dans le Jardin d`Epicure

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Moussa Youssouf Maïga
Gai savoir sur l’Epicurisme-I
La culture de l’amitié (philia) dans le Jardin d’Epicure
Essai
Editions EDILIVRE APARIS
Collection Universitaire
93200 Saint-Denis – 2012
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INTRODUCTION GENERALE
La notion de philia dans la doctrine d’Épicure est consubstantiellement
liée au vivre bien, à la vie de concorde. Plus rigoureusement, vivre en
amitié, c’est vivre dans le plaisir entendu comme vertu. Mais Épicure va
encore plus loin dans la célébration de cette philia, pour en faire un bien
excellemment supérieur à la sagesse elle-même. Car disait-il : « de tous les
biens que la sagesse procure pour la félicité de la vie tout entière, de
beaucoup le plus grand est la possession de l’amitié »1.
La question du « bien vivre » (euzen) est un souci majeur dans toute
organisation humaine, et les moyens pour réaliser cette fin dépendent en
dernière analyse de la bonne santé des institutions et surtout des
législateurs, dont leur mission est d’éduquer les citoyens. C’était là, l’échec
des institutions grecques ; et de façon similaire nous retrouvons des maux
communs dans nos États modernes. C’est donc dire que nous ne sommes
pas mieux avancés, malgré le masque que nous affichons : individualisme,
poursuite de l’intérêt personnel, la peur de l’autre très manifeste à travers
des formes telles que : l’insécurité tous azimuts (terrorisme, intolérance,
racisme, chômage, etc.), lois impopulaires ici et là, bref un long chapelet
de problèmes qui font constamment tanguer les institutions modernes ; qui
sont aujourd’hui les preuves évidentes qu’il y a un malaise ou un mal être
dans les États dits modernes, comme dans les Cités-Etats grecques.
Aujourd’hui comme hier, nous estimons que les citoyens tout comme
les institutions ont besoin de nouvelles valeurs qui puissent les rassembler
et favoriser la « bona vita » c’est-à-dire le bien vivre.
L’éthique que nous nous proposons d’introduire, dans le cadre de cette
réflexion sur la philia épicurienne, ne s’appesantit pas sur une espèce de
morale spéculative ; mais doit se comprendre plutôt comme un ensemble
de principes qu’il faut adopter ou pratiquer (au sens de praxis) en vue
1
Maxime capitale XXVII, trad. Marcel Conche, Épicure, Lettres et Maximes, Paris, PUF,
2005, p. 239.
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d’atteindre le souverain bien qui réside dans le plaisir lié à l’amitié.
Toutefois, le plaisir sur lequel nous insisterons plus amplement sera
distingué comme nous le verrons des autres plaisirs superfétatoires. Ce
plaisir spécifique sera lié indissociablement à la fréquentation, ou pour
mieux dire, à la pratique en commun de l’amitié (koinoia philia).
Mais le terme éthique, est surtout un concept que nous retrouvons chez
Aristote (le Stagirite) qui peut être considéré à juste titre comme le premier
à parler d’une êthike théoria, par exemple dans les Seconds Analytiques
(89.b-9) pour indiquer cette partie de la philosophie qui étudie la conduite
de l’homme, les critères de bases d’évaluation des comportements et des
choix (du grec êthikos, ou de êthos qui signifie comportements, coutume) 2.
Le mot éthique chez Épicure correspond dans sa philosophie
(hédoniste), à la troisième partie de son système ; aussi est-elle
architectonique par rapport à la canonique et à la physique : La Lettre à
Hérodote traite des choses de la terre, La Lettre à Pythoclès des corps
célestes, et la troisième, La Lettre à Ménécée de la conduite de la vie. La
canonique contient l’introduction à tout l’ouvrage, elle est exposée dans le
livre intitulé le Canon. La Physique comprend l’étude des choses
naturelles, elle est exposée dans les trente-sept livres sur la nature, et dans
les lettres en résumés ; enfin l’Ethique concerne les choses qu’on doit
rechercher et celles que l’on doit fuir, on la retrouve dans les livres sur les
Vies, dans les lettres et dans les ouvrages sur les fins 3. C’est donc dire que
le philosophe du Jardin n’est pas un ignorant, ni un « copiste », mais
reconnaît Diogène Laërce un grand polygraphe.
