CONFERENCE SUR LA MATERNELLE
Ce travail sur la maternelle s'articule autour de 3 points :
Une connaissance de l'enfant de 2-3 ans
Son adaptation à la maternelle ce qui renvoie aux notions de séparation et d'autonomisation,
d'individuation de l'enfant
La notion d'estime de soi
INTRODUCTION
Dans le but de renforcer notre action de prévention en maternelle, cet exposé vise à une meilleure
connaissance de l'enfant quant aux grandes étapes du développement de la construction de la personnalité
afin d'aiguiser notre regard sur les signes de narcissisme défaillant ou de difficultés à s'autonomiser, qui, s'ils
ne sont pas détectés rapidement en maternelle risquent de compromettre gravement la suite des
apprentissages.
Notre conviction est qu'il existe deux points fondamentaux dans le développement de sa personnalité qui
vont déterminer pour une large part les grandes étapes de son développement cognitif et intellectuel et donc
les apprentissages.
Il s'agit, d'une part, de la capacité pour l'enfant à sortir de la fusion initiale, à s'individuer, à s'autonomiser,
d'autre part, la construction de l'image de soi, son sentiment de compétence.
Cet exposé vise dans un premier temps à reprendre le développement des grandes fonctions intellectuelles
et cognitives à la lumière du développement affectif de l'enfant.
Puis nous aborderons le problème de l'autonomisation et les situations qui rendent ces séparations
difficiles. L'entrée à la maternelle est donc de ce point de vue un révélateur de difficultés.
Enfin, nous parlerons de l'estime de soi, concept phare dans la compréhension de difficultés à apprendre.
Notre travail a pour objectif, de présenter la très grande complexité que peut révêtir la difficulté à apprendre,
les causes en sont le plus souvent multiples, affectives, psychologiques et relationnelles.
Très peu d'enfants sont concernés par un manque de « moyens », c'est une autre lecture qui vous est
proposée, faisant appel, pour une large part à un travail avec les familles.
Le signalement en maternelle doit donc reposer, avant tout, sur ces signes de développement plutôt que sur
des compétences scolaires qui n'en sont que les conséquences, le révélateur.
I – CONNAISSANCE DE L'ENFANT DE 2 ANS
Aujourd'hui, de nombreuses écoles accueillent des tout-petits, or l'enfant de deux ans est un enfant qui a des
besoins et des comportements spécifiques.
C'est un enfant en construction.
2 ans, c'est l'âge des sentiments contradictoires : l'enfant a tout à la fois le désir d'être grand et celui d'être
protégé.
Il vit une véritable révolution dans le sentiment qu'il a de lui-même car il est paradoxal et compliqué de
grandir.
Avant son entrée en maternelle, l'enfant a acquis tout un langage d'expériences qui vont servir de tremplin à
ses investissements scolaires.
Il a vécu la dyade mère-enfant dans les toutes premières semaines de sa vie, puis son papa est venu
s'interposer entre maman et lui, il a parfois découvert qu'il faudrait partager ces deux adultes avec des frères
et soeurs.
A peine réussit-il à trouver ses repères qu'il lui faut aller à l'école, rencontrer d'autres enfants, partager.
C'est un changement de mère, de fratrie, de réglements, une remise en question de l'image de soi.
Il va découvrir l'altérité et progressivement conquérir son autonomie.
Cette période de la vie est traversée par des conflits intra-psychiques inhérents au développement
psychologique.
o
Le premier conflit se situe autour de l'autonomisation : l'enfant a tout à la fois envie de
grandir et resté protégé : cette fragilisation se lit dans ses accès parfois agressifs, tout-
puissants et le moment d'après, il s'écroule en pleurant en appelant le soutien. Cette
émancipation est anxiogène et déstabilisante.
o
Puis le complexe d'Oedipe représente une nouvelle étape entre 3 et 4 ans. L'enfant est aux
prises a des sentiments ambivalents, contradictoires sur la même personne. Il en ressent de la
culpabilité et éprouve à ces moments-là une vive angoisse à l'idée de perdre l'amour de ses
parents. Lorsqu'un bébé arrive à cette p ériode, la tourmente est réelle, la rivalité avec le père
et la mère, ,investis à ce moment-là sur un mode particulièrement exacerbé et ambivalent, est
vécue de façon très importante. Pour certains enfants, cette étape se passera sans effets, pour
d'autres, le sentiment de culpabilité peut générer des inhibitions intellectuelles s'il n'y a pas eu
possibillité d'expression, de verbalisation par rapport à tout ce qu'il ressent confusément.
