PARTICIPATION DE L`AFRIQUE AU TOURISME INTERNATIONAL

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Tourisme & Territoires / Tourism & Territories (2009)
PARTICIPATION DE L’AFRIQUE
AU TOURISME INTERNATIONAL :
FAIBLESSES ET CAUSES
Antoine HOUNGA80
Résumé
L’Afrique a la réputation d’un continent riche en ressources
naturelles et socioculturelles qui, normalement, devraient lui
permettre de se faire une place de choix dans le domaine du
tourisme sur le plan international. Mais, tel n’est pas le cas parce
que des problèmes importants existent. L’objectif de notre étude
est de rechercher et de présenter les causes qui engendrent ces
différents freins à l’évolution du tourisme international sur ce
continent.
Dès cet instant, une lecture d’informations diverses basées sur
une documentation spécifique à notre étude va permettre de
relever des faiblesses du tourisme africain que sont entre autres :
le niveau de vie très bas des populations limitant le nombre de
voyageurs à but touristique, l’insuffisance des équipements et
infrastructures, les tensions politiques (guerres et conflits), le
climat difficile et les maladies tropicales.
Mais il faut souligner que c’est surtout l’Afrique subsaharienne
qui, face à cette réalité, ne représente pas encore une zone
privilégiée du tourisme international à la lecture de la part infime
des pourcentages qui lui reviennent dans la répartition
géographique des recettes et arrivées générales.
Mots clés : tourisme, Afrique, économie
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Institut National de la Jeunesse, de l’Éducation Physique et du Sport (INJEPS),
Université d’Abomey-Calavi, Bénin
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A
utrefois considéré comme une activité uniquement
réservée aux pays développés, le tourisme a fini par
s’étendre aux moins avancés dont les pays africains.
L’Afrique a la réputation d’être un continent qui offre
dépaysement et exotisme à la clientèle en raison de la richesse de
ses ressources naturelles et socioculturelles (par exemple, la
nature, le paysage, la faune, la flore, le safari, le soleil, la plage).
Ainsi, le secteur touristique occupe une place de plus en plus
importante dans l’essor de pays africains où il est une source de
richesse, de croissance et de diversification économique.
Mais le développement du secteur touristique en Afrique, surtout
subsaharienne, est confronté à divers obstacles liés au faible
indice de développement humain notamment le faible niveau des
revenus, d’alphabétisation et d’espérance de vie ainsi que les taux
élevés d’accroissement de population (Tévoédjrè, 2002).
D’ailleurs, François Vellas (1996, p. 34) abonde dans le même
sens en soulignant que « le retard des pays africains en matière
de tourisme international s’explique d’abord par un problème
global de développement économique».
Cet état de chose rend l’industrie touristique africaine non
compétitive et c’est ce qu’à juste titre Iain et al. (2001, p. 2) font
remarquer en affirmant : « dans toute l’Afrique, l’industrie
touristique se situe en deçà des normes internationales».
C’est une situation qui est, à notre avis, préoccupante et qui de
surcroît, hypothèque et retarde l’avenir de l’Afrique dans le
domaine du tourisme.
C’est pourquoi nous émettons l’hypothèse selon laquelle la
faiblesse de la participation de l’Afrique au tourisme international
varie d’une région à l’autre et ce, en rapport avec le niveau
économique (une économie embryonnaire, l’insuffisance des
infrastructures et équipements touristiques) mais aussi avec
certaines contingences environnementales (climat et les maladies
tropicales) sociales et politiques (guerres, conflits sociaux).
MATÉRIEL
Notre matériel d’étude est constitué de sources d’information
recueillies sur le tourisme en Afrique et dans le monde, à partir :
d’articles de la presse internationale traitant du
tourisme (au sens large depuis les récits économiques,
environnementaux,
culturels,
jusqu’aux
textes
politiques ou sportifs),
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de documents statistiques officiels reçus de
l’Organisation Mondiale du Tourisme,
de documents relatifs à la politique de développement,
les comptes rendus des colloques, séminaires,
conférences
d’ouvrages généraux relatifs au tourisme international.
Cette diversité d’informations a une utilité particulière car elle
permet de dresser un état des lieux du contexte afin de mieux
cerner dans leurs grandes lignes, les dynamiques qui
interviennent dans l’évolution et le développement du tourisme
dans les pays industrialisés et les moins avancés.
