Diplôme de Comptabilité et Gestion Économie • Cours • Applications • Entraînement à l’UE5 M édia BBii A. BERTHOMIER - P. BRAULT - A DERRAY - J. GEORGEL H. JAHIER - M. MELLOUL ©FontainePicard Avant-propos Cet ouvrage inédit est le fruit de la collaboration de 6 enseignants en charge de cet enseignement dans différents établissements préparant au DCG. Chaque acheteur de la version papier accède gratuitement à la version « bimédia » avec des enrichissements (voir ci-dessous). L’étudiant est actif dans son apprentissage : une synthèse de cours réactive (l’auteur l’invite à répondre à un bref questionnement régulièrement), des QCM, des propositions de reportages économiques liés à de nombreux sujets, certains corrigés. Les auteurs ont conçu l’ouvrage pour offrir tous les outils efficaces à la réussite de l’épreuve n° 5 d’économie du DCG : les applications de chaque chapitre, une partie spéciale entraînement, toutes les fiches de méthodologie entraînent aux 3 types de travaux de l’épreuve, les auteurs communiqueront aussi en cours d’année universitaire 2015/2016 des liens vers des ressources d’actualisation qui seront actifs dans la version « bimédia ». Votre ouvrage bimédia (avantage réservé aux acheteurs d’un ouvrage étudiant papier) : • Retrouvez au dos de la couverture votre mot de passe personnel pour entrer sur le site • Adresse http://bimedia.fontainepicard.com • Téléchargez gratuitement votre application bimédia • Télécharger votre ouvrage sur votre ordinateur et/ou votre tablette Androïd. • L’ouvrage une fois téléchargé est utilisable sans connexion Internet (sauf les liens vers des sites). 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La révolution industrielle 2. L’entre-deux-guerres Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 3 - De l’après-guerre à nos jours………………………………………………………………………………………………………… 1. La croissance des économies occidentales 2. Crise et mutations 3. Le monde contemporain Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… PARTIE 2 - L’ÉCONOMIE DE MARCHÉ : SON FONCTIONNEMENT ET SES IMPERFECTIONS Chapitre 4 - Le circuit économique acteurs et opérations………………………………………………………………………………… 1. Les agents économiques 2. Les opérations des agents économiques 3. Les outils d’analyse de l’activité économique Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 5 - Le comportement des acteurs……………………………………………………………………………………………………… 1. Analyse microéconomique du comportement du consommateur 2. Analyse microéconomique du comportement du producteur Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 6 - La construction des marchés et la formation des prix…………………………………………………………………… 1. La formation des prix sur un marché de concurrence pure et parfaite (CPP) 2. La formation des prix sur les marchés imparfaits 3. Les défaillances du marché et le rôle de l’État Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 7 - L’analyse de la consommation et de l’épargne……………………………………………………………………………… 1. La place de la consommation et de l’épargne dans l’économie 2. La mesure de la consommation et de l’épargne 3. Les déterminants de la consommation et de l’épargne Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 8 - L’analyse de l’investissement……………………………………………………………………………………………………… 1. Définition, mesure et caractéristiques de l’investissement 2. Les déterminants de l’investissement 3. Les effets de l’investissement Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 9 - La croissance et le suivi de l’activité économique………………………………………………………………………… 1. Définition et mesure de la croissance 2. Les déterminants de la croissance 3. Les effets et les irrégularités de la croissance 4. Le suivi de l’activité économique par l’analyse conjoncturelle Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… ©FontainePicard 5 16 20 24 25 30 31 32 33 39 40 42 43 46 47 50 51 54 54 56 57 61 61 66 67 71 72 78 79 82 83 88 89 93 94 104 3 PARTIE 3 - LE FINANCEMENT ET LA MONDIALISATION DE L’ÉCONOMIE Chapitre 10- La monnaie………………………………………………………………………………………………………………………………… 1. Définition, fonctions et formes de la monnaie 2. La création monétaire et la masse monétaire 3. Les politiques monétaires Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 11- Le financement de l’économie……………………………………………………………………………………………………… 1. Les circuits de financement 2. Les marchés financiers Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 12 - Les fondements des échanges internationaux……………………………………………………………………………… 1. Les fondements des échanges internationaux 2. Les principales caractéristiques du commerce mondial Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences…………………………………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 13 - La division internationale du travail et les stratégies internationales des entreprises…………………… 1. Le pouvoir de régulation du commerce international 2. Stratégie des firmes multinationales et nouvelle division internationale du travail Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 14 - Marché des changes et système monétaire et financier international…………………………………………… 1. Le marché des changes 2. Les principales évolutions du système monétaire et financier international 3. Une instabilité croissante du système monétaire et financier international 4. Une régulation du système monétaire et financier nécessaire Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… PARTIE 4 - POLITIQUES PUBLIQUES ET RÉGULATION DE L’ÉCONOMIE Chapitre 15 - Les différents niveaux institutionnels de l’intervention publique…………………………………………………… 1. L’intervention de l’État dans l’économie 2. La montée en puissance des collectivités territoriales 3. Le rôle économique de l’Union européenne Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 16 - L’emploi……………………………………………………………………………………………………………………………………… 1. La mesure et les caractéristiques du chômage 2. Les explications du chômage 3. Les politiques de lutte contre le chômage Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 17 - La répartition des richesses………………………………………………………………………………………………………… 1. La répartition primaire : formation des salaires et inégalités 2. La répartition secondaire : mécanismes et limites Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… Chapitre 18 - La politique industrielle et la réglementation concurrentielle……………………………………………………… 1. La politique industrielle 2. La réglementation concurrentielle et politique de la concurrence Applications : Contrôle de connaissances……………………………………………………………………………………… Contrôle des compétences……………………………………………………………………………………… Les questions de cours de l’épreuve UE5………………………………………………………………………………………… 105 111 112 120 121 125 126 129 131 139 140 150 151 157 159 168 169 179 182 190 191 195 197 206 207 211 212 218 219 225 228 234 235 238 239 244 Sujet complet commenté………………………………………………………………………………………………………………………………… 245 Sujet 1 de dissertation avec proposition de corrigé ……………………………………………………………………… 249 Fiches méthodologique Fiche n° 1 : Les fiches de synthèse………………………………………………………………………………………………… Fiche n° 2 : L’épreuve d’économie du DCG……………………………………………………………………………………… Fiche n° 3 : Les questions de cours………………………………………………………………………………………………… Fiche n° 4 : Le commentaire de documents…………………………………………………………………………………… Fiche n° 5 : La dissertation économique………………………………………………………………………………………… Fiche n° 6 : Grille d’évaluation de la dissertation…………………………………………………………………………… 4 253 255 257 259 261 264 ©FontainePicard Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux Les grands courants de la pensée économique CHAPITRE 1 « Si toute connaissance débute avec l’expérience, cela ne prouve pas qu’elle dérive toute de l’expérience ». Emmanuel Kant Quels sont les principaux courants de la pensée économique ? Quels sont les liens de filiation ou d’opposition entre ces courants ? Au début de son Histoire de l’analyse économique, Joseph A. Schumpeter s’interroge sur les raisons d’étudier l’histoire de la pensée économique. À ses yeux cela permet non seulement de tirer des leçons utiles pour le présent, mais également en comprenant les démarches de l’esprit humain, de faire surgir des idées nouvelles. Dans l’exposé de cette histoire, respectant globalement la continuité de sa construction, nous exposerons schématiquement la pluralité des voies explorées à partir des paradigmes constitutifs. 