Volume 56 – n° 5 Septembre 2009 Les antidépresseurs durant la grossesse à votre service sans ordonnance Les MVL chez les patients hypertendus LES pAges Bleues Les antirejets en transplantation cardiaque D’une page à l’autre Impact des conseils téléphoniques sur l’observance www.monportailpharmacie.ca PP 40070230 1200, avenue McGill College, bureau 800, Montréal (QC) H3B 4G7 Éditorial Tracasseries et drôleries Directrice de la rédaction Caroline Baril Rédactrice en chef Hélène-M. Blanchette, B. Pharm. Rédacteur en chef adjoint Jean-François Guévin, B. Pharm., M.B.A., Pharm. D. Adjointe à la directrice de la rédaction Stéphanie Decelles Direction artistique Dino Peressini Graphiste Adriana Alvear Ayala, Jocelyne Demers Directrice des rédactions, Groupe Santé Catherine Choquette Directeur des rédactions, Groupe Santé Rick Campbell Comité de rédaction Avez-vous entendu parler de... Isabelle Giroux, B. Pharm. M. Sc. Dominique Harvey, B. Pharm. À vos soins Sonia Lacasse, B. Pharm. Sophie Grondin, B. Pharm. M. Sc. À votre service sans ordonnance Nancy Desmarais, B. Pharm. Julie Martineau, B. Pharm. De la mère au nourrisson Caroline Morin, B. Pharm., M. Sc. D’une page à l’autre Isabelle Boisclair, B. Pharm., M. Sc. Nicolas Paquette-Lamontagne, B. Pharm., M. Sc., M.B.A. Inforoute Jean-François Bussières, B. Pharm., M. Sc., M.B.A. Les Pages bleues Chantal Duquet, B. Pharm., M. Sc. Ingrid Wagner, B. Pharm. Pharmacovigilance Marie Larouche, B. Pharm., M. Sc. Christine Hamel, B. Pharm., M. Sc. Place aux questions Elyse Desmeules, B. Pharm. Santé publique Suzie Lavallée, B. Pharm. Membre honoraire Georges Roy, M. Pharm. Impression Imprimeries Transcontinental Québec Pharmacie est publié 8 fois l’an par Rogers Media. Vous pouvez consulter notre politique environnementale à : www.leseditionsrogers.ca/about_rogers/ environmental.htm www.monportailpharmacie.ca Un éditorial n’est pas qu’une méthode de réflexion, une claque dans le dos ou un commentaire acerbe sur une situation. Ce peut être tout ça et ce peut être un clin d’œil. C’est le clin d’œil que je vous propose ici : les tracasseries sont monnaie courante en pharmacie, communautaire ou d’établissement. La lecture du dictionnaire des tracas1 m’a donné l’idée d’en décrire quelques-uns, avec de nouveaux mots à ajouter dans le dictionnaire du pharmacien. Je souhaite vous éviter la dépression saisonnière qui nous guette tous avec l’été gris que nous avons subi. N’oubliez pas votre vitamine D ! Aidant naturel : laxatif. Bévue : ne pas voir une erreur de distribution Bogue : cosse, peau, enveloppe. Par extension : peau du technicien informatique qu’on veut avoir pour son incompétence. Boudeur : patient qui refuse systématiquement tous les médicaments génériques parce qu’il y est allergique. Clairance : autorisation de décoller. Par extension : autorisation de servir un médicament selon la fonction rénale du patient. Collaborateur : professionnel de la santé qui agit en interdisciplinarité. Antonyme de multidisciplinaire. Couchtard : pharmacien dépanneur. Décoincé : client qui exprime fortement ses problèmes personnels dans la salle d’attente. Désespérance : recevoir un patient qui sort de l’hôpital avec une ordonnance de 18 médicaments, deux minutes avant la fermeture de la pharmacie. Par extension, recevoir un autobus de patients, alors que vous êtes à personnel réduit pour une raison quelconque. Hacher : devenir une victime de H1N1. Liseuse : personne qui prescrit au téléphone ce que le médecin a écrit dans ses notes ou ce que le médecin lui dit de dire. Livraison différée : produit en rupture de stock, pour une période indéterminée, parce que le fabricant ne sait pas quand il en produira. Par extension, ignorance d’une réalité. Mélangé : état de la personne qui veut administrer de la poudre de Colyte et ajoute 4 litres d’eau au patient pour bien le brasser ensuite. Monsieur net : patient qui a lu tous les sites Web sur un sujet lié à sa santé et qui vient vous les expliquer. Multidisciplinaire : professionnel de la santé qui peut agir en toute autonomie. Murailler : un professionnel de la santé qui ne rappelle jamais quand on tente de le rejoindre. Pause : robot, ensacheuse, emballeuse qui ne fonctionne pas. Peinurie : avoir de la peine à uriner. Ne pas confondre avec pénurie. Pénurie : carence en vitamine P. L’avitaminose P entraîne des bris de service. Perdus : les médicaments qu’un patient a commandés, qui ont été préparés mais qu’on ne trouve pas. Par extension, médicaments livrés par la pharmacie sur un étage, et non trouvés par l’infirmière. Prendre des vessies pour des rates : modification d’un vieux proverbe. Par extension : commettre une erreur en distribuant un ou plusieurs médicaments. Prescrire : contraire de proscrire. Proscrire : politique gouvernementale qui exclut les pharmaciens de leur plein rôle professionnel. Saint-dique : qui indique la voie de la sainteté professionnelle. Soufflant : patient qui arrive en courant, à bout de souffle et en crise d’asthme, et qui veut du Ventolin sans prescription. Transfaire : patient qui veut faire transférer ses médicaments d’une autre pharmacie, mais il ne sait plus dans laquelle il les avait obtenus. Transférite : patient qui transfère à tous les deux ou trois mois ses médicaments d’une pharmacie à une autre. Synonyme de transfoire. Technocent : technicien de soutien informatique qui nous demande de nous assurer que notre ordinateur est branché. N’est habituellement pas un technotwit. Technotwit : définition libre selon votre humeur, du lien d’une personne avec la technologie. Triage : choix du prochain politicien à nous embêter le moins possible. Walgrainer : chaîne américaine de pharmacies qui vend des glucomètres à l’extérieur en même temps que des beignets Krispy Kreme. Par extension, farce, blague. Bon automne à tous ! 1.Le baleinié, Christine Murillo, 3 tomes. septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 3 Sommaire Volume 56 – n° 5 – septembre 2009 Pour toute information 1200, avenue McGill College, bureau 800 Montréal (Québec) H3B 4G7 Téléphone : 514 845-5141 Télécopieur : 514 843-2183 [email protected] Changements d’adresses et abonnements Pour les pharmaciens par téléphone : 514 284-9588 par télécopie : 514 284-3420 par courriel : [email protected] Pour les non-pharmaciens Tél. : 514 843-2594 • Téléc. : 514 843-2182 Tarifs : Canada : 69 $ par année, 103 $ pour 2 ans, 8 $ l’exemplaire. Tarif de groupe/vrac : 55,20 $. (min. 6 exemplaires). États-Unis et international (abonnement individuel seul.) : 110 $ par année. Taxes en vigueur non comprises. Directrice des ventes Québec Caroline Bélisle 514 843-2569 (Montréal) Directrice nationale des ventes, Groupe Santé Nancy Kent 416 764-3902 (Toronto) Publicité/Ventes pharmaceutiques Josée Plante 514 843-2953 (Montréal) Pauline Shanks 514 843-2558 (Montréal) Nedjma Zidane 514 843-2559 (Montréal) Norman Cook 416 764-3918 (Toronto) Stephen Kranabetter 416 764-3822 (Toronto) Sara Mills 416 764-4150 (Toronto) Teresa Tsuji 416 764-3905 (Toronto) Petites annonces 514 843-2132 Directrice de la coordination et de la production publicitaire Sylvie Graveson 514 843-2565 Coordonnatrice de la production Maria Tomasino 514 843-2147 Coordonnateur du MSG Claude Larochelle 514 843-2114 Directeur de la diffusion, groupe B2B Keith Fulford 416 764-3878 [email protected] Coordonnatrice de la diffusion Francine Beauchamp 514 843-2594 [email protected] Directrice du développement des affaires, projets spéciaux Karen Welds 416 764-3922 Éditrice exécutive, Groupe Santé, Rogers Media Janet Smith Vous trouverez les questions de formation continue à la fin de chacun des articles. 3 Éditorial 7 À VOS SOINS 12 Place aux questions 16 DE LA MÈRE AU NOURRISSON 22 à votre service sans ordonnance 28 D’une page à l’autre 32 Vice-président senior, publications d’affaires et professionnelles John Milne Prise en charge de l’hypothyroïdie induite par le lithium Comment traiter et prévenir l’ostéonécrose de la mâchoire associée aux biphosphonates ? Les antidépresseurs durant la grossesse : des risques calculés Les MVL chez les patients hypertendus : au-delà du Code Médicament B Impact des conseils téléphoniques sur l’observance Avez-vous entendu parler de... Le dabigatran (PradaxMD) 39 Les pages bleues 47 Pharmacovigilance Intoxication par l’acide valproïque secondaire à une hypo-albuminémie Dans ce numéro Président et chef de la direction Rogers Media Anthony P. Viner Président des Éditions Rogers Media Brian Segal Tracasseries et drôleries Les antirejets en transplantation cardiaque Gestion thérapeutique 2009 Vice-présidents seniors Marc Blondeau, Mitch Dent, Michael J. Fox Vice-présidents – Planification opérationnelle Imme Chee Wah, Patrick Renard Vice-président – Production John Hall Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Québec, Bibliothèque nationale du Canada ISSN 0826-9874. Toutes les annonces de produits pharmaceutiques sur ordonnance ont été approuvées par le Conseil consultatif de publicité pharmaceutique. Envoi de poste – publications, convention nº 40070230. www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 5 À vos soins Prise en charge de l’hypothyroïdie induite par le lithium Présentation de cas Mme A.S., âgée de 53 ans, a un diagnostic de maladie affective bipolaire. Elle se présente à la pharmacie et vous demande de lui conseiller un produit sans ordonnance aux effets « stimulants ». Elle vous apprend que,­­depuis environ six mois, elle ressent une grande fatigue, de la faiblesse musculaire ainsi qu’une perte d’appétit. Elle a aussi noté que, cette année, elle tolérait mal le froid de notre hiver québécois et était très frileuse. Dans son dossier, vous notez la prise de carbonate de lithium (CarbolithMD) 600 mg tid depuis un an, médicament auquel elle semble observante. Elle vous mentionne que le prélèvement sanguin effectué la semaine dernière était normal, selon son médecin, et elle vous tend sa copie sur laquelle vous notez une augmentation de la valeur sérique de son hormone thyréostimulante (TSH), avec une concentration normale de thyroxine (T4) libre. Discussion L’action antithyroïdienne du lithium est bien connue, bien que son mécanisme exact ne soit pas complètement élucidé. De façon générale, le lithium entraîne une augmentation du contenu intrathyroïdien en iode et inhibe la formation et la sécrétion des iodothyronines, soit la thyroxine (T4) et la triiodothyronine (T3). Ces effets suppressifs risquent, entre autres, d’entraîner une hypothyroïdie, de conduire à la formation d’un goitre ou de favoriser une thyroïdite auto-immune1,2. On rapporte parfois quelques cas d’hyperthyroïdie concomitante à la prise de lithium, mais ils s’avèrent généralement une conséquence d’une compensation thyroïdienne excessive1. Notons que ces dysthyroïdies sont diagnos­ tiquées autant chez les consommateurs de lithium que chez les nouveau-nés exposés au lithium in utero2. Des données indiquent que le lithium entraîne une suppression de la fonction thyroïdienne chez environ 42 % des patients3. Elle se présente le plus fréquemment sous forme subclinique, c’est-à-dire entraînant une augmentation de la TSH et des concentrations sériques normales de T3 et T4 libres. Bien que plusieurs patients présentent tous les signes et symptômes d’une hypothyroïdie classique (augmentation de TSH avec diminution de concentration sérique de T4), les symptômes cliniques sont souvent absents lors d’hypothyroïdie subclinique3. Généralement augmenté au cours des deux premières années de traitement, le risque d’hypothyroïdie semble augmenter avec l’âge et serait particulièrement important chez les femmes âgées d’au moins 45 ans4. Un examen médical complet avant l’instauration d’un traitement par le lithium est primordial. Un examen physique de la thyroïde et la recherche de symptômes et d’antécédents familiaux devraient être effectués d’emblée, mais le bilan thyroïdien de base (TSH et T4 libre) et la mesure des anticorps antithyroïwww.monportailpharmacie.ca diens demeurent toutefois la pierre angulaire de cet examen pré-traitement afin de déceler une éventuelle dysthyroïdie. Le cas échéant, le lithium peut tout de même être administré, mais la dysfonction thyroïdienne doit être prise en charge le plus tôt possible3-5. Les conséquences de l’hypothyroïdie peuvent être d’ordre à la fois somatique (into- Texte rédigé par Julie Duchaine, B. Pharm., candidate L.L.M. Institut Philippe-Pinel. Texte original soumis le 13 mai 2009. Texte final remis le 18 juin 2009. Révision : Sonia Lacasse, B. Pharm. SMme A.S. présente une grande fatigue, de la faiblesse musculaire, une perte d’appétit et de la frilosité depuis environ six mois. OPatiente de 53 ans, sans allergie, avec diagnostic de maladie affective bipolaire. Tableau stable avec lithium 600 mg tid depuis un an; médication bien tolérée et lithémie normale. Aucune consommation de MVL ou produit naturel. Prélèvement sanguin de la semaine dernière : TSH élevée à 7,0 U/L (N = 0,5 – 4,7 U/L) et T4 libre normale de 10,8 pmol/L (N = 10,3 - 35,0 pmol/L). ALe lithium est connu pour induire une hypothyroïdie, le plus fréquemment sous forme subclinique, c’est-à-dire avec une augmentation de la TSH et des concentrations sériques normales de T4, tels les résultats sanguins de notre patiente. Selon la documentation scientifique, un traitement supplétif de T4 est recommandé lorsque la TSH se situe au-delà de 5 mU/L et qu’un patient est symptomatique. P Communiquer avec le médecin traitant pour suggérer l’ajout d’un traitement pour contrer les effets indésirables probablement induits par le lithium et exclure les diagnostics différentiels (par palpation de la glande et mesure des anticorps antithyroïdiens). n Recommander l’ajout de T4 (Synthroid), à raison de 25 μg die. Cette dose devra ensuite être réajustée selon les résultats du prélèvement sanguin, par paliers de 25 μg aux 6 semaines, jusqu’à stabilisation de la TSH dans l’intervalle recommandé (N = 0,5 – 4,7 U/L). n Expliquer le nouveau médicament à notre patiente, en insistant sur les effets indésirables à surveiller, l’importance de l’observance et des prélèvements sanguins pour en vérifier l’efficacité. n Réitérer l’importance de continuer la prise de lithium et de toujours consulter un pharmacien avant la prise de produits MVL ou naturels. n Faire un suivi, après deux semaines, pour s’assurer de la tolérance au nouveau médicament. n Lorsque la patiente viendra renouveler sa médication dans 3 mois, s’assurer qu’un bilan thyroïdien est prévu prochainement, aux trois mois pendant l’ajustement de la dose et aux 6 à 12 mois par la suite. Vérifier aussi l’amélioration des symptômes dans environ six mois. n septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 7 À vos soins Des données indiquent que le lithium entraîne une suppression de la fonction thyroïdienne chez environ 42 % des patients3. rance au froid, fatigue, etc.) et psychiatrique (dépression, diminution de la mémoire et de la concentration, etc.), d’où l’importance d’une prise en charge rapide. Le lithium peut être remplacé par une autre molécule ne causant pas cet effet indésirable, mais on peut éviter ce changement de médication en administrant un traitement pharmacologique d’appoint au lithium. L’hypothyroïdie classique devrait être traitée selon les lignes directrices en vigueur, avec une préférence pour un supplément de T4 (SynthroidMD) par rapport à la T3 (CytomelMD), cette dernière entraînant des taux hormonaux parfois erratiques. La dose moyenne de T4 est généralement évaluée à 1,7 μg/kg chez l’adulte6. En ce qui a trait à l’hypothyroïdie subclinique, son traitement demeure moins connu étant donné le peu de documentation scientifique sur le sujet. Toutefois, les lignes directrices et les consensus d’experts s’entendent sur le protocole suivant3,5: Si la TSH se situe entre 5 et 10 mU/L et que le patient est asymptomatique, un remplacement thyroïdien ne semble pas nécessaire, mais un suivi plus étroit est de rigueur. Une seconde mesure devrait toutefois être effectuée un mois plus tard. Si la TSH demeure élevée, un suivi aux trois mois doit être effectué3. Plusieurs experts sont d’avis que la majorité des patients bénéficient d’un traitement de remplacement lors d’une TSH élevée persistante, mais la décision de traiter ou non doit être prise selon le jugement du clinicien5. Si la TSH se situe entre 5 et 10 mU/L et que le patient est symptomatique ou si la TSH est élevée au-dessus de 10 mU/L – que le patient soit symptomatique ou non – un traitement semble nécessaire. Dans ce cas, il est recommandé de débuter la T4 à raison de 25 à 50 μg par jour, puis d’augmenter par paliers de 25 μg aux 6 à 8 semaines jusqu’à stabilisation de la TSH dans l’intervalle recommandé. Par contre, un titrage plus graduel est recommandé chez les patients âgés ou présentant des troubles cardiaques. Un délai pouvant atteindre six mois est parfois nécessaire afin d’observer une amélioration clinique3. Une réévaluation de la fonction thyroïdienne devrait être effectuée 3 mois après l’instauration de la T4, puis aux 6 à 12 mois par la suite3. De plus, puisque l’hypothyroïdie est généralement réversible à l’arrêt du lithium, il est primordial de s’assurer que le traitement par la T4 ne soit pas poursuivi sans motif valable après un arrêt ou un changement de stabilisateur de l’humeur. Acte pharmaceutique facturable Opinion pharmaceutique : Ajouter un médicament complémentaire à un autre médicament pour enrayer ses effets indésirables. (DIN 00999027) n Opinion pharmaceutique Docteur, Tel que discuté, nous vous transmettons un résumé de notre conversation téléphonique concernant Mme A.S. Après discussion avec notre patiente, nous avons constaté qu’elle présentait, depuis environ six mois, des symptômes qui pourraient être liés à une éventuelle hypothyroïdie subclinique, selon les résultats de laboratoire observés la semaine dernière. Ces symptômes incluaient fatigue, faiblesse, perte d’appétit et frilosité. Dans un tel cas de tableau symptomatique avec une valeur de TSH au-delà de 5 mU/L, il est recommandé d’instaurer un traitement par la T4 (Synthroid), à raison de 25 μg die, à ajuster en fonction de prélèvements sanguins effectués aux trois mois, jusqu’à l’obtention d’une TSH comprise dans l’intervalle-cible (N = 0,5 – 4,7 U/L). Un bilan thyroïdien devrait ensuite être effectué aux 6 à 12 mois par la suite. Tel que discuté, nous avons également adressé la patiente à votre bureau pour un examen physique et une mesure des anticorps antithyroïdiens afin d’exclure les diagnostics différentiels. Nous avons donc débuté le traitement comme convenu et assurerons un suivi auprès de Mme A.S. N’hésitez pas à nous contacter pour de plus amples informations. Il nous fera plaisir de rediscuter avec vous. La pharmacienne Références 1.Maarbjerg K, Vestergaard P, Schou M. Changes in serum thyroxine (T4) and serum thyroid stimulating hormone (TSH) during prolonged lithium treatment. Acta Psychiatr Scand 1987; 75: 2217-21. 2.Correll CU, Carlson HE. Endocrine and metabolic adverse effects of psychotropic medications in children and adolescents. J Am Acad Child Adolesc Psych 2006; 45: 771-791. 3. Kleiner J, Altshuler L, Hendrick V et coll. LithiumInduced Subclinical Hypothyroidism: Review of the Literature and Guidelines for treatment. J Clin Psychiatry 1999; 60: 249-255. 4. Johnston AM, Eagles JM. Lithium-associated clinical hypothyroidism – Prevalence and risk factors. Br J Psychiatry 1999; 175: 336-339. 5. Gharib H, Tuttle RM, Baskin HJ et coll. Consensus statement: Subclinical Thyroid Dysfunction: A Joint Statement on Management from the American Association of Clinical Endocrinologists, the American Thyroid Association, and The Endocrine Society. J Clin Endocrinol Metab 2005; 90: 581-585. 6. Singer PA, Cooper DS, Levy EG et coll. Treatment guidelines for patients with hyperthyroidism and hypothyroidism. Standards of Care Committee, American Thyroid Association. JAMA 1995; 273: 808812. 8 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Question de formation continue 1) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux? A.Certains patients peuvent présenter une hyperthyroïdie associée à la prise de lithium. B. Un patient non symptomatique avec une TSH de 9 mU/L et des valeurs normales de iodothyronines ne nécessite généralement pas de traitement supplétif de T4 (Synthroid) à moins d’avis contraire du clinicien. C. Un prélèvement sanguin devrait être fait au moins trois mois après le début de la thérapie supplétive de T4 (Synthroid). D.Le lithium induit le plus fréquemment une hypothyroïdie classique, une élévation de la TSH et une diminution des concentrations sériques d’iodothyronines, plutôt qu’une hypothyroïdie subclinique. E. Un fœtus peut être atteint d’une dysthyroïdie causée par la thérapie au lithium de sa mère. Veuillez reporter votre réponse dans le formulaire de la page 90 Place aux questions Comment traiter et prévenir l’ostéonécrose de la mâchoire associée aux biphosphonates ? Les biphosphonates sont indiqués dans le traitement et la prévention de l’ostéoporose, dans le traitement de la maladie de Paget et de l’hypercalcémie associée à certains cancers tels que les myélomes multiples, ainsi que pour soulager les douleurs liées aux métastases osseuses. Depuis quelques années, nous avons vu plusieurs rapports de cas d’ostéonécrose de la mâchoire (mort osseuse découlant d’une innervation sanguine insuffisante) qui découlent de leur activité inhibitrice sur les ostéoclastes1,2. Même si son incidence demeure faible et qu’elle est plus souvent associée aux formulations intraveineuses utilisées en oncologie, il y a lieu de se questionner sur notre rôle comme pharmaciens dans la prévention et le traitement de cette complication1. Texte rédigé par Joanie Vivier-Trépanier, étudiante en pharmacie, 4e année. Révision : Elyse Desmeules, B. Pharm., et Geneviève Duperron, B. Pharm. Texte original soumis le 21 janvier 2009. Texte final remis le 2 février 2009. Incidence L’incidence de ce problème dans la population générale est difficile à déterminer. Toutefois, celle-ci semble être relativement faible, bien qu’elle s’accentue d’année en année1. Les médicaments les plus souvent associés à l’ostéonécrose sont, par ordre d’importance, le zolédronate, le pamidronate, l’alendronate et le risédronate1. Une revue de la documentation médicale publiée par Shane en mai 2006 affirmait que moins de 5 % des cas d’ostéonécrose de la mâchoire Tableau I Traitements de l’ostéonécrose de la mâchoire associée aux biphosphonates Traitements Commentaires A) Chirurgie et débridementRéservé aux cas réfractaires, si encore symptomatique même après un traitement à long terme aux antibiotiques. risque d’exposition de l’os, peut aggraver les symptômes. B) Antibiotiques : 1.Pénicilline V 500 mg* po qid 1er choix4-6 2. Doxycycline 100 mg die 2e ligne. Alternative si allergie aux pénicillines4 3. Azithromycine 250 mg die 2e ligne. Alternative si allergie aux pénicillines4 4.Pénicilline V 500 mg* po qid ou amoxi- Cas réfractaires ou plus symptomatiques4-6 cilline/acide clavulanique 1 g po q 12 h + Métronidazole 500 mg po tid 5. Ciprofloxacine 500 mg po bid Alternative si allergie aux pénicillines ou érythromycine 400 mg* po tid et/ou cas réfractaires4-6 + métronidazole 500 mg po tid 6. ClindamycineNon recommandé en raison de la faible et même quasi­-absence d’activité contre les microorganismes impliqués4 C)Rince-bouche à base de Adjuvant au traitement antibiotique chlorhexidine 0,12 % tid-qid D)Oxygénothérapie hyperbareEfficacité très limitée3 * Doses proposées dans la documentation médicale américaine, formulations non disponibles au Québec 12 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 étaient liés aux biphosphonates par voie orale1. Symptômes Les symptômes vont du simple inconfort à une douleur intense à la mâchoire. La douleur serait davantage liée à l’infection qui pourrait apparaître au site plutôt qu’à l’exposition osseuse elle-même4. En effet, la mort des tissus environnants implique la disparition de l’innervation à cet endroit, d’où l’absence de sensation de douleur. Une difficulté à avaler et à se brosser les dents pourrait également survenir. Dans de rares cas, une paresthésie pourrait se manifester au niveau de la mâchoire allant même jusqu’à défigurer le patient1. Dans ces cas graves, on a également rapporté une perte pondérale et un état de dénutrition. Hypothèses de développement Le mécanisme de développement de l’ostéonécrose n’est pas très bien élucidé. L’hypothèse la plus fréquemment émise est la suivante : la diminution du remaniement osseux causée par les biphosphonates amènerait un ralentissement des mécanismes de réparation de l’os occasionnant la formation de microlésions et, éventuellement, de lésions plus importantes pouvant aller jusqu’à la nécrose de l’os. De plus, l’action anti­ angiogénique des biphosphonates contribuerait à l’effet ischémique déjà présent aux endroits endommagés. Enfin, le fait de manger, de mastiquer et/ou de grincer des dents amènerait un remodelage osseux plus rapide au niveau de la mâchoire par rapport à d’autres os du corps1,2. Facteurs de risque L’analyse des différents cas a permis de déceler plusieurs facteurs de risque associés à ce type d’ostéonécrose : l’inflammation et l’ir- Comment traiter et prévenir l’ostéonécrose de la mâchoire associée aux biphosphonates ? Les médicaments les plus souvent associés à l’ostéonécrose sont, par ordre d’importance, le zolédronate, le pamidronate, l’alendronate et le risédronate1. ritation de la muqueuse (p. ex., prothèses dentaires mal ajustées), certaines maladies (cancer, diabète, anémie, problèmes de coagulation et maladies vasculaires périphériques), certains médicaments (chimiothérapie, corticostéroïdes), les interventions dentaires effractives (chirurgie, extraction), les problèmes dentaires préexistants, le type de biphosphonates (dose, durée de traitement, voie d’administration), l’alcool et la cigarette. Selon les différentes références consultées, dans près de 50 % des cas, l’ostéonécrose survenait à la suite des interventions dentaires effractives, raison pour laquelle l’Academy of Oral medicine recommande de cesser la prise de biphosphonates un mois avant une telle intervention. D’un autre côté, cette pratique reste encore controversée puisque la portée de cette intervention n’est pas réellement connue et que la demi-vie osseuse de cette classe de médicaments est au-delà de 10 ans3. Traitements Présentement, il n’existe pas de lignes directrices dans la documentation médicale sur les traitements de cette complication. C’est pourquoi les traitements suggérés (tableau I) découlent d’études de cas. La thérapie vise à diminuer la douleur et à prévenir la progression de la nécrose. La durée du traitement antibiotique varie selon les références consultées. Certains auteurs recommandent un traitement de 14 jours ou jusqu’à la maîtrise de la douleur3,4. D’autres préconisent un traitement à long terme, et même permanent dans certains cas réfractaires3. Toutefois, il faut se rappeler qu’un traitement antibiotique à vie peut entraîner des problèmes de résistance. De plus, Marx et coll. recommandent de cesser le biphosphonate pendant six à neuf mois afin de permettre une meilleure guérison des tissus, puisque, de cette façon, l’effet antiangiogénique des biphosphonates est abolie4. les inciter à consulter leur dentiste tous les six mois afin de déceler toute anomalie. Les interventions dentaires effractives devraient être évitées si le traitement par les biphosphonates a débuté depuis plus de trois mois1. Idéalement, une évaluation de la santé buccale du patient devrait être faite au moins un mois avant de commencer un traitement afin d’enrayer toute possibilité d’infection et de procéder à des extractions dentaires s’il y a lieu6. Conclusion La prévention demeure la meilleure option. C’est ainsi que notre rôle en tant que pharmacien entre en jeu. Nous devons encourager une bonne hygiène dentaire auprès de nos patients prenant des biphosphonates et L’ostéonécrose de la mâchoire est surtout associée aux biphosphonates intraveineux. Pour l’instant, son incidence demeure faible, mais sachant que les interventions dentaires effractives telles que les extractions dentaires semblent être un facteur précipitant, la vigilance s’impose. De plus, il ne faut pas oublier de prendre en considération l’ensemble des facteurs de risque d’un patient. En attendant des traitements plus prometteurs, il faut miser sur la prévention et l’information. Le rôle du pharmacien devient donc primordial dans cette optique. n 3. Krueger CD, Lodolce AE, Pickard AS et coll. Bisphosphonate-Induced Osteonecrosis of the Jaw. The Annals of Pharmacotherapy. Fév 2007; 41 : 276-84. 