomie des personnes. L’éthique de la discussion cherche à établir un principe de base pour la délibération morale et pour le jugement, afin d’établir une validité des normes. Selon Jürgen HABERMAS « Les normes valides font reposer leur caractère d’obligation sur le fait qu’elles incarnent un intérêt universalisable et avec la défense de cet intérêt, ce sont en même temps, l’autonomie et le bien-être des individus, ainsi que l’intégration et le bien-être de la collectivité sociale qui sont en jeu. »19 A partir de là, HABERMAS prend acte de l’impossibilité de définir une éthique universelle et propose le principe d’une libre discussion entre les membres d’une même communauté. La recherche du consensus par la voie de l’argumentation anime les individus en référence aux normes validées et à la recherche du bien-être collectif. La prise en compte des lois est parfois sujette à de conflits éthiques. La délibération collective permet de s’interroger, voire de transformer l’action des lois qui ne paraissent pas justes. L’éthique professionnelle s’enrichit ainsi des différents débats philosophiques contemporains interrogeant les notions d’égalité, d’équité, de multiculturalisme, d’engagement citoyen, de lien social … Ces références théoriques à l’éthique dans ses différentes approches favorisent les positionnements professionnels dans la recherche de l’amélioration de la prise en charge soignante, notamment au regard du partage d’information qui était une question posée dans cette partie. Cette question renvoie à la notion de secret, secret professionnel et secret partagé que nous nous proposons d’exposer ici. Le droit au secret est un droit universel Notre société prône la transparence, notamment par souci de moraliser l’action publique. La démocratie serait ainsi fondée sur le déploiement de la vérité. Dans ce contexte, la notion de 19 Jürgen HABERMAS, De l’éthique de la discussion, Collection du Cerf, Paris, 1992, 199 p., p. 65. 29 secret a une connotation quelque peu suspecte, comme si elle pouvait avoir quelques liens avec le mensonge ou en tous cas comme si elle pouvait faire obstacle à la vérité. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les législateurs internationaux ont reconnu le droit au secret comme un droit universel (secret des familles et de la vie privée : article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, puis article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme). Ce principe est également introduit dans le Code civil (article 9) par la loi du 17 juillet 1970. Les professionnels sont juridiquement tenus de respecter le secret Les professionnels se voient définis un cadre pour que ce droit soit respecté. Il s’agit du droit de réserve (obligation faite aux fonctionnaires de ne pas porter préjudice à l’institution qui les emploie), de l’obligation de discrétion (elle est inscrite dans le droit du travail et oblige les salariés à être discrets sur les éléments appris dans le cadre de leur fonction). Le secret professionnel quant à lui vise à protéger l’usager. Il permet d’établir la relation de confiance. Il a un fondement juridique : c’est une protection de l’individu qui correspond à un contrat de dépôt. Est considérée comme soumise au secret, toute information qui concerne la personne, sa vie familiale, professionnelle, ses opinions, sa religion et tout élément décidé par l’usager lui-même. Selon l’article 226-13 du code pénal, trois catégories de personnes sont soumises au secret professionnel : soit par état (ministère du culte par exemple) ou compte tenu de leur profession (les médecins, les infirmières, les sage femmes, les assistants sociaux, les avocats…) ou en raison d’une fonction (agents de la fonction publique et membres de certaines institutions) ou d’une mission temporaire (c’est le cas par exemple des éducateurs spécialisés au titre de la protection de l’enfance.) Le secret partagé n’existe pas en droit La notion de secret partagé n’existe pas en droit. Il s’agit bien de partage d’informations utiles dans l’intérêt de l’usager. Cette utilité doit être régulièrement interrogée. Sa pertinence résulte avant tout de la mission confiée à l’établissement et à chacun des professionnels. Dans un travail d’équipe, où chacun est soumis au secret professionnel, la proximité et l’habitude de 30 travailler ensemble peut parfois faire perdre de vue les limites de ce qui est communicable et ce qui doit rester confidentiel. « Quand on travaille en proximité, il y a plus de risque de se transmettre plus d’info… mais c’est dans l’intérêt du patient. (…) Dans une petite équipe on arrive à des fonctionnements qui sont beaucoup plus harmonieux. Quand le médecin a compris ce que c’était une intervention sociale, c’est assez logique de lui en donner un peu plus.» (Assistante sociale aux urgences, Brest) Les usagers eux-mêmes notent l’intérêt du partage d’information et les limites de la question du secret. « La confidentialité apparaît comme un grand tabou, mais elle s’arrête à partir du moment où elle porte préjudice aux personnes. La confidentialité a du sens jusqu’à un certain point. Elle ne doit pas être contre-productive à l’accès aux droits. » « Il y a une alliance entre le professionnel et le malade. » (Représentante de l’UNAFAM, Nantes). « Ce qui est préjudiciable c’est le manque de considération. » (Représentant de l’association ILCO Stomisé, Nantes). Pour autant, l’usager devrait garder la maîtrise des informations communiquées : « Des personnes pensent que toutes les informations sont connues de tous les professionnels. Il est important de redire aux patients qu’ils sont maîtres de leurs informations » (Représentant de l’association ILCO Stomisé, Nantes) Si les informations recueillies par les professionnels sont réputées confiées à l’ensemble de l’équipe, il y a lieu que les professionnels gardent en mémoire que ces informations concernent la vie privée de la personne malade et de son entourage. Elles touchent à l’intime. Elles ne peuvent être transmises qu’avec discernement. Il convient d’informer le patient sur les modalités de communication au sein des équipes et des services et de s’assurer de son accord pour la transmission de certains éléments entre professionnels. La qualité des relations interpersonnelles – avec l’usager, entre professionnels – contribue pleinement à la qualité de soins. L’informatisation du dossier patient s’inscrit dans cette recherche de l’amélioration des pratiques. 5. L’informatisation du dossier patient La loi rappelle que le patient doit être informé des procédures le concernant, notamment en matière de recueil d’information. L’information partagée concerne le patient : la transmission 31 ne peut se faire sans l’accord de l’usager : « L’accord du patient est nécessaire au préalable. » (Jeune assistante sociale en soins aigus, Brest) Il peut s’opposer à ces modalités. Cela n’est pas sans poser des conflits de devoir aux professionnels de santé. Entre respect de la vie privée de l’usager et continuité dans la prise en charge soignante, un équilibre est à trouver : « La CNIL nous oblige à noter dans le livret d’accueil que le dossier est informatisé et la loi du 4 mars 2002 autorise le patient à dire « mais moi je ne veux pas qu’on informatise les données me concernant… » C’est la loi informatique et liberté, ça. Alors, il y a la réponse papier. C’est vrai qu’on n’y est pas encore mais on va être confronté à ça. Les procédures qui vont être mises en place par les gens. On peut imaginer en se projetant qu’à terme, on puisse avoir des gens qui disent : non je veux qu’on ne note aucune information que ce soit sur l’informatique de l’hôpital. » (Cadre de santé, Brest) Le passage au dossier informatisé réactive les questions relatives au recueil des informations et à leur communication car l’accès à l’information est facilité et sa limitation est également permise. Au CHU de Nantes, le dossier patient, actuellement sous version papier, est structuré en onglets prédéfinis par ordre chronologique inverse afin de permettre une recherche plus rapide d’un élément du dossier. (Annexe 10, p.125) Ces éléments sont constitués de fiches validées par l’institution, de courriers et comptes-rendus médicaux et résultats d’examens. Le travail actuel de réflexion sur l’amélioration du dossier pour tendre vers un dossier unique est un préalable à la construction du dossier électronique à venir. La gestion du dossier patient dans ses deux composantes électronique et papier est placée sous la responsabilité d’un Centre de l’Information Médicale et du Dossier Patient (CIMDP) qui assure la coordination des Programmes d’Amélioration de la Qualité (PAQ) relatifs au dossier mis en place dans le cadre du projet d’établissement. Une démarche d’harmonisation des pratiques sur l’ensemble des services du CHU est en cours. L’objectif est à terme de dématérialiser totalement le dossier patient. Un cadre de santé et un ingénieur service qualité sont chargés de coordonner des groupes de travail sur ce sujet en lien avec le service des archives et la direction des systèmes d’informations et des télécommunications, l’idée étant que les réflexions et les applications 32 déterminées puissent être transférables lors de l’informatisation du dossier patient. « Dans le cadre de l’informatisation, si on y a réfléchit pour le dossier papier, on peut se dire que c’est préparatoire pour l’informatisation » Une charte de gestion du dossier patient a été élaborée par le CIMDP et validée par les instances en mai 2007. Cette charte définit les grands principes de la gestion du dossier patient, pose le cadre juridique, précise les rôles et les responsabilités des acteurs concernés, rappelle les règles de constitution et de tenue du dossier patient ainsi que les modalités de communication (en termes de sécurité et de règles d’accès), décrit le cycle de vie du dossier patient et énonce les conditions et perspectives d’évaluation. Il existe par ailleurs une charte d’utilisation de l’outil informatique à laquelle chaque professionnel du CHU de Nantes doit adhérer dès lors qu’il a sollicité une habilitation. Au CHU de Brest, la démarche visant l’informatisation du dossier patient est déjà bien engagée. Le travail porte notamment sur la recherche d’harmonisation des différents logiciels en fonction au sein de l’institution, sur la définition des onglets et des habilitations relatives à ces onglets. « La confidentialité d’un séjour est possible. Ça, ça se joue avec les droits qu’on donnera. Il y aura des personnes à l’hôpital qui auront tous les droits (d’accès). Le patient a le droit qu’on ne sache pas qu’il est venu pour un problème psychiatrique par exemple, mais il faut bien que certains médecins sachent que dans son antériorité, dans son histoire de maladie, il y a eu cet épisode là. Car cela peut avoir des conséquences sur une nouvelle pathologie ou un traitement. Sinon on est dans le registre de la non-assistance à personne en danger. Alors entre deux maux… » (Cadre de santé, Brest) L’informatisation du dossier vise à mieux prendre en compte le patient, en renforçant le travail pluridisciplinaire : « Donner réellement du sens à l’équipe pluridisciplinaire c'est-à-dire on intervient tous et on est tous centré sur la même chose qui est le patient, qui est là. Que ce soit à tous les niveaux, qu’il y ait un vrai partenariat. » (Cadre de santé, Brest). En conclusion, Il apparaît que l’outil dossier patient, au-delà du recueil d’information, parle des liens avec l’usager et entre les professionnels à l’hôpital. Selon la façon d’accueillir le patient et de recueillir sa parole, s’instaure une qualité de relation propice aux soins. Selon la façon de consigner l’information recueillie et de la partager entre professionnels, se met en place 33 une qualité de prise en charge soignante et sociale. On voit ainsi que cette question concerne l’ensemble de l’institution et qu’elle va concerner tout particulièrement les personnels chargés de décliner les orientations institutionnelles, dont les cadres des services chargés du management de proximité. Les projets d’informatisation du dossier viennent réinterroger l’outil sur le plan technique mais sont aussi l’occasion de regarder les pratiques professionnelles en ce qui concerne l’accueil et la prise en charge de la personne malade et de son entourage. Alors que les évolutions technologiques et les contraintes économiques poussent à toujours plus de rapidité, la législation et les références aux valeurs humanistes rappellent que le respect de la personne humaine est central à l’hôpital. Le management contribue, dans ce contexte, à accompagner les équipes dans la mise en application de ces objectifs. 34 PARTIE II - LE DOSSIER SOCIAL : UN DOSSIER PARTAGÉ OU UN DOSSIER DISTINCT ? Cette partie, cœur de notre travail, fera l’objet d’un long développement : il s’appuiera sur les entretiens réalisés, comme annoncé dans le chapitre préliminaire sur la méthodologie. Nous venons de présenter le dossier patient et les modalités de partage d’information à l’hôpital. Notre étude porte sur le dossier social informatisé. Regardons comment le service social, service minoritaire à l’hôpital, s’inscrit dans le processus de soins et dans le travail en équipe pluridisciplinaire. Nous préciserons tout d’abord le cadre d’intervention du service social. Ensuite nous présenterons le dossier social selon trois approches : comme partie intégrante du dossier de soin, comme dossier de spécialité complémentaire de ce dossier de soin, comme dossier spécifique consultable uniquement par le service social. Nous rappellerons que le travailleur social intervient à partir de la demande de l’usager et recherche l'adhésion des intéressés à tout projet les concernant. En cela, l’action du service social se reconnaît dans les valeurs humanistes et l’éthique que nous avons exposées au premier chapitre. Nous montrerons aussi qu’elle se réfère à une déontologie professionnelle spécifique notamment pour ce qui est du secret professionnel. En préambule de cette seconde partie, nous faisons un constat : l’informatisation du dossier social vient réinterroger ces différentes dimensions, là où les pratiques finissaient par aller de soi avec le dossier papier. Au décours du recueil et du partage de l’information avec cette nouvelle modalité technique qu’est le dossier informatisé, c’est la place de chacun de ces paramètres qui est questionnée. L’informatique suscite tout à la fois des interrogations, des craintes, des engouements car elle facilite la transmissions d’éléments. L’informatique renforce les questions sur le partage d’information, sur les relations interpersonnelles qui sont mobilisées dans cette transmission – ou cette non transmission. Comment se construit le dossier social en tenant compte des différentes exigences que sont le respect de l’usager (de sa demande, de son intimité) et l’intérêt du partage d’information en équipe pluridisciplinaire ? Comment s’inscrit la participation de l’assistant social au processus de soins et son intégration dans le travail soignant ? Sur quelle référence éthique s’appuie le service social en matière de partage d’information? 35 Services de soins Dossier Social Informatisé Service social Usagers Quelle est la place du dossier social informatisé dans ce triangle ? C’est ce que nous chercherons à déterminer dans ce chapitre, en regardant quelle incidence a chaque niveau identifié – place de l’usager, participation au travail pluridisciplinaire dans le processus de soins, référence à l’éthique professionnelle spécifique au métier d’assistant social – dans la construction du dossier social informatisé et en quoi finalement il est un outil de management stratégique. 1. Cadre d’intervention du service social hospitalier Le statut du service social est celui applicable au statut général de la fonction publique hospitalière. Le décret du 26 mars 1993 le rattache au cadre socio-éducatif de l’établissement luimême rattaché au directeur. Les interventions du service social sont réalisées en conformité avec : la charte du patient hospitalisé la charte des droits de la personne âgée dépendante 36 la loi du 4 mars 2002 sur le droit des usagers dans le système de santé. le décret n° 93-652 du 26 mars 1993 portant statut particulier des assistants socio-éducatifs de la Fonction Publique Hospitalière. Selon le secteur d’intervention, l’action des assistants sociaux peut se limiter à l’hôpital ou être plus largement située à l’intérieur d’un territoire d’intervention (ce qui est le cas pour les assistants sociaux affectés au secteur psychiatrique, conformément au champ de compétence fixé par la sectorisation psychiatrique.) ou dans le cadre d’une prise en charge sociale globale intégrant un suivi hospitalier et extra-hospitalier, (ce qui est le cas pour les prises en charge VIH). La profession d’assistant social est réglementée. L’assistant social se conforme aux règles de déontologie du service public, aux règles relatives au secret professionnel définies par l’article 226-13 du code de procédure pénale ainsi qu’aux principes définis par le code de déontologie de la profession. La compétence distinctive du Service Social Hospitalier tient à la connaissance qu’ont les assistants sociaux de l’institution hospitalière et de ses modalités de prise en charge. Personnels hospitaliers, les assistants sociaux développent des liens privilégiés avec les services de soins leur permettant de mieux approcher les pathologies et leurs répercussions sur la vie sociale des personnes soignées. Leur implication dans le processus de soins les amène à partager, avec l’accord du patient, des informations qui ne sauraient être partagées en dehors de ce cadre20. Les actions prioritaires sont définies dans un projet de service du service social des malades. A titre d’exemple, les axes prioritaires du service social du CHU de Nantes sont les suivants : l’accès aux droits et aux soins 20 Extrait du projet de service du service social du CHU de Nantes. 37 le traitement et la prévention de la dépendance la lutte contre les exclusions le traitement et la prévention de la désinsertion au niveau du logement et de la vie professionnelle le traitement et la prévention de la maltraitance l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques l’accompagnement social de la fin de la vie Le travail social fonde son action sur le respect de la demande de l’usager ce qui constitue une difficulté en milieu hospitalier, l’hôpital cherchant à réduire les temps d’hospitalisation à la fois pour des raisons économiques liées à la tarification à l’activité et à la fois par souci de répondre à la demande de prise en charge médicale du plus grand nombre. Le temps de l’acceptation et de la préparation à des choix après l’annonce d’une maladie, d’un handicap, d’une perte d’autonomie est différemment accordé au patient et à son entourage selon les secteurs d’hopitalisation. La marge de manœuvre du service social est alors différente d’un service à l’autre. L’autonomie du service social dans la définition de ses objectifs de travail est parfois contestée par les pôles et peut constituer un enjeu de pouvoir. Le dialogue est nécessaire afin de clarifier les missions et les attentes des pôles en fonction du projet de soin et d’identifier ainsi les points de convergence et de divergence. Cette démarche peut passer par l’élaboration de contrat entre le service social et les pôles. Le service social accompagne les personnes dans une démarche d’accès à leurs droits en les reconnaissant libres d’arrêter les décisions qui les concernent. Dans ce sens, le service social est porteur de la parole des usagers. Sur le plan déontologique,21 l’assistant social s’engage, quand il entreprend un suivi, à poursuivre son action et ne pas s’imposer lorsque son aide n’est plus nécessaire ou non souhaitée. A l’hôpital, le temps de l’accompagnement social est souvent lié à la durée d’hospitalisation : des relais avec d’autres intervenants sociaux sont alors organisés. 21 ANAS, Code de déontologie, Art. 14 - L'Assistant de Service Social doit aux personnes qui s'adressent à lui une aide d'une durée aussi longue que l'exige la situation, en dépit des difficultés rencontrées et quels que soient les résultats obtenus. Il ne doit pas s'imposer lorsque son aide n'est plus nécessaire. 38 La nature du travail social hospitalier varie selon le temps d’intervention sociale sur le secteur de soins concerné et s’adapte au projet médical du service tout en conservant les références aux finalités du métier. L’accompagnement social s’appuie sur un véritable pacte de confiance avec l’usager. Il est donc essentiel de connaitre le service de soins dans lequel s’inscrit l’intervention sociale afin de prendre en compte les orientations qui y sont développées. 2. Présentation du dossier social 2.1 Définition du dossier social Tous les assistants sociaux utilisent un dossier social, sous une forme ou une autre, validée ou non par leur institution. Ce dossier social fait partie intégrante des outils de l’assistant social et pourtant, il ne correspond à aucune définition légale et encore moins à une quelconque obligation juridique. C’est pourquoi les professionnels peuvent y projeter des fonctions différentes. Le dossier social informatisé, parce qu’il est un nouveau support de communication, vient questionner le sens et les modalités même du dossier social. La facilité technique d’accès aux informations interroge les contenus et les possibilités de consultation. L’informatisation réactive des questions qui n’étaient peut-être plus posées avec la culture du dossier papier. Un document administratif sans existence juridique Sur le plan légal, le dossier social n’a aucune existence. Toutefois plusieurs avis et conseils de la CADA22 le considèrent comme un document administratif au sein de la loi du 17 juillet 197823 et la loi du 12 avril 200024. 22 23 CADA : Commission d’Accès aux Documents Administratifs Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques, modifiée par la loi 79-587 du 11 juillet 1979. 24 Loi 200-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens et de leurs relations avec les administrations. 39 Historiquement, l’assistante sociale disposait d’un « dossier » contenant toutes sortes de documents, d’écrits, de pièces justificatives, courriers, notes personnelles. C’était la « propriété » de l’assistante sociale et personne ne venait le regarder. A partir du moment où les employeurs, particulièrement dans les grandes institutions, se sont intéressés au dossier papier, des préconisations ont été faites en matière de règles de constitution, de tenue et de clôture. Parallèlement à ces réflexions internes, des questions plus générales de constitution et de consultation des dossiers sont intervenues, ainsi que la question du contrôle judiciaire. Les lois de 1978 sur l’accès aux documents administratifs et sur « informatique et libertés » ont introduit le dossier social dans la sphère légale, la création d’un fichier nominatif étant désormais soumise à déclaration. Document administratif, il doit répondre aux règles de communication et de gestion réglementées par la loi. Une mémoire et un outil pour l’accompagnement social L’ANAS dans son opuscule sur le dossier social précise : « Il est la mémoire d’un service sur la situation administrative et sociale d’une personne prise en charge par un assistant de service social. Il est la mémoire des interventions de l’assistant de service social. C’est un outil qui permet, par l’écriture et la réflexion, l’analyse de toutes les données d’une situation, de la relation avec le client et la distanciation nécessaire à la prise de décision pour un traitement le mieux adapté possible à cette situation. Il comporte des éléments utiles pour établir une liaison avec des collègues pour le traitement d’une situation, pour la participation à un travail de groupe ou pour une contribution à une action collective. Il contient des informations qui permettent de « rendre compte » à l’employeur (statistiques, études, etc.…) et d’évaluer ainsi si le service rendu correspond bien aux missions confiées. C’est un support essentiel lors des échanges avec l’encadrement : soutien technique, contrôle, bilan des situations à transmettre lors d’un changement de prise en charge (départ de l’assistant social ou de l’usager). »25 L’association AProSSHeS26 rejoint cette définition et apporte des précisions concernant l’accessibilité : « Du fait des données confidentielles et nominatives qu’il contient, son accès doit être 25 ANAS, le dossier social, La revue française de service social, Paris, n° 203, décembre 2001. 26 L'Association Professionnelle des Services Sociaux Hospitaliers et de la Santé a été crée le 18/12/2001 en remplacement de la délégation nationale de l'Association Européenne des Assistants sociaux Hospitaliers et de la Santé dissoute en juin 2001. 40 protégé vis-à-vis des tiers, quels qu’ils soient. En revanche, il doit être ouvert à l’usager sur simple demande de sa part. » Le dossier est un outil vivant constitué d’informations recueillies à son ouverture, alimenté tout au long de l’accompagnement de la personne et clos à la fin de l’intervention. On peut considérer que le dossier comporte plusieurs parties : Une partie qui concerne directement l’usager et qui est soumise au secret professionnel. Cette partie pourra lui être communiquée, à sa demande, selon les dispositions légales sur l’accès aux documents administratifs. Une partie qui intéresse la réflexion de l’assistant social, également soumise au secret professionnel. Elle peut prendre la forme de notes de l’assistant social comprenant des éléments objectifs mais aussi subjectifs permettant des hypothèses de travail. Ces éléments de méthodologie professionnelle (aides mémoire, notes, comptes-rendus d’entretiens, éléments d’appréciation d’une situation à un moment donné) doivent être retirés et détruits dès qu’ils ne sont plus utiles, en tout cas dès que l’action prend fin. Une partie qui intéresse l’employeur : elle rassemble les données rendues anonymes qui peuvent servir à des études sur la population et ses problématiques, voire sur les orientations du service social. Elle rend compte de l’activité du service et assure également le contrôle de cette activité auprès de l’employeur. Le dossier social est aussi un support pour l’objectivation des pratiques et des problématiques sociales prises en charge. L’assistant social est responsable du dossier social mais celui-ci ne lui appartient pas. Il ne peut l’emporter ni le supprimer avant son départ. Le dossier appartient au service qui emploie le professionnel. 