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Position de la
Chine et des pays
émergents sur les
priorités mexicaines
au G20, en vue du
sommet de Los Cabos
(18 et 19 juin 2012)
note
En associant neuf pays développés, l’Union européenne
et dix pays émergents, le G20 instaure un nouvel échelon
dans la gouvernance mondiale. Il entérine l’idée d’une
interdépendance nécessitant d’aborder les enjeux
mondiaux de manière concertée. En 2012, la présidence
mexicaine du G20 conrme l’installation des pays
émergents au cœur de la gouvernance mondiale. Le
groupe est présidé pour la seconde fois par un pays non-
membre du G8 (après la Corée du Sud en 2010) et pour
la première fois par un pays émergent. La présidence
mexicaine a à cœur d’imprimer cette spécicité à travers
les priorités qu’elle a établies en vue du Sommet de Los
Cabos, prévu les 18 et 19 juin 2012, et dans sa manière
de mener les débats.
La dénition des pays émergents, outil économique et
nancier converti en objet politique, ne fait pas l’objet
d’un consensus. Ces pays diffèrent en effet par leurs
systèmes politiques et leurs poids démographiques
ou économiques, mais partagent certaines
caractéristiques (croissance forte, économie axée sur
les exportations), problématiques (inégalités, accès
des plus démunis aux biens de consommation, dés
environnementaux) et revendications (développement
et croissance, meilleure représentativité des
organisations internationales, non-ingérence). Leurs
priorités divergent néanmoins, et ne recoupent pas
nécessairement les frontières traditionnellement dressées
entre pays du Nord et pays du Sud.
Cette note résume les principales positions de la Chine et
ses convergences ou divergences avec les autres pays
émergents, sur les cinq thèmes prioritaires de la présidence
mexicaine. Les membres du BRICS (Brésil, Russie, Inde,
Chine, Afrique du Sud) sont considérés en priorité. Les
autres émergents du G20 (Arabie Saoudite, Argentine,
Indonésie, Mexique, Russie, Turquie) sont mentionnés
lorsque leurs positions les distinguent du reste du groupe.
Note de cadrage
Partenariat entre Asia Centre et la Direction générale de la mondialisation, du
développement et des partenariats, MAEE.
Delphine Alles,
Avril 2012
PROGRAMME CHINE - G20
2
Point de départ : les priorités de la présidence
mexicaine
Pour sa présidence, le gouvernement mexicain a xé cinq
thèmes prioritaires:
Stabilisation économique et réformes structurelles
pour la croissance et l’emploi
Renforcement du système nancier et de l’inclusion
nancière pour promouvoir la croissance
Amélioration de l’architecture nancière
internationale dans un monde interconnecté
Amélioration de la sécurité alimentaire, en
abordant notamment le problème de la volatilité du
prix des matières premières (denrées alimentaire,
carburant, métaux)
Promotion du développement durable, de la
croissance verte et de la lutte contre le changement
climatique
Ces thèmes feront l’objet du sommet de Los Cabos,
et sont préliminairement discutés dans le cadre de
discussions parallèles. Les trois premières priorités,
associées aux questions liées aux marchés de l’énergie et
des marchandises, sont abordées lors de discussions sur
les questions nancières. Une première étape s’est tenue
avec la rencontre ministérielle de Mexico du 24 au 26 février
dernier, et sera renouvelée à Washington DC les 19 et 20
avril. Les questions non-nancières telles que la croissance
verte, le dialogue social et la sécurité alimentaire, sont
quant à elles discutées lors des rencontres des sherpas,
qui traitent également des objectifs non-prioritaires comme
la corruption, le tourisme et le commerce multilatéral. Une
première rencontre des sherpas s’est tenue en marge de
la réunion des ministres des Affaires étrangères des 2 et 3
février à Mexico, puis une seconde les 15 et 16 mars. Ils se
réuniront de nouveau en mai.
Au niveau des pratiques, le Mexique entend instaurer
une présidence concertée avec l’ONU et les
organisations internationales, mais aussi les autres
pays en développement et la société civile. Les
rencontres des sherpas sont ainsi ouvertes non seulement
à l’Espagne et au Chili, mais aussi Bénin et à la Colombie,
conrmant l’engagement du Mexique en faveur d’une plus
grande inclusivité, dans la continuité des objectifs élaborés
en 2011 lors du sommet de Cannes.