4. Cillo Jr JE, Marx RE, Ulloa JJ. Oral BisphosphonateInduced Osteonecrosis: Risk Factors, Prediction of Risk Using Serum CTX Testing, Prevention, and Treatment. Journal of Oral Maxillofacial Surgery 2007; 65 : 2397-2410. 5. Bartolomeo-Gissi D, Felicetti L, Marchetti C et coll. Biphosphonate-associated osteonecrosis can be controlled by nonsurgical management. Oral Surgery, Oral Medecine, Oral Pathology, Oral Radiology and Endodontics 2007; 104 : 473-7. 6. Broumand V, Fortin M, Marx RE, Sawatari Y. Biphosphonate-Induced Exposed Bone (osteonecrosis/Osteopetrosis) of the Jaws : Risk Factors, Recognition, Prevention and Treatment. Journal of Oral Maxillofacial Surgery 2005; 63 : 1567-75. 7. Cardoso ES, Cardoso AS, Correa MEP et coll. Oral avascular bone necrosis associated with chemotherapy and biphosphonate therapy. Oral Diseases 2005; 11; 365-69. Prévention Références 1. Gomez-Front R, Martinez-Garcia ML, Olmos-Martinez JM. Osteochemonecrosis of the Jaws due to Bisphophonate Treatments. Update. Medecina Oral, Patologìa Oral y Cirugìa Bucal 2008; Mai 1; 13 (5) : E318-24. 2. Bernal M, Blumentals WA, Kothawala P et coll. A Review of the Litterature on osteonecrosis of the jaw in Patients with Osteoporosis Treated with Oral Biphosphonates : Prevalence, Risk Factors, and Clinical Characteristics. Clinical Therapeutics 2007; 29 (8) : 1548-58. Question de formation continue 2) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux ? A. La douleur liée à la nécrose osseuse de la mâchoire est un symptôme important de cette complication et serait associée fréquemment à une infection. B. Les médicaments souvent impliqués dans l’ostéonécrose sont, par ordre d’importance, le zolédronate, le pamidronate, l’alendronate et l’étidronate. C. Le mécanisme hypothétique du développement de ce problème comporte principalement deux volets : le ralentissement du processus de réparation de l’os et l’action antiangiogénique des biphosphonates. D. La ciprofloxacine 500 mg po bid associée au métronidazole 500 mg po tid constitue un des traitements de l’ostéonécrose chez les patients réfractaires à la pénicilline. E. Toutes ces réponses sont fausses. Veuillez reporter votre réponse dans le formulaire de la page 90 www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 13 De la mère au nourrisson Les antidépresseurs durant la grossesse : des risques calculés L’état des connaissances sur l’impact des antidépresseurs sur le développement fœtal a grandement évolué ces 10 dernières années. Cette somme croissante d’informations, conjuguée aux difficultés d’interprétation des méthodologies de recherche employées et aux résultats parfois contradictoires des études, peut constituer un véritable casse-tête pour le pharmacien qui doit pourtant conseiller ses patientes enceintes et renseigner l’équipe médicale. Cet article vise à faire une synthèse des données publiées à ce jour sur l’innocuité des antidépresseurs durant la grossesse. Texte rédigé par Brigitte Martin, B. Pharm., M.Sc., Centre IMAGe, CHU Sainte-Justine, et Martin Saint-André, MD, CM, FRCPC, psychiatre, CHU Sainte-Justine. Texte original soumis le 7 janvier 2009. Texte final remis le 7 février 2009. Révision : Marie-Julie Cimon, MD, FRCPC, psychiatre, CHUL, Centre mère-enfant. Bien que complémentaire à la prescription d’antidépresseurs durant la grossesse, la place des thérapies non pharmacologiques ne sera pas examinée dans ce texte centré sur les données factuelles des agents pharmacologiques. Le lecteur qui désire compléter son étude du sujet est référé à des sources d’informations récentes qui abordent cet aspect1. Cas clinique Karine se présente à la pharmacie pour renouveler son ordonnance de venlafaxine. Elle reçoit ce traitement depuis deux ans pour une récidive de dépression majeure. Ses symptômes sont bien maîtrisés actuellement. Elle vous demande conseil au sujet d’une grossesse éventuelle : peut-elle poursuivre ce médicament sans risque ? Elle ne prend aucun autre médicament. Les troubles anxieux et dépressifs en période périnatale : quelques éléments de contexte La prévalence des troubles dépressifs est d’environ à 7 % à 13 % durant la grossesse, et 2 % à 6 % des femmes enceintes répondent aux critères de dépression majeure2. Ces chiffres se comparent à ceux observés dans la population générale : la grossesse ne semble ni protéger des troubles dépressifs, ni les exacerber. Pour la future mère, une psychopathologie non traitée peut signifier une décompensation psychiatrique, une entrave au suivi prénatal et à la préparation à l’arrivée du nouveau-né, des conflits exacerbés avec la famille et l’entourage, un recours plus fréquent à l’alcool, au tabac et aux médicaments1. Pour l’enfant à naître, les troubles dépressifs et le stress maternels ont été associés à une augmentation du risque d’avortements spontanés, de prééclampsie, de prématurité, de petit poids à la naissance, de complications néonatales, de scores APGAR diminués et de niveaux de cortisol élevés2. Une dépression durant la grossesse augmente le risque de dépression postnatale et, conséquemment, peut com- 16 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 promettre le développement du lien mèreenfant. À plus long terme, certaines recherches relient également la présence de stress et de symptômes dépressifs durant la grossesse à des troubles de développement chez l’enfant (difficultés tempéramentales, impulsivité, etc.)2,3. Soulignons que toutes les études n’ont pas relevé ces risques et que plusieurs facteurs de confusion peuvent intervenir dans ces résultats. Les mères qui lisent les résultats de ces études ont souvent tendance à se sentir inquiètes et très culpabilisées, ce qui devrait amener le pharmacien à exercer sa prudence en transmettant ces informations à des mères fragilisées. On sait par ailleurs que le cerveau du bébé présente une grande neuroplasticité et que, cliniquement, la récupération de certains bébés exposés in utero à des stress importants s’est avérée excellente2,3. En dépit de ces données, une grande proportion des femmes préfèrent cesser leur traitement lorsqu’elles apprennent leur grossesse, et la majorité d’entre elles le font par crainte des effets nocifs sur le développement de leur enfant4. Il importe donc pour les pharmaciens de bien connaître les données d’innocuité des antidépresseurs pour guider le plus justement possible leurs patientes et pour conseiller judicieusement l’équipe médicale sur les options pharmacologiques disponibles. Tératogenèse structurelle Les antidépresseurs Le tableau I recense les observations des principales études publiées sur les effets d’une exposition anténatale aux antidépresseurs pour l’embryon, le fœtus et le nouveauné. Il s’agit d’un résumé condensé d’un sujet complexe : le lecteur intéressé par un aspect précis de la question est invité à examiner de façon plus approfondie les études citées dans le tableau. La bibliographie complète du tableau peut être consultée sur le site Web www.monportailpharmacie.ca (archives de juillet-août de Québec Pharmacie). De façon générale, les antidépresseurs ne comportent pas de risques tératogènes majeurs, Les antidépresseurs durant la grossesse : des risques calculés bien que la somme et la qualité des données étayant cette thèse varie d’une molécule à l’autre. Dans le cas des médicaments plus récents ou moins souvent utilisés, les données ne permettent pas d’exclure tous les risques. La paroxétine Les récentes mises en garde de Santé Canada au sujet d’un lien possible entre la paroxétine et les malformations congénitales, et notamment des anomalies du septum cardiaque, ont alarmé les cliniciens et leurs patientes. Les données actuelles Une récente méta-analyse ne décèle pas de risques augmentés de malformations cardiaques5. En effet, le taux de malformations cardiaques calculé à partir des six études de cohorte retenues est de 1,14 % pour les enfants exposés à la paroxétine au premier trimestre, alors que celui des groupes de comparaison est de 1,09 %. La différence n’est pas statistiquement significative et ces valeurs correspondent aux incidences mesurées dans la population générale. De plus, la combinaison des trois études cas-témoins retenues permet de calculer un rapport de cote de 1,18 (intervalle de confiance [IC] 95 % 0,88-1,59) pour les malformations cardiaques. Depuis la parution de cette méta-analyse, deux autres publications ont relancé la controverse. Une étude comptant 3000 enfants a constaté que l’exposition in utero à un inhibiteur sélectif du recaptage de la sérotonine (ISRS) n’augmente pas le risque général de survenue d’une anomalie majeure6. Cependant, le taux de malformations du septum cardiaque est augmenté de 0,21 % en termes absolus. La paroxétine ne fait pas l’objet d’une analyse séparée, mais elle constitue plus du tiers de l’échantillon. Une autre étude a observé un risque augmenté de malformations majeures, notamment cardiovasculaires, avec la paroxétine et la fluoxétine par rapport au groupe de comparaison (malformations majeures : 5,2 % c. 4,7 % c. 2,5 %, respectivement)7. Ainsi, les données épidémiologiques actuelles ne permettent pas de résoudre la controverse. Notons cependant quelques éléments supplémentaires plutôt en défaveur d’un risque tératogène : les données animales ne démontrent pas de tératogenèse semblable à celle soupçonnée chez l’humain, l’association est faible dans les études montrant un risque potentiel, les anomalies en question (anomalies septales) sont peu spécifiques et leur incidence de base est très variable. Des facteurs de risque ? Une étude cas-témoins a proposé un lien dose-réponse entre l’exposition à la paroxéwww.monportailpharmacie.ca tine et la survenue d’anomalies cardiaques : des doses supérieures à 25 mg par jour pendant l’organogenèse cardiaque pourraient être associées à un risque potentiel (rapport de cote 3,07, IC 95 % 1,00-9,42)8. Une autre étude a également soulevé la possibilité d’un effet tératogène synergique entre les ISRS et les benzodiazépines6. Ces effets potentiels constituent des pistes d’explication pour comprendre les résultats contradictoires des multiples études épidémiologiques. donné l’absence de contrôle pour la condition psychiatrique maternelle, de multiples facteurs de confusion ou de faibles effectifs. L’état actuel des connaissances permet de penser que le taux de prématurité est plus élevé que dans la population générale, mais que la réduction de la durée de la grossesse est de faible amplitude, soit de quelques jours en moyenne; rappelons également que la dépression est elle-même un facteur de risque pour ces complications. En résumé Complications néonatales S’il existe effectivement un risque tératogène associé à la paroxétine, il reste faible : les femmes exposées au premier trimestre ont un risque supplémentaire inférieur à 1 % de donner naissance à un enfant présentant une malformation majeure. Ce risque supplémentaire est probablement attribuable à une légère augmentation des malformations du septum cardiaque. Rappelons que le risque de base d’anomalies majeures dans la population générale se situe à environ 2 % à 3 %, et celui des malformations cardiaques, à environ 1 %. Les données actuelles ne penchent pas vers un effet de classe, les autres ISRS ne comportant probablement pas ces risques. Dans la mesure du possible, on évitera la prescription de la paroxétine chez les femmes en âge de procréer ou planifiant une grossesse. Cependant, une femme exposée avant de connaître sa grossesse devra être rassurée et informée des examens de dépistage anténatals, comme l’échocardiographie fœtale, qui pourraient lui être proposés. La plupart des antidépresseurs ont été associés à des complications à la naissance pour les enfants exposés à la fin de la grossesse (tableau I). Il s’agit surtout d’observations cliniques isolées pour les antidépresseurs tricycliques et les agents plus récents, mais on reconnaît maintenant l’existence d’un syndrome néonatal d’exposition pour les ISRS et les inhibiteurs du recaptage de la sérotonine et de la norépinéphrine (IRSN)21. En effet, 20 % à 30 % des enfants exposés dans les dernières semaines de la grossesse manifestent des signes qui se présentent dans les heures suivant la naissance et perdurent pendant quelques jours, et moins souvent jusqu’à une ou deux semaines21. Dans la grande majorité des cas, ces signes sont transitoires, ne retardent pas le congé de l’enfant à la maison et ne comportent pas de risque vital pour l’enfant13,22. Plus rarement, soit dans moins d’un pour cent des cas, les signes peuvent être plus graves : quelques études ont établi des liens entre l’exposition aux ISRS et des convulsions néonatales ou de l’hypertension pulmonaire21,23,24. Par contre, une étude plus récente n’a pas décelé d’association entre la prise d’ISRS en fin de grossesse et l’hypertension pulmonaire néonatale25. On ne connaît pas encore précisément l’étiologie de ces manifestations, ni les facteurs de risque (possiblement la dose, la polythérapie, la prématurité, etc.) qui pourraient prédisposer certains enfants à ces complications. Complications obstétricales Avortements spontanés Deux méta-analyses ont relevé un risque accru d’avortements spontanés chez les femmes traitées par des antidépresseurs9,10. Cependant, la plupart des études incluses n’étaient pas conçues pour l’évaluation de cette issue de grossesse et les taux observés (environ 12 %), s’ils sont supérieurs aux taux des groupes témoins, se situent néanmoins dans les limites attendues dans la population générale. Prématurité et poids à la naissance Plusieurs chercheurs ont observé une réduction de la durée de la grossesse, une augmentation du taux de prématurité ou un risque augmenté de petit poids pour l’âge gestationnel chez les enfants exposés in utero aux antidépresseurs11-16. D’autres études n’ont pas montré de tels effets17-20. Les conclusions de la plupart de ces études doivent être interprétées avec prudence étant Développement psychomoteur Les recherches commencent à peine à cerner les conséquences à long terme d’une exposition anténatale aux antidépresseurs. Onze des 13 études publiées à ce jour notent que les enfants d’âge préscolaire exposés aux ISRS durant la grossesse ont un développement psychomoteur comparable à celui des enfants des groupes de comparaison26. Une seule étude constate que l’exposition in utero aux ISRS est associée à une réduction modeste de certains scores de développement moteur des enfants entre 6 et 40 mois. Une étude englobant d’autres septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 17 De la mère au nourrisson médicaments comme les antiépileptiques et les benzodiazépines relève davantage de scores psychomoteurs anormaux chez les enfants exposés; ces résultats devront être reproduits dans des études centrées sur les antidépresseurs seulement avant de conclure à un effet de cette classe de médicaments. L’approche clinique en bref Choisir un antidépresseur Dans un contexte de planification de grossesse ou de traitement à débuter durant la grossesse, la décision sera guidée par les données d’innocuité du médicament, mais aussi par la présentation générale de la condition de la patiente, sa réponse antérieure à un agent ou une classe pharmacologique, ses comorbidités, les effets indésirables attendus et les interactions potentielles avec d’autres traitements pharmacologiques en cours. Dans la mesure du possible, on choisira les agents pour lesquels on a davantage de recul durant la grossesse, soit les ISRS comme la fluoxétine, la sertraline et le citalopram (tableau I). L’innocuité des nouveaux antidépresseurs est relativement peu connue jusqu’à présent : on envisagera leur prescription dans les situations cliniques plus compliquées, dans les cas de non-réponse ou d’intolérance aux agents mieux connus. Le profil d’effets indésirables moins favorable des antidépresseurs tricycliques les relègue en deuxième recours. Poursuivre ou cesser un traitement une fois la grossesse confirmée La décision de poursuivre ou de cesser un traitement chez une femme qui vient de confirmer sa grossesse doit tenir compte de la gravité de la maladie traitée, du risque de rechute et des données accumulées sur le médicament. Si on peut envisager l’arrêt du traitement pour plusieurs d’entre elles, le risque de rechute durant la grossesse est élevé et justifie un suivi étroit de l’état de la patiente. Dans une étude, les deux tiers des femmes dont la dépression était maîtrisée et ayant cessé leur médication avant la conception ont subi une rechute au cours de la grossesse, comparativement à un quart des femmes ayant poursuivi leur traitement27. Les femmes de cette cohorte avaient cependant de lourds antécédents psychiatriques : ces chiffres peuvent être moindres dans le cas d’une patiente sans comorbidités ou sous traitement pour un premier épisode de dépression. Si le traitement est poursuivi, on favorisera une monothérapie, avec les doses les moins élevées possibles qui permettront de conserver une efficacité clinique. 18 Dans le cas des grossesses non planifiées, ce qui survient dans près de 50 % des cas, l’exposition embryonnaire au médicament a déjà eu lieu, et il est souvent difficile de sevrer le médicament avant la fin de l’organogenèse : même si on peut y voir d’autres avantages, le fait de cesser le traitement à ce stade ne réduit pas, ou peu, les risques potentiels de tératogenèse structurelle. Finalement, à moins d’une intolérance ou d’une réponse non satisfaisante, il existe peu de situations cliniques où un antidépresseur devrait être changé pour un autre une fois la grossesse amorcée, car on exposerait alors la patiente et le fœtus à plusieurs médicaments plutôt qu’à un seul. Poursuivre le traitement pharmacologique à la fin de la grossesse À l’approche du troisième trimestre, l’équipe traitante et la patiente doivent discuter des symptômes néonatals possibles et soupeser ces risques et les bienfaits de la poursuite du traitement pharmacologique. Si l’on peut être tenté de diminuer ou d’arrêter un traitement avant l’accouchement pour prévenir la survenue d’un éventuel syndrome néonatal d’exposition aux antidépresseurs, rappelons que la plupart des patientes présentent des risques significatifs d’exacerbation ou de rechute de leur condition anxiodépressive qui justifieront la poursuite du médicament à l’approche de la période postnatale. Dans la discussion avec la patiente, on doit exposer la nature et la gravité des signes habituellement observés chez les nouveau-nés : les signes sont transitoires et peu graves dans la grande majorité des cas et les manifestations plus graves sont également beaucoup plus rares. Les données actuelles laissent penser qu’un suivi de routine est suffisant pour les enfants qui seront exposés. Le rôle du pharmacien Lors de l’entrevue avec la patiente, il est avant tout essentiel de faire le point sur les histoires médicale et pharmacologique de la patiente et de s’informer de l’évaluation du médecin traitant de façon à conserver la cohérence du message pour la patiente et d’éviter la multiplicité des points de vue. La communication des risques peut constituer un défi : prendre un médicament antidépresseur durant la grossesse est un geste chargé de significations pour une femme qui désire bien sûr le meilleur pour son enfant à naître. Souligner les avantages d’un état psychiatrique bien maîtrisé pour elle-même et sa famille, insister sur les bienfaits d’un traitement pharmacologique s’il a été jugé nécessaire, expliquer les risques connus ou l’innocuité des médicaments en Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 prenant le temps de préciser les limites des données actuelles et les mettre en perspective avec les risques de ne pas traiter, aider le couple à interpréter les données relayées par les médias comme Internet, présenter le suivi possible, voilà des interventions qui permettront au pharmacien d’aider la patiente et le couple à se conforter dans leur décision. Enfin, le pharmacien peut profiter des renouvellements de médicaments pour offrir son soutien professionnel à la patiente et au couple, pour détecter les signes d’intolérance au traitement ou de réponse insuffisante au traitement, et pour faire le suivi à l’équipe médicale traitante (médecin, psychologue, etc.) si nécessaire. Retour sur le cas de Karine Vous expliquez à Karine les connaissances actuelles, limitées mais rassurantes, sur l’innocuité de la venlafaxine en grossesse. Si son traitement s’avère nécessaire durant la grossesse, la venlafaxine ne comporte pas de risques supérieurs au risque de base d’anomalies dans la population générale : elle a donc 97 % à 98 % des chances que son bébé se développe normalement, comme dans toutes les grossesses. Vous profitez de la rencontre avec Karine pour l’encourager à bien prendre soin d’elle-même durant sa grossesse et à bien s’entourer d’un réseau de soutien et de soins, dont vous ferez partie. Vous lui rappelez qu’advenant des changements d’humeur importants durant sa grossesse et durant le post-partum, ce qui n’est pas rare, elle pourra trouver du soutien auprès de son médecin et du CSSS qui offre des programmes de soutien pour les jeunes parents. Vous adressez Karine à son médecin pour discuter des autres aspects de sa question, et notamment des risques potentiels à cesser son traitement compte tenu de son histoire de dépression. Enfin, vous lui recommandez de débuter une multivitamine contenant 0,4 à 1 mg d’acide folique. Conclusion Les antidépresseurs sont parmi les médicaments les plus étudiés durant la grossesse et la somme croissante des données aide heureusement les professionnels de la santé à délimiter de mieux en mieux les risques et les bienfaits du traitement psychopharmacologique. Le traitement des troubles de l’humeur et liés à l’anxiété en période périnatale pose également des défis de communication qui demandent aux pharmaciens d’apporter leur soutien à des patientes souvent inquiètes, et qui mettent en lumière l’importance du travail interdisciplinaire auprès de cette clientèle. n Les antidépresseurs durant la grossesse : des risques calculés Tableau I Innocuité des antidépresseurs durant la grossesse : revue des principales données Médicament ou classe Tératogenèse structurelle (exposition au premier trimestre de la grossesse) Complications néonatales et développement psychomoteur Antidépresseurs tricycliques et hétérocycliques Près de 3500 expositions sans preuve d’une augmentation du risque de malformations majeures par rapport au risque de base4,11,12,17,28-34 Quelques notifications d’effets indésirables néonatals (rétention urinaire, iléus, convulsions, etc.)28 Augmentation de 1,5 à 2 fois du risque d’anomalies cardiaques avec la clomipramine dans un seul rapport33 Pas de preuve d’un effet néfaste majeur sur le développement psychomoteur dans deux petites études11,31 Environ 4100 expositions au citalopram, 4200 à la sertraline, et 5700 à la fluoxétine : risque de malformations congénitales généralement comparable au risque de base Complications néonatales (agitation, irritabilité, trémulations, hyper/hypotonie, tachypnée, tirage, difficultés alimentaires, etc.) transitoires et peu graves décrites chez environ 20 % à 30 % des nouveau-nés; complications graves (hypertension pulmonaire, convulsions) plus rares (< 1 %); lien dose-réponse parfois suggéré, et risque apparemment plus élevé si polythérapie (notamment avec benzodiazépines) et si prématurité13-15,19,21-25,47-53 Inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS) Environ 200 expositions à l’escitalopram et 400 à la fluvoxamine : données encore insuffisantes pour statuer sur les risques, mais pas de preuve d’un effet tératogène majeur à ce jour4,6,7,11,14,17-20,30,34-38 5200 expositions à la paroxétine dans diverses études4,6-8,12,18,20,36,37,39-44; augmentation des malformations majeures, notamment cardiovasculaires, notée dans quelques études, mais non dans d’autres; risque supplémentaire d’anomalies cardiovasculaires, s’il existe, estimé à moins de 1 %; lien dose-réponse suggéré8 Pas de preuve d’un effet néfaste majeur sur le développement psychomoteur dans quelques petites études26,31,54 Associations de faible ampleur entre les ISRS et diverses anomalies rares (craniosténose, omphalocèle, etc.) dans quelques études cas-témoins ou de cohorte aux résultats parfois opposés6,36,45,46; risques probablement peu cliniquement significatifs pour une patiente exposée Inhibiteurs du recaptage de la sérotonine et de la norépinéphrine (IRSN) Près de 1400 expositions à la venlafaxine : risque de malformations congénitales comparable au risque de base4,6,34,55-57 Pas de données publiées à ce jour pour la duloxétine Quelques notifications d’effets indésirables transitoires (agitation, trémulations, hypertonie, difficultés respiratoires et alimentaires, convulsions etc.)13; incidence imprécise Pas de données sur le développement à long terme publiées à ce jour Bupropion 724 expositions dans le registre prospectif du fabricant : pas de preuves d’une augmentation du risque de malformations majeures58 Aucune donnée retracée 1300 expositions dans deux études : risque de malformations congénitales comparable au risque de base59,60 Mirtazapine 350 expositions sans effet tératogène majeur décelé jusqu’à présent34,56,61,62; données encore insuffisantes pour exclure tous les risques Une notification d’effets indésirables chez deux nouveau-nés (hypothermie)63 Aucune donnée sur le développement à long terme Trazodone 400 expositions sans effet tératogène majeur décelé jusqu’à présent28,34,64; données encore insuffisantes pour exclure tous les risques Aucune donnée retracée Inhibiteurs de la monoamine oxidase (IMAO) 21 expositions aux IMAO non réversibles : incidence de malformations majeures supérieure au taux attendu28 Aucune donnée retracée Aucune donnée épidémiologique publiée pour la moclobémide www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 19 De la mère au nourrisson Références 1.Martin B, Saint-André M. Dépression et troubles anxieux. Dans: Ferreira E. Grossesse et allaitement: guide thérapeutique. Montréal : Éditions du CHU Sainte-Justine, 2007:539-59. 2. Pearlstein T. Perinatal depression: treatment options and dilemmas. Rev Psychiatr Neurosci 2008;33(4):302-18. 3. Talge NM, Neal C, Glover V. Antenatal maternal stress and long-term effects on child neurodevelopment: how and why? Journal of child psychology and psychiatry, and allied disciplines 2007;48(34):245-61. 4.Ramos E, St-André M, Rey E et coll. Duration of antidepressant use during pregnancy and risk of major congenital malformations. Br J Psychiatry 2008;192:344-50. 5. O’Brien L, Einarson TR, Sarkar M et coll. Does paroxetine cause cardiac malformations? J Obstet Gynaecol Can 2008;30(8):696-701. 