2.2 Vie du dossier social. Deux temps de formalisation : l’ouverture et l’archivage du dossier social L’ouverture du dossier social est décidée par l’assistant social lorsqu’il entreprend une action de suivi. Le dossier lui permet de consigner la demande de l’usager et les démarches 41 effectuées et aussi de réfléchir sur le processus d’accompagnement et le plan d’aide. L’action sociale est engagée dans l’intérêt de l’usager et dans le respect de la personne et de sa dignité. Le dossier est constitué selon les mêmes principes. Il peut contenir des informations sur la vie privée de l’usager, informations que ce dernier aura lui-même confiées. Le dossier représente une composante de son identité. La vulnérabilité de l’usager accentue la responsabilité du professionnel à son égard. Si la création du dossier social ne répond pas à des règles juridiques, elle doit répondre à des règles éthiques : l’usager doit être informé de l’ouverture d’un dossier, il peut y avoir accès et demander à apporter des modifications. En service social hospitalier, aucun diagnostic médical ne doit apparaître dans un dossier social. Le dossier social participe à la traçabilité de la prise en charge sociale. L’information consignée doit répondre à un classement méthodique. Le dossier doit être clair, précis et facile de compréhension par la personne accompagnée. Il doit permettre l’accès à l’information par un(e) collègue en l’absence de l’assistant social référent (maladie, congé…) et ce dans l’intérêt de l’usager. Toute information est datée et son auteur identifié (nom et fonction). L’accompagnement social se construit ainsi à partir de la demande de l’usager et le dossier social s’ouvre dès le début de la prise en charge. Afin d’assurer la confidentialité des informations recueillies, le dossier de service social est classé dans un meuble fermant à clé ou un fichier non accessible. La clôture du dossier social signifie la fin d’un accompagnement dans le cadre d’un plan d’aide concerté avec l’usager. Une orientation vers un autre professionnel peut être convenue. Cet élément est consigné. L’archivage permet la continuité de prise en charge en cas de nouvelle hospitalisation. Il renvoie à la notion de devoir de mémoire, devoir de protection des personnes et par opposition interroge le droit à l’oubli. N’ayant pas d’existence juridique à proprement parler, il est fait référence aux règles qui régissent les documents administratifs nominatifs. Dans beaucoup de services sociaux, la conservation des dossiers s’est faite en fonction de la disponibilité des locaux. On observe donc des pratiques variables. Des procédures s’élaborent, visant à clarifier les pratiques. Elles devraient permettre d’établir des règles de conservation des 42 dossiers au sein des services et des règles de transmission et de conservation auprès du service des archives de l’établissement. Elles permettent aussi de communiquer sur des règles de destruction respectueuses de la confidentialité des données. La loi du 3 janvier 1979 sur les archives spécifie les délais au-delà desquels les documents d’archives peuvent être librement consultés (délais supérieurs à 100 ans). Il existe par ailleurs bon nombre de circulaires concernant le traitement d’archives selon les types de dossiers (RMI, Aide sociale à l’Enfance..). A titre d’exemple, au CHU de Nantes, en accord avec le responsable des archives, il a été convenu de se caler sur la durée de conservation des dossiers médicaux à savoir 20 ans pour les dossiers papier.27 Le service social du CHU de Brest a obtenu un accord similaire des archives départementales. 3. La place de l’usager Nous avons vu précédemment que la législation place l’usager au cœur de la prise en charge. Pour autant la relation qui s’engage entre le professionnel et l’usager révèle des postures différentes. En quoi la position d’autorité du professionnel permet-elle de mobiliser ou non le propre pouvoir de la personne accompagnée ? En quoi la personne malade ou dépendante est-elle pleinement un sujet acteur de son histoire et de son parcours ? Maladie et dépendance viennent déséquilibrer et fragiliser une situation personnelle, familiale, professionnelle. Nous montrerons, dans ce paragraphe, en quoi le dossier social rend compte des échanges qui résultent de la relation engagée. Puis nous verrons la pertinence de définir le contenu de cet espace et pourquoi la relation de confiance est une posture à rechercher pour adapter l’accompagnement à la situation singulière de l’usager. Décret du 4 mars 2006, relatif au dossier médical personnel, article 2. « Le dossier médical mentionné à l'article R. 1112-2 est conservé pendant une durée de vingt ans à compter de la date du dernier séjour de son titulaire dans l'établissement ou de la dernière consultation externe en son sein. Lorsqu'en application des dispositions qui précèdent, la durée de conservation d'un dossier s'achève avant le vingt-huitième anniversaire de son titulaire, la conservation du dossier est prorogée jusqu'à cette date. » 27 43 Recueillir des informations en interrogeant l’utilité L’usager a la possibilité de définir le contour de ce qu’il souhaite communiquer ou non au travailleur social. Dans l’échange entre le professionnel et l’usager, il s’agit de se mettre d’accord sur ce qui est utile à l’un et à l’autre. Autant d’éléments qui contribueront à l’évaluation sociale réalisée et se retrouveront dans l’écriture du dossier. Les représentants des usagers interrogés s’accordent à dire qu’il est important que soient consignés dans le dossier social des éléments relatifs à la vie familiale et professionnelle, à la situation financière, des conditions de logement, dès lors que l’hospitalisation, le problème de santé a des incidences sur ces aspects de la vie de la personne malade et/ou de son entourage. « Si le malade a des enfants, quel retentissement la maladie va avoir sur les enfants, sur le mari, sur le couple etc… Je pense que tous ces renseignements là sont importants à consigner pour que la personne qui suit le malade ait un rappel de la situation, qu’elle ne soit pas toujours obligée de demander au malade…. » (Représentante de l’association A. Aupetit). En référence à une éthique professionnelle, il est essentiel que les éléments d’information recueillis et consignés ne nuisent pas à la personne : c’est la responsabilité de l’assistant social. Le dossier social est constitué de faits et d’éléments objectivés. Ce qui relève des hypothèses de travail du professionnel n’a pas vocation à rester dans le dossier. Elles appartiennent aux notes personnelles. Écrire dans le dossier permet aussi au professionnel de garder en mémoire la situation du patient, de l’avoir à l’esprit puis de la mettre de côté temporairement pour accompagner d’autres personnes, de prendre de la distance, d’y revenir en s’appuyant sur ce qui a été écrit. L’écriture renvoie à la relation, à l’histoire de l’usager, à ce qui a été envisagé, le cas échéant aux démarches effectuées. Assurer la continuité de la prise en charge au regard du droit à l’oubli Le dossier social en établissement de santé est le lieu où sont déposés les éléments relatifs à la situation du patient, les répercussions sociales identifiées en lien avec son hospitalisation ou sa pathologie. Consigner ces informations par écrit permet la continuité dans la prise en charge, quel que soit l’assistant social qui sera amené à l’accompagner, en cas d’absence suite à un départ, des congés… ou s’il change de service au sein de l’hôpital. En cela, c’est une garantie d’efficacité. 44 Ceci évite d’avoir à demander au patient de retracer son histoire, voire de revenir sur des épisodes douloureux. Cela participe de la considération de l’usager dans sa globalité, dans le respect de sa parole déjà confiée, des difficultés précédemment évoquées, des orientations éventuellement envisagées, du cheminement engagé. Ce point de vue a été exprimé au cours des différents entretiens aussi bien par les représentants des usagers que par les assistants sociaux et les cadres de santé interrogés. « L’intérêt d’un dossier, est de ne pas avoir à décliner plusieurs fois son histoire. Cela favorise le dialogue et permet d’être reconnu en tant que personne. (…) Cela permet d’être plus efficace dans le prise en charge, puisqu’il y a continuité du secret entre professionnels ». (Représentant de l’association ILCO Stomisé) Mais dans quelle limite doit-on conserver ou se référer à un épisode ancien de la vie du patient ? Lors d’une nouvelle hospitalisation, il peut être totalement pertinent de revenir à l’accompagnement réalisé antérieurement si la problématique est identique (perte d’autonomie chez une personne âgée par exemple). A contrario cela peut être stigmatisant si les motifs d’hospitalisation sont différents. Ainsi, une personne hospitalisée à un moment donné en psychiatrie, ne souhaitera pas nécessairement que l’on y fasse référence quelques années plus tard, à l’occasion d’une hospitalisation en médecine par exemple. Elle pourra souhaiter que cette hospitalisation ne lui soit pas remise en mémoire. L’usager a ainsi le droit à l’oubli : oubli de ce qu’a été sa vie dans un autre contexte, oubli de ce qui a été douloureux, voire traumatique. Démarrer une nouvelle évaluation sociale, n’est-ce pas considérer la personne là où elle en est dans son histoire, telle qu’elle se présente maintenant ? Favoriser la continuité de la prise en charge de l’usager, tout en respectant sa vie privée, sans prendre le risque d’une stigmatisation, tel est l’équilibre pour le professionnel dans la tenue du dossier social. C’est pourquoi, il est important qu’il y ait un accord entre l’assistant social et l’usager à propos de ce qui restera en mémoire active dans le dossier. En cela, l’instauration d’une relation de confiance est essentielle. Le dossier social, trace résultant d’une relation de confiance L’accompagnement social vise à établir une relation d’écoute, de soutien, de conseil en vue de favoriser l’autonomie de la personne. Chaque situation est singulière et l’accompagnement se construit donc différemment. Ceci constitue à la fois une zone d’inconfort et de manœuvre que 45 Maëla Paul appelle «la maison vide dont seul le cadre a été défini. Seuls les acteurs concernés peuvent l’aménager, l’habiter, l’animer ». 28 Compte tenu de l’évolution de la législation, les professionnels ont été amenés à réinterroger leur pratique, y compris en ce qui concerne les actes d’écriture sur celle-ci. La relation de confiance qui s’instaure pour permettre l’expression de la parole, se prolonge-t-elle jusque dans l’élaboration de ce qui va rester la mémoire de cette rencontre ? En effet, on peut se demander jusqu’où la participation de l’usager est acceptée. Il importe de définir dès le début de la rencontre le cadre et les modalités de la retranscription des informations qui seront consignées dans le dossier. La personne hospitalisée, à défaut la personne de confiance ou son entourage si elle n’est pas en capacité d’exprimer sa volonté, peut ainsi à tout moment demander, si elle le juge opportun, que ce qui a été précédemment noté soit revu, reformulé. Les entretiens avec les représentants des usagers révèlent l’importance de cet échange avec l’assistant social sur la nature des informations qui seront consignées, sur celles qui seront transmises aux autres professionnels, sur l’utilisation du dossier lors d’une éventuelle nouvelle hospitalisation. Parallèlement, les personnes interviewées déclarent faire confiance aux assistants sociaux sur l’évaluation de la pertinence dans les transmissions d’information. Avec l’introduction du dossier informatisé, l’utilisation de l’écran peut servir d’intermédiaire. Le dossier peut être renseigné en direct. Si l’usager le souhaite, l’écran peut être tourné vers lui ou en tout cas servir de support, pour le professionnel, à une relecture des éléments consignés afin de poursuivre l’échange et l’accompagnement social engagé. Le dossier social garde ainsi la trace de la relation de confiance établie. Le secret professionnel garantit la confidentialité des informations recueillies. Un espace d’ajustement Nous l’avons souligné, l’accompagnement social en établissement de santé s’inscrit dans des problématiques liées aux pathologies, à la dépendance et à leurs conséquences sociales. En accord avec la personne malade et dans son intérêt, l’assistant social est amené à partager des informations utiles avec les soignants et les médecins. 28 Maëla PAUL, L’accompagnement…comme changement de paradigme, La revue française de travail social, n° 223-224, décembre 2006-2007, p.14. 46 L’assistant social se réfère à une double culture : sanitaire et sociale. Si le dossier de l’usager est actuellement segmenté, les pratiques s’orientent aujourd’hui vers un essai de réunification du dossier, avec des volets spécifiques et des accès définis. S’il est important que l’assistant social continue à écrire dans le dossier patient dans un espace dédié, il est aussi essentiel de conserver un dossier social distinct. Les informations sociales, contenues dans chacun des espaces, sont définies avec la personne hospitalisée. Les entretiens réalisés auprès des représentants des usagers témoignent globalement de la confiance envers les professions sur la pertinence et les modalités dans les transmissions d’information, même s’ils redisent l’importance pour eux d’être informés de ces communications, voire concertés. Certains patients pourront s’engager activement dans une relation de coopération et de co-construction dans la relation d’aide, tandis que d’autres, plus fragiles, pourront se sentir déstabilisés et attendront une prise en charge plus soutenante. On est donc bien là dans un espace d’ajustement et de formalisation à propos des éléments relatifs au suivi engagé, en fonction de ce qui a été convenu entre l’usager et le professionnel, au regard de situations singulières. Le dossier social par nature s’inscrit dans des relations interpersonnelles avec l’usager et son entourage, avec les équipes soignantes et également avec les assistants sociaux de l’établissement ou de structures partenaires, ceci dans un cadre institutionnel particulier, l’hôpital. Dans ce jeu des acteurs, des tensions peuvent apparaître, aussi la référence aux orientations du service social permet-elle aux assistants sociaux de garder le cap sur les finalités du métier. La référence à l’éthique professionnelle y contribue. C’est ce que nous proposons de développer maintenant. 4. Dimension éthique Une éthique professionnelle à affirmer et à confronter Inscrit dans un travail en équipe pluridisciplinaire, le service social hospitalier est sans cesse en interaction avec d’autres références métier. Le travail social gagne à « confronter, élaborer 47 et faire partager son éthique professionnelle. » 29 Dans un contexte social en mutation, la recherche commune d’une actualisation des valeurs professionnelles permet de les discuter collectivement et de les confronter avec les autres acteurs. La réflexion éthique du travail social a évolué au fil du temps, à la fois en lien avec les apports nouveaux en sciences humaines et sociales et les questions soulevées par les évolutions de la société. Les positionnements ont pu être tantôt dans la continuité, tantôt dans la rupture, en fonction des influences externes et des ajustements internes. Les valeurs du travail social sont liées aux valeurs de la société. Elles s’inscrivent particulièrement dans des valeurs humanistes, démocratiques et républicaines fondées sur le respect et la dignité de la personne humaine. Le travail social s’appuie sur la confiance en l’homme et sur ses capacités à changer. Il valorise la « justice sociale » par un engagement professionnel pour contribuer à accroître le bien-être et l’accès aux droits des individus et des groupes défavorisés. Cela passe par l’accompagnement des personnes et l’interpellation des pouvoirs publics sur les problématiques rencontrées. Le travail social est avant tout un travail relationnel qui se fonde sur la reconnaissance des sujets en action. Il veille à favoriser l’autonomie des personnes, les conditions de leur autodétermination et le respect de leur place dans la société. Certaines personnes sont plus éloignées des « droits sociaux » et plus que d’autres nécessitent un accompagnement social. La relation d’aide est soumise au principe d’incertitude. Elle doit sans cesse être questionnée sous l’angle de la non-nocivité, de la bienveillance, de l’empathie, de la réciprocité et du respect envers l’usager. Comme le soulève Brigitte BOUQUET30, le risque d’une éthique professionnelle serait le repli corporatiste du travail social passant par la définition de normes, de bonnes pratiques au risque du désengagement. Or l’éthique professionnelle doit renvoyer avant tout au dialogue permanent, souvent difficile, car il confronte des tensions. Elle permet l’affirmation de valeurs dans l’exercice de missions spécifiques auprès d’usagers et d’acteurs sociaux. Comme toute éthique, elle a une fonction critique et évolutive. A ce titre, elle peut être force de proposition dans les débats de sociétés. 29 BrgitteBOUQUET, Ethique et travail social, Dunod, Paris, 2004, p. 22. 30 Ibid, BrigitteBOUQUET, Ethique et travail social, Dunod, Paris, 2004 48 Comme le précise les rapporteurs du CSTS dans Ethique des pratiques sociales et déontologie des travailleurs sociaux31, l’éthique est un questionnement sur la pratique et s’éprouve dans l’acte. Il s’agit de mettre les valeurs en pratique. L’éthique propose des éléments pour faciliter un choix responsable et éclairé. Elle interroge sur le sens et les finalités. Elle s’applique à des situations concrètes, complexes du fait de leur singularité. Des choix éthiques se posent constamment aux travailleurs sociaux. Certains se résolvent sans délibération formelle. D’autres nécessitent une réflexion plus posée, une argumentation plus élaborée. C’est le cas lorsqu’il y a tension entre le discours et la pratique, quand apparaissent des conflits de valeurs. Le travail est parfois confronté à des logiques différentes : des logiques thérapeutiques, des logiques administratives et gestionnaires, des logiques politiques ou stratégiques…Ceci génère des conflits d’intérêts d’acteurs. Le service social hospitalier à l’épreuve de l’économie Ainsi dans un contexte où l’information est omniprésente, des tensions éthiques sont soulevées : il s’agit, comme nous l’avons vu, de trouver la bonne posture entre la préservation du secret et la transmission d’information, entre le recueil d’informations utiles pour les professionnels et le respect de la vie privée de l’usager, entre la traçabilité des éléments dans un dossier et le droit à l’oubli…La question éthique pour le service social hospitalier est de pouvoir situer ce point d’équilibre. Les tensions sont inhérentes au fait que le service social se trouve en situation d’interface : interface avec l’usager, interface avec l’équipe médicale et soignante. Il s’inscrit dans une culture sociale au sein d’un environnement sanitaire dans un contexte de nouvelle gouvernance et de tarification à l’activité. Ce nouveau cadre économique vient infléchir par exemple la recherche de diminution des durées de séjour, au risque de modifier la prise en compte des conditions de sortie d’hospitalisation. Les équipes soignantes et médicales, tout en gardant le souci de la qualité des soins et de la prise en charge des personnes malades, sont particulièrement soumises à cette pression. 31 Ethique des pratiques sociales et déontologie des travailleurs sociaux, Rapport CSTS, Rennes, 2001, p. 26. 49 Dans ce contexte, le service social doit se positionner en référence à ses missions d’aide et d’accompagnement des personnes, particulièrement des personnes les plus en difficultés, tout en tenant compte des contraintes institutionnelles. Il se trouve parfois pris dans des conflits d’obligation. De la même façon, les assistants sociaux doivent rester vigilants en ce qui concerne la transmission d’informations utiles à la prise en charge du patient dans son parcours de soins. Les politiques sociales de plus en plus transversales et le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication contribuent à solliciter les professionnels dans le sens du partage d’information. Or, il y a lieu de resituer le partage d’information dans sa dimension éthique et de se rappeler que l’usager doit rester au cœur des préoccupations des professionnels. Le respect de la vie privée est primordial et la transmission d’information doit être guidée par l’intérêt de la personne. A partir de la définition de valeurs fondamentales, les professionnels peuvent construire un cadre de référence structurant. La déontologie professionnelle comme référence L’arbitrage des positionnements professionnels se dessine à partir d’une réflexion sur l’intérêt supérieur visé, le droit fondamental à privilégier. L’évaluation des conséquences prévisibles des différentes alternatives favorise la prise de décision. La référence aux valeurs professionnelles y contribue pleinement. Celles-ci peuvent être formalisées par une déontologie. « A la différence de l’éthique qui met en valeur une vision de l’agir bien, la déontologie donne conscience des limites et des normes. Elle appartient à la règle instituée. C’est la science des devoirs professionnels qui inscrit la personne dans un collectif de référence. Elle encadre l’action qui doit se dérouler en conformité aux valeurs admises par un corps professionnel et aux usages professionnels en vigueur dans un contexte social. » 32 La déontologie ne peut pas répondre à toutes les situations. Elle énonce des principes qui sont des repères pour les professionnels. Pour autant, la référence à la déontologie n’exonère pas du débat éthique, c'est-à-dire de la confrontation avec d’autres, de la mise en questions de la réalité, quelle soit complexe ou évidente. 32 Ethique des pratiques sociales et déontologie des travailleurs sociaux, Rapport du CSTS, Rennes, 2001, p.28. 50 Ainsi l’ANAS 33 a rédigé un code de déontologie en 1949, revu en 1981 et 1994. S’il n’a pas de valeur juridique, il a une valeur d’usage effective parmi les professionnels. L’objet principal de sa dernière révision a été de rappeler que « la relation de confiance est indispensable à toute relation en travail social et que l’assistant social est reconnu par la loi comme un confident nécessaire ». Dans sa pratique, l’assistant social entend des informations relatives à la vie privée des personnes. Ces informations lui permettent de répondre au mieux aux difficultés rencontrées. Il importe que cette parole donnée soit tenue. La relation de confiance est indispensable à la relation entre le professionnel et l’usager. Elle s’appuie sur le respect de la confidentialité des échanges. « La relation de confiance est une des conditions permettant d’aborder les questions importantes et de travailler sur les sens de la demande. Cette relation ne se décrète pas, elle se construit dans un contexte et à travers des actes posés et du temps. Elle ne peut s’établir que si la personne qui révèle des faits à caractère personnel (voire intime) à l’assurance que ces informations ne sont pas traitées ailleurs. C’est au travailleur social qu’il incombe la responsabilité de ne pas rédiger ces informations dans les dossiers, qu’ils soient « papier » ou « informatisés ». 34 La confiance est nécessaire dans le dépôt du secret, permettant ainsi l’exploration de l’histoire individuelle. Dans la notion de confiance, il y a l’idée d’un retour attendu de reconnaissance, de démarches pour lequel l’usager fait appel. Ainsi, l’assistant social est pris dans un double impératif : veiller au secret professionnel au cours de l’exploration de l’histoire individuelle de l’usager en évitant que celle-ci ne devienne publique et partager avec d’autres professionnels les informations utiles à la prise en charge. Le secret professionnel comme fondement de l’éthique professionnelle des assistants sociaux 33 ANAS : Association nationale des assistants sociaux créée en 1944. 34 CSTS, Nouvelles technologies de l’information et de la communication et travail social, ENSP, Rennes 2001, P.60. 51 Le secret professionnel introduit dans le Code pénal en 1810, s’inscrit dans les origines de la profession d’assistant de service social. Il est repris dans le Code de l’Action sociale et des familles (article L.411-3)35 et dans le Code de déontologie de l’ANAS dès 1947. Il est le fondement de l’éthique professionnelle des assistants sociaux. Le code de la santé publique (article L.1110-4 al.1 et 2) précise que « toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations le concernant », excepté dans les cas de dérogation prévus par la loi. Ce secret s’impose à tout professionnel de santé, ainsi qu’à tous les professionnels intervenant dans le système de soins. Si la notion de secret professionnel est une obligation, elle conserve une marge d’appréciation. Cette tension est liée aux différents intérêts à protéger : celui de la personne et celui de la société. L’éthique professionnelle s’attache à reconnaître la personne comme unique et singulière. Pour autant l’éthique professionnelle s’intéresse aussi à la société. Dans le cadre de l’action sociale, l’intérêt public prime en cas de violation des règles et des lois établies par la société. C’est le cas notamment dans les situations de maltraitance à enfants. La levée du secret est alors autorisée, de même lors de révélation de carence ou sévices. Dans les faits, cette décision n’est pas toujours aussi simple à arrêter. Selon l’évaluation professionnelle et la mesure des intérêts en présence, il peut y avoir possibilité de dévoiler ou non. La protection de la personne doit être dans tous les cas recherchée. « Comme le travailleur social vit ainsi dans une dialectique entre responsabilité/liberté (autonomie), responsabilité/devoir (cadre institutionnel et légal) et responsabilité professionnelle citoyenne, l’éthique de discussion, dans un dialogue ouvert, permet que l’éthique professionnelle se construise pas à pas, par l’argumentation, en partant de situations concrètes. »36 35 Les assistantes, assistants ou auxiliaires de service social et les élèves des écoles se préparant à l’exercice de cette profession sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les réserves énoncées à l’article 226-13 du Code pénal 36 B.BOUQUET, Ethique et responsabilité, in La revue française de service social, ANAS, Paris, mars 2006, p.8. 