RÉSULTATS ET DISCUSSIONS
LA SITUATION DU TOURISME INTERNATIONAL EN
AFRIQUE
L’essor du tourisme depuis la fin de la seconde guerre mondiale
bien que considérable est inégalement réparti selon les pays.
Dans les pays en développement, la majeure partie de l’activité
touristique est assurée par les flux internationaux constitués de
visiteurs étrangers, les flux nationaux étant quasi inexistants. Par
contre, dans les pays industrialisés, les mouvements internes
viennent s’ajouter aux flux internationaux. Cette attraction pour
l’Afrique est liée à l’originalité de ses ressources naturelles et
culturelles qui suscitent la curiosité des touristes étrangers.
Malheureusement ce potentiel est peu ou pas transformé en
produits touristiques authentiques susceptibles de créer des
valeurs ajoutées. «L’Afrique n’a pas réussi, d’une manière
généralisée, à créer des produits ni à accéder à des marchés qui
fassent de tourisme le moteur de moteur de développement qu’il
pourrait être dans cette région ». (Rapport sur le développement
en Afrique, 2000, p. 11). Georges Cazes (1989, p. 22, 23, 28),
évoque, la place du continent sur le marché du tourisme mondial
en soulignant les inégalités mondiales majeures du tourisme
international. En effet, il fait constater que le Tiers Monde, dont
fait partie l’Afrique, ne reçoit que le quart du flux total de
touristes internationaux, alors qu’il concentre plus de trois quarts
de la population mondiale. Aussi, les trois quarts des flux totaux
reviennent-ils aux pays industrialisés développés où sont
concentrées les deux fonctions du tourisme à savoir « émission »
et « réception ».
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En 1981, la part de l’Afrique dans le tourisme international, selon
Vellas (1986, p 6), a été de 2,5 % pour les arrivées touristiques et
de 2,09 % pour les recettes. Cette faiblesse est imputable surtout
au niveau économique relativement bas des pays africains, à
l’importance de la distance qui sépare certains pays d’Afrique de
l’Europe et au coût élevé des transports internationaux. En 1986
(Vellas, p. 6), ajoute-t-il, seules 2,6 % des arrivées internationales
étaient enregistrées pour le compte de l’Afrique soit huit millions
de touristes internationaux et 2,156 milliards de dollars US de
recettes. Elle se classe après les Antilles et l’Amérique latine (6 %)
et avant le Moyen-Orient (2,1 %) et l’Asie (moins de 1 %). Les
causes se rattachent à l’influence de divers facteurs politiques,
économiques et financiers se manifestant différemment suivant
les orientations des gouvernements et l’action exercée sur la
conjoncture politico-économique. Aussi ce même auteur fait-il
observer en 1994 en matière des arrivées touristiques, la faible
part de l’Afrique avec seulement 3,5 % du total mondial.
En 1998, une statistique sur la distribution des arrivées
touristiques des six continents (OMT, 2001a, p.78), place l’Afrique
en quatrième position après l’Europe, première, les Amériques
deuxième, l’Asie Est/Pacifique troisième et avant le Moyen-Orient
cinquième et l’Asie du Sud sixième. Pourtant, dix fois plus grande
que l’Europe, elle regroupe 24,9 millions d’arrivées contre 372,5
pour le vieux continent sur un total de 625,2 pour l’ensemble du
monde.
Après ce bref aperçu sur la capacité de l’Afrique à se placer sur le
marché du tourisme international, quelques constats s’imposent.
Le continent africain ne représente pas encore une zone
privilégiée du tourisme international à la lecture de la part infime
des pourcentages qui lui reviennent dans la répartition
géographique des recettes et arrivées générales. Aussi, doit-il
faire face d’abord à la concurrence des autres pays du Tiers
Monde et ensuite des pays industrialisés. Cependant, bien qu’elle
ne participe encore que de façon marginale et lointaine à la
création de nouveaux foyers touristiques, une évolution, même
faible, s’observe d’une année à l’autre à cause de quelques foyers
(pays) qui représentent les destinations privilégiées du tourisme
international. Le tourisme d’une manière générale, a évolué en
Afrique depuis les années quatre vingt en référence à la lecture
que nous avons faite et ceci se traduit à travers les moyennes de
taux de croissance des arrivées ou des recettes d’une année à une
autre.