1. Les précurseurs Initialement, les idées économiques ont été produites dans le champ de la philosophie (Aristote, Platon se préoccupent d’économie domestique, de gestion de la cité) puis, dans celui de la religion (Saint Thomas d’Aquin, se montrant favorable au « juste prix », au juste salaire…). Entre le XVIe et le XVIIIe, mercantilistes et physiocrates échafaudent des pensées de plus en plus autonomes, mais ce n’est qu’à partir de la fin du XVIII siècle que l’on peut véritablement parler « d’école de pensée ». Il ne s’agit plus de décrire et de comprendre les choix des divers agents économiques, mais d’élaborer des modèles afin de guider l’acte politique. A - Les mercantilistes Contemporains de la colonisation du nouveau monde et de l’émergence des « États nation », les mercantilistes cherchent à développer la puissance de leur souverain et de son royaume grâce à l’accumulation de richesses. L’État se doit de développer la richesse du royaume en adoptant « les bonnes pratiques de la pensée mercantiles ». • Les bullionistes (Espagne) préconisent l’accumulation de métaux précieux par le pillage du nouveau monde. • Les Colbertistes promeuvent l’industrie et le commerce. • En Hollande et en Angleterre l’enrichissement se réalise au travers du commerce maritime. B - Les physiocrates Ils s’opposent aux mercantilistes en se faisant les apôtres du libéralisme et en réduisant la création de richesse à la production agricole. Ils sont hostiles à toutes réglementations et réclament la libre circulation des grains « laissez faire, laissez-passer ». Les flux entre les trois classes, tableau économique de François Quesnay Subsistances Paiement Classe productive agriculteurs Classe des propriétaires Paiement de la rente Subsistances Paiement Matières premières, ouvrages… Objets de luxe Paiement Classe stérile autres actifs • Ils font une analyse globale, sous forme de circuit. 1758, « Le tableau économique de François Quesnay » décrit la circulation des richesses dans une nation : les richesses produites dans l’agriculture sont à l’origine d’un circuit qui irrigue la nation. • Dans un autre ordre, Turgot formule la loi des rendements non proportionnels dans l’agriculture. Paiement Lorsque les interrogations sur l’enrichissement de la nation se font plus pressantes, la réflexion économique se développe de façon plus autonome. De grands courants de pensée économiques, parfois antagonistes, apparaissent et apportent des explications aux situations économiques d’une époque. ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 5 2. Les classiques • Le contexte historique est celui de la révolution industrielle et de l’essor du capitalisme. • Marx désignait par cette appellation « les classiques » les économistes qui étudiaient les relations réelles de production dans la société bourgeoise. • Ces économistes partagent des idées communes sur la valeur-travail, l’ordre naturel, l’harmonie des intérêts, le libre-échange, l’état stationnaire… • Ils croient en l’existence de lois économiques intemporelles et universelles et cherchent à les identifier. Ils perçoivent les phénomènes économiques comme interdépendants et en proposent une théorie générale. • Bien que reprenant certains éléments de la théorie classique, Karl Max proposera une critique radicale. A - Le courant libéral classique • Adam Smith, suite à la parution en 1776 de son essai « Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations », est considéré comme le fondateur de l’école libérale anglaise. • Dans ce premier traité général de la discipline, il a repris et synthétisé nombre d’idées économiques antérieurement exprimées d’une manière fragmentaire. • Les classiques ne représentent pas un courant unifié. La diversité de leurs analyses inspirera les penseurs néoclassiques du XIXe siècle autour de la notion de libéralisme et Karl Max autour de celle de la valeur travail. 1 Les postulats L. e libéralisme économique suppose l’existence d’un ordre naturel qui tend à conduire le système économique automatiquement vers l’équilibre. Comme le propose Hobbes dans le « Léviathan », le système économique requiert l’instauration de la liberté du commerce avec la constitution d’un état gendarme uniquement destiné à veiller à ce que la loi de la nature soit respectée. ? Pour les classiques, à quelles fonctions régaliennes doit se limiter un État ? Pour Adam Smith la poursuite par un individu de son intérêt particulier concourt à l’intérêt collectif. Une main invisible (ordre naturel) guide les passions individuelles vers le bien de tous. ? Par quelle phrase célèbre A. Smith illustre ce propos ? De même les chefs d’entreprise, grâce à un calcul économique, maximisent les profits des firmes qu’ils dirigent. 2 Le marché, vecteur de la régulation économique • Le marché, lieu des échanges entre agents économiques, résulte de la division du travail : l’homme ne peut vendre que ce que les autres ne possèdent pas et, inversement, cherche à acquérir ce qu’il n’a pas. • Au-delà du savoir faire productif et de la possession des ressources nécessaires, Adam Smith justifie la division du travail, par l’amélioration de la productivité du travail conduisant à une plus grande richesse globale. • David Ricardo montre qu’un pays doit se spécialiser dans les secteurs où sa productivité, comparée à celle des autres pays, est relativement la plus élevée. Cette loi des coûts comparatifs légitime, en partie, le commerce international au motif que la richesse globale des pays participants s’accroît. Le marché est pour les classiques l’élément moteur de la régulation économique. S’il peut librement fonctionner, il est un instrument idéal pour la circulation de l’information nécessaire aux choix de chaque agent économique et conduit à la fois à la plus grande satisfaction pour tous et à la meilleure allocation possible des ressources, c’est-à-dire à leur plein-emploi. • Les valeurs s’échangent contre des valeurs, ce qui signifie que les prix n’expriment que des valeurs attribuées par chaque partie de l’échange. • La monnaie n’a qu’une fonction d’étalon des valeurs. Elle facilite l’échange, mais n’ajoute rien à celui-ci. La monnaie est neutre, « elle n’est qu’un voile ». Se pose alors la mesure de la valeur. •A dam Smith distingue la valeur d’usage (liée à l’utilité) et la valeur d’échange qui exprime le pouvoir d’obtenir d’autres biens. •C omme David Ricardo, nombre d’économistes classiques adhèrent à une théorie de la valeur travail. Toutes les marchandises sont le produit d’un travail et n’auraient aucune valeur sans ce travail dépensé à les produire. Aussi ce qui compte dans l’échange ce sont les quantités de travail mises en œuvre. Les prix de marché à long terme expriment donc les quantités de travail incorpo6 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard rées dans la production des biens, y compris le travail nécessaire à la production des machines. À court terme, les prix peuvent connaître des fluctuations autour de cette valeur de long terme en raison de déséquilibres entre les offres et les demandes. • Pour Jean Baptiste Say, ces déséquilibres ne peuvent être durables, car selon sa fameuse loi des débouchés, « l’offre crée sa propre demande », les produits s’échangeant contre des produits. Une offre nouvelle s’accompagne d’une distribution supplémentaire de revenus. L’augmentation de pouvoir d’achat permet ainsi d’écouler la production nouvelle. Les crises de surproduction ne sont donc pas concevables si les mécanismes du marché fonctionnent. 