52 Le nouveau code pénal introduit en 1994 (article 226-13) permet le partage du secret sans pour autant reconnaître à proprement parler le secret partagé. Le secret professionnel est protégé et les assistants sociaux ne peuvent plus être poursuivis pénalement pour non dénonciation. Il reste, qu’en tant que citoyens, ils peuvent être poursuivis pour non-assistance à personne en danger. (Article 223-6 du Code Pénal). Au-delà des situations mentionnées ci-dessus, l’assistant social est sollicité pour partager des informations sur les personnes accompagnées. Le développement des dispositifs d’action sociale transversaux et du travail en partenariat sont autant de contextes mettant le professionnel face à cette question. La délibération décisionnelle se réfère à une éthique professionnelle et à la question du sens. Il s’agit avant tout de s’interroger sur sa pratique et non pas d’appliquer des réponses « préfabriquées ». Cette démarche vise l’engagement et non pas le repli « sécurité » dans un contexte de rationalité institutionnelle et financière et de « judiciarisation » des affaires. Le respect de l’autonomie du sujet et la volonté de ne pas nuire doivent primer dans ce choix. Le cadre institutionnel dans lequel exerce le travailleur social conditionne également ses positionnements et définit le contour de son intervention. Comme nous l’avons déjà mentionné, en établissement de santé de service public, la mission de l’assistant social se réfère au décret n° 93-652 du 26 mars 1993. Le secret partagé dans la limite de ce qui est utile A l’hôpital les assistants sociaux sont souvent interpellés sur la notion de secret partagé qui se justifierait par le fait que tous les salariés de l’établissement sont soumis au secret professionnel et par la nécessité de connaître le patient dans toutes ses dimensions pour mieux le soigner et prendre en compte ses conditions de sortie. Le Code de santé publique (article L.110-4 alinéa 3) stipule : « Deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent toutefois, sauf opposition de la personne dûment avertie, échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible. Lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins dans un établissement de santé, les informations la concernant sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe. » Or, cette interprétation de la loi ne prend pas en considération la particularité de la profession d’assistant social et ne garantit pas le respect de la confidence. Cette exigence des 53 assistants sociaux est parfois perçue comme un attachement à un privilège ou une culture professionnelle quelque peu caduque. C’est dans une démarche éthique sur les questions du partage d’information, de la constitution du dossier et du dossier informatique que le service social hospitalier peut construire son positionnement sur cette problématique et élaborer un dossier social informatisé. Les références à l’éthique de conviction (référence à des valeurs), l’éthique de responsabilité (les actes posés ou non posés engagent et ont des conséquences), l’éthique de discussion (rien n’est figé, chaque situation est singulière et les questions doivent se reposer à chaque fois : quelles sont les informations utiles à partager ? Pourquoi ? Avec qui ? Dans quelles conditions ? Nous nous sommes arrêtée jusqu’alors essentiellement sur la question du partage d’information et nous avons vu l’impact de la relation professionnelle-usager. A ce stade du travail, il nous paraît important de resituer sur un plan historique l’introduction des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans le champ du secteur social. 5. L’informatisation du dossier social Au début des années 70, le champ du social a été confronté à l’introduction des nouvelles techniques de l’information et de la communication. Des grandes administrations d’Etat ont commencé à introduire l’informatisation et constitué de gros fichiers nominatifs. Ces projets ont suscité de vives réactions fondées sur la crainte du fichage, de la stigmatisation et du renforcement du contrôle social. Créés à des fins de gestion et d’élaboration de statistiques, c’est tout d’abord le Ministère de la Santé publique qui en 1969 décide de la mise en œuvre du Projet d’Automatisation des Directions départementales de l’action sanitaire et sociale (AUDASS) pour répondre aux besoins liés à l’accroissement du nombre de bénéficiaires de l’aide sociale puis son application AUDASS-Enfance, susceptible d’orienter la politique de protection de l’Enfance. Quelques années plus tard, en application de la loi sur la Protection maternelle et infantile, le Ministère de la santé engage en 1972 un projet de traitement automatisé des informations dénommé GAMIN (Gestion Automatisée de Médecine Infantile), instituant une surveillance systématique, médicale et sociale, des jeunes enfants. Ce programme suscite des réactions de protestations très fortes de la part des professionnels, générant crainte et résistance. 54 L’opinion publique se mobilise contre le projet de création d’un Système Automatisé pour les Fichiers Administratifs et le répertoire des Individus (SAFARI) visant la connexion de tous les fichiers administratifs par un numéro national d’identification unique. C’est dans ce contexte que le gouvernement décide la création de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en 1974. Un rapport est rédigé et la loi relative à l’informatique aux fichiers et aux libertés adoptée le 6 janvier 1978. Le projet GAMIN sera finalement retiré en 1981 après avoir été récusé par la CNIL. L’introduction de l’informatisation s’est progressivement opérée dans le champ de l’action sociale comme dans les autres secteurs professionnels. Le développement des compétences informatiques a favorisé le sociaux. Il facilite la gestion partage des tâches entre secrétaires et travailleurs des agendas, contribue à l’organisation dans le travail. L’informatique est aussi un outil de communication qui modifie les pratiques. Il permet un accès rapide à l’information (actualisation de la législation, connaissance des dispositifs …). Cependant, l’introduction de l’informatique en travail social a réactivé l’interrogation des professionnels sur la protection des données ainsi que sur le partage de l’information. Les réactions portent notamment sur les risques liés au fichage des usagers, du fait de la mise en réseau des ordinateurs. La CNIL rappelle l’importance de la protection des personnes à l’égard des traitements de données les concernant et notamment la préservation de leur vie privée. « La mise en place de logiciels spécifiques permet-elle toujours d’assurer cette garantie de confidentialité, notamment s’il y a risque que les pratiques des professionnels soient dévoyées ? La connaissance de la situation de l’usager devient partagée dans un dossier unique sans pour autant que l’usager soit systématiquement informé du cheminement de l’information, des professionnels qui la partagent et la traitent. » 37 Le code de déontologie de l’ANAS a intégré cette dimension dans ces articles 5 et 6 : Art. 5 - L'Assistant de Service Social doit toujours veiller à la protection du dossier de l'usager et avoir conscience que ce dossier est communicable à la personne concernée. La constitution des dossiers doit tenir compte des dispositions légales sur l'accès aux documents administratifs. 37 Ibid., cité CSTS, p.60 55 Art. 6 - L'introduction et le développement des technologies modernes de recueil et de traitement des informations, imposent à l'Assistant de Service Social de se préoccuper, dès la phase de conception d'un projet, des règles de conservation et de recoupements, au regard du respect de la vie privée des individus et des familles. Pour les travailleurs sociaux, l’information parait « hors contexte » lorsqu’elle est traitée par items. De plus, il y a risque de stigmatisation car la typologie fige alors que la situation est évolutive. Il importe d’être vigilant à cette dimension afin de ne pas travailler sur des idées fausses car insuffisamment actualisées. Le choix des items dans la construction de la trame du dossier social informatisé et des grilles statistiques qui y sont rattachées mérite une attention particulière. Les règles d’utilisation et d’accès aux dossiers informatisés doivent également être réfléchies. L’accès aux données doit être sécurisé et défini par niveaux d’information, par catégorie de professionnels… L’information du dossier social permet également une activité « statistique » rendant compte de façon anonyme des actes professionnels, des caractéristiques des populations aidées, de leurs demandes. Celle-ci permet aussi à l’encadrement d’apprécier l’activité et d’apporter des éléments d’analyse auprès des directions, des décideurs. Nous reviendrons sur cet aspect qui contribue à la mission d’expertise des travailleurs sociaux dans le champ de l’action sociale. Littérature existant sur Informatique et travail social La question de l’informatique et du travail social apparaît dans la littérature professionnelle à la fin des années 70. Ainsi en 1977, deux revues d’action sociale consacrent un numéro spécial sur ce sujet : la CNAF dans Informations sociales avec un article écrit par le sociologue V. De GAULEJAC38 et l’ANAS (association nationale des assistants sociaux) dans la Revue française de service social 39 suite à un congrès organisé sur ce thème. Puis cinq années plus tard, en 1982, la revue Autrement publie un numéro sur le thème de l’informatique tandis que la revue Esprit interroge le système GAMIN et les perspectives de 38 Vincent de GAULEJAC, L’ordinateur du travail social, in Informations sociales, n° 3-4, 1977. 39 ANAS, Travail social, Informatique, liberté, Actes du congrès de Lille, Paris, ESF, 1977. 56 fichage. Informations sociales, réalise en 1983 un nouveau dossier sur la question « Vivre avec les nouvelles technologies ». A partir de 1985/87 paraissent une série de textes interrogeant l’introduction de l’informatique dans le champ de l’action sociale et médico-sociale à l’occasion de la mise en place de cet outil dans les services et /ou suite à des colloques en France, en Belgique. L’ANAS et la CNAF reviennent sur cette question. On peut lire des articles dans un vaste panel de la presse professionnelle : ASH, Action sociale, Informations sociales, Revue française de travail social, TSA, Sauvegarde de l’Enfance, Union sociale, Service social dans le monde, … Les annales du centre de recherches sociales de Genève publient également sur le sujet, successivement en 1985 et 1986. La presse professionnelle allemande s’intéresse également à la question avec notamment un article paru en 1988. Trois mémoires de fin d’études supérieures en travail social (DSTS) traitent de cette problématique. Certains de ces travaux feront ensuite l’objet de publications (Françoise DURIBREUX). Depuis les années 90, la presse professionnelle n’a cessé de faire paraître des articles sur cette problématique. Les étudiants en formation initiale ou supérieure de travail social se sont interrogés sur ce sujet dans le cadre de leur mémoire de fin d’étude (DEAS40, DSTS41…). Des comités d’éthique ont été créés dans les départements lors de la mise en place de logiciels par des Conseils Généraux en 1996 (ANIS42). A la même période les CRAM ont introduit leur progiciel (ANAISS43). Des cadres du service social CRAM ont notamment examiné cette question au regard de la pratique au sein de leur propre institution. L’ANAS a été largement consultée par les professionnels sur des questions déontologiques afférentes à ce nouvel outil. L’association a organisé à deux reprises des journées d’étude traitant de cette problématique. Ces temps de travail et de réflexion ont donné lieu à des publications dans la revue française de service social. La CNAF a produit des dossiers sur ce thème. Plus largement, la presse professionnelle s’est fait l’écho de ces débats. 40 DEAS : Diplôme d’Etat d’assistant de service social. 41 DSTS : Diplôme supérieur en travail social. 42 ANIS : Approche nouvelle de l’information sociale. 43 ANAISS : Application nationale informatique des services sociaux 57 En 1997, le CSTS a donné mandat à un groupe de travail pour réfléchir sur les conséquences de l’introduction des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Un rapport a été rédigé et publié en 2001 : Nouvelles technologies de l’information et de la communication et travail social et la même année un rapport Ethique des pratiques sociales et déontologie des travailleurs sociaux. Brigitte BOUQUET participe à ces rapports et publie articles et ouvrages sur ces problématiques. La dimension éthique est également confrontée aux questions juridiques. Ainsi avocats, directeurs des systèmes d’information, attaché de direction juridique à la CNIL…contribuent par leurs articles à la réflexion des professionnels de l’action sociale. La question du dossier social renvoie à celle du dossier médical. Le point de vue des médecins vient alimenter la réflexion et permet aux assistants sociaux d’affirmer leur positionnement au regard du secret professionnel, particulièrement en secteur hospitalier. Une association, La ligue des droits de l’Homme, et deux collectifs se sont créés, en 1999, dans le but de poser publiquement la question du droit fondamental à la vie privée, que ce soit dans le cadre de l’informatisation de l’action sociale ou dans celui plus large lié à la gestion des fichiers de toutes sortes. L’introduction de l’informatique dans le champ de l’action sociale renvoie les professionnels à des questions éthiques et déontologiques et interroge sur l’évolution des métiers du social. Le partage d’information, la constitution du dossier et l’accessibilité du dossier aux usagers sont au cœur des réflexions. On retrouve ces questions dans la presse des sciences sociales aux Etats-Unis, au Canada, en Angleterre, Allemagne, Norvège. Le mandat donné au CSTS en 2001 a double vocation : rendre intelligible les nouvelles technologies de l’information et contribuer à la vigilance sociale. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication représentent pour le travail social à la fois un risque et une chance. Le risque est du côté de la menace de rupture de confidentialité et par la même de la relation de confiance entre l’usager et le professionnel. La chance est du côté de l’opportunité d’une plus grande autonomie, d’une structuration nouvelle du champ professionnel en termes de formations, d’échange, de communications. « Les travailleurs sociaux ont à s’intéresser aux systèmes d’information qui se mettent et se mettront de plus en plus en place. En effet les systèmes d’informations devront tout à la fois permettre 58 l’observation territoriale, produire des données d’évaluation, assister les actes professionnels, activer les systèmes de prestations, partager les informations de façon concertée. »44 La mise en réseau des ordinateurs élargit les possibilités de partage d’information au sein d’une équipe, d’un service, d’une institution. Les processus de communication sont modifiés et par la même les pratiques et la place de l’usager sont réinterrogées. La mise en place de groupes de réflexion permet ainsi aux professionnels d’un service d’en mesurer les intérêts et les limites. Les instances de contrôle et de veille contribuent à garantir le respect des principes définis au sein de l’institution. Nous avions vu que le dossier social, au-delà de sa dimension d’outil, parle de l’exercice du métier d’assistant social en secteur hospitalier, des relations avec l’usager et les équipes soignantes, de la confrontation avec les attentes et les représentations des uns et des autres. Au regard de ces différents apports, nous allons maintenant les illustrer à partir d’exemples de mise en œuvre. 6. Des exemples de mise en œuvre La mise en place de l’informatisation au sein des services sociaux et en particulier des services sociaux hospitaliers s’est réalisée de façon très variable selon les établissements et souvent sous l’impulsion du cadre socio-éducatif du service. Nous proposons de nous arrêter ici sur l’expérience du service social du CHU de Brest qui a mis en place l’informatisation du dossier social en 1994. Des entretiens ont été réalisés avec plusieurs membres de l’équipe. Nous complèterons cette illustration par une référence plus succincte au service social des Hospices civils de Lyon qui a récemment introduit le dossier social informatisé, en nous appuyant sur l’entretien téléphonique effectué avec l’un des cadres du service. Nous ne nous appuierons pas sur l’expérience nantaise. En effet, au CHU de Nantes, il a été fait le choix de penser le dossier social informatisé au moment où serait travaillé le dossier patient unique informatisé. Le CHU travaille depuis plusieurs années à la mise en place sur 44 CSTS, Nouvelles technologies de l’information et de la communication et travail social, ENSP, Rennes 2001, P.20 59 l’ensemble du CHU d’un dossier patient unique qui devrait pouvoir être ensuite transposé sur un plan informatique. Brest : une pratique confirmée d’informatisation L’introduction du dossier social informatisé au CHU de Brest a fait l’objet d’une démarche concertée au sein du service, en lien avec les services informatiques de l’établissement et une société extérieure. Le projet du dossier social informatisé a été initié en 1994 par le cadre socio-éducatif peu après sa prise de fonction. Le service social venait d’être unifié : jusqu’alors, il y avait un service social en psychiatrie et un service social à l’hôpital général. Il était constaté qu’il y avait parfois des doublons pour certains dossiers, notamment pour des patients hospitalisés dans les deux secteurs, générant perte de temps, d’énergie, d’information. L’informatisation du dossier s’est inscrite dans une démarche projet. Une réflexion a été engagée avec l’objectif « d’améliorer la façon de travailler ». La démarche correspondait également à un intérêt particulier du cadre socio-éducatif pour l’outil informatique et à un souhait de créer un dossier utilisable en réseau. Le projet trouve alors le soutien des services informatiques, favorables à cette expérience novatrice de mise en place d’un dossier informatisé au profit d’un service de petite taille, au sein de l’établissement. Le cadre précédent avait déjà posé quelques bases avec le recueil de données statistiques. Des groupes de travail ont été mis en place, impliquant assistants sociaux et secrétaires du service social, afin d’identifier les besoins et les attentes. Les éléments administratifs étaient nécessaires à tous. Mais selon les secteurs d’hospitalisation, des divergences apparaissaient : pour les professionnels de l’hôpital général, il importait d’identifier la demande envers le service social, l’évaluation sociale et les éléments mis en place; pour les professionnels de la psychiatrie, l’accent devait être mis sur les éléments concrets de l’histoire de vie du patient. La réflexion a également porté sur les questions éthiques relatives à l’écriture et l’accès au dossier. Un cahier des charges a été transmis à une société informatique. Après deux années de travail, une première expérimentation a été lancée sur un site de soins aigus. Au préalable une charte d’utilisation a été définie. Aujourd’hui, elle est soumise à tous les professionnels et stagiaires intégrant le service social. L’accord de la CNIL a été obtenu en mars 1997. Depuis lors, 60 des groupes de travail ont continué à se réunir pour affiner l’outil. Le dossier social informatisé a été généralisé à l’ensemble du service social du CHU de Brest en 1998. Depuis, aucune évolution de l’outil n’a pu être réalisée : la société informatique qui avait accompagné le projet a fait faillite. Le CHU n’a pas souhaité s’engager dans un nouveau contrat avec une autre entreprise car il commençait à envisager l’informatisation du dossier patient unique. En 2006, le service des urgences a reçu un budget dédié à la mise en place du dossier patient informatisé. Le service social a été impliqué dans l’élaboration de cet outil. Un espace service social a été créé, séparé en trois zones : une zone d’informations partagées (entre les équipes médico-sociales), une zone confidentielle (réservée à l’assistante sociale des urgences) et une zone pour les informations données par des tiers ou relatives aux tiers. Le CHU de Brest a engagé un travail de réflexion en vue de la mise en place du dossier patient unique. Ce projet a été amorcé il y a quelques années puis abandonné suite à la faillite de la société informatique en charge du dossier. Aujourd’hui un cadre de santé (à temps plein) et un médecin (à mi-temps) sont détachés pour coordonner ce travail pluridisciplinaire. Lyon : une expérience récente De la même façon, le projet du dossier social informatisé du service social des Hôpitaux civils de Lyon a fait l’objet d’une réflexion au sein du service. En 1998, le service social inscrit dans son projet de service l’amélioration du recueil statistique de son activité. L’outil est alors construit sur une base ACCESS. Au fil des années, l’idée d’aller vers la construction d’un dossier social informatisé fait son chemin. Le projet reçoit l’aval de la direction des services informatiques qui détache une informaticienne pendant 6 mois pour accompagner ce travail d’élaboration. Des sous-groupes de travail sont constitués, composés de secrétaires du service social et d’assistants sociaux. Un groupe permanent service social/service informatique supervise la démarche, tandis que le groupe « Ethique et déontologie » se consacre pendant un an aux questions relatives au partage d’information et aux droits d’accès. Testé sur site fictif durant l’été 2006, puis sur site pilote en novembre 2006, le dossier social informatisé est effectivement mis en place à Lyon en janvier 2007 et à Grenoble en janvier 61 2008. Une hotline assurée par un cadre et une assistante sociale est mise en place pendant un mois afin de répondre aux différentes questions des professionnels au moment du démarrage de l’outil. Un comité de pilotage a été constitué, composé d’un directeur d’établissement, d’un directeur de groupement d’établissement, d’un représentant de la commission des soins de suite, d’un médecin, d’un représentant de la commission des soins infirmiers et d’un cadre socioéducatif. Le dossier social informatisé est pensé comme la page sociale du dossier patient unique à venir. Dans l’immédiat, il n’existe pas de dossier de soins informatisé au sein des Hôpitaux Civils de Lyon, mais une multitude de dossiers de soins papier. 6.1 La structure du dossier social informatisé A Brest, le dossier social informatisé est structuré par quatre rubriques. Un logiciel de traitement de texte y est associé. Des règles d’utilisation ont été définies au départ mais il apparait au cours des entretiens avec les assistantes sociales, quelle que soit leur ancienneté dans le service et leur participation à l’élaboration du dossier social informatisé, qu’au fil du temps, des accommodations individuelles et des adaptations collectives se sont dessinées. Les éléments administratifs sont rapatriés du logiciel du bureau des entrées. Mais certaines assistantes sociales préfèrent s’en tenir à la seule consultation sans intégrer les informations dans leur dossier :« Je vais sur un autre logiciel qui est mis à jour par le bureau des entrées, cela va aussi vite que de rapatrier les infos, je ne me casse pas la tête, j’utilise en fait ce qui m’intéresse et ce qui est productif. » (Assistante sociale en psychiatrie et gériatrie, depuis 4 ans dans le service, Brest) Il existe : Une rubrique dénommée Intervention qui permet d’identifier si la personne est vue dans le cadre d’une hospitalisation ou d’une consultation externe, de préciser la date de la première intervention sociale, l’identité de la personne et le numéro du dossier social. Une rubrique Statistique, qui fera l’objet d’un développement particulier à la suite de ce paragraphe. Une rubrique intitulée Libellé a été conçue de façon à proposer un espace dédié à une écriture linéaire, envisagée comme une partie notes personnelles de l’assistant social. Ces notes peuvent être détruites par le professionnel qui les a rédigées. De fait, il est constaté 62 que cet espace n’est quasiment pas utilisé, car il génère une double écriture. Tous les professionnels du service s’accordent à dire qu’ils renseignent quasi exclusivement la rubrique Synthèse. Une rubrique Synthèse permet de consigner les démarches entreprises. Sont ici recensés les problèmes principaux identifiés, les faits objectifs liés à l’action sociale, les informations globalisant les entretiens sur l’organisation de la sortie de l’hôpital, les orientations éventuelles vers une autre structure, les coordonnées des collègues sollicités. « L’idée c’était d’avoir une continuité … La synthèse devrait normalement servir à synthétiser vraiment le travail fait, et le libellé à développer les choses. Mais moi, je n’ai pas envie de faire deux rubriques, je me contente d’écrire dans la synthèse. » (Assistante sociale depuis 4 ans dans le service, Brest) Cette rubrique synthèse fait généralement l’objet d’une relecture et au besoin de corrections avant d’être validée. Ce document devient alors définitif. Le signataire apparaît automatiquement. Il engage ainsi sa responsabilité. De fait, cette partie est utilisée quasi exclusivement et apparaît comme le cœur du dossier social informatisé de ce service. Pour autant, l’intégralité de cette rubrique n’est pas systématiquement complétée. Là aussi, il existe une certaine marge de manœuvre : « Il y a beaucoup de rubriques que je n’utilise pas. Il doit y avoir une différence entre les assistantes sociales qui ont appris depuis le début, qui ont eu l’information au démarrage et moi qui suis arrivée en cours de route.» (Assistante sociale depuis 4 ans dans le service, Brest) « Je ne renseigne plus certains critères qui apparaissent dans la partie statistique ». (Jeune professionnelle, dans le service depuis 6 mois). « Avant de clôturer notre synthèse, on relit. Mais, une fois que c’est clôturé on ne peut plus rien enlever ». « Toutes les notes que l’on avait dans le dossier papier, on ne peut pas, on ne peut pas avoir cette logique là avec l’informatique. Alors qu’il y avait un espace dédié à ça. L’espace dédié il y est, mais d’abord c’est pas pratique. » « Concrètement (…) on écrit directement dans la synthèse, sinon ça fait « double écriture.” (Assistante sociale dans le service depuis plus de 20 ans, Brest.) « C’est une question de temps. » est un argument qui revient souvent pour justifier du choix sélectif des rubriques et des critères renseignés. 