6. Oberlander TF, Warburton W, Misri S et coll. Major congenital malformations following prenatal exposure to serotonin reuptake inhibitors and benzodiazepines using population-based health data. Birth Defects Res (Part B) 2008;83:68-76. 7. Diav-Citrin O, Shechtman S, Weinbaum D et coll. Paroxetine and fluoxetine in pregnancy: a prospective, multicenter, controlled, observational study. Br J Clin Pharmacol 2008;66(5):695-705. 8.Berard A, Ramos E, Rey E et coll. First trimester exposure to paroxetine and risk of cardiac malformations in infants: the importance of dosage. Birth Defects Res B Dev Reprod Toxicol 2007;80(1):18-27. 9.Hemels ME, Einarson A, Koren G et coll. Antidepressant use during pregnancy and the rates of spontaneous abortions: a meta-analysis. Ann Pharmacother 2005;39(5):803-9.10.Rahimi R, Nikfar S, Abdollahi M. Pregnancy outcomes following exposure to serotonin reuptake inhibitors: a meta-analysis of clinical trials. Reprod Toxicol 2006;22(4):571-5. 11.Simon GE, Cunningham ML, Davis RL. Outcomes of prenatal antidepressant exposure. Am J Psychiatry 2002;159(12):2055-61. 12.Davis RL, Rubanowice D, McPhillips H et coll. Risks of congenital malformations and perinatal events among infants exposed to antidepressant medications during pregnancy. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2007;16(10):1086-94. 13.Ferreira E, Carceller AM, Agogue C et coll. Effects of selective serotonin reuptake inhibitors and venlafaxine during pregnancy in term and preterm neonates. Pediatrics 2007;119(1):52-9. 14.Chambers CD, Johnson KA, Dick LM et coll. Birth outcomes in pregnant women taking fluoxetine. N Engl J Med 1996;335(14):1010-5. 15.Källén B. Neonate characteristics after maternal use of antidepressants in late pregnancy. Arch Pediatr Adolesc Med 2004;158(4):312-6. 16.Wen SW, Walker M. The use of selective serotonin reuptake inhibitors in pregnancy. J Obstet Gynaecol Can 2004;26(9):819-22. 17. Pastuszak A, Schick-Boschetto B, Zuber C et coll. Pregnancy outcome following first-trimester exposure to fluoxetine (Prozac). JAMA 1993;269(17):2246-8. 18.Kulin NA, Pastuszak A, Sage SR et coll. Pregnancy outcome following maternal use of the new selective serotonin reuptake inhibitors: a prospective controlled multicenter study. JAMA 1998;279(8):609-10. 19.Hendrick V, Smith LM, Suri R et coll. Birth outcomes after prenatal exposure to antidepressant medication. Am J Obstet Gynecol 2003;188(3):812-5. 20.Malm H, Klaukka T, Neuvonen PJ. Risks associated with selective serotonin reuptake inhibi­tors in pregnancy. Obstet Gynecol 2005;106(6):128996. 21.Moses-Kolko EL, Bogen D, Perel J et coll. Neonatal signs after late in utero exposure to serotonin reuptake inhibitors: literature review and implications for clinical applications. JAMA 2005;293(19):2372-83. 22.Boucher N, Beaulac-Baillargeon L. A new look at the neonate‘s clinical presentation after in utero exposure to antidepressants in late pregnancy. J Clin Psychopharmacol 2008;28:334-9. 20 23.Källén B, Otterblad Olausson P. Maternal use of selective serotonin re-uptake inhibitors and persistent pulmonary hypertension of the newborn. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2008;17(8):801-6. 24.Chambers CD, Hernandez-Diaz S, Van Marter LJ et coll. Selective serotonin-reuptake inhibitors and risk of persistent pulmonary hypertension of the newborn. N Engl J Med 2006;354(6):579-87. 25.Andrade SE, McPhillips H, Loren D et coll. Antidepressant medication use and risk of persistent pulmonary hypertension of the newborn. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2009;18:246-52. 26. Gentile S. SSRIs in pregnancy and lactation: emphasis on neurodevelopmental outcome. CNS Drugs 2005;19(7):623-33. 27.Cohen LS, Altshuler LL, Harlow BL et coll. Relapse of major depression during pregnancy in women who maintain or discontinue antidepressant treatment. JAMA 2006;295(5):499-507. 28.Briggs GG, Freeman RK, Yaffe SJ. Drugs in pregnancy and lactation. A reference guide to fetal and neonatal risk. 8e éd. Philadelphie: William Wilkins; 2008. 29.Altshuler LL, Cohen L, Szuba MP et coll. Pharmacologic management of psychiatric illness during pregnancy: dilemmas and guidelines. Am J Psychiatry 1996;153(5):592-606. 30.McElhatton PR, Garbis HM, Elefant E et coll. The outcome of pregnancy in 689 women exposed to therapeutic doses of antidepressants. A collaborative study of the European Network of Teratology Information Services (ENTIS). Reprod Toxicol 1996;10(4):285-94. 31.Nulman I, Rovet J, Stewart DE et coll. Child development following exposure to tricyclic antidepressants or fluoxetine throughout fetal life: a prospective, controlled study. Am J Psychiatry 2002;159(11):1889-95. 32.Wen SW, Walker M. Risk of fetal exposure to tricyclic antidepressants. J Obstet Gynaecol Can 2004;26(10):887-92. 33.Källén B, Otterblad Olausson P. Antidepressant drugs during pregnancy and infant congenital heart defect. Reprod Toxicol 2006;21(3):221-2. 34.GlaxoSmithKline. EPIP083: Updated Preliminary Report on Bupropion and Other Antidepressants, including Paroxetine, in Pregnancy and the Occurrence of Cardiovascular and Major Congenital Malformation, 2005. [En ligne. Consulté le 18 mars 2006.]; http://ctr.gsk.co.uk/Summary/paroxetine/studylist.asp. 35.Goldstein DJ, Corbin LA, Sundell KL. Effects of first-trimester fluoxetine exposure on the newborn. Obstet Gynecol 1997;89(5 Pt 1):713-8. 36.Wogelius P, Norgaard M, Gislum M et coll. Maternal use of selective serotonin reuptake inhibitors and risk of congenital malformations. Epidemiology 2006;17(6):701-4. 37.Källén BA, Otterblad Olausson P. Maternal use of selective serotonin re-uptake inhibitors in early pregnancy and infant congenital malformations. Birth Defects Res A Clin Mol Teratol 2007;79(4):301-8. 38.Sivojelezova A, Shuhaiber S, Sarkissian L et coll. Citalopram use in pregnancy: prospective comparative evaluation of pregnancy and fetal outcome. Am J Obstet Gynecol 2005;193(6):2004-9. 39.Inman WH, Kubot K, Pearce G. PEM Report Number 6. Paroxetine. Pharmacoepidemiol Drug Saf 1993;2:393-422. 40.Unfred CL, Chambers C, Felix R. Birth outcomes among pregnant women taking paroxetine. OTIS 14th annual meeting (Organization of Teratology Information Services); Montréal, Qc.; 2001. 41.Schloemp S, Paulus WE, Sterzik S, et coll. Congenital malformations after antidepressant medication with paroxetine in early pregnancy ? [Résumé]. Hum Reprod 2006;21(Suppl 1):i12. 42.Cole JA, Ephross SA, Cosmatos IS et coll. Paroxetine in the first trimester and the prevalence of congenital malformations. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2007;16(10):1075-85. 43.Einarson A, Pistelli A, DeSantis M, et coll. Evaluation of the risk of congential cardiovascular defects Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 associated with use of paroxetine during pregnancy. Am J Psychiatry 2008;165(6):749-52. 44.Bar-Oz B, Einarson T, Einarson A et coll. Paroxetine and congenital malformations: metaanalysis and consideration of potential confounding factors. Clin Ther 2007;29(5):918-26. 45.Alwan S, Reefhuis J, Rasmussen SA et coll. Use of selective serotonin-reuptake inhibitors in pregnancy and the risk of birth defects. N Engl J Med 2007;356(26):2684-92. 46.Louik C, Lin AE, Werler MM et coll. First-trimester use of selective serotonin-reuptake inhibitors and the risk of birth defects. N Engl J Med 2007;356(26):2675-83. 47.Sanz EJ, De-las-Cuevas C, Kiuru A et coll. Selective serotonin reuptake inhibitors in pregnant women and neonatal withdrawal syndrome: a database analysis. Lancet 2005;365(9458):482-7. 48.Cissoko H, Swortfiguer D, Giraudeau B et coll. Exposition aux antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (IRS) en fin de grossesse : retentissement néonatal. Arch Pediatr 2005;12(7):1081-4. 49.Cohen LS, Heller VL, Bailey JW et coll. Birth outcomes following prenatal exposure to fluoxetine. Biol Psychiatry 2000;48(10):996-1000. 50.Maschi S, Clavenna A, Campi R et coll. Neonatal outcome following pregnancy exposure to antidepressants: a prospective controlled cohort study. BJOG 2007 :283-9. 51.Oberlander TF, Misri S, Fitzgerald CE et coll. Pharmacologic factors associated with transient neonatal symptoms following prenatal psychotropic medication exposure. J Clin Psychiatry 2004;65(2): 230-7. 52. Gentile S. Serotonin reuptake inhibitor-induced perinatal complications. Paediatr Drugs 2007;9(2):97-106. 53. Levinson-Castiel R, Merlob P, Linder N et coll. Neonatal abstinence syndrome after in utero exposure to selective serotonin reuptake inhibitors in term infants. Arch Pediatr Adolesc Med 2006;160(2):173-6. 54.Casper RC, Fleisher BE, Lee-Ancajas JC et coll. Follow-up of children of depressed mothers exposed or not exposed to antidepressant drugs during pregnancy. J Pediatr 2003;142(4):402-8. 55.Einarson A, Fatoye B, Sarkar M et coll. Pregnancy outcome following gestational exposure to venlafaxine: a multicenter prospective controlled study. Am J Psychiatry 2001;158(10):1728-30. 56. Yaris F, Kadioglu M, Kesim M et coll. Newer antidepressants in pregnancy: prospective outcome of a case series. Reprod Toxicol 2004;19(2):235-8. 57. Lennestal R, Källén B. Delivery outcome in relation to maternal use of some recently introduced antidepressants. J Clin Psychopharmacol 2007;27(6):607-13. 58. GlaxoSmithKline. The Bupropion Pregnancy Registry - Final report (1 September 1997 through 31 March 2008); 2008. 59.Chun-Fai-Chan B, Koren G, Fayez I et coll. Pregnancy outcome of women exposed to bupropion during pregnancy: a prospective comparative study. Am J Obstet Gynecol 2005;192(3):932-6. 60.Cole JA, Modell JG, Haight BR et coll. Bupropion in pregnancy and the prevalence of congenital malformations. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2007; 16(5):474-84. 61.Biswas PN, Wilton LV, Shakir SA. The pharmacovigilance of mirtazapine: results of a prescription event monitoring study on 13554 patients in England. J Psychopharmacol 2003;17(1):121-6. 62. Djulus J, Koren G, Einarson TR et coll. Exposure to mirtazapine during pregnancy: a prospective, comparative study of birth outcomes. J Clin Psychiatry 2006;67(8):1280-4. 63. Sokolover N, Merlob P, Klinger G. Neonatal recurrent prolonged hypothermia associated with maternal mirtazapine treatment during pregnancy. Can J Clin Pharmacol 2008;15(2):e-188-e90. 64.Einarson A, Bonari L, Voyer-Lavigne S et coll. A multicentre prospective controlled study to determine the safety of trazodone and nefazodone use during pregnancy. Can J Psychiatry 2003;48(2):106-10. Les antidépresseurs durant la grossesse : des risques calculés Questions de formation continue 3) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux? A. Concernant le syndrome néonatal d’exposition aux inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS), les données actuelles laissent penser qu’un suivi de routine est suffisant pour les enfants exposés. B. Chez toutes les femmes traitées durant la grossesse, l’antidépresseur devrait être sevré au moins deux semaines avant la date prévue d’accouchement de façon à diminuer le risque de complications néonatales pour le nouveau-né. C. Vingt à 30 % des nouveau-nés exposés à un ISRS à la fin de la grossesse présenteront des signes compatibles avec le syndrome néonatal d’exposition aux ISRS. D. Les résultats des études sont divergents en ce qui concerne le lien entre l’exposition anténatale aux antidépresseurs et la prématurité; il est possible que la durée de la grossesse soit faiblement réduite chez les femmes traitées par un antidépresseur durant la grossesse. E. Le développement psychomoteur des enfants exposés aux antidépresseurs durant la grossesse est comparable à celui des enfants non exposés dans la majorité des études menées à ce jour. 4) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux? A. La fluoxétine, la sertraline et le citalopram sont trois antidépresseurs dont l’innocuité durant la grossesse a été évaluée dans plusieurs études et qui ne sont pas associés à une augmentation du risque de malformations congénitales. B. La prescription de mirtazapine ou de duloxétine devrait être réservée aux femmes enceintes qui ne répondent pas ou qui ne tolèrent pas les antidépresseurs dont l’innocuité est mieux documentée durant la grossesse. C. La paroxétine a été associée à une augmentation des malformations congénitales, notamment cardiovasculaires, dans quelques études épidémiologiques. Le risque supplémentaire, s’il existe, est estimé à moins de 1 %. D. Les troubles anxieux ou dépressifs durant la grossesse sont associés à une morbidité importante pour la femme enceinte, mais ne comportent pas de risques pour le fœtus. E. Chez les femmes qui cessent leur traitement antidépresseur avant la conception, le risque de rechute durant la grossesse est élevé et justifie un suivi étroit de l’état de la patiente. Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 90 www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 21 À votre service sans ordonnance Les MVL chez les patients hypertendus : au-delà du Code Médicament B Au Canada, 27,4 % de la population souffre d’hypertension1. Cette proportion atteint jusqu’à 65 % des 60 ans et plus2. Ces patients peuvent présenter des pathologies concomitantes pouvant être traitées par automédication (rhume, douleurs, reflux gastro-œsophagien, brûlures d’estomac, etc.). Certains médicaments et produits naturels peuvent affecter la tension artérielle et il en sera question dans le présent article3. Par ailleurs, les antihypertenseurs peuvent causer des effets indésirables que le patient pourrait éventuellement traiter par des médicaments en vente libre. Les conseils du pharmacien pour prévenir ou gérer adéquatement ces effets indésirables sont donc très importants afin de s’assurer de l’usage optimal des médicaments. Texte rédigé par Jean-Philippe Lemieux, étudiant en pharmacie, Université de Montréal. Texte original soumis le 12 mai 2008. Texte final remis le 27 février 2009. Révision : Marc Parent, D.P.H, M.Sc., BCPS. L’auteur aimerait souligner l’apport de Katherine Desforges, étudiante en pharmacie. La tension artérielle est proportionnellement liée au débit cardiaque et à la résistance périphérique totale2. Le débit cardiaque est le volume de sang éjecté par unité de temps, alors que la résistance périphérique totale est la somme des forces s’opposant au passage du sang dans les vaisseaux2. Cette relation explique les effets sur la pression artérielle de plusieurs médicaments en vente libre (MVL) et produits de santé naturels (PSN). Une altération du volume sanguin total, de la fréquence cardiaque ou du retour veineux par certains MVL et PSN modifie le débit cardiaque2. Quant à la résistance périphérique, elle est régulée par le diamètre de la lumière des vaisseaux ainsi que par l’état d’hypertrophie et d’élasticité des tissus vasculaires2. Plus de 90 % des cas d’hypertension sont dits « d’hypertension essentielle ou primaire » lorsqu’aucune cause n’est identifiée2. Il existe toutefois des hypertensions secondaires à des pathologies ou à des médicaments2. La première ligne de traitement de ce type d’hypertension est la correction de la cause sous-jacente2. Ainsi, la détection et la gestion par le pharmacien des MVL ou PSN pouvant être à l’origine d’une hypertension secondaire (par exemple, les amines sympathomimétiques, les AINS, le Ma Huang ) sont essentielles2. Code Médicament B En février 1995, le programme Code Médicament de l’Ordre des pharmaciens du Québec est devenu obligatoire dans toutes les pharmacies offrant des MVL4. Le Code Médicament B indique une contre-indication du médicament visé chez les patients souffrant d’hypertension, d’hypertrophie de la prostate, d’hyperthyroïdie ou prenant des antidépresseurs4. La base de données des MVL de l’OPQ répertorie 495 produits étiquetés avec le Code Médicament B, dont 18 sont classés hors annexe5. Ce code inclut notamment les amines sympathomiméti- 22 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 ques essentiellement utilisées par voie orale (phényléphrine, pseudoéphédrine et éphédrine [l’éphédrine n’est plus disponible sur le marché canadien]), mais aussi par voie topique (phényléphrine en gel pour usage rectal [p. ex., Préparation H PEMD]) 5. Les amines sympathomimétiques orales sont disponibles seules ou en association sous plusieurs formes pharmaceutiques; les sirops, les gouttes orales, les comprimés à libération immédiate ou prolongée, les pellicules à laisser fondre sur la langue (p. ex., Triaminic Bandes MincesMD) et les boissons chaudes en sont quelques exemples5. Les autres amines sympathomimétiques topiques administrées par voie intranasale (oxymétazoline, phényléphrine, naphazoline et xylométazoline) ou ophtalmique (oxymétazoline, phényléphrine, naphazoline et tétrahydrazoline) ne sont pas visées par le Code Médicament B5,6. Quand le système sympathique est stimulé, il accroît la tension artérielle en augmentant le débit cardiaque (par la vasoconstriction des veines qui augmente le retour veineux ainsi que par des effets inotrope et chronotrope positifs) et la résistance périphérique (par la vasoconstriction des artérioles à court terme et l’hypertrophie des vaisseaux à plus long terme)2. Une augmentation de la pression artérielle est possible à des doses thérapeutiques d’amines sympathomimétiques prises oralement (pseudoéphédrine [SudafedMD] 30 à 60 mg toutes les 4 à 6 heures sans dépasser 240 mg par jour ; phényléphrine [Sudafed PEMD] 10 mg toutes les 4 heures chez les patients hypertendus), alors que des doses plus élevées sont nécessaires chez les patients normotendus7. Dans la population générale, les changements de la fréquence cardiaque et de la tension artérielle seraient non détectables jusqu’à 180 mg en dose unique de pseudoéphédrine8. Cependant, à des doses de 210 mg à 240 mg, ces effets peuvent être Les MVL chez les patients hypertendus : au-delà du Code Médicament B détectés8. Il est préférable d’éviter les décongestifs oraux chez les patients hypertendus, surtout en cas de maîtrise inadéquate de la tension artérielle ou d’antécédents d’hypertension labile. En cas d’utilisation d’un décongestif oral chez un hypertendu, il faut envisager la plus petite dose efficace et suivre rigoureusement la tension artérielle. Les produits topiques (usage intranasal, rectal ou ophtalmique) causent plus fréquemment des effets indésirables locaux6,8. Ils devraient quand même être utilisés avec prudence et pour une courte période6,7. Aucune donnée probante n’a permis de démontrer l’efficacité des décongestifs intranasaux lors d’un usage à long terme; de plus, deux d’entre eux (phényléphrine et oxymétazoline) ont été associés à des cas d’hypertension et d’AVC après un usage d’au moins une semaine9. Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) Selon les recommandations des fabricants, l’ibuprofène (MotrinMD, AdvilMD) ne devrait être utilisé chez les patients hypertendus que sur recommandation du médecin compte tenu du risque de rétention sodée6. L’effet sur le débit cardiaque (via l’augmentation du volume sanguin secondaire à la rétention sodée) et l’effet vasoconstricteur sont impliqués dans les changements de tension artérielle2,10. La hausse moyenne de pression artérielle serait de 1,1 à 5 mmHg chez les utilisateurs d’AINS; les coefficients de variation peuvent toutefois atteindre près de 60 mmHg10. L’effet est plus important chez les patients sous traitement antihypertenseur, quelle que soit la maîtrise préalable de la tension artérielle10. Cette hausse serait peu ou pas significative avec l’acide acétylsalicylique (AAS)10. En pratique, en cas d’instauration d’un AINS, le suivi de la tension artérielle dans les semaines suivantes est recommandé et le traitement sera ou non poursuivi en fonction de la réaction de chaque patient11. MVL avec apport important en sodium Une restriction sodique est souhaitable chez les personnes hypertendues, car le sodium est associé de façon cliniquement importante à l’hypertension2. En effet, s’il est ingéré en quantité excessive, le sodium augmente le volume sanguin ainsi que le débit cardiaque, ce qui contribue à l’augmentation de la tension artérielle2. Lorsqu’un régime trop riche en sodium est identifié comme étant la cause de l’hypertension, il est primordial d’amorcer le traitement en s’attaquant premièrewww.monportailpharmacie.ca ment à la teneur en sodium du régime du patient2. Un régime contenant 2,4 g ou moins de sodium est associé à une diminution de la pression artérielle systolique de 2 à 8 mm Hg2. La plupart des patients hypertendus bénéficient d’une réduction de leur apport en sodium, à l’exception de certains qui y sont insensibles2. Plusieurs MVL contiennent du sodium. Quelques exemples sont présentés au tableau I. Il n’existe pas de limite définie quant à la quantité maximale de sodium à ingérer via la médication. Cela dépendra des apports alimentaires. Cependant, outre le docusate sodique (ColaceMD), les produits présentés dans le tableau I fournissent des quantités de sodium pouvant compter pour 15 % à 417 % de l’apport journalier recommandé chez les hypertendus. La quantité de sel contenue dans le docusate sodique pris à la posologie maximale utilisée en automédication (200 mg par jour) est négligeable; le docusate calcique devient une option chez les patients qui prennent de plus hautes doses (1600 mg)6,12. Caféine La caféine n’est pas recommandée dans le traitement de l’obésité, car la perte de poids associée à son utilisation est essentiellement secondaire à son effet diurétique13. La caféine augmente la pression artérielle à une dose médiane de 410 mg de caféine par jour sous forme de comprimés; l’augmentation significative de la tension artérielle systolique (TAS) étant de 4,16 mm Hg et de 2,41 mm Hg pour la tension artérielle diastolique (TAD)13,14. L’augmentation est moins importante pour la TAS et non significative pour la TAD lorsque la même dose de caféine est consommée sous forme de café14. Outre le café, le thé, les boissons gazeuses et énergisantes, et le chocolat, plusieurs MVL contenant de la caféine sont énumérés au tableau II6,15. Pris à une posologie maximale, ces produits peuvent fournir jusqu’à 1000 mg de caféine par jour, alors que, pour éviter les autres effets secondaires de la caféine (nausées, irritabilité, anxiété et insomnie), on devrait suggérer aux patients de limiter la consommation quotidienne de Tableau I Teneur en sodium de certains MVL6 Produit Teneur en sodium Posologie Teneur en par unité quotidienne sodium posologique (mg) maximale en quotidienne (mg) automédication à posologie maximale Alginates utilisés pour le reflux gastro-œsophagien Gaviscon comprimé ordinaire 22 par comprimé 16 comprimés 352 Gaviscon comprimé extra-fort 35 par comprimé 12 comprimés 420 Gaviscon liquide 53 par 5 mL 80 mL 848 Maalox HRFNDNDND Antiacides : citrate de sodium (ENO) ou bicarbonate de sodium (Alka Seltzer [contient aussi de l’AAS], Bromo Seltzer) ENO 855 par sachet 5 sachets 4275 de 5 grammes Alka Seltzer comprimé régulier 523 par comprimé 8 comprimés 4184 Alka Seltzer aromatisé à la cerise 464 par comprimé 8 comprimés 3712 Alka Seltzer aromatisé 467 par comprimé 8 comprimés 3736 au citron-lime Bromo Seltzer 1000 par sachet 3 sachets 3000 Médicaments pour la constipation Phosphate de sodium oral (Fleet) 556 par 5 mLConstipation 2224 passagère : 20 mL Colonoscopie : 5000 à 10 000 45-90 mL Docusate sodique (Colace) 5,17 par capsule 200 mg soit : 10,34 (capsules) 0,65 par mL de gouttes 2 (capsules) 13 (gouttes) 3,7 par 5 mL de sirop 20 mL (gouttes) 37 (sirop) 50 mL (sirop) MVL = médicaments en vente libre; ND = non disponible; AAS = acide acétylsalicylique septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 23 À votre service sans ordonnance La détection et la gestion par le pharmacien des MVL ou PSN pouvant être à l’origine d’une hypertension secondaire sont essentielles2. caféine à 400-450 mg15. Plusieurs produits vendus pour contribuer à la perte de poids contiennent de la caféine13. Nicotine Malgré les effets hémodynamiques de la nicotine (particulièrement l’augmentation de la pression artérielle [de 5 à 10 mm Hg avec les carrés à mâcher, moindre pour les timbres]), l’emploi de TRN (traitement de remplacement de la nicotine) est sécuritaire chez les hypertendus16-18. Chaque TRN possède un profil de libération de nicotine pouvant affecter différemment la tension artérielle des patients16. Le pharmacien se doit d’expliquer aux patients les avantages et les inconvénients; le choix du patient prévaut toutefois sur les avantages hémodynamiques17,19. Puisque la nicotine augmente la libération de catécholamines, notons qu’on doit parfois diminuer les doses de bêtabloquants à la suite de la cessation tabagique6. Il est ainsi nécessaire de suivre régulièrement la tension artérielle au cours de la cessation tabagique. Produits de santé naturels (PSN) Plusieurs PSN ont un effet diurétique (p. ex., le raisin des ours [Uva ursi], le boldo, le pis- senlit et la salsepareille); il faut penser à l’effet hypotenseur possible de ces PSN et suivre la tension artérielle lors de leur instauration3. La caféine étant le principe actif du café, du thé, du guarana, du kola et du maté, ceux-ci doivent être utilisés en tenant compte des effets hémodynamiques possibles lorsqu’on atteint des doses élevées de caféine3. Le millepertuis, via l’induction de plusieurs enzymes du cytochrome P450, peut modifier la pharmacocinétique de certains antihypertenseurs (p. ex ; l’amlodipine (NorvascMD), la félodipine (PlendilMD, RenedilMD), le diltiazem (CardizemMD, TiazacMD) et le vérapamil (ChronoveraMD, IsoptinMD)3,6. La prudence est de mise à l’instauration ou à l’arrêt de ce PSN3. Quelques cas d’hypertension ont été associés aux PSN suivants : Dong Quai, Ma Huang (éphédra), glycyrrhizine (contenue dans la réglisse) ainsi que des produits homéopathiques chinois3. Certains produits amaigrissants contiennent de la synéphrine (p. ex., Meta Slim Weight Reduction FormulaMD), une amine glycyrrhizine de l’orange amère (Citrus aurantium) pouvant avoir des effets similaires aux autres amines sympathomimétiques, Les PSN ne font pas exception quant à leur contenu en sodium; par exemple, certaines formulations de sulfate de glu- Tableau II Exemples de produits contenant de la caféine6 Produits Teneur en caféine (mg)Autres ingrédients 222 15AAS 375 mg; codéine 8 mg* Anacin 32AAS 325 mg Anacin extra-fort 32AAS 500 mg Atasol 8, Triatec 8 15Acétaminophène 325 mg; codéine 8 mg* Excedrin extra-fortMD 65AAS 500 mg Instantine, Midol 65AAS 325 mg Midol ADO 60Acétaminophène 325 mg; pyrilamine 15 mg Midol Extra-Fort 65Acétaminophène 500 mg; pyrilamine 15 mg Norgesic 30AAS 385 mg; citrate d’orphénadrine 25 mg Norgesic Forte 60AAS 770 mg; citrate d’orphénadrine 50 mg Triatec 8 Fort 15Acétaminophène 500 mg; codéine 8 mg* Tylenol N° 1 15Acétaminophène 300 mg; codéine 8 mg* Tylenol Ultra efficace 65Acétaminophène 500 mg Wake-up** 100 et 200 * La codéine est présente sous forme de phosphate de codéine dans ces produits. ** Le fabricant recommande une dose maximale quotidienne de 1000 mg. AAS = acide acétylsalicylique. 