Méthode – Terminales S1 S2, Lycée Montchapet, Dijon.
M. BOULANGER.
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La dissertation de philosophie
en 12 questions !
SOMMAIRE :
1. Que me demande-t-on de mettre dans ma dissertation ? ...........................................1
2. Comment puis-je éviter le hors-sujet ? .....................................................................1
3. Mais cela consiste en quoi un problème ?.................................................................2
4. Que dois-je mettre dans mon introduction ? .............................................................3
5. Qu’est-ce que c’est, une thèse? ................................................................................4
6. Comment utiliser les auteurs ? .................................................................................4
7. Faut-il donner des exemples ? Lesquels ?.................................................................4
8. Est-ce qu’il faut chercher à être original vis-à-vis des autres copies?........................5
9. Est-ce que je peux donner mon avis dans une dissertation ? .....................................5
10. Vais-je recevoir une mauvaise note si je ne dis pas ce que pense le correcteur ?.....5
11. Faut-il faire des transitions ? ..................................................................................6
12. Comment faut-il écrire ? ........................................................................................7
Épilogue : Faut-il répondre à la question posée? .............................................................7
1. Que me demande-t-on de mettre dans ma dissertation ?
Vu de l’extérieur, une dissertation représente 6 à 12 pages (quatre pages est un minimum
absolu ; nota 1 copie double = 4 pages), avec une introduction (environ 10 à 20 lignes), un
développement de 2 à 4 parties et une conclusion (environ 5 à 15 lignes). Le format conseillé
est de 3 parties. Vous sauterez 2 lignes après l’introduction et avant la conclusion, et 1 ligne
entre les parties du développement. Vous ménagerez des paragraphes dans vos parties,
marqués par un retour à la ligne et un alinéa.
Vu de l’intérieur, ce qu’on vous demande est simple : il faut répondre au sujet posé :
1/ en mettant au jour un problème (dans l’introduction),
2/ en proposant différentes thèses pour le résoudre (autant de thèses que de parties
dans le développement), organisées non de façon juxtaposées mais selon une progression.
3/ en défendant chaque thèse de façon raisonnée par des arguments qui s’appuient sur
des références et des exemples (les paragraphes des parties)
4/ en apportant enfin une réponse au problème de départ, après avoir dressé un court
bilan du développement (en conclusion).
2. Comment puis-je éviter le hors-sujet ?
Il faut :
1/ lire très attentivement le sujet au départ – chaque mot compte ! – et ne pas lui substituer
un autre sujet proche. Par exemple : au lieu de traiter le sujet « Pourquoi l’homme peut-il
désirer l’inconscience ? », le remplacer par le sujet « Peut-on désirer l’inconscience ? »,
« Qu’est-ce qu’un désir inconscient ? » ou pire « Pourquoi l’homme a-t-il des désirs ? »
2/ demandez-vous toujours, pendant que vous écrivez, si vous répondez à la question qui
est précisément posée. Si vous avez bien fait votre travail, les choses s’enchaînent toutes
seules : votre problème traite le sujet, vos thèses répondent au problème, et chaque paragraphe
argumente la thèse. Et donc vos paragraphes ne sont pas hors-sujet !
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3/ ne pas transformer le sujet « Qu’est-ce que A ? » ou « Pourquoi A ? » en « Que vaut
A ? ». Cela veut dire qu’il ne faut pas juger, mais analyser (pour ensuite démontrer).
4/ viser à traiter tout le sujet : cela veut dire qu’il ne faut pas laisser de côté certains
aspects essentiels. Il faut veiller à ne pas trop restreindre votre devoir à quelques cas isolés.
3. Mais cela consiste en quoi un problème ?
Le problème c’est cette difficulté qui fait qu’il est impossible d’apporter une réponse
directe et simple à la question posée.
Observez la différence entre ces trois questions :
1. Qui fait les lois en France ?
2. A-t-on le droit de contester les lois ?
3. Qu’est-ce qu’une « association loi 1901 » ?
Demandez-vous laquelle contient un problème. Pour cela, cherchez celle qui n’accepte
pas de réponse simple et directe.
