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Il importe selon les conclusions de la rencontre des
sherpas d’éviter les mesures protectionnistes ou les
barrières commerciales internationales, qui privent
précisément les pays émergents des effets bénéques
de la croissance économique sur le développement.
La rencontre d’avril devrait à ce titre viser à instaurer
une meilleure compréhension des chaines de valeurs
mondiales dans l’objectif de favoriser les échanges
internationaux. L’objectif de lutte contre la corruption
s’inscrit dans la même logique. Il convient ici de souligner
que si la position de la Chine est claire au point de vue des
principes, ses pratiques commerciales ne sont pas sans
ambiguïtés notamment du point de vue des restrictions
aux exportations, discutées dans la partie ci-dessous
consacrée au prix des matières premières.
Amélioration de l’architecture nancière
internationale
La question de la réforme de l’architecture nancière
mondiale est étroitement liée à celle de la croissance. Les
conclusions de la rencontre des ministres des Finances
n février, mais aussi celles du quatrième Sommets des
BRICS qui s’est tenu à New Delhi les 28 et 29 mars,
donnent un éclairage sur les objectifs des émergents dans
le cadre du G20 et à plus long terme.
Leur but n’est pas d’adopter une posture de confrontation
vis-à-vis des pays développés, mais de revendiquer
davantage d’inuence dans le cadre d’une plus
grande ouverture des institutions nancières
internationales. Entraînés par le Brésil, les pays émergents
entendent mettre n à la tradition qui consiste à placer un
responsable américain à la tête de la Banque mondiale
et un Européen à la direction du FMI. Dans le cadre
du prochain remplacement du directeur de la Banque
mondiale, Robert Zoellick, aucun candidat potentiel ne
fait cependant à ce jour l’objet d’un consensus entre les
pays émergents. Concernant la gouvernance du FMI,
ces derniers s’accordent en faveur du maintien du
système de quotas et l’actualisation de sa réforme,
prévue depuis 2010. Leur rôle devrait s’accroître dans le
cadre de l’accord auquel sont parvenus en mars les Etats
membres du FMI, pour une révision du mode de calcul des
quotes-parts et des droits de vote au sein de l’institution.
Si les modalités de cette réforme, censée être mise en
œuvre au plus tard en janvier 2013, ne font pas l’objet d’un
consensus lors de la rencontre d’avril puis à l’assemblée
de printemps du FMI, elles seront à nouveau discutées lors
du sommet du G20.
En termes de nancement, alors que le FMI a besoin de
renforcer sa puissance nancière de 500 à 600 milliards
de dollars pour gérer la crise européenne, les pays
émergents exigent de peser davantage et sont divisés
sur la question de l’augmentation de leurs contributions.
Le G20 de Cannes n’avait pas permis de trouver un
accord sur ces points, tout en soulignant l’urgence de
la situation. Par rapport à l’année dernière, la position
de la Chine et celle du Brésil se sont assouplies. Les
deux gouvernements s’accordent sur la nécessité d’un
plan à deux voies, soutenu également par la présidence
mexicaine, qui consisterait à augmenter le nancement
du FMI parallèlement aux avancées attendues en
Europe. Les avancées de l’euro-zone sur le second plan
de sauvetage de la Grèce offrent davantage de latitude
aux pays européens, mais leurs partenaires conditionnent
leur aide au renforcement des pare-feux nanciers et aux
efforts sur les fonds de stabilité européens pour atténuer
les prochaines crises. A court terme, l’option privilégiée
par les émergents est l’augmentation des ressources
du FMI via des accords d’emprunts bilatéraux et des
conventions d’achat de billets.
A plus long terme, les BRICS se sont accordés en
mars sur l’objectif d’établir une nouvelle banque de
développement, signe d’une prise de conscience de
leurs interdépendances mais aussi de leur volonté de
s’émanciper de la tutelle de la Banque mondiale tout
en assurant la stabilité de leurs économies. La nouvelle
institution servirait à nancer des projets de développement
et d’infrastructures dans les pays concernés, et pourrait
jouer le rôle de réserve de prêts en cas de crise globale
grâce à sa capacité d’émettre de la dette convertible
susceptible d’être achetée par les banques centrales des
Etats membres. Lors de la rencontre de Delhi, la Chine s’est
néanmoins montrée prudente sur ce projet porté par l’Inde,
soulignant que sa mise en place supposerait de trouver un
équilibre entre des Etats membres de poids différents et
impliquerait la mise en place d’un cadre de coopération
plus formel. La déclaration nale du sommet des BRICS
se contente donc de commander des études de faisabilité
sans lancer formellement le projet. Les dirigeants chinois
ont quant à eux pris soin de souligner que l’objectif n’est
pas d’abandonner les institutions globales, mais de les
améliorer pour les rendre plus représentatives et répondre
aux exigences posées par le développement économique
des pays émergents.
Renforcement du système nancier et de l’inclusion
nancière
Au niveau des Etats, l’objectif d’inclusion nancière
élaboré lors du sommet de Séoul en 2010 constitue l’une
des principales revendications des pays émergents,
qui la considèrent comme une condition nécessaire au
développement de leur croissance économique. L’enjeu
est d’ouvrir un accès aux services nanciers de base
(épargne, emprunt, versements, assurance, transferts
d’argent) pour les deux milliards d’adultes (dont 260
millions de Chinois) qui n’en bénécient pas encore, et
de permettre aux petites et moyennes entreprises de ces
Etats d’emprunter pour se développer. Ces dernières sont
en effet considérées comme les moteurs de la croissance,
et leur développement est censé réduire les inégalités
de revenus qui constituent l’un des principaux enjeux
pour les émergents, dont l’économie se développe sans
que toutes les catégories de population aient accès à la
consommation.
Plusieurs pays émergents ont déjà mis en œuvre leurs
propres initiatives. La Chine est en phase de réalisation
d’un plan en trois ans destiné à assurer l’accès de ses
villages aux services nanciers. Le Mexique s’efforce
d’assurer une inclusion nancière totale pour 2012. L’Inde
a quant à elle pour objectif d’assurer en 2012 l’accès aux
services nanciers de 500 000 villages non couverts ou
mal couverts par ces services. L’enjeu demeure cependant
de trouver un cadre général pour la mise en œuvre de ces
initiatives, et de mobiliser des fonds pour les nancer. En
ce sens, le Mexique s’est notamment engagé à favoriser la
mise en œuvre de règles de transparence sur les produits,
pour assurer la protection des consommateurs.