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Ainsi de « 1980 à 1985, le taux de croissance annuel moyen a été
de 4,5 % pour les arrivées en Afrique contre 2,7 % pour
l’ensemble du monde, et de 1,5 % pour les recettes en Afrique
contre 0,7 % pour le tourisme mondial » (Vellas, 1986, p. 6).
Depuis « 1995, le nombre absolu des arrivées internationales a
augmenté de 7,5 millions ; au cours de la même année, la part de
l’Afrique passait à quatre pour cent du total mondial, tandis que
dans la période 1995-2000, le continent dans son ensemble,
connaît une croissance supérieure de près d’un point et demi à
celle du monde, à un rythme annuel de 6,6% contre 4,9 % pour le
tourisme mondial » (OMT, 2000a, p.2).
Pierre Biombi Mouandjo Lewis, (2002, p. 100) souligne qu’ « en
1999, les chiffres de l’Organisation Mondiale du tourisme
attestent un taux de croissance plus que respectable en ce qui
concerne l’Afrique dans la mesure où l’on observe une
augmentation de 8,2% du nombre d’arrivées internationales et
une hausse de 10,3% des recettes du tourisme. »
Par contre en « 2000, les arrivées internationales y ont augmenté
à peine de 1,5 % à cause du brusque recul de deux grandes
destinations africaines à savoir, l’Afrique du Sud et le
Zimbabwe » (OMT, 2000a, p.2). En « 2001, les arrivées
internationales y ont augmenté de 3 % ; cette progression étant
due pour l’essentiel à deux pays d’Afrique du nord, la Tunisie et le
Maroc qui ont connu une croissance respectivement de 10 % et 8
%, pendant la période de janvier à août » (OMT, 2002a, p. 2).
Certes, l’Afrique enregistre des progrès notables dans le secteur
touristique, mais ces derniers, ne lui permettent pas encore de
s’affirmer sur le plan mondial : elle devra faire beaucoup d’efforts
pour maintenir cette progression à cause de l’incertitude qui
caractérise le climat social et politique dans les différents pays
qu’elle renferme.
Aujourd’hui, même s’il part d’une base plus étroite en nombre de
visiteurs, « le continent africain connaît des taux de croissance
supérieurs (7,2 %) à ceux des autres régions » (Iain et al, 2001, p.
1).
Cette croissance est sans doute liée à la volonté mise en œuvre
dans le développement de ce secteur par quelques pays reconnus
comme des foyers touristiques. Il s’agit pour l’Afrique de refaire
son image économique sur le plan international afin de tendre
vers une promotion au mieux de son tourisme en comptant
d’abord sur ses forces internes.
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LES PROBLÈMES LIÉS AU DEVELOPPEMENT DU
TOURISME INTERNATIONAL EN AFRIQUE
La préoccupation première des populations africaines pour
satisfaire leur besoin quotidien alimentaire les éloigne des
activités de loisir dites modernes. Or, « pour construire un secteur
touristique plus diversifié, il ne faut pas concentrer exclusivement
le développement sur l’attraction du tourisme international. Il faut
aussi tenir compte des marchés potentiels du tourisme intra
régional et du tourisme interne » (OMT, 2001b, p. 12). Mais ceci
est-il possible en considérant le grand handicap qu’est pour
l’Afrique son sous développement économique ?
LE
SO U S - D ÉV EL O P P E M E N T É CO N O M I Q U E
Depuis l’accession de la plupart des pays d’Afrique à
l’indépendance, le développement économique est fortement lié
aux mutations internationales. Et, « bien que les tendances
générales cachent des situations diverses d’un pays à un
autre » (OMT, 2000b, p. 10), la plupart d’entre eux ne disposent
pas de grandes industries de transformation, ce qui limite les
sources de richesse aux seules exploitations agricoles et aux
maigres produits d’exportation.
Cela fait que, depuis quarante six ans et en particulier depuis les
années soixante dix, l’Afrique est à la traîne des autres continents
en terme de croissance du PIB et du revenu par habitant. « Son
incapacité à converger vers le niveau de croissance économique
mondial et à se maintenir au niveau des pays en développement
dans leur ensemble, est attestée par son déclin » (Rapport sur le
développement en Afrique, 2000, p. 10). « Elle se présente
comme le seul continent où le nombre de personnes pauvres
augmente, de sorte que la pauvreté est de plus en plus souvent
perçue comme un problème africain et non pas
mondial » (Rapport sur le développement en Afrique, 2000, p.
44).