Face à ces objectifs, la position chinoise est claire. Comme
pour les autres émergents, le G20 offre l’opportunité
de s’impliquer dans la gouvernance mondiale et de
participer à la refondation de l’architecture nancière et
économique mondiale. La Chine entend conserver
les bénéces de sa position de leader économique
des émergents et de pivot de l’interdépendance
économique et nancière mondiale, en évitant les
questions politiques sur lesquelles existe un clivage à
la fois avec les pays développés et avec certains grands
émergents, notamment le Brésil et l’Inde. Sur les thèmes
politiques, une ligne d’opposition apparaît en effet au sein
même du BRICS, entre la Chine et la Russie d’une part,
les émergents démocratiques d’autre part. Pour la Chine,
la priorité absolue du G20 doit donc rester aux questions
économiques et nancières. Ma Xaoxu, vice-ministre des
Affaires étrangères, l’a rappelé en février dernier après la
rencontre ministérielle informelle de Los Cabos: la Chine
entend empêcher le G20 de dériver vers des questions
politiques, faisant valoir que le groupe ne doit prétendre
remplacer l’ONU et rappelant l’engagement de son pays
envers le principe de non-ingérence.
Questions économiques et nancières
Plusieurs questions sont à l’agenda du G20 dans le
domaine économique et nancier. Après l’accord pris en
février à Los Cabos pour développer un plan d’action sur
la création d’emplois, la rencontre ministérielle des 19 et 20
avril à Washington D.C. devrait aborder en priorité la mise
en œuvre de réformes structurelles, scales, nancières et
monétaires susceptibles d’affecter le développement des
émergents et la croissance mondiale.
Pour la Chine, l’enjeu est de parvenir à un consensus
sur la résolution de l’instabilité internationale en
trouvant une solution au problème de la dette des pays
développés, et en réformant le système monétaire et
nancier dans la continuité des engagements de Cannes.
Les autorités mettent en avant la nécessité de réduire les
écarts de développement et de poursuivre la lutte contre
le protectionnisme commercial – tout en se réservant la
possibilité d’y recourir en mobilisant notamment l’argument
écologique.
Stabilisation économique et réformes structurelles
pour la croissance et l’emploi
Les sherpas, réunis à Mexico les 15 et 16 mars 2012, se
sont accordés pour souligner que les signes de reprise
de l’économie mondiale n’annulent pas la présence de
risques importants, notamment si la croissance des pays
émergents venait à ralentir. La Chine est concernée au
premier chef par cette inquiétude puisque la croissance de
son PIB a ralenti en 2011, passant de 10,3% à 9,5%. Bien
que limité, ce ralentissement s’explique par la baisse de la
demande européenne et fait écho à celui de l’ensemble
des économies émergentes (la croissance indienne est par
exemple passée de 8,5% en 2010 à 7% en 2011, tandis
que celle du Brésil reculait de 7,5% à 2,5%). Il inquiète les
émergents autant que les pays développés, tirés par le
moteur que constituent les économies en développement.
Les pays émergents s’accordent par conséquent pour
insister sur les dangers en provenance des pays à fort
décit, et la nécessité de soutenir les réformes structurelles
de leurs marchés an de maintenir leur croissance
et la création d’emplois qui en dépend. Cette priorité
comporte des enjeux notamment dans le domaine du
développement durable (voir infra) qui ne doit pas,
selon la Chine et les autres émergents, empiéter sur le
développement économique.
3
Il importe selon les conclusions de la rencontre des
sherpas d’éviter les mesures protectionnistes ou les
barrières commerciales internationales, qui privent
précisément les pays émergents des effets bénéques
de la croissance économique sur le développement.
La rencontre d’avril devrait à ce titre viser à instaurer
une meilleure compréhension des chaines de valeurs
mondiales dans l’objectif de favoriser les échanges
internationaux. L’objectif de lutte contre la corruption
s’inscrit dans la même logique. Il convient ici de souligner
que si la position de la Chine est claire au point de vue des
principes, ses pratiques commerciales ne sont pas sans
ambiguïtés notamment du point de vue des restrictions
aux exportations, discutées dans la partie ci-dessous
consacrée au prix des matières premières.
Amélioration de l’architecture nancière
internationale
La question de la réforme de l’architecture nancière
mondiale est étroitement liée à celle de la croissance. Les
conclusions de la rencontre des ministres des Finances
n février, mais aussi celles du quatrième Sommets des
BRICS qui s’est tenu à New Delhi les 28 et 29 mars,
donnent un éclairage sur les objectifs des émergents dans
le cadre du G20 et à plus long terme.
