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Formation de la Poche
Le 6 juin 1944, c'est le débarquement tant atten du. Une formidable armada : 2 226 bateaux, protégée par 11 000
avions et 702 navires de guerre, débarque en l'espace de cinq jours, 5 divisions sur les plages de Normandie.
Début août 1944 : les troupes alliées déferlent sur la Bretagne. Les Allemands, partout traqués par les résistants
un peu mieux armés (50 000 pour la seule Bretagne) ne savent plus où donner de la tête. Ils ne peuvent livrer que des
combats d'arrière-garde. Pour tout l'ouest la libération n'est qu'une question de jours. Et pourtant...
Le 4 août, la 4ème division blindée américaine a pénétré assez facilement dans Rennes. Elle entre à Redon le 5
août, à Vannes le 6. Les Allemands se retirent de Nantes le 4 août mais l'occupent à nou veau le 5, devant
d'indécision des Américains. Ils en profitent pour endommager les installations portuai res et couler des bateaux dans
la Loire.
Formation de la Poche
La 4ème D.B. progresse donc sur une ligne Redon-Plessé-Blain-Fay-de-Bretagne, hésitant à continuer plus avant.
Conjointement, des groupes F.F.I. se forment et tiennent des positions aux frontiè res de la future Poche. C'est ainsi
que Saint-Étienne de Mont Luc sera investi par le corps franc du capi taine Josso formé de groupes de Savenay,
Lavau et Couëron bien avant l'arrivée des Américains. De Redon à Plessé, le 3ème bataillon de Torquat se
maintiendra malgré les incursions ennemies et le 2ème bataillon contrôlera la forêt du Gâvre.
Jusqu'en septembre la Poche n'est donc pas vrai ment constituée, les lignes sont perméables. Ce n'est qu'au cours
de la fin août - début septembre que les bataillons enfermeront les forces allemandes sur un front stable. Les combats
les plus vifs se dérouleront pendant cette période qui sera aussi celle de l'occu pation du sud-Loire. Le front de la
Poche formera alors une ligne stable tenue par plus de 15 000 F.F.I. et la 4ème division U.S. cantonnant dans la forêt
du Gâvre.
Les alliés avaient donc totalement négligé l'es tuaire en passant au nord du canal de Nantes à Brest. La Poche de
Saint-Nazaire était limitée par la rive gauche de la Vilaine, La Roche Bernard, Nivillac, le canal de Nantes à Brest,
Guenrouet, Bouvron, Cordemais, et, au sud de la Loire, La Sicaudais, Chauvé et Pornic.
Pourquoi la Poche ?
Ici, l'histoire locale rejoint la "grande" histoire de la guerre mondiale. Au début du mois d'août 1944, la
conjonction des perspectives alliées, notamment américaines, et les derniers espoirs nazis, explique le maintien des
enclaves allemandes des différentes "Poches de l'Atlantique".
Par son décret en date du 19 janvier, Hitler avait fait établir la liste des secteurs du littoral qui devaient être
défendus afin de bloquer les ports. Y figuraient dans l'ouest : Cherbourg, Saint-Malo, Brest, Lorient, Saint-Nazaire,
Royan, Le Verdon. Toutes ces villes furent déclarées forteresses et reçurent l'ordre de résister jusqu'au dernier
homme. Même si la carte de guerre leur est désormais moins favorable, après les débarquements alliés de Normandie
et de Provence, mais surtout avec l'avance rapide de l'Armée Rouge en Europe centrale, les Allemands ne perdent
pas tout espoir de l'emporter. Pour cela, ils comptent sur les nouvelles armes (V1, V2, avion à réaction, arme
nucléaire), mais également sur la possibilité d'un brusque renversement des alliances par la rupture de la grande
alliance des trois principaux pays combat tant le nazisme : la Grande-Bretagne, les États-Unis et l'Union Soviétique.
D'autre part, les Américains, même s'ils recon naissent l'importance du rôle de la résistance dans la libération de
parties étendues du territoire, comme l'intérieur de la Bretagne et tout le sud-ouest, n'envi sagent pas la restauration
de la souveraineté fran çaise. Au contraire, comme en Italie, ils pensent installer une Administration militaire alliée
des terri toires occupés (A.M.G.O.T.). Ce qui les préoccupe le plus, en cet été 1944, c'est de foncer le plus vite
possible, y compris en évitant les villes comme Paris ou Strasbourg, vers l'Allemagne, dans l'objectif d'éviter que la
libération de l'Europe soit le seul fait de l'Armée Rouge. Dans ces conditions, on comprend pourquoi Saint-Nazaire
et sa "Poche" sont un point d'appui essentiel pour les Allemands dans la perspec tive d'une contre-offensive future - et
celle des Ardennes montrera que ce n'est pas une vue de l'es prit - alors que, pour les Américains, c'est un objectif
tout à fait secondaire qui ne mérite ni un détour, ni un retard.
Les forces en présence