NOTE DE CADRAGE
ATELIER GESTION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ : DU JARDINAGE DE LA NATURE À LA NATURALITÉ
Outre le coût parfois élevé de la restauraon des fonconnalités ou des expressions
écologiques, certaines acons peuvent être considérées comme lourdes et impac-
tantes sur les milieux naturels en réponse à des enjeux variés :
• Protecon d’espèces indigènes ou endémiques : lue contre les espèces envahis-
santes notamment dans les îles via le contrôle manuel et mécanique (arrachage,
capture), le contrôle ou la lue chimique (herbicides, empoisonnement), biologique
(introducon de prédateurs ou pathogènes spéciques), écologique (restauraon des
milieux et modicaons des perturbaons naturelles ou anthropiques), sur la repro-
ducon (immuno-contracepon)/réintroducon ou translocaon d’espèces indigènes/
mise en place de récifs arciciels, de nichoirs arciels …
EXEMPLE : Eradicaon des gries de sorcière sur l’île de Bagaux = 100 000 euros pour un
hectare en situaon de falaise/ Eradicaon des rongeurs : distribuon d’appât chimique
par hélicoptère assisté par cartographie GPS / Island Conservaon : organisme dédié à
la lue contre les espèces invasives notamment les rats sur les îles an de prévenir
l’exncon d’espèces (intervenon dans le Pacique, les Caraibes, en Californie,
Mexique et dans le Sud de l’Amérique).
• Protecon d’habitats/ de paysages : mainen des milieux ouverts (coupe, fauche,
brulis dirigé, pâturage …), reforestaon, stabilisaon des berges, restauraon et
entreen de mare, plans d’eau...
EXEMPLE : mesures agro-environnementales territorialisées : contractualisaon avec un
agriculteur pour qu’il mainenne des paysages ouverts
• Rendre accessible à tous les milieux naturels, sensibiliser le public à leur fragilité :
aménagements des sites naturels (tables, poubelles, parking, cheminements, signaléque,
asserelle, plateforme d’observaon…).
LA GESTION ACTIVE, UN MODÈLE EN FIN DE COURSE OU SEUL REMPART ENCORE
EFFICACE ?
Les acons de conservaon de la nature eecvement menées relèvent néanmoins souvent
du génie écologique et de la restauraon acve, du simple fait que les milieux naturels ont subi de
lourdes dégradaons et que la subsistance du patrimoine naturel remarquable en dépend. Le disposif
de protecon de la nature, aux plans juridique, instuonnel et scienque, est essenellement tourné
vers la conservaon de ces éléments remarquables (ou, pourrait-on dire, remarqués) de la biodiversité.
Ces mesures, prises dans un contexte d’urgence, ont permis de préserver des espaces et des espèces
menacées, même sur des espaces réduits, et de mobiliser des moyens pour leur suivi. Aujourd’hui,
les poliques de préservaon de la nature sont réinterrogées : ne se livre-t-on pas parfois à une sorte
d’écharnement thérapeuque coûteux et illusoire? La biodiversité ne doit-elle pas «sorr de sa réserve»
et invesr l’ensemble du territoire ? Les espaces «sauvages», «vierges», à «haute naturalité» ne sont-ils
pas une soluon plus globale à la protecon de la biodiversité ?
2) ... VERS LE CONCEPT DE NATURALITE
(GAUTHIER-CLERC, MESLÉARD, ET BLONDEL 2014)
« La naturalité caractérise l’état naturel ou spontané. Le terme est opposé à ce qui est culvé,
domesqué et plus généralement à l’arcialité, à savoir ce qui est produit par la technique. La
naturalité est synonyme de processus dynamique non contrarié par l’homme, pour tout milieu
quel que soit son état de départ. Ainsi, deux aspects novateurs émergent du concept de natu-
ralité : l’acceptaon de trajectoires nouvelles proposées par la nature seule, sans implicaon
de l’homme autre que l’observaon, et la volonté de protéger une nature du futur, autant que
celle du présent et du passé. L’applicaon du concept de naturalité peut conduire à ne pas accor-
der plus de valeur à l’espèce rare qu’à l’espèce commune et à l’espèce autochtone qu’à l’espèce
exoque qui fait désormais pare des héritages anthropiques » (Gauthier-Clerc, Mesléard, et
Blondel 2014).
Ainsi, on peut appliquer le concept de naturalité à la biologie de la conservaon :
- La non intervenon (vaste réseau d’écosystèmes en libre évoluon) : de très nombreux milieux
naturels ou semi-naturels peuvent être laissés en libre évoluon, rochers, falaises, ébouilis, cours
d’eau, étangs, mares, pelouses, prairies, cultures, mégaphorbiaies, frucés, landes, maquis,
garrigues car laisser la nature ne coûte rien en entreen à la collecvité et peut apporter beaucoup
par l’observaon et le suivi connu de la nature de demain. Certains de ces milieux sont plus
dynamiques que d’autres, notamment sur le lioral : les noons de successions écologiques et
d’instabilité doivent être intégrées dans ces démarches.
- La restauraon par la suppression des aménagements arciels qui pénalisent la naturalité :
laisser un écosystème se rétablir seul sur le plan écologique. Une restauraon en faveur de la
naturalité doit avoir un double objecf : augmenter de façon signicave le degré de naturalité
de l’écosystème de départ et laisser la nature suivre son cours après la restauraon.
EXEMPLE
Réintroducon des grands prédateurs ; suppression de certains barrages ; fermeture et destrucon
de certaines routes an de préserver la tranquillité de certaines zones naturelles; éliminaon de
réseaux électriques ou téléphoniques, déconstrucon de bâments pour eacer d’anciennes traces
d’occupaon humaine, suppression du pâturage domesque dans des zones protégées comme les
zones centrales des parcs naonaux an de favoriser les ongulés sauvages…
- Dans un monde marqué par le changement global (climaque, sociétal, économique, énergé-
que, et/ou d’usage), les écosystèmes considérés comme « dégradés » aujourd’hui ne vont ils
pas acquérir demain une forte valeur patrimoniale, fonconnelle ou naturelle via leurs évoluons
spontanées ou des modicaons dans les critères de conservaon futurs ?