63 Au départ l’outil a été conçu avec une recherche d’exhaustivité. Une secrétaire a passé beaucoup de temps à créer des bibliothèques, banque de données recensant des répertoires de prestations, d’organismes pour alimenter des menus déroulants. De fait, celles-ci ne sont pas utilisées, car les renseigner demande trop de temps comparativement à l’intérêt produit. A Lyon, le dossier informatisé est constitué de deux parties : Deux formulaires hors dossier intitulés « Patient » (administratif : identité, droits sociaux) et « Contexte de vie » (aides à domicile, lieux de vie), accessibles en lecture et écriture, excepté le montant des ressources, à l’équipe médico-soignante. Un formulaire dans le dossier composé de neuf rubriques relatives à l’accompagnement social pendant l’hospitalisation. Certaines ne sont accessibles en lecture et écriture qu’au service social. D’autres, relatives à la sortie du patient sont accessibles en lecture et écriture à l’équipe médico-soignante. Le suivi de la situation incluant les informations aux tiers est accessible en lecture, à l’ensemble du service social. Les notes personnelles ne sont accessibles qu’à l’auteur des notes. Un traitement de texte est associé au logiciel ainsi qu’une fonction agenda (répertoire de recherche des dossiers sociaux en file active). Un logiciel est associé pour la fonction statistique. Le dossier social informatisé est nommé par le cadre du service comme un « vrai outil de communication entre assistantes sociales », notamment en cas de remplacement (congé..) et du fait de la décentralisation des secrétariats : les dossiers sont accessibles indépendamment de la localisation des professionnels. 6.2 Les pratiques d’écriture dans le dossier social informatisé : contraintes et marges de manœuvre A Brest comme à Lyon, la question de l’écriture dans le dossier social a suscité des débats entre les professionnels du service au moment de l’informatisation: 64 « Le dossier informatique repose les questions de l’écriture. Cela a fait débat au moment de la conception de l’outil : obligation d’écrire. Qu’est ce qu’on écrit ? Qu’est-ce qu’on n’écrit pas ? » (Assistante sociale à l’urgence, Brest) « La mise en place du dossier social informatisé a permis de s’interroger sur l’écriture : qu’est-ce qu’on écrit ? Comment on l’écrit ? Pour qui ? Cette réflexion a émané de l’informatisation, mais aurait du être faite avant. » (…) « On écrit moins de chose dans le dossier informatique. Avec un dossier papier, on prend ses notes à soi. Avec le dossier informatique, on a conscience que ce n’est pas son dossier à soi. On est plus synthétique. » (Cadre socio-éducatif, Lyon) A Brest, au cours des entretiens, les assistantes sociales font part de leurs impressions sur leur manière d’écrire. Il y a celles qui déclarent prendre peu de notes pendant l’entretien afin de privilégier une disponibilité à la relation : « Je prends le minimum de notes pendant l’entretien. Moi aussi, j’écoute les gens. - Après, on fait confiance à notre mémoire» tandis que d’autres utilisent le support informatique dans l’échange : « Parfois avec la famille d’une personne âgée, si l’ordi est branché, je vérifie avec elle que les données que j’ai sont bonnes ou pas. Je ne passe plus par le papier. » Pour autant l’outil informatique apparaît comme parfois insuffisant : il y a alors recours à des outils papier spécifiques pour certaines : cahier de notes, génogramme, feuille de budget… Est-ce que l’écriture est modifiée ? Les avis sont partagés. Pour certaines : « C’est la même chose que j’écris dans mon cahier, un petit peu plus résumé. Mais je suis aussi à l’aise. » (Assistante sociale dans le service depuis 4 ans). D’autres reconnaissent que parfois : « Les termes sont plus lisses… qu’on comprend à demi mots. » (Assistante sociale dans le service depuis plus de 15 ans) ; Ceci est sans doute à mettre en lien avec le regard de tiers, en l’occurrence des collègues assistantes sociales ou secrétaires qui pourront plus facilement accéder au dossier et exercer un regard critique sur la façon de le tenir, d’écrire. « Au début, le plus difficile, était d’accepter le regard des collègues sur « son » dossier. Cela a obligé à plus de rigueur, plus d’objectivité. » (Cadre du Centre hospitalier, Lyon). Qu’est-ce qu’on écrit ? Il s’agit à la fois de consigner les démarches engagées et les éléments du contexte : 65 « C’est toujours les démarches qui sont en cours. (…) Je mets des appréciations aussi parfois, sur le comportement des personnes ou des familles. Cela peut être lu par les patients. Par exemple, là, je note pour une patiente « contacté la fille », je mets « les deux sœurs ont ramené leur frère à la réalité en insistant sur la nécessité de l’hospitalisation » : donc ça c’est une appréciation sur le fonctionnement de la famille. » (Assistante sociale depuis 4 ans dans le service, Brest) La façon de « contextualiser » les situations dans le dossier est cependant variable selon les professionnels : certaines consignent des démarches engagées, d’autres rapportent des éléments qu’elles qualifient de «personnalisés ». « Il y a les dossiers qui sont très administratifs » (…) « mais on ne perçoit pas la personne » (…) « Il manque des éléments qui personnalisent. Moi, je mets entre guillemets des phrases qu’elle m’a dites : L’intéressé dit que… Ou j’essaie de décrire des choses qui se sont mal passées, mais au lieu de dire justement que cela s’est mal passé, j’essaie en tout cas de ne pas porter de jugement. » « Parfois, j’explique pourquoi j’ai pas pu faire telle démarche. » « C’est le contexte que j’essaie d’expliquer. » (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service, Brest) « Il y a des niveaux très très différents. Je crois que beaucoup n’ont pas compris qu’est ce qu’il faut garder en mémoire » « Les As qui l’ont fait avaient une certaine manière de travailler, de prévoir comment était leur métier… et après selon les formations, chacun a compris ce qu’est son métier et ce qu’est le dossier social. A mon avis, je pense que ça pèche là. » (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service, Brest) « Le contenu du dossier est très variable selon qui le remplit. Il y a des dossiers très pauvres et des dossiers Pfuit…Où il faut tout lire, or normalement c’est une synthèse » « C’est embêtant car dans la synthèse, il y a le déroulé de l’action (…) et puis après on n’est plus dans la synthèse» (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service, Brest) Cette même professionnelle poursuit sa réflexion et note finalement qu’elle-même n’a pas toujours la rigueur qui lui semblerait nécessaire d’avoir dans la tenue du dossier. Entre théorie et pratique, il y a des écarts liés aux principes de réalité notamment la gestion du temps : « Moi, je me rends compte que je mets trop de choses qui ne sont pas nécessaires, c’est plus un déroulé d’intervention qu’une synthèse. (…) Oui, en général c’est ça par manque de temps. » (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service, Brest) Les professionnels s’approprient l’outil et l’adaptent : « Moi je mets à tel endroit, d’autres utilisent d’autres endroits. », « Il y a des pratiques différentes, après chacune a son organisation. » (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service, Brest) 66 Les éléments de diagnostic et les renseignements médicaux ne devraient pas apparaître dans le dossier social, lorsqu’il est distinct du dossier patient : « En 1990, je suis allée à une journée organisée par l’ANAS à Brest sur le secret professionnel. Et il avait été dit qu’il ne devait plus y avoir aucun élément médical dans les dossiers sociaux. On le savait mais on n’avait pas mesuré que le dossier est un dossier administratif, donc il n’a pas la même protection qu’un dossier médical etc. Au service social, nous sommes les seuls à avoir une vue globale de la situation du patient, à regrouper les éléments. Donc on a fait un compte-rendu à nos collègues. Et la collègue et moi, on a mis en pratique ce qu’on avait décidé. Notre responsable de service de l’époque avait une position différente. Elle n’était pas du tout favorable à notre proposition. Ce n’est plus le cas avec la nouvelle cadre : elle n’est pas favorable à ce qu’il y ait des éléments médicaux dans le dossier social. Cela a posé un problème d’organisation car les dossiers médicaux n’avaient pas d’espace prévu pour ces documents. » (Assistante sociale depuis plus de 15 ans dans le service). En pratique, cette position n’est pas toujours tenue car le nom de la pathologie informe sur les répercussions sociales qui pourront être rencontrées. Certains professionnels trouvent alors des biais: « Moi j’écris « maladie de longue durée » ou « Le nom du service d’hospitalisation peut être indicateur. » Les éléments recueillis se réfèrent au projet de soin et au type d’accompagnement qui pourra être engagé selon que l’on va se trouver dans une prise en charge de courte ou de longue durée : « Je retiens toujours, que l’on travaille en psychiatrie. Parce que si je travaillais en médecine générale, il y a de grandes chances que je ne mettrais pas tout ça. Il me semble que j’y accorderais moins d’importance. » Quand est-ce qu’on écrit ? Là encore, les pratiques varient : certaines utilisent l’outil informatique en direct pour le recueil d’informations utiles à la prise en charge, d’autres en font un support pour l’échange dans l’accompagnement social : « Ce matin par exemple, j’avais un jeune, alors je mets l’écran face à lui, et je lui dis « on en est là », et on avance comme ça. Je n’écris pas avec la personne, j’écris après, ce sont des choses qu’on a faites et qui peuvent être relues. » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie, depuis 4 ans dans le service, Brest) Est-ce lisible par l’usager ? 67 L’usager peut désormais demander à consulter son dossier social, comme son dossier médical. Aussi les éléments consignés doivent être lisibles et acceptables : « Quand j’écris une synthèse, j’ai toujours à l’esprit que le patient peut demander à consulter son dossier. » sociale en psychiatrie, Brest) (Assistante « Je remplis de telle manière que je puisse être prête à retourner mon écran s’il me le demande et lui montrer ce que j’ai écrit. » (Assistante sociale en psychiatrie, ancienne dans la profession, dans le service depuis 4 ans, Brest) Le regard des collègues vient parfois interroger la façon d’écrire : « Parfois, je vois les synthèses de mes collègues et je me dis “je ne mettrais pas ça”, cela me choque. »(…) «Avec des phrases du genre, la mère qui dit que son fils est nul et c’est écrit comme ça. Alors, je me suis demandé, qu’est-ce que peux ressentir la personne si un jour elle est amenée à lire ça. » (Assistante sociale en psychiatrie, dans le service depuis plus de 20 ans, Brest) A Lyon, le service social s’est doté d’un groupe éthique et déontologie qui se réunit tous les deux mois et traite des questions amenées par les collègues. Il a également organisé une journée de travail sur les questions des écrits professionnels et les aspects juridiques. Les assistantes sociales notent des différences d’appréciation entre elles sur la manière de compléter le dossier. Ces écarts sont surtout remarqués par les professionnels qui ont une certaine ancienneté dans le métier et le service : « Pour certaines, les éléments sont plus rationnels : il s’agit de l’exposé des démarches. Pour d’autres, les éléments sont plus d’ordre relationnel. » (Assistante sociale dans le service depuis plus de 20 ans, Brest), « Je crois qu’il n’y pas forcément de logique entre tout le service social. La base dans le dossier c’est quand même l’évaluation et qu’est ce qu’on retire de l’évaluation qui va être utile pour l’action, par rapport à nos missions. » (Assistante sociale dans le service depuis plus de 20 ans, Brest) Parmi les assistants sociaux, la pratique de la transmission écrite est variable : l’équilibre est à trouver entre recherche de lien avec les services de soins et gestion du temps et de la charge de travail. « C’est vrai que les pratiques sont inégales déjà sur le partage d’infos dans les dossiers par les AS ; Il y en a qui vont spontanément écrire dans le dossier papier, ce qu’on appelle les cardex, y en a qui ne vont rien mettre, y en a qui vont mettre « vu », y en a qui vont mettre « démarches préparation de sortie, contact avec tel ou tel », des infos qu’on définit comme utiles au service de soins. Mais les pratiques évoluent dans le sens où elles écrivent de plus en plus. Mais au départ, il y avait une forte 68 réticence. Le leitmotiv c’était « On ne veut pas écrire partout ; On ne trouve pas le dossier de soins. On écrit déjà dans le dossier social…Cela fait des doubles écritures. C’est vrai que cela accroît en charge de travail. Ceci dit, il y en a quand même qui s’attache à mettre quand même un minimum dans le dossier, en termes de lien avec le service. » (Cadre du service social de Brest) Pour quel usage ? Le dossier social informatisé facilite la transmission d’information entre assistants sociaux. A l’origine c’est la question de la continuité de la prise en charge du patient qui a motivé la création du dossier social informatisé, pour les reprises de situation pendant une absence (congé…) ou lorsqu’un patient change de service. Aussi des règles de consultation du dossier ont été établies : « Chaque utilisateur s’engage à consulter un dossier social que s’il doit intervenir » (cadre du service social) A partir de là, libre à chacune de consulter le dossier avant le premier entretien, de lire la ou les dernières interventions selon les situations. Dans tous les cas, une nouvelle évaluation sociale est réalisée. Dans le même ordre d’idée, ne sont communiquées par une assistante sociale que les informations utiles recueillies par elle-même. « Par souci de déontologie, une AS ne va pas communiquer une info notée par sa collègue. » (Cadre du service social) Les assistantes sociales du service se reconnaissent autour des mêmes valeurs professionnelles et se référent à la déontologie comme garante de pratiques communes. « Normalement, il y a un engagement moral et éthique.», «des règles éthiques » (Assistante sociale avec une ancienneté de plus de 20 ans le service) Cependant, on s’aperçoit que certaines composent avec la règle, dans la limite de l’évaluation de la situation : « Cela arrive que je communique des éléments des collègues si c’est une information que je juge utile. Je ne dis pas tout, pas le nom de la collègue. » (Assistante sociale avec une ancienneté de plus de 20 ans le service) La responsabilité des professionnels est engagée dans l’écriture. Elle est guidée par la recherche de l’intérêt de l’usager et le souci de ne pas lui porter préjudice. Elle se réfère à la relation de confiance entre l’usager et l’assistant social qui prévaut à l’accompagnement social: qu’est ce que l’usager sait de ce qui est écrit dans son dossier ? Qu’est ce qui est discuté ensemble de ce qui sera consigné dans le dossier ? Qu’est-ce que l’usager sait de la possibilité d’accès à son dossier ? Ces règles d’accès sont-elles bien définies? 69 La diffusion des informations pose des questions éthiques en termes de responsabilité et appelle à la prudence. C’est pourquoi, il importe de définir des procédures validées au sein du service et de l’institution. 6.3 Les Statistiques L’outil informatique permet de coupler différentes fonctions. Il est ainsi possible de paramétrer des fonctions statistiques à partir du dossier social. A Brest, les statistiques sont réalisées au moment de la clôture du dossier. Elles permettent de rendre compte de l’activité : « Les statistiques concluent l’intervention. Elles donnent une vision globale de l’activité et valorisent les actions (origine, motifs de la demande, problème (évaluation sociale), type (actions concrètes). » (Assistante sociale dans le service depuis 6 mois), « Tous les ans, un rapport d’activité est réalisé. Elles cochent un certain nombre de rubriques quand elles ferment un dossier. Il y a un menu déroulant : par exemple « problèmes repérés », « actions engagées »…Elles font leur synthèse en début d’année suivante, de manière à faire des statistiques, mais euh … maintenant tous les ans c’est à peu près toujours les mêmes choses qui ressortent, et c’est pas forcément conforme à la réalité. » (Cadre du service social, Brest) L’outil a été pensé et réalisé il y a plus de 10 ans. Aujourd’hui, il n’est plus adapté. La législation a évoluée et des critères ne peuvent pas être pris en compte, comme la CMU45 par exemple : « Dans les items statistiques, on ne s’y retrouve plus. Ce n’est plus adapté. Et on ne peut plus y toucher. C’est ça qui est dommage. Les personnes qui ont réfléchi à ça…bon c’était une réflexion sur un moment donné, ça date maintenant de plus de dix ans. Donc les préoccupations déjà n’étaient pas les mêmes. » (Assistante sociale dans le service depuis 4 ans, Brest), « On ne sait pas toujours ce qu’elles ont voulu mettre derrière l’intitulé. » (Assistante sociale dans le service depuis 4 ans, Brest) L’analyse des données est d’autant plus difficile qu’il y a des interprétations variables des paramètres : « Bilan-évaluation sociale: c’est un fourre-tout, cela ne devrait même pas exister parce que cela va de soi. » Assistante sociale dans le service depuis 15 ans, Brest), « On peut renseigner 45 CMU : Couverture Maladie Universelle 70 plusieurs items mais à force de trop en renseigner, en étant pas sûre de ce qu’il y a derrière, et bien cela finit par ne plus avoir de sens non plus. Certains items, on pourrait les cocher systématiquement. Moi je ne sais jamais lequel retenir. » (Assistante sociale dans le service après l’élaboration du dossier social informatisé, Brest), « Nous on sait ce qu’on voulait mettre derrière, mais les nouvelles collègues qui arrivent … il y a des choses qui prêtent à beaucoup d’interprétations. » (Assistante sociale dans le service au moment de l’élaboration du dossier social informatisé, Brest) Les statistiques ne rendent pas compte du temps passé pour chaque situation : « Les statistiques ne valorisent pas le temps passé pour chaque intervention : or aujourd’hui c’est un argument pour les demandes de moyens en personnel auprès des directions. » (Jeune professionnelle) Pour autant, l’intérêt de l’outil de recueil statistique est reconnu pour sa fonction de valorisation de l’activité professionnelle. Pour répondre pleinement à cette attente, il conviendrait de le faire évoluer pour en affiner la lecture et mieux identifier les problématiques rencontrées : « Ce qui m’intéresserait plus, c’est de savoir par unité de soins, la charge, la dimension sociale de la prise en charge. Les problématiques par unité. (…) Le dossier patient informatisé qui va inclure le dossier social va permettre, j’espère, d’avoir des stat plus fines, par unité de soins» (Cadre du service social) A Lyon, pour pallier au problème de l’interprétation des items, des temps d’échange ont été organisés en réunion de service afin de réajuster et d’harmoniser les pratiques. L’objectif est de tendre vers une qualité de remplissage des items pour que les chiffres soient cohérents et permettent d’objectiver les résultats. Un système de requêtes a été élaboré. Il permet de valoriser l’activité du service. Il apparaît pertinent d’intégrer les statistiques au dossier électronique. Elles concluent l’intervention, donnant ainsi une vision globale de l’activité. Elles valorisent les actions en identifiant un certain nombre d’items (origine et motifs de la demande, problèmes identifiés (évaluation sociale), actions engagées. Pour autant, il apparaît nécessaire que l’outil soit évolutif afin de s’adapter aux réalités à observer. Pour une utilisation cohérente au sein d’un service, il paraît important que les items soient clarifiés afin de s’assurer d’un sens commun. 6.4 Accessibilité du dossier social informatisé A Brest comme à Lyon, le dossier social informatisé est accessible en lecture et écriture à l’ensemble du service social (assistantes sociales, secrétaires, cadres). Pour autant, à Lyon, les 71 cadres informent préalablement les assistantes sociales lorsqu’elles souhaitent consulter un dossier (ex : demande d’information de la part de la direction). L’accès à des zones partagées avec les équipes médico-soignantes avait été souhaité par le service social du CHU de Brest au moment de l’élaboration de l’outil mais cela n’avait pas alors reçu d’écho favorable. Aujourd’hui, cela n’est techniquement plus possible de faire évoluer l’outil Afin de formaliser les règles d’utilisation du dossier informatisé, une charte a été définie par le service social. Elle est présentée à tous les professionnels intégrant le service pour signature, ainsi qu’aux étudiants stagiaires de 3° année. A Lyon, où le dossier social informatisé a été récemment mis en place, les médecins et cadres de santé peuvent demander des habilitations en lecture et en écriture, dans un espace d’informations partagées, limité aux unités de soins où la personne est hospitalisée. La direction des soins actualise les informations relatives à la mobilité des cadres de santé afin d’ajuster les droits. Les habilitations sont gérées par les cadres socio-éducatifs des secteurs concernés. Il n’y a pas de charte spécifique sur l’utilisation du dossier social informatisé. Celle-ci sera « intégrée » dans une charte plus large en cours d’élaboration sur l’utilisation de l’outil informatique. Cependant, l’accès aux dossiers électroniques fait l’objet d’une traçabilité. Un historique de consultation peut être édité, si besoin. 6.5 Intérêt du dossier social informatisé A Brest, après 11 ans d’utilisation du dossier social informatisé, l’intérêt pour cet outil est unanimement reconnu malgré ses limites, ceci quelle que soit l’ancienneté des professionnels dans le service et leur implication dans son élaboration. Les points forts sont : - Une continuité de prise en charge : l’accès facilité à une information déjà recueillie permet un lien dans l’histoire de la personne, notamment quand les hospitalisations se répètent. Cela est particulièrement pertinent dans l’accompagnement des personnes où une dépendance ou encore une précarité s’installe. Ainsi en gérontologie, il est ainsi plus aisé de suivre l’évolution de la situation, de s’appuyer sur les entretiens précédents. Ceci permet de mieux accompagner le cheminement des personnes et de leur entourage et de proposer des aides adaptées. 72 - Une facilité de communication des informations : lorsque les patients sont hospitalisés successivement dans plusieurs services, le lien entre les assistants sociaux est assuré quelque soit la distance géographique entre les sites. Ceci évite notamment de faire répéter leur histoire aux patients et à leur famille : « On ne va pas tout refaire avec les familles » (Assistante sociale à l’urgence, Brest), “Cela permet de redémarrer sur des choses qui ont été discutées » (Assistante sociale en gérontologie, Brest) Le dossier social informatisé peut servir de guide d’entretien à partir des informations antérieurement recueillies. Il favorise ainsi une meilleure réactivité. Des doublons sont ainsi évités. - Une accessibilité : d’un point vue pratique, le dossier électronique présente des avantages par rapport au dossier papier. Ainsi :« ne pas se trimbaler de la paperasse à n’en plus finir. », « L’écriture est plus lisible » . Le document étant accessible quelle que soit sa localisation et celle du professionnel, l’informatisation représente un gain de temps. De plus les écrits sont souvent plus synthétiques que dans le format papier ce qui est apprécié par les professionnels. Néanmoins, la communication verbale demeure nécessaire et complémentaire. L’échange téléphonique est facilité à partir de l’identification d’une ouverture de dossier par une collègue. - Une référence à une culture professionnelle commune : elle garantit, selon les personnes interrogées, une même approche et une même lecture et est de ce fait constitutive de l’identité professionnelle. Chacune peut s’appuyer sur l’évaluation de sa collègue. Même si des différences apparaissent dans l’approche de l’écrit entre celles qui ont participé à l’élaboration de l’outil et les nouvelles collègues, ce qui est consigné s’attache à être objectivé : « Les éléments communiqués sont toujours très concrets. » (Assistante sociale de soins aigus, Brest) Aucune assistante sociale interrogée ne remet en cause l’intérêt du dossier social informatisé, les réticences portant davantage sur l’usage qui peut en être fait. 6.6 Les limites du dossier social informatisé A Brest , lors de sa conception il y a 14 ans, le dossier social informatisé avait été réfléchi de façon à répondre au mieux aux attentes des secrétaires et des assistantes sociales du service : il se voulait exhaustif mais il apparaît aujourd’hui lourd dans son utilisation. 