C’est une question sur laquelle on est forcé de prendre une position tranchée, tout en
sachant que l’on s’exposera alors à d’autres positions qui seront en désaccord avec la nôtre.
Mais alors les problèmes ne feraient qu’engendrer une opposition stérile d’avis subjectifs et
relatifs !? Non, on peut éviter cela en donnant des raisons solides à plusieurs thèses adverses
et en les envisageant honnêtement les unes après les autres. C’est exactement cela, l’exercice
de la dissertation : plusieurs parties, des arguments pour chacune d’elles, et des transitions
entre les parties.
La bonne réponse est : la question n°2. Mais quel est le problème, alors dans « A-t-on
le droit de contester les lois ? » Exemple de problématisation en introduction :
Une loi consiste en l’édiction d’une règle de conduite. Par exemple le commandement : « tu ne
tueras point ». La loi dit ce que l’on a le droit et pas le droit de faire [définition de A]. Contester consiste
à exprimer un désaccord, soit dans les mots, soit dans les gestes : c’est enfreindre, en pensées ou en
actes, une règle posée [définition de B]. À partir de , parler de « droit de contestation des lois »
contient un paradoxe : cela revient à faire une loi qui prévoit et autorise sa propre infraction. Cela a
pour conséquence l’anarchie. Pourtant il y a bien nécessité à ce que les lois soient contestées, sans quoi
il n’y aurait aucun progrès politique, et nous vivrions toujours sous les premières lois humaines de
l’Histoire. Le problème est donc le suivant :
d’un côté un « droit de contestation des lois » est impossible, car une loi se nie elle-même si elle
autorise sa propre infraction,
de l’autre côté le progrès des institutions dans l’Histoire rend cessaire un droit de contestation
des lois.
Ainsi : comment le droit peut-il autoriser sa propre infraction ?
[NOTA BENE : Il y a problème car les deux branches ne peuvent être vraies simultanément : une
chose ne peut pas à la fois être impossible et nécessaire.]
Comment m’y prendre pour trouver le problème au brouillon ?
Voici les étapes d’une méthode possible :
a. Cherchez quelques exemples le sujet se pose avec pertinence, et indiquez
cette pertinence par une courte analyse. Notez éventuellement certaines
idées, remarques ou références associées à ces exemples. Vous obtenez une
page de brouillon avec 10 à 20 “tirets”, chaque point est développé en
maximum 2 lignes.
b. À partir de ces exemples, dégagez plusieurs définitions sommaires des
concepts principaux du sujet. Isolez des caractéristiques dans vos
définitions qui entrent en contradiction les unes avec les autres (par exemple
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la loi défini comme A entre en contradiction avec la contestation définie
comme C).
c. Et, dans le même temps, regroupez ces “tirets” par “paquets” correspondant
aux définitions sommaires. Vous pouvez éventuellement éliminer certains
“tirets” que vous jugez non pertinents.
d. Dégagez alors les positions tranchées que ces définitions sous-tendent.
C’est simplement parce que l’on comprend différemment les mots que l’on
est en désaccord, que l’on aboutit à des positions incompatibles. (La
philosophie permet de savoir ce que veulent dire les mots, ces mots qui
structurent notre pensée et notre conduite dans la vie.)
e. Recherchez enfin le bénéfice et la limite de chaque position : bref ce qui
nous pousse à la soutenir ou ne pas la soutenir. (Ces positions et ces limites
vous aideront à bâtir votre plan et vos transitions).
f. Formulez un problème à partir des tensions que vous avez dégagées.
Vous tenez alors, si tout va bien, votre problématique (= le problème, une fois
décortiqué) :
D’un côté, si l’on définit tel(s) terme(s) ainsi [étape b. définition 1], alors on peut
dire que [étape d. position 1] mais alors [étape e. limite 1]. D’un autre côté, si l’on
pose comme critère de… [étape b. définition 2], alors on peut soutenir que [étape d.
position 2] mais dans ce cas … [étape e. limite 2].
Ceci n’est qu’une façon de poser le problème : sous la forme d’une alternative (soit…
soit… ).