24 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 cosamine peuvent fournir d’importantes quantités de sodium. Il est préférable de privilégier les marques sans sodium. Plusieurs autres PSN pourraient modifier la maîtrise de la tension artérielle.C’est pourquoi un suivi de la tension artérielle est conseillé3. Consultations en vente libre liées aux effets indésirables des antihypertenseurs Toux Les IECA peuvent engendrer une toux sèche et persistante6,7. Le mécanisme suggéré est l’accumulation de kinines à la suite de l’inhibition de leur dégradation par les IECA6. Cet effet secondaire peut se produire entre 24 heures et 1 an après l’instauration d’un IECA6. Une diminution de la dose d’IECA ou son remplacement par un autre antihypertenseur (p. ex., un ARA) est à privilégier si le problème est trop incommodant6. Insomnie L’insomnie et les cauchemars sont des effets indésirables possibles du traitement par les bêtabloquants6,22,23. Les diurétiques peuvent aussi être une cause d’insomnie en causant des mictions nocturnes plus fréquentes20,21. Il serait alors adéquat de conseiller le patient sur l’hygiène du sommeil et sur l’horaire de prise des diurétiques pour éviter les réveils nocturnes20,21. Le pharmacien pourra également proposer un changement de la pharmacothérapie si cela est envisageable. La tenue d’un journal du sommeil est recommandée, car celui-ci servira pour réévaluer l’efficacité des interventions et les causes des troubles du sommeil20. Constipation Plusieurs antihypertenseurs peuvent induire de la constipation14. Citons le vérapamil et les autres bloqueurs des canaux calciques (BCC), les bêtabloquants, les diurétiques et la clonidine (CatapressMD)6. Le pharmacien peut encore une fois proposer un changement du traitement antihypertenseur, des mesures non pharmacologiques ou, en dernier recours, un traitement symptomatique. Il faut faire attention aux mesures non pharmacologiques proposées à ces patients. En effet, une trop grande augmentation de l’apport liquidien n’est pas adéquate chez les Les MVL chez les patients hypertendus : au-delà du Code Médicament B patients sous diurétiques. Par ailleurs, l’emploi de psyllium nécessite aussi un apport liquidien important et il est recommandé de l’espacer de deux heures avec la prise d’autres médicaments6. Références 1. Wolf-Maier K, Cooper RS, Banegas JR et coll. Hypertension prevalence and blood pressure levels in 6 European countries, Canada, and the United States. JAMA 2003; 289(18) : 2363-9. 2. Sassen JJ, Carter BL. Hypertension. Dans : DiPiro JT, Talbert RL, Wells BG et coll., eds. Pharmacotherapy : A pathophysiologic approach, 6e éd. New York : McGraw-Hill Publishing Inc, 2005 : 185-217. 3. Ernst E. Cardiovascular adverse effects of herbal medicines : A systemic review of the recent literature. Can J Cardiol 2003; 19(7) : 818-27. 4. Ordre des pharmaciens du Québec. Autotraitement : Médicaments vendus sans ordonnance. [En ligne. Page consultée le 5 mai 2008.]. www.opq. org/fr/services_public/autotraitement. 5. Ordre des pharmaciens du Québec. Base de données des médicaments en vente libre. [En ligne. Page consultée le 5 mai 2008.]. //prod.opq.org/ mvl/Produits.aspx 6. Association des pharmaciens du Canada. Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques. Ottawa : Association des pharmaciens du Canada, 2006 : V1-V68, L58-L64 105-6, 248, 445-6, 533-4, 564, 716-7, 776-84, 910, 946, 1019-1020, 1177-8, 1191-3, 1231-4, 1463-5, 1491, 1543-6, 1618-22, 1639-40, 2511, 2559-61, 2567. 7. Roy H. Upper respiratory tract infection Dans : Patient self-care : helping patients make therapeutic choices, 1re éd. Ottawa : Association des pharmaciens du Canada, 2002 : 130-41. Conclusion Plusieurs PSN et MVL peuvent présenter un effet néfaste sur la tension artérielle des patients hypertendus. Si l’on est dans le doute ou si le médicament en question doit absolument être administré, un suivi régulier de la tension artérielle du patient s’avère opportun pour déterminer la gravité de l’interaction considérant que l’hypertension est souvent asymptomatique2. Le pharmacien doit également évaluer la possibilité que la consultation du patient puisse être associée à un effet indésirable de son traitement antihypertenseur. n 8. May JR, Smith PH. Allergic rhinitis. Dans : DiPiro JT, Talbert RL, Wells BG et coll., eds. Pharmacotherapy : A pathophysiologic approach, 6e éd. New York : McGraw-Hill Publishing Inc, 2005 : 1729-40. 9. Cantu C, Arauz A, Murillo-Barilla LM et coll. Stroke associated with sympathomimetics contained in the over-the-counter cough and cold drugs. Stroke. 2003; 34(7) : 1667-72. 10.Frishman WH. Effects of nonsteroidal anti-inflammatory drug therapy on blood pressure and peripheral edema. Am J Cardiol. 2002 Mar 21; 89(6A) : 18D-25D. 11.Tannenbaum H, Bombardier C, Davis P et coll. An evidence-based approach to prescribing nonsteroidal antiinflammatory drugs. Third Canadian Consensus Conference. J Rheumatol. 2006 Jan; 33(1) : 140-57. 12.Bowles-Jordan J. Constipation. Dans : Patient selfcare : helping patients make therapeutic choices, 1re éd. Ottawa : Association des pharmaciens du Canada, 2002 : 222-36. 13. Heschuk S. Weight management. Dans : Patient self-care : helping patients make therapeutic choices, 1re éd. Ottawa: Association des pharmaciens du Canada, 2002 : 376-89. 14. Noordzij M, Uiterwaal CS, Arends LR et coll. Blood pressure response to chronic intake of coffee and caffeine : A meta-analysis of randomized controlled trials. J hypertens. 23(5), May 2005, 921-8. 15. Beveridge C. Basic nutrition. Dans : Patient selfcare : helping patients make therapeutic choices, 1re éd. Ottawa: Association des pharmaciens du Canada, 2002 : 339-54. 16. Benowittz NL. Gourlay SG. Cardiovascular toxicity of nicotine : implications for nicotine replacement therapy. J Am Coll Cardiol. 1997 Jun; 29(7) : 1422-31. 17. Thériault A. Cesser de fumer, qu’a-t-on en pharmacie ? Québec Pharmacie. 2007 Mai; 54(5) : 21-5. 18. Institut de cardiologie de Montréal. Protocole : Thérapie de remplacement de la nicotine pour tous les patients hospitalisés. Accepté par le CMDP le 5 décembre 2005. 19. Choquette J. L’abandon du tabac. Québec Pharmacie. 2002 fév; 49(2) : 113-23. 20. Vaillancourt R. Insomnia. Dans : Patient self-care : helping patients make therapeutic choices, 1re éd. Ottawa: Association des pharmaciens du Canada, 2002 : 49-57. 21. Jackson CW. Curtis JL. Sleep disorders. Dans : DiPiro JT, Talbert RL, Wells BG et coll., eds. Pharmacotherapy : A pathophysiologic approach, 6e éd. New York : McGraw-Hill Publishing Inc, 2005 : 1321-32. Questions de formation continue 5) Lequel des énoncés suivants est faux ? Chez les hypertendus : A. Les décongestifs oraux peuvent causer une augmentation de la tension artérielle à doses thérapeutiques. B. L’AAS et l’ibuprofène causent une augmentation similaire de la tension artérielle. C. La caféine ne semble pas avoir le même effet sur la tension artérielle lorsqu’elle est prise sous forme de café ou de comprimé. D. Les thérapies de remplacement de la nicotine sont sécuritaires chez les patients souffrant d’hypertension. E. Le millepertuis est susceptible de modifier la pharmacocinétique de plusieurs antihypertenseurs. 6) Lequel des produits suivants, aux doses utilisées en automédication, a le plus faible apport en sodium ? A. Alka-Seltzer B. ENO C. Gaviscon liquide D. Colace E. Fleet Phospho Soda Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 90 www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 25 D’une page à l’autre Étude coût-efficacité évaluant l’impact de conseils téléphoniques sur l’observance après le début d’une thérapie chronique Texte rédigé par Alexandre Guichard, étudiant en 5e année hospitalo-universitaire, Université de Dijon, France, Mariève Simoncelli, B. Pharm., candidate à la maîtrise en sciences pharmaceutiques, et Jean-François Bussières, B. Pharm., M.Sc., M.B.A., FCSHP, Département de pharmacie et Unité de recherche en pratique pharmaceutique, CHU Sainte-Justine. Texte original soumis le 4 octobre 2008. Texte final remis le 19 janvier 2009. Révision : Nicolas Paquette-Lamontagne, B. Pharm., M.Sc., M.B.A. Objectif Mesures Évaluer si un service de conseils téléphoniques prodigués par un pharmacien représente une intervention coût-efficace chez des patients recevant une première ordonnance pour une thérapie chronique. Étude coût-efficacité réalisée à partir des données provenant d’une étude clinique contrôlée avec répartition aléatoire ayant évalué l’effet d’un suivi téléphonique effectué par un pharmacien. L’étude pharmacoéconomique a été approuvée par le London Multi-Centre Research Ethics Committee et financée par un programme gouvernemental de recherche britannique. L’issue principale de l’étude clinique est l’inobservance rapportée par le patient et est définie comme au moins une dose de médicament non prise dans les sept derniers jours. L’observance et les coûts ont été évalués à partir d’un entretien téléphonique réalisé auprès du patient quatre semaines après le recrutement. L’issue principale de l’étude économique est le rapport coût-efficacité du suivi téléphonique du pharmacien utilisé afin d’accroître l’observance. Les coûts incluent les coûts directs de recours au système de santé et les coûts de l’intervention pharmaceutique (contact par l’équipe de recherche, formation du pharmacien, temps requis pour l’intervention). Lieu Analyse L’étude clinique regroupait 500 patients provenant de 40 pharmacies communautaires situées dans 8 régions de l’Angleterre. Un arbre décisionnel a été mis au point afin de calculer un rapport coût-efficacité différentiel (RCED) (le coût pour qu’un patient additionnel soit observant). Une courbe d’acceptabilité coût-efficacité permet également de déterminer la probabilité que le RCED soit inférieur à la capacité de payer maximale du décideur. Plan de l’étude Participants Les patients recrutés devaient recevoir une première ordonnance pour le traitement d’une maladie chronique (accident vasculaire cérébral, maladie cardiovasculaire, asthme, diabète ou arthrite rhumatoïde) et être âgés d’au moins 75 ans. Après le recrutement, le pharmacien d’officine remettait au patient une enveloppe scellée lui indiquant le groupe auquel il devait appartenir (intervention ou témoin). Les patients qui ne comprenaient ou ne lisaient pas l’anglais ont été exclus ainsi que ceux ne disposant pas d’un téléphone. Interventions Deux semaines après le recrutement et le début du traitement, le patient a été contacté au téléphone par un pharmacien. L’intervention comprenait une entrevue semi-structurée ainsi qu’une liste aide-mémoire des éléments à discuter. Elle repose sur la théorie du self-regulatory model (SRM) qui reconnaît l’utilité de recourir à des stimuli internes (p. ex., comment vous sentez-vous ?) et externes (p. ex., conseil d’un professionnel de la santé) afin d’influencer un comportement. L’intervention vise à conseiller le patient en tenant compte des problèmes liés à la pharmacothérapie qu’il mentionne. 28 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Résultats Au total, 500 patients ont été recrutés et 8 patients ont été exclus pour un total de 255 patients dans le groupe intervention (taux d’abandon de 12 %) et 237 patients dans le groupe témoin (taux d’abandon de 19 %). Pour l’analyse économique, 205 pa­­tients ont été retenus. L’inobservance à 4 semaines était significativement moins élevée dans le groupe intervention (11 %) que dans le groupe témoin (19 %) (p < 0,05). Les auteurs ont extrapolé ces résultats à huit semaines postrecrutement. Le pharmacien procédant au suivi téléphonique a réalisé en médiane un appel par patient pour une durée médiane de 12 minutes par appel pour l’intervention et six minutes pour les formalités administratives. Les patients des deux groupes ont eu recours aux mêmes services de santé, mais les coûts reliés par patient ont été significativement plus élevés dans le groupe témoin que dans le groupe intervention (282 £ contre 177 £). Le rapport coût-efficacité différentiel moyen était de -2168 £ pour chaque Étude coût-efficacité évaluant l’impact de conseils téléphoniques sur l’observance après le début d’une thérapie chronique patient observant supplémentaire. Cette stratégie est donc dominante (plus efficace et moins coûteuse que le fait de ne pas inter­ venir) et génère des économies. La courbe d’acceptabilité montre également que la probabilité que cette intervention soit coût-efficace est de 90 % en considérant que le décideur a une capacité de payer nulle. Conclusion de l’étude La mise en place d’un service de conseils téléphoniques par un pharmacien est une intervention coût-efficace selon la perspective tiers-payeur publique britannique et peut améliorer l’observance chez des patients débutant un traitement chronique. Discussion On reconnaît que l’inobservance est un phénomène complexe et multifactoriel. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « l’impact de la non-observance augmente avec le fardeau des maladies chroniques ». L’inobservance peut atteindre jusqu’à 30 % des patients dès la deuxième semaine de traitement et sa fréquence générale est de 30 % à 50 %. Bien qu’il s’agisse d’une priorité de santé, les auteurs soulignent qu’il existe un nombre limité d’études ayant montré un impact positif et durable d’une intervention sur l’observance. Il existe très peu de données sur le rapport coût-efficacité de telles interventions. Les auteurs reconnaissent plusieurs limites. La principale est que l’étude clinique n’a pas été conçue afin de réaliser une étude économique et que sa puissance statistique est limitée. Le seuil utilisé pour définir l’inobservance ne fait référence qu’à une seule de ses facettes (dose non prise), alors que le moment de la prise et le respect des précautions n’ont pas été considérés. La méthode de mesure de l’observance, qui est autorapportée, peut introduire un biais de désirabilité sociale pouvant surestimer l’observance. La proportion élevée de pertes au suivi dans chacun des groupes et la durée limitée du suivi constituent d’autres limites. En effet, une période de huit semaines est insuffisante afin d’évaluer l’impact réel de l’intervention sur l’observance à une thérapie chronique et les résultats de santé. Il aurait été intéressant de cibler une seule pathologie puisque les ressources de santé consommées sont spécifiques. On peut se demander si les causes réelles de l’inobservance ont été prises en compte puisqu’un patient pourrait omettre une dose en raison d’un changement posologique recommandé par son médecin. La définition de l’observance implique également la notion d’adhésion aux recommandations. Cette étude apporte un double éclairage : une intervention simple et ciblée comme le conseil téléphonique chez un groupe de patients donné peut augmenter l’observance et cette intervention peut être coûtefficace. Parce qu’il existe un nombre limité d’études bien conçues montrant l’impact favorable d’une intervention peu coûteuse sur l’observance, cette étude devrait être répétée à plus large échelle dans un système de soins canadien. n Référence Elliott RA, Barber N, Clifford S, Horne R, Hartley E. The cost effectiveness of a telephone-based advisory service to improve adherence to newly prescribed medicines. Pharm World Sci 2008; 30:17-23. Autre lecture suggérée RBC DOMINION VALEURS MOBILIÈRES Clifford S, Barber N, Elliott R, Hartley E, Horne R. Patient-centred advise is effective in improving adherence to medicines. Pharm World Sci 2006; 28:165-70. Votre prescription pour un bonne gestion de votre patrimoine Question de formation continue Reconnu comme l’un des meilleurs conseillers en placement à Montréal, Francis M. Turcotte offre une gamme complète de services de gestion de patrimoine répondant aux objectifs particuliers tel un professionnel pharmaceutique. 7) Parmi les énoncés suivants concernant l’impact d’un suivi téléphonique de pharmaciens auprès des patients, lequel est vrai ? A. La fréquence de l’inobservance est de 50 % dès la deuxième semaine. B. 205 patients ont été retenus pour l’analyse économique, et l’inobservance à 4 semaines était significativement moins élevée dans le groupe intervention (11 %) par rapport au groupe témoin (19 %) (p < 0,05). C. La principale limite de l’analyse économique est la proportion élevée de pertes au suivi dans le groupe intervention. D. L’intervention décrite a une probabilité de 85 % d’être coût-efficace si la capacité de payer est nulle. E. Le pharmacien procédant au suivi téléphonique a réalisé un appel par patient pour une durée médiane de six minutes par appel. Veuillez reporter votre réponse dans le formulaire de la page 90 www.monportailpharmacie.ca Pour plus de renseignements, veuillez communiquer avec: Francis M. Turcotte, B. Sc. Conseiller en placement FM Turcotte Gestion de Patrimoine de RBC Dominion valeurs mobilières t [email protected] www.francisturcotte.com “Construire autour de vous, pour vous” Gestion de patrimoine professionnelle depuis 1901 RBC Dominion valeurs mobilières Inc.* et la Banque Royale du Canada sont des entités juridiques distinctes et affiliées. *Membre du FCPE. ®Marque déposée de la Banque Royale du Canada, utilisée sous licence. RBC Dominion valeurs mobilières est une marque déposée de la Banque Royale du Canada, utilisée sous licence. ©Copyright 2009. Tous droits réservés. septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 29 Avez-vous entendu parler de... Le dabigatran (PradaxMD) Chez les personnes âgées qui souffrent d’arthrose, l’arthroplastie de la hanche est depuis un bon moment l’une des solutions offertes. L’arthroplastie du genou, maintenant plus sécuritaire, est également de plus en plus courante. Les statistiques canadiennes les plus récentes rapportent que les deux tiers des départs après hospitalisation pour une chirurgie de la hanche et les trois quarts pour celle du genou concernent des personnes de plus de 65 ans, parmi un peu plus de 12 000 arthroplasties de la hanche et 14 000 du genou1. Texte rédigé par Julie Grenier, B. Pharm., M.Sc., pharmacie Laurier Lavoie et associés. Texte original soumis le 14 décembre 2008. Texte final remis le 26 janvier 2009. Révision : Isabelle Taillon, B. Pharm., M.Sc., Hôpital Laval, Québec. Quelques-unes de ces personnes expérimenteront une thrombose veineuse profonde à la suite de ce type de chirurgies, et ce, malgré une prophylaxie avec les héparines de faible poids moléculaire (HFPM). Les durées de séjour liées à ces chirurgies sont plus courtes, et lorsque les patients obtiennent leur congé de l’hôpital, les HFPM sont souvent cessées. Cela survient bien avant les 10 jours de traitement minimal recommandés dans les guides thérapeutiques nord-américains. Les patients invoquent souvent la complexité de suivre de tels régimes posologiques à la maison pour justifier leur abandon. De nouveaux anticoagulants oraux sont maintenant indiqués pour les patients ayant subi une chirurgie orthopédique. Ces agents, à l’opposé de la warfarine, ont un index thérapeutique plus large et ne nécessitent pas de monitorage de laboratoire impliquant fréquemment des changements de doses. L’héparine non fractionnée (HNF) a été découverte il y a plus de 60 ans. Pendant plus de 40 ans, elle a été le seul anticoagulant accessible aux cliniciens. La première vague de nouveaux anticoagulants n’était pas active par voie orale. Au départ, ces limites étaient attribuées à des difficultés techniques d’absorption. La warfarine, d’abord utilisée en tant que poison, a été approuvée comme médicament dans les années 1950. Les héparines de faible poids moléculaire sont sur le Figure 1 Site d’action du dabigatran (Pradax) et des autres thérapies anticoagulantes dans la cascade de la coagulation7 a FXIIa FVIIa FXIa Warfarine Facteur tissulaire FIXa FVIIIa FXa Héparines non fractionnées Héparines de faible poids moléculaire 32 FVa Thrombine fibrine Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Fondaparinux Idraparinux Désirudine Dabigatran marché depuis les années 1990. Les progrès technologiques ont permis la mise au point de nouveaux anticoagulants oraux. Les principales cibles de ces nouveaux agents sont les facteurs X et IIa (thrombine) impliqués dans la cascade de la coagulation. Cette mise au point est parsemée d’embûches puisque les coûts sont élevés et les suivis sont sur une longue période. La thrombine (facteur IIa) joue un rôle pivot dans la cascade de coagulation en clivant le fibrinogène, ce qui empêche la formation de caillot de fibrine. Elle active aussi plusieurs autres facteurs de coagulation incluant les facteurs V, VIII, XI et XIII, et les plaquettes3,4. La warfarine, un antagoniste de la vitamine K, inhibe quatre facteurs de coagulation : II, VII, IX et X. Malgré son efficacité dans la prévention de la thromboembolie veineuse (TEV) après des chirurgies orthopédiques et dans la prévention des embolies chez les patients atteints de fibrillation auriculaire (FA), la warfarine a un index thérapeutique étroit, engendre un risque signi­ ficatif d’hémorragie, présente plusieurs interactions avec les médicaments et les aliments et, enfin, implique fréquemment des prises de sang. Ces limitations de la warfarine ont aussi suscité un intérêt pour la recherche de nouveaux anticoagulants oraux pouvant potentiellement la remplacer. Parmi les nouveaux anticoagulants oraux ciblant la thrombine, on trouve le ximélagatran, le dabigatran et l’odiparcil. Ces deux derniers agents sont en phase d’évaluation, dans l’attente d’une approbation pour des indications en cardiologie. Les substances ciblant le facteur Xa sont le rivaroxaban et l’apixaban, tous deux sous évaluation pour des indications en cardiologie. Le ximélagatran a été le premier inhibiteur de la thrombine à être actif oralement. Il s’agit d’un promédicament qui a fait l’objet d’une étude en matière de prévention des ischémies et des embolies systémiques chez les sujets atteints de fibrillation auriculaire ou d’infarctus du myocarde. Il n’a pas reçu son approbation en Amérique du Nord en raison de sa toxicité hépatique. En Europe, il est réservé à la prévention thrombo-embolique suivant une chirurgie orthopédique2. Le dabigatran (PradaxMD) Quant à l’odiparcil, il stimule la libération de chondroïtine, ce qui confère une activité antithrombotique par une activation d’un cofacteur de l’héparine. Le dabigatran (Pradax) est un nouvel anticoagulant oral permettant de prévenir les thromboembolies veineuses à la suite des arthroplasties électives de la hanche et du genou. Il est approuvé depuis juin 2008 au Canada et est commercialisé par Boehringer Ingelheim (Canada) ltée5. Pharmacologie et mécanisme d’action Le dabigatran etexilate est le promédicament du dabigatran, mais il n’a aucune activité anticoagulante en soi. À la suite de son absorption par voie orale, le dabigatran etexilate est converti en dabigatran par une hydrolyse catalysée via des estérases plasmatiques et hépatiques. Le dabigatran est un inhibiteur direct de la thrombine, il est réversible et compétitif. La conversion du fibrinogène en fibrine au cours de la cascade de la coagulation est médiée par la thrombine. Par conséquent, l’inhibition de la thrombine prévient la formation de thrombus. Le dabigatran inhibe à la fois la thrombine libre, la thrombine liée à la fibrine et l’agrégation plaquettaire provoquée par la thrombine6. Il se lie à la thrombine et bloque l’interaction de cette dernière avec ses substrats2,3. La figure 1 tirée du Drug Information Center (DIC) en ligne montre les différents sites d’action des thérapies anticoagulantes. Pharmacocinétique La pharmacocinétique du dabigatran a été étudiée tant chez des volontaires sains que chez des sujets ayant subi une arthroplastie élective de la hanche ou du genou (administration d’une dose unique ou de doses mul- tiples). Les résultats obtenus ont montré que la pharmacocinétique du dabigatran est légèrement différente chez les volontaires sains, par comparaison avec les sujets opérés6. Dans tous les cas, sa pharmacocinétique est linéaire3. Le dabigatran etexilate est absorbé à raison de 3,5 % à 5 %, sans égard à la nourriture. Lors de son administration à des volontaires sains, la concentration plasmatique augmente rapidement, jusqu’à atteindre une concentration maximale, puis diminue en présentant une demi-vie évaluée à 11 heures. Une corrélation a été établie entre la concentration de dabigatran et le degré de l’effet anticoagulant. Le temps de demi-vie semble légèrement plus long chez les sujets opérés, passant d’une moyenne de 11 heures chez les sujets sains à une moyenne de 14 à 17 heures chez les sujets opérés. Cependant, dans les deux cas, l’administration uniquotidienne est possible en raison d’un temps de demievie assez long. Le dabigatran est faiblement lié aux protéines plasmatiques humaines (34 %-35 %), et ce, d’une manière indépendante de la concentration. Le volume de distribution avoisine les 60 à 70 litres. La prin­ cipale voie de métabolisme du dabigatran etexilate est l’hydrolyse caractérisée par les estérases. Le dabigatran est faiblement conjugué (10 %). Son élimination est principalement rénale à 85 % et fécale à 6 %. Les CYP 450 ne participent pas au métabolisme du dabigatran. L’aire sous la courbe du dabigatran est semblable chez les volontaires sains et les sujets opérés. Chez les personnes âgées, on note une augmentation de l’aire sous la courbe de 40 % à 60 %, ainsi qu’une concentration maximale 25 % plus élevée. Chez les insuffisants rénaux modérés (30-50 mL/min), l’exposition au dabigatran est 2,7 fois plus élevée et, chez les insuffisants rénaux graves (10-30 mL/min), elle est six fois plus élevée. Pour l’insuffisance rénale modérée, la dose de dabigatran doit être ajustée à la baisse et, dans le cas de l’insuffisance rénale grave, le produit est contreindiqué. Ni le sexe, ni le poids, ni l’origine ethnique asiatique ne semblent modifier les paramètres pharmacocinétiques de façon à changer l’approche clinique6. À titre comparatif, la warfarine, un autre anticoagulant administré par voie orale, offre une biodisponibilité complète, présente une demi-vie beaucoup plus longue (20 à 60 heures) et est fortement liée aux protéines. Les principales caractéristiques pharmacocinétiques sont présentées au tableau I. Indications et études cliniques Le dabigatran est approuvé au Canada pour la prévention de la TEV chez les sujets ayant subi une arthroplastie élective totale de la hanche ou du genou5,6. La Commission européenne a approuvé la commercialisation du dabigatran (Pradaxa) dans 27 états membres de l’Union européenne8. Les indications sont les mêmes qu’au Canada. Le produit est en attente d’approbation d’ici 2010 par la FDA américaine. Le tableau II présente les principales études cliniques qui portent sur le dabigatran. Études comparatives avec l’énoxaparine Dans la littérature médicale, trois études majeures portant sur l’utilisation du dabigatran ont été publiées. Les deux premières, soit RE-NOVATE9 et RE-MODEL10, ont comparé le dabigatran 220 mg ou 150 mg par jour à l’énoxaparine 40 mg par jour, soit le traitement recommandé en prévention de la TEV à la suite d’une arthroplastie totale élective de la hanche ou du genou, dans les lignes directrices européennes. En Tableau I Principaux paramètres pharmacocinétiques du dabigatran et de la warfarine3,6 Biodisponibilité Cmax (1) T ½ (h)ASC Clairance, Vd Liaison aux Délai élimination protéines d’action Dabigatran 0,8 11 h 6-10 ng*h/Urine 60 à 70 L 34-35 % 2h (volontaires à 1,4 mL/mg (85 %) sains) ng/mL/mg Fèces (6 %) Dabigatran 3,5-5 % 1,22 ng/ 14-17 h 9,7 ng*h/ Absence de 0,86- faible 7,0-9,0 h (sujets mL/mg mL/mg données 1,0 L/kg opérés)Tmax post-chirurgie Warfarine 100 % 20-60 hUrine 0,14 L/kg Forte Lent (92 %) (99 %) Abréviations : Cmax (concentration maximale), T½ (temps de demi-vie), ASC (aire sous la courbe), Vd (volume de distribution), Tmax (temps pour atteindre le Cmax) www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 33 Avez-vous entendu parler de... ce qui concerne la population, RE-NOVATE n’a inclus que les sujets subissant une chirurgie de la hanche et RE-MODEL n’a inclus que les sujets subissant une chirurgie du genou. La durée de traitement était de 28 à 35 jours à la suite d’une chirurgie de la hanche et de 6 à 10 jours à la suite d’une chirurgie du genou. Les sujets des deux études étaient