En termes clairs, pour Épicure l’homme relativement à la vie bonne et
ses agréments liés à l’amitié, ne doit pas attendre d’aide des dieux, ou de
la providence (pronoia), mais doit compter uniquement sur lui-même. Par
conséquent, la recherche du plaisir doit consister son unique sagesse en
lien avec l’étude de la philosophie. Il suit donc que l’éthique, en tant
qu’art de diriger la conduite doit avoir pour fin ultime l’absence de
trouble de l’âme. Toutefois, dans sa théorie de l’amitié, la morale est
comprise comme un ensemble de prescriptions qu’on doit appliquer en
toutes circonstances ; ce qu’il nomme les « épitomés » c’est-à-dire des
résumés de sa doctrine que les disciples doivent intérioriser. Cette morale
dont les règles reposent sur les maximes et les sentences, est donc
inséparable de l’éthique.
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Encyclopédie de la philosophie, éd. La Pochothèque, garzanti 2002.
Diogène Laërce, Vie, Doctrines et Sentences des Philosophies illustres, GF Flammarion,
1999, p. 224.
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Pour un néophyte en effet, la doctrine morale d’Épicure s’apparente
d’emblée à une théorie des plaisirs, qui n’est à exactement pas tout notre
propos, mais un élément qui lui est indissociable. Fondamentalement,
l’éthique ne saurait être compréhensible, sans son intrication à l’étude de
la physique ou de la nature (phusis). Mieux nous pouvons oser l’analogie
en montrant par là que, la connaissance de la phusis, est un organon pour
la vie bienheureuse. Le terme même de bienheureux qui a une
connotation religieuse, montre clairement l’approche divine de sa
conception du bonheur. L’exorde de La Lettre à Ménécée est déjà une
heureuse traduction de sa constante exhortation, à ne pas craindre les
phénomènes célestes et le royaume des dieux. C’est ce que son disciple
Lucrèce réaffirme en disant en substance que le philosophe du Jardin est
comparable à Héraclès, car il a dépeuplé le ciel de ses dieux ; ou pour
mieux dire, il l’a purifié : « la force vive de son âme a vaincu l’obstacle et
s’est avancée bien loin au-dehors des murs enflammés du monde ; et elle
a, de l’esprit et du cœur, parcouru tout l’espace sans limite »4. Autrement
dit, Épicure apparaît aux yeux de ses disciples comme le héros qui a brisé
les portes étroites de la nature. C’est donc dire que véritablement, lorsque
nous parlons de philia épicurienne, c’est au cœur d’une éthique pratique
que nous nous situons, car dans cette amitié a besoin comme un champ,
d’être cultivée. Par cette démarche, la culture de l’amitié vise au partage,
et conditionne que soient dissipés la crainte des dieux et de la morts, qui
représentent comme dirait Lucrèce des « monstres » dont l’ami doit
d’abord extirper en lui ; car longtemps entretenues par les fausses
croyances, la superstition, la pratique de la divination etc. Une
connaissance rationnelle de la nature, à partir des Lettres à Hérodote, et à
Pythoclès qui constituent de véritables traités sur les phénomènes,
participe également du projet de philosophie curative du Jardin.
Si en effet Épicure n’a pas fait de grands développements sur l’amitié
comparativement à Aristote (ses Éthiques), c’est pensons-nous parce que
beaucoup de choses ont été dites sur le sujet, mais il s’agissait pour Épicure
de la mettre en pratique, telles que peuvent nous les traduire
remarquablement ses maximes et sentences. Par l’amitié épicurienne
souligne Pierre Boyance « chaque homme devient un toi, considéré dans
son individualité et touché dans ses croyances les plus profondes » 5.
Aussi sans être proprement une véritable protreptique, elles – les
maximes et sentences – n’en gardent pas cependant quelques accents.
Qu’est-ce qu’une œuvre protreptique ? Les protreptiques disait Sophie Van
4
5
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Pierre Boyance, Lucrèce et l’épicurisme, éd. PUF, 1963, p. 44.
Ibid., p. 44.