3 Un état stationnaire Dans son essai sur le principe de la population (1798), Malthus montre que la « population croît à un rythme géométrique, alors que les subsistances n’augmentent qu’à un rythme arithmétique ». La limitation de la population est alors inévitable, soit par la répétition de famines, soit, pour Malthus, par la limitation des naissances dans les catégories sociales défavorisées. • Les classiques s’interrogent non seulement sur les manières d’augmenter les richesses produites mais aussi sur celles de les répartir. • Ricardo distingue trois types de revenus. - Le salaire qui doit fournir aux salariés et à leur famille les moyens de subsister. Il dépend donc du prix des subsistances nécessaires à la conservation de la vie. - La rente qui rémunère la mise à disposition par les propriétaires fonciers de surfaces agricoles. - Le profit qui récompense le capital engagé avec risque. • L’antagonisme entre les salariés, les propriétaires fonciers et les capitalistes font que la répartition du revenu global est nécessairement conflictuelle. • Dans l’industrie la concurrence conduit à la disparition des producteurs les moins efficaces. • Mais rien de tel dans l’agriculture. Pour augmenter la production agricole, il est nécessaire de mettre en culture des terres de moins en moins fertiles. Les coûts de production sur ces terres sont plus importants que ceux des bonnes terres et induisent une augmentation des prix agricoles. • Les propriétaires des bonnes terres bénéficient alors d’une rente foncière. Cependant, cette augmentation inéluctable de rente contraint à augmenter les salaires et, par conséquence, à diminuer les profits. • À terme, cette réduction des profits conduit à un arrêt de l’investissement. Il ne peut plus y avoir d’accumulation du capital puisqu’aucun capital ne peut générer de profit. La production stagne, la population a atteint son maximum, la nation connaît un état stationnaire. Ricardo est donc farouchement hostile au protectionnisme car seul le commerce international, à défaut de progrès de la productivité agricole, peut permettre d’accroître les profits en fournissant des subsistances à un meilleur prix en raison de l’avantage comparatif de chaque pays. B - Une critique : le marxisme Philosophe, économiste, sociologue, historien et homme engagé, Karl Marx propose une analyse critique globale du capitalisme et de ses crises. Nous ne présenterons ici que les principaux éléments nécessaires à la compréhension de la dimension économique du marxisme. Influencé par Ludwig Feuerbach, Marx a une conception matérialiste de l’histoire : les hommes font leur propre histoire sur la base de conditions données héritées du passé. Parmi celles-ci, les conditions de la reproduction matérielle de la société sont déterminantes. 1 L’exploitation des prolétaires • Marx reprend à son compte la perception de socialistes français comme Saint Simon qui considéraient que parmi les clivages de la société, l’antagonisme entre les bourgeois et les prolétaires est le plus économiquement déterminant : la classe bourgeoise détenant le capital exploite le prolétaire qui ne dispose que de sa force de travail. • Il considère que les capitaux engagés (K) dans la sphère productive se divisent en capital constant C (valeur des moyens de production au sens large : bâtiments, machines, matières premières…) et capital variable V (salaires représentant la valeur de la force de travail mise en jeu dans la production). K=C+V • Pour Marx, seul le capital variable (donc le travail) est source de valeur. • L’exploitation des prolétaires par les capitalistes provient du fait que la force de travail utilisée n’est pas rémunérée au prorata de sa valeur. • Comme exprimé par les classiques, la force de travail étant une marchandise comme une autre, sa valeur est égale à la quantité de travail socialement nécessaire à sa production, c’est-à-dire, le temps que requiert la production de biens de subsistance nécessaire à sa reconstitution. La rémunération versée au prolétaire n’a donc aucun lien avec la valeur créée, elle n’est que fonction du prix des moyens de subsistance. L’« armée industrielle de réserve » (les chômeurs) fait que, même à long terme, les salaires ne peuvent s’écarter de ce minimum vital. Les salaires étant toujours inférieurs à la valeur créée, le capitaliste récupère donc la différence. ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 7 Si P est la valeur d’un bien, PV la plus-value et VA la valeur ajoutée par le travail incorporé, on obtient : P = C + VA ou encore P = C + V + PV On peut alors définir un taux de plus-value : PV/V Le volume de plus-value (PV) produit par la force de travail, divisé par le capital variable (V) utilisé pour la produire, exprime le niveau d’exploitation du salarié, car cette plus-value est accaparée par le capitaliste. ? Que signifie alors le rapport PV/(C + V) ? Pour accroître la plus-value, le capitaliste peut contraindre le prolétaire au surtravail : • par une augmentation du temps de travail (et donc un plus grand dégagement de travail gratuit, c’est-à-dire, non payé à l’ouvrier) (plus-value absolue), • par une diminution du temps de travail nécessaire pour produire l’équivalent du minimum de subsistance (plus-value relative, grâce au progrès technique, aux importations). 2 Crises du capitalisme L’ambition de Marx est d’analyser le fonctionnement du capitalisme et de montrer qu’il est fondé sur une contradiction insoluble : les forces productives reposent sur une socialisation croissante, mais les moyens de production sont aux mains d’un nombre de plus en plus réduit de capitalistes. Son objectif est de construire une théorie du capitalisme qui puisse scientifiquement fonder la révolution socialiste comme nécessité historique. Pour comprendre la logique de la circulation des marchandises et du capital, il raisonne comme les physiocrates en termes de circuit : • Dans le circuit simple des marchandises (MAM : échange Marchandises contre Argent et, par la suite, argent contre Marchandises) - Un individu vend un bien dont il n’a pas besoin, pour en acquérir un autre fortement désiré. - Ici, la monnaie n’a pas de rôle en soi. Le but ultime est de consommer mieux et plus. - Marx revient sur les propos des classiques relatifs à l’origine de la valeur des choses. Il retient la notion de valeur d’échange (résultant de la comparaison entre les biens). - Pour mesurer cette valeur d’échange qui se doit d’être objective pour être partagée, Marx reprend la théorie de la valeur travail de Ricardo. La valeur d’un bien est fixée par la quantité de travail incorporé en lui, c’est le temps socialement nécessaire pour le produire. Dans un tel circuit, l’échange se résume à un troc. • Dans le circuit du capital (AMA) il n’en est pas de même, - car ici la raison est d’acheter des marchandises pour les revendre plus cher, - l’intention n’est plus alors de consommer, mais de s’enrichir, d’accumuler du capital. Ce mode de production capitaliste n’est plus guidé par une utilité sociale (production de biens de consommation), mais par la recherche de profits. La répétition de ce cycle, via l’exploitation des prolétaires, conduit à l’accumulation du capital. - La concurrence pousse les entreprises à accumuler du capital constant dans l’espoir d’obtenir un avantage temporaire sur les concurrents. Comme la plus-value est créée par le capital variable (le travail direct), le taux de profit vient à diminuer : de l’ancien taux de profit : [PV/(C + V) ] on passe à un taux de profit : [pv/(C + v) beaucoup plus faible. - le capital constant augmente, il passe de C à C - au contraire le capital variable diminue, il passe de V à v - la plus-value créée est plus faible, on passe de [PV à pv] • L a substitution du capital (C) au travail induit un chômage qui lui-même entraîne une baisse de la consommation et, par voie de conséquence, une crise de surproduction dans le secteur des biens de consommation. •Les crises du système capitaliste sont à la fois des crises de sous-consommation de biens et des crises de surproduction. • Ces dernières se résorbent par une baisse des prix et la faillite des entreprises les moins performantes. •L es crises sont inhérentes au système capitaliste, elles en assurent la régulation, mais aussi, en provoquent l’instabilité, jusqu’au moment où une crise finale l’emportera. •L a théorie de l’impérialisme (Lenine, Rosa Luxembourg) explique l’absence actuelle d’une telle crise finale : le capitalisme peut retarder la baisse du taux de profit par la conquête de nouveaux marchés, qui servent à écouler les biens de consommation qui ne trouvent pas preneur en Occident. •M ais l’étendue de ces marchés est limitée et leur conquête exacerbe la concurrence entre les pays impérialistes, aggravant les risques de guerre (allusion à la première guerre mondiale). Repoussant la révolution, l’impérialisme ne saurait l’empêcher. 