
LE PATRIOTE RÉSISTANT
N° 916 - février 2017
1010 mémoire
abattus, avec au moins 70 morts. Pour 
la Hongrie actuelle, les chires sont de 83 
cas sur 281 avions détruits, avec 40 morts, 
et l’ensemble de la région fait encore ap-
paraître dans les statistiques un total de 
169 aviateurs dont les corps n’ont pas été 
retrouvés, et dont un certain nombre ont 
certainement été victimes de lynchages. 
Personne n’est en mesure de fournir des 
chires précis d’ensemble sur les cas de 
lynchage commis dans les régions occu-
pées par l’Allemagne nazie, comme sur le 
nombre d’aviateurs ainsi assas sinés. Ces 
actions, non seulement tolé rées, mais en-
couragées par les autorités nazies, n’étaient 
pas forcément mentionnées dans la presse 
locale, et tous les témoins n’étaient pas 
des participants aux exactions. Plus de 
200 cas ont été recensés avec certitude, 
mais on estime parfois le total eectif 
des morts dans ces conditions entre 300 
et 350. L’Institut d’histoire contempo-
raine allemand parle, lui,  d’environ 1 000 
 aviateurs  lynchés.
Dans les années d’immédiat après-guerre, 
on tenta de juger des coupables. Un tri-
bunal militaire américain jugea à Dachau 
dans une relative improvisation quelque 
600 accusés dans 200 procès (les accusés 
de la région « Alpes-Danube » furent ju-
gés à Salzbourg). On a retenu cinq exécu-
tions, 34 peines d’emprisonnement (entre 
quelques mois et la perpétuité) et 24 ac-
quittements. Ici comme ailleurs, les ef-
fets de la guerre froide se rent sentir et 
un relatif oubli intervint par la suite. On 
compte en Allemagne un certain nombre 
de plaques ou de rappels sous une forme 
ou une autre des morts violentes d’avia-
teurs alliés (« qui ont  perdu la vie de  façon 
tragique », par exemple à Borkum). En 
Autriche, on signale un unique rappel 
public, en Hongrie par contre, aucun.
Les nazis avaient été des précurseurs 
dans l’utilisation des bombardements 
aériens contre des populations civiles. 
L’Allemagne a certainement subi sous 
les bombes alliées un sort tragique, et 
cela d’autant plus que les prémisses 
de ces attaques étaient erronées : la 
 volonté de « tenir » n’a jamais faibli au 
sein de la population, et cela, jusqu’à 
la défaite  terrestre totale. Pourtant la 
tentative de détourner le ressentiment 
des foules contre les aviateurs abattus, 
pour protéger les dirigeants nazis, était 
particulièrement vicieuse. Un aveugle-
ment meurtrier et une action criminelle 
supplémentaire à mettre au compte du 
 régime  hitlérien.
JeAn-luc bellAnger
(1) Une étude portant sur la région « Alpes-
Danube » chire la responsabilité de ces 
catégories à plus de 60 %.
n
 Georg HOFFMANN, Fliegerlynchjustiz, 
Gewalt gegen abgeschossene alliierte 
Flugzeugbesatzungen 1943-1945, (Le lynchage 
des aviateurs, La violence contre les équipages 
d’avions alliés abattus, 1943-1945), Ed. Ferdinand 
Schoeningh, Paderborn, 2015, (non traduit).
- Rappel -  Jörg  Friedrich,  Der Brand, Ed. 
Ullstein Heyne List, Munich, 2002 (L'incendie : 
l’Allemagne sous les bombes 1940-1945, Ed. 
de Fallois, 2004).
Une journée particulière 
Châteaubriant
le 22 octobre 1941
Le 22 octobre 1941, 27 résistants, internés et otages sont fusillés à la Sablière à Châteaubriant (Loire-
Atlantique). Depuis, ce site est devenu symbole et lieu de rassemblement. Dans la ferme attenante 
transformée en Musée, une exposition temporaire consacrée cette année à la négation de l’homme dans 
l’univers concentrationnaire nazi accueille le public jusqu’au 14 octobre 2017. Présentation.