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Der Meeren « étaient des ouvrages ou discours par lesquels les philosophes
exhortaient les jeunes gens, essentiellement, à philosopher »6. En d’autres
termes, les protreptiques avaient pour fin de montrer au disciple la valeur
et la nécessité de la philosophie. Et par là toute La Lettre à Ménécée est
articulée à cette fin, car elle conduit au bonheur. Il est aisé de montrer que
c’est dans La Lettre à Ménécée qu’Épicure emploie abondamment les
expressions : « il faut que », « il ne faut pas différer », « il ne faut pas
cesser », qui sont autant d’exhortations vers la vertu, donc à exercer des
habitudes, comme chez les Stoïciens ; dans notamment la sentence 48 qui
invite expressément à l’héxis : « essayons de faire que la prochaine étape
soit meilleure que la précédente, tant que nous sommes en route ; mais,
arrivés au terme, que la joie reste unie »7.
Il saute aux yeux que chez Épicure il y a un impératif à philosopher, à
méditer. Et, quand la mort frappe un ami il lui est interdit de pleurer ou de
se lamenter, mieux il faut méditer, sympathiser : c’est pourquoi il dit
« soyons en sympathie avec nos amis non en gémissant, mais en
méditant »8. En gros nous pouvons avancer que son éthique est
protreptique, car elle pose les bases d’un bonheur effectif avec les autres.
Selon J. C. Fraisse, on ne peut pas traiter du philosophe du Jardin,
notamment de la notion de philia sans faire un tant soit peu ce travail de
retour aux Anciens. C’est pourquoi, il souligne dans son important ouvrage
Philia que : « la chaleur de l’éloge fait par Epicure de l’amitié incite
nécessairement l’historien de la philosophie à des comparaisons soit avec
Platon, soit avec Aristote »9. Mais ce choix des auteurs est pensons-nous
voulu de façon indicative et à titre de comparaison utile. Car au fil de nos
investigations, nous avons bien perçu qu’il était possible de remonter
jusqu’aux poètes anciens tels que : Homère, Hésiode et Théognis ; ou un
Présocratique comme Pythagore, à qui Diogène Laërce reconnaît déjà la
paternité du mot philosophos qui signifie : ami.
Cependant, l’originalité d’Épicure a ceci de remarquable par rapport à
ses prédécesseurs, qu’il fut le premier, a avoir enseigné et montré par sa
propre vie que l’amitié était le plus grand des biens ; mieux pour utiliser un
langage platonicien, l’amitié est le bien immortel par excellence. Par la
conversion des plaisirs, le sage épicurien peut attendre ce niveau de
béatitude qui appartient seul aux bienheureux. Mais cette ascension exige
une certaine ascèse ou dialectique de l’utilité dont le but final est
6
Sophie Van Der Meeren, Lettre d’Epicure, éd La Philothèque, 2003, p. 42.
Epicure, Lettres et Maximes, Trad. M. Conche, op.cit, p. 259.
8
M. Conche, op.cit, p. 265.
9
Philia, section II, éd. vrin, Paris,1975, p. 307.
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l’ataraxie ; ou comme le dit Lucrèce : la summa pax. A la fin de cette
ascension le sage peut alors convier les autres à la même félicité :
« l’amitié mène sa ronde autour du monde habité, comme un héraut nous
appelant tous à nous réveiller pour nous estimer bienheureux »10.
L’histoire de la philosophie antique, nous a légué l’idée selon laquelle
l’homme est un animal doué de raison et doublement porté à vivre en
société. Il ne peut s’épanouir pleinement que dans un milieu social, où les
rapports avec les autres sont déterminants pour avoir une certaine vérité de
soi et des autres.
Lorsque Socrate en effet cite la sentence de Delphes « connais-toi, toimême » ; c’est pour montrer quelque part, dans les faits, que le philosophe
tout comme l’homme ordinaire ne peut pas vivre replier sur lui-même,
coupé du monde et des autres. Une telle conception du monde est
l’antithèse de la doctrine du bonheur épicurien. Pour les épicuriens, c’est
en effet dés ici bas que le bonheur est possible et entouré d’amis.