Vous pouvez alors annoncer votre plan en prenant éventuellement une version
améliorée de la première branche de l’alternative comme première partie.
4. Que dois-je mettre dans mon introduction ?
Elle doit posséder trois parties :
a. Amorce
b. Problématique
c. Annonce du plan
Dans l’amorce, le but est de montrer que la question du sujet se pose. En bref, vous
faites plaisir à votre professeur en lui montrant que le sujet est bien choisi. Conseil : vous
prenez un cas concret (par exemple, la différence en droit entre plaider coupable et plaider
non-coupable), ou bien une citation, ou bien un élément tiré d’un savoir technique (par
exemple la communication des abeilles) ou scientifique (un fait historique, une loi
mathématique, …). Vous analysez ce morceau de réel, un peu comme un physicien le fait
avec un élément chimique. Vous en tirez les finitions et caractéristiques qui vont vous
permettre d’amener le problème. Votre amorce est vraiment réussie si elle n’a pas seulement
un lien avec le thème de votre sujet (les lois), mais avec le problème (le droit peut-il prévoir
sa propre infraction ?).
La problématique, c’est la mise en forme didactique d’un problème. C’est le problème
que l’on a déplié scrupuleusement sur une table de dissection. Exemple :
La problématique :
À partir de là, parler de « droit de contestation des lois » contient un paradoxe : cela revient à
faire une loi qui prévoit et autorise sa propre infraction. Cela a pour conséquence l’anarchie. Pourtant il y
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a bien nécessité à ce que les lois soient contestées, sans quoi il n’y aurait aucun progrès politique, et
nous vivrions toujours sous les premières lois humaines de l’Histoire. Le problème est donc le suivant :
d’un côté un « droit de contestation des lois » est impossible, car une loi se nie elle-même si elle
autorise sa propre infraction,
de l’autre côté le progrès des institutions dans l’Histoire rend nécessaire la contestation des lois.
Le problème que cette problématique formule de façoncortiquée est simplement :
Comment le droit peut-il autoriser sa propre infraction ?
5. Qu’est-ce que c’est, une thèse?
Une thèse c’est un avis, une position, un propos qui suscite accord ou désaccord. Elle
s’appuie sur une certaine définition des termes, qu’elle justifie par un certain nombre
d’arguments.
Exemple de thèse :
Si l’on finit le droit par la séparation des pouvoirs, on voit que le droit suppose une
contestation des lois : c’est alors que plusieurs institutions concurrentes (Sénat, Assemblée,
Ministres, Conseil d’État, etc.) exercent une contestation réciproque.
6. Comment utiliser les auteurs ?
La règle d’or est la suivante : il faut se servir des auteurs et ne pas les servir. Cela
correspond à la règle générale qu’il ne faut jamais réciter ou décrire, mais démontrer. Vous
convoquez un auteur comme un avocat convoque un témoin à la barre. Mais ce n’est pas vous
qui vous mettez à réciter sa doctrine, sinon c’est que vous le servez.
Mais dois-je connaître par cœur des citations ? Une citation est souhaitable et
conseillée, mais l’important est de connaître un texte précis et surtout de savoir le ré-
expliquer : comme vous avez su le faire pour Leibniz (les perceptions insensibles et l’exemple
de la mer) dans vos travaux.
Combien faut-il d’auteurs dans ma dissertation ? Le minimum est : un auteur par
partie.
7. Faut-il donner des exemples ? Lesquels ?
Bien sûr qu’il faut fournir des exemples à vos arguments. Vos exemples, ce sont vos
munitions pour nourrir votre démonstration. Or ce qui fait la force d’un exemple, c’est :
1/ sa valeur démonstrative. Or plus un exemple est universel et bien connu, plus il est
démonstratif. Il faut donc prendre à la fois un “échantillon représentatif” du réel, et un
élément accessible à tous, issu de la culture générale. Cela fait que vous ne prendrez pas
d’exemple dans votre vie personnelle, ou relevant d’un univers trivial, lycéen, trop quotidien.
Une bonne façon d’être à la fois concret et universel, c’est donc de prendre des exemples
ciblés dans la culture générale, qu’elle soit scientifique, historique ou artistique.
