
accusé Marie-Antoinette d’avoir fomenté cela, mais enfin Louis XVI en était par-
faitement capable lui-même, il avait une haute conscience de ses fonctions et il
était capable de prendre des décisions. Mais enfin le coup d’arrêt de Valmy est
quand même fondamental.
La Convention était réunie pour voter une nouvelle constitution, (c’est le but
de toute convention : on avait repris le terme de la Convention américaine, en
ajoutant « Convention nationale ») mais curieusement dans la Déclaration des
Droits, on ne trouve pas le mot « nation ». La Déclaration des Droits de 1793, qui
n’a jamais été appliquée, substitue presque partout le mot «peuple ». On ne la
trouve que de façon adjective à l’article 23 « la souveraineté nationale ». C’est
une particularité.
Alors est-ce que le terme de « peuple » était à ce moment là prévalant, surtout
à Paris, dans les sections des sans- culottes? Est-ce que le terme de nation parais-
sait déjà dépassé et nécessitait un approfondissement? Je ne le sais pas, il faudrait
s’adresser à des spécialistes de la Révolution, comme Michel Vovelle, par exemple
qui serait capable de répondre. Cependant, que cela soit en 1789 ou en 1793, la
notion de nation est quand même présente, à travers les biens nationaux, par
exemple, ou la garde nationale.
La citoyenneté représente à la fois un statut de citoyen individuel et aussi,
lorsqu’elle est élargie à la collectivité nationale, c’est ce qu’on appelle le droit des
peuples à disposer d’eux-mêmes, qui va être constamment invoqué par tout le
monde y compris par les adversaires des notions républicaines au XXesiècle. Et là
j’observe qu’on ne dit pas le droit des nations à disposer d’elles-mêmes, on dit le
droit des peuples. Le nom de peuple revient, et peuple c’est à la fois une notion
beaucoup plus affective et beaucoup plus complexe aussi. Un peuple peut être
considéré comme plusieurs nations ou plusieurs éléments nationaux. Ce sont
donc des notions assez difficiles à cerner, et qui ne sont pas complètement iden-
tiques (comme tous les synonymes d’ailleurs).
L’histoire a fait que le Roi de France, (je ne vais pas entrer dans le détail de la
fuite à Varennes etc.) n’a pas accepté sa transformation en symbole national qui
était à la fois un partage de pouvoir et une perte de pouvoir pour lui, et en même
temps une désacralisation. C’est-à-dire que le roi devient un fonctionnaire man-
daté par les élus de la nation et par la nation toute entière, même s’il est hérédi-
taire, et il n’est plus le représentant de Dieu sur Terre, avec tout le décorum et la
symbolique du sacre de Reims qui en fait presque un prêtre. C’est la monarchie
absolue de droit divin qui disparaît.
Et ce refus conduit finalement, à travers diverses péripéties, à la déclaration
de guerre (on en a déjà parlé), à la déposition du roi le 10 août 1792 et à son exé-
cution le 25 janvier 93, dans un contexte dramatique d’invasion et de soulèvement
interne et de risque d’arrêt du processus révolutionnaire.
La Convention proclame la République et il y a de manière quasi congénitale
en France, une liaison entre nation, république et patrie, puisque l’appel à la
2008-2009 - LES IDÉES CONTEMPORAINES
37
NATION RÉPUBLICAINE ET NATION ETHNOCULTURELLE