En 1962, l’agronome René Dumont (1966) affirmait déjà
« l’Afrique est mal partie », tandis que Frédéric Teulon signale
aujourd’hui que « l’Afrique est souvent décrite comme un
continent perdu pour le développement à cause des contraintes
qui pèsent sur ses États » (Teulon, 1999, p. 51).
Michel Norro (1994) parle d’économies extraverties, exsangues,
fondées essentiellement sur l’exploitation de quelques richesses
naturelles et soumises aux dures conditions des Plans
d’Ajustement Structurel, ou Programmes d’Ajustement
Structurel (PAS).
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En somme, le sous-développement de l’Afrique constitue un
véritable frein à l’émergence de son tourisme sur les plans
national et international. Or, selon les propos de Iain et. al. (2001,
p. 1), « c’est un secteur qui peut contribuer au développement
économique de ce continent si les conditions s’y prêtent car sa
gestion est un facteur potentiel de réduction de pauvreté, de
préservation du patrimoine culturel et de protection des
ressources naturelles ».
Mais, dans un tel contexte de sous-développement évident et qui
s’aggrave, il n’est pas surprenant que l’Afrique, tant d’années
après les indépendances, présente une performance peu
satisfaisante en matière d’équipements (Cazes & Lanquar, 2000)
et d’infrastructures touristiques.
L’ I N S U F FI S AN C E
D E S É Q U I P E M EN T S E T I N F R AS T R U C T U R ES
T O UR I ST I Q U E S
Comme le rappellent Georges Cazes et Robert Lanquar (2002) 81,
« Les infrastructures apportent une contribution déterminante au
renforcement de la capacité de production de tous les secteurs de
l’économie. Or celles de l’Afrique figurent parmi les plus
déficientes du monde, tant en terme de couverture que de
qualité. Leur piètre état, constitue un obstacle majeur à
l’accélération de la croissance, empêchant les pays africains d’être
concurrentiels sur les marchés internationaux (OMT, 2000b, p.
46) ». Mieux, le caractère onéreux de l’industrie touristique, ne
leur permet pas de faire valablement face à la lourdeur des
investissements dans la construction des infrastructures
(aéroports, réseaux de transport et de communication) sans
l’apport financier extérieur. D’ailleurs en terme d’hébergements,
« la capacité de l’Afrique subsaharienne est plutôt modeste parce
qu’elle regroupe moins de 3 % de la capacité hôtelière mondiale,
concentrée dans les capitales et les villes littorales » (Mesplier &
Bloc-Duraffour, 1998, pp. 255-259) à cause des activités
économiques et du développement du monde des affaires.
Georges Cazes (1989, p. 141) parle de la « sophistication des
infrastructures touristiques dont les coûts très élevés proviennent
de l’exigence exprimée par les visiteurs internationaux (ou les
81
« Les équipements se traduisent physiquement par des locaux, des
établissements, des installations bâties (cinéma, hôtel ou centre récréatif) ou
des espaces aménagés (parc urbain, stade, jardin…) » (Cazes et Lanquar, 2002,
P. 5).
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organismes qui planifient les voyages) de trouver dans le pays
visité, des équipements, des services, des commodités,
semblables à ceux de leur résidence permanente». Vincent Vles
(2001, p. 137) pense aussi que « les clientèles sont de plus en plus
exigeantes sur la qualité des prestations ; et, cet appétit pour la
qualité provient de la transposition du mode de consommation
urbain en vacances ». Iain et. al. (2001, p. 1) renchérissent en
soulignant que « les touristes à tous les niveaux de prix,
deviennent plus exigeants sur le marché mondial… ». C’est une
situation difficile pour les pays africains qui, malgré les efforts
fournis pour satisfaire cette clientèle étrangère, se trouvent
confrontés à des problèmes organisationnels : « gérer, entretenir,
améliorer, vendre » (Cazes & Lanquar, 2000, p. 5), avec une maind’œuvre très peu qualifiée, un manque de professionnalisme, de
rigueur et de conviction dans le travail.
Aussi le transport aérien reste-t-il un gros problème pour le
secteur du tourisme international, car plusieurs pays d’Afrique
subsaharienne ne disposent pas de compagnie nationale. Une
situation qui s’est détériorée quand de véritables compagnies de
renom comme Sabena, Swissair, Air Afrique et Ansette qui
assuraient la desserte aérienne vers d’autres continents, ont dû
disparaître de la scène à cause de leurs difficultés financières
énormes.