âgés de plus de 18 ans (moyenne de 64 et 69 ans) et avaient un poids supérieur à 40 kg. Hommes et femmes se répartissaient à part égale, ils étaient de race blanche ou asiatique et avaient une fonction rénale normale (≥ 50 mL/min). Les deux études ont conclu à la non-infériorité du dabigatran (toutes doses confondues) par rapport à l’énoxaparine 40 mg par jour quant à la survenue de TEV veinographiques ou symptomatiques associée à la mortalité. De plus, les deux études n’ont montré aucune différence significative en ce qui a trait aux sai- gnements majeurs, aux événements coronariens et à l’augmentation des enzymes hépatiques entre les groupes témoins et les traitements. Le dabigatran à 150 mg par jour pourrait, selon ces données, être une solution de rechange à l’énoxaparine puisque ce traitement cause des effets indésirables légèrement inférieurs tout en favorisant la prévention de la TEV lors d’une arthroplastie élective. Par ailleurs, les effets indésirables sont plus importants lors de l’administration de la dose de 220 mg par jour. L’étude RE-MOBILIZE11, quant à elle, a comparé le dabigatran 220 mg ou 110 mg par jour à l’énoxaparine 30 mg deux fois par jour, qui est actuellement la dose recommandée en prévention de la TEV, selon les guides thérapeutiques d’Amérique du Nord, lors d’une arthroplastie totale élective du genou. La population s’apparentait à celle des deux autres études. Les sujets étaient âgés de plus de 18 ans, l’âge moyen était de 66 ans, et les autres caractéristiques étaient les mêmes. L’étude a montré l’infériorité des deux régimes posologiques de dabigatran par rapport à l’énoxaparine 30 mg deux fois par jour pour la survenue de TEV symptomatiques. Tout comme dans les deux premières études, le taux de saignements majeurs, la survenue d’événements coronariens et l’augmentation des enzymes hépatiques ont été semblables pour le groupe témoin et les groupes de traitement. Par opposition aux résultats des études européennes, le dabigatran ne peut représenter une solution de rechange aux prophylaxies de la TEV actuellement recommandées en Amérique du Nord. Des essais avec des doses ou des régimes posologiques différents pourraient mener à démontrer la non-infériorité du dabigatran, mais ce dernier ne peut faire l’objet de recommandations acceptables actuellement. Tableau II Principales études portant sur le dabigatran9,10,11 Auteurs et devisPopulation Groupes deRésultats Commentaire de l’étude à l’étude traitement RE-NOVATEN : 3494 Groupe témoinNon-infériorité Aucune différence Ericksson BI et coll. ≥ 18 ans (≈ 64) Énoxaparine par rapport significative pour les Étude à répartition Arthroplastie totale 40 mg die à l’énoxaparine : saignements majeurs, aléatoire, double insu élective de la hanche % TEV et mortalité les événements versus énoxaparine Groupes combinée de 6,7 coronariens et traitements avec énoxaparine, l’augmentation des Dabigatran 6,0 et 8,6 avec enzymes hépatiques 220 mg dabigatran Durée : 28 à 35 jours Dabigatran 220 mg et 150 mg 150 mg die respectivement RE-MODEL N : 2076 Groupe témoinNon-infériorité Aucune différence Ericksson BI et coll. ≥ 18 ans (≈ 69) Énoxaparine par rapport significative pour les Étude à répartition Arthroplastie totale 40 mg die à l’énoxaparine : saignements majeurs, aléatoire, double insu élective du genou % TEV et mortalité les événements versus énoxaparine Groupes combinée de 37,7 coronariens et traitements avec énoxaparine, l’augmentation des Dabigatran 36,4 et 40,6 avec enzymes hépatiques 220 mg dabigatran Durée : 6 à 10 jours Dabigatran 220 mg et 150 mg 150 mg die respectivement RE-MOBILIZE N : 1896 Groupe témoinLes deux doses sontPas de différence Ginsberg JS et coll. ≥ 18 ans (≈ 66) Énoxaparine inférieures pour les saignements Étude à répartition Arthroplastie totale 30 mg bid à l’énoxaparine : majeurs et aléatoire, double insu élective du genou p= 0,2 pour 220 mg l’augmentation versus énoxaparine Groupes et p < 0,001 pour 110 mg des enzymes hépatiques traitements Dabigatran 220 mg Durée : 12 à 15 jours Dabigatran 110 mg die Légende : N : nombre de sujets 34 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Le dabigatran (PradaxMD) Le dabigatran est approuvé au Canada pour la prévention de la TEV chez les sujets ayant subi une arthroplastie élective totale de la hanche ou du genou. Étude comparative avec la warfarine Le dabigatran a été comparé avec la warfarine dans une étude de phase II. La population à l’étude comptait 542 sujets atteints de fibrillation auriculaire et durait 12 semaines. Les 472 sujets du groupe témoin ont reçu de la warfarine (RNI 2 à 3) et les 70 sujets du groupe de traitement ont été placés sous dabigatran à dose variable, une fois par jour. L’étude a montré une hausse des enzymes hépatiques trois fois supérieure à la normale chez 0,7 % des sujets du groupe de traitement, et ce, toutes doses confondues, et chez aucun sujet du groupe témoin2. L’étude PETRO a été la première étude randomisée à évaluer le dabigatran chez 502 personnes atteintes de FA. Le groupe expérimental recevait le dabigatran 50 mg, 150 mg ou 300 mg deux fois par jour avec ou sans aspirine 81 mg ou 325 mg, alors que le groupe témoin recevait la warfarine (RNI 2 à 3) pendant 3 à 12 semaines. Des hémorragies majeures sont survenues uniquement dans le groupe dabigatran 300 mg en association avec l’aspirine. Les événements thromboemboliques sont survenus dans le groupe dabigatran 50 mg seulement. Aucune toxicité hépatique sérieuse n’a été observée dans les groupes14. L’étude RELY12, un essai clinique randomisé à double insu, est en cours. Un total de 15 000 sujets a été recruté dans 44 pays. La durée prévue de l’étude est de deux ans. Pour être inclus, les sujets doivent être atteints de FA non valvulaire et avoir un autre facteur de risque de thromboembolie artérielle. Le groupe témoin reçoit la warfarine (RNI 2 à 3) et le groupe de traitement, le dabigatran en dose de 150 mg ou 220 mg à l’aveugle. L’issue primaire est de démontrer la non-infériorité du dabigatran par rapport à la warfarine avec l’indice combiné de thromboembolies et d’ischémies. Enfin, aucune étude comparant la daltéparine (FragminMD) au dabigatran, que ce soit en contexte d’arthroplastie ou de toutes autres indications, n’a été publiée à ce jour. Les recommandations nord-américaines Voici un bref rappel des dernières lignes directrices publiées en ce qui a trait à la préwww.monportailpharmacie.ca vention de la thromboembolie veineuse lors d’une arthroplastie de la hanche ou du genou. L’un des trois régimes suivants est approprié : une HFPM, le fondaparinux ou la warfarine (RNI 2 à 3) pour une durée minimale de 10 jours15 lors d’une intervention au genou. Cette durée peut augmenter pour atteindre quatre ou cinq semaines lorsqu’il s’agit d’une arthroplastie de la hanche16. Le CHEST recommande, pour une chirurgie élective de la hanche, l’une des prophylaxies de routine suivantes : une HFPM 12 heures avant la chirurgie ou 12 à 14 heures après la chirurgie, le fondaparinux 2,5 mg débuté 6 à 24 heures après la chirurgie ou la warfarine avec un RNI entre 2-3 instauré avant la chirurgie ou le soir de la chirurgie. Pour une chirurgie élective du genou, les recommandations sont les mêmes. Les doses d’HFPM recommandées sont de 30 mg d’énoxaparine deux fois par jour pendant 7 à 14 jours ou de la daltéparine 5 000 U une fois par jour pendant 5 à 7 jours17. Effets indésirables Le dabigatran a généralement été bien toléré dans les études cliniques. Le plus souvent, la fréquence des effets indésirables a été semblable à celle de l’énoxaparine dans les groupes témoins. Parmi les effets indésirables rapportés à 1 %, aucune différence significative n’a pu être démontrée. La fréquence des saignements majeurs définie soit par une diminution de l’hémoglobine plus grande ou égale à 20 g/L ou par le besoin d’au moins deux transfusions, ou par des saignements rétro-péritonéaux, intracrâniens, intraoculaires ou intrarachidiens mortels a été semblable chez les Tableau III Effets indésirables liés au traitement par le dabigatran lors des études cliniques, par rapport à l’énoxaparine1 Effets indésirables Dabigatran DabigatranÉnoxaparine 150 mg die 220 mg die 40 mg die ou 30 mg (n = 2737) (n = 2682) (n = 2716) Saignement majeur* 0,6–1,3 % 0,6–1,8 % 1,4–1,5 % Tout saignement 8,3-13,8 % 8,6-13,8 % 9,7-13,4 % Système sanguin et lymphatique Anémie 4 % 4,4 % 4,5 % Hémorragie gastro-intestinale 1,2 % 0,6 % 0,6 % Hématurie 1,2 % 1,2 % 0,8 % Hématome 1,4 % 1,4 % 1,8 % Hémorragie au niveau 1,3 % 1,0 % 1,0 % d’une plaie Investigations Baisse de l’Hb 1,6 % 1,3 % 2,4 % Blessures, empoisonnement et complications chirurgicales Sécrétion au niveau d’une plaie Hématome postopératoire 4,7 % 4,8 % 3,0 % Hémorragie postopératoire 2,4 % 1,7 % 2,5 % Anémie postopératoire 1,5 % 2,4 % 1,7 % Hématome traumatique 1,4 % 1,5 % 1,6 % Écoulement postopératoire 1,1 % 1,3 % 1,0 % *Diminution Hb > ou = 20g/L, nécessité de > ou = 2 transfusions, saignement rétro-péritonéal, intracrânien, intraoculaire ou intrarachidien mortel septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 35 Avez-vous entendu parler de... sujets ayant reçu le dabigatran ou l’énoxaparine. Au niveau du système sanguin et lymphatique, le dabigatran a causé légèrement plus d’hématurie que l’énoxaparine. En ce qui concerne les investigations, la baisse de l’hémoglobine causée par l’énoxaparine a été plus fréquente que celle induite par le dabigatran. À l’inverse, le nombre de sujets qui ont rapporté des sécrétions au niveau de la plaie a été plus important dans les groupes de traitement. L’augmentation des enzymes hépatiques a été plus fréquente dans les groupes témoins. Les autres effets indésirables, rares toutefois, qui ont été rapportés sont les suivants : thrombocytopénie, hémorragie rectale, élévation des transaminases, hémarthrose, épistaxis, ecchymose1. L’incidence des principaux effets indésirables, comparativement à celle de l’énoxaparine, est présentée au tableau III. La littérature médicale ne rapporte malheureusement pas de données comparatives entre les effets indésirables de la warfarine et ceux du dabigatran en contexte de chirurgie de la hanche ou du genou. Mises en garde et contre-indications On ne doit pas utiliser le dabigatran chez les sujets insuffisants rénaux graves (< 30 mL/ min). On devrait aussi éviter de l’administrer lors de manifestations hémorragiques, de diathèse hémorragique ou chez les sujets présentant une altération spontanée ou pharmacologique de l’hémostase. Les lésions étant associées à un risque de saignement significatif sur le plan clinique, tels qu’un infarctus cérébral (hémorragique ou ischémique), au cours des six derniers mois, le traitement concomitant par un inhibiteur de la P-glycoprotéine et l’hypersensibilité sont également des contre-indications5,6. Le fabricant a aussi émis des mises en garde quant à l’utilisation du dabigatran chez les personnes qui doivent subir une anesthésie avec cathéters périduraux à demeure post-opératoire en raison du ris- que d’hématomes rachidiens ou périduraux pouvant entraîner une paralysie prolongée ou permanente. Il en est de même pour ceux qui reçoivent un traitement d’HNF, d’HFPM, de fondaparinux, de bivalirudine, de thrombolytiques, d’antagonistes GPIIb/ IIIa, de clopidogrel, de ticlopidine, de sulfinpyrazone ou d’antagonistes de la vitamine K. Étant donné que l’administration d’une faible dose d’aspirine < 160 mg par jour n’a pas fait l’objet d’études importantes, elle n’est pas recommandée. À la suite de l’administration du dabigatran, il est recommandé d’attendre 24 heures avant de commencer à administrer un anticoagulant parentéral. Pour ce qui est de l’inverse, il n’existe actuellement pas de données dans la littérature médicale6. En ce qui concerne l’administration de ce médicament aux populations spéciales, l’innocuité et l’efficacité n’ont pas été établies chez les jeunes de moins de 18 ans, les femmes enceintes ou celles qui allaitent. Par conséquent, l’utilisation n’est pas recommandée pour ces populations6. En gériatrie, chez les plus de 75 ans, il faut faire preuve de prudence; une dose de 150 mg par jour devrait être prise en considération en raison du déclin de la fonction rénale. Lors d’une insuffisance hépatique, le dabigatran n’est pas recommandé si les enzymes hépatiques sont supérieures à deux fois la limite supérieure de la normale en raison de l’absence d’études. La même recommandation s’applique si le poids est inférieur à 50 kg. Bien qu’aucune donnée spécifique ne soit disponible pour les patients obèses, les études ont inclus des patients pesant jusqu’à 120 kg, et le poids corporel n’a eu qu’un effet mineur sur la clairance plasmatique du dabigatran. Interactions médicamenteuses Ni le dabigatran etexilate ni sa fraction active ne sont métabolisés par le CYP 450 et n’exercent un effet sur les isoenzymes du Tableau IV Conseils aux utilisateurs de dabigatran14 Le dabigatran (Pradax) empêche la formation de caillots sanguins en bloquant l’activité d’une protéine nommée « thrombine ». ■Les capsules peuvent être prises avec ou sans nourriture, mais elles ne peuvent être mâchées. Si vous oubliez une dose, consultez votre pharmacien ou votre médecin. ■Le dabigatran peut causer des effets indésirables graves. Arrêtez-le si vous saignez au niveau de la plaie, d’une blessure ou du rectum. Parlez au pharmacien ou au médecin si la plaie coule, si vous avez des bleus ou un saignement à la suite d’une blessure, d’une épistaxis (saignement de nez), du sang dans les selles ou dans l’urine. ■ Gardez les capsules entre 15 et 30°C. Une fois le flacon ouvert, les capsules doivent être utilisées dans les 30 jours. ■ 36 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 CYP 450. Le dabigatran etexilate est un substrat avec une affinité modérée pour le transporteur de la P-glycoprotéine (P-gp). Par conséquent, les inducteurs ou les inhibiteurs de la P-gp puissants pourraient avoir un impact sur l’exposition au dabigatran. Parmi les inducteurs de la P-gp, on trouve le vérapamil et la clarithromycine qui ne sont pas recommandés en association avec le dabigatran. La quinidine est, quant à elle, contre-indiquée. Les inhibiteurs de la P-gp, tels que la rifampicine et le millepertuis, doivent également faire l’objet de prudence. L’amiodarone augmente l’aire sous la courbe et la concentration maximale de dabigatran, la dose suggérée est donc de 150 mg. Les antiacides semblent réduire l’exposition au dabigatran, en conséquence, il faut éviter l’administration concomitante dans les 24 heures postchirurgie6. Posologie et coûts de traitement Les doses recommandées au Canada pour la prévention de la TEV à la suite d’une arthroplastie du genou élective est de 220 mg par jour à débuter quatre heures postchirurgie. Au jour 0, il est suggéré d’administrer une capsule de 110 mg, puis d’augmenter à deux capsules une fois par jour par la suite, pour un maximum de dix jours. Pour la prévention de la TEV à la suite d’une arthroplastie de la hanche élective, la posologie est de 220 mg par jour à commencer dans les quatre heures postchirurgie, selon le même régime posologique que pour la chirurgie du genou, mais pour une durée maximale de 28 à 35 jours. En présence d’insuffisance rénale modérée (30-50 mL/min), la dose devrait être de 150 mg par jour6. Le dabigatran peut être administré indépendamment de la nourriture. De plus, il n’existe aucune donnée concernant le passage d’un anticoagulant parentéral au dabigatran, mais il semble approprié d’attendre le moment où le traitement parentéral aurait eu lieu pour commencer à administrer le dabigatran. Actuellement, la Régie de l’assurance-maladie du Québec ne rembourse pas le dabigatran et le coût pour un traitement de 30 jours à la dose recommandée de 220 mg, soit 60 capsules de 110 mg, est d’environ 250 $. À titre indicatif, la warfarine coûte plus ou moins 5 $ par mois, mais elle engendre des coûts par rapport au suivi des RNI, et l’énoxaparine coûte 190 $ par mois si l’on calcule le coût pour un traitement de 30 mg 2 fois par jour, pendant 14 jours. Les deux traitements sont remboursés par les assurances publiques13. Les conseils pertinents à donner aux personnes traitées par le dabigatran sont présentés dans le tableau IV. Le dabigatran (PradaxMD) Conclusion Le dabigatran est un nouvel anticoagulant oral sur le marché canadien. Il inhibe la liaison de la thrombine avec ses substrats et prévient la transformation du fibrinogène en fibrine, ce qui prévient la formation de thrombus. Sa place dans la thérapie actuelle reste à déterminer puisqu’il a été démontré que ce médicament, pris une fois par jour, est inférieur à l’énoxaparine administrée de façon sous-cutanée deux fois par jour, selon les lignes thérapeutiques reconnues en Amérique du Nord, dans le contexte de prévention de la TEV. Les deux thérapies présentent cependant des effets indésirables similaires. Ce médicament serait une solution de rechange à l’énoxaparine pour la prévention de la TEV, à la suite d’une chirurgie élective de remplacement de la hanche ou du genou. Des études supplémentaires sont en cours afin de valider si le médicament pourrait être une solution de rechange intéressante à la warfarine chez les sujets atteints de fibrillation auriculaire afin de prévenir les accidents ischémiques et les thromboses artérielles. Également à surveiller, le rivaroxaban (Xeralto), un nouvel agent commercialisé par Bayer et visant à prévenir la TEV chez les adultes qui subis- sent une chirurgie élective de la hanche ou du genou. Il s’agit du premier inhibiteur direct du facteur Xa. La dose recommandée est de 10 mg par jour, 6 à 12 heures après la chirurgie pendant deux semaines dans le cas du genou et cinq semaines, dans le cas de la hanche. La série d’études Record semble démontrer une efficacité supérieure à l’énoxaparine 40 mg une fois par jour (Record 1-2-3) ou 30 mg deux fois par jour (Record-4) et un avantage en matière d’effets indésirables, soit une diminution des saignements. Le produit est approuvé au Canada et en Allemagne à l’heure actuelle18. ■ 8.Boehringer Ingelheim (Canada) Ltée. L’anticoagulant oral innovateur dabigatran etexilate Pradaxa (nom de marque européen) homologué par la Commission européenne. Communiqués de presse. Boehringer Ingelheim (Canada) Ltée, 2008. [En ligne. Page consultée le 7 décembre 2008.] www.boehringer-ingelheim.ca/francais/news/2008/2008-3-27. asp 9.Ericksson BI, Dahl OE, Rosencher N et coll. Dabigatran etexilate versus enoxaparin for prevention of venous thromboembolism after total hip replacement : A randomised, double-blind, non-inferiority trial (Renovate). Lancet 2007; 370: 949-56. 10.Ericksson BI, Dahl OE, Rosencher N et coll. Oral dabigatran etexilate vs. Subcutaneous enoxaparin for the prevention of venous thromboembolism after total knee replacement : The Re-Model randomized trial. Journal of Thrombosis and Haemostasis 2007; 5: 2178-85. 11.Ginsberg JS, Davidson BL, Comp PC et coll. The oral thrombin inhibitor dabigatran etexilate vs the north american enoxaparin regimen for the prevention of venous thromboembolism after knee arthroplasty surgery (Re-mobilize). The Journal of Arthroplasty 2008; 0(0) : 1-10. 12.Boehringer Ingelheim U.S. Corporation. RE-LY. Boehringer Ingel heim U.S. Corporation, 2008. [En ligne. Page consultée le 7 décembre 2008.] https:// www.rely-trial.com/RelyWeb/index.jsp 13. McKesson Canada Inc. Pharmaclick. McKesson Canada Inc. 2008. [En ligne. Page consultée le 10 décembre 2008.] https://clients.mckesson.ca/logon 14.Ezekowitz MD, Reilly PA, Nehmiz et coll. Dabigatran with or without concomitant aspirin compared with warfarine alone in patients with non valvular atrial fibrillation (PETRO Study). The American Journal of Cardiology 2007; 100(9) : 1419-26. 15.Geerts WH, Pineo GF, Heit JA et coll. Prevention of venous thromboembolism : The Seventh ACCP Conference on Antithrombotic and Thrombolitic Therapy. Chest 2004; 126(3 Suppl) : 338S-400S. 16.Deitelzeig SB, McKean SC, Amin An et coll. Prevention of venous thromboembolism in the orthopedic surgery patient. The Cleveland Clinical Journal of Medicine 2008: 75(3 Suppl) : S27-36. 17.William H. Geerts, David Bergqvist, Graham F et coll. Antithombotic and thrombolytic therapy 8th edition : ACCP Guidelines. Chest 2008; 133; 381-453. 18.Bayer healthcare. About Xarelto. [En ligne. Page consultée le 21 janvier 2009.] www.xarelto.com/ scripts/pages/en/information-on-xarelto/efficacy/index.php Références 1. Statistique Canada. Arthroplastie de la hanche et du genou. Rapports sur la santé 2002;14(1) : 43-59. 2.Hirsh J, O’Donnell M et Eikelboom JW. Beyond unfractioned heparin and warfarine : current and future advances. Circulation 2007; 116: 552-60. 3.Ma Q. Development of oral anticoagulants (Commentary). British Journal of Clinical Pharmacology 2007; 64(3): 263-5. 4. Liesenfeld KH, Schafer HG, Troconiz IF et coll. Effects of the direct thrombin inhibitor dabigatran on ex-vivo coagulation time in orthopaedic surgery patients : A population model analysis. British Journal of Clinical Pharmacology 2006; 62(5) : 527-37. 5. Santé Canada. Avis de décision portant sur Pradax, 14 juillet 2008. 6.Boehringer Ingelheim (Canada) Ltée. Monographie du dabigatran (PradaxMD). Burlington, Ontario, Canada; juin 2008. 7. Drug Information Center (DIC). Dabigatran etexilate. Drug Information Center, 2008 [En ligne. Page consultée le 6 décembre 2008.] drugs-in. blogspot.com/2008/07/dabigatran-etetexilate. html Questions de formation continue 8) Parmi les énoncés suivants, lequel est vrai ? A. Le dabigatran 220 mg par jour n’est pas inférieur à l’énoxaparine 30 mg deux fois par jour pour la prévention de la TEV à la suite d’une arthroplastie totale élective du genou. B. La durée de traitement par le dabigatran se situe entre 28 et 35 jours dans le cas d’arthroplastie totale élective du genou. C. Les études cliniques ont montré que l’augmentation des enzymes hépatiques est inférieure avec l’énoxaparine une fois par jour, en comparaison avec le dabigatran 220 mg ou 150 mg une fois par jour. D. Les insuffisants rénaux modérés (30-50 ml/min) devraient recevoir une dose de dabigatran de 110 mg par jour. E. L’effet anticoagulant du dabigatran est proportionnel à sa concentration plasmatique. 9) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux ? A. Le dabigatran peut être administré avec ou sans nourriture. B. La liaison aux protéines du dabigatran est faible. Il en est de même pour son niveau de biodisponibilité qui est faible après l’administration par voie orale. C. Le dabigatran est un inhibiteur réversible et compétitif de la thrombine. Il inhibe aussi la thrombine libre, mais pas la thrombine liée. D. La prévention de la TEV avec le dabigatran n’est pas remboursée par la Régie de l’assurance médicament du Québec. E. Chez les personnes de 75 ans et plus, la dose recommandée est de 150 mg par jour. Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 90 www.monportailpharmacie.ca septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 37 LES pages bleues Les antirejets en transplantation cardiaque La transplantation cardiaque est sans contredit la forme de traitement la plus efficace de l’insuffisance cardiaque terminale. L’évolution des traitements immunosuppresseurs a amélioré considérablement la survie des patients et cette longévité passe inévitablement par une immunosuppression prolongée. Celle-ci résulte notamment en une prévalence accrue des comorbidités secondaires à la thérapie antirejet, à savoir l’infection, l’hypertension, les dyslipidémies, l’insuffisance rénale, le diabète, l’ostéoporose et les néoplasies. La pharmacothérapie de ces patients est complexe et changeante. Il importe donc que le pharmacien connaisse bien ces médicaments à index thérapeutique étroit, leurs effets secondaires, les interactions médicamenteuses potentielles et leur monitorage. Ces éléments sont d’une importance capitale pour la survie et la qualité de vie de ces patients. Selon le registre de la International Society of Heart and Lung Transplantation, la survie de trois ans après la greffe avant l’époque de la cyclosporine, soit dans les années 1969-1980, était de 40 %. À la suite de la mise en marché de la cyclosporine au début des années 1980, 70 % des greffés survivaient plus de trois ans1. En dépit de ces avancées encourageantes et de l’évolution continue des thérapies, l’espérance de vie d’un greffé cardiaque est de 9 à 11 ans, en fonction de la pathologie de base1. Le rejet Avant l’introduction de la cyclosporine, le rejet du cœur transplanté était la cause principale de mortalité et de morbidité. Bien qu’actuellement on estime qu’environ 30 % des greffés auront un épisode de rejet au cours de la première année de greffe, le rejet aigu est la cause de 15 % des décès observés au cours de cette même année, les complications opératoires étant responsables de la moitié des décès répertoriés au cours de cette même période1. Le diagnostic du rejet cellulaire est posé à l’aide d’une biopsie endomyocardique et la symptomatologie varie selon la gravité du rejet, la plupart étant asymptomatiques. Le rejet plus sérieux causera un dysfonctionnement du greffon se manifestant par des symptômes de défaillance cardiaque gauche (dyspnée, fatigue, œdème, etc.). Le rejet humoral, appelé aussi « rejet vasculaire » survient plusieurs jours ou semaines après la greffe. Ce type de rejet est moins fréquent que le rejet cellulaire et peut être associé à un grave dysfonctionnement du cœur. Selon la gravité du rejet cellulaire, le traitement peut aller de l’observation jusqu’au recours aux corticostéroïdes (intraveineux ou per os), aux anticorps mono ou polyclonaux en passant par une majoration des doses d’immunosuppresseurs utilisés ou par un changement dans le régime immunosuppresseur en cours2,3. Le rejet humoral se traite à l’aide de hautes doses de stéroïdes ou par www.monportailpharmacie.ca une intensification de l’immunosuppression. Les cas plus sérieux pourront requérir l’utilisation de gammaglobulines ou même de plasmaphérèse afin de moduler la production d’anticorps ou d’extraire des anticorps circulants2,3. La vasculopathie du greffon Parmi les complications plus tardives de la greffe cardiaque, on retient une coronaropathie diffuse qui atteint préférentiellement les artères de petit calibre. Il s’agit de la vasculopathie du greffon4. Bien que cette vasculopathie soit présente chez tous les types de greffe d’organes solides, elle est plus facilement diagnostiquée et étudiée chez les greffés cardiaques grâce à la facilité d’examen des artères coronaires. La morbidité associée à la vasculopathie du greffon est significative puisque, pendant de nombreuses années, cette atteinte était la principale cause de décès des greffés cardiaques. Actuellement, la vasculopathie du greffon a cédé son titre de cause principale de décès au profit des complications néoplasiques, mais elle demeure la cause principale de perte du greffon et une source importante de morbidité chez les greffés cardiaques. Texte rédigé par Nathalie Châteauvert, M.Sc., pharmacienne clinicienne, Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, Hôpital Laval. Révision : Dr Bernard Cantin, cardiologue, Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, Hôpital Laval, et Chantal Duquet, M.Sc. Texte original soumis le 15 juin 2009. Texte final remis le 1er juillet 2009. Les immunosuppresseurs L’immunosuppression demeure la pierre angulaire du traitement des greffés. Au-delà des bénéfices clairement démontrés en matière de rejets, on lui reconnaît aussi des effets secondaires significatifs qui modulent fortement son utilisation. Les générations plus récentes d’immunosuppresseurs ont aussi montré un effet bénéfique dans la vasculopathie