
Secret et transparence
Le Vice ou la Vertu ?
L’information sur les entreprises à la croisée des chemins
procédure qui vient parfois au secours du plaideur en difficulté. Et quel merveilleux magicien
que cet avocat qui peut expliquer à son client, fournisseur impayé d’un commerçant insolvable
ou parti sans laisser d’adresse, qu’il va pouvoir rechercher le précédent exploitant ou
propriétaire du fonds parce que la cession n’a pas été publiée et lui est donc inopposable.
Les quinze dernières années ont marqué un profond changement. La loi n’y est pas pour
grand chose. On doit le changement aux nouvelles techniques de traitement et de diffusion de
l’information dont les gestionnaires de la publicité légale ont très tôt tiré parti en s’engageant,
soit directement dans la constitution de banques de données accessibles en ligne par voie
télématique – et je pense notamment à Infogreffe pour les greffes et à Euridile pour l’INPI –, soit
en favorisant la constitution de telles bases de données par des opérateurs privés auxquels
étaient cédées les informations sur support électronique, comme tel a été le cas des journaux
officiels.
Assez rapidement l’interrogation de ces bases de données a pris le pas sur les modes
classiques d’accès à l’information légale, c’est-à-dire les demandes d’extraits ou de copie
papier des registres ou le dépouillement des journaux ou des bulletins. Elle est devenue l’acte
réflexe des opérateurs de la vie économique intervenant, non plus a posteriori au stade du
contentieux comme je l’évoquais tout à l’heure, mais souvent avant toute décision et avant toute
action. Et, par là même, la publicité légale a, je crois, pris sa pleine signification, en même
temps qu’était conférée plus de légitimité aux effets de droit qui s’y attachent. La facilité d’accès
à la publicité légale, s’ajoutant d’ailleurs à l’extension de l’information obligatoire aux comptes
annuels des sociétés, a conféré à la publicité légale une autre dimension, d’ordre plus
économique : l’établissement d’une transparence minimale dans la vie des affaires.
Mais, parallèlement, la technique des banques de données accessibles en ligne à tout
moment, sans déplacement, a transformé en une certaine redondance ce qui avait été conçu
en termes de complémentarité. Le regroupement des greffiers au sein d’Infogreffe donne à leur
système informatique quelques effets de registre national. Les bases Infogreffe et Euridile
offrent des prestations de publicité portable, empiétant alors quelque peu sur l’objet des
bulletins et des journaux d’annonces légales. Le regroupement des annonces légales autour de
la désignation de l’entreprise, auquel procèdent les opérateurs privés, conduit à établir d’une
certaine façon des registres, au moins partiels.
L’ensemble de ces problèmes avait été abordé il y a dix ans, à l’initiative du CREDA, lors
du colloque déjà évoqué, de 1994 ( )1 . La demi-journée d’aujourd’hui doit conduire à nous
interroger sur le point de savoir si quelque chose à changé depuis dix ans. À titre personnel, je
ne le pense pas. Ceci étant, je suis désormais un observateur extérieur et, peut-être, mon
propos est-il un peu abrupt.
Cette table ronde devrait être l’occasion de faire le point de la question en abordant
successivement : la présentation des institutions et organismes gestionnaires de l’information
légale, afin de préciser les enjeux juridiques de leurs interventions ; l’impact des nouvelles
techniques de traitement, de stockage et de diffusion de cette information ; la question de
savoir si, notamment dans la perspective de l’application de la directive du 15 juillet 2003,
d’autres aspects de l’information légale ne doivent pas évoluer.
(1) CREDA, L’information légale dans les affaires, préc.
Ce document provient du site internet du CREDA, http://www.creda.ccip.fr.
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