Exposition temporaire 
au musée de la Résistance 
de Chateaubriant
La ferme est transformée en Musée 
dont la gestion et la programmation 
est conée aux Amis du Musée de la 
Résistance de Châteaubriant. Ouvert 
en octobre 2001, il a été conçu et réali-
sé par le Musée de la Résistance natio-
nale (MRN) de Champigny-sur-Marne 
(94), appuyé par le Collectif Histoire de 
Châteaubriant mêlant résistants, ayants-
droit, enseignants, passionnés d'histoire 
de la Résistance et d'histoire de la région.
Musée de site, il présente la vie et les résis-
tances dans le camp de Choisel, évoque 
les nombreux camps d'internement, les 
otages à travers des collections présen-
tant les objets des internés, comme la 
pipe de Jean-Pierre Timbaud ou la va-
lise de Guy Môquet, alternant avec des 
photos, des articles de presse, des lettres 
et des aches. Une salle est consacrée à 
la Résistance en Pays de Châteaubriant.
Présentée actuellement, La négation 
de l'homme dans les camps nazis 1933-
1945 est la dixième exposition tempo-
raire créée par les Amis du Musée de 
la Résistance de Châteaubriant, travail 
réalisé en commun avec le réseau des 
Musées de la Résistance.
12 panneaux (cf. page ci-contre) accom-
pagnés d'une cinquantaine d'objets pré-
sente les idées du nazisme – racisme, 
exclusion – les premiers camps créés 
par Hitler dès 1933 pour y enfermer les 
opposants politiques, les dénonciations 
des camps en France et en Allemagne 
alternent, mettant en valeur images et 
textes connus ou inédits. Le transport 
des déportés en Allemagne, l'arrivée au 
camp dans un système concentration-
naire pensé pour désorienter, déshuma-
niser, le génocide juif sont aussi évoqués, 
comme la déportation des enfants. La 
vie quotidienne et le travail dans les 
camps font l'objet de deux panneaux, 
de même que la dénonciation faite par 
Marie-Claude Vaillant-Couturier dans ses 
 articles de presse et ses  photos  publiées 
avant-guerre.
Les sanctions et les jugements contre 
les responsables nazis sont au centre 
des actes d'accusation lors du procès 
de Nuremberg en 1945-1946 qui contri-
buent à une notion nouvelle : le crime 
contre l'humanité. Après l'ouverture des 
camps en 1945, la réexion sur la nature 
des crimes nazis, la  capacité à écouter 
les témoins apportent des éléments 
sur la violence politique et les notions 
de reconstruction et de résilience.
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L
e 20 octobre 1941 le Feld Kommandant 
Karl Hotz est exécuté à Nantes par 
un groupe de trois résistants.
Les Allemands décident en représailles 
de fusiller 50 otages deux jours plus 
tard et le même jour, le 22 octobre 1941, 
16 otages sont fusillés à Nantes (44), 
5 otages au Mont-Valérien à Suresnes 
(92), près de Paris, et 27 autres hommes 
à Châteaubriant (44).
L'exécution des 50 otages – en fait 48 – 
provoque une immense émotion dans 
le pays et dans le monde. La tragédie est 
très vite connue par le  récit Le témoin des 
martyrs rédigé par Louis Aragon, écrit, 
imprimé, distribué clandestinement et 
diffusé par les radios de Londres et de 
Moscou. Le Général de Gaulle au mi-
cro de la BBC depuis Londres propose 
un garde-à-vous  national le 31 octobre.
L'exécution, une des premières fusillades 
collectives en France, a une résonnance 
extraordinaire à laquelle les Allemands 
ne s'attendaient pas.