Or avec les compagnies étrangères, l’importance de la distance
séparant la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne de ceux
des autres parties du monde, agit inéluctablement sur les frais des
vols secs ou des circuits organisés par les voyagistes. Ainsi, par
exemple, tandis qu’un circuit de découverte de deux semaines
organisé en Afrique de l’Ouest au Togo et au Bénin coûte pour un
Français 1 123,55 € (Nouvelles Frontières, 2000, pp. 152-140), un
autre au Maroc en Afrique du Nord pour la même durée, revient à
833,90 €.
Au total, le développement du tourisme international en Afrique
ne peut donc se faire convenablement tant que ses
infrastructures seront dans un état chaotique. Un continent ou un
pays sans infrastructures adéquates au service des usagers en
général et des touristes en particulier, ne peut prétendre à une
quelconque croissance sur le plan économique. Les mauvaises
routes tuent parfois, tandis que les hébergements vétustes
choquent les hôtes. L’Afrique doit réellement investir pour
répondre aux exigences d’une certaine clientèle.
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Alors, si « on estime que le continent aura besoin de quelques 250
milliards de dollars au cours de la prochaine décennie pour
satisfaire la demande d’infrastructures de base » (OMT, 2000b, p.
46), cet investissement ne pourra se réaliser sans l’aide des
bailleurs internationaux. Les États africains devront donc faire un
choix : soit encourager le développement d’un tourisme interne
ou intra régional par la participation massive des nationaux en
leur permettant d’avoir accès aux différents équipements à un
prix raisonnable afin d’augmenter la croissance et de réduire le
gigantisme des équipements souvent onéreux, soit, privilégier ce
dernier aspect au profit d’un tourisme d’affaires international
constamment perturbé et menacé par les maladies tropicales et
les aléas climatiques.
LE
CLI M AT ET L ES MA L A DI E S T RO P I CA L E S
L’impact du climat sur le développement du tourisme est
important car il influe sur les possibilités de progrès de ce secteur
dans la plupart des pays. Mais il est bien évident que les
problèmes climatiques diffèrent selon les pays et les sous régions
et n’engendrent pas les mêmes effets. C’est ainsi que les pays du
nord de l’Afrique, jouissent d’un climat méditerranéen ; tandis que
l’Afrique Noire a la réputation et l’image d’un climat contraignant
qu’illustrent dans l’imaginaire des touristes, les famines lors des
grandes sécheresses ou des pluies dévastatrices. La chaleur (les
températures qui excèdent les 35° C dans certains pays du Sahel
tels que le Niger, le Burkina, le Mali), les précipitations fortes et
parfois très violentes (les tornades, les averses, les ouragans, les
tempêtes) renforcent ces représentations négatives.
« Les données empiriques récentes révèlent que les interactions
entres les conditions climatiques et la santé (maladie humaines et
animales) en Afrique, retardent les progrès économiques » (OMT,
2000b, p. 26) auxquels sont intimement liées les activités
touristiques. La présence des maladies tropicales et fléaux
endémiques en Afrique noire constitue toujours un grand frein à
son développement touristique. La plupart de ces maladies sont
mortelles et effraient les touristes occidentaux : le paludisme qui
peut affecter au quotidien les visiteurs, suite à la piqûre des
moustiques, la maladie du sommeil qui se transmet par la mouche
tsé-tsé, la dysenterie et le choléra par l’absorption d’une eau
infectée, la méningite, la fièvre jaune, la fièvre typhoïde, la lèpre,
l’onchocercose, la bilharziose, les vers. La liste de ces maladies qui
nécessitent plusieurs vaccinations parfois contraignantes pour les
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touristes est longue. La situation est différente dans les pays de
l’Afrique du Nord, qui se voient épargnés par certaines maladies
(maladies tropicales) liées aux aléas climatiques pouvant gêner ou
conditionner l’arrivée des touristes.
Somme toute, le problème de santé étant très préoccupant pour
un touriste, cette image négative d’un continent reconnu très
favorable aux épidémies, aiguise une certaine réticence dans le
choix de la destination, et même des rejets de désir d’y faire un
voyage. Dans ces conditions, l’évolution du nombre de touristes
s’en ressent par rapport à l’ensemble du reste du monde. Le sousdéveloppement couve la pauvreté morale qui parfois à son tour,
entraîne le manque de discernement, du respect à la dignité
humaine, de tolérance et de ce fait engendre la violence,
véritables signes d’actes désespérés.