73 - Une inadéquation de la codification des actes professionnels : préétablie, elle ne semble pas adaptée. Les espaces de renseignements linéaires ont nettement la préférence des professionnelles : « On avait fait un cahier des charges un peu compliqué. Il y avait beaucoup de choses possibles, mais qu’on n’utilise pas, parce qu’elles sont trop … enfin, on va trop vite, on ne peut pas passer trop de temps. Il y a des rubriques qu’on ne remplit plus.» (Assistante sociale depuis 20 ans dans le service, travaillait en hôpital général au moment de l’élaboration du dossier social informatisé, travaille depuis en psychiatrie, Brest) « C’est trop compliqué, on a perdu les codes, aller chercher dans les bibliothèques c’est très fastidieux et cela ne correspond pas forcément aux éléments que l’on a maintenant. Dès que l’on ne peut pas rentrer les infos en “libre” ou ” linéaire” et bien c’est compliqué. » (Assistante sociale depuis 20 ans dans le service, en psychiatrie, Brest) L’hôpital est doté de différents logiciels, qui sont liés soit à un service, soit une population cible. La multiplication des différents logiciel visant le recueil d’information crée une saturation auprès des professionnels et risque d’entraîner une dévalorisation de ces outils : « ..différents logiciels que je ne remplis même pas parce que c’est trop pour moi … Les différents logiciels sont toujours présentés comme visant à simplifier la communication de l’information. Je n’y crois pas du tout. Cela me pèse beaucoup d’avoir à remplir de multiples dossiers ; je n’ai pas envie de consacrer plus de temps à cela. » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie, Brest) - Des limites techniques : Les autres critiques apportées renvoient aux limites de l’outil qui ne peut plus évoluer. Il ne peut pas intégrer par exemple de nouveau dispositif créé depuis sa conception. Les statistiques pensées en 1996, ne paraissent plus adaptées voire leur interprétation ne semblent plus faire l’unanimité au sein du service et interroge les résultats : « Les items ne sont plus adaptés. Les définitions ne sont pas identiques pour tout le monde, elles sont sujettes à interprétations ; il y a beaucoup trop d’items, certains ont été créés pour les besoins d’étude de certains AS. » (Assistante sociale présente au moment de l’élaboration du dossier social informatisé, Brest). Les possibilités de traitement de texte associées sont limitées: « Aucune possibilité au niveau traitement de texte, même pour l’époque, il aurait pu être conçu autrement: on ne peut pas mettre en 74 caractère gras, ni souligner….. » (Assistante sociale présente au moment de l’élaboration du dossier social informatisé, Brest) A terme, avec la mise en œuvre du dossier patient informatisé, les différents logiciels devraient disparaître au profit d’un dossier unique. - L’importance du facteur temps : La principale réserve émise par les assistantes sociales ne porte pas sur l’intérêt du dossier social informatisé mais sur le temps que demande l’outil s’il est utilisé tel que conçu initialement. Ceci explique les adaptations et une utilisation qui fait consensus autour de quelques « paramètres » afin d’éviter les doublons d’écriture. Globalement, au service social du CHU de Brest, l’écriture linéaire est privilégiée aux renseignements sur menus déroulants. A Lyon, où le dossier social informatisé a été mis en œuvre très récemment, cette notion de temps comme élément négatif dans l’intérêt de l’outil, apparaît également. Cela semble d’autant plus paradoxal que l’informatique est souvent associée à une rapidité d’exécution et d’accès à l’information : « Point négatif : demande beaucoup de temps : est-ce du fait que l’outil est nouveau, il y a un manque de maîtrise ? Il y a beaucoup de sécurité : le mot de passe est souvent demandé : cela prend du temps dans la procédure. »(…) Un guide d’utilisation a été élaboré pour remédier aux erreurs dans le remplissage des dossiers. » (…) « Le dossier est très complet. La difficulté est de savoir où aller chercher l’info ? » (Cadre socio-éducatif, Lyon) On peut se demander si la complexité du recueil d’information (l’exhaustivité est recherchée) ne finit pas par nuire au recueil lui-même. En conclusion, Si le dossier informatisé fait l’unanimité quant à l’intérêt de son utilisation, on entend que c’est les modalités de son utilisation qui doivent être bien définies pour garantir la confidentialité des informations recueillies et transmises entre professionnels. De même, pour que l’outil soit opérationnel, il doit s’intégrer dans un système pensé globalement au sein de l’institution afin de disposer d’informations déjà recueillies (selon les droits d’accès accordés) - et ainsi être dans une logique de continuité de la prise en charge – et ne pas alourdir le temps de recueil d’information – en faisant répéter par ailleurs à l’usager des éléments déjà communiqués. Que ce soit pour le 75 dossier social ou pour l’espace social partagé dans le dossier patient, des modes d’écriture linéaires sont à privilégier. Les rubriques avec menus déroulants requièrent beaucoup de temps et ne sont pas adaptées à la transmission d’évaluation sociale au regard de la singularité des situations rencontrées. La dimension « statistique » associée au logiciel est reconnue parce qu’elle permet la valorisation de l’activité des professionnels et plus largement du service. Pour une utilisation cohérente et pertinente, cet outil doit faire l’objet d’une réflexion concertée et d’un accompagnement menés par l’encadrement. Le recueil des données statistiques peut ainsi être la base de rapports d’activité, d’études ciblées sur des problématiques sociales. Le service social a là un rôle d’expertise sociale au sein de l’hôpital et éventuellement auprès d’instances partenaires. En résumé de cette deuxième partie, on voit bien que sont en cause plusieurs acteurs : l’outil luimême (avec ses atouts techniques et ses limites), les professionnels-utilisateurs (avec leurs attentes et leurs projections) et l’institution hospitalière (avec ses projets et sa programmation). Pour cette raison, la conception et la mise en œuvre du dossier social informatisé ne peut se limiter à la compilation de solutions techniques. Impliquant des hommes et des femmes, usagers du système en tant que patients ou personnels hospitaliers, le dossier social informatisé s’inscrit nécessairement dans une dynamique institutionnelle. En cela, on peut se demander si le dossier social informatisé ne peut être considéré comme une composante du management stratégique ? 76 PARTIE III - LE DOSSIER SOCIAL INFORMATISE, UNE COMPOSANTE DU MANAGEMENT STRATEGIQUE Nous venons de voir que la question du dossier social informatisé ne peut se limiter à des aspects techniques. Engageant les professionnels et l’institution, il y a nécessité de penser, à l’intérieur du dossier patient, les articulations entre dossier de soin et dossier social. L’encadrement étant très souvent chargé de la réflexion sur les projets, il a un rôle d’interface entre les concepteurs et les professionnels de terrain au moment de la mise en œuvre. La fonction d’encadrement exercée au sein du service social du CHU de Nantes permettant de s’interroger sur les enjeux de la question, nous tenterons donc de penser la place de l’encadrement socio-éducatif dans l’élaboration du dossier social informatisé en termes de management stratégique. Tout d’abord, il est important de rappeler que la pratique du service social n’est pas une pratique autonome. Il y a interdépendance avec les autres pratiques à l’hôpital, en particulier avec celles des services de soins. Cette interdépendance ne doit pas être pensée comme une contrainte qu’il faudrait dépasser mais comme une particularité à prendre en compte. Dans un premier temps, nous illustrerons l’articulation entre le soin et le social en présentant la démarche de constitution du dossier patient unique et son informatisation puis dans un deuxième temps nous approfondirons notre propos en nous appuyant sur la pratique du partage d’information dans un secteur d’activité ciblé, la rééducation fonctionnelle. Nous chercherons ensuite à tirer les enseignements pour le dossier social et finalement pour le management stratégique. 77 1. Le dossier patient unique informatisé : une démarche projet 1.1- Exemple de structuration du dossier patient unique A titre d’exemple, nous présenterons ici succinctement la structuration du dossier patient au CHU de Nantes à partir de la charte de gestion du dossier patient validée en mai 2007 et de l’entretien réalisé avec un cadre de santé impliqué dans ce travail. Le contenu du dossier informatisé est aujourd’hui limité aux éléments administratifs enregistrés sous un logiciel (CLINICOM) dans lequel sont également saisies les cotations des actes médicaux. Une fonction bureautique y est associée permettant d’enregistrer courriers, comptes-rendus médicaux, résultats d’examens… Le service de la PASS renseigne des données statistiques depuis 2004, à partir de CLINICOM. Le service social dispose d’un espace spécifique, ce qui permet de valoriser son activité, d’identifier les catégories des populations prises en charge et les problématiques rencontrées. (Annexe n°9, p.124) Il existe par ailleurs quelques dossiers électroniques spécifiques (ex service « anesthésie ») qui sont interfacés avec CLINICOM. La gestion du dossier patient dans ses deux composantes électronique et papier est placée sous la responsabilité du CIMDP (Centre de l’Information Médicale et du Dossier Patient). Il assure la coordination des Programmes d’Amélioration de la Qualité relatifs au dossier mis en place dans le cadre du Projet d’établissement. Rappelons que le dossier patient est placé sous la responsabilité du directeur général. Une démarche d’harmonisation des pratiques sur l’ensemble des services de l’établissement est en cours. L’objectif est à terme de dématérialiser totalement le dossier patient. Un cadre de santé et un ingénieur qualité sont particulièrement chargés de coordonner des groupes de travail sur ce sujet en lien avec le service des archives et la direction des systèmes d’informations et des télécommunications. L’idée est que les réflexions et les applications déterminées à ce stade puissent être transférables lors de l’informatisation du dossier patient. « Dans le cadre de l’informatisation, si on y a réfléchi pour le dossier papier, on peut se dire que c’est préparatoire pour l’informatisation. 78 … « Dans l’historique, il y avait un Programme d’Amélioration de la Qualité (PAQ) « dossier patient » qui était plutôt des PAQ « information médicale et prescription ». Et puis cela s’est réuni. Quand j’ai pris le poste c’est devenu PAQ « dossier patient », qui a été mis en gel forcé car il y avait aussi la problématique du PAQ « circuit du médicament » avec les questions de la traçabilité de l’administration. Donc on ne l’a pas trop travaillé. Là ça se remet vraiment en mouvement. On parle de dossier unique, mais ça s’avère un peu compliqué à l’hôpital parce que rien qu’avec le dossier papier, « dossier unique », il n’y a que le nom. Quand on veut essayer de n’avoir qu’une seule pochette pour la totalité d’un patient qui est pris en charge pour plusieurs types de pathologie, au sein de l’hôpital c’est ingérable. Il y a plusieurs dossiers papier en fait. Pour le moment, le seul élément d’unicité, c’est son numéro d’identité permanent. A partir de ce dossier informatique CLINICOM, on pourra savoir qu’il a été suivi en gastro, alors on pourra récupérer un dossier gastro… Arriver à un dossier unique, même pour l’archivage, cela pourrait être compliqué. Donc le dossier informatisé pour le coup sera le bienvenu, car là, on aura en un seul lieu toutes les informations. … On va certainement arriver à plusieurs dossiers ou types de dossier. On a six thématiques qui sont en train d’émerger. … L’idée est d’obtenir pour 2009 des dossiers qui correspondent aux besoins de chacun ; pour que chacun s’y retrouve, on va faire intervenir des médecins, des infirmiers et cadres de santé, des secrétaires. Ca c’est les groupes qui vivent de façon constante et on fera appel à des experts qui sont obligés aussi de classer leur dossier ou qui interviennent dans le cadre du dossier patient, cela va être les psychologues, les assistantes sociales. C’est d’autant plus important de les faire intervenir à ce niveau et à ce stade de la réflexion parce dans le cadre du projet QUALIPSO, le dossier patient informatisé, y a cette prise en compte, c’est à dire comment on gère les onglets « assistante sociale », « psychologue », quels sont les accès, quelles sont les habilitations. » (Cadre de santé, Nantes) Une charte informatique est soumise à la signature de chaque agent dès lors qu’une demande d’habilitation pour une fonction informatique est accordée. Mettre en place le dossier patient unique signifie qu’il y a compatibilité des différents logiciels au sein de l’institution. La démarche-projet prend en compte les adaptations techniques qui doivent être envisagées à partir des profils déjà existants. 79 1.2- Recueil d’expériences en matière d’informatisation du dossier de soins auprès d’autres CHU Le dossier patient unique informatisé est en cours de réflexion, voire d’élaboration, dans un certain nombre d’établissements de santé. Le CHU de Brest est particulièrement engagé dans cette démarche. Le CHU de Nantes, comme nous venons de le voir, travaille à l’harmonisation du dossier patient dans sa version papier en se projetant dans la mise en œuvre de l’informatisation. Aussi, il est intéressant de s’attarder sur les constats et les interrogations de ces établissements… 1.2.1 - Vision partagée des professionnels interrogés sur le dossier patient Un consensus sur la nécessité de zones partagées et de zones confidentielles à l’intérieur du dossier A partir des entretiens réalisés, il apparaît clairement pour les différents professionnels interrogés que le dossier patient unique devra proposer des zones partagées et des zones confidentielles. Chacun au cours des entretiens nous a semblé intégrer l’intérêt de limiter le partage d’information dans le respect des missions. « Il est impératif de prévoir une zone d’infos partagée et une zone d’infos confidentielle réservée au service social. » (Jeune professionnelle en soins aigus, Brest), « L’idée c’est bien d’avoir un dossier unique partagé, en fonction des droits de chacun, des droits de lecture, des droits de création, des droits de consultation …Ce sera en lien avec les droits et les habilitations. » (Cadre de santé, Brest) Le dossier social peut être considéré comme un dossier de spécialité. A l’intérieur du processus de soins qui implique une démarche pluridisciplinaire, le dossier social est considéré par les personnes interrogées comme un dossier de spécialité, sur le modèle d’autres spécialités hospitalières, comme par exemple le dossier d’anesthésie. 80 « Le dossier social sera considéré comme un dossier de spécialité. Il n’y en aura pas besoin pour tous les patients et ce sera quelque chose qui va être construit comme un dossier de spécialité, un document qui sera activé à partir du moment où il y aura besoin. » (Cadre de santé, Brest) Les professionnels recherchent à partager une même culture de communication A l’intérieur du dossier de soins, le service social utilise les mêmes outils de communication que les équipes médico-soignantes, notamment les transmissions ciblées. L’ensemble des professionnels bénéficie d’une formation à la méthodologie de l’écriture par cible. Chaque professionnel peut consigner des éléments utiles à la prise en charge du patient à partir de cibles telles : autonomie, douleur, retour à domicile… « L’idée, c’est bien d’utiliser un outil commun et un langage à peu près commun, parce qu’effectivement chaque corps de métier a son vocabulaire, sa propre terminologie, mais il faut que cela soit compréhensible de tous. » (Cadre de santé, Brest) Les transmissions ciblées permettent de développer une culture du partage d’information. En se constituant un langage commun, les professionnels participent à l’amélioration de la qualité dans la communication. L’importance d’une continuité dans la transmission des informations concernant le patient est affirmée Les professionnels s’accordent sur le fait que l’informatisation du dossier patient permet de garantir la continuité dans la transmission d’informations concernant le patient. « La construction du cahier des charges était bien de centrer tous les acteurs autour du patient. » (Cadre de santé, Brest) « Il y a déjà des évaluations de faites. On ne va pas tout refaire avec les familles. Aux familles je leur dis: j’ai les notes de Mme D sous les yeux. Ils le perçoivent bien, en général ils sont contents de savoir que tout ce qui a été dit à un endroit, ils n’ont pas à le redire. Il y a plutôt une satisfaction de 81 voir que ça suit, que cela fait un ensemble autour de la personne. » (Assistante sociale en soins de suite et SLD, Brest) Chaque professionnel intervient dans son champ de compétence mais aussi en complémentarité avec ses collègues : le recueil d’informations et les observations des uns peuvent contribuer à l’intervention des autres dans le respect du métier de chacun. Cependant, il faut relativiser l’intérêt porté par chaque profession aux informations transmises par l’autre, chacun opérant un tri sélectif dans l’information. « Je suis certaine que la plupart du temps les soignants ne regardent pas et préfèrent me demander oralement ce qui est en cours alors que tout est déjà écrit. Au staff, quand on me demande une chose que moi, je n’ai pas en tête, je dis « regarder dans le cardex » et donc je vois bien que le réflexe n’est pas de lire ce que j’ai écrit. Donc ce sont des informations qui peuvent se perdre. C’est vrai que peut-être s’il y avait un dossier unique peut-être que cela se perdrait moins sans doute… » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie, Brest) Le dossier patient informatisé évite d’interroger inutilement le patient Les entretiens font apparaître que la multiplicité des intervenants et les changements de services génèrent, pour le patient, une répétition des mêmes questions de la part des équipes. « On va gagner du temps et on ne va pas demander de répéter au patient ou aux parents, qui sont souvent anxieux, dix fois les mêmes choses. On améliore de toute évidence. » (Cadre de santé, Brest) De plus, il n’est pas rare qu’une intervention sociale, utile à la prise en charge soignante, puisse être engagée sans que cette mention ne soit consignée. L’enjeu opérationnel n’est donc pas mineur puisqu’il a un effet sur la cohérence de la prise en charge. On voit donc le gain qui peut être apporté pour le patient lui-même. A l’issue des entretiens, on mesure mieux à quel point la mise en œuvre du dossier patient unique nécessite une réflexion pluridisciplinaire prenant en compte la nécessité d’une adaptation permanente. 82 « Quand on décide dans un établissement, dans un CHU, du mode de prise en charge que l’on veut mettre en place…Ce n’est pas quelque chose qui est figé, c’est quelque chose qui est dynamique(…) C’est bien que cela soit améliorable. Un produit qui est bien fini sera très vite obsolète (…) Au fur et à mesure, on fera évoluer le produit, en fonction de l’évolution et des pratiques et de la législation, de la philosophie des soins et de l’hôpital même …» (Cadre de santé, Brest) 1.2.2 - Zones d’incertitude Dans les échanges avec les professionnels, nous avons pu constater qu’il existe des tâtonnements sur les contours du partage d’information. Plusieurs questions ont porté sur l’utilité des informations de chaque métier pour les autres professionnels. Qu’est-ce qui nécessite une confidentialité ? « Qu’est-ce qu’on fait des notes confidentielles ? Qu’est-ce qu’un espace confidentiel ? Un espace partagé ? Un espace confidentiel : est-ce également confidentiel pour le patient ? Au quel cas, cela sera dans les éléments non-communicables ? Si c’est non communicable pour le patient, cela l’est peut être aussi pour le personnel. Dans le dossier papier, cela n’est pas possible de faire ça. C’est bien ça le problème actuellement. On se rend compte qu’il y a plusieurs niveaux pour chacun de confidentialité » (Cadre de santé, Nantes) « Les soignants réagissent par rapport au secret professionnel des AS en invoquant le secret partagé. Or tout ne peut pas être partagé. Tout comme les AS ne peuvent pas avoir accès à toutes les informations médicales. » (Jeune assistante sociale en soins aigus, Brest) Dans le dossier papier, il peut exister des documents ayant des statuts différents : observations, évaluations, conduites à tenir…Le dossier est considéré comme un outil de travail. Certaines informations ont un caractère définitif. D’autres font état de réflexions et hypothèses de travail. Selon les métiers, ces éléments figurent ou non au dossier. « Les notes personnelles servent à alimenter dans l’observation médicale tout ce bénéfice/risque, qui fait qu’on a quand même conscience du raisonnement mené par le médecin pour aboutir à une décision thérapeutique. Cela appartient au médecin et malgré tout, il doit y faire référence, à cette traçabilité de bénéfice/risque, et de la même façon il doit tracer le fait qu’il a informé le patient qu’il a 83 pris telle décision en rapport avec … Ah mais il y a tout une logique qui fait que …comment on trace ? » (Cadre de santé, Nantes) « Est-ce un document de travail ? Un document purement administratif répondant à des exigences notamment lorsqu’il y a plainte. Si c’est un document administratif alors, cela ne peut plus être un document de travail, donc cela ne nous sert plus à rien et il y aura un deuxième document. Il y a des problèmes éthiques. Le psychiatre qui disait ça, disait « pour moi c’est un document de travail, mon dossier patient. Il faut qu’il serve à quelque chose mais il faut qu’il serve à mes collègues aussi. Mais comme il doit me servir à moi, il y a peut-être des notes qui me sont confidentielles, qui ne concernent que moi, cela peut être une réflexion qu’à un moment donné, il a fallu que j’écrive pour garder une trace. Qu’est-ce qu’on fait de tout ça. Je pense qu’il va falloir qu’on fasse appel à des juristes, quelquefois à des experts. » (Cadre de santé, Nantes) Au cours des entretiens, on a pu souligner l’importance des représentations que les uns et les autres ont des missions de chacun. A titre d’exemple, plusieurs assistantes sociales ont évoqué l’usage qui pouvait être fait des informations relatives à la sortie d’hospitalisation. « Cela oblige à partager. Par définition, on partage ce qui est utile à l’autre. » (Cadre du service social, Brest) « On communique sur l’organisation de la sortie, sur les informations en lien, utiles. » (Assistante sociale en soins de suite, Brest) « Pour la préparation de la sortie, ils ont besoin de savoir les éléments que l’on a pu mettre en place. (…) Est-ce qu’il y aura une aide-ménagère ? Est-ce que la personne aura un lieu correct pour être accueilli ? Est-ce que la personne a un toit, de quoi manger, un entourage suffisant par rapport à sa dépendance ? » ((Assistante sociale aux urgences, Brest) « Ce qui est attendu par les soignants, c’est les démarches en cours, les questions pratiques. Moi je note le type de communication : si c’est un entretien, si c’est des démarches faites par téléphone, par exemple pour les personnes âgées, s’il y a des inscriptions en établissements, qui les a faites- moi ou la famille- les entretiens sur une recherche de logement, une demande d’aide financière en cours ou acceptée. Je note où on en est de la démarche » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie, Brest) 84 De même, des interrogations apparaissent sur le statut des éléments de vie privée de l’usager lorsqu’ils ne sont pas en lien direct avec le projet de soin, c’est le cas notamment des ressources et du budget : « Je ne communique pas sur une situation financière ou familiale ou en des termes choisis, par exemple en parlant de tensions sans préciser. » (Assistante sociale aux urgences, Brest) « Sur la situation financière des personnes par exemple, je vais dire s’il y a des possibilités de financement pour une structure ou s’il n’y en a pas, je ne rentre pas au-delà. Les questions qui sont abordées au niveau familial, si elles n’ont pas trait au soin qui est en cours, je ne les fournis pas non plus. Mais c’est vrai que c’est toujours au cas par cas, les informations en psychiatrie, comme elles sont, l’entourage a beaucoup de sens, par rapport à la maladie, à la pathologie, si on n’amène pas des informations concernant l’extérieur, cela n’a pas non plus de sens ; Je rentre uniquement dans les informations qui ont du sens avec le soin. Cela passe bien. » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie, Brest) Ce constat amène à réfléchir à la traçabilité dans le respect de la vie privée du patient, comme nous l’avons déjà évoqué. Le souci de continuité dans la prise en charge doit en effet veiller à préserver l’intimité de chaque personne hospitalisée : « On peut filtrer complètement les droits, c'est-à-dire par exemple, si l’aide-soignante ouvre un dossier patient, elle n’aura même pas la vision qu’il existe un dossier social, parce qu’à priori, elle n’a aucune raison … C’est un exemple pour dire qu’il faut réfléchir à chaque droit.» (Cadre de santé, Brest) « Chaque profil aura des droits propres. Par exemple, accès au compte rendu de sortie, mais pas tout le dossier médical. D’où l’intérêt de l’informatique : on peut aller jusqu’à cette finesse. Ce logiciel va le permettre. Il y a la confidentialité, il y a plein de choses dont il faut tenir compte. » (Cadre de santé, Brest) Ce poids des représentations pèse sur les pratiques : chacun a une idée, non seulement des éléments confidentiels liés à sa profession, mais aussi de ce qui est confidentiel dans le métier de l’autre, ce qui pose la question des limites du secret partagé et de l’adhésion de l’usager à ce partage d’information. 