Leur but n’est pas d’adopter une posture de confrontation
vis-à-vis des pays développés, mais de revendiquer
davantage d’inuence dans le cadre d’une plus
grande ouverture des institutions nancières
internationales. Entraînés par le Brésil, les pays émergents
entendent mettre n à la tradition qui consiste à placer un
responsable américain à la tête de la Banque mondiale
et un Européen à la direction du FMI. Dans le cadre
du prochain remplacement du directeur de la Banque
mondiale, Robert Zoellick, aucun candidat potentiel ne
fait cependant à ce jour l’objet d’un consensus entre les
pays émergents. Concernant la gouvernance du FMI,
ces derniers s’accordent en faveur du maintien du
système de quotas et l’actualisation de sa réforme,
prévue depuis 2010. Leur rôle devrait s’accroître dans le
cadre de l’accord auquel sont parvenus en mars les Etats
membres du FMI, pour une révision du mode de calcul des
quotes-parts et des droits de vote au sein de l’institution.
Si les modalités de cette réforme, censée être mise en
œuvre au plus tard en janvier 2013, ne font pas l’objet d’un
consensus lors de la rencontre d’avril puis à l’assemblée
de printemps du FMI, elles seront à nouveau discutées lors
du sommet du G20.
En termes de nancement, alors que le FMI a besoin de
renforcer sa puissance nancière de 500 à 600 milliards
de dollars pour gérer la crise européenne, les pays
émergents exigent de peser davantage et sont divisés
sur la question de l’augmentation de leurs contributions.
Le G20 de Cannes n’avait pas permis de trouver un
accord sur ces points, tout en soulignant l’urgence de
la situation. Par rapport à l’année dernière, la position
de la Chine et celle du Brésil se sont assouplies. Les
deux gouvernements s’accordent sur la nécessité d’un
plan à deux voies, soutenu également par la présidence
mexicaine, qui consisterait à augmenter le nancement
du FMI parallèlement aux avancées attendues en
Europe. Les avancées de l’euro-zone sur le second plan
de sauvetage de la Grèce offrent davantage de latitude
aux pays européens, mais leurs partenaires conditionnent
leur aide au renforcement des pare-feux nanciers et aux
efforts sur les fonds de stabilité européens pour atténuer
les prochaines crises. A court terme, l’option privilégiée
par les émergents est l’augmentation des ressources
du FMI via des accords d’emprunts bilatéraux et des
conventions d’achat de billets.
A plus long terme, les BRICS se sont accordés en
mars sur l’objectif d’établir une nouvelle banque de
développement, signe d’une prise de conscience de
leurs interdépendances mais aussi de leur volonté de
s’émanciper de la tutelle de la Banque mondiale tout
en assurant la stabilité de leurs économies. La nouvelle
institution servirait à nancer des projets de développement
et d’infrastructures dans les pays concernés, et pourrait
jouer le rôle de réserve de prêts en cas de crise globale
grâce à sa capacité d’émettre de la dette convertible
susceptible d’être achetée par les banques centrales des
Etats membres. Lors de la rencontre de Delhi, la Chine s’est
néanmoins montrée prudente sur ce projet porté par l’Inde,
soulignant que sa mise en place supposerait de trouver un
équilibre entre des Etats membres de poids différents et
impliquerait la mise en place d’un cadre de coopération
plus formel. La déclaration nale du sommet des BRICS
se contente donc de commander des études de faisabilité
sans lancer formellement le projet. Les dirigeants chinois
ont quant à eux pris soin de souligner que l’objectif n’est
pas d’abandonner les institutions globales, mais de les
améliorer pour les rendre plus représentatives et répondre
aux exigences posées par le développement économique
des pays émergents.
Renforcement du système nancier et de l’inclusion
nancière
Au niveau des Etats, l’objectif d’inclusion nancière
élaboré lors du sommet de Séoul en 2010 constitue l’une
des principales revendications des pays émergents,
qui la considèrent comme une condition nécessaire au
développement de leur croissance économique. L’enjeu
est d’ouvrir un accès aux services nanciers de base
(épargne, emprunt, versements, assurance, transferts
d’argent) pour les deux milliards d’adultes (dont 260
millions de Chinois) qui n’en bénécient pas encore, et
de permettre aux petites et moyennes entreprises de ces
Etats d’emprunter pour se développer. Ces dernières sont
en effet considérées comme les moteurs de la croissance,
et leur développement est censé réduire les inégalités
de revenus qui constituent l’un des principaux enjeux
pour les émergents, dont l’économie se développe sans
que toutes les catégories de population aient accès à la
consommation.
