4
Introduction
par Nicole Gauthey
Pourquoi le GREP a-t- il choisi de centrer son évènement de fin de saison de
Lectures Croisées sur l’anthropologue Claude Levi-Strauss ?
Sans doute parce que nous aimons la façon dont ce penseur a « touché » le
monde, comment il peut nous guider sur la question de l’Autre et des Autres, et
les plus « différents » qu’on puisse imaginer.
Cet homme, qui a vécu plus de 100 ans, a vu poindre et se développer les
mutations technologiques de son siècle, et c’est justement cette traversée d’un
siècle que son œuvre va nous proposer
Dans «Tristes tropiques » en 1955 son inquiétude écologique nous montre
l’emprise de destruction que notre civilisation mène à l’encontre de la nature et
aussi des autres cultures.
Nous avons aimé que cet homme hors du commun puisse nous expliquer que
nous avons tous le même logiciel dans notre façon de penser et qu’il n’y a pas
de différence entre un homme cultive et un homme primitif, que la pensée
« sauvage « n’est pas une forme mineure de la logique.
Catherine Clément qui l’a connu et beaucoup aimé (elle a même écrit un livret
d’opéra sur « Tristes Tropiques ») lui a consacré 100 heures de lecture au Musée
Branly, à l’occasion de son centenaire. Un grand témoin donc et une jeunesse de
pensée qui ne l’a jamais quitté
Alors bien sûr c’est vrai qu’il a connu une sorte de purgatoire médiatique et
qu’on note un certain retour de sa pensée aujourd’hui : Godelier lui a consacré
un énorme livre paru cette année.
Claude Levi-Strauss est-il une clé de compréhension de notre monde actuel ?
Pour le grand public, son nom est associé à un mouvement unitaire de pensée
appelé « structuralisme ».On le rapproche de Jacobson, Foucault, Lacan, et
même de ceux qui apparaissent comme les pères fondateurs de ce mouvement,
Marx et Freud.
A un certain moment on a pu mésinterpréter son apport, alors qu’il a voulu
sortir l’anthropologie de ses aprioris philosophiques pour fonder une discipline
rigoureuse, basée sur les études de terrain. On l’a accusé de négliger l’individu
et sa capacité de retournement contre les structures qui peuvent régir ses
comportements, alors qu’il s’agissait pour lui de dégager des régularités, d’en
déduire des structures, et, à partir des situations observées, de comprendre leur
articulation, mais sans que ce soit des éléments de pression