85 On perçoit que chaque métier a des attentes et des exigences différentes. La mise en place d’un dossier patient unique renvoie chacun à ses propres missions. La question du contenu du dossier interroge également la place de l’évaluation professionnelle. Apparaissent ici clairement les questions éthiques relatives au partage de l’information : accord du patient, référence déontologique des professionnels. Comment les droits d’accès doivent-ils être définis ? La définition des droits d’accès aux différents espaces du dossier électronique mérite d’être réfléchie sur un plan institutionnel. « Dans un dossier informatique, on peut se dire, cela va être facilité par un accès limité, sous forme d’habilitation ce qui fait que seule telle et telle personne, parce qu’ils ont ce statut là, pourront effectivement accéder. Mais il faudra voir : entre une assistante sociale et une autre, est-ce qu’on est dans cette logique là ou est-ce qu’il y a des habilitations différentes…Tout cela, il va falloir le définir. » (Cadre de santé, Nantes) Pour garantir l’éthique dans l’utilisation du dossier patient informatisé, des règles et des modes de contrôle doivent être définis, notamment par le biais d’une charte d’utilisation de l’application informatique. Quelles règles de conservation doivent être appliquées ? A partir des entretiens, un premier constat s’impose : la législation évoluant en matière de communication du dossier aux usagers, les règles d’application de cette législation ne sont pas toujours claires pour les professionnels. « Par rapport à l’archivage de toutes ces données informatiques, il n’y a rien de bien clair et bien défini. On est encore avec une législation en lien avec un archivage papier. C’est une question de fond importante. » (Cadre de santé, Brest) « (…) La loi n’est pas écrite de cette façon aussi claire, nous disant on peut conserver qu’un dossier informatique. Ce n’était pas encore aussi précis que ça. On n’avait pas nécessairement encore 86 la réponse. Il faut être capable à tout moment d’imprimer par exemple un dossier, lorsqu’il est demandé. » (Cadre de santé, Nantes) De plus, des hésitations persistent dans la pratique des professionnels concernant le statut des informations apportées par des tiers. « Dans la loi du 4 mars 2002, il y a des documents qui ne sont même pas accessibles au patient. Par exemple les informations autour du tiers qui peuvent être notées dans le dossier patient et l’hôpital ne doit pas le donner. » (Cadre de santé, Brest) Il faut aussi rappeler que les assistants sociaux ont, lors des entretiens, à plusieurs reprises interrogé la pertinence de conserver certaines informations. Nous avons vu l’utilité de consigner des informations dans un souci de continuité de prise en charge au cours d’un séjour hospitalier. Cependant, cette conservation ne risque-t-elle pas dans certains cas de figer la perception que l’on a de la personne hospitalisée ? Quels risques présente une communication standardisée ? On retrouve exprimée dans le recueil de données, la crainte de certains professionnels d’une perte liée à la standardisation de la communication : « Je crois que toute idée de simplification aboutit à la complexité au contraire. Les assistantes sociales, on partage obligatoirement les mêmes besoins. Donc quand on écrit nos synthèses, on sait que la collègue qui va le lire va le comprendre à peu près tel qu’on l’écrit. Il y a la même culture professionnelle : on sait de qui on parle quand on prend des abréviations. Si on écrit à la fois pour les médecins, des infirmiers, des aides-soignants, le secrétariat ou l’administration, on n’écrit plus la même chose. Le mode d’écriture ne sera pas le même. L’outil sera simplifié mais la communication avec tel partenaire ne sera plus aussi intéressante. » (Assistante sociale en psychiatrie, Brest) L’informatisation généralisée ne risque-t-elle pas effectivement de laisser moins de place à l’échange verbal ? 87 1.3 - Interrogations en termes de management stratégique Au cours des entretiens, il est apparu que les professionnels exprimaient une attente à l’égard de l’informatisation du dossier, à savoir que le partage serait source de clarification dans la communication. Cependant, il n’a pas été précisé ce qu’on entendait par clarifier la communication. Clarifier la communication peut signifier mieux partager l’information Ceci nous ramène à la question : qu’attend-on exactement du partage d’information ? Simplifier l’investigation : le recueil partagé des informations auprès du patient est susceptible de lui apporter un confort en lui évitant des répétitions. Pour autant, n’est-il pas important pour celui-ci de répéter plusieurs fois certaines informations, ceci pouvant l’aider à intégrer des changements ou même à les élaborer. Considérer une fois pour toute qu’on dispose d’une information transmise par la personne hospitalisée, peut amener à se priver de la richesse des perceptions différentes. Eviter les redondances ou à contrario la perte d’information. « Actuellement, au CHU, quand un patient est transféré dans un autre service, il n’y a pas de résumé de soins infirmiers ; ce n’est pas encore arrivé dans les habitudes ; on profite effectivement de l’informatisation pour qu’à la fin de l’hospitalisation, l’infirmière puisse éditer un résumé de soins infirmiers automatique. » (Cadre de santé, Brest) Garantir la continuité de la prise en charge malgré la multiplicité des intervenants. « On fait partie de l’équipe de soins, on est aussi une aide à la décision des médecins. On le voit peut-être plus sur la gériatrie : les médecins gériatres vont tenir compte du contexte social pour prendre une décision: ils ont besoin des éléments qu’on peut apporter. On est là pour aider la personne et cela fait partie de l’aide à la personne que de fournir au médecin les éléments pour comprendre la situation. Il est arrive que certains éléments n’aient pu être transmis par écrit faute d’accès au dossier, et que cela ait représenté une gêne à la décision, notamment une décision qui n’est pas adaptée. » (Assistante sociale en soins de suite et SLD) Clarifier la communication peut signifier mieux définir le champ de compétence de chacun 88 Ceci se traduit dans les entretiens par le souci de préciser les zones de confidentialité, les modes d’accès et les modes de contrôle du dossier informatisé. « Il n’y a pas de tension en termes de communication avec les soignants : si je n’ai pas envie de donner certaines informations, je ne les donne pas. C’est respecté. » (Assistante sociale en psychiatrie et gérontologie) « Je n’ai jamais entendu de récrimination de la part des soignants sur le fait que les assistantes sociales aient accès aux dossiers de soins. » (Cadre de santé, Nantes) « Le projet de dossier unique avec une zone partagée permettrait d’améliorer les relations avec les services de soins, la prise en charge du patient et améliorer notre fonctionnement. Avoir un dossier bien défini avec une partie où les services de soins iront et notre partie à nous. On aura répondu à leur demande et on sera plus à l’aise pour notre partie à nous. » (Assistante sociale en soins de suite et SLD, Brest) Clarifier la communication peut signifier mieux clarifier les relations entre professionnels. Le flou sur les missions et les compétences peut se traduire par une suspicion concernant les informations qui seraient détenues et l’usage qui en serait fait, voire devenir un enjeu de pouvoir. « Quand une cadre nous dit “ une assistante sociale “ par rapport à moi, qu’est-ce qu’elle fait de plus? “ Elle a un autre aspect du problème, une autre façon de voir les choses. On n’est pas dans l’organisation. Le cadre il est dans sa sortie d’hôpital, point/barre. Nous on n’est pas dans cette dimension là. Tout ça se joue là. » (Assistante sociale en soins de suite et SLD, Brest) « Certains soignants sont très demandeurs du dossier social. Il y a des services où cela bagarre beaucoup. » (Assistante sociale à l’Urgence, Brest). « Parfois, il y a des pressions des médecins et des cadres de santé, auprès de l’As du service, pour avoir des infos recueillies par des collègues qui sont intervenues auprès des patients dans d’autres services »(Assistante sociale en Soins de suite et SLD, Brest) On perçoit ainsi que cette formulation très simple, clarifier la communication, recouvre bien autre chose qu’une amélioration des pratiques à un niveau opérationnel. Clarifier la 89 communication a vocation à fortifier le processus de prise en charge en limitant l’énergie dépensée dans ces questions de communication au profit d’une énergie centrée sur le patient. Pour autant, la clarification doit « laisser du jeu » afin que chaque professionnel au sein de l’équipe pluridisciplinaire se sente autorisé à interroger le processus de soin à tout moment de la prise en charge. Clarifier la communication présente un risque de standardisation de la communication. Au cours des entretiens, les professionnels ont fait part d’une crainte, à savoir celle d’une standardisation de la communication qui pourrait constituer une perte pour les professionnels. De quelle perte s’agit-il ? A quel niveau faut-il entendre cette perte ? On peut entendre cette perte dans la communication qui serait due à une simplification excessive des éléments retranscrits. Si l’informatique crée trop de standard, que reste-il alors des évaluations, des synthèses et autres outils d’analyse contribuant à définir la prise en charge ? «On écrit moins de choses dans le dossier informatique. Avec un dossier papier, on prend ses notes à soi. On a conscience que ce n’est pas son dossier à soi. On est plus synthétique. Les termes choisis sont plus lisses, qu’on comprend à demi mots. Par exemple, si une personne est déprimée, on ne va pas se laisser aller à l’écrire ne serait ce que pour des raisons médico-légales. » (Assistante sociale à l’Urgence, Brest). Si l’on ne considère que l’écrit s’adresse à des professionnels de métiers différents et qu’il n’existe plus autant cette possibilité de cibler l’information en fonction des destinataires, il est à craindre qu’il y ait à terme un appauvrissement des contenus. Communiquer est déjà un exercice exigeant, la normalisation de l’écriture ne risque-t-elle pas de limiter l’engagement des professionnels dans les transmissions ? On commence à percevoir ainsi la dimension stratégique de la question. Le passage d’une culture à dominante orale qui laisse du flou sur les contours des pratiques à une culture écrite qui garantit la traçabilité s’inscrit dans des changements qui vont au delà des questions pratiques : dans un hôpital où les missions évoluent et où la place de chacun est régulièrement interrogée, 90 comment un service social, représentant un champ d’action hors du sanitaire, va–t-il se positionner ? 2. Articulation entre soin et social à l’hôpital Nous allons décrire dans ce chapitre, à titre d’exemple, la pratique de partage d’information d’un secteur d’activité, la rééducation fonctionnelle, et tenter d’analyser celle-ci au regard des questions qui nous intéressent : - Le partage de l’information entre les professionnels d’un même service doit-il être partiel ou total ? - Sur quels critères s’appuie-t-on pour déterminer, le cas échéant, la ligne de partage ? - Quelle est la valeur ajoutée de chaque option pour l’usager ? - Quelles implications cela a-t-il sur le dossier social ? - Les résultats de cette observation sont-ils transposables à d’autres services hospitaliers ? Sous quelles conditions ? Le secteur de Médecine Physique et Réadaptation (MPR) du CHU de Nantes a été retenu pour cette analyse en raison du travail pluridisciplinaire qui s’y réalise et de l’attachement de ce service à cette pluridisciplinarité. Nous allons recueillir un certain nombre d’éléments sur les pratiques de partage d’information au sein du service ainsi que sur les références de ce secteur en matière de bonnes pratiques. Puis nous analyserons l’impact de cette pluridisciplinarité sur le dossier social et l’apport de cette analyse à la question de départ. 2.1- Les préconisations de la société française de médecine physique et réadaptation La pratique du secteur MPR du CHU de Nantes se veut en phase avec les recommandations de la société française de médecine physique et réadaptation. Afin de saisir les orientations de la société, nous nous appuierons sur la Conférence de consensus de septembre 2004 intitulée « Sortie du monde hospitalier et retour à domicile de la personne adulte handicapée sur le plan moteur et/ou neuropsychique ». (Annexe 17, p.132) 91 Cette conférence affirme le caractère «toujours pluridisciplinaire, médico–paramédico– technico–psycho-social de la lutte contre le handicap» (Annexe 17, p.137) 92 Les lignes de force de la conférence sont les suivantes : - Le projet de sortie prend en compte l’environnement sanitaire et social : il inclut pour l’équipe hospitalière la connaissance de l’environnement à domicile, des acteurs professionnels sanitaires et sociaux du lieu de vie, des associations, … avec la nécessité d’une continuité des soins, du transfert et du partage des informations. - L’évaluation constitue un élément majeur, « l’analyse des potentialités et besoins de la personne permet de personnaliser le projet sur des valeurs positives et non sur l’étalonnage des déficiences » (Annexe 17, p.140), l’évaluation devant se faire dans un contexte réel d’activités sociales et professionnelles. La situation familiale et sociale doit être évaluée très tôt. - La mise en œuvre du projet de sortie implique «les professionnels sanitaires et sociaux (qui) participent à la mise en œuvre d’un projet commun et fédérateur. La sortie est un événement attendu et perçu par tous les professionnels comme un objectif fondamental ». (Annexe 17, p.142). La société française de médecine physique et de réadaptation réaffirme ainsi la complémentarité des différents acteurs de la prise en charge. 2.2 Les recommandations du jury Le jury de la conférence de consensus préconise un certain nombre de bonnes pratiques professionnelles, à savoir : - Développer la pluridisciplinarité à l’hôpital et à domicile. - Mettre en place une démarche d’évaluation pluridisciplinaire intégrant les attentes et les besoins du patient, conçue en partenariat entre l’hôpital et la ville. - Intégrer dans le dossier médical du patient hospitalisé une fiche d’alerte médico-sociale complétant les informations médicales par des informations neuropsychologiques et sociales. - Nommer un professionnel référent médical, paramédical ou social (il peut être l’assistant social) qui effectue un accompagnement permanent tout au long du parcours de réadaptation. 93 - Retranscrire par écrit les synthèses qui correspondent à la mise en commun des évaluations de chaque professionnel, avec une mise à la disposition de chaque professionnel en charge du patient. - Développer les rencontres et outils favorisant la coordination des professionnels hospitaliers et des intervenants à domicile : fiche de suivi, document partagé, dossier médical personnel accessibles à la personne. Le jury traduit dans ses recommandations une volonté de proximité des intervenants et valorise le partage d’information. 2.3- La pratique de la pluridisciplinarité en médecine physique et réadaptation Le service de rééducation fonctionnelle du CHU de Nantes tend vers une pratique en phase avec ces recommandations. La prise en charge est pluridisciplinaire. Conformément aux recommandations de la Conférence de consensus, «La mobilisation de l’équipe autour du projet de sortie constitue une préoccupation centrale indispensable à la construction du projet de soins. Ceci se traduit très concrètement dans les pratiques au sein du pôle MPR » (Annexe 17, p.142). La réussite du projet de sortie repose essentiellement sur la continuité de la coordination débutée en phase d’hospitalisation complète. Il convient maintenant de décliner plus concrètement les pratiques de partage d’informations au sein du plateau de rééducation fonctionnelle, afin de mettre en perspective les enjeux de ce partage d’informations pour le dossier social. - En hospitalisation La pluridisciplinarité s’exerce à chaque niveau de la prise en charge hospitalière. Les visites des équipes médicales au chevet du malade se font en présence de l’assistante sociale qui recueille ainsi un certain nombre d’informations utiles à la prise en charge psychosociale. Cette pratique témoigne d’un niveau élevé de partage d’information entre 94 professionnels même si l’on peut peut-être s’interroger sur la valeur de l’accord tacite du patient. Le service organise des rencontres régulières avec les familles. Ces entretiens de famille menés avec la participation de l’assistante sociale constituent un temps fort pour l’élaboration des projets et la prise en compte du contexte social qui a besoin d’être connu du médecin et qui est intégré dans les objectifs de soins. Soulignons aussi que les staffs, réunissant l’ensemble des professionnels qui interviennent dans la prise en charge, sont une pratique régulière de ce secteur d’activité là où ils ont du mal à se mettre en place parfois en médecine chirurgie obstétrique (MCO). Dans ce cadre, les problèmes sociaux peuvent être abordés. - En consultation L’idée d’une continuité de prise en charge prévaut à chaque étape de l’accompagnement. Il n’est pas souhaité que le patient ait une trop grande multiplicité d’intervenants. De même, on évite un clivage ville-hôpital qui nuirait à la prise en charge. L’assistante sociale, sollicitée par le médecin, peut être amenée, dans ce contexte, à initier ou prolonger l’accompagnement social, ce qui suppose une qualité de l’information tout au long de la prise en charge. Nous constatons ainsi que ce qui prime dans la prise en charge en MPR, c’est bien la participation de toutes les parties impliquées dans la prise en charge : patient, famille, aidants, professionnels de santé, paramédicaux de l’hôpital et du domicile. 2.4- Impact de la pratique en MPR sur la conception du dossier social A propos du projet de sortie, il est écrit dans les actes de la conférence : «Une réelle participation ne peut se fonder que sur : une information intelligible de la part des soignants sur les données médicales, les certitudes et incertitudes du pronostic, les perspectives de traitement et de réadaptation, tenant compte de la subjectivité avec laquelle chaque malade construit sa propre représentation de la maladie ; une information claire et concrète sur les droits, les aides existantes et leurs modalités d’accès ; … » (Annexe 17, p.143). 95 La diversité des modes de prise en charge par une même équipe et pour un même patient (hospitalisation complète, hospitalisation de jour, consultations externes spécialisées, prise en charge à domicile) nécessite, nous l’avons abordé, une qualité dans le partage d’information. Dans la Conférence de consensus, on retrouve l’énumération des services susceptibles d’intervenir dans la prise en charge : professionnels de santé libéraux (isolés ou organisés), équipes mobiles d’origine hospitalière (travaillant avec les libéraux), service d’Hospitalisation à Domicile (HAD) avec une dimension réadaptation réinsertion, réseau de santé, centre de soins infirmiers, service de soins infirmiers à domicile (SSIAD), service de soutien à domicile (auxiliaires de vie sociale, travailleuses familiales, etc.), assistantes sociales (de secteur, de l’assurance maladie, d’entreprise, etc. ), services d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) et des services d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH), centres communaux d’action sociale (CCAS) (Annexe 17, p.146). Ce listing suffit en lui-même à mesurer l’importance de l’information. L’accès aux données médicales est ainsi favorisé dans le respect du secret médical : « Sous réserve du respect du secret médical, certaines informations recueillies et transposées par écrit dès l’entrée du patient doivent pouvoir être disponibles pour les acteurs sociaux » (Annexe 17, p.143). Dans le même esprit, l’évaluation sociale est consignée dans le dossier médical, ce qui n’empêche pas l’existence d’un dossier social distinct. Sont contenus dans le dossier médical les éléments qui nécessitent d’être partagés et dans le dossier social distinct, l’ensemble des informations et évaluations nécessaires spécifiquement à l’exercice du métier. On peut donc dire que la philosophie générale est le secret partagé sous réserve du respect du métier. 2.5- Apport de cette réflexion à la construction du dossier social informatisé Qu’apprenons-nous de cette expérience du MPR ? Du point de vue du partage d’information 96 Nous pouvons revenir sur trois points : - Une pratique pluridisciplinaire rôdée, s’appuyant sur des outils d’évaluation et de communication partagés, évite le cloisonnement des métiers, si préjudiciable à une prise en charge globale du patient. - Le recueil précoce d’informations médico-sociales sur la situation antérieure du patient permet d’optimiser l’accompagnement médical et psycho-social de celui-ci. - La traduction de cette pluridisciplinarité par des retranscriptions écrites partagées évite la déperdition de renseignements et favorise la coordination. Ces constats plaident en faveur du partage d’information mais on constate que chaque profession a exercé sa vigilance quant au respect de ce secret, exercice complexe. Cependant, plusieurs écueils peuvent être rencontrés : risque d’une perte de vigilance du fait d’une proximité professionnelle, présupposé d’un accord du patient pour ce partage d’information sans en préciser parfois le contour, partage d’éléments de caractère privé là où la vie privée se doit d’être éminemment protégée. Du point de vue du dossier social informatisé Le contexte MPR nous amène à formuler des remarques. D’abord il faut noter que la création d’un dossier social non partagé ferait nécessairement apparaître des doublons d’information et générerait un temps inutile de retranscription des données. D’autre part, il reste entendu que certaines informations sociales doivent être protégées lorsque le patient s’oppose au partage de l’information et à chaque fois que celle-ci n’est pas utile à la prise en charge soignante. En conclusion, On a vu, à travers cette illustration de la pratique en MPR, que la question du dossier social ne peut se traiter indépendamment de la place qu’occupe l’information sociale dans la prise en charge médicale. Celle-ci dépend d’un certain nombre d’indicateurs : - la nature de la pathologie et son impact sur la vie sociale du patient 97 - l’implication du service social selon les modes de prise en charge (hospitalisation conventionnelle, hôpital de jour, CATTP, domicile, consultation spécialisée). - la quotité de temps d’intervention sociale dédiée au service - l’existence et la composition de l’équipe pluridisciplinaire - la place accordée à la question de la sortie - l’existence des aidants - le réseau partenarial Ainsi un service de soins aigus pourra accorder une importance moindre aux conditions sociales de vie et aux conditions de sortie d’hospitalisation que le service de rééducation fonctionnelle cité précédemment. La mise en place d’un dossier social partagé pourra cependant être préconisée. Cependant, le service social devra intégrer que seules quelques informations soient consultées par les équipes soignantes, ce qui suppose un discernement dans les informations transmises qui prennent en compte les indicateurs précités. L’exemple du MPR permet de redire l’importance de l’approche pluridisciplinaire et d’une évaluation partagée en secteur hospitalier, le niveau d’évaluation et de partage devant faire l’objet d’une adaptation selon les secteurs de soins et le projet médical du service. Le dossier social sera alors intégré au dossier de soins pour ce qui concerne les informations utiles au projet ou disposer d’un espace partagé, l’assistant social utilisant par ailleurs un dossier social distinct pour ce qui relève des éléments spécifiques au métier. Dans les espaces partagés, les informations sociales peuvent être consignées par d’autres professionnels que les assistants sociaux, ce qui nécessite une définition claire des accès et la signature de chaque intervenant dans un souci de traçabilité. Les équipes s’impliqueront d’autant mieux dans la mise en œuvre du dossier informatisé, qu’elles auront été partie prenante dans l’élaboration du projet et que la mise en œuvre de celui-ci sera accompagné tant sur le plan technique qu’éthique. L’encadrement du service social a particulièrement sa place à ce niveau. 98 Ceci nous amène à deux préconisations générales : Le dossier social informatisé doit être intégré au dossier patient unique comme dossier de spécialité comprenant un espace partagé en lecture et écriture avec l’équipe en charge du patient et une zone protégée (libre et semi-libre) réservée exclusivement à l’assistant social. L’encadrement de chaque métier concerné, ici l’encadrement socio-éducatif, doit conduire l’élaboration de son dossier de spécialité, en sa qualité de garant de la référence métier et des pratiques qui y sont associées. 99 CONCLUSION - ENSEIGNEMENTS POUR UN MANAGEMENT STRATÉGIQUE A l’issue de ce travail, la complexité du dossier patient a pu être mise en évidence, avec une particularité pour le service social : les assistants sociaux ne sont pas à part entière professionnels de santé. L’essentiel de la réflexion a porté sur le contour du partage d’information en équipe pluridisciplinaire et nous a permis de définir des préconisations que nous venons d’exposer. Les modalités d’accès du dossier social informatisé, en termes d’écriture et de lecture, devront être explicitement réfléchies et définies au sein des services et de l’institution et pourront faire l’objet de formalisation telle une charte d’utilisateur. La question des statistiques ne devra pas être sousestimée au moment de la définition des éléments du recueil d’information. Elles contribuent en effet à la valorisation de l’activité du service concerné. D’autre part, le patient devra être informé des modalités de communication des informations le concernant, notamment relativement à l’informatisation. Pour conclure la réflexion, nous pouvons tenter de distinguer et de lier entre eux des aspects de notre problématique soulevant des questions managériales impliquant les personnes (usagers et professionnels hospitaliers) ou l’institution ainsi que les questions sociétales soulevées par notre travail. Nous identifierons d’abord les éléments personnels et interpersonnels en jeu lors de la création du dossier et mettrons en évidence l’importance de la volonté institutionnelle dans l’élaboration et la mise en œuvre de celui-ci. Puis nous interrogerons enfin la place du manager dans le contexte institutionnel de la nouvelle gouvernance hospitalière. En construisant ensemble ou séparément le dossier social informatisé, les professionnels travaillent avec les représentations qu’ils se font de leur propre métier et du métier des autres. Une des caractéristiques managériales du travail hospitalier consiste à ajuster ou rétablir les perceptions que chacun peut avoir du métier de l’autre. 