du greffon4. L’immunosuppression primaire en greffe cardiaque consiste en une triple thérapie regroupant un inhibiteur de la calcineurine (cyclosporine ; NeoralMD), ou le tacrolimus PrografMD, un agent antimétabolite purique (azathioprine ; ImuranMD), ou le mofétilmycophénolate (CellceptMD), et un corticostéroïde1-4. Un an après la greffe, 94 % des septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 39 LES pages bleues patients reçoivent toujours un inhibiteur de la calcineurine, plus de 80 % d’entre eux, un agent antimétabolite purique, le plus souvent le mofétilmycophénolate (77 % des greffés) et 63 % sont toujours sous corticothérapie. Une faible mais croissante proportion de patients reçoit un inhibiteur du signal de la prolifération (sirolimus [RapamuneMD] ou évérolimus [CerticanMD])1. Ce dernier n’est pas encore disponible au Canada, mais il fait l’objet d’un important projet de recherche, de sorte qu’il est utilisé chez plusieurs greffés cardiaques depuis plus de deux ans. Il est toutefois largement utilisé dans plus de 40 pays situés principalement en Eurasie. Le choix des immunosuppresseurs dans les mois suivant la greffe se module en fonction des effets secondaires et des complications que présente chaque individu. Comme les corticostéroïdes sont utilisés largement et qu’ils sont bien connus des pharmaciens, cette classe de médicaments utilisés comme immunosuppresseurs ne sera pas traitée dans cet article. Les inhibiteurs de la calcineurine (ICN) La cyclosporine A (CyA) (Neoral, Sandimmune) et le tacrolimus (TAC) (Prograf, Advagraf) sont les antirejets constituant la pierre angulaire de l’immunosuppression chez les greffés cardiaques. Les ICN inhibent la calci- neurine, une protéine intralymphocytaire essentielle à la production de cytokines impliquées dans les réactions immunitaires, notamment l’activation et la prolifération des lymphocytes4,5. Le TAC est un médicament 50 à 100 fois plus puissant que la cyclosporine pour inhiber la prolifération des lymphocytes impliqués dans la réaction de rejet5. Effets secondaires La néphrotoxicité est l’effet secondaire le plus fréquent et ayant le plus de conséquences à long terme. Elle se présente dans les mêmes proportions avec l’un ou l’autre des ICN. Cette toxicité rénale peut être aiguë, souvent proportionnelle à la dose, ou chronique, avec présence de sclérose artériolaire et de fibrose tubulo-interstitielle. Rarement, elle se manifeste par un syndrome urémique. L’hypertension et l’hyperlipidémie se produisent chez la majorité des patients, mais l’incidence serait proportionnellement plus importante avec la CyA6-9. L’hypertrichose atteint plus de 50 % des patients sous CyA, alors que cet effet est absent avec le TAC, ce dernier pouvant à l’inverse être la cause d’alopécie. L’hyperplasie gingivale est un problème relativement fréquent qui touche uniquement les patients sous CyA. L’incidence de diabète et la toxicité neurologique (tremblements, céphalées, insomnie, paresthésie) sont plus importantes avec le TAC8-10. L’hypomagnésémie, l’hy- Tableau I Effets secondaires des antirejets Effets secondaires CyA TAC MMFEc-MPS AZASRLEVE Alopécie ++ + Anémie ++ ++ ++ +++ ++ Diabète ++ +++ Diarrhée ++ +++ +++ ++ ++ +++ +++ Hépatotoxicité + ++ + + + Hirsutisme +++ Hypercholestérolémie ++++ +++ ++++ ++++ Hyperkaliémie ++ ++ + ++ ++ Hyperplasie gingivale +++ Hypertension ++++ +++ ++ ++ ++ Hypertriglycéridémie +++ +++ ++++ ++++ Hyperuricémie +++ +++ ++ ++ +++ +++ Hypomagnésémie +++ +++ Néphrotoxicité +++ +++ ++ ++ Neurotoxicité ++ +++ ++ + (tremblements, paresthésie) Neurotoxicité (convulsions) + + Leucopénie ++ ++ +++ +++ ++ Thrombopénie +++ ++ ++ + ++ Retard dans la guérison de plaies ++ ++ + : rare < 5 % ++ : commun 5-15 % +++ : très commun ++++ : la majorité des patients 40 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 perkaliémie et l’hyperuricémie sont des effets secondaires qui touchent la plupart des patients sous ICN. Le tableau I compare l’incidence des effets secondaires des antirejets. Données probantes cliniques L’efficacité des ICN quant à la prévention du rejet en greffe cardiaque favorise le tacrolimus6,7. Les associations TAC-mycophénolate mofétil (MMF) et TAC-azathioprine (AZA) seraient supérieures à la CyA combinée aux mêmes médicaments, causant moins de rejets histologiquement démontrés6,7. En dépit de ces résultats, aucune différence quant à la survie à un an n’a été démontrée. Ces études suggèrent que le TAC est supérieur à la CyA pour réduire le rejet histologique, mais elles reflètent aussi que la plupart des rejets ne sont pas lourds de conséquences. Il est important de noter que cette supériorité apparente du TAC peut être expliquée en partie par une meilleure absorption et des taux sériques plus prévisibles que la CyA. La conversion de la CyA au TAC est une approche justifiée dans le cas d’un rejet significatif sous CyA. Un ratio de conversion empirique de 1 mg TAC pour 40-50 mg de CyA est souvent adopté, bien que des dosages de contrôle soient requis pour ajuster la dose adéquatement. Pharmacocinétique et monitorage La CyA et le Prograf (TAC) sont administrés deux fois par jour, toutes les 12 heures. L’instauration de l’un ou l’autre de ces ICN se fait à dose croissante, pour atteindre les dosages cibles selon le moment de la post-transplantation. Une formulation uniquotidienne de tacrolimus est offerte sous le nom commercial d’AdvagrafMD. Cette formulation à longue durée d’action de TAC est toujours sous évaluation en vue d’obtenir l’indication de prévention du rejet en greffe cardiaque. Une évaluation pharmacologique préliminaire a démontré une exposition comparable entre la formulation à longue durée d’action et la formulation standard après une conversion 1 :1 chez des patients, plus de six mois après la greffe. Les patients convertis à la formulation à longue durée d’action sont demeurés stables durant l’année qui a suivi la conversion et le médicament a été bien toléré, avec un profil d’effets secondaires comparable à celui du TAC dans sa formulation standard11. Les ICN sont faiblement absorbés au niveau de la muqueuse gastro-intestinale, leur biodisponibilité est de l’ordre de 25 à 30 %. La nourriture diminue l’aire sous la courbe des concentrations en fonction du temps de l’ordre de 15 à 40 %. Une grande variabilité intra et interindividuelle existe quant à leur absorption. Ainsi, Les antirejets en transplantation cardiaque : l’évolution des poisons il est recommandé de les prendre avec rigueur, toujours de la même façon, soit avec ou sans aliments. Un changement au niveau du transit gastro-intestinal secondaire à la diarrhée ou à l’utilisation d’agents prokinétiques, tels que le métoclopramide ou la dompéridone, peut entraîner une augmentation de l’absorption et, conséquemment, une hausse des concentrations sanguines des ICN. Le TAC et la CyA sont largement liés aux protéines plasmatiques (albumine et lipoprotéines particulièrement). On connaît peu l’impact clinique de ces liaisons. Les enfants ont un volume de distribution presque deux fois plus grand que celui de l’adulte; ce volume s’explique entre autres par une plus faible quantité et affinité des protéines à se lier aux médicaments, augmentant leur répartition tissulaire et leur élimination. Ils requièrent ainsi des doses d’ICN deux à quatre fois plus élevées que chez l’adulte11,12. Les ICN subissent un métabolisme pré-systémique par les enzymes du CYP4503A4 de l’intestin et y retournent en se liant à la p-glycoprotéine (p-gp). Les ICN sont des substrats et des inhibiteurs de ces voies métaboliques. Une étude in vivo a démontré que seule la CyA a la capacité d’inhiber l’activité de la p-glycoprotéine aux doses utilisées en clinique, lesquelles sont nettement plus élevées que celles du TAC pour un effet immunosuppresseur comparable5. Les ICN sont métabolisés principalement par les CYP4503A du foie et de l’intestin avec moins de 0,5 % des médicaments retrouvés inchangés dans l’urine ou les fèces. Une fois de plus, la CyA aurait un impact beaucoup plus significatif sur l’activité de cyp4503A5 que le TAC. Le cytochrome 3A5 serait davantage impliqué dans le métabolisme du TAC. L’expression du cyp4503A5 est polymorphique. Il semble que 10 à 40 % de la population caucasienne aurait une haute expression de ce cytochrome, ce qui pourrait expliquer l’utilisation de doses plus importantes pour atteindre les concentrations sanguines cibles chez certains patients11,12. Le monitorage des ICN diffère selon le médicament. En effet, la documentation scientifique abonde de données sur le meilleur outil pour surveiller la CyA, alors que pour le TAC la concentration avant la dose du matin est encore la norme de pratique2,3. Pour la CyA, on se demande quel paramètre donnera la meilleure corrélation entre l’exposition à l’immunosuppression et le rejet et/ou la toxicité. Des études ont montré que la concentration sanguine avant la dose (C0) n’offre pas une bonne corrélation avec l’exposition au médicament obtenue par la surface sous la courbe concentration-temps. L’utilisation de la concentration sanguine deux heures après www.monportailpharmacie.ca la dose (C2) pour l’ajustement thérapeutique offrirait une meilleure corrélation avec l’exposition à l’immunosuppression et réduirait le nombre de rejets aigus. On a de plus démontré une diminution significative des doses de CyA en ajustant le médicament à l’aide du C2 plutôt que du C0, ce qui pourrait entraîner une diminution de la toxicité14. Bien que l’utilisation du monitorage C2 soit bien établie en greffe rénale, le consensus sur la transplantation cardiaque de la Société canadienne de cardiologie fait du monitorage au C2 une recommandation 2B3,15. Il est bien connu que le rejet est plus important au cours des premiers mois suivant la greffe. Conséquemment, les concentrations sanguines visées dépendent du temps écoulé depuis la greffe. En clinique, elles sont aussi individualisées en fonction des épisodes de rejet, des effets secondaires et des autres immunosuppresseurs utilisés en concomitance1-3. Le tableau II exprime les concentrations sanguines visées des ICN lorsqu’ils sont associés aux agents antimétabolites puriques, soit la thérapie immunosuppressive de première intention, alors que le tableau III résume les taux sériques visés des inhibiteurs du signal de la prolifération (ISP) en association ou non avec les ICN3. Bien que les ISP, le sirolimus et l’évérolimus, n’aient pas de toxicité rénale intrinsèque, ils peuvent augmenter le potentiel de néphrotoxicité des ICN. En conséquence, une association avec les ISP nécessite une réduction des cibles d’ICN. Bien qu’il y ait peu d’études rigoureuses ayant pour but de déterminer les taux visés d’ICN lorsqu’utilisés en association avec le sirolimus ou l’évérolimus, il semble que le potentiel antirejet des ISP soit assez important pour compenser ces taux sériques d’ICN qui peuvent atteindre 50 % de la normale16. Les interactions médicamenteuses avec les ICN Bon nombre de médicaments d’usage courant entrent en interaction avec les ICN. La plupart des données sur les interactions médicamenteuses avec les ICN impliquent davantage la CyA que le TAC. D’une part, il s’agit d’un médicament utilisé depuis beaucoup plus longtemps en clinique et, d’autre part, tel que mentionné précédemment, certains auteurs ont démontré que le TAC avait un impact mitigé sur l’activité de la p-gp et du Cyp4503A45,17. En tant que clinicien, il appert sage d’extrapoler au TAC les interactions les plus significatives que l’on rencontre avec la CyA et d’effectuer le monitorage d’usage afin d’éviter toute complication. Parmi les agents antihypertenseurs, le diltiazem et le vérapamil inhibent le cyp4503A4 et la p-gp, augmentant ainsi les concentrations sanguines des ICN de façon significative. Bien que certaines dihydropyridines aient aussi été rapportées comme pouvant faire augmenter les concentrations des ICN, en clinique, l’utilisation de l’amlodipine ou de la nifédipine n’entraîne pas d’augmentation des concentrations des ICN17. Quant aux autres anti-hypertenseurs, tels que les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IECA), les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA) et l’hydrochlorothiazide (HCTZ), ils présentent un intérêt certain pour leur effet néphroprotecteur (pour les IECA et les ARA) et leur efficacité (pour l’HCTZ), mais leur utilisation justifie un suivi étroit de la fonction rénale puisque leur association avec les ICN peut la détériorer, habituellement de façon temporaire. Les hypolipémiants font partie du traitement de base des greffés cardiaques tant pour leurs effets préventifs sur la vasculopathie du greffon que pour maîtriser l’augmentation des lipides sanguins, un effet délétère des ICN2. L’atorvastatine, la lovastatine et la simvastatine sont des substrats du cyp4503A4 les prédisposant à interagir avec les ICN. En effet, il est bien démontré que les ICN, particulièrement la CyA, inhibent la biotransformation de ces statines, ce qui a pour conséquences une accumulation sous une forme active de ces médicaments et la survenue de myotoxicité (myalgie, musculopathie et rhab- Tableau II Taux sériques cibles (en ng/mL) avant la dose (C0) et 2 heures après (C2) des ICN en association avec les antimétabolites puriques (AZA, MMF ou EC-MPS) 2,13 Temps depuis la greffe Cyclosporine C0 Cyclosporine C2 Tacrolimus 0-3 mois 300-400 1200-1400 10-20 3-6 mois 200-300 800-1000 5-15 6-12 mois 150-250 ng 700-900 5-15 > 12 mois 100-150 500-700 5-15 ICN : inhibiteurs de la calcineurine AZA : azathioprine MMF : mofétilmycophénolate EC-MPS : mycophénolate sodique septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 41 LES pages bleues Les hypolipémiants font partie du traitement de base des greffés cardiaques tant pour leurs effets préventifs sur la vasculopathie du greffon que pour maîtriser l’augmentation des lipides sanguins, un effet délétère des ICN. domyolse)17. La fluvastatine est métabolisée par le cyp4502C9, une voie métabolique non empruntée par les ICN. La pravastatine est un substrat de la p-gp, mais elle ne passe pas par le CYP4503A4, ce qui laisse croire à une accumulation potentielle de cette statine, bien que possiblement en quantité moindre. La rosuvastatine n’est pas métabolisée par le cyp4503A4, mais une augmentation significative de l’ordre de 10 fois son exposition lorsqu’associée avec la CyA a été démontrée, ce qui en fait une contre-indication aux doses usuelles18. L’ézétimibe a fait l’objet de quelques études chez les greffés cardiaques. Les résultats confirment que l’ézétimibe est sécuritaire et efficace en association avec la CyA19. Une fois de plus, l’utilisation de la plus petite dose efficace de statine demeure une règle de choix, et l’association avec l’ézétimibe peut s’avérer utile lorsque les cibles ne sont pas atteintes chez les sujets considérés comme à haut risque, en présence d’une vasculopathie du greffon ou lorsque les statines sont contreindiquées ou non tolérées. Il importe de demeurer prudent puisque une augmentation des concentrations sanguines de l’ézétimibe a été rapportée lorsque ce médicament est associé à la CyA. Quant aux fibrates, leur utilisation peut être envisagée dans la mesure où les doses sont ajustées selon la fonction rénale. On suggère de surveiller les dosages des ICN lors de leur introduction. Bien que les données soient limitées, il pourrait y avoir une augmentation des dosages des ICN16. Les antifongiques, à savoir kétoconazole, fluconazole, itraconazole et voriconazole, sont tous des inhibiteurs du cyp4503A4 et de la p-gp (sauf le fluconazole). Le kétoconazole est le plus puissant inhibiteur du métabolisme des ICN, suivi par l’itraconazole, le voriconazole et le fluconazole (doses > 200 mg). Ces agents peuvent jusqu’à doubler les concentrations sériques des ICN et, conséquemment, la toxicité relative. En présence de kétoconazole, de voriconazole et d’itraconazole, il est recommandé de diminuer d’emblée les doses d’ICN de 30 à 50 %17,20. L’inhibition enzymatique est observée immédiatement après l’administration de la première dose de l’inhibiteur. Toutefois, on a peu de données au regard de la durée attendue de cette inhibition lorsque le médicament est cessé. La demi-vie de l’inhibiteur et 42 sa liaison protéique peuvent affecter la durée de cette inhibition. On considère qu’en moyenne 7 à 10 jours sont requis pour que les concentrations sanguines de l’immunosuppresseur retournent aux valeurs de base. Habituellement, les cliniciens considèrent les interactions médicamenteuses comme plus indésirables que bénéfiques. Comme la thérapie immunosuppressive est très coûteuse, la réduction des doses quotidiennes est perçue comme génératrice d’économie substantielle. Les antifongiques azolés, notamment le kétoconazole, en association avec la CyA, se sont révélés les agents les plus sécuritaires et efficaces pour réduire le fardeau financier que représente une immunosuppression à long terme, sans sacrifier le bienêtre du patient21. D’autres investigateurs pharmacoéconomes se sont intéressés à une semblable association réductrice de coûts avec le diltiazem, précisément chez les greffés rénaux22. Cette dernière interaction à visée pharmacoéconomique est utilisée largement en pratique chez les greffés rénaux. La goutte est une complication invalidante et fréquente chez les patients sous ICN. La gestion de cette comorbidité se complique par les interactions médicamenteuses des agents antigoutteux avec les ICN. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens présentent un risque accru d’insuffisance rénale et d’hyperkaliémie chez les patients prenant des ICN. La colchicine s’avère aussi un choix peu sécuritaire en association avec les ICN. Une combinaison d’effets secondaires, tels que diarrhées, hépatonéphropathie et neuromyopathie, peut être induite en associant la colchicine et la CyA. Ce syndrome apparaît dans les deux premières semaines suivant l’instauration de la colchicine et se résout trois à quatre semaines après son arrêt. La CyA poten­tialiserait les effets toxiques de la colchicine en inhibant la p-gp. De plus, les effets secondaires, tels que la diarrhée, peuvent engendrer une déshydratation et une insuffisance rénale aiguë. Or, la colchicine devrait être utilisée brièvement et à la dose la plus faible possible chez les patients sous ICN. Le monitorage des symptômes de diarrhées, vomissements, jaunisse, faiblesse musculaire, myalgies et paresthésie distale, devrait être fait étroitement et l’apparition de l’un ou l’autre de ces symptômes justifie l’ar- Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 rêt de la colchicine23. Les corticostéroïdes demeurent des agents sécuritaires et efficaces pour le traitement des épisodes aigus de goutte. Il n’y a pas d’interaction significative entre les ICN et l’allopurinol bien qu’une possible accumulation des concentrations sanguines de cyclosporine ait été rapportée2,24. L’interaction des ICN avec les antiépileptiques, phénytoïne et carbamazépine, est bien documentée. La puissante induction du cyp4503A4 par ces agents peut réduire jusqu’à quatre fois les concentrations sanguines de CyA. Le même effet devrait être anticipé avec le TAC, bien que peu de données soient rapportées. À l’inverse, une augmentation des concentrations sanguines de phénytoïne a été rapportée lors de l’utilisation concomitante de TAC. Un déplacement de la phénytoïne des sites de liaison protéiques est la cause la plus probable puisqu’il s’agit de deux médicaments fortement liés qui se concurrencent pour les sites de liaison protéiques. Au-delà des effets sur le métabolisme, l’association phénytoïne-CyA peut potentialiser l’hyperplasie gingivale2,17. Parmi les antibiotiques pouvant interagir significativement avec les ICN, on trouve l’érythomycine, un inhibiteur du cyp4503A4, et la clarithromycine. Le même mécanisme y est à l’œuvre, mais avec un moindre impact. Les concentrations des ICN peuvent augmenter significativement en présence de ces macrolides. L’azithromycine serait une solution de rechange de choix. Quant à la ciprofloxacine, son usage est sécuritaire en association avec les ICN. Il n’est pas recommandé de modifier les doses d’ICN ni de surveiller leurs concentrations sanguines. On rapporte une augmentation potentielle de la créatinine sérique qui s’expliquerait par une compétition pour la sécrétion tubulaire de ces deux médicaments. Les antirétroviraux augmentent significativement les taux sériques des ICN et, à l’inverse, la rifampicine les diminue. Le tableau IV énumère les interactions les plus courantes et les plus significatives, et offre des suggestions de monitorage clinique de ces interactions. Ce tableau est disponible sur MonPortailPharmacie.ca (archives de Québec Pharmacie, numéro de septembre 2009). Dans la section « FC en ligne », ce tableau se trouve intégré à la chronique. Les antirejets en transplantation cardiaque : l’évolution des poisons Les antifongiques azolés, notamment le kétoconazole, en association avec la CyA, se sont révélés les agents les plus sécuritaires et efficaces pour réduire le fardeau financier que représente une immunosuppression à long terme, sans sacrifier le bien-être du patient. Compte tenu de l’index thérapeutique étroit des ICN, il convient que tout ajout de nouveaux médicaments mérite qu’on évalue les risques d’interaction. Il ne faut pas oublier le jus de pamplemousse qui est un inhibiteur du cyp4503A4 bien connu. Son utilisation, même sporadique, peut augmenter les concentrations d’ICN jusqu’à trois jours après une seule consommation. Bien que cela soit bien démontré dans les études fondamentales, il semble que l’impact clinique soit plutôt faible avec les ICN26. À moins d’être aussi rigoureux dans la prise de son jus que dans celui de son antirejet, il reste souhaitable d’éviter la consommation de jus de pamplemousse. Les antimétabolites puriques L’azathioprine (AZA), le mofétilmycophénolate (MMF) et le mycophénolate sodique (ECMPS) sont des inhibiteurs de la prolifération des lymphocytes aussi appelés « antimétabolites puriques ». L’AZA a été le premier immunosuppresseur à se montrer efficace pour prévenir le rejet d’organes solides. L’AZA a été remplacé au cours des dernières années par des agents moins toxiques, plus spécifiques et plus puissants, comme le MMF et le EC-MPS. Le MMF et l’EC-MPS inhibent de façon sélective la production des lymphocytes en réponse à une stimulation allogénique, sans inhiber la croissance d’autres lignées cellulaires9. Le métabolite actif du MMF et de l’EC-MPS est l’acide mycophénolique (AMP) qui est libéré et exerce un effet immunosuppresseur. L’ECMPS est une formulation entérique qui libère l’AMP au niveau de l’intestin et dont l’efficacité et la bioéquivalence ont été démontrées27. Effets secondaires L’effet secondaire le plus redoutable de l’AZA est sa myélotoxicité, incluant la leucopénie, l’anémie et la thrombopénie. Ces effets dépendent de la dose et se résolvent dans les 7 à 10 jours suivant une diminution de dose ou l’arrêt. Le MMF est relativement bien toléré. Les effets secondaires les plus courants sont d’ordre digestif, à savoir nausées et diarrhées, lesquels répondent normalement à une diminution de la dose. Les effets indésirables digestifs seraient davantage liés aux niveaux sériques d’AMP qu’à la dose de MMF. Certaines études ont montré que la forme entérosowww.monportailpharmacie.ca luble (EC-MPS) permettrait de diminuer les effets secondaires gastro-intestinaux et améliorerait ainsi la qualité de vie des patients28. Les effets secondaires d’ordre hématologique, moins fréquents qu’avec l’AZA, comprennent aussi la leucopénie, la thrombopénie et rarement la pancytopénie. Toutefois, le risque d’infections virales semble plus élevé avec le MMF qu’avec l’AZA29. Données probantes cliniques Le MMF a d’abord été utilisé en remplacement de l’AZA chez des patients en rejet. Dans ces essais, le médicament s’est révélé efficace comme traitement de sauvetage2. Une vaste étude dans laquelle les patients étaient sous CyA et stéroïdes en association avec le MMF ou l’AZA s’est traduite par une diminution du nombre de rejets et de la mortalité toutes causes, un an après la greffe. Une analyse à plus long terme confirme la persistance de ces résultats en plus d’évoquer la possibilité de diminution de la vasculopathie du greffon29,30. Le MMF ou l’EC-MPS s’utilise le plus souvent en association avec un ICN et les corticostéroïdes2. Pharmacocinétique et monitorage Le MMF et l’EC-MPS ont une excellente biodisponibilité, soit près de 100 %. Après l’absorption, ils sont hydrolysés en leur forme active, l’acide mycophénolique (AMP). Ce métabolite subit ensuite une glucuronidation pour former l’acide mycophénolique glucuronidé (AMPG), dépourvu d’activité pharmacologique. L’AMPG est excrété dans la bile et retourne dans l’intestin pour reformer de l’AMP. La demi-vie d’élimination de l’AMP est de 16 heures. La clairance de l’AMP est très dépendante de sa liaison protéique. Or, la présence d’insuffisance rénale et d’urémie dans la période de post-transplantation résulte en une diminution de la liaison de l’AMP aux protéines et en une augmentation de la clairance de l’AMP libre31. Cet élément justifie l’utilisation de doses de MMF ou d’EC-MPS plus importantes dans la période de post-transplantation. La recirculation entérohépatique de l’AMPG est inhibée par la CyA, ce qui entraîne une exposition systémique à l’AMP diminuée en présence de cette association. À l’arrêt de la CyA, une augmentation de l’ordre de 50 % des concentrations d’AMP avant la dose a été démontrée. L’utilisation du TAC avec le MMF entraîne à l’inverse une exposition à l’AMP qui croît avec le temps après la greffe. On a démontré qu’à des doses de MMF de 1 g deux fois par jour, l’exposition à l’immunosuppression est supérieure de façon significative lorsque le MMF est combiné au TAC versus à la CyA. Les concentrations moyennes d’AMP atteintes au creux le matin avec une dose de MMF de 1 g deux fois par jour avec le TAC sont les mêmes que celles atteintes avec une dose de MMF de 1,5 g deux fois par jour avec la CyA32. Les doses recommandées dans la prévention du rejet en transplantation cardiaque sont de 1,5 g deux fois par jour en association avec la CyA et de 1 g deux fois par jour avec le TAC31,32. L’utilité d’effectuer une surveillance thérapeutique du MMF n’est pas clairement démontrée31. L’AMP n’a pas une concentration-dose linéaire durant les premiers mois après la greffe. La pharmacocinétique variable de l’AMP dans le temps, la recirculation entéro-hépatique et l’ICN utilisé en association rendent difficile l’interprétation du paramètre mesuré32. On n’a pas déterminé clairement quelle méthode de surveillance reflétait avec précision l’immunosuppression. La concentration sanguine avant la dose du matin ne reflète pas l’exposition à l’immunosuppression telle qu’obtenue par l’aire sous la courbe32. Or, en pratique, la surveillance de l’AMP n’est pas faite de routine, mais elle peut être utile chez certains patients à haut risque de rejet, comme ceux qui reçoivent des doses réduites ou aucun ICN, ceux hautement sensibilisés, les Afro-Américains ou ceux n’ayant pas reçu d’induction de l’immunosuppression. Les concentrations sanguines visées du métabolite actif de l’AMP sont de 1,6-4,2 ng/mL32. L’équivalence MMF-EC-MPS est la suivante : MMF 500 mg/comprimé = EC-MPS 360 mg/comprimé. Comme il s’agit d’un médicament tératogène et mutagénique, les comprimés ne devraient pas être coupés ni manipulés avec les mains. Ils devraient demeurer dans leur emballage original jusqu’au moment de la prise. septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 43 LES pages bleues Les immunosuppresseurs sont des médicaments pharmacologiquement