L ES
T E N SI O N S P O LI T I Q U ES
:
GU E RR E S E T CO N F LI T S
Nous ne saurions expliquer la petite place de l’Afrique dans
l’évolution du tourisme mondial sans évoquer les troubles,
agitations et émeutes sociales dont elle est constamment victime.
En effet, la plupart des états africains subissent des conflits
politiques qui dégénèrent en guerres civiles, occasionnant la
misère, un déséquilibre et une dégradation des conditions de vie
des populations. Or, l’insécurité représente un gros handicap au
développement du tourisme dans un pays ; le cas de la République
du Togo à proximité du Bénin en Afrique occidentale, reste un
exemple édifiant car les activités touristiques ont complètement
chuté à cause des troubles sociaux et de l’insécurité grandissante.
C’est ainsi qu’« en 1982, le Togo dont le nombre d’arrivées de
touristes est de 130 000, n’en enregistre que 24 000 en 1993
contre 48 000 pour le Bénin en 1982 et 140 000 en 1993 » (OMT,
2000b, p.27).
Il en est de même de l’Éthiopie au milieu des années 1980, de
l’Angola, du Mozambique, et Soudan dans les années 1980 et au
début des années 1990, du Nigeria, Libéria, de l’Éthiopie, du
Tchad, Zimbabwe, Burundi, Rwanda, de l’Ouganda, du Congo, de
la République Démocratique du Congo et récemment de la Côte
d’Ivoire.
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Le tourisme, nul ne l’ignore, ne se développe guère dans un
continent reconnu pour ses violences et insécurités ; une situation
qui appelle les Africains à avoir une autre vision de leur continent
afin qu’elle « repose sur la promotion et la consolidation de la
justice, des libertés, de la paix, de la participation de tous les
citoyens aux processus décisionnels » (Tévoédjrè, 2002, p. 104)
même s’il est d’une évidence capitale que la base de ces
différents problèmes est liée au sous-développement global.
CONCLUSION
Les pays africains ne disposent pas des mêmes atouts en matière
de ressources touristiques selon leur localisation géographique
étant donné la politique de développement de ce secteur
qu’adopte chacun d’eux. Cela va sans doute entraîner une
différence entre certains qui vont occuper une place privilégiée
par rapport à d’autres ; une disparité qui se déploie dans un
contexte de développement global qui a ses forces et ses
faiblesses. Des forces qui font accorder une place importante au
secteur du tourisme parce qu’ils le considèrent comme une
source de richesse économique ; mais également des faiblesses
qui représentent de véritables handicaps principalement liés à son
image de continent placé au sommet du club des régions les plus
pauvres.
Or, le développement touristique isolé de toute réalité
économique n’est qu’illusion, parce que tout est lié dans ce
secteur. En effet, les aménagements appellent les équipements
qui à leur tour appellent les hébergements et ces derniers
appellent les animations et les services. Le frein au
développement du tourisme international en Afrique est un
problème qui interpelle tous les responsables politico
administratifs africains : ces derniers devraient chercher à sortir le
continent de cette impasse dans laquelle il s’engloutit au fil des
jours.
Si l’Afrique continue de placer la politique avant le
développement de son économie, l’exclusion, les inégalités et
insécurités sanitaires, alimentaires et politiques vont s’amplifier et
elle risque de végéter dans sa contre-performance et sa part sur le
marché du tourisme international pour longtemps encore s’en
ressentira. À ce sujet, il s’avère impérieux qu’elle prenne
conscience de son retard dans ce domaine en faisant une
projection dans l’avenir axée sur « l’image d’une entité
économiquement intégrée et moderne, composée d’États
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démocratiques où sont privilégiées les valeurs favorisant le
consensus politique, le travail, le progrès, l’intégrité et la
promotion par le mérite » (Tévoédjrè, 2002, p. 104).
Quoiqu’il en soit, « le tourisme africain regorge de circuits
personnalisés. Par conséquent les atouts culturels ainsi que la
réceptivité de la population locale peuvent constituer les
principaux éléments porteurs de valeur (Iain et al., 2001, p. 1) »
pourvu que cette population au niveau des foyers touristiques soit
mobilisée autour des objectifs significatifs et participe activement
à la promotion du tourisme international dont le développement
est lié aux problèmes de plusieurs ordres.
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