100 Dans ce contexte, la place du service social, très minoritaire à l’hôpital, est toujours à faire et à refaire, c’est sa fragilité et l’encadrement a un rôle à jouer comme médiateur pour faciliter la communication et asseoir la place du service social. Cette place est bien sûr différente selon les secteurs d’hospitalisation et les secteurs d’intervention de l’assistant social, celui-ci pouvant être pleinement intégré dans le processus de soin ou intervenir plus ponctuellement. Comme nous l’avons déjà mentionné, le service social hospitalier se situe dans une relation tripartite où il est engagé avec l’institution sanitaire et l’usager. Une intervention complémentaire auprès de la personne malade est recherchée dans une perspective de prise en charge globale mais elle peut être source de conflit lorsque les priorités des uns et des autres divergent. Dans tous les cas, il existe une tension entre des conceptions du travail social qui sont chargées du poids des représentations des usagers, des assistants sociaux, de l’encadrement socioéducatif, des directions, des directions des soins et du monde médical. Le social n’est pas l’apanage des travailleurs sociaux. D’autres professionnels assurent également une prise en charge sociale, ce qui n’est pas sans créer parfois des conflits de territoire plus ou moins avérés et variables selon les circonstances et la disponibilité des uns et des autres. En termes de management stratégique, on peut dire que le développement d’un projet, quel qu’il soit - dossier social informatisé ou autresuppose des capacités d’adaptation de la part des professionnels et une stratégie de l’encadrement visant à retenir la solution susceptible de faire consensus. Cette recherche constante d’équilibre doit cependant pouvoir se référer au projet du service social. L’interdépendance est souvent vécue dans la plainte alors que cette complexité est un élément dynamique. Elle doit être pensée et portée dans ce sens par l’encadrement même si celui-ci peut être mis à mal par le jeu complexe des acteurs s’inscrivant tantôt dans la coopération, tantôt dans la rivalité, voire la guerre des pouvoirs. Le rôle de l’encadrement dans le management de projet est encore plus difficile dans un environnement incertain. C’est pourquoi la volonté institutionnelle dans la mise en œuvre des projets est particulièrement importante. Dans les retours d’expérience des CHU de Brest et Lyon, nous avons pointé des mouvements d’accélération ou de ralentissement qui correspondent aux projets et contraintes des établissements concernés. C’est à ce niveau qu’apparaît la forte interdépendance entre les projets 101 du service social, initiés ou non par l’institution, et les projets de l’institution. Un service social créant de manière isolée son dossier social ne pourra ensuite attendre une application spontanée par les autres professions, ne serait-ce que dans la consultation d’une partie commune. Pour l’encadrement socio-éducatif engagé dans la démarche, on peut préconiser en termes de management de réduire si besoin le niveau d’exigence quant au recueil d’information au profit d’une vision commune avec l’équipe pluridisciplinaire du contenu du dossier de spécialité pour la partie sociale partagée. La difficulté est que le service social doit à la fois déterminer ses buts, ses objectifs de manière à maîtriser son destin et tenir compte du système dans lequel il est inscrit, d’où l’enjeu de son positionnement. Il importe qu’il puisse proposer un positionnement au sein de l’institution hospitalière au risque sinon de se voir imposer une place où son autonomie serait amoindrie. La décision de création du dossier social informatisé et la structure du dossier sont à situer dans ce contexte où les décisions prises par l'encadrement vont orienter le développement du service social : en cela l'informatisation du dossier social peut être à la fois une opportunité et une menace. L’investissement du dossier social par les directions pourra être considéré comme un indicateur de la place réservée au service social. De même, la qualité du dossier social informatisé ou de la partie sociale du dossier patient pourra être considérée comme un indicateur de la performance du service. Cependant, pour que l’encadrement socio-éducatif occupe une place à laquelle il puisse agir positivement, il doit être en mesure d’adapter ses projets aux impératifs des services, ce qui suppose une excellente connaissance du terrain. Pour autant, pour avoir une bonne vision des dossiers, il doit disposer d’une connaissance pointue des enjeux institutionnels. Ce constat peut légitimer en soi deux niveaux d’encadrement, l’un de proximité (au plus près des services), l’autre plus à distance mais bien en phase avec les orientations institutionnelles de sa propre institution et des institutions partenaires et garant des orientations de son service. De même un hôpital doit savoir ce qu’il peut attendre de son service social et être capable de dire clairement ce qu’il est prêt à investir pour le fonctionnement de ce service. Ces remarques valent dans un environnement relativement stable mais toute préconisation semble pouvoir 102 aujourd’hui être battue en brèche par les changements d’organisation liés à la nouvelle gouvernance hospitalière. La nouvelle gouvernance hospitalière rend les questionnements plus prégnants. Elle génère des remaniements organisationnels dans les hôpitaux et incite à de nouvelles formes de management aux différents niveaux d’encadrement. On a vu tout au long de ce mémoire qu’une question apparemment technique, l’informatisation du dossier social, comporte en soi, par nature des enjeux stratégiques, d’autant qu’elle s’inscrit dans un contexte institutionnel en mutation. Les incertitudes de l’avenir liées aux restructurations hospitalières rendent la fonction de management complexe. L’absence de maitrise des évolutions de l’institution hospitalière enferme parfois les personnels dans l’immédiateté et le repli sur des positions frileuses. Une certaine standardisation des pratiques liée aux mécanismes de concertation et au développement des procédures peut être source d’investissement dans les dynamiques institutionnelles ou à contrario de désengagement et de perte de créativité. 103 Dans un environnement riche et diversifié comme peut l’être l’hôpital, les réformes successives et profondes comme celles que nous vivons actuellement n’ont de chance d’aboutir qu’à cette condition d’une volonté partagée des acteurs, à tous les niveaux de l’organisation hospitalière. Plus cette organisation se complexifie, plus la concertation nécessite d’être menée dans le respect des missions et des métiers. Pour les professionnels de l’encadrement, ceci suppose pour chaque filière et à chaque niveau hiérarchique une véritable éthique de la responsabilité. 104 SIGLES UTILISES AS Assistant(e) Social(e) ou assistant(e) de service social ANAES Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en santé ANAISS Application Nationale Informatique des Services Sociaux ANAS Association Nationale des Assistants de Service Social ANIS Approche Nouvelle de l’Information Sociale APROSSHES Association Professionnelle des Services Sociaux Hospitaliers et de la Santé ARH Agence Régionale de Santé ASH Actualité Sociale Hebdomadaire AUDASS Automatisation des Directions Départementales de l’Action sanitaire et Sociale CADA Commission d’Accès aux Documents Administratifs CARDEX Classeur « dossier de soins » CCAS Centre Communal d’Action Sociale CHU Centre Hospitalier Universitaire CIMDP Centre de l’Information Médicale et du Dossier Patient CLINICOM Logiciel dossier patient (partiel) utilisé au CHU de Nantes CMU Couverture Maladie Universelle CNAF Caisse Nationale des Allocations Familiales CNIL Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés CSTS Conseil Supérieur en Travail Social DEAS Diplôme d’Etat d’Assistant de Service Social DHEPS Diplôme des Hautes Etudes en Pratique Sociale DMS Durée Moyenne de Séjour 105 DSTS Diplôme Supérieur en Travail Social HAD Hospitalisation à Domicile HAS Haute Autorité de Santé GAMIN Gestion Automatisé de Médecine Infantile IPP Identifiant Permanent du Patient IRTS Institut Régional de Travail Social MCO Médecine Chirurgie Obstétrique MPR Médecine Physique et Réadaptation OMS Organisation Mondiale de la Santé PAQ Programme de l’Amélioration de la Qualité QUALIPSO Projet d’informatisation de la production de soins RMI Revenu Minimum d’Insertion SAMSAH Service d’Accompagnement médico-social pour adultes handicapés SAVS Service d’Accompagnement à la vie sociale SSIAD Service de Soins Infirmiers à Domicile SLD Soins de Longue Durée SROS Schéma Régional d’Organisation Sanitaire SSR Soins de Suite et de Réadaptation T2A Double Tarification à l’Activité TAS Travail Social Actualité SAFARI Système Automatisé pour les Fichiers Administratifs et le répertoire des Individus UNAFAM Union Nationale des Amis et Familles de Malades Psychiques UNCAM Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie VIH Virus de l’Immunodéficience Humaine 106 BIBLIOGRAPHIE OUVRAGES ANAS, Travail social, Informatique, liberté, Actes du congrès de Lille, Paris, ESF, 1977, 154 p. 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Site de la CNIL : www.cnil.fr, consulté le 26.04.08. 112 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION ........................................................................................................................................................... 2 Le concept de santé évolue au fil du temps................................................................................................2 La fonction hospitalière s’adapte aux conceptions de la santé ..................................................................3 La santé est devenue un produit économique............................................................................................5 L’hôpital est attaché aux principes et aux missions du service public ........................................................5 Les établissements de santé dispensent différentes catégories de soins...................................................6 Une réforme des pouvoirs ..........................................................................................................................7 Une réforme de la tarification.....................................................................................................................7 Une réforme budgétaire .............................................................................................................................8 Une réforme de la planification ..................................................................................................................8 Le service social hospitalier s’inscrit dans une culture sociale et sanitaire................................................8 Quelles informations partager dans l’intérêt de l’usager ?.........................................................................9 Quelles informations partager dans l’intérêt de l’institution ?.................................................................10 Quelles informations partager dans l’intérêt du service social ?..............................................................10 L’informatisation du dossier social constitue‐t‐elle un outil.....................................................................11 de management stratégique ? ..................................................................................................................11 CHAPITRE PRÉLIMINAIRE : MÉTHODOLOGIE ................................................................................................. 13 PARTIE I ­ LE DOSSIER PATIENT : LIEU DU PARTAGE D’INFORMATION ................................................ 19 1. Présentation du dossier patient ........................................................................................................... 19 La Haute Autorité de Santé préconise un dossier unifié du patient .........................................................19 Un outil complexe à améliorer..................................................................................................................21 2. Les modalités de transmission d’information........................................................................................ 22 Les informations confiées par le malade sont réputées confiées à l’ensemble de l’équipe.....................22 Les staffs....................................................................................................................................................22 Les transmissions ciblées : une culture commune ....................................................................................23 Un partage d’information dans la limite de ce qui est utile aux missions ................................................24 3. La place de l’usager .............................................................................................................................. 24 L’usager au cœur de la prise en charge.....................................................................................................24 Le respect de la vie privée du patient doit demeurer constant ................................................................25 4. Dimension éthique .............................................................................................................................. 26 L’éthique interroge les valeurs et les règles du vivre‐ensemble...............................................................26 Les concepts peuvent être antagonistes et complémentaires .................................................................27 113 Le droit au secret est un droit universel ...................................................................................................29 Les professionnels sont juridiquement tenus de respecter le secret .......................................................30 Le secret partagé n’existe pas en droit .....................................................................................................30 5. L’informatisation du dossier patient ..................................................................................................... 31 PARTIE II ­ LE DOSSIER SOCIAL : UN DOSSIER PARTAGÉ OU UN DOSSIER DISTINCT ? ...................... 35 1. Cadre d’intervention du service social hospitalier ........................................................................ 36 2. Présentation du dossier social .............................................................................................................. 39 2.1 Définition du dossier social ......................................................................................................................39 Un document administratif sans existence juridique................................................................................39 Une mémoire et un outil pour l’accompagnement social.......................................................................40 2.2 Vie du dossier social. ...............................................................................................................................41 Deux temps de formalisation : l’ouverture et l’archivage du dossier social .............................................41 3. La place de l’usager .............................................................................................................................. 43 Recueillir des informations en interrogeant l’utilité .................................................................................44 Assurer la continuité de la prise en charge au regard du droit à l’oubli ..................................................44 Le dossier social, trace résultant d’une relation de confiance..................................................................45 Un espace d’ajustement............................................................................................................................46 4. Dimension éthique ............................................................................................................................... 47 Une éthique professionnelle à affirmer et à confronter...........................................................................47 Le service social hospitalier à l’épreuve de l’économie ............................................................................49 La déontologie professionnelle comme référence ...................................................................................50 Le secret professionnel comme fondement .............................................................................................51 de l’éthique professionnelle des assistants sociaux..................................................................................51 Le secret partagé dans la limite de ce qui est utile .................................................................................53 5. L’informatisation du dossier social........................................................................................................ 54 Littérature existant sur Informatique et travail social .............................................................................56 6. Des exemples de mise en œuvre........................................................................................................... 59 Brest : une pratique confirmée d’informatisation ....................................................................................60 Lyon : une expérience récente ..................................................................................................................61 6.1 La structure du dossier social informatisé ...............................................................................................62 6.2 Les pratiques d’écriture dans le dossier social informatisé : contraintes et marges de manœuvre .......64 6.3 Les Statistiques.........................................................................................................................................70 6.4 Accessibilité du dossier social informatisé...............................................................................................71 114 6.5 Intérêt du dossier social informatisé .......................................................................................................72 6.6 Les limites du dossier social informatisé..................................................................................................73 PARTIE III ­ LE DOSSIER SOCIAL INFORMATISE, UNE COMPOSANTE DU MANAGEMENT STRATEGIQUE........................................................................................................................................................................... 77 1. Le dossier patient unique informatisé : une démarche projet................................................................ 78 1.1‐ Exemple de structuration du dossier patient unique .............................................................................78 1.2‐ Recueil d’expériences en matière d’informatisation du dossier de soins auprès d’autres CHU ............80 Un consensus sur la nécessité de zones partagées...................................................................................80 et de zones confidentielles à l’intérieur du dossier ..................................................................................80 Le dossier social peut être considéré comme un dossier de spécialité. ...................................................80 Les professionnels recherchent à partager une même culture de communication .................................81 L’importance d’une continuité dans la transmission ................................................................................81 des informations concernant le patient est affirmée ...............................................................................81 Le dossier patient informatisé évite d’interroger inutilement le patient ................................................82 Qu’est‐ce qui nécessite une confidentialité ? ...........................................................................................83 Comment les droits d’accès doivent‐ils être définis ?...............................................................................86 Quelles règles de conservation doivent être appliquées ? .......................................................................86 Quels risques présente une communication standardisée ? ....................................................................87 1.3 ‐ Interrogations en termes de management stratégique ........................................................................88 2. Articulation entre soin et social à l’hôpital ............................................................................................ 91 2.1‐ Les préconisations de la société française de médecine physique et réadaptation...............................91 2.2 Les recommandations du jury..................................................................................................................93 2.3‐ La pratique de la pluridisciplinarité en médecine physique et réadaptation .........................................94 2.4‐ Impact de la pratique en MPR sur la conception du dossier social ........................................................95 2.5‐ Apport de cette réflexion à la construction du dossier social informatisé .............................................96 CONCLUSION ­ ENSEIGNEMENTS POUR UN MANAGEMENT STRATÉGIQUE .........................................100 SIGLES UTILISES......................................................................................................................................................105 BIBLIOGRAPHIE......................................................................................................................................................107 TABLE DES MATIERES...........................................................................................................................................113 ANNEXES ...................................................................................................................................................................116 115 ANNEXES Annexe 1 : Corpus de référence …………………………………………………………………… p.99 Annexe 2 : Guides d’entretien …………………………………………………………………….. p.104 Annexe 3 : Entretiens CHU de BREST 10 et 11 Janvier 2008……………………………………. p.107 Annexe 4 : Extraits d’entretiens……………………………………………………………………. p.108 Annexe 5 : Charte de l’utilisateur du dossier social informatisé de BREST………………………… p.114 Annexe 6 : Acte réglementaire relatif au dossier social informatisé CHU de BREST………........... p.115 Annexe 7 : Impressions d’écran du dossier social informatisé du CHU de BREST………………… p.119 Annexe 8 : Impression d’écran du dossier social informatisé des Hôpitaux civils de LYON…......... p.123 Annexe 9 : Impression d’écran du dossier PASS – CHU de NANTES…………………………….. p.124 Annexe 10 : Fiche « structure du dossier patient » - CHU de NANTES…………………………... p.125 Annexe 11 : Fiche « recueil de données administratives » - CHU de NANTES…………………… p.126 Annexe 12 : Fiche «synthèse de soins » - CHU de NANTES……………………………………… p.127 Annexe 13 : Fiche « synthèse de sortie » - CHU de NANTES……………………………………... p.128 Annexe 14 : « Fiche transmission des informations choix du patient » - CHU de NANTES………. p.129 Annexe 15 : « Feuille de transmission par cible » - CHU de NANTES…………………………….. p.130 Annexe 16 : « Feuille de dépôt d’initiales » - CHU de NANTES –………………………………… p.131 Annexe 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier »…………………………….. p.132 Annexe 18 : Recommandations de la CNIL………………………………………………………... p.154 116 ANNEXE 1 : Corpus de référence CORPUS DE REFERENCE OUVRAGES ANAS, Travail social, Informatique, liberté, Actes du congrès de Lille, Paris, ESF, 1977. 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RAPPORTS 120 ANNEXE 1 : Corpus de référence CNIL, voir rapports annuels. Informatique et secteur médico-social, compte-rendu du colloque CTD, Bruxelles, mai 1987, TSA, 26 juin 1988. Rapport du Conseil supérieur de travail social, Nouvelles technologies de l’information et de la communication et travail social, ENSP, Rennes, Septembre 2001. Rapport du Conseil supérieur de travail social, Ethique des pratiques sociales et déontologie des travailleurs sociaux, ENSP, Rennes, 2001. CONFERENCE FANGET Annick, L’informatisation au service du travail social : une aide à la révélation des besoins d’un territoire en matière d’action sociale ?, Conférence « Journées régionales de valorisation (Lyon) Vie sociale, Paris, 2000. Colloque interrégional Grand-Est. Le droit des usagers face aux pratiques professionnelles : le travail social à l’épreuve des droits des personnes. Vie sociale, Paris, 2006. Interprofessionnal case construction in social work: the evidential status of information and its reportabily. Discourse across professional boundaries. (La construction interprofessionnelle d’un cas en travail social: le bien fondé de l’information et sa transmissibilité. Le discours à travers les frontières professionnelles), Center for language and communication research, Germany, Texte The Hague, 1998. 121 ANNEXE 2 : Guides d’entretien GUIDES D’ENTRETIEN Durée : ¾ d’heure Présentation de la démarche : travail universitaire en lien avec la pratique professionnelle (Master Pro/DEIS) Du point de vue des personnes ayant participé à la conception ou la mise en œuvre : Comment le dossier social informatisé a-t-il été élaboré et par qui ? Quand a-t-il été élaboré ? Quand a-t-il été mis en service ? Pourquoi à ce moment-là ? Qu’elles sont les orientations qui ont sous-tendu la construction du dossier social informatisé? (Ligne directrice ?) Qu’elle en était la finalité ? Quels sont les items retenus dans la construction du dossier social informatisé ? Sur quoi les concepteurs ont-ils buté ? Y a-t-il des éléments qui n’étaient pas pensé initialement qui sont apparus au cours de la phase d’élaboration ? Qu’ont-ils découvert au cours de la phase de mise en œuvre du dossier informatisé ? Maintenant : Y a-t-il un dossier social ouvert pour chaque nouveau suivi ? ‐ Si non, quels sont les critères pour ouvrir un dossier social ? ‐ Descriptif du dossier social ? (Sachant que l’outil aura été présenté) ‐ Quels sont les éléments renseignés à chaque dossier ? ‐ Y a-t-il des particularités pour certains dossiers ? Comment sont recueillies les informations notées dans le dossier social ? ‐ Quelles informations sont partagées ? Avec qui ? Dans quelle(s) condition(s) ? 122 ANNEXE 2 : Guides d’entretien Qui saisi les informations ? ‐ Qui a accès aux informations ? Qu’est-ce qui est communiqué à l’usager à propos de son dossier ? ‐ Quel accès a-t-il au dossier le concernant ? ‐ Quelle(s) autre(s) personne(s) que l’usager a/ont accès au dossier social ? Comment se clôture un dossier social ? Quels sont les avantages, maintenant repérés, du dossier informatisé par rapport au dossier papier ? ‐ Quels sont les inconvénients, maintenant repérés, du dossier informatisé par rapport au dossier papier ? Perspective du dossier unique : quelle perception ? Crainte ? Intérêt ? Du point de vue des personnes utilisatrices n’ayant pas participé à l’élaboration du dossier social informatisé : Selon vous, comment le dossier social informatisé a-t-il été élaboré et par qui ? Quelle est votre perception de la ligne directrice de la conception du dossier social informatisé ? Quels sont les items retenus dans la construction du dossier social informatisé ? Commentaires sur ces items : Pertinence ? Si c’était à refaire ? ‐ Quels sont les éléments renseignés à chaque dossier ? ‐ Y a-t-il des particularités pour certains dossiers ? Y a-t-il un dossier social ouvert pour chaque nouveau suivi ? ‐ Si non, quels sont les critères pour ouvrir un dossier social ? Comment sont recueillies les informations notées dans le dossier social ? ‐ Quelles informations sont partagées ? Avec qui ? Dans quelle(s) condition(s) ? 