8 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard 3. Les néoclassiques Le qualificatif de « néoclassiques » a été formulé à l’origine par Thorstein Veblen pour désigner des économistes qui ont une forte propension à mathématiser, à scientifiser l’économie. Comme les classiques, les néoclassiques sont dans l’ensemble des partisans du libéralisme économique. Leur préoccupation principale est celle de la formation des prix au travers du fonctionnement des marchés. Des classiques aux néoclassiques Prémisses du libéralisme Aristote Bentham Hobbes Physiocrates Locke École classique A. Smith J.B. Say Loi des débouchés Ricardo Théorie de la valeur travail, rente foncière Malthus Loi de la population Les fondateurs du néoclassique L’école de Vienne C. Menger Böhm - Bawerk L’école de Lausanne Léon Walras (l’équilibre général) L’école anglaise W.S. Jevons A. Marshall Les néoclassiques cherchent à réhabiliter les conclusions libérales des classiques malmenées dans les faits et par les marxistes. Aussi sont-ils conduits à reformuler les hypothèses de base afin de pouvoir construire une théorie plus robuste. A - La reformulation des hypothèses de base Cette reformulation concerne avant tout le concept de valeur. • Ce n’est pas la quantité de travail nécessaire à sa fabrication qui fonde la valeur d’un bien, mais l’utilité qu’il procure à celui qui le consomme. La valeur d’un bien devient alors subjective, car c’est l’utilité ressentie par le consommateur qui fonde la valeur d’un bien. ? Pourquoi les néoclassiques doivent-ils renier le concept de valeur travail des classiques ? Ce consommateur, mais aussi par symétrie, le producteur sont incarnés dans leurs comportements au travers d’un être fictif « l’homo œconomicus ». Ce dernier est dans ses agissements totalement rationnel. Consommateur, il cherche à maximiser sa satisfaction, et son profit s’il est producteur. Les agents agissent chacun indépendamment, à partir des informations révélées par les marchés. Ces informations ne sont pertinentes que si les marchés sont parfaits, c’est-à-dire parfaitement concurrentiels. ? Quelles peuvent être les conditions d’une concurrence pure et parfaite ? ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 9 B - L’analyse néoclassique À partir de ces hypothèses, les néoclassiques ont construit une théorie de l’allocation des ressources rares, à partir d’une formalisation mathématique importante. Consommateur, homo œconomicus, agit suite au calcul à la marge suivant : • Au fur et à mesure que la consommation d’un bien augmente, la satisfaction qu’apporte chaque unité supplémentaire décroît. •S ous contrainte d’un budget limité, la stratégie consiste à égaliser les utilités marginales, sinon le consommateur regretterait d’avoir gaspillé ses possibilités d’achat à acquérir des biens moins utiles que ceux négligés. Producteur, homo œconomicus, va accepter de produire • Jusqu’au moment où le coût marginal est égal au prix du marché. • Au-delà toute unité supplémentaire produite entraînera des pertes. Aussi, lorsqu’on laisse fonctionner librement le marché, on obtient à la fois la plus grande satisfaction pour tous les agents et la meilleure allocation des ressources c’est-à-dire leur plein-emploi. Prix Demande Offre A. Marshall raisonne sur un seul marché. Il agrège les fonctions d’offre et de demande individuelles. La confrontation de ces fonctions définit un prix et une quantité d’équilibre. Le marché permet d’éliminer les scories (entreprises non performantes et rentes de situation). Il s’agit ici d’un équilibre partiel. Prix d’équilibre Quantité d’équilibre Quantité • L. Walras considère que chaque marché pris isolément est l’élément de base « d’un vaste marché général » et qu’un équilibre général sera atteint pour l’ensemble de l’économie. Wilfredo Pareto a démontré que l’équilibre général défini par L. Walras est aussi un optimum. • Si une modification intervient sur l’un des marchés, elle se répercute sur les autres marchés, qui compensent la variation de façon à maintenir l’équilibre. •L ’idée d’autorégulation chère aux classiques est ici reprise. La condition à respecter est l’existence d’une concurrence pure et parfaite. C’est un idéal vers lequel il faut tendre pour assurer une allocation optimale. •P our les néoclassiques, les crises sont dues à des événements extérieurs qui perturbent le bon fonctionnement des marchés, car en situation de concurrence pure et parfaite elles se résolvent d’elles-mêmes. •A ussi toute intervention des pouvoirs publics est condamnable dans la mesure où elle perturbe le fonctionnement autorégulateur du marché. 10 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard 4. Les keynésiens Le capitalisme n’a pas été emporté, comme le prévoyait Marx, par la crise de 1929. Cependant, la vision libérale de l’autorégulation par le marché s’est trouvée sérieusement battue en brèche. . our ces économistes libéraux, le chômage qui résulte de cette crise n’est que la conséquence d’un manque d’adaptabilité du marché P de l’emploi. Il suffit que les salaires baissent, pour que les prix baissent à leur tour et que l’activité économique connaisse à nouveau une phase de prospérité. J. ohn Maynard Keynes montre que, psychologiquement, il est impossible que les salaires nominaux puissent baisser. C’est ce que l’on appelle « l’effet de cliquet ». L’analyse keynésienne est une analyse en termes de circuit macroéconomique qui s’attache à montrer que l’agrégation des comportements microéconomiques ne détermine pas un équilibre de plein-emploi : l’offre ne crée pas comme chez J.B Say sa propre demande, mais dépend de la demande effective. Également pour les keynésiens, la monnaie n’est pas un voile, mais exerce une influence sur l’économie réelle. A - Le circuit keynésien La demande effective est la demande anticipée par les chefs d’entreprise. Ces décideurs ajustent le niveau de production aux sollicitations de la demande effective, et le niveau de la production détermine à court terme le niveau d’emploi. Circuit keynésien de la demande réelle Demande autonome (État, étranger) Anticipation de la demande réelle Demande Consommation Demande effective Revenu Emploi Investissement Production Ce niveau d’emploi ne correspond pas obligatoirement au niveau de plein-emploi, et cela d’autant plus si les entrepreneurs sont timorés et réalisent des prévisions pessimistes. Un chômage involontaire est possible. B - La nécessaire intervention de l’État • Keynes montre que les déséquilibres entre offre et demande peuvent être durables. • Il remarque qu’une partie des revenus des ménages peut être thésaurisée en particulier sous forme d’épargne de précaution. ? Que signifie « propension moyenne à consommer » ? Comment varie-t-elle ? • Dès lors, puisque l’intégralité des revenus distribués ne revient pas sous forme de demande aux entreprises, il peut y avoir une crise de surproduction durable. • Les déséquilibres keynésiens ne sont pas des déséquilibres de marché, mais des déséquilibres entre des flux monétaires. • Les réajustements ne peuvent se réaliser qu’à partir des quantités globales (et non des prix comme chez les néoclassiques). Dans sa « Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie » publiée en 1936, Keynes indique qu’il suffit d’augmenter le revenu national, soit en lançant un programme d’investissements publics, soit en versant aux ménages des prestations sociales supplémentaires. Ce concept de soutien de la demande, à la base des politiques keynésiennes, sera largement appliqué après la seconde guerre mondiale ; il est pour une bonne part dans le développement économique des trente glorieuses. • L’enchaînement est alors le suivant : les ventes des entreprises s’accroissent ; elles recherchent de la main-d’œuvre supplémentaire et de nouveaux équipements. Grâce à cette augmentation initiale des revenus, le chômage se résorbe et le produit national augmente sous l’impulsion de la consommation des ménages : c’est l’effet multiplicateur. ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 11 5. La pensée économique contemporaine Le contexte économique et social des nations a changé. Les économistes ne peuvent élaborer de solutions aux problèmes contemporains à partir des analyses économiques traditionnelles. Il convient alors de rénover les concepts, voire de les renouveler. A - Le renouveau de la pensée libérale .Depuis le début des années 70, on assiste à un renouveau des théories libérales. Les néo-libéraux considèrent que la mise en place des politiques keynésiennes, loin de corriger les déséquilibres, les aggravent au contraire. Les principaux courants néo-libéraux sont : 1 L’école de l’économie de l’offre • Cette école de pensée s’oppose à la théorie keynésienne de la demande et considère que c’est l’offre qui crée la demande, et non l’inverse. Elle reprend en cela la loi des débouchés de J.B. Say. • Le meilleur moyen d’obtenir sur le moyen et long terme une croissance économique élevée est d’aider les entreprises à produire davantage de biens et de services, de les inciter à entrer sur de nouveaux marchés et de lever le plus possible les freins fiscaux et réglementaires qui entravent leur développement. • Aussi toute politique visant à augmenter la demande au détriment de l’offre est récessive. • Dans cette optique, les politiques de redistribution sont néfastes : prélever des revenus sur ceux qui ont la plus forte propension à épargner et les distribuer à ceux qui ont la plus forte propension à consommer diminue l’épargne, et donc, l’investissement. • Par ailleurs, la distribution de prestations sociales déresponsabilise les individus, les incite à l’oisiveté en leur conférant un statut d’assisté. L’État ne corrige pas les imperfections du marché, mais opère un effet d’éviction : le financement du budget ponctionne l’économie privée. Un désengagement de l’État est donc impératif. Courbe de Laffer Recettes fiscales Une illustration célèbre des apports de cette école est la courbe de Laffer. Celui-ci considère qu’une pression fiscale excessive décourage l’offre des agents économiques. Ils sont de moins en moins motivés à accroître leur activité pour un supplément de revenu après impôt de plus en plus faible. A RMax À partir d’un certain seuil d’imposition (Rmax), les recettes fiscales de l’État diminuent. R 0 ? Pression fiscale f TA F Le niveau de recettes fiscales OR peut être obtenu avec un taux de pression fiscale faible (f) ou fort (F). 100 % À quoi correspond le point A ? 2 L’école monétariste • Cette école s’est constituée dans les années 1960 à l’université de Chicago autour de Milton Friedman à partir d’une critique libérale de l’interventionnisme keynésien. Les thèses de cette école ont trouvé un écho grandissant dès lors que, dans un contexte de crise du système monétaire international et de stagflation (années 70), les politiques keynésiennes se révélaient inaptes à restaurer à la fois le plein-emploi, la stabilité des prix et l’équilibre extérieur. •P our les monétaristes, l’inflation est exclusivement un phénomène monétaire. Dès lors qu’il dépasse le rythme d’augmentation de la production, tout accroissement de la quantité de monnaie dans l’économie engendre une augmentation proportionnelle des prix. •C ette inflation est le dérèglement économique le plus grave : elle réduit le pouvoir d’achat de certains acteurs et modifie en conséquence leur comportement. Une hausse des revenus nominaux ne permet de relancer l’économie qu’à très court terme, car les agents économiques ne sont victimes de l’illusion monétaire que pendant un temps limité. Ils se rendent compte que leur pouvoir d’achat n’augmente pas, la hausse des prix (« impôt masqué » pour M. Friedman) qui permet de réajuster la quantité de monnaie à la production, les privant des effets de la hausse des revenus. • L ’augmentation de la quantité de monnaie peut provoquer à court terme un mouvement d’expansion économique diminuant le chômage, mais elle est toujours à long terme source de perturbation durable du bon fonctionnement du système économique. 12 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard Il est nécessaire de contrôler la masse monétaire pour éviter l’inflation. Il faut donc substituer aux actuelles politiques monétaires laissées à la discrétion des gouvernements une règle monétaire intangible fixant un taux de croissance de la masse monétaire égal au taux de croissance à long terme du PIB. 3 L’école des choix publics • James Buchanan et Gordon Tullock remettent en cause le bien-fondé de la production de biens et de services publics par l’État. Ils considèrent que dans cette sphère de l’économie non marchande, les règles de l’économie marchande s’appliquent : les individus ne sont pas bipolaires, c’est-à-dire, rationnels et optimisateurs dans le monde marchand et irrationnels et altruistes dans le monde non marchand. • Dans le champ de l’action publique, les offreurs sont les hommes politiques et les fonctionnaires, qui comme tout agent économique cherchent à maximiser leur utilité. • Les choix, en matière d’investissements publics, résultent de marchandages politiques et sont soumis aux pressions de groupes sociaux organisés. Or l’agrégation des choix individuels est souvent incohérente et les décisions des dépenses publiques sont facilitées par le fait que leurs avantages sont concentrés sur un petit nombre de bénéficiaires et les inconvénients dispersés sur un grand nombre de contribuables. • Les hommes politiques pour se faire élire ou réélire auront tendance pour satisfaire leur électorat ou, du moins, les groupes sociaux les plus influents, à engager de nouvelles dépenses. • De même, les fonctionnaires chercheront à éviter toute diminution de budgets publics. Pour éviter une telle progression des dépenses et de la réglementation publique, Buchanan et Tullock préconisent de supprimer la possibilité de réaliser des déficits budgétaires et de mettre les services publics en situation concurrentielle. ? Lequel de ces deux économistes a été prix Nobel d’économie ? 