Le camp de Choisel 
à Châteaubriant
Avant la Seconde Guerre mondiale, 
Châteaubriant est une petite ville 
bretonne, sous-préfecture de Loire-
Inférieure, dominée par son château, 
importante par ses usines de matériel 
agricole et sa gare. Au printemps 1940, 
la cité vit l'exode de milliers de migrants 
avec ses militaires et civils. Avec l'ar-
rivée des troupes allemandes nazies, 
45 000 militaires français sont prison-
niers, entassés dans quatre camps, puis 
transférés en Allemagne.
Un seul camp y est conservé, le camp de 
Choisel, quartier situé à deux kilomètres 
du centre-ville de Châteaubriant. Fin 
avril 1941, y sont internés les premiers 
Résistants : ouvriers des arsenaux, marins 
bretons arrêtés comme communistes ou 
militants de la CGT. En mai, arrivent les 
« Parisiens », 54 puis 100 hommes, tous 
communistes, puis 14 gaullistes de la ré-
gion. En septembre, viennent s'ajouter, ve-
nus des prisons parisiennes, 87 hommes 
et 46 femmes. En octobre 1941, ils et elles 
sont 600 interné(e) s dans les baraques 
du camp de Choisel.
C'est en début d'après-midi, le mercre-
di 22 octobre 1941, que les Allemands 
réunissent les 27 Résistants-otages dans 
la baraque 6, pour leur remettre une 
feuille de papier et une enveloppe. Leurs 
 dernières lettres bouleversantes et d'une 
grande humanité seront bientôt connues 
de tous, notamment celle écrite pour sa 
famille par Guy Môquet, 17 ans.
Aujourd'hui disparu, le camp a fait 
l'objet d'une nouvelle sculpture en pierre 
inaugurée le 22 octobre 2016 pour se sou-
venir de ce lieu d'enfermement organi-
sé et géré par Vichy, pour y interner les 
« Indésirables et terroristes » pendant 
l'Occupation.
La sablière-carrière 
des fusillés à Châteaubriant
Ce mercredi 22 octobre 1941, le temps 
est superbe et c'est jour de marché à 
Châteaubriant.
Les 27 internés et otages sont conduits 
à la Sablière, située à la sortie de la ville, 
à deux kilomètres du centre, pour y être 
fusillés. Le sinistre convoi traverse la 
ville et les otages, répartis par groupe 
de neuf, menottes aux mains, en trois 
camions, chantent l'Internationale et la 
Marseillaise.
A la carrière les Allemands ont  planté 
neuf poteaux et 90 soldats allemands 
 forment le peloton d'exécution, qui se 
déroule en trois salves à 15 h 50, 16 h et à 
16 h 10. Les otages ont tous refusé d'avoir 
les yeux bandés et les mains liées. Ils 
meurent en chantant.
Les habitants de Châteaubriant, le len-
demain, malgré les risques de répression, 
viennent eurir les lieux d'exécution à la 
Sablière. Depuis, chaque année en  octobre, 
une foule considérable vient perpétuer le 
souvenir. Ainsi le 23  octobre 2016,  plusieurs 
milliers de jeunes et d'anciens, venant de 
partout, sont présents pour commémo-
rer le 75e anniversaire des 27 fusillés de 
Châteaubriant et  armer par leur présence 
leur délité à la mémoire de la Résistance.
La Sablière-Carrière des Fusillés, pro-
priété de l'Amicale de Châteaubriant-
Voves-Rouillé-Aincourt (autant de noms 
de camps), est aujourd'hui un site histo-
rique classé. L’Amicale en est proprié-
taire depuis 1945. Progressivement, elle 
a acquis le terrain et les parcelles avoisi-
nantes, lançant une souscription en 1950, 
pour ériger une sculpture monumentale 
en pierre, disposer 27 stèles en pourtour du 
site an d'informer les  visiteurs – 12 000 
par an en moyenne – et aménager la ferme 
en Musée de la Résistance en 2001.
JeAn-PAul le mAguet
Administrateur au Musée de la Résistance 
de Châteaubriant • Membre du Conseil 
scientifique du Musée de la Résistance 
nationale (MRN) • Conservateur honoraire 
du Patrimoine.
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