cohésion ou par une conscience collective forte, ils se réfèrent
à un état de paix interne.
Quand Marx et ses successeurs insistent sur les conflits de
classe, ils se réfèrent à un état de guerre dans lequel des enne-
mis s'affrontent.
Les théories sociologiques de l'équilibre ou du changement pri-
vilégient l'un ou l'autre des termes de la discrimination de l'ami
et de l'ennemi.
C. Schmitt a le mérite d'insister sur le fait que la dialectique
de l'ami et de l'ennemi est indispensable pour la compréhension
de toute forme de vie collective et d'ajouter que n'importe quel
domaine de la vie sociale (religieux, philosophique, moral, écono-
mique, technique ... ) peut devenir le domaine stratégique pour la
compréhension de toute société, si la discrimination de l'ami et de
l'ennemi s'opère par son biais.
Finalement la conclusion générale de cette étude est de décla-
rer non-scientifique toute analyse qui prétend expliquer la société
par l'action d'un facteur dominant, car ainsi la notion de politique
est réifiée.
Le texte Théorie du partisan est un approfondissement de la problé-
matique de l'ami et de l'ennemi.
Le contexte international ne permet plus une distinction claire
entre la paix et la guerre, entre le civil et le militaire, finalement
entre le privé et le public. Le partisan, ce combattant irrégulier et
tellurique dont l'engagement idéologique est très intense, est une
des figures les plus caractéristiques du phénomène politique de
notre siècle.
C. Schmitt montre comment la figure du partisan a évolué de-
puis la guerre d'Espagne (1808-1813) jusqu'à la guerre d'Algé-
rie (1962).
Ce qui ressort de cette analyse est que la guerre est une conti-
nuation de la politique, dans la mesure où le partisan peut radica-
liser l'opposition entre ami et ennemi. Lénine, par exemple, en
mettant l'accent sur l'identification et la lutte de l'ennemi de
classe, conteste l'édifice tout entier de la société.
D'une manière générale, toutefois, le partisan demeure un irré-
gulier mais par rapport à un état régulier. Ce sont les critères
qui légitiment une situation de fait donnée, qui fournissent le ca-
dre de la stratégie et de l'action du partisan: «Celui qu'on a
dépouillé de tout droit va puiser son droit dans l'hostilité. C'est
en elle qu'il trouve un sens à sa cause et le sens du droit quand
s'écroule l'édifice de protection et d'obéissance qu'il habitait ou
que se déchire la trame normative de la légitimité qui garantis-
sait son droit et sa protection. Et c'est la fin du jeu convention-
nel
'>
(p. 306).
Mais l'état d'hostilité demande le contrepoids de l'amitié. Le
partisan doit se ranger à côté d'un tiers puissant, qui peut le sub-
ventionner, mais qui, en tout cas, doit en légitimer l'action. Les
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