Le développement affectif est traversé par des conflits importants, les grandes étapes du développement
intellectuel et cognitif vont être déterminés, pour une large part, par la manière dont ces conflits vont
pouvoir se gérer.
Ainsi, LE SCHEMA CORPOREL
ne se réduit pas à l'étape où l'enfant peut nommer les différentes parties de son corps.La naissance du
schéma corporel, c'est quand l'enfant a une représentation de son corps propre, c'est un processus
psychologique tout à fait important, l'enfant réalise que son corps est un ensemble unifié et délimité qui lui
est propre. Ce n'est plus un conglomérat de sensations olfactives, tactiles etc...
C'est au cours de la première année que la différenciation du moi corporel s'accomplit et que s'installe pour
l'enfant, la possibilité de se séparer de l'Objet.
Entre 18 et 24 mois, le corps est devenu un tout indépendant et différencié de l'extérieur.
C'est seulement vers 2 ans que l'enfant reconnaît son image dans le miroir en tant qu'intégration visuelle du
corps propre. C'est un moment important car il se perçoit comme une unité corporelle.
C'est dire l'importance des miroirs dans une classe de tout-petits !
Le « Je » apparaît à l'étape de la locomotion et c'est à ce moment que l'enfant peut devenir angoissé jusqu'à
dénier la séparation, il tente alors de se replonger dans le fantasme de l'unité avec la mère toute-puissante, se
situant alors comme dans le prolongement du corps de la mère.
Au moment de l'entrée à la maternelle, il y a réactivation de cette crainte si elle n'a pas été bien négociée et il
faut prendre en compte cette difficulté comme une défense temporaire et en parler avec la famille en
présence de l'enfant. Ne pas voir la difficulté fera se cristalliser un problème qui risque de réapparaître à
chaque séparation ou à chaque rentrée.
Parler à la mère en présence de l'enfant c'est donner vie à des sentiments confus, c'est permettre que
s'élabore une parole avec des effets de sens. C'est aussi contenir l'enfant dans son enveloppe
corporelle, ce qui concerne ses besoins mais aussi les éléments psychiques qui y sont liés.
De 2 à 3 ans, l'enfant doit être disponible pour faire des expériences multiples, pour connaître mieux son
corps et établir une liaison par comparaison entre son corps et celui des autres ; C'est ainsi qu'il s'identifie.
L'objectivation du corps propre fait émerger chez l'enfant la conscience de sa singularité et par la même
aussi de celle des autres.
Le schéma corporel est la résultante de perceptions, de représentations plus ou moins conscientes et un
certain contrôle du corps propre :
o
agissant ou immobile
o
dans l'espace et par rapport au monde environnant
o
avec une indépendance de ses différents segments mais avec une sensation de l'unité
permanente du corps
o
avec une latéralité qui s'affirme
o
et une maîtrise des pulsions et inhibitions
o
le tout contenu par un revêtement cutané par lequel il est en contact avec le monde (« MOI-
PEAU de Didier Anzieu »)
Au vu de ces considérations, le schéma corporel n'apparaît pas comme un « apprentissage classique », une
compétence ordinaire, elle est liée au développement affectif, relationnel et cognitif de l'enfant. Il est, de ce
fait, nécessaire d'accueillir avec la plus grande prudence les dessins de bonshommes lorsqu 'ils apparaissent.
L'enfant se dessine comme il se représente d'une part, et d'autre part, avec les moyens de figuration et de
représentation dont il dispose à ce moment-là.
Toute comparaison négative, ou retour négatif ( ne serait-ce qu'un petit bonhomme qui grimace) affecte en
premier lieu, son image de lui-même, alors qu'il s'agit là d'un apprentissage très lié à la maturation
physiologique, psychologique et cognitive.
En revanche, le dessin du bonhomme peut révéler des signes pathologiques de difficulté à s'individuer ou à
se représenter comme une entité : c'est le cas des psychoses où l'enfant se perçoit morcelé, le bonhomme
reste morcelé, ou certaines dysharmonies où l'enfant se représente systématiquement dans une bulle, dans le
ventre de sa mère fantasmatiquement lorsqu'il n'est pas parvenu au stade de différenciation.