Plusieurs pays émergents ont déjà mis en œuvre leurs
propres initiatives. La Chine est en phase de réalisation
d’un plan en trois ans destiné à assurer l’accès de ses
villages aux services nanciers. Le Mexique s’efforce
d’assurer une inclusion nancière totale pour 2012. L’Inde
a quant à elle pour objectif d’assurer en 2012 l’accès aux
services nanciers de 500 000 villages non couverts ou
mal couverts par ces services. L’enjeu demeure cependant
de trouver un cadre général pour la mise en œuvre de ces
initiatives, et de mobiliser des fonds pour les nancer. En
ce sens, le Mexique s’est notamment engagé à favoriser la
mise en œuvre de règles de transparence sur les produits,
pour assurer la protection des consommateurs.
4
L’ensemble de ces objectifs fait l’objet d’un consensus,
mais il est à considérer avec prudence. Loin d’être un
instrument économique bénin, le crédit présente en effet
des dangers, en particulier celui de risquer d’alimenter une
croissance trop rapide qui déboucherait inévitablement sur
des faillites et une récession. Il est par conséquent impératif
de s’assurer qu’une crise du microcrédit ne succède pas
dans les pays émergents à la crise du crédit dont les
économies développées ne sont pas encore sorties.
Questions de développement
Dans le domaine du développement durable, introduit pour
la présidence de 2012, le Mexique a établi deux priorités
en vue du sommet de Los Cabos, qui se tiendra
quelques jours avant le troisième sommet de la Terre,
Rio+20, à Rio de Janeiro: la sécurité alimentaire et la
croissance verte. La première s’insère dans la question
plus large de la stabilité des prix des matières premières,
tandis que la question de la croissance verte consiste pour
les émergents à mettre l’accent sur les bénéces qu’ils
peuvent retirer d’un développement attentif aux questions
environnementales.
Promotion du développement durable et de la
croissance verte
La présidence mexicaine s’efforce de favoriser la mise
en œuvre des engagements pris avec le plan d’action
pluriannuel de Séoul pour le développement, qui propose
des avancées dans le domaine du développement des
savoirs, des infrastructures, de l’investissement et de
l’intégration commerciale régionale. La rencontre du
groupe de travail sur le développement, réuni les 28 et
29 février puis les 19 et 20 mars à Séoul, ainsi que la
rencontre des sherpas les 15 et 16 mars, ont fait ressortir
plusieurs priorités mais également des divergences entre
les pays émergents. Ces derniers s’accordent pour
mettre en avant les opportunités que représentent
la croissance verte et la nécessité pour le G20 de
montrer l’exemple. Les dirigeants chinois insistent
néanmoins sur la nécessité pour les objectifs du G20
d’être non volontaires et non prescriptifs pour les pays
émergents. Ils tiennent en particulier à ce que la question
de la croissance verte ne soit pas dissociée ou abordée
de manière prioritaire par rapport à d’autres éléments
du développement durable, l’éradication de la pauvreté
et le développement économique. La position chinoise
consiste à souligner que le développement requiert un
espace que les pays riches ont déjà occupé par le passé,
et qu’il serait par conséquent illégitime de refuser aux
émergents dont les classes populaires n’ont pas encore
accédé à la consommation.
Sous la présidence de l’Agence mexicaine pour le
développement et la coopération internationale, le groupe
de travail sur le développement s’est donc concentré
sur l’identication de bonnes pratiques susceptibles
d’aider les pays membres à favoriser la synergie entre
croissance économique et protection environnementale
comme outil du développement durable. Les sherpas
se sont mis d’accord pour travailler sur les mécanismes
d’une plus grande efcacité énergétique pour contribuer
à la protection de l’environnement, et améliorer la gestion
des catastrophes naturelles. L’intérêt de la Chine reste
néanmoins de faire en sorte que le thème de la croissance
verte demeure le moins déni possible, pour éviter
l’adoption de solutions concrètes et contraignantes.
Amélioration de la sécurité alimentaire et limitation
de la volatilité des prix des matières premières
(denrées alimentaire, carburant, métaux)
Le prix des matières premières est étroitement lié à la
question du développement durable, pour trois raisons:
parce qu’il affecte la croissance économique; parce qu’il se
répercute sur le prix des biens de consommation courante
et donc la sécurité alimentaire des plus pauvres; et parce
que l’extraction des matières premières s’accompagne de
problèmes environnementaux de premier ordre.
