L’architecture ne peut suivre une
quelconque formule. Chaque projet
relève d’une série de couches d’in-
formation dont il faut absolument
tenir compte. Et c’est précisément
le travail de l’architecte : reconnaître
ce qui est important et l’inclure dans
la dynamique du projet.
Où placer vous l’expérience de l’usager ?
C’est une information essentielle.
Quand j’évoque la culture d’un lieu,
la communauté qui y vit, c’est direc-
tement en relation avec l’usager.
L’usager n’est pas toujours le com-
manditaire, c’est pourquoi il faut en
tenir compte de façon objective et
indépendante.
Y a-t-il encore une place pour
l’avant-garde, dans un monde où
la temporalité est réduite au mini-
mum. Comment être en avance
quand le temps cherche à nous rat-
traper sans cesse ?
Fondamentalement, je crois qu’une
condition d’avant-garde peut encore
exister. Je ne me suis jamais senti à
l’aise dans le cercle de confort établi,
dans des situations réputées confor-
tables. Je préfère toujours explorer les
limites, au-delà de la zone de confort.
C’est à la limite des choses que l’on
devient intéressant, c’est là aussi que le
temps à plus de mal à nous rattraper.
Et comment parvenez-vous, le plus
souvent, à réaliser concrètement ce
que vous avez imaginé sur papier ?
C’est à mettre au crédit de nos
clients, qui ont la capacité de nous
accompagner dans cette démarche.
Le client lambda ne viendra pas
nous voir, il ne se sentira pas à l’aise
avec nous. C’est pour cela que cette
profession est si complexe. Le client
et l’architecte doivent pouvoir «
coïncider » dans cette attitude à
vouloir plus que la chose com-
mune. Il y a peu de chance que vous
rencontriez jamais autour de cette
table un cadre moyen d’une socié-
té de grande distribution. Ce qui
ne veut pas dire que l’architecture
plus expérimentale n’a pas de fon-
dement structurel ou économique.
C’est seulement qu’elle demande
plus d’implication, et de la compli-
cité de la part du client, pour qu’il
accepte lui aussi de sortir de sa zone
de confort.
Quelle est votre manière de travailler ?
Nous travaillons toujours en équipe.
C’est une équipe complexe, compo-
sée de personnalités multiples, qui
ont chacune quelque chose à propo-
ser. Nous essayons toujours de nous
éloigner des évidences, pour tenter
de voir jusqu’où nous pouvons aller.
Parfois nous devons rebrousser che-
min, mais jamais pour revenir au
point initial. Et comme cela nous
avançons. Pas à pas.
Qu’en est-il de votre identi cation
dans les diff érents projets ?
Je crois me connaître très bien. J’ai
toujours senti en moi une curio-
sité mêlée de rébellion. Et je crois
éperdument à la capacité de l’ar-
chitecture comme forme révéla-
trice d’une époque, d’une culture
ou d’une communauté. Les archi-
tectes dessinent les temps et les
lieux. L’architecture va bien plus loin
que l’objet : la ville est architecture,
le paysage est architecture, et c’est
le cas pour tous les milieux phy-
siques que nous occupons. Nous
vivons une époque de révolution
passionnante. Ce monde en chan-
gement apporte la nouveauté tous
les jours. En ce qui me concerne, je
ne cherche pas à créer des objets.
Je ne crois pas que plus l’objet est
déroutant plus il est intéressant, ce
qui semble être beaucoup le cas
aujourd’hui. Je crois plus à l’archi-
tecture comme expérience, comme
mise en relation, ce qui m’implique
d’emblée beaucoup plus. Améliorer
les conditions de vie, mais aussi
les qualités personnelles, intellec-
tuelles, émotionnelles de l’individu
est pour moi un enjeu beaucoup
plus important.
A quel moment faites-vous interve-
nir les matériaux dans le projet ?
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