complexes. Ils possèdent un index thérapeutique étroit entre le rejet et la toxicité, justifiant un monitorage étroit de leurs concentrations sanguines et/ou des effets secondaires qu’ils peuvent engendrer. Les interactions médicamenteuses L’absorption de MMF peut être significativement diminuée par les antiacides ou le fer en raison de la formation d’un complexe par chélation. L’exposition à l’immunosuppression mesurée par l’aire sous la courbe a été diminuée jusqu’à près de 90 % lorsque le MMF a été administré au même moment que le fer33. Il va sans dire que les conséquences d’une telle interaction peuvent être catastrophiques et qu’il importe de bien enseigner au patient l’importance d’espacer de deux à quatre heures la prise de fer ou d’antiacides à base de cations. Par ailleurs, la dose de MMF (ou EC-MPS) doit être modulée en fonction des autres antirejets associés, notamment les ICN. Une interaction significative existe entre l’allopurinol et l’AZA. L’allopurinol augmente significativement la biodisponibilité du métabolite actif de l’AZA. Des cas d’anémie, de leucopénie et de thrombopénie ont été rapportés. Lorsqu’une telle association est inévitable, il faut diminuer de 75 % les doses des deux médicaments17. Les inhibiteurs du signal de la prolifération (ISP) L’histoire des ISP aussi appelés « inhibiteurs de la mTOR » (mammalian Target of Rapamycin) date des années 1970, époque à laquelle la rapamycine a été isolée de Streptomyces hygroscopius, un champignon retrouvé dans le sol de l’île de Pâques. Les ISP sont le sirolimus (SRL), aussi connu sous le nom de rapamycine (RapamuneMD), et son dérivé, l’évérolimus (ÉVÉ) (CerticanMD). Leur effet antiprolifératif n’est pas restreint aux lymphocytes et s’applique aussi aux cellules néoplasiques. Cela confère à cette classe de médicaments un effet potentiellement protecteur contre certaines formes de cancer, considérant que le cancer compte pour 23 % des décès chez les greffés cinq ans après la transplantation cardiaque. Cette classe d’antirejets offre de plus une nouvelle option thérapeutique pour la prévention de la vasculopathie du greffon. Il s’agit sans doute d’antirejets prometteurs34-36. Effets secondaires Les ISP étant de puissants immunosuppresseurs, l’infection devient ainsi un des effets 44 secondaires attendus. Quelques études ont montré une augmentation des infections bactériennes chez les patients recevant un ISP, comparativement à l’AZA37,38. En contrepartie, l’incidence d’infection à cytomégalovirus est plus faible chez les sujets traités par un ISP versus le MMF ou l’AZA36-38. La toxicité pulmonaire, qui se manifeste sous la forme de pneumonie interstitielle, a été observée avec l’utilisation du SRL. Il semble que cet effet soit inexistant avec l’utilisation de l’ÉVÉ. En effet, la résolution des symptômes pulmonaires a été rapportée une fois le SRL remplacé par l’ÉVÉ39. Les ISP, de par leur effet antiprolifératif, entraînent des complications au niveau des plaies. Celles-ci se présentent sous la forme de déhiscence de la plaie sternale, d’infections de la plaie sternale ou de lymphocèle. La différence entre le SRl et l’ÉVÉ quant aux complications de plaies est inconnue. Bien que des études observationnelles tendent à favoriser l’ÉVÉ à cet égard, les différences dans l’utilisation du SRL et de l’ÉVÉ dans les protocoles de chaque étude peuvent expliquer ces résultats. De plus, ils n’ont jamais été étudiés l’un contre l’autre. En effet, l’exposition au SRL a été immédiate après la greffe avec l’utilisation fréquente d’une dose de charge, tandis que l’introduction de l’ÉVÉ a été retardée jusqu’à 72 heures après la transplantation37-38. Par ailleurs, les différences peuvent aussi être relatives à la distribution tissulaire et aux concentrations sanguines de l’un ou l’autre des ISP. Afin de minimiser ces effets, il est recommandé d’éviter leur utilisation durant le processus de guérison des plaies. Pour les patients déjà placés sous cette thérapie et qui requièrent une chirurgie, on recommande de cesser les ISP au moins une semaine avant l’intervention et de les réinstaurer 14 à 21 jours après la chirurgie35. Les ISP n’ont pas de néphrotoxicité inhérente à leur utilisation, mais ils peuvent potentialiser celle qu’induisent les ICN14,35,36. Par ailleurs, on a observé une prévalence accrue de protéinurie, un prédicteur d’insuffisance rénale chronique, chez les utilisateurs d’ISP40. L’utilisation d’un médicament de la classe des inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 d’un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 comme agent néphroprotecteur est à considérer. Données probantes cliniques En transplantation cardiaque, l’ÉVÉ a fait l’objet d’un plus grand nombre d’études que le SRL. L’ÉVÉ a été comparé à l’AZA chez des patients greffés de novo qui recevaient aussi la CyA et des corticostéroïdes. À 12 mois, l’incidence de rejet et de vasculopathie du greffon était significativement moindre qu’avec l’AZA38. Une plus petite étude menée avec le SRL a permis d’obtenir des résultats sem­ blables37. L’utilisation des ISP s’est révélée intéressante dans la perspective où une diminution des doses d’ICN était possible, minimisant ainsi la néphrotoxicité relative. Il faut se rappeler que l’insuffisance rénale chronique survient chez près de 7 % des greffés cardiaques cinq ans après la greffe41. La faisabilité d’une diminution de doses d’ICN avec l’utilisation des ISP a été démontrée chez des greffés cardiaques présentant une insuffisance rénale plus de six mois après la greffe. Les résultats ont été concluants quant à l’efficacité antirejet et à l’amélioration de la fonction rénale35. Par ailleurs, le sevrage précoce des ICN après la greffe avec la conversion au SRL a été tenté chez un petit nombre de greffés présentant une insuffisance rénale. Les résultats ont été décevants puisqu’une augmentation du nombre de rejets a été observée, justifiant l’arrêt de l’étude42. Ces données suggèrent que l’utilisation des ICN est essentielle au maintien d’une immunosuppression adéquate durant la première année après la transplantation35. À ce jour, aucun de ces agents n’a démontré une diminution de la mortalité, si bien que leur utilisation en greffe cardiaque demeure controversée. D’autres études sont nécessaires pour confirmer si les bénéfices de cette classe de médicaments en matière de vasculopathie du greffon, de rejet aigu, d’insuffisance rénale et d’infections à cytomégalovirus surpassent les effets secondaires, notamment sur les infections de plaies. Le partage d’expériences clini- Les antirejets en transplantation cardiaque : l’évolution des poisons ques permettra de préciser l’utilisation optimale des ISP en termes de sélection de patients et de dosages cibles des ICN utilisés en association35. Pharmacocinétique et monitorage Les ISP ont une biodisponibilité orale de 15 %. La constance quant à leur prise avec ou sans aliments demeure une recommandation pertinente puisque des variabilités ont été notées dans la biodisponibilité du médicament en fonction de la prise avec ou sans aliments42. Les ISP présentent une pharmacocinétique qui ressemble à celle des ICN, notamment en ce qui concerne leur distribution et leur métabolisme. Ils sont tous deux métabolisés par le CYP4503A4 et sont des substrats de la p-glycoprotéine. Ils ont une très longue demi-vie d’élimination, soit près de 60 heures pour le SRL et approximativement 43 heures pour l’ÉVÉ. Une grande variabilité intra et interindividuelle en matière de paramètres pharmacocinétiques des ISP existe, ce qui justifie le monitorage thérapeutique de ces médicaments. Le SRL se prend une fois par jour, alors que l’ÉVÉ nécessite une prise biquotidienne malgré sa longue demi-vie d’élimination. Le monitorage des concentrations sanguines avant la dose d’ISP est recommandé puisque ce paramètre reflète judicieusement l’exposition à l’immunosuppression43. Une bonne corrélation existe entre le rejet et les concentrations de SRL avant la dose. Les taux sériques visés en greffe cardiaque ne sont pas clairement élucidés et des études cliniques sont en cours pour tenter de répondre à cette question. Il paraît sécuritaire et efficace de viser des taux sériques de SRL d’entre 4 et 12 mcg/L lorsque combiné avec la CyA. Dans un régime sans CyA (ni TAC), des taux sériques de 8-20 mcg/L sont recommandés43. Pour l’ÉVÉ, les cibles visées ne font pas pour autant l’objet de recommandations claires, mais suffisamment d’études ont été menées pour définir les écarts optimaux. Basés sur les analyses exposition-efficacité et expositionsécurité, des taux sériques avant la dose de 3-8 ng/mL assurent une immunosuppression adéquate35. Tout comme pour le SRL, ces recommandations sont valables dans un régime où l’ÉVÉ est combiné à la CyA et où les taux sériques visés pour cette dernière sont de 50 % des taux visés sans un ISP. En absence d’ICN, les taux d’ÉVÉ visés ne sont pas élucidés, mais il est sans doute approprié de viser des taux plus élevés pour maintenir une immunosuppression efficace. Compte tenu de la longue demivie des ISP, il faut attendre l’équilibre (cinq fois la demi-vie d’élimination), soit jusqu’à deux semaines avant de faire un dosage en début de traitement et lors de tout changement de doses de l’ISP ou de l’ICN associé, particulièrement s’il s’agit de la CyA35,43. Les interactions médicamenteuses Comme les ISP sont des substrats du Cyp4503A4 et de la p-gp, des interactions similaires à celles documentées avec les ICN sont attendues, bien que la documentation ne déborde pas d’information sur le sujet. Quelques interactions ont été documentées entre autres avec le diltiazem et le SRL. La monographie du SRL recommande de ne pas administrer le médicament avec le kétoconazole et le voriconazole44. La CyA, par son effet inhibiteur du 3A4, augmente significativement les niveaux plasmatiques du SRL et de l’ÉVÉ. À l’inverse, les ISP n’ont pas d’effets sur les concentrations de CyA. À cet égard, une étude menée chez les greffés rénaux recevant SRL et CyA depuis plus de trois mois a montré une différence significative des taux sériques selon que le SRL était administré en même temps ou à quatre heures d’intervalle de la CyA, soit 13,1 ± 7,1 versus 8,9± 4,4 ng/mL (p<0,001) respectivement 44. Selon la monographie du produit, il est recommandé d’espacer de quatre heures l’administration des deux médicaments 45. En clinique, la prise concomitante est possible Tableau III Taux sériques (ng/mL) des ISP en association avec les ICN2,35,43 Sirolimus Évérolimus Avec ICNSans ICN 4-12 8-20 3-8 4-8 ICN : inhibiteurs de la calcineurine ISP : inhibiteur du signal de la prolifération dans la mesure où le patient conserve cette prise et où l’ajustement thérapeutique du SRL se fait en présence de cette association. Peu de données sont disponibles sur l’interaction pharmacocinétique des ISP combinés au TAC, mais on se doit tout de même d’être prudent et de traiter l’association d’un ISP avec le TAC comme celle avec la CyA. Conclusion L’immunosuppression après une transplantation cardiaque constitue un défi de taille pour les cliniciens. Les immunosuppresseurs sont des médicaments pharmacologiquement complexes. Ils possèdent un index thérapeutique étroit entre le rejet et la toxicité, justifiant un monitorage étroit de leurs concentrations sanguines et/ou des effets secondaires qu’ils peuvent engendrer. La combinaison qui semble offrir la meilleure efficacité (prévention du rejet) tout en minimisant les effets secondaires est l’association TAC plus MMF2,3. Malgré cette donnée probante, l’immunosuppression individualisée a remplacé les protocoles généralisés. Cette approche personnalisée offre à chaque individu une immunosuppression qui tient compte des comorbidités et des effets secondaires éprouvés avec l’un ou l’autre des immunosuppresseurs utilisés et, évidemment, de leur efficacité dans la prévention du rejet. n Références 1. Taylor D, Edwards L, Aurora P et coll. Registry of the International Society for Heart and Lung Transplantation : Twenty-fifth Official Adult Heart Transplant Report 2008. J Heart Lung Transplant 2008; 27: 943-56. 2. 2001 Canadian Cardiovascular Society Consensus Conference on Cardiac Transplantation. Can J Cardiol 2003; 19: 620-54. 3. Canadian Cardiovascular Society Consensus Conference update on cardiac transplantation 2008 : Executive Summary. Can J Cardiol 2009; 25(4): 197-205. 4. Lindenfeld J, Miller G, Shaker S et coll. Drug therapy in the Heart Transplant Recipient Part I : Cardiac Rejection and Immunosuppressive Drugs. Circulation 2004; 110: 3734-40. 5. Lemahieu W, Maes B, Verbeke K et coll. CYP3A4 and P-Glypoprotein Activity in Healthy Controls www.monportailpharmacie.ca 6. 7. 8. 9. and Transplant Patients on cyclosporin vs. Tacrolimus vs. Sirolimus. American Journal of Transplantation 2004; 4: 1514-22. Kobashigawa JA, Miller LW, Russel SD. Tacrolimus with mycophenolate mofetil (MMF) or sirolimus vs cyclosporine with MMF in cardiac transplant patients : 1 year report. Am J Transplant 2006; 6: 1377-86. Grimm M, Rinaldi M, Yonan NA et coll. Superior prevention of acute rejection by tacolimus vs cyclosporine in heart transplantation recipients : A large European trial. Am J Transplant 2006: 6: 1387-97. Lindenfeld J, Page R, Zolty R et coll. Drug therapy in the Heart Transplant Recipient Part III : Common Medical Problems. Circulation 2005; 111: 113-7. Lindenfeld J, Miller G, Shakar S, Zolty R et coll. Drug therapy in the heart Transplant recipient. Part II : Immunosuppressive Drugs. Circulation 2004; 110: 3858-65. 10. Montori VM, Basu A, Erwin PJ et coll. Posttransplantation diabetes : A systematic review of the literature. Diabetes Care 2002; 25: 583-92. 11. Patel J, Kobashigawa J. Tacrolimus in Heart Transplant Recipients. An overview. Biodrugs 2007; 21 (3): 139-43. 12. Staaz C, Tett S. Clinical Pharmacokinetics and Pharmacodynamics of Tacrolimus in Solid Organ Transplantation. Clin Pharmacokinetic 2004: 43 (10); 624-53. 13. Cantarovich M, Ross H, Arizon J et coll. Benefit of Neoral C2 Monitoring in de Novo Cardiac Transplant Recipients Receiving Basiliximab Induction. Transplantation 2008; 85: 992-9. 14. Lefebvre A, Châteauvert N, Simard C. Changements posologiques engendrés par le monito- septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 45 LES pages bleues rage de la cyclosporine 2 heures après la prise chez les patients greffés cardiaques. Pharmactuel 2007; 40 (3): 132-7. 15. Knight S. Morris P. The clinical benefits of cyclosporine C2-level monitoring : A systematic review. Transplantation 2007; 83: 1525-35. 16. Eisen H. Long term cardiovascular risk in transplantation : Insights from the use of everolimus in heart transplantation. Nephrol Dial Transplant 2006; 21: 9-13. 17. Page R, miller G, Lindenfeld J. Drug Therapy in the Heart Transplant Recipient. Part IV : DrugDrug Interactions. Circulation 2005; 111: 230-9. 18. Astra Zeneca Canada inc. Monographie Crestormd . Décembre 2008. 19. Shaw S, Chaggar P, Ritchie J et coll. The Efficacy and Tolerability of Ezetimibe in Cardiac Transplant Recipients Taking Cyclosporin. Transplantation 2009; 87: 771-5. 20. Saad A, DePestel D, Carver P. Factors influencing the magnitude and clinical significance or drug interactions between azole antifungals and select immunosuppressants. Pharmacotherapy 2006; 26 : 1730-44. 21. Martin J, Schroeder T, First M. The clinical and economic potential of cyclosporine drug interactions. Pharmacoeconomics 1999; 15: 317-37. 22. Jones T. The use of other drugs to allow a lower dosage of cyclosporin to be used. Therapeutic and pharmacoeconomic considerations. Clinical Pharmacokinetic 1997; 32: 357-67. 23. Simkin P, Gardner G. Colchicine use in cyclosporine treated transplant recipients : how little is too much ? J Rheumatol 2000; 27: 1334-7. 24. Cyclosporine in : DRUGDEX® System. n.d. Thomson Reuters (Healthcare) Inc. Page consultée le 15 mai 2009. Adresse URL: http://www.thomsonhc.com 25. Lindenfeld J, Page R, Zolty R et coll. Drug therapy in the Heart Transplant Recipient. Part III : Common Medical Problems. Circulation 2005; 111: 113-7. 26. S. U. Mertens-Talcott, I. Zadezensky, W. V. De Castro, H. et coll. Grapefruit-Drug Interactions : Can Interactions With Drugs Be Avoided ? Journal of Clinical Pharmacology, 2006; 46: 1390-416. 27. Lehmkuhl H, Hummel M, Kobashigawa J et coll. Enteric-coated mycophenolate-sodium in heart transplantation : efficacy, safety, and pharmacokinetic compared with mycophenolate mofetil. Transplant Proc. 2008; 40(4): 953-5. 28. Darji P, Vijayaraghavan R, Thiagarajan CM, Sharma RK. Conversion from mycophenolate mofetil to enteric-coated mycophenolate sodium in renal transplant recipients with gastrointestinal tract disorders. Transplant Proc. 2008; 40(7): 2262-7. 29. Kobashigawa J, Miller L, Renlund D et coll. A randomized active-controlled trial of mycophenolate mofetil in heart transplant recipients. Transplantation 1998; 66: 507-15. 30. Eisen HJ, Kobashigawa J, Keogh A et coll. Mycophenolate Mofetil Cardiac Study Investigators. Three-year allograft vasculopathy results of the multicenter heart transplant randomized trial. J Heart Lung Transplant. 2005; 24: 517-25. 31. Van Gelder T, Klupp J, Barten MJ et coll. Comparison of the effects of tacrolimus and cyclosporine on the pharmacokinetics of mycophenolic acid. Ther Drug Monit 2001; 23: 119-28. 32. West-Thielke P., Kaplan B. Therapeutic Monitoring of Mycophenolate Acid : Is There Clinical Utility ? American Journal of Transplantation 2007; 7 (11): 2441-2. 33. Morii M, Ueno K, Ogawa A et coll. Impairement of mycophenolate mofetil absorption by iron ion. Clin Pharmacol Ther 2000; 68: 613-6. 34. Raichlin E, Kushwaha S. Proliferation signal inhibitors and cardiac allograft vasculopathy. Curr Opin Organ Transplant 2008; 13: 543-50. 35. Zuckermann A, Manito N, Epailly E et coll. Multidisciplinary Insights on Clinical Guidance for the Use of Proliferation Signal Inhibitors in Heart Transplantation. J Heart Lung Transplant 2008; 27: 141-9. 36. Gustafsson F, Ross HJ. Proliferation signal inhibitors in cardiac transplantation. Current opinion in Cardiology 2007; 22: 111-6. 37. Keogh A, Richardson M, Ruygrok P et coll. Sirolimus in de novo heart transplant recipients reduces acute rejection and prevents coronary artery disease at 2 years : A randomized clinical trial. Circulation 2004; 110: 2694-2700. 38. Eisen H, Tuzcu EM, Dorent R et coll. Everolimus for the prevention of allograft rejection and vasculopathy in cardiac-transplant recipients. N engl J Med 2003; 349: 847-58. 39. Rehm B, Keller F, Mayer J et coll. Resolution of sirolimus-induced pneumonitis after conversion to everolimus. Transplant Proc 2006; 38: 711-3. 40. Aliabadi AZ, Zammerstätter DP, Seebacher G et coll. Development of proteinuria after switch to sirolimus based immunosuppression in long term cardiac transplant patients. Transplantation 2006; 82: 562. 41. Akinlolu O, Philip J, Friedrich K et coll. Chronic Renal Failure after Transplantatopn of Nonrenal Organ. N Engl Med 2003; 349: 931-40. 42. Rapammune (sirolimus) summary of products characteristics. Philadelphia Wyeth Pharmaceuticals; 2007. 43. Stenton S, Partovi N, Ensom M. Sirolimus. The evidence for Clinical Pharmacokinetic Monitoring. Clin Pharmacokinetic 2005; 44: 769-86. 44. Kaplan B, Meier-Kriesche H, Napoli K et coll. The effects of relative timing of sirolimus and cyclosporine microemulsion formulation coadministration on the pharmacokinetics of each agent. Clin Pharmacol Ther 1998; 63: 48-53. 45. Wyeth Canada. Monographie Rapamunnemd. Montréal, Canada. Octobre 2008. Questions de formation continue 10) Parmi les énoncés suivants sur le rejet, lequel est faux ? A. L’arrivée de la cyclosporine a significativement amélioré la survie des patients greffés. B. Le rejet est toujours symptomatique. C. Le rejet survient chez 30 % des patients durant la première année après la greffe. D. Le rejet humoral est appelé aussi « rejet vasculaire ». E. Le traitement du rejet implique entre autres une majoration de l’immunosuppression. 11) Parmi les énoncés suivants, lequel décrit l’immunosuppression primaire d’un greffé cardiaque ? A. Un inhibiteur de la calcineurine, les corticostéroïdes et un antimétabolite purique B. Un inhibiteur de la calcineurine et un antimétabolite purique C. Un inhibiteur de la calcineurine, les corticostéroïdes et un inhibiteur du signal de la prolifération D. Deux inhibiteurs de la calcineurine et un antimétabolite purique E. Un antimétabolite purique, un inhibiteur du signal de la prolifération et les corticostéroïdes 12) Parmi les immunosuppresseurs suivants, lequel n’est pas métabolisé par les enzymes du cyp4503A4 ? A. La cyclosporine A B. Le mycophénolate sodique C. Le tacrolimus D. Le sirolimus E. L’évérolimus 13) Parmi les énoncés suivants, lequel est un effet secondaire propre à la cyclosporine A ? A. Hypertension B. Néphrotoxicité C. Hypertrichose D. Hypomagnésémie E. Dyslipidémie 14) Parmi les antirejets suivants, lequel ne doit pas être administré au même moment que le fer ? A. Le sirolimus B. Le tacrolimus C. Le mofétilmycophénolate D. La cyclosporine E. L’azathioprine Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 90 46 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Tableau IV Interactions médicamenteuses significatives avec les antirejets3,17,18 Antirejets + médicamentEffet/mécanisme Gestion de l’interaction ICN CyA Diltiazem, Vérapamil exposition des ICN par inhibition dose des ICN de 25-50 % TAC de leur métabolismeSurveiller Cs 5-7 jours après l’introduction CyAAtorvastatine, TACSimvastatine exposition à la statine Utiliser la plus petite dose de statine Lovastatine risque myopathie/rhabdomyoliseConsidérer la prise de pravastatine Inhibition du Cyp4503A4 et p-gp par les ICN ou de fluvastatine CyARosuvastatine exposition à la rosuvastatine de 7 fois Éviter cette association Données limitées CyABosentan concentrations sanguines avant la dose Éviter cette association de bosentan de 30 fois concentrations de la CyA avant la dose de 50 % CyA Fluconazole >200 mg exposition des ICN par inhibition dose des ICN de 30-50 % TACItraconazole de leur métabolismeSurveiller Cs des ICN 3 jours après l’introduction Kétoconazole et 1 fois par semaine pendant le traitement Voriconazole CyAMillepertuis exposition des ICN par induction Éviter cette association TAC de leur métabolisme Risque accru de rejet CyAPhénytoïne exposition des ICN par induction dose d’ICN de 25-50 % lors de l’introduction TAC de leur métabolisme de la phénytoïne Risque accru de rejetSurveiller Cs des ICN 2 fois par semaine X 2-3 semaines Risque accru d’hyperplasie gingivale avec la CyAConsidérer solutions de rechange : ac. valproïque, des Cs de phénytoïne gabapentin, lamotrigine, vigabatrin Début de l’effet retardéSurveiller Cs des ICN et phénytoïne lors de l’arrêt de l’anticonvulsivant chaque semaine X 4 mois. CyACarbamazépine exposition des ICN par inductionSurveiller Cs des ICN 2 fois par semaine X 2 semaines TACOxcarbazépine de leur métabolismeConsidérer solutions de rechange : ac. valproïque, Risque accru de rejet gabapentin, lamotrigine, vigabatrin CyAAmiodarone exposition aux ICN par inhibitionSurveiller Cs des ICN 2 fois par semaine lors TAC de leur métabolisme de l’introduction de l’amiodarone puis 1 fois/semaine X 1 mois. Suivi étroit Cs 1 fois / semaine des ICN lors de l’arrêt de l’amiodarone ICN CyA Érythromycine exposition aux ICN par inhibition dose des ICN de 25 % TACClarythromycine de leur métabolisme Surveiller Cs des ICN 3 jours après l’introduction hépatotoxicité et 1 fois par semaine pendant le traitement CyARifampicine exposition des ICN par inductionMonitorer Cs des ICN 2 fois par semaine TAC de leur métabolisme X 2 semaines puis Q1-2 semaines jusqu’à 1 mois Risque accru de rejet après l’arrêt de la rifampicine. ISP Sirolimus Diltiazem exposition du sirolimus par inhibitionSurveiller Cs du sirolimus, 1 à 2 fois par semaine Vérapamil métabolique et de la p-gp pour les 2 premières semaines Sirolimus Fluconazole exposition des ISP par inhibition métabolique ÉvérolimusItraconazole Sirolimus Kétoconazole exposition des ISP par inhibition métabolique Éviter ces associations ÉvérolimusVoriconazole SirolimusCyclosporine exposition du sirolimus par inhibitionSurveiller tout changement au moment de la prise métabolique de l’un ou l’autre des médicaments associés. Recommander de prendre les 2 médicaments toujours au même moment. Débuter le sirolimus à petite dose en présence de CyA. Anti-métabolites puriques MMF/EC-MPSCholestyramine exposition du métabolite actif du MMF Éviter l’association par de l’absorptionSi aucune solution de rechange, prendre MMF 2 heures avant ou 4 heures après MMF/EC-MPS Fer, antiacides exposition du métabolite actif Espacer la prise de 2 à 4 heures par absorption (chélation) AZA allopurinol biodisponibilité et accumulation du métabolite dose AZA et d’allopurinol de 75 % actif de l’AZA (6-mercaptopurine) Surveiller éléments sanguins (hémoglobine, plaquettes, leucocytes) Pharmacovigilance Intoxication par l’acide valproïque secondaire à une hypo-albuminémie Les réactions médicamenteuses constituent la cause principale des maladies iatrogéniques. Les intoxications médicamenteuses peuvent survenir dans diverses situations, aiguës ou chroniques, intentionnelles ou non intentionnelles. Les intoxications médicamenteuses survenant dans un contexte d’hypo-albuminémie sont méconnues. Voici le cas d’un homme ayant présenté une intoxication par l’acide valproïque à la suite d’une hypo-albuminémie. Présentation du cas Au jour 1, S.M., un homme de race blanche de 56 ans, est admis à l’urgence de l’hôpital dans un contexte de chutes avec perte de conscience. À l’examen, le patient est éveillé, confus, désorienté et présente un ralentissement psychomoteur ainsi qu’une douleur dorsale légère. Ses antécédents médicaux et chirurgicaux sont les suivants : diabète de type 2 (depuis 10 ans environ), dyslipidémie, trouble de l’équilibre (chutes), hyperkaliémie plus ou moins chronique, dépendance à l’alcool, malnutrition, lithiase vésiculaire et opération, en 1998, pour le drainage d’un hématome sous-dural secondaire à une chute. La médication usuelle de S.M. se retrouve au tableau I. À l’admission, la médication usuelle est prescrite à nouveau, à l’exception de la metformine et du polystyrène sulfonate sodique puisque le patient présente une légère insuffisance rénale aiguë secondaire à une déshydratation (créatinine à 143 µmol/L, clairance estimée à 50 mL/min) et une normokaliémie (potassium à 4,9 mmol/L). Les premières investigations (radiologiques, biochimiques) démontrent des fractures lombaires (L1 et L3), des désordres électrolytiques et vitaminiques, une anémie inflammatoire, une légère hypo-albuminémie sans doute secondaire à une malnutrition (tableau II), un dosage d’acide valproïque total un peu bas (tableau II), une stéatose hépatique et une dégénérescence cérébelleuse probablement secondaire à l’alcool. Sur le plan clinique, le patient présente une polyneuro­ pathie d’origine multiple (diabétique, alcoolique, déficience légère en vitamine B12 [112 µmol/L]). Le diagnostic de syndrome de Wernicke est rapidement évoqué. Ainsi, tel que suggéré par les recommandations de la prise en charge d’un patient avec un syndrome de Wernicke, on amorce1 un traitement à hautes doses de thiamine (500 mg intraveineux [ I.V. ] 4 fois par jour) et la correction des désordres électrolytiques et vitaminiques. Pour les fractures lombaires, on administre une dose de pamiwww.monportailpharmacie.ca dronate 30 mg I.V. et on entame le traitement par l’association habituelle de carbonate de calcium (500 mg 2 fois par jour) et de vitamine D3 (400 UI 2 fois par jour). Après une amélioration au cours des