2/ qu’il concerne précisément votre sujet, qu’il tombe “pile”. L’écueil numéro 1
lorsque vous utilisez un exemple, c’est de vous prendre tellement au jeu que vous oubliez la
thèse qu’il doit défendre. Évitez de raconter, de décrire, de réciter. Mais analysez en vue de
démontrer.
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8. Est-ce qu’il faut chercher à être original vis-à-vis des autres
copies?
Oui c’est une bonne chose pour augmenter votre note. MAIS n’essayez jamais d’être
original par la façon dont vous écrivez : écrivez toujours de façon sobre, évitez les envolées
lyriques. Recherchez surtout l’originalité dans les savoirs que vous convoquez. Par exemple
en faisant appel à la loi de Moore en informatique, qui stipule que la puissance des micro-
processeurs double tous les dix-huit mois; ou bien en opposant le critère moderne du vivant,
la possession d’un code génétique, d’une définition classique : est vivant ce qui peut croître et
dépérir. Vous pouvez aussi rechercher l’originalité dans votre façon de démontrer. Vous
pouvez mobiliser un contre-exemple (citer le cas du prion, comme celui dit de la « vache
folle » : le prion est une simple protéine, c’est bien quelque chose de vivant, mais qui ne
possède pas de code génétique). Vous pouvez faire une démonstration par l’absurde (c’est-à-
dire en démontrant l’impossibilité de la thèse adverse : on prouve A en montrant que non-A
est impossible). Vous pouvez encore, et c’est excellent, envisager tous les cas possibles,
comme Épicure (340-270 av JC, philosophe antique matérialiste qui fonda l’École qui porte
son nom), qui critique l’idée qu’un Dieu existe par l’argument de l’existence du mal :
Fragment 374 :
Dieu ou veut éliminer le mal et ne le peut, ou le peut et ne le veut, ou ne le veut ni ne le peut, ou
le veut et le peut. S’il le veut et ne le peut, il est impuissant, ce qui ne convient pas à Dieu. S’il le peut
et ne le veut, il est méchant, ce qui est étranger à Dieu. S’il ne le peut ni ne le veut, il est à la fois
impuissant et chant, il n’est donc pas Dieu. S’il le veut et le peut, ce qui convient à Dieu, d’où vient
donc le mal ?
En somme : la bonne originalité consistera dans la finesse de la thèse que vous
envisagez, dans ce que vous savez, et dans votre manière de démontrer, et non pas dans votre
écriture ou par des idées extravagantes.
9. Est-ce que je peux donner mon avis dans une dissertation ?
Oui, bien sûr, mais si et seulement si votre avis fait l’objet d’une démonstration
rigoureuse. Votre avis doit s’exprimer sous la forme d’une thèse raisonnée, et non sous la
forme d’une opinion subjective (« je pense que »), d’une remarque de cour de récréation.
C’est en apportant dans la conclusion une réponse tranchée au problème de départ que vous
résumez votre position sur la question posée.
Donc oui écrivez ce que vous pensez. Mais si vous restez au niveau de l’opinion, vous
n’aurez aucun point. L’opinion c’est le contraire de la thèse ou de l’idée : elle est dogmatique
(sans justification et sans auto-critique) et unilatérale (sans envisager d’autres perspectives).
Or il n’y a de la philosophie dans une copie qu’à condition de quitter le dogmatisme et
l’unilatéralisme. Les points se gagnent en démontrant et en faisant preuve d’esprit critique
(cela se traduit par le fait d’envisager honnêtement et de démontrer plusieurs thèses diverses
voire opposées).
En dépassant l’opinion, vous court-circuiterez le discours ambiant, « ce qui se dit »
dans la rue ou à la télévision, vous n’abandonnerez pas votre plume à l’opinion des autres, et
vous pourrez penser par vous-mêmes.
10. Vais-je recevoir une mauvaise note si je ne dis pas ce que
pense le correcteur ?
Non. Vous recevrez une mauvaise note :
1/ si vous ne traitez pas le sujet,
1 / 7 100%
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