Revue Française d’Œnologie - mars/avril 2004 - N° 205
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et glucose), a été étudiée dans le cadre d’un plan d’expérience
fractionnaire 24-1, avec 3 répétitions par modalité.
L’effet de l’alcool sur la croissance de Brettanomyces est très
significatif, les teneurs croissantes en éthanol inhibant la
production de phénols volatils. L’effet des températures
croissantes est également favorable. La présence de sucres
résiduels a un effet significatif tandis que l’effet du pH est faible.
Brettanomyces s’implante plus facilement sur un vin n’ayant pas
effectué sa fermentation malolactique. Par ailleurs, le SO2ne
détruit la population de Brettanomyces qu’à des doses
supérieures à 40 mg/L.
4. Présence de Brettanomyces en bouteilles
Sur 95 vins du millésime 1996 représentant les différentes
appellations de Bourgogne (51 vins blancs de Chardonnay et
44 vins de Pinot noir), seuls 5 % des vins blancs s’avèrent
contaminés à de faibles niveaux de populations. A l’inverse, la
présence de microorganismes dans les vins rouges est fréquente.
Des bactéries lactiques et des levures sont trouvées dans
respectivement 50 % et 32 % des bouteilles, avec des niveaux
de population pouvant atteindre 104 U.F.C./mL. La présence de
Brettanomyces est mise en évidence dans 25 % des bouteilles
de Pinot noir analysées. Pour certains vins, les populations
dépassent 103 U.F.C./mL.
5. Influence de la température de macération
et de l’utilisation d’enzymes sur les teneurs
en phénols volatils des vins de Pinot noir
Certaines techniques de vinification, comme le chauffage en fin
de macération et l’utilisation d’enzymes, permettent une
meilleure extraction des composés phénoliques du Pinot noir
tout en améliorant la qualité sensorielle des vins obtenus ;
chaque technique augmentant l’extraction des composés
phénoliques de l’ordre de 15 %.
L’utilisation d’enzymes d’extraction, sans activité cinnamyl
estérase, permet d’éviter la formation d’acides phénols pouvant
être transformés en phénols volatils par des levures du genre
Brettanomyces.
Les teneurs en sucres résiduels des vins élaborés avec une
macération finale à chaud sont proches de 1.0 g/L contre moins
de 0.2 g/L pour les vins élaborés avec une macération classique.
L’utilisation d’enzymes à l’encuvage n’influence pas notablement
les teneurs en sucres résiduels des vins. Par contre, l’utilisation
d’enzymes après décuvage tend à augmenter la teneur en
glucose (jusqu’à + 0,4 g/L).
Les contaminations bactériennes
en vinification et en élevage
Aline Lonvaud
Faculté d’Œnologie - Université de Bordeaux II
1. Les conditions de milieu et la vie des bactéries
Les bactéries lactiques et les bactéries acétiques sont deux types
de microorganismes très différents pour leurs exigences et donc
pour leur adaptation à l’environnement. La principale différence
tient à la présence indispensable d’oxygène nécessaire aux
bactéries lactiques.
Avec la fermentation alcoolique et l’augmentation de la teneur
en éthanol, le milieu devient plus sélectif et sélectionne les
bactéries lactiques et acétiques de sorte qu’en fin de fermentation
alcoolique, les espèces prédominantes sont Oenococcus oeni pour
les lactiques et Acetobacter aceti et A. pasteurianus pour les acétiques.
La température du milieu influence la vitesse de croissance des
bactéries. Plus elle est élevée, plus les populations augmentent
rapidement. Le pH est le paramètre le plus important qui
conditionne la vie des bactéries dans le moût et le vin. Plus le pH
est élevé, plus la vie des bactéries dans le vin est facile. Dans les
vins issus de moûts acides, les bactéries sont mieux sélectionnées.
L’espèce O. oeni plus acidophile que les autres prédomine
pendant la vinification ; les autres bactéries lactiques et les
bactéries acétiques, sources d’altération sont moins présentes.
2. Les métabolismes bactériens à l’origine
d’altérations
La piqûre acétique
Les bactéries acétiques et en particulier les Acetobacter aceti
et A. pasteurianus ont comme substrat privilégié l’éthanol. La
voie d’oxydation de l’éthanol en acide acétique ne fonctionne
activement que lorsque de l’oxygène dissous est présent ; la
quantité formée dépendant de la concentration en bactéries
acétiques.
La piqûre lactique
Par analogie à la piqûre acétique, la piqûre lactique signifie
l’augmentation d’acide acétique, donc d’acidité volatile, produite
par les bactéries lactiques. Cet incident résulte de la fermentation
des sucres par les bactéries lactiques dites hétérofermentaires,
comme Oenococcus oeni et certains lactobacilles.
Les vins filants
Certaines souches bactériennes de l’espèce Pediococcus damnosus
sont responsables de cet incident. Elles utilisent quelques
centaines de mg/L de sucres résiduels du vin pour synthétiser un
exopolysaccharide d’une structure très particulière qui se traduit
par une forte augmentation de la viscosité des vins. Des vins
filants peuvent être conditionnés à nouveau, après avoir subi
une agitation mécanique et une stabilisation.
Les vins amers
La maladie de l’amertume, plus rare que celle des vins filants, est
causée par des lactobacilles et se traduit par une dégradation
du glycérol selon une voie qui aboutit au propanediol ;
l’intermédiaire de la voie est une aldéhyde qui est à l’origine de
l’acroléine. Le goût amer des vins vient de la combinaison de
l’acroléine (ou de son précurseur) avec les polyphénols du vin.
Les vins riches en amines biogènes
Certaines souches de bactéries lactiques sont caractérisées par la
présence de gènes particuliers et sont capables de décarboxyler
l’histidine en histamine et la tyrosine en tyramine.
La tourne
Certains lactobacilles sur des vins à pH élevé sont impliqués dans
cette maladie grave à l’origine de la dégradation de l’acide tartrique.
L’acidité fixe diminue alors que l’acidité volatile augmente.
Le “goût de souris”
Dans de rares cas, on assiste à la production de bases aromatiques
hétérocycliques volatiles (2-acétyltetrahydropyridine et 2-acétyl-1-
pyrroline) attribuée à des bactéries hétérofermentaires, comme
L. hilgardii ou O. oeni. Dans l’état actuel des connaissances, on
ne sait pas s’il s’agit de souches particulières ou si des conditions
du milieu, comprenant des sucres, de l’éthanal, de l’ornithine,
de la lysine et certains métaux déterminent cette déviation.
3. La détection des bactéries d’altération :
le contrôle microbiologique des vins.
Le contrôle microbiologique des vins revêt plusieurs aspects.
D’une part, il est souhaitable de dénombrer des microorganismes
(levures, bactéries lactiques, bactéries acétiques) pour savoir s’ils