4
Enfin, il faut noter la spécialisation de plusieurs productions agricoles qui s'est imposée en
modèle sur la grande majorité des fermes depuis les années 60 et qui caractérise
aujourd'hui de vastes territoires de production: (lait, volaille, porc, œufs, céréales, produits
maraîchers, etc.). Ce courant de spécialisation est remis en question depuis un certain
nombre d'années par différents organismes et groupements. Le récent rapport de la
Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois a aussi traité de
cette question et proposé des voies de remplacement.
3. Quelles sont les conséquences (positives et négatives) de cette tendance à la
spécialisation pour les territoires?
La spécialisation d'un territoire est souvent liée à la présence dominante d'une ressource
naturelle (matière première, source énergétique, qualité agronomique des sols, paysage,
environnement naturel, etc.). ou d'atouts historiques ou patrimoniaux. Elle peut être
attribuable aussi à la persistance de l'activité pionnière qui a accompagné l'occupation
première du territoire, telles l'agriculture, la forêt et les pêches. Appuyée par des structures
et des dispositifs appropriés tant au niveau de la chaîne de production qu'à celui de la
transformation et de la mise en marché (dans le cas des productions spécialisées), la
spécialisation comporte des avantages (systèmes productifs locaux, économies de
proximité, pouvoir de négociation pour la conquête de marchés, bassin de main-d'œuvre
spécialisée, etc.).
Pour plusieurs territoires du Québec, et plus spécifiquement à l'échelle des municipalités
locales et des MRC, l'expérience des quarante dernières années a démontré que la
spécialisation dans les domaines agricole, forestier, des pêches et des mines, constituait
un facteur de vulnérabilité très important lorsque surviennent des crises tant structurelles
que conjoncturelles affectant ces secteurs économiques. C'est ainsi que plusieurs
territoires ruraux du Québec dont l'économie et l'organisation sociale étaient fondées sur
l'agriculture, la forêt ou les pêches, ont été entraînés dans la spirale de la dévitalisation
suite à l'effondrement de ces activités économiques. Les territoires concernés déploient
aujourd'hui des efforts considérables pour diversifier leur base économique. Et cette
diversification repose sur la capacité du milieu à susciter une polyvalence de fonctions qui
stimulera la vie économique et sociale tout en générant des emplois dans des domaines
nouveaux d'activités.
La spécialisation et la multifonctionnalité ont chacune leurs mérites dans l'organisation et
le dynamisme d'un territoire. Elles possèdent aussi chacune leurs conditions
d'épanouissement dans le temps et dans l'espace. Selon les évolutions en cours,
conséquences de la mondialisation des marchés, selon les politiques et règles de l'OMC,
les tendances des consommateurs, les progrès de la productivité, etc., l'une ou l'autre
apparaîtra appropriée au contexte ou au contraire en mal d'adaptation.
Dans le contexte actuel marqué, comme on l'a souligné précédemment, par la grande
mobilité des personnes, des biens et des informations, et aussi par la quête d'une
meilleure qualité de vie, la ville sort de son cadre traditionnel et trouve à la campagne les
ressources pour répondre à plusieurs de ses besoins. La société rurale devient ainsi très
intégrée dans la société urbanisée en raison des échanges villes-campagnes, du
rapprochement des modes de vie, des aspirations communes et des fréquentations
quotidiennes (mouvement pendulaire des travailleurs), hebdomadaires et saisonnières.
Ce nouveau contexte d'osmose entre espaces urbains et espaces ruraux s'avère propice
à la multifonctionnalité des territoires ruraux.