4 La nouvelle économie classique Cette école est parfois appelée école des anticipations rationnelles en raison de l’importance qu’elle a donné à cette hypothèse. Sur la base de ce paradigme, les auteurs de ce courant (Robert Lucas, Thomas Sargent, Robert Barro…) se sont attachés à montrer l’inefficacité des politiques conjoncturelles. • L’anticipation rationnelle n’est pas nécessairement l’anticipation exacte de l’avenir. Elle n’est rationnelle que par rapport à l’information disponible. Si l’information est partielle ou de mauvaise qualité, même des agents économiques rationnels feront de mauvaises anticipations. • Face aux diverses décisions de politiques économiques, les agents vont mobiliser toute l’information disponible pour en anticiper les conséquences. Certains vont se tromper, mais la majorité va parvenir à des conclusions conformes à ce que prévoit la théorie économique. • Ainsi, face à une politique monétaire visant à favoriser l’expansion, majoritairement les agents économiques anticiperont une hausse des prix. Les salariés négocieront alors des augmentations de salaires nominaux destinés à maintenir leur pouvoir d’achat. En l’absence de variation du salaire réel, les entrepreneurs ne modifieront ni les effectifs de salariés, ni le volume de la production. • De la même façon, R. Barro montre que si les pouvoirs publics annoncent un déficit budgétaire, les agents économiques anticiperont rationnellement une augmentation future de leurs impôts destinés à rembourser les emprunts levés pour financer le déficit budgétaire. Dans ces conditions, les ménages anticiperont la baisse de leur revenu disponible futur, ce qui les conduira à épargner le surcroît de revenu disponible d’aujourd’hui pour éviter une baisse future de leur niveau de vie. En conséquence, l’accroissement de la demande issue de l’accroissement de la demande publique est immédiatement annulé par la réduction de la demande privée pour un montant similaire (équivalence ricardienne) et le déficit budgétaire n’a pas d’effet d’expansion. • Pour ces économistes, l’État est impuissant à réguler l’économie, contrairement aux espoirs des keynésiens. Ils préconisent, que la politique monétaire, afin qu’elle échappe à toute manipulation politique électoraliste, soit menée par une banque centrale indépendante. ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 13 B - Le prolongement de l’analyse keynésienne 1 Une synthèse des modèles néoclassiques et keynésiens Le modèle IS-LM élaboré par John Hicks et complété par Alvin Hansen synthétise les éléments essentiels des pensées néoclassique et keynésienne. Il associe des variables réelles et monétaires dans la détermination de l’équilibre économique d’ensemble : Le modèle IS - LM Taux d’intérêt LM IS • Le principal apport de ce modèle réside dans la détermination simultanée, en économie fermée, du revenu national et du taux d’intérêt à partir d’une interaction entre les marchés des biens et services (IS) et le marché de la monnaie (LM). io Revenu de production • Il constitue le support conceptuel des politiques monétaires et budgétaires des années d’après-guerre qui s’expriment par le « stop and go » : une politique budgétaire expansive conduit à des effets inflationnistes qu’il convient de limiter par une politique monétaire et une restriction budgétaire. Il s’en suit un chômage que l’on cherche à enrayer par des politiques monétaires et de relance budgétaire, etc. Ro 2 Une nouvelle macroéconomie keynésienne • Cette nouvelle macroéconomie keynésienne se fonde pour partie sur les postulats keynésiens traditionnels, mais en certains aspects elle les désavoue au profit d’une vision proche de la nouvelle économie classique. • Comme Keynes, ces économistes considèrent que la monnaie n’est pas neutre et qu’un chômage involontaire est possible. • Mais contrairement à Keynes, ils admettent que les agents économiques sont rationnels et que les niveaux de la production et de l’emploi sont déterminés par la confrontation de l’offre et la demande sur les marchés. • Aussi si ces économistes ne s’opposent pas par principe aux politiques conjoncturelles, ils les préconisent avec retenue. Cette nouvelle économie keynésienne (NEK) n’est pas un courant de pensée uniforme. Deux écoles parmi d’autres en montrent toute l’intelligence : a - Les « nouveaux keynésiens » George Akerlof, Joseph Stiglitz, Olivier Blanchard… contestent l’explication keynésienne de la non-autorégulation des marchés au profit d’une vision plus microéconomique : •S ur de nombreux marchés, on constate des asymétries d’information qui induisent des phénomènes d’anti-sélection et, par là même, conduisent à une non autorégulation des marchés. Un des acteurs en sait plus que l’autre, en conséquence de quoi le prix en est affecté et le marché déréglé. •S tiglitz prend l’exemple du marché du crédit : les banquiers estiment toujours difficilement les risques encourus lors des octrois de prêts, alors que les emprunteurs connaissent assez bien leur capacité à faire face aux échéances financières. Pour se prémunir de ce risque de défaillance des débiteurs, les banquiers pratiquent alors des taux d’intérêt élevés. Mais ces taux risquent de dissuader les « bons emprunteurs » qui méritent au regard du risque encouru des taux plus faibles. Les banquiers sélectionnant involontairement les clients à risques, doivent augmenter encore leurs taux et leurs conditions d’octroi. À terme, le marché est déséquilibré, car les banquiers rationnent injustement le crédit. b - L’école du déséquilibre Devant la persistance du sous-emploi, Edmond Malinvaud, Jean Paul Benassy, Axel Leijonhufvud remettent en cause l’efficacité et l’existence même des mécanismes d’ajustement par les prix. Du fait de la concentration capitalistique dans de nombreux secteurs de l’économie, de nombreux marchés sont en situation oligopolistique, ce qui crée une rigidité des prix à la baisse. Mais pour E. Malinvaud, la raison principale de cette rigidité réside dans le coût des transactions : faire jouer la concurrence nécessite de multiples et fréquents changements de fournisseurs. Également, les changements de prix ont un coût : il faut renouveler les catalogues, renégocier les contrats avec les acheteurs…. Autant de dépenses et de temps nécessaires à une flexibilité des prix. Il en advient que la demande est relativement inélastique par rapport au prix et que les offreurs sont moins incités à les faire varier. 14 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard Considérons un excès d’offre sur le marché des biens et sur celui du travail : Déséquilibre sur les marchés des biens et du travail Marché des biens Marché du travail P S O O P’ S’ D D Q ? Q À partir de la situation des marchés du travail et des biens et des services ci-dessus décrite, montrez, comme ces économistes le pensent, que le chômage peut être involontaire. C - Une reformulation des thèmes marxistes : exemple de la théorie de la régulation Les principaux représentants de cette école sont des Français : Michel Aglietta, Robert Boyer, Alain Lipietz. Ils visent à expliquer les raisons du brutal ralentissement de la croissance dans les années 1970 et les dysfonctionnements l’accompagnant. Pour eux, les crises économiques majeures sont des crises de mutation entre un mode de régulation ancien et caduc qui ne permet plus la croissance économique et un nouveau type de régulation susceptible de résoudre les causes profondes de la crise. • S’inspirant de la tradition marxiste, des méthodes de la nouvelle histoire (Fernand Braudel) et de la macroéconomie keynésienne, ces auteurs distinguent la régulation concurrentielle de la régulation monopolistique. • Au XVIIIIe, le mode de régulation est concurrentiel : les conditions de la concurrence sont pratiquement réunies, la faiblesse des syndicats et le peu d’engagement des pouvoirs publics assurent une bonne flexibilité des salaires et des prix. • Après la seconde guerre mondiale, les concentrations d’entreprises engendrent des situations de monopoles ou d’oligopoles. Le rapport salarial se modifie en raison de négociations collectives. Les gains de productivité conduisent à des augmentations importantes des salaires et des revenus qui sont autant de sources de croissance. La régulation se fait alors de moins en moins par le marché. • Face à la crise de croissance des années 70, les économistes préconisent la formation d’un nouveau rapport salarial fondé, d’une part, sur une collaboration entre les salariés et les entreprises et, d’autre part, sur l’institutionnalisation d’un mode de régulation mondial qui limiterait la concurrence à outrance entre les pays. Pour certains, l’intégration européenne apparaît comme une solution. version M édia BBii ©FontainePicard Actualisez vos connaissances : « Les 3 prix Nobel d’économie décernés à des auteurs français » « Le prix Nobel d’économie 2015 » (actualisation à venir dans votre ouvrage bimédia) Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 15 Applications Contrôle de connaissances QCM : choisissez la bonne réponse. 