deux premières semaines de traitement du syndrome de Wernicke, l’état du patient se détériore soudainement : au jour 15, on constate un retour de la confusion, de la désorientation et de l’ataxie. De plus, une Texte rédigé par Maxime Doré, B.Sc., B. Pharm., M.Sc., Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. Texte original soumis le 5 octobre 2008. Texte final remis le 20 novembre 2008. Révision : Christine Hamel, B. Pharm., M.Sc., Hôpital Royal-Victoria, Montréal. Tableau I Médication usuelle de S.M. Médicament Acide acétylsalicylique 80 mg po die Lansoprazole 30 mg po die Metformine 500 mg po tid Polystyrène sulfonate sodique 15 g po tid Divalproex sodique 500 mg po bid Durée Depuis quelques années Depuis 5 mois environ Depuis 1 an et demi environ Tableau II Valeurs de laboratoire (dosage d’acide valproïque et albuminémie) Acide valproïque totalAcide valproïque libreAlbuminémie (350 à 700 µmol/L) (28 à 104 µmol/L) (35 à 50 g/L) Jour #1 261 28 Jour #16 1er prélèvement 277 21 2e prélèvement 240 122,2 Jour #20 56 Jour #53 34 Tableau III Exemples de médicaments à faible et forte extractions hépatiques10 Faible extraction hépatique Forte extraction hépatique Acide valproïqueAmitriptyline CarbamazépineLidocaïne DiazépamMépéridine IbuprofèneMorphine PhénytoïnePropranolol TolbutamideVérapamil Wafarine septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 47 Pharmacovigilance Figure I Changements en fonction du temps des paramètres pharmacocinétiques d’un médicament à faible extraction hépatique lors d’une augmentation de la fraction libre10 Fraction libre Clairance intrinsèque Clairance totale Concentration totale Concentration libre Temps dysarthrie ainsi qu’un léger astérixis sont apparus. Dès lors, on demande un dosage d’acide valproïque (EpivalMD) total et on cesse l’Epival d’emblée puisque l’indication chez ce patient demeure nébuleuse (l’Epival aurait été administré dans un contexte de convulsions secondaires à l’alcool). À ce moment, le dosage d’acide valproïque total s’avère normal, voire faible (tableau II). Après discussion avec l’équipe de médecine interne, il est convenu de refaire un prélèvement, mais, cette fois, pour le dosage de l’acide valproïque libre puisque le patient présente une hypo-albuminémie plus importante qu’à l’admission (tableau II) et que l’acide valproïque est connu pour être fortement lié aux protéines plasmatiques (90 %)2-4. Il est à noter que le niveau d’ammoniac (NH3) est à 15 µmol/L à ce moment, soit dans les limites de la normale (10 à 47 µmol/L), laissant croire qu’une intoxication par l’acide valproïque est peu probable. Toutefois, les résultats du deuxième prélèvement confirment l’hypothèse d’une intoxication par l’acide valproïque puisque le dosage d’acide valproïque total est de 240 µmol/L (intervalle thérapeutique : 350 à 700 µmol/L), alors que le dosage d’acide valproïque libre est de 122,2 µmol/L (intervalle thérapeutique : 28 à 104 µmol/L). Le ratio libre/total est donc de 0,51; ainsi, 51 % de l’acide valproïque est sous forme libre, alors que la normale se situe entre 5 % et 15 %. Une fois corrigé pour l’albuminémie, le dosage d’acide valproïque total varie entre 48 815 et 1883 µmol/L selon la méthode utilisée pour faire le calcul5, ce qui dépasse l’intervalle thérapeutique (tableau II). Ce niveau toxique d’acide valproïque peut donc expliquer la détérioration du patient. Au jour 20, soit cinq jours suivant l’arrêt de l’Epival, une amélioration au niveau de la dysarthrie et de l’astérixis est notable et le dosage d’acide valproïque total est désormais de 56 µmol/L. Au jour 25, soit 10 jours suivant l’arrêt de l’Epival, le patient n’est plus dysarthrique, ne souffre plus d’astérixis, est nettement moins confus et il est orienté. Une excellente évolution sur le plan cognitif est aussi observable. Au jour 58, le patient reçoit son congé de l’hôpital. Discussion Les réactions médicamenteuses sont considérées comme la principale cause des maladies iatrogéniques6. Elles peuvent être classées selon leur étiologie en réaction im­muno­ logique ou en réaction non immunologique7. Les réactions non immunologiques sont les plus fréquentes (75 % à 80 %) et sont relativement prévisibles, contrairement aux réactions immunologiques7. Comme elles sont prévisibles, il est donc possible de les prévenir par un suivi adéquat8. Pour certains médicaments, un suivi implique un dosage sanguin, plasmatique ou sérique. Toutefois, il n’est pas nécessaire d’effectuer un monitorage des concentrations sanguines pour tous les médicaments9. Les dosages sont généralement réservés aux médicaments Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 ayant un intervalle thérapeutique étroit ou un potentiel de toxicité important avec une concentration légèrement au-dessus de l’intervalle thérapeutique9. Les intoxications médicamenteuses peuvent survenir dans diverses situations, aiguës ou chroniques, intentionnelles ou non intentionnelles : tentative de suicide, insuffisance rénale ou hépatique, hypo-albuminémie, interactions médicamenteuses. La plupart des médicaments se lient aux protéines plasmatiques, essentiellement à l’albumine10. L’α1-glycoprotéine acide et les lipoprotéines sont les autres protéines de transport des médicaments en importance après l’albumine10. La liaison des médicaments aux protéines plasmatiques peut être affectée par différentes conditions physiologiques ou pathologiques : l’âge avancé, la grossesse, le sexe, le tabagisme, l’obésité, les problèmes médicaux graves, les maladies rénales ou hépatiques, l’hyperthyroïdisme, le cancer, les brûlures extensives et lors d’interactions médicamenteuses10. L’Epival est un médicament utilisé comme anticonvulsivant et stabilisateur de l’humeur. Bien que son mécanisme d’action ne soit pas complètement élucidé, on suppose qu’il augmenterait la concentration d’acide γ-aminobutyrique (GABA) dans le cerveau, ce qui expliquerait son efficacité dans le traitement de l’épilepsie2,12. De plus, il diminuerait la neurotransmission (dopaminergiques et neurotransmetteurs excitateurs) et aurait un effet stabilisateur des membranes neuronales; toutefois, l’effet précis de ce médicament sur les membranes neuronales est inconnu2,12. Il est composé de divalproex sodique qui se dissocie dans le tube digestif en valproate (acide valproïque) pour être ensuite absorbé (biodisponibilité d’environ 100 %)2. Une fois absorbé, l’acide valproïque se lie fortement aux protéines plasmatiques (90 %), particulièrement à l’albumine, pour être ensuite distribué dans tout l’organisme2-4. L’acide valproïque est essentiellement métabolisé par le foie, principalement par glucuronoconjugaison (30 %-50 %) et β-oxydation (environ 40 %) et, dans une moindre mesure, par ω-oxidation2,11,13. De nombreux métabolites sont ainsi formés, certains actifs, d’autres toxiques2,11,13. La demi-vie de l’acide valproïque est d’environ 6 à 16 heures et l’élimination des métabolites est majoritairement rénale2,11,13. Comme on l’a mentionné précédemment, l’acide valproïque se lie fortement aux protéines plasmatiques, plus particulièrement à l’albumine. Il est toutefois important de mentionner que la liaison aux protéines plasmatiques de l’acide valproïque est satu- Intoxication par l’acide valproïque secondaire à une hypo-albuminémie rable; ainsi, la liaison aux protéines plasmatiques diminue à la suite d’une augmentation de la concentration totale d’acide valproïque (90 % à 280 µmol/L et 82 % à 875 µmol/L)2-4,9. De cette manière, la relation entre la dose d’Epival et la concentration totale d’acide valproïque n’est pas linéaire. Par contre, la pharmacocinétique de la fraction libre d’acide valproïque est linéaire2. En effet, comme l’acide valproïque est une molécule à faible extraction hépatique, la clairance totale de l’acide valproïque (Cltot) est dépendante de la fraction libre (flibre) et de la clairance intrinsèque (Clint) : Cltot ≈ flibre x Clint3,4,10. Ainsi, si la flibre d’acide valproïque augmente (interaction médicamenteuse ou hypo-albuminémie, par exemple), la Cltot d’acide valproïque augmente à son tour et la concentration totale d’acide valproïque à l’équilibre (Ctotéq) est diminuée puisque Ctotéq = F x (D / t) / Cltot , où F représente la biodisponibilité, D la dose et t l’intervalle posologique3,10. Toutefois, comme la Clint demeure généralement constante, la concentration libre à l’équilibre (Clibreéq) demeure elle aussi constante puisque Clibreéq = F x (D / t) / Clint ou, plus simplement, Clibreéq = flibre x Ctotéq3,10. Par conséquent, chez un patient avec hypo-albuminémie, malgré l’augmentation de la fraction libre, la concentration libre d’acide valproïque à l’équilibre demeure généralement inchangée, mais la concentration totale d’acide valproïque à l’équilibre diminue à cause d’une augmentation de son métabolisme3,10. Par contre, la concentration libre d’acide valproïque augmente de manière transitoire jusqu’à l’atteinte de l’état d’équilibre (figure 1). Il est à noter qu’une augmentation de la concentration libre se traduit non seulement par une meilleure efficacité de l’acide valproïque, mais aussi par une augmentation des effets indésirables puisque c’est la fraction libre du médicament qui s’avère pharmacologiquement active. Ainsi, pour un médicament à faible extraction hépatique (tableau III), lorsqu’une concentration totale s’avère basse en présence d’hypoalbuminémie, il importe de résister à l’envie d’augmenter la dose, car bien que la concentration totale soit basse, la concentration libre, elle, demeure élevée. L’incidence des intoxications par l’acide valproïque est en hausse aux États-Unis13. Heureusement, environ 50 % des patients ne présentent que des symptômes mineurs et la mortalité se situe autour de 2 %13. La majorité des patients intoxiqués par l’acide valproïque présentent un dysfonctionnement du système nerveux central (SNC) d’intensité variable selon les concentrations www.monportailpharmacie.ca sanguines d’acide valproïque : somnolence, léthargie, hallucinations, encéphalopathie avec ou sans hyperammoniémie, myoclonie, tremblement, convulsion, œdème cérébral et, plus rarement, de la dysarthrie, du nystagmus et de l’ataxie12-15. Les symptômes impliquant d’autres systèmes sont les suivants : nausée, vomissement, détresse respiratoire, bloc auriculo-ventriculaire, hépatotoxicité, troubles métaboliques (altération du cycle de l’urée et du métabolisme des acides gras), pancréatite, anémie, leucopénie, thrombocytopénie, troubles électrolytiques et insuffisance rénale12,13,16,17. Fait intéressant à noter, l’acide valproïque pourrait diminuer l’albuminémie. En effet, quelques rapports de cas ont démontré une diminution de l’albuminémie à la suite de l’introduction de l’acide valproïque18. Cette hypo-albuminémie serait transitoire lors de l’introduction de l’acide valproïque, mais elle pourrait tout de même avoir un impact significatif au début du traitement18. Par ailleurs, une augmentation des acides gras libres pourrait à son tour augmenter la fraction libre d’acide valproïque, car ceux-ci entrent en compétition avec l’acide valproïque au niveau des sites de liaison à l’albumine3-5. De plus, il est important de se rappeler que l’acide valproïque peut altérer le métabolisme des acides gras13. Il est à noter que les acides gras libres peuvent être augmentés chez les patients urémiques, les patients atteints d’une maladie hépatique, les patients hypertriglycéridémiques ou lors d’une infusion d’acides gras (alimentation parentérale)3. Enfin, une hyperbilirubinémie peut elle aussi engendrer un déplacement de l’acide valproïque des sites de liaison à l’albumine et ainsi favoriser une augmentation de la fraction libre5. Ainsi, les dosages des acides gras libres et de la bilirubine sont potentiellement deux autres paramètres à documenter dans le contexte d’une augmentation de la fraction libre d’acide valproïque sans autre cause apparente. Le cas présenté impliquait un médicament à faible extraction hépatique. Dans le cas d’un médicament à forte extraction hépatique (tableau III), lorsque la fraction libre augmente, il n’y a pas d’augmentation de la Cltot, car Cltot ≈ Q, où Q représente le débit sanguin hépatique10. De cette manière, la concentration totale à l’équilibre ne change pas, car Ctotéq = F x (D / t) / Cltot, alors que la concentration libre à l’équilibre du médicament augmente puisque Clibreéq = flibre x Ctotéq10. Par conséquent, en présence d’une hypo-albuminémie, l’augmentation de la concentration libre et de la réponse pharmacologique d’un médicament à forte extraction hépatique est plus importante, comparativement à un médicament à faible extraction hépatique10. Tel que mentionné précédemment, les réactions médicamenteuses non immunologiques sont prévisibles si l’on fait un suivi adéquat. Par contre, la fraction libre et la concentration libre des médicaments demeurent parfois difficilement prévisibles. Ainsi, Dasgupta A. suggère que pour plusieurs médicaments ayant une liaison aux protéines plasmatiques de plus de 80 %, un monitorage des concentrations libres serait plus adéquat que le monitorage habituel des concentrations totales, notamment pour les anticonvulsivants (phénytoïne, carbamazépine et acide valproïque)9. Du moins, le monitorage des concentrations libres serait particulièrement recommandé chez les patients urémiques (insuffisance rénale), les patients avec atteinte hépatique chronique, les patients avec hypo-albuminémie ou lorsqu’on suspecte une interaction médicamenteuse3,5,9,10,19. La mesure de la concentration libre d’acide valproïque n’est pas offerte par tous les laboratoires. Seul un nombre limité d’entre eux offre ce service. Pour cette raison, Hermida J. et Tutor C. ont publié un modèle de correction de la concentration totale d’acide valproïque (Ctotcorrigée) en fonction de l’albumine5. Selon leur modèle, pour une albumine à 21 g/L, la Ctotcorrigée est de 1067 µmol/L5. Ce modèle ne semble pas tout à fait précis et ne remplace pas le dosage de la concentration libre, mais il peut tout de même s’avérer utile si le dosage de la concentration libre n’est pas disponible dans un délai raisonnable. Imputabilité La chronologie des événements et la présentation des signes et symptômes ont rapidement orienté le diagnostic vers une intoxication par l’acide valproïque. La documentation médicale abondait aussi en ce sens, quoique certaines données aient été limitées. Les symptômes présentés par S.M. à l’admission (confusion, désorientation, ralentissement psychomoteur) avaient tout d’abord été attribués au syndrome de Wernicke. S.M. avait une légère hypo-albuminémie à l’admission donc, a posteriori, l’intoxication pouvait être légère à ce moment (tableau II). L’hypo-albuminémie s’est ac-­ cen­tuée au cours de l’hospitalisation, ce qui peut effectivement expliquer la détérioration de l’état du patient. Chez ce dernier, la faible concentration totale d’acide valproïque peut s’expliquer par l’augmentation de sa clairance à la suite de l’augmentation de sa fraction libre. Suite à la page 52 septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 49 Pharmacovigilance Toutefois, l’interprétation est difficile puisqu’aucun dosage avant l’épisode en question n’était disponible. Pour ce qui est de la concentration libre d’acide valproïque, on ne dispose que d’une seule valeur, il est donc impossible de la comparer; néanmoins, cette valeur de 122,2 µmol/L dépasse l’intervalle thérapeutique de 28 à 104 µmol/L, ce qui nous a permis d’objectiver l’intoxication. La concentration libre d’acide valproïque était élevée, probablement parce que l’équilibre n’était pas atteint, ou bien parce que la clairance intrinsèque avait peut-être diminué vu l’état du patient. L’impact des métabolites de l’acide valproïque était difficile à quantifier, mais ces derniers auraient pu effectivement contribuer aux symptômes. Les signes et symptômes de S.M. ont grandement diminué à la suite de l’arrêt de l’Epival. Ainsi, avec l’arrêt de l’Epival et la poursuite du traitement du syndrome de Wernicke, l’état du patient s’est nettement amélioré tant sur le plan cognitif que moteur : ces deux mesures sont probablement responsables de cette amélioration. Toutefois, cette dernière est vraiment survenue à la suite de l’arrêt de l’Epival, ce qui permet de croire à une forte implication du médicament. Par ailleurs, aucune autre cause de dysarthrie et d’astérixis n’a été identifiée. Ainsi, un résultat de 8 est obtenu lorsque l’échelle de probabilité d’effets indésirables médicamenteux de Naranjo est appliquée à la situation20, ce qui signifie qu’une intoxication par l’acide valproïque est probablement responsable de l’état de S.M. Il n’y a toutefois pas eu de deuxième essai thérapeutique avec l’Epival, puisqu’il n’y avait aucune indication claire pour S.M. clairement démontrés. La naloxone à raison de 0,8 à 2 mg peut s’avérer efficace pour renverser la dépression du SNC, probablement via l’inhibition des effets du GABA2,16,21. La L-carnitine peut s’avérer utile pour renverser l’hyperammoniémie et l’hépatotoxicité induite par l’acide valproïque puisque toutes deux seraient médiées par une déficience en carnitine. L’administration de L-carnitine 50 mg/kg/dose (1 à 3 doses par jour) est recommandée chez les patients présentant une hyperammoniémie, un coma ou un dysfonctionnement hépatique13,16,17. Toutefois, la dose, la posologie et la durée de traitement optimales ne sont pas clairement définies. Enfin, les techniques favorisant une augmentation de l’élimination de l’acide valproïque, telles que l’hémodialyse et l’hémoperfusion, sont rarement indiquées puisque l’acide valproïque est fortement lié aux protéines plasmatiques. Toutefois, la concentration libre d’acide valproïque peut s’avérer élevée dans un tel contexte : un dosage d’acide valproïque libre pourrait donc se révéler utile13. Par conséquent, les techniques d’élimination extracorporelle sont réservées aux cas réfractaires, mais elles pourraient être utiles dans un contexte d’hypo-albuminémie ou dans une autre situation où la fraction libre est grandement augmentée13. Dans le cas de S.M., une intoxication par l’acide valproïque a rapidement été suspectée et on a aussitôt cessé l’Epival. Mis à part le traitement de soutien (hydratation) et un suivi plus étroit, aucun traitement spécifique ne s’est avéré nécessaire. Une administration de naloxone aurait peut-être pu permettre une récupération plus rapide. Traitement Conclusion Dans la plupart des intoxications médicamenteuses, l’arrêt rapide du médicament en cause demeure une action importante à entreprendre, de même que l’évaluation de la quantité de médicament ingérée12. L’approche initiale d’une intoxication par l’acide valproïque dépend des signes et des symptômes présentés par le patient : le traitement de soutien est le principal traitement13,16. La décontamination gastro-intestinale avec du charbon activé en dose unique ou multiple peut être envisagée chez certains patients, particulièrement dans un contexte d’ingestion aiguë de comprimés à longue durée d’action, mais elle s’avère moins utile dans un contexte d’intoxication chronique13,16. La naloxone et la L-carnitine sont deux médicaments potentiellement utiles dans un contexte d’intoxication par l’acide valproïque, quoique leurs bénéfices n’aient pas été La meilleure prévention des intoxications médicamenteuses demeure un suivi adéquat des effets indésirables et, dans les cas où il est disponible, le monitorage des concentrations sanguines s’avère très utile. Toutefois, pour certains médicaments, il est important de tenir compte d’autres paramètres en plus des concentrations sanguines, notamment l’albuminémie. Le pharmacien est le professionnel de la santé tout à fait désigné pour interpréter les dosages des concentrations sanguines des médicaments en fonction des autres paramètres de laboratoire. Le dosage de la concentration libre de certains médicaments peut se révéler utile dans différentes situations où la fraction libre peut être augmentée, mais cette analyse de laboratoire reste présentement Suite de la page 49 52 Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 septembre 2009 Suite à la page 55 Intoxication par l’acide valproïque secondaire à une hypo-albuminémie Suite de la page 52 difficile d’accès. À l’heure actuelle, la pierre angulaire en matière d’intoxication par l’acide valproïque demeure l’arrêt rapide du médicament. Le traitement de soutien a aussi une grande importance en ce qui concerne le soulagement des signes et des symptômes associés. La décontamination gastro-intestinale peut être recommandée dans certaines situations. De plus, on peut envisager un traitement spécifique par la naloxone et la L-carnitine dans les cas plus graves. Enfin, les techniques d’élimination extracorporelle sont réservées aux cas réfractaires. n Références 1. Sechi G, Serra A. Wernicke’s encephalopathy : new clinical settings and recent advances in diagnosis and management. Lancet Neurol 2007; 6(5) : 442-55. 2. Abbott Laboratories Limited. Monographie canadienne d’EpivalMD. Ville St-Laurent (Québec); mai 2008. 3. Haroldson JA, Kramer LE, Wolff DL et coll. Elevated free fractions of valproic acid in a heart transplant patient with hypoalbuminemia. Ann Pharmacother 2000; 34(2) : 183-7. 4. Kodama Y, Tsutsumi K, Teraoka I et coll. Effect of unbound clearance on binding parameters of valproic acid to serum proteins. J Clin Pharmacol 1993; 33(2) : 130-5. 5. Hermida J, Tutor JC. A theoretical method for normalizing total serum valproic acid concentration in hypoalbuminemic patients. J Pharmacol Sci 2005; 97(4) : 489-93. 6. Pirmohamed M, Park BK. Adverse drug reactions : back to the future. Br J Clin Pharmacol 2003; 55(5) : 486-92. 7.Riedl MA, Casillas AM. Adverse drug reactions : types and treatment options. Am Fam Physician 2003 ; 68(9) : 1781-90. 8. Piermohamed M, Ferner RE. Monitoring drug treatment. BMJ 2003; 327(7425) : 1179-81. 9. Dasgupta A. Usefulness of monitoring free (unbound) concentration of therapeutic drugs in patient management. Clin Chim Acta 2007; 377(1-2) : 1-13. 10.MacKichan JJ. Influence of protein binding and the use of unbound (free) drug concentrations. Dans : Evans WE, Schentag JJ, Jusko WJ. Applied pharmacokinetics. 3e éd. Applied Therapeutics, Vancouver, 1992 : 5-1-5-48. 11.Levy RH, Wilensky AJ, Anderson GD. Carbamazepine, valproic acid, phenobarbial, and ethusoximide. Dans : Evans WE, Schentag JJ, Jusko WJ. Applied pharmacokinetics. 3e éd. Applied Therapeutics, Vancouver, 1992 : 26-1-26-29. 12.Manoguerra AS, Erdman AR, Woolf AD et coll. Valproic acid poisoning : an evidence-based consensus guideline for out-of-hospital management. Clin toxicol 2008; 46(7) : 661-76. 13.Bédry R, Parrot F. Intoxications graves par l’acide valproïque. Réanimation 2004; 13(5) : 324-333. 14.Gerstner T, Buesing D, Longin E et coll. Valproic acid induced encephalopathy – 19 new cases in Germany from 1994 to 2003 – A side effect associated to VPAtherapy not only in young children. Seizure 2006; 15(6) : 443-8. 15.Parize P, Beuret P, Fischer C. Une encéphalopathie au valproate sans hyperammoniémie. Ann Fr Anesth Reanim 2007; 26(12) : 1084-5. 16.Chan YC, Tse ML, Lau FL. Two cases of valproic acid poisoning treated with L-carnitine. Hum Exp Toxicol 2007; 26(12) : 967-9. 17.L’heureux PE, Penaloza A, Zahir S et coll. Science review : carnitine in the treatment of valproic acid-induced toxicity – what is the evidence ? Crit care 2005; 9(5) : 431-40. 18.Attilakos A, Voudris KA, Katsarou E et coll. Transient decreased serum albumin concentrations in epileptic children treated with sodium valproate monotherapy. Clin Neuropharmacol 2007; 30(3) : 145-9. 19.Lagneau F, Perbet S, Delefosse D et coll. Drugs pharmacokinetics in ICU patients : consequences of hypoalbuminemia upon drugs monitoring and dosing scheme. Intensive Care Med 2004; 30(6) : 1247. 20.Naranjo CA, Busto U, Sellus EM et coll. A method for estimating the probability of adverse drug reactions. Clin Pharmacol Ther 1981; 30(2) : 74-80. 21.Thanacoody HK. Chronic valproic acid intoxication : reversal by naloxone. Emerg Med J 2007; 24(9) : 677-8. www.monportailpharmacie.ca Questions de formation continue 15) Parmi les énoncés suivants, lequel est faux ? A.Le pharmacien peut jouer un rôle déterminant dans la prévention des effets indésirables médicamenteux et des intoxications médicamenteuses. B.La L-carnitine devrait être utilisée chez tous les patients intoxiqués par l’acide valproïque. C.La naloxone peut s’avérer utile pour renverser la dépression du SNC. D.Le traitement de soutien demeure le principal traitement d’une intoxication par l’acide valproïque. E.Le monitorage des concentrations libres est particulièrement recommandé chez les patients avec atteintes hépatique et/ou rénale, les patients avec hypoalbuminémie ou lorsqu’on suspecte une interaction médicamenteuse. 16) Parmi les énoncés suivants, lequel est vrai ? A.Il est indiqué d’effectuer un monitorage des concentrations sanguines pour tous les médicaments. B.Pour les médicaments à faible extraction hépatique, lorsque la concentration totale est en dessous de l’intervalle thérapeutique en présence d’une hypo-albuminémie, il faut augmenter la dose afin d’obtenir une concentration totale dans l’intervalle thérapeutique. C.En présence d’une hypo-albuminémie, l’augmentation de la concentration libre et de la réponse pharmacologique d’un médicament à forte extraction hépatique est plus importante, comparativement à un médicament à faible extraction hépatique. D.L’hémodialyse et l’hémoperfusion sont toujours inutiles dans un contexte d’intoxication par l’acide valproïque puisque cette molécule se lie fortement aux protéines plasmatiques. E.L’administration de charbon activé est particulièrement indiquée dans les cas d’intoxication chronique par l’acide valproïque. Veuillez reporter vos réponses dans le formulaire de la page 90 septembre 2009 vol. 56 n° 5 Québec Pharmacie 55 Répondez en ligne sur Programme de formation continue 1200, avenue McGill College, bureau 800, Montréal (QC) H3B 4G7 Télécopieur : 514 843-2940 www.monportailpharmacie.ca Questions de Formation continue Noircir les cases. 1. 9. A B C D E Formulaire de réponses A B C D E 10. A B C D E 2. A B C D E 11. A B C D E 3. A B C D E 12. A B C D E 4. A B C D E 13. A B C D E 5. A B C D E 14. A B C D E 6. A B C D E 15. A B C D E 7. A B C D E 16. A B C D E 8. A B C D E 2,8 UFC de l’OPQ septembre 2009 Répondre à 10 des 16 questions proposées Date limite : 11 décembre 2009 Réponses au questionnaire de févriermars 2009 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. D D E B C C B D 9. D 10.A 11.A 12.B 13.C 14.A 15.D Veuillez écrire lisiblement. Les réponses illisibles, ambiguës ou multiples seront rejetées. N° de permis : Année d’obtention du diplôme : Nom : Prénom : Nom de la pharmacie : Télécopieur (bureau) : Courriel : Adresse : Ville : Hôpital Province : Industrie Université/enseignement Propriétaire de pharmacie Indépendant Chaîne/franchise Bannière Gouvernement Code postal : Autre – spécifiez : Salarié en pharmacie communautaire Indépendant Temps complet Chaîne/franchise Temps partiel Bannière Remplaçant Pharmacien membre de l’Ordre des pharmaciens du Nouveau-Brunswick N° de permis : Veuillez nous confirmer que ce contenu vous a été utile en répondant aux questions suivantes : 1) Après avoir lu ce contenu, pensez-vous être plus en mesure d’offrir des soins pharmaceutiques à vos patients ? Oui Non 90 2) Ce contenu vous est-il utile dans l’exercice de votre profession ? Oui Non Québec Pharmacie vol. 56 n° 5 SEPTEMBRE 2009 3) Pourrez-vous mettre en pratique cette information ? Oui Non N.A. 4) Dans l’ensemble, êtes-vous satisfait(e) de ce contenu ? Très Assez Pas du tout www.monportailpharmacie.ca Téléphone (bureau) :