L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE DANS LA CRISE FINANCIÈRE / PIERRE JACQUEMOT OCTOBRE 2011
LESNOTESDEL’IRIS
4
‐ La chute concerne surtout le Nigéria. Environ 3,6 milliards de dollars en invesssements de portefeuille
sont sors du pays en 2009, alors qu’il avait enregistré des entrées nees de 2 milliards de dollars pendant
les deux années précédentes. Cee chute est surtout due à la perte de confiance des invessseurs étran‐
gers dans l’économie en raison de la crise bancaire, des problèmes de corrupon et des incertudes po‐
liques à l’approche des élecons naonales.
Dans les deux derniers cas, la conséquence de la crise a été l’abandon ou le report de certains grands
projets importants (mines, raffineries, routes, chemins de fer, ports, aéroports) et la cessaon d’acvités
dans des exploitaons agricoles et foresères ainsi que dans des unités manufacturières tournées vers
le marché américain et européen.
2. Les transferts de revenus des travailleurs africains à l’étranger, lesquels avaient aeint près de 20
milliards de dollars en 2008, ont mécaniquement été affectés par la récession en Europe et aux États‐
Unis, qui sont pour les trois quarts à l’origine de ces transferts. L’impact peut être puissant si l’on consi‐
dère qu’une baisse de 1% de croissance dans les pays hôtes se traduit en effet par une chute de 4% des
envois de fonds4. Certains pays sont plus exposés que d’autres. Les transferts représentent plus de 35%
du PIB au Cap Vert, de 20% au Lesotho et aux Comores, et de 10% au Libéria, au Sénégal ou au Mali. Au
Ghana, 15 % de la populaon vit à l’étranger et les transferts, empruntant des voies légales ou non, sont
esmés à un quart du PIB ; ils portent une large pare des dépenses courantes des familles restées au
pays.
3. La pression sur l’aide publique au développement, au regard des tensions déjà percepbles sur les
finances publiques des pays donateurs, sera probablement sensible. L’APD vers l’Afrique subsaharienne
des donateurs membres de l’OCDE a été de 25 milliards de dollars en 2009, en augmentaon de 5%,
avec un important volet consacré au désendeement. Pour l’avenir, le pronosc n’est pas facile, car si
déjà en période normale, les pays de l’OCDE avaient du mal à respecter les engagements pris lors du
sommet du G8 à Gleneagles en 2005 de se rapprocher de l’objecf du 0,5 puis du 0,7% du PIB5, sans
doute qu’en temps de fortes tensions budgétaires, ils auront encore plus de peine à le faire. On le constate
amèrement dans le cas de la France avec une APD bloquée autour de 0,45% du PIB6.
4. Les taux de change ont‐ils réagit aux chocs ? Sont‐ils devenus plus sensibles à l’évoluon des taux
d’intérêt et des risques pendant la phase crique ? Le problème ne se pose pas pour les 15 membres de
la zone France qui ont préservé leur parité avec l’euro, la libre converbilité et une geson commune de
leurs réserves de change dans les deux espaces CEMAC et UEMOA7. Pour ces pays, l’évoluon du taux
de change euro/dollar est décisive pour la valorisaon de leurs exportaons primaires.
Pour les autres qui ont des taux de change floant, le FMI a effectué une esmaon empirique sur 12
pays d’Afrique subsaharienne qui offrent des données suffisantes pour la période 2003–2009, en faisant
la disncon entre les pays ayant un compte de capital ouvert (Afrique du sud, Ghana, Kenya, Ouganda,
Tanzanie, Zambie) ou fermé (Gambie, Madagascar, Malawi, Mozambique, Rwanda, Sierra Leone). Pour
(4) Selon FMI, 2011b.
(5) Sur la période 2004‐2010, l’Afrique n’a reçu que 12 des 25 milliards supplémentaires d’APD prévus lors de Gleneagles.
(6) Voir P. Jacquemot, 2011 (à paraître). Certains pays comme la Grande Bretagne ont néanmoins décidé de maintenir une polique volontariste, mais géographiquement
plus sélecve, en maère d’APD.
(7) Six États d’Afrique centrale : le Cameroun, la République centrafricaine, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad, formant la Communauté éco‐
nomique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC), dont l'instut d'émission est la Banque des États de l'Afrique centrale (BEAC). Huit États d’Afrique de l’Ouest : le Bénin,
le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée‐Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo formant l'Union économique et monétaire ouest‐africaine (UEMOA), dont l'instut
d'émission est la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO). Les Comores constuent une zone CFA parculière.plus sélecve, en maère d’APD.