Socrate, le maître de la morale, à la veille de sa mort n’était-il pas
entouré de tous ses amis (Cf. le Phédon) ? Epicure à l’article de la mort ne
confia-t-il pas ses dernières volontés à ses amis ? Il suit donc que, s’il y a
véritablement quelqu’un qui a plus besoin des amis, c’est sans conteste le
sage ; qui sait mieux que personne les vertus de l’amitié. Dans le Lysis de
Platon, Socrate par une brillante maïeutique, a enseigné à Lysis et ses amis
ce qu’est l’ami véritable, et comment il convient de choisir ses amis, dans
l’exacte mesure où la plupart des gens ignorent qu’elle repose sur la
bienveillance réciproque. Il ne suffit pas d’être toujours ensemble, mais
savoir qui est notre ami.
C’est cette idée de l’association qui ressort chez Aristote dans l’Éthique
à Nicomaque lorsqu’il disait : « l’amitié est en effet une certaine vertu, ou
ne va pas sans vertu ; de plus elle est ce qu’il y a de plus nécessaire pour
vivre »11. Aristote donne ici une définition complexe de l’amitié, qui
apparaît plus comme une identité de termes qu’une définition explicite ; de
sorte que le terme même d’« association » apparaît comme une fausse
note ; car nous savons que pour Aristote ; cela peut passer pour une hérésie
de considérer dans sa définition la place de l’esclave dans un cercle d’amis,
dans une « association d’amis ». Or, et c’est là toute la particularité
d’Epicure : l’esclave n’est pas indigne d’amitié, a fortiori la prostituée
(l’hétaïre). L’amitié aristotélicienne peut être dite théorique (théorétique)
alors celle d’Épicure concrète. De ce point de vue il n’est donc pas illusoire
d’accepter avec Épicure la possibilité de fonder une société ou une
10
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Sentence vaticane 52, Trad Marcel Conche, op.cit, p. 261.
Éthique à Nicomaque, Liv.VIII, éd. vrin, 1990, p. 383.
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communauté dont la valeur cardinale serait l’amitié. Mieux que ses
prédécesseurs, nous considérons qu’Epicure précise davantage l’essence de
cette notion dans la maxime fondamentale XXVII en ces termes : « de tous
les biens que la sagesse procure pour la félicité de la vie entière, de
beaucoup le plus grand est la possession de l’amitié »12. Autrement dit,
l’amitié est un bien qui est à rechercher aussi bien par le riche, l’esclave,
l’hétaïre que le sage. Pour C. Diano, précise J.C. Fraisse, la particularité
essentielle du philosophe du Jardin, est d’avoir été le premier à créer la
première société des amis dans l’histoire de ce IIIe siècle av-J.-C ; non pas
qu’il n’eut pas avant lui des groupes d’amis, tels que les Pythagoriciens,
mais c’est surtout que mieux que les autres ; il a su rallumer une autre
flamme de l’amitié plus généreuse.
Malgré l’absence en effet de définition explicite de l’amitié chez
Epicure (remarquable aussi chez Aristote, car le sens est ambigu), nous
avions jugé utile de proposer une définition acceptable de l’amitié parmi la
gamme de maximes et sentences qu’il nous propose à partir de la sentence
23 : « toute amitié est par elle-même désirable ; pourtant elle a eu son
commencement de l’utilité »13. En termes clairs, l’amitié est une tendance
naturelle propre aussi bien à l’animal qu’à l’homme. Mais, à la différence
de l’animal, l’homme étant doté de ce que les grecs nomment le
« parakoloutésis » (la conscience réfléchissante) comprend la signification
et la finalité de la philia ; qui n’est pas dans l’optique épicurienne, une
amitié intéressée. Au contraire, l’ami est celui sur lequel nous pouvons
toujours compter et sans calculs téléologiques. Mieux, cette amitié sera
axée sur la bienveillance, dont la sincérité se vérifiera toujours dans les
actes. D’où ici sa nature complexe dont parlera Socrate dans le Lysis, à
travers ce nœud gordien que constitue l’énoncé du véritable ami : qui est
en effet notre ami ? Est-il seulement possible d’assumer l’amitié dans
toutes les occurrences de la vie ?
si en effet, certains esprits peuvent légitimement être sceptiques sur la
finalité de l’amitié généralement confondue au profit, force est de
reconnaître qu’avec l’éthique épicurienne, l’amitié cesse d’être un fonds
de commerce ; d’où ici le sens de la mise en garde de la Sentence
vaticane 39 : « n’est ami ni celui qui cherche toujours l’utile, ni celui qui
jamais ne le joint à l’amitié : car le premier, avec le bienfait, fait trafic de
ce qui se donne en échange, l’autre coupe le bon espoir pour l’avenir » 14.