1. Adam Smith est : a) un entrepreneur anglais de l’industrie du coton b) un Écossais et professeur de morale c) un pasteur anglican 6. L’équilibre de Pareto est un équilibre : a) partiel b) général c) efficace 2. Jean Baptiste Say est un économiste : a) classique anglais b) néoclassique américain c) classique, français, frère de Louis Say créateur à Nantes de l’entreprise Beghin-Say 7. Le principe de « destruction créatrice de l’innovation » est énoncé par : a) Alfred Marshall b) Joseph Schumpeter c) JM Keynes 3. Karl Marx voit dans le capitalisme : a) un système social fondé sur l’exploitation du travail des uns au profit de ceux qui possèdent les moyens de production b) un moyen de réduire la misère née de la révolution industrielle c) un moyen de dégager de la plus-value pour le prolétaire 8. La « demande effective » selon JM Keynes est : a) la demande anticipée par les chefs d’entreprises b) la demande potentielle de monnaie c) la demande d’encaisses réelles 4. Pour les néoclassiques, la valeur d’un bien dépend : a) de la quantité de travail nécessaire à obtenir ce bien b) de son utilité c) du taux de change 5. La révolution marginaliste : a) est un courant de pensée marxiste b) se fonde sur l’utilité de la dernière unité produite ou consommée 9. La théorie du revenu permanent est celle de : a) Max Weber sociologue allemand b) Milton Friedman, monétariste américain c) James Tobin, keynésien américain 10. En économie, les orthodoxes sont : a) dans la lignée d’une école de pensée b) des radicaux c) à la recherche de nouveaux dogmes et paradigmes Complétez les tableaux. Mercantilisme Pays Mercantilisme Caractéristiques Industrialiste Bullioniste (bullion = lingot) Commercial Les précurseurs : école ou courant de pensée ? Auteurs École de pensée Courant de pensée Manufactures royales Loi des rendements non proportionnels Le tableau économique en 1758 16 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard Applications 1 - Quelle était la position officielle de Colbert ? 2 - Quelle filière a-t-il réorganisée ? Le colbertisme La marine française doit louer ou acheter des navires étrangers en cas de guerre. La construction d’un grand vaisseau nécessite d’abattre jusqu’à 4 000 chênes centenaires. Or, à cette époque, il n’existe pas de politique forestière digne de ce nom. Le défrichage et la surexploitation des forêts royales ont provoqué une baisse régulière de la surface boisée. La forêt s’étend alors sur 13 millions d’hectares. Le bois de chêne étant insuffisant, on en importe essentiellement d’Italie et d’Albanie. Le pin, utilisé pour le gréement, provient d’Europe du Nord. En cas de reprise des hostilités, la maîtrise des routes du bois devient stratégique… Colbert, par ordonnance de 1669 scelle une reprise en main vigoureuse des forêts françaises. Un quart de la surface des forêts doit être préservé, l’âge d’abattage des arbres est reculé à vingt ans, 32 baliveaux à l’hectare sont conservés. L’abattage est réglementé. Les résultats ne tardent d’ailleurs pas à se faire sentir : les recettes des forêts royales passent de 50 000 livres en 1662 à 1 million vingt ans plus tard. Les chantiers navals sont réorganisés pour que la fabrication d’un navire prenne un rythme industriel. La réalisation de maquettes de bateaux permet de standardiser leur construction. Dans le dessein d’en augmenter la performance, on fait appel aux mathématiciens et aux géomètres. Le personnel est formé dans les écoles navales, on emploie aussi de la main-d’œuvre étrangère. Au besoin, on a recours à l’espionnage pour percer les secrets de fabrication des ennemis. L’effort est considérable. Rien qu’en 1673, vingt-six navires et six galères sortent des chantiers de Rochefort, qui emploient alors 20 000 personnes. Dix ans auparavant, ce bourg ne comptait que 500 âmes. En 1677, la marine est en possession de 300 vaisseaux et galères. C’est ainsi que la France a maintenu une gestion rigoureuse de son patrimoine forestier. L’héritage légué par Colbert se retrouve dans une administration des forêts efficace, de riches massifs forestiers et une conception de l’économie faisant de l’État un acteur à part entière. Jacques-Marie Vaslin - Lemonde.fr, 27/04/2011 Indiquez les caractéristiques du mercantislime français dans le tableau suivant. Les caractéristiques du mercantilisme français Période But Objectifs Moyens 1 - Que signifie « physiocratie » ? 2 - En quoi François Quesnay et ses disciples se sont-ils opposés aux idées mercantilistes ? 3 - Comment les physiocrates conçoivent-ils la richesse et que veut dire « stérile » ? 4 - Que montre le tableau économique des physiocrates ? 5 - En quoi les physiocrates annoncent-ils l’école classique ? En 1764, quel illustre économiste écossais rend visite à Paris à François Quesnay ? Les physiocrates « La nation est réduite à trois classes de citoyens : la classe productive, la classe des propriétaires et la classe stérile. La classe productive est celle qui fait renaître par la culture du territoire les richesses annuelles de la nation… Un grain de blé permet d’obtenir plusieurs grains de blé supplémentaires après récolte ». Tableau économique, 1758 François Quesnay ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 17 Applications Complétez le tableau en référence à l’ « Essai sur le principe de la population » paru en 1798 et précisez son auteur. Loi de la population Auteur : Rythme de la croissance De la population De la production alimentaire Dans le tableau, indiquez la formulation de la loi des débouchés et sa controverse. Loi des débouchés Auteur et détracteur Formulation Possibilité ou non d’une crise globale de surproduction Distinguez le libéralisme philosophique du libéralisme économique. 1 - De quel auteur Ricardo s’est-il inspiré dans la théorie de la rente différentielle ? 2 - Expliquez le schéma ci-après. 3 - Donnez deux arguments en défaveur de la rente. Schématisez l’enchaînement du processus. Coûts de production La rente différentielle selon D. Ricardo Prix du blé sur le marché CP4 CP3 CP2 CP1 Niveau de qualité NQ1 NQ2 NQ3 NQ4 des terres Coûts de production sur des terres de qualités différentes Q1 (très bonne) à Q4 (mauvaise) 18 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard Applications Complétez le tableau. Économiste A. Smith D. Ricardo T. R. Malthus J. B. Say John Stuart Mill Nationalité Ouvrage majeur Date Sources d’inspiration Théorie de la valeur d’une marchandise Vision du monde 1 - Définissez la notion de valeur travail. 2 - La valeur travail est-elle une donnée objective ? 3 - Que signifie « Armée de réserve », « paupérisation croissante » ? 4 - Qu’est-ce que « l’homo œconomicus » ? 5 - Citez 3 raisons, motifs de détention de la monnaie selon Keynes. ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 19 Applications Contrôle des compétences Application 1 Les théories du libre-échange Théorie de l’avantage absolu (A. Smith) Soit 2 pays : le Portugal et l’Angleterre ; soit 2 produits : le vin et le drap. Angleterre Portugal Une unité de vin 200 heures de travail 100 heures de travail Une unité de drap 100 heures de travail 200 heures de travail Les deux pays vivent en autarcie Nombre d’heures de travail Pour une unité de vin Pour une unité de drap Pour une unité de vin Pour une unité de drap Angleterre Portugal L’Angleterre Le Portugal Les deux pays se spécialisent et échangent Nombre d’heures de travail Angleterre Portugal Théorie de l’avantage comparatif (D. Ricardo) Une unité de vin 120 heures de travail 80 heures de travail Une unité de drap 100 heures de travail 90 heures de travail 1 - Complétez le tableau dans les deux hypothèses : autarcie ou spécialisation. 2 - Déterminez le taux d’échange entre le vin et le drap dans le cas où les deux pays se spécialisent. Conclusion selon la théorie de l’avantage absolu ? 3 - Quel est le rapport d’échange entre une unité de vin et une unité de drap selon D Ricardo ? 