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La vérification empirique de Tinbergen fut suivie de celle de
Lawrence Klein3 dont l‟œuvre ouvrit la voie à un champ florissant
de modèles macroéconométriques de plus en plus larges dont la
construction fut rendue possible par l‟amélioration des données
macroéconomiques (grâce au développement de plus en plus
rapide de la comptabilité nationale) et des moyens de calcul
(grâce au développement fulgurant de l‟informatique)4. Les
modèles construits à l‟époque étaient « keynésiens » car ils
reproduisaient presque tous des situations d‟insuffisance de la
demande qui pouvaient être résorbées par l‟augmentation des
dépenses publiques, faisant usage du multiplicateur de la
consommation publique, dans la tradition du modèle IS-LM.
La domination de la macroéconomie keynésienne devint
réelle dès le début des années 1950. Le modèle fut modifié par
Modigliani5 et popularisé par Hansen6. Chacune des composantes
de la demande globale (consommation, investissement, etc.)
devint le champ des améliorations successives. L‟introduction de
la courbe de Phillips, qui établissait l‟existence d‟une relation de
trade-off entre l‟inflation et le chômage, permit de combler
l‟hypothèse de rigidité des prix qui caractérisait le modèle initial.
Dès lors, la macroéconomie s‟installa comme une discipline
distincte de la microéconomie et qui, sans faire recours aux
fondements microéconomiques devant servir de base à la
modélisation des comportements des agents économiques, était
capable de fournir des propositions de politique économique au
décideur. Cette période est affublée par certains auteurs du nom
de « synthèse néo-classique ». La théorie microéconomique,
essentiellement classique ou plutôt néo-classique, coexiste avec la
théorie macroéconomique keynésienne. La synthèse définit aussi
un partage des compétences entre les deux branches des
sciences économiques : la microéconomie est jugée compétente
pour traiter de problèmes de long terme (les prix étant flexibles
dans le long terme) tandis que la théorie keynésienne est jugée
3 Klein, L. (1950) Economic Fluctuations in the United States, 1921-1941, New-York,
Wiley.
4 Dans la seconde moitié de 1960, certains modèles comptaient déjà 400 équations.
5 Modigliani, F. (1944), "Liquidity Preference and the Theory of Interest and Money",
Econometrica, vol. 12, pp. 44-88.
6 Hansen, A. (1953), A Guide to Keynes, New-York: MacGraw-Hill.