Septembre 2016 - n° 197 /Le Messager •
Le mot du Président
juguler la pulsion de mort. Ou
comme le dit le Talmud « s’il n’y
avait pas l’Etat, les hommes s’entre-
déchireraient ». Or force est de
constater qu’aux Etats Unis,
il n’y a pas beaucoup d‘Etat…
et qu’en France, l’Etat, qui,
pourtant, a le monopole de la
violence légitime, a beaucoup
faibli depuis 40 ans.
Mais l’individualisme absolu de
nos sociétés ayant décrété qu’il
ne pouvait y avoir de limites à
l’hédonisme, à la jouissance
de soi, au narcissisme, et la
dérision devant toute forme
d’autorité, a participé à la
libération de la pulsion de
mort, d’autant plus facilement
que, corollaire, dans certaines
familles, l’autorité et la simple
éducation ont tout simplement
disparu. Ne feignons donc
pas d’être surpris et de nous
réveiller surpris. Echec donc
de l’individualisme comme
idéologie et dont l’hédonisme
pensait faire identifier la
religion à un stade dépassé du
développement de l’humanité.
religieuse est redevenue
. Non seulement
parce qu’une certaine partie
des musulmans ne sait pas
vivre dans notre laïcité, qui
n’a cependant jamais été
vraiment définie positivement,
qui s’est contentée d’instaurer
juridiquement la neutralité de
l’Etat par rapport aux religions,
mais parce que plus largement,
chez certains, et regardez dans
le monde juif également, et,
quoiqu’à une moindre mesure,
dans le monde chrétien, la
religion tient lieu de seule
identité : toutes les autres
identités se sont effondrées,
et leur intériorité se réduit à
un appartement à une pièce.
Quelle pauvreté !
Voilà pourquoi, car l’affaiblis-
sement de l’Etat en France
est un processus historique,
dont le surendettement de la
puissance publique est l’un des
marqueurs, mais non le seul,
nous allons devoir réapprendre
à vivre en France avec cette
question religieuse. La laïcité
à la française, qui est pourtant
la seule façon de ne pas tenir
compte des particularités de
chacun, mais de leurs seuls
mérites et talents, et qui est
donc une pensée de l’universalité
de l’homme, est d’autant plus
incapable d’endiguer la montée
de la température religieuse
qu’elle n’a jamais été au fond
pensée positivement, mais
uniquement dans sa neutralité,
dans sa négativité. C’est à
l’évidence un travail urgent
à faire.
D’ici là, nous avons nous,
juifs libéraux, une obligation :
démontrer qu’une religion sait
être ouverte, active, engagée
dans le monde et dans la
société pour qu’y triomphe la
pulsion de vie, qu’elle n’est pas
une monomanie de l’identité,
qu’elle n’est pas régressive,
et obnubilée par elle-même
comme institution, et par le
retour à une origine fantasmée,
opposée au flux de l’histoire qui
fait que chaque jour est différent
d’hier, qu’elle comprend la
nécessité d’actualiser son
message, qu’elle doit récuser
définitivement toute tentation
de monopole et d’exclusive,
mais sait vivre dans un contexte
de pluralisme, avec un seul
objectif : ne pas réduire l’autre
à un autre moi-même ou à un
ennemi de moi-même, mais
savoir lui faire une place et
l’aimer pour ce qu’il est. N’est
ce pas le projet originel d’Israël ?
C’est la force du judaïsme
libéral que de s’être posé et
confronté à ces questions
depuis 200 ans. Dans l’urgence
absolue qui est la nôtre, en
France et ailleurs, ce judaïsme-
là peut donner à réfléchir à tous
ceux que la question religieuse
inquiète ou intéresse. C’est
parce que la France a tant
besoin de ce judaïsme-là que
nous construirons un nouveau
Copernic à la hauteur de cette
nécessité.
sérénité.
Puisse cette nouvelle année
vous donner à vous et à
vos familles une vie pleine,
rayonnante, heureuse, paisible.
Qu’elle soit pour vous une
année de paix et une année
d’engagement.
■
Chana tova
Gmar ‘hatima tovah
Le mot du Président