L'IMAGE DE SOI
A partir de 2 ans, l'enfant a besoin de revenir à ce « je » spéculaire du stade du miroir, l'image fonctionne
comme identification, elle permet à l'enfant d'assumer sa propre image.
L'image que chacun se forge de lui-même se trouve affectée d'images multiples : facteurs familiaux, socio-
économiques et culturels.
L'image qui va de soi à autrui est un processus psychologique essentiel qui s'accompagne de valorisations
positives et négatives.
La représentation de soi évolue et se remanie tout au long de la scolarité. Les enfants qui ont une bonne
image d'eux-mêmes sont souvent ceux qui aiment l'école et vont s'intéresser aux apprentissages.
LA REPRESENTATION
Dans ce continuum qui part de la possibilité pour l'enfant à s'abstraire d'une fusion initiale à l'enfant qui
parvient à une autonomie affective et intellectuelle, se situe l'apparition de la Représentation mentale.
La représentation est une opération mentale qui permet de se représenter des objets absents.
L'enfant peut se détacher de la perception immédiate et différer l'action pour « penser ».
Il peut garder en tête une image mentale de l'objet et une image mentale de son corps.
Il est capable d'imiter de façon différée, en l'absence du modèle.
Il sait que ses parents momentanément absents existent toujours et vont revenir, c'est d'ailleurs ce qui
rend la scolarité acceptable.
Pour accepter cette séparation que constitue l'entrée en maternelle, l'enfant doit avoir intériorisé l'image
d'une mère suffisamment constante, permanente. La fiabilité de l'image maternante est déterminante, s'il n'en
a pas une représentation interne suffisamment élaborée, l'enfant est inquiet et il recherche l'objet libidinal, la
mère.
Pouvoir supporter l'absence de l'objet libidinal va activer le système de représentation.
On comprend, là encore, le lien très fort entre un processus psychologique de séparation,
d'autonomisation et le développement d'un processus intellectuel tout à fait déterminant dans les
apprentissages.
On assiste au développement de la fonction représentative ou symbolique ; l'enfant a besoin d'agir ses
représentations c'est à dire de jouer, de manipuler, de trier, transvaser etc...
« Faire semblant » va lui permettre de structurer le monde. Il joue le réél tel qu'il le comprend, nous voyons
ainsi comment il comprend la réalité.
Son monde intérieur est parfois très compliqué, chargé de désirs et d'angoisses.
Le rééducateur peut intervenir si besoin est pour l'aider à différencier le réél et l'imaginaire.
L'ACCES AU SYMBOLIQUE
C'est la représentation qui donne accès au symbolique, elle permet au sujet de se représenter les objets et les
événements en images.
L'enfant acquiert la possibilité de représenter quelque chose par un symbole ou un signe, ce qui va
l'aider à se séparer puisqu'il aura un support de mentalisation pour penser l'absence de sa mère.
Les moyens auxquels il a recours pour cette capacité évocatrice sont : l'image mentale, le jeu symbolique,
le dessin et le langage.
Si la période qui couvre les 18 premiers mois est couramment appelée sensori-motrice, celle qui précède
l'entrée à l 'école élémentaire de 2 à 6 ans est largement dominée par le « label symbolique ».
Il faut donc accepter la séparation pour activer le processus de representation qui est le point de
départ du développement intellectuel, symbolique : langage, écriture, lecture, mathématiques...
LA RELATION A L'OBJET
Elle rend compte de la manière dont le sujet se comporte dans les relations interpersonnelles. Elle est
structurée par l'organisation psychique de la personne, et elle se fonde sur le processus de séparation entre le
sujet et les différents objets investis dès les premiers mois de sa vie.
Si personne n'est à l'écoute de l'anxiété réactionnelle que l'enfant manifeste, il risque de rester sur le
qui-vive, ne s'autorisant aucun investisement. Ce qui serait, bien-sûr, préjudiciable aux apprentissages.
La fiabilité de l'image maternante dans le vécu de l'enfant est le garant de son propre sentiment de sa
continuité d'exister.
S'il n'en a pas une représentation interne suffisamment élaborée, l'enfant est inquiet et il recherche
l'objet libidinal, la mère.
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