4 - Quel est l’intérêt pour le Portugal et pour l’Angleterre ? Conclusion selon la théorie de l’avantage comparatif ? 20 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard Applications Application 2 Les externalités Le théorème de Ronald Coase : Prix Nobel 1991 Selon la loi, le tapage nocturne interdit de jouer de la trompette de 22 h à 7 h du matin. Mais rien ne nous empêche de trouver un arrangement avec nos voisins si l’on veut organiser un petit concert privé. Il y a plusieurs possibilités : les inviter ou bien, s’ils ne partagent pas nos goûts musicaux, les indemniser pour la gêne occasionnée. Si le gouvernement abolit l’interdiction, il redevient possible de jouer de la trompette toute la nuit. Alors, nos voisins vont nous supplier de stopper le flot de décibels et peuvent aller jusqu’à acheter notre silence. Le théorème de Coase : Économiste britannique (1910-2013) « Quelle que soit la législation relative au tapage nocturne, la quantité de bruit dans un immeuble sera la même ». Si le tapage est interdit : le tapageur achète le droit de tapager. S’il est permis, les voisins négocient le droit au silence. Le résultat est le même en termes de bruit ; la seule différence est le sens de l’indemnisation : • Trompettiste Voisins • Trompettiste Voisins En 1960, Ronald Coase reprend la question des externalités développée par Pigou. Plus généralement, le théorème énonce qu’une externalité peut être résolue par le mécanisme du marché si les droits sont bien définis et si les coûts de transaction sont limités. La solution est efficace car flexible et dans notre exemple : • si on peut décaler dans la journée, on le fait plutôt que payer un dédommagement ; • si on ne peut pas décaler, on achète leur indulgence. Toutefois, quand les pollueurs sont nombreux, la négociation bilatérale devient impossible. Il faut organiser un véritable marché même si le mécanisme est le même. Ainsi, le marché européen du CO2 créé en 2005. […] D’après la chronique « Les Idées Claires » d’Agnès Bénassy-Quéré, extraite des « Matins » de France Culture, diffusée le 12/09/2013 1 - Définissez la notion d’externalité négative. 2 - À quel courant appartient Ronald Coase ? 3 - Comment propose-t-il de corriger les externalités négatives liées aux émissions de CO2 ? ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 21 Applications Application 3 Le dilemme inflation chômage La courbe de Phillips est à l’origine basée sur des statistiques au Royaume-Uni entre 1861 à 1957. En 1958, l’économiste néozélandais A. W. Phillips publie un article montrant une relation statistique observée négative et forte. NAIRU : Pour les Anglo-Saxons Non Accelerating Inflation Rate of Unemployment, le taux de chômage naturel, incompressible qui est atteint lorsque les anticipations inflationnistes sont stables. Paul Samuelson et Robert Solow keynésiens de la synthèse interprètent aussi en 1960 la « Courbe de Philipps ». Il existe un dilemme entre l’inflation et le chômage que doit prendre en compte la politique économique. Interprétation (1958) : Liaison négative et forte Réinterprétation (1960) : Robert Lipsey (keynésien) Taux de variation des salaires nominaux Taux de variation du niveau de prix U* Taux de chômage U* Taux de chômage S1 S2 Réinterprétation de Samuelson et Solow (école de la synthèse néoclassique) en 1960 Taux de variation du niveau des prix Critique de Friedman (monétariste) et de Lucas (école des anticipations rationnelles) Taux d’inflation E Courbes d’indifférence entre inflation et chômage Contrainte inflation-chômage D C B p/p A U U* Taux de chômage % S3 22 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux Taux de chômage S4 ©FontainePicard Applications « Un coup de dé jamais n’abolira le hasard » Stéphane Mallarmé … Curieusement, l’impossibilité de tester a été reconnue depuis longtemps par la plupart des économistes. On peut toujours dire a posteriori pourquoi on s’est trompé. En général, on déborde d’explications. Mais on ne peut pas dire : « demain, le CAC 40 sera à tant », « la croissance sera à tant », ni même – bien que le phénomène « grands nombres » atténue l’erreur – « le chômage sera de tant ». Toute proposition économique repose sur des conjectures complexes emboîtées qui ne sont jamais directement testables… Il faut, pour tester, désemboîter les conjectures ». Les économistes raisonnent « toutes choses égales par ailleurs », c’est-à-dire en appréhendant un phénomène de façon isolée, indépendamment de toute autre manifestation humaine. « Toutes choses égales par ailleurs » est une hypothèse héroïque, énorme. Par exemple : « Si la guerre d’Irak n’a pas de conséquences graves, si les Français ne changent pas de comportement, si demain est de la même farine qu’aujourd’hui, si l’état d’esprit des entrepreneurs ne bouge pas, si la météo est clémente, s’il n’y a pas de phénomène politique majeur, alors, on peut raisonnablement penser que la demande d’automobiles ne changera pas ». Voilà un beau raisonnement « toutes choses égales par ailleurs » qui équivaut à peu près à une lapalissade. Les économistes peuvent-ils faire mieux ? Eh bien non ! Jamais ? Jamais. Ceux qui prétendent le contraire sont des charlatans, ou des experts (c’est à peu près la même chose). Bernard Maris « Antimanuel d’économie », Éditions BREAL, www.editions-breal.fr La fascination des maths C’est un tournant essentiel dans la pensée économique. Jusqu’alors, celle-ci ne se distinguait que peu des analyses politiques et on avait tendance, au XIXe siècle, à qualifier de « publicistes » tous ceux qui s’interrogeaient sur le contenu et les règles de la bonne société. Ceux qui s’intéressaient plus spécifiquement à l’analyse économique dénommaient celle-ci « économie politique » : l’économie de la cité. À partir de la révolution marginaliste, on parle de « science économique ». Le soubassement de l’analyse n’est plus moral (rappelons-nous : Adam Smith était professeur de morale), c’est-à-dire appuyé sur une certaine conception de la société, du bien-être et des rapports sociaux, il devient scientifique (entendons par là que l’outil mathématique devient déterminant) et cherche à optimiser le fonctionnement de la société. Et comme il fallait un critère – que cherche-t-on à optimiser ? –, on se rabat sur l’utilité, c’est-à-dire le profit pour le producteur et le bien-être pour le consommateur. Malheureusement, comme on ne sait mesurer ni l’utilité ni le bien-être, cette nouvelle approche de l’économie débouche tout naturellement sur la maximisation de la production censée améliorer le bien-être des uns et le profit des autres. La mathématisation de l’économie et le culte de la croissance sont les enfants naturels de la « révolution marginaliste ». Denis Clerc « Comprendre les économistes » © Alternatives Économiques La démarche scientifique Observation des faits Induction Vérification Hypothèses Déduction Théories, lois, modèles 1 - Quelle corrélation est déduite en S1 et S2 ? 2 - À quoi correspond U* sur la courbe en S1 et S2 ? 3 - Expliquez l’analyse dominante des années 60 (en S2 et S3) et pourquoi il y a un dilemme inflation-chômage. 4 - Expliquez la critique des monétaristes (fin années 60) et de l’école des anticipations rationnelles (années 70). 5 - L’économie est-elle une science ? ©FontainePicard Chapitre 1 - Les grands courants de la pensée économique 23 Applications Application 4 Synthèse Néoclassiques Keynésiens Le renouveau Libéral Auteurs fondateurs Keynésien : Synthèse Approches Concepts de base nouveaux keynésiens Chômage déséquilibre Rôle de la monnaie Croissance endogène Comment parvenir à l’équilibre École de la régulation Rôle de l’État Concevez ou complétez un tableau récapitulatif selon le modèle ci-dessus. Les questions de cours de l’épreuve UE5 Dans une réponse structurée, montrez en quoi la théorie de Keynes et le monétarisme se distinguent. 24 Partie 1 - Grands courants de pensée et principaux faits économiques et sociaux ©FontainePicard