123 ANNEXE 2 : Guides d’entretien Qui saisi les informations ? Qui a accès aux informations ? (Développer : Patient, entourage, soignants…) Comment se clôture un dossier social ? Qu’est-ce qui est communiqué à l’usager à propos de son dossier ? ‐ Quel accès a-t-il au dossier le concernant ? ‐ Quelle(s) autre(s) personne(s) que l’usager a/ont accès au dossier social ? Sur quoi les utilisateurs ont-ils buté/ butent-ils dans son utilisation ? ‐ Qu’ont découvert les utilisateurs au cours dans la phase de mise en œuvre du dossier informatisé ? ‐ Y a-t-il eu des ajustements ? Si oui, lesquels ? Si non, pourquoi selon vous ? Quels sont les avantages, maintenant repérés, du dossier informatisé par rapport au dossier papier ? ‐ Quels sont les inconvénients, maintenant repérés, du dossier informatisé par rapport au dossier papier ? Perspective du dossier unique : quelle perception ? Crainte ? Intérêt ? Du point de vue des représentants des usagers Présenter le dossier social, ses modalités au sein du service social du CHU de Nantes. Au cours de l’accompagnement social, un dossier est constitué par les assistants sociaux : ‐ Comment percevez-vous cela ? ‐ Quel sens donnez-vous à la constitution d’un dossier social dans l’accompagnement d’une personne hospitalisée ? Quels types de renseignements vous semble-t-il important de laisser dans un dossier social? Pourquoi ? Quels types de renseignements vous semble-t-il important de ne pas laisser dans un dossier social? Pourquoi ? Vous parait-il pertinent que ce dossier « suive » le patient au cours de son hospitalisation s’il change de service ? (AS différente selon les services) Vous parait-il pertinent que ce dossier « suive » le patient au cours de ses différentes hospitalisations, quelques que soient les services de soins ? Pensez-vous que le dossier social doit-être considéré différemment quand il est sous forme papier ou informatique ? Si non pourquoi ? Si oui, quelle(s) différence(s) ? 124 ANNEXE 2 : Guides d’entretien Selon-vous, y a-t-il des échanges entre les assistants sociaux et les soignants ? Qu’en pensezvous ? En fin d’accompagnement social à l’hôpital, comment concevez-vous la clôture d’un dossier? (Ex : c’est l’affaire de l’As ? Le contenu du dossier devrait-il être revisité par l’usager et l’AS ?...) 125 ANNEXE 3 : Entretiens CHU de BREST 10 et 11 Janvier 2008 1 Cadre du service social depuis 2001. Etait précédemment en poste comme assistante social au CHU de Brest au centre de soins pour Toxicomanes, où le dossier social informatisé, n’était pas en place. Ce service était un peu externe au reste du service social. N’a pas participé à la phase d’élaboration. L’a suivi à distance, lors des réunions de service. 2 Assistante sociale. Exerçait en psychiatrie au moment de l’élaboration du dossier social informatisé. Actuellement en poste au centre d’accueilprécarité et à l’urgence où a été mis en place il y a un an environ un dossier patient unique avec un espace « assistante sociale ». Site de Morvan. 3 Assistante sociale : jeune professionnelle en poste au CHU de Brest depuis mai 2007. Y avait été précédemment stagiaire. Courte expérience au CH de Quimper. Exerce sur des secteurs de MCO, à mi-temps sur 2 sites : Morvan et La Cavale Blanche. 4. Secrétaire auprès de l’encadrement du service social et des assistantes sociales du site de Morvan. Etait présente au moment de l’élaboration du dossier social informatisé. S’est beaucoup impliquée notamment dans la constitution des « bibliothèques » de données. Gère aujourd’hui les habilitations et les requêtes concernant les statistiques. Assure la formation du logiciel Social + auprès des nouveaux professionnels intégrant le service social et auprès des stagiaires. 5 Assistante sociale au CHU de Brest depuis 1996. Lorsqu’elle est arrivée, l’outil était finalisé mais pas en place sur le site où elle travaillait (Bohars). A travaillé précédemment en polyvalence de secteur dans d’autres départements. Exerce sur plusieurs sites en soins de suite et soins de longue durée. 6 Assistantes sociales en psychiatrie (site de Bohars). Exercent au CHU de Brest respectivement depuis 1983 (d’abord en secteur de MCO) et 1988 (actuellement en inter-secteur d’addictologie). 7 Assistante sociale au CHU de Brest en psychiatrie depuis 2003. A une expérience professionnelle variée. A exercé précédemment comme Coordinatrice gérontologique à la ville de Brest, d’où elle a suivi l’élaboration du dossier social informatisé et s’en est inspiré pour créer son propre dossier informatisé. Travaille sur 1 secteur de psychiatrie et un secteur de gérontologie. 8 Cadre de santé, infirmière depuis 35 ans. Détachée sur la mission IPS : Informatisation Du Processus de Soins. 126 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens Le dossier patient informatisé qui va inclure le dossier social va permettre, j’espère, d’avoir des stat plus fines, par unité de soins. Il y a aussi l’offre et la demande, la sensibilisation des services aux pb sx, enfin, il y a plein de choses qui rentrent en ligne de compte. Philo d’IPS : Etre plus efficient dans sa compétence. Au niveau du contenu, il sera peut-être à retravailler mais, avec une zone partagée selon des droits et une zone confidentielle. Cela n’empêche pas les échanges verbaux, dans les staffs ou de manière informelle. Nous, service social, on a été associé dès la conception du projet. Pour nous, le fait d’avoir eu le dossier social informatisé, c’était un atout. En pointant les points positifs et ceux qui étaient à améliorer. Et dans ce nouveau projet, le dossier social serait toujours considéré comme un dossier de spécialité. Méthodologie des transmissions ciblées : les AS pourront regarder les éléments liés à l’autonomie, l’évolution …Avec la pratique les AS sauront où aller regarder. 1 Quand on a travaillé sur les transmissions ciblées, on a bien vu qu’il y avait des choses où on n’a rien à voir, mais dès qu’on était dans autonomie, comportement, tout de suite… (Mme G. les AS iront voir là. Les AS n’auront plus besoin de rapatrier les informations administratives dans leur dossier social. Il suffira d’aller sur le portail du patient et d’aller activer par exemple sécu, mutuelle, …) et nous on aura des informations complémentaires dont on a besoin par exemple n° CAF, les infos administratives dont on a besoin mais dont le service des admissions n’a pas besoin. (Compatibilité des différents logiciels) Dans le précédent projet, c’était clivé. A propos des connexions extérieures : Si un jour,comme pour les médecins , il y a des dossiers partagés, si c’est pareil pour les services sociaux, je me disais , notre dossier fait partie du dossier patient, et un service social extérieur n’aura pas accès au dossier patient. A moins qu’on imagine une zone d’accès. Mais, je ..ça pose question …. Je ne suis pas sûre que … Il y a qchose d’assez dissuasif aussi, c’est aussi que si qq’un va consulter un dossier , il y a une trace : on sait qui a été consulter le dossier. Garantie pour éviter que les 127 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens gens aillent consulter pas curiosité. Normalement quand le dossier patient prendra forme, tous ces petits logiciels devraient disparaitre, pour qu’il y ait des passerelles entre les dossiers. Actuellement chacun travaille dans son coin un outil informatique. La réflexion menée dans le groupe était très intéressante : cela a soulevé beaucoup de problèmes ; Chacun a des exigences qui ne sont pas partagées par tous. : ce ne sont pas les mêmes pour les médecins Et c’est là qu’on voit la différence entre les métiers. …Sur la notion de confidentialité cela repose plein de pb éthique qui étaient débattus. Les reflexions étaient très différentes selon les professionnels. Moi, j’ai participé aux reflexions avec les cadres, puisque on devaient lancer la phase d’évaluation, sur le site de SLD, pour démarrer le projet qui devait être test et là, ils étaient plus dans l’organisation . Et là il n’y avait aucun souci. La dimension éthique était complètement exclue. On était dans l’organisation, le pratique. Et c’est là qu’on voit la difference entre les métiers. On peut faire la meme chose … quand une cadre nous dit “mais bon, une assistante sociale “ par rapport à moi, qu’est-ce qu’elle fait de plus? “ Elle a un autre aspect du pb, une autre façon de voir les 5 choses. On n’est pas dans l’organisation. Le cadre il est dans sa sortie d’hôpital, point/barre. Nous on n’est pas dans cette dimension là. Tout ça se joue là. Par rapport à la difficulté d’accès aux dossiers de soins papier: pertinent d’aller vers un dossier unique informatisé. Ce qui est nécessaire et transmissible… on fait partie de l’équipe de soins, on est aussi une aide à la décision des médecins. On le voit peut-être plus sur la gériatrie, les médecins gériatres vont tenir compte du contexte social pour prendre une décision: ils ont besoin des éléments qu’on peut apporter. On est là pour aider la personne et cela fait partie de l’aide à la personne que de fournir au médecin les éléments pour comprendre la situation. Il est arrive que certains éléments n’ai pu être transmis, par écrit faute d’accès au dossier, et que cela est représenté une gène à la décision, notamment une décision qui n’est pas adaptée. Projet de dossier unique avec une zone partagée permettrait d’améliorr les relations avec les services de soins, la prise en charge du patient et améliorer notre fonctionnement. Avoir un dossier bien défini avec une partie où les services de soins iront et notre partie nous. On aura répondu à leur demande et on sera plus à 128 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens l’aise pour notre partie à nous. Social+ comme ça , je me dis que c’est un dossier galvaudé. Le dossier va être amené à changer parce qu’il y aura un dossier unique un jour ou l’autre, avec pour nous une spécificité service social qui restera propre. Il faudra que les choses soient bien claires entre ce qui est transmissibles et ce qui ne l’est pas. On a déjà travaillé à cela. On a fait plusieurs fois des groupes là-dessus. 6 Il faudrait reparler avec les collègues : qu’est-ce qu’une évaluation sociale et qu’est-ce qu’on met dans le dossier et qu’est-ce qui est utile à l’autre. L’éthique par rapport aux familles, aux patients, ce qu’on met, qu’on ne met pas dedans. Et il n’y a pas que ça …l’évaluation sociale en fait. On est assez ambitieux, on a beaucoup de créativité et on a une vraie volonté de travailler ensemble, car souvent c’est assez clivé. Il y a eu toute une réflexion, sur la fameuse notion de secret partagé, de choses sur l’information accessible aux uns et aux autres et c’est vrai que l’informatique va ns permettre de pouvoir laisser les droits à chacun, des droits suffisants pour que chaque utilisateur puisse travailler dans les meilleures conditions pour le patient. C’est toute la philosophie d’IPS. Et donner réellement du sens à l’équipe pluridisciplinaire c'està-dire on intervient tous et on est tous centré sur la même chose qui est le patient, qui est là. Que ce soit à tous les niveaux, qu’il y ait un vrai partenariat. On a eu une expérience qui n’a pas été très heureuse puisque cela n’a pas abouti, mais on est très 8 optimiste puisque la nouvelle solution va effectivement nous permettre de construire l’outil dossier social tel que vous l’avez défini. En sachant que certaines informations que les infirmières recueillent de manière un peu systématique et automatique seront effectivement aussi partagées. L’idée c’est d’éviter au patient de dire dix fois les mêmes choses, de réactualiser bien sûr l’information. Si le patient dit qu’il a une aide-ménagère qui passe deux fois par jour, ce n’est pas la peine que l’assistante sociale aille lui reposer la question, puisqu’elle l’aura immédiatement l’information. C’est un vrai partage de l’information. Cela part du recueil de données infirmières. Et aussi par rapport à la sortie du patient, parce que ce sont effectivement des moments forts où le service social est très impliqué, l’entrée et la sortie du patient sont des moments-clé, où le partenariat est très …physiquement 129 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens proche. Et on veut essayer de remédier à certains dysfonctionnements et améliorer le retour à la maison ou la sortie du patient, quelque soit le lieu où il ira…grace finalement à ce partage d’informations suffisantes pour que chaque professionnel puisse faire au mieux pour le patient. Les staffs, cela se fait maintenant de manière systématique. C’est vrai qu’avec les cadres, ce sont des habitudes de fonctionnement qui sont en train de se développer, des staffs hebdomadaires ou bi-hebdomadaires quelquefois plus fréquemment selon les besoins, qui nous permettent de faire le tour des patients, de repérer, grâce au recueil de données des infirmières, s’il y a des situations à risque ou problématiques. Un travail autour de ce staff, travail en concertation pour mettre en place les solutions les plus adaptées, contacter les familles. Il y a un bon travail ensemble et j’aime bien cette idée. C’est pour ça que j’aime IPS, c’est parce que on est dans la logique de travailler ensemble pour prendre soin de la personne. Dans le projet d’informatisation, je suis la représentante de tous les par-médicaux et l’assistante sociale est par la force des choses une para-médicale. D’emblée, il y avait cette volonté, parce qu’il y avait déjà un existant, d’inclure le service social, parce que c’est complètement la philosophie d’IPS. La construction du cahier des charges était bien de centrer tous les acteurs autour du patient : on est vraiment dans cette logique là. Ma mission c’est bien, c’est pas toujours évident, j’essaie au moins de ….de faire participer et surtout d’entendre et de tenir compte des remarques de tous pour que chacun puisse travailler en harmonie, puisqu’on aura un dossier unique. L’idée c’est bien d’avoir un dossier unique partagé, en fonction après des droits de chacun, des droits de lecture, des droits de création, des droits de consultation … ce sera en lien avec les droits et les habilitations. Le dossier social sera considéré comme un dossier de spécialité. Il n’y en aura pas besoin pour tous les patients et ce sera quelquechose qui va être construit comme un dossier de spécialité, un document qui sera activé à partir du moment où il y aura besoin. Il n’y aura pas un dossier social dans tous les dossiers informatisés. Il y en aura un selon que le patient ou la situation….Le recueil de données que fait l’infirmière, quand arrive le patient doit alerter …après il y a les situations médicales, tout un tas de situations où on va dire…le retour à la maison n’est pas possible, ou au moins tel que c’est organisé, il faut revoir …C’est aussi en lien avec la pathologie, en concertation avec les médecins…C’est vrai que c’est un travail ensemble. Mais suivant la situation, il y aura un système de portail où elles 130 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens pourront aller chercher l’onglet. Une fois qu’il sera activé, il restera dans la synthèse du dossier patient. Cette synthèse du dossier patient suivra le patient. On saura si le service social est intervenu ou pas. On pourra avoir un historique de ce qui s’est passé, toute la trace des évènements qu’il y a eu autour. On pourra consulter l’antériorité. Aujourd’hui on a travaillé sur les droits avec ce nouveau logiciel : On peut filtrer complètement les droits, c'est-à-dire par exemple, si l’aidesoignante ouvre un dossier patient, elle n’aura même pas la vision qu’il existe un dossier social, parce qu’à priori, elle n’a aucune raison …C’est un exemple pour dire qu’on peut choisir en termes de droit. Si on le souhaite, on peut très bien dire que l’aide-soignante ou l’ASH, à partir du moment où elle est loguée, ou elle rentre et elle est identifiée dans l’informatique, elle n’aura pas accès par exemple à certaines informations par exemple médicales, à certaines… et elle ne saura même pas que ça existe. Elle n’aura la possibilité d’accéder qu’au champ et aux choses dont elle a les droits. Chaque profil aura des droits propres. Par exemple, accès au compte rendu de sortie, mais pas tout le dossier médical. D’où l’intérêt de l’informatique : on peut aller jusqu’à cette finesse. Ce logiciel va le permettre. Il y a la confidentialité, il y a plein de choses dont il faut tenir compte. D’abord on va gagner du temps et on ne va pas demander de répéter au patient ou aux parents, qui sont souvent anxieux, dix fois les mêmes choses. On améliore de toute évidence. (…) Les patients arrivent à l’hôpital par différentes portes d’entrée. Et svt les logiciels des urgences sont dans une certaine logique , demandé par le ministère, de gestion des flux surtout, parce que c’est important de savoir combien de personnes, les vitesses…s’ils restent longtps, si c’est des passages…parce qu’il y bcp de stats autour de ça. Très peu sont hospitalisés finalement. Le contexte sanitaire est tel que, quand ils ont un pb avec leur gamin, ils viennent aux urgences, sinon ils vont faire le tour de la ville pour trouver un médecin disponible. Il y a aussi une modification des comportements des gens, ce qui fait qu’il y a bcp de passages. Et très peu qui sont hospitalisés. Mais il y en a qq’uns et pour ceux là… ils sont en train de paramètrer les éléments que j’ai communiqués, qui avaient été réalisés par l’équipe de pédiatrie à partir des infos nécessaires : macrocibles d’entrée pour le secteur enfants, enfin tout ce dont elles ont besoin pour accueillir un enfant. De la même manière, le partenariat avec les AS apparaitra de la même manière. Pour les urgences adultes, à terme, pas aujourd’hui, car ce logiciel est récent, 131 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens il n’a pas un an. Il n’y a pas assez de recul. Cela demande un travail titanesque. Ce n’est pas fini. Il y a eu un pb. Ils ont du suspendre, interrompre, ils vont recommencer avec une version corrigée...Donc ils ne sont pas prêts à remettre en question certaines méthodes qu’ils ont …C’est tjs pareil, ce que l’on décide quand on décide dans un établissement, dans un CHU du mode de prise en charge que l’on veut mettre en place... c’est pas qqchose qui est figé, c’est qqchose qui est dynamique. Il y a trois ans quand ils ont commencé à paramétrer Urcal adultes, on en n’était pas au même stade qu’aujourd’hui par rapport à la réflexion sur les outils que le CHU voulait mettre en place. On avance. Et je pense que dans trois ans cela évoluera encore. Le lien Urcal adultes/services de soins c’est pas encore gagné actuellement. C’est trop frais. Mais de toute manière le dossier de soins informatisé n’est pas encore arrivé dans les unités de soins. Il est à l’état d’ébauche. On se dit ... il y a le temps, aussi. C’est un élément dont il faut tenir compte. Dans trois ans, Urcal-adultes fera la démarche de modifier ses paramètres pour fonctionner comme va fonctionner la pédiatrie. S’intégrer complètement et inscrire la prise en charge du patient qui va est hospitalisé dans la continuité. Ca laisse le temps de faire les choses. 132 ANNEXE 4 : Extraits d’entretiens Entretien ‐ UNANFAM Loire-Atlantique 28.05.08 Importance du dossier social. Les soins sont indissociables d’autre besoins que sont le logement, les ressources, l’accompagnement social et éventuellement des mesures de protection juridique, des mises en situation de travail si possible. Il y a une probabilité de rechute s’il n’y a pas d’accompagnement sur les quatre premiers points. Une personne n’est pas « « découpable » en tranche. Il y a lieu de prendre en compte les problèmes de précarité, d’insalubrité ….. ‐ En termes de prise en charge et de dossier de compensation, le dossier social permet la réflexion. Le dossier social se constitue à partir du recueil d’informations nécessaires à l’ouverture de droit. ‐ L’informatisation du dossier social renvoie plus à un problème de gestion de l’information et de la communication interne. ‐ La confidentialité apparait comme un grand tabou, mais elle s’arrête à partir du moment où elle porte préjudice aux personnes. La confidentialité a du sens jusqu’à un certain point. Elle ne doit pas être contre-productive à l’accès aux droits. ‐ Quels éléments ne devant pas apparaitre dans le dossier social ? ‐ Les éléments de vie privée, les choix de vie sans lien avec la pathologie : par exemple : la religion, l’homosexualité ‐ Dossier social unique a du sens pour les personnes qui peuvent être en difficulté pour redonner des éléments de leur histoire, de leur situation de façon identique. ‐ Il y a de la confidentialité entre les soignants et les patients ; ‐ Clôture du dossier ? ‐ Il y a une alliance entre le professionnel et le malade. ‐ Les informations sont données en concertation avec l’entourage du malade, notamment en fin de prise en charge, en ce qui concerne les dispositions après l’hospitalisation et les modalités de suivi après la sortie. ‐ Le bilan social est indispensable, voire déterminant dans la constitution de certains dossiers comme les dossiers MDPH. En accord avec le patient et dans son intérêt des informations peuvent être transmises par l’assistant social à d’autres institutions. Les familles ne se substituent pas au service social. L’UNAFAM oriente les familles vers le service social. 133 ANNEXE 5 : Charte de l’utilisateur du dossier social informatisé de BREST 134 ANNEXE 6 : Acte réglementaire relatif au dossier social informatisé CHU de BREST 135 ANNEXE 6 : Acte réglementaire relatif au dossier social informatisé CHU de BREST 136 ANNEXE 6 : Acte réglementaire relatif au dossier social informatisé CHU de BREST 137 ANNEXE 6 : Acte réglementaire relatif au dossier social informatisé CHU de BREST 138 ANNEXE 7 : Impressions d’écran du dossier social informatisé du CHU de BREST 139 ANNEXE 7 : Impressions d’écran du dossier social informatisé du CHU de BREST 140 ANNEXE 7 : Impressions d’écran du dossier social informatisé du CHU de BREST 141 ANNEXE 7 : Impressions d’écran du dossier social informatisé du CHU de BREST 142 ANNEXE 8 : impression d’écran du dossier social informatisé des Hôpitaux civils de LYON 143 ANNEXE 9 : impression d’écran du dossier PASS – CHU de NANTES 144 ANNEXE 10 : fiche « structure du dossier patient » ‐ CHU de NANTES 145 ANNEXE 11 : fiche « recueil de données administratives » ‐ CHU de NANTES 146 ANNEXE 12 : fiche «synthèse de soins » ‐ CHU de NANTES 147 ANNEXE 13 : fiche « synthèse de sortie » ‐ CHU de NANTES 148 ANNEXE 14 : « fiche transmission des informations choix du patient » ‐ CHU de NANTES 149 ANNEXE 15 : « Feuille de transmission par cible » ‐ CHU de NANTES 150 ANNEXE 16 : « Feuille de dépôt d’initiales » ‐ CHU de NANTES ‐ 151 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 152 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 153 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 154 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 155 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 156 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 157 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 158 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 159 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 160 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 161 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 162 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 163 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 164 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 165 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 166 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 167 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 168 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 169 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 170 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 171 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 172 ANNEXE 17 : Conférence de consensus « sortie du monde hospitalier » 173 ANNEXE 18 : recommandations de la CNIL 174 ANNEXE 18 : recommandations de la CNIL 175 ANNEXE 18 : recommandations de la CNIL 176 Mémoire présenté pour l’obtention du Master Professionnel Ingénierie et Gestion des Interventions Sociales et du Diplôme d’Etat d’Ingénierie Sociale, session d’octobre 2008 – Université de Nantes. Auteur : HALLIEN Claire Titre : LE DOSSIER SOCIAL INFORMATISÉ : UN OUTIL DE MANAGEMENT STRATÉGIQUE POUR LE SERVICE SOCIAL HOSPITALIER. Tuteur : LAMENDOUR Eve Le secteur de la santé est actuellement en pleine mutation. Dans ce contexte, la question du partage d’information à l’hôpital est réactivée avec la mise en œuvre du dossier patient unique et la réaffirmation de la place de l’usager au cœur des prises en charge. Au-delà de ses aspects techniques, l’élaboration du dossier informatisé interroge le sens du travail en équipe pluridisciplinaire d’un point de vue éthique. De même cette démarche, pour le service social hospitalier inscrit dans une culture sanitaire et sociale, renforce les réflexions sur son positionnement institutionnel. Après avoir situé en introduction les évolutions dans le champ de la santé et leurs impacts sur les organisations hospitalières, la première partie présente le dossier patient. En s’appuyant essentiellement sur les entretiens réalisés auprès de professionnels du CHU de Brest, la seconde partie développe les questions liées au dossier social. La troisième partie cherche à mettre en évidence l’articulation entre le soin et le social et interroge la place de l’information sociale dans la prise en charge médicale. C’est au regard de cette approche que le dossier social informatisé pourra apparaître comme une composante du management stratégique. Ceci nous amène à proposer des recommandations pour l’encadrement du service social. L’auteure est actuellement responsable-adjointe du service social hospitalier du CHU de Nantes. Mots-clés… Mots-clés… Mots-clés… Mots-clés… Mots-clés… Mots-clés… Dossier patient unique – Dossier social – Ethique – Equipe pluridisciplinaire - Informatique – Management stratégique - Partage d’information – Place de l’usager – Projet de soins – Secret partagé -Secret professionnel.