Le mécanisme de l’effet contraceptif de l’allaitement enfin décrypté !
Il est bien établi que l’allaitement entraîne à la fois une augmentation de la sécrétion de prolactine
(PRL) par l’hypophyse et inhibe les capacités d’une femme à ovuler. Ceci empêche la survenue d’une
nouvelle grossesse ce qui faisait de l’allaitement une méthode contraceptive.
Il existe des situations pathologiques où la PRL augmente, c’est le cas des tumeurs hypophysaires
sécrétant cette hormone, les prolactinomes. Ces hyperprolactinémies, responsables de troubles des
règles et d’infertilité, sont une cause majeure d’anovulation. Le mécanisme intime de l’effet anti-
ovulatoire de l’hyperprolactinémie n’était pas établi ; on savait seulement que l’élévation de la PRL
entrainait une perturbation de la sécrétion pulsatile de l’hormone hypothalamique GnRH et donc des
gonadotrophines hypophysaires LH et FSH empêchant le fonctionnement cyclique ovarien. Cet effet
inhibiteur de la PRL sur les neurones à GnRH n’était pas compris car ces neurones dans leur grande
majorité n’exprimaient pas le récepteur de la PRL.
L’équipe de Jacques Young et de Nadine Binart (Unité Inserm 693 à l’hôpital de Bicêtre) a enfin
permis de décortiquer le mécanisme sous-jacent de cet effet antigonadotrope. Ils ont démontré, en
utilisant un modèle de souris de la maladie, que la PRL inhibe la sécrétion de neurones situés en
amont des neurones à GnRH essentiels à leur fonctionnement. Ces neurones sécrètent une neuro-
hormone appelée kisspeptine. L’hyperprolactinémie inhibe directement la sécrétion de kisspeptine
et empêche alors la sécrétion de GnRH et la cyclicité ovarienne. L’administration de kisspeptine a
permis de rétablir la libération de GnRH et le fonctionnement cyclique des ovaires malgré
l’hyperprolactinémie.
Cette découverte physiopathologique explique pour la première fois le lien entre l’infertilité et
l’hyperprolactinémie et permet une ouverture thérapeutique originale. Des études sont en cours à
l’hôpital de Bicêtre pour valider le concept chez la femme ce qui permettra de proposer une
alternative thérapeutique en cas de résistance aux médicaments actuels.
Hyperprolactinemia is the most common cause of hypogonadotropic anovulation and is one of the
leading causes of infertility in women aged 25-34. Hyperprolactinemia has been proposed to block
ovulation through inhibition of GnRH release. Kisspeptin neurons, which express prolactin receptors,
were recently identified as major regulators of GnRH neurons. To mimic the human pathology of
anovulation, we continuously infused female mice with prolactin. Our studies demonstrated that
hyperprolactinemia in mice induced anovulation, reduced GnRH and gonadotropin secretion, and
diminished kisspeptin expression. Kisspeptin administration restored gonadotropin secretion and
ovarian cyclicity, suggesting that kisspeptin neurons play a major role in hyperprolactinemic
anovulation. Our studies indicate that administration of kisspeptin may serve as an alternative
therapeutic approach to restore the fertility of hyperprolactinemic women who are resistant or
intolerant to dopamine agonists.
Contact chercheur :
Jacques YOUNG et Nadine BINART
Unité Inserm 693
Mail : jacques.young@bct.aphp.fr ou nadine.binart@inserm.fr