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1.3 Le mécénat florentin et la famille Médicis.
« En ce jour de 1429, une foule nombreuse accompagne jusqu'à sa dernière demeure - l'église
San Lorenzo de Florence - Giovanni «di Bicci» de Médicis. Ancien gonfalonier de la ville (le
plus prestigieux des offices de justice), mécène, banquier, représentant de l'une des plus
grandes familles de Florence, le défunt avait su se faire respecter de ses concitoyens par sa
puissance et sa discrétion. Sa mort semble jeter une ombre sur l'avenir de la lignée. Tous les
regards convergent désormais sur son fils aîné, Cosme de Médicis. A quarante ans, celui-ci
parviendra-t-il à préserver les intérêts de la famille, notamment face au puissant clan des
Albizzi, maîtres de Florence ? Eduqué en prince, riche d'un patrimoine estimé à 180.000
florins, somme considérable pour l'époque, l'héritier des Médicis ne manque pas d'atouts pour
y parvenir. A commencer par la banque familiale, encore modeste en 1429, mais dont les trois
succursales italiennes jouent comme autant de relais de pouvoir et d'influence. »
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L’argent et la politique : tel est le secret de l’irrésistible ascension des Médicis ; la famille
s’est enrichie dans le commerce et l’industrie de la laine, spécialité de Florence, et commence
à « sortir de l’ombre » à la fin du XIII ième siècle, en prenant une part active à la vie de la
cité. Après avoir pris la tête de la « révolte des Ciompi », des ouvriers aux conditions de
travail misérables, la famille scelle une sorte d’alliance avec le parti populaire. La révolte sera
écrasée et les Médicis se retireront du monde politique pour se concentrer sur celui des
affaires, et c’est en 1393 que leur première banque naît.
« Deux siècles plus tard, les petites banques itinérantes ont bien changé. Devenues
compagnies commerciales, elles regroupent plusieurs associés, disposent de succursales dans
la plupart des places commerciales du monde méditerranéen et sont présentes dans toutes les
activités, de la fabrication de draps jusqu'aux mines en passant par le grand commerce
maritime, le change, les virements, les dépôts, les prêts aux princes, aux rois ou aux papes. »
Au début des années 1460, Cosme est devenu le protecteur attitré des Florentins et le
«parrain» de la ville. Mécène, ami des arts et des lettres, il s’offre même le luxe d'organiser,
en 1439, un concile à Florence pour tenter de réunir l'Eglise orthodoxe et l'Eglise catholique,
prenant à sa charge tous les frais, y compris le voyage de délégués éthiopiens. Le mécénat des
Médicis prend donc une forme particulière avec Cosme, qui porte un intérêt très vif à l’art et à
la science, « au service desquels il met sa fortune avec la libéralité d’un grand seigneur. Tout
Florence suivra son exemple. »
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Collectionneur, il est conseillé par Donatello, qu’il encouragera dans ses recherches
artistiques.
La différence entre le mécénat de Maecenas et celui de la famille Médicis est précisément
explicitée dans le fait que cette dernière va faire rentrer un nouveau facteur en jeu : le pouvoir.
Il y a ici une rupture entre la volonté et la finalité artistique de l’antiquité et la manière dont
l’Italie de la renaissance et le monde contemporain vont utiliser l’Art pour asseoir leur
domination.
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ANTONETTI P, Les Médicis, Paris, PUF, 1997
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LUCAS-DUBRETON J, La vie quotidienne à Florence au temps des Médicis, Paris, Hachette, 1958