En d’autres termes, le calcul détruit le sens de l’amitié, c’est pourquoi J.
12
M. Conche, op.cit, p. 239.
M. Conche, op.cit, p. 253.
14
M. Conche, op.cit, p. 257.
13
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C. Fraisse peut merveilleusement affirmer : « s’il convient de semer avant
de récolter, ce que l’on récolte ne diffère pas en substance de ce que l’on
sème, et du commencement de l’amitié à son achèvement, ou de son
assise objective aux sentiments qu’elle suscite, il semble que l’on ne fait
que passer d’un plaisir à un autre » 15. Même Plutarque le détracteur avéré
de l’épicurisme reconnaît ce préalable – ou « principe »– au fondement
de l’amitié véritable en affirmant : « il dit (Epicure) qu’il est non
seulement plus beau de faire du bien que d’en recevoir, mais aussi plus
agréable ; rien en effet, n’est aussi fécond en joie que la bienveillance »
(In J.C. Fraisse, Ibid).
Ainsi lorsque toute attitude de méfiance est évacuée dans nos rapports
avec les autres, c’est-à-dire dans une réciprocité de conscience, l’amitié se
transforme en plaisir. C’est ce plaisir d’être avec l’autre, de donner et de
recevoir qui marque aujourd’hui dans nos rapports avec les autres. Cette
expérience authentique du donner et du recevoir, de partager, de
communion, qui sont des vertus du Jardin d’Epicure, a maille à partir avec
nos sociétés modernes, où tout le monde court vers la recherche de biens
superfétatoires. Par cette illimitation vers des biens illusoires, les individus
aujourd’hui annihilent les véritables chances pour une ouverture de soi à
l’autre dans l’amitié.
Aussi nous demanderons-nous si l’association des personnes vertueuses
est une condition nécessaire et suffisante pour fonder une vraie
communauté des amis ? Le Jardin d’Épicure qui brille par son caractère
hétéroclite (esclaves, hétaïres, enfants, femmes), n’a-t-il pas posé
historiquement les bases d’une amitié cosmopolite possible ? Mieux
aujourd’hui eu égard aux multiples formes de violences, d’insécurités, de
xénophobie, de racisme, de mépris de l’autre ; bref de tout ce qui est
attentatoire à la dignité humaine, l’amitié épicurienne ne s’avère-t-elle pas
la meilleure thérapie ? C’est-à-dire une sorte de « quintapharmakos » ? En
termes clairs, le déficit de prégnance de l’amitié n’est-il pas à l’origine de
toutes ces atteintes à la dignité humaine ?
C’est pourquoi notre réflexion qui sera axée en trois parties, essayera de
montrer dans un premier moment l’amitié comme fondement de la sagesse
épicurienne en lien et en rupture avec les conceptions classiques ; le second
moment s’efforcera autant que faire se peut de montrer les conditions de
possibilités du bonheur épicurien ; et enfin le troisième moment tâchera
d’établir la nécessité aujourd’hui d’un retour aux valeurs de l’amitié dans
notre rapport à l’autre.
15
2
J. C. Fraisse, op.cit, p. 298.
11
Dans un contexte sociopolitique qui est le notre – Afrique et monde
arabe – ; il s’agira de faire en sorte que la culture de l’amitié soit
durablement mise à profit dans les États en mal de concorde intérieure et
de stabilité politique. En un mot, c’est une sorte de théorie de la
constitution des valeurs de l’amitié dans un espace sociopolitique réel que
nous proposons à la lumière des valeurs de l’amitié enseignées par le
philosophe du Jardin. Les citations, maximes et sentences que nous userons
à profusion, n’ont pas pour objet de faire savant comme pourrait le dire J.
Bollack, mais sont commandées nécessairement par la démarche de notre
sujet.
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