Déjà abordée lors du G20 français, la question de la
volatilité des prix des matières premières concerne
l’ensemble des Etats membres. Si l’augmentation du
prix des matières premières peut sembler avantager les
pays émergents exportateurs, comme l’Arabie Saoudite, le
Mexique ou la Russie pour le pétrole, le Brésil ou l’Argentine
pour les céréales, ses conséquences sur la demande
dans les économies développées et émergentes sont
susceptibles d’accélérer une récession mondiale
dommageable pour tous. Une perspective économique
publiée par l’Inter-American Development Bank (IADB) a
par exemple suggéré que le prix des matières premières
risquerait de diminuer de 30% dans le cas d’un recul de
trois points de la croissance chinoise, en particulier le prix
du cuivre qui pourrait perdre jusqu’à 48% de sa valeur
nominale. L’augmentation des prix du pétrole pourrait
en outre aggraver l’ination des pays qui y sont déjà
sensibles, comme le Brésil qui a diminué ses taux d’intérêt
pour tenter de relancer sa croissance.
Les objectifs xés à Cannes, favorables à la limitation
de la volatilité des prix en harmonisant les régulations,
la transparence des échanges et les mécanismes pour
assurer la sécurité alimentaire notamment pour les plus
pauvres, restent donc d’actualité. Les sherpas l’ont
conrmé en soulignant les 15 et 16 mars que la volatilité
des marchés énergétiques et des matières premières
affecte chacun et surtout les plus vulnérables dans les pays
en développement. Les mesures à adopter divisent en
revanche les émergents, dont la vulnérabilité et les
intérêts divergent en fonction de la nature des produits
concernés. Les économies de la Chine et de l’Inde, dont la
production exportable est étroitement liée aux fournitures
extérieures en matières premières, sont particulièrement
sensibles aux variations du prix des métaux ou de
l’énergie. Le Brésil et l’Argentine, en revanche, sont moins
affectés dans la mesure où leurs exportations de matières
premières reposent largement sur les denrées alimentaires
(céréales), pour lesquelles la demande minimale est moins
liée à la croissance.
Les positions des émergents divergent donc sur les
solutions à apporter, en particulier pour la Chine qui se
trouve à la fois coupable et victime des dérèglements
provoqués par les entraves au commerce mondial.
5
L’Arabie Saoudite, concernée au premier chef par la
question du prix du pétrole, s’est engagée n février à
contribuer à limiter les risques en ouvrant ses valves pour
ses plus gros clients, an d’équilibrer le marché en cas de
choc politique comme celui provoqué par les sanctions
contre l’Iran. Dans le cas chinois, la question sensible est
celle de la fourniture des terres rares, sur laquelle elle se
trouve en situation de quasi-monopole puisqu’elle alimente
97% de la consommation mondiale. En 2010, la Chine a
réduit ses quotas d’exportation de terres rares à la moitié
de leur niveau de 2010. Epinglée par l’Union Européenne,
les Etats-Unis et le Japon, qui ont porté plainte devant
l’OMC le 13 mars, la Chine se justie au nom de la priorité
environnementale, dont elle rejette pourtant la légitimité
dans d’autres dossiers. Elle avait déjà été condamnée
l’année dernière sur le dossier similaire de ses barrières
à l’exportation de produits miniers, suite à une plainte
déposée en 2009 par les Etats-Unis et l’Union Européenne
ainsi que le Mexique. L’enjeu étant en réalité l’objectif de
réorientation vers le marché intérieur d’une économie trop
axée sur les exportations (actuellement 60 à 70% du PIB),
il est peu probable de voir évoluer la position de la Chine.
Conclusions
Si les pays émergents sont confrontés à des enjeux
similaires et afchent des objectifs comparables, leurs
priorités divergent. La Chine, dont le PIB est plus de
deux fois supérieur à celui du Brésil, seconde économie
émergente, et quatre fois supérieur à celui de l’Inde,
deuxième puissance démographique, occupe une
position spécique en tant que leader des émergents et
pivot de l’interdépendance économique mondiale. C’est
sans doute sur les questions qui font l’objet d’un
consensus avec la Chine que les négociations au G20
sont les plus susceptibles d’aboutir, en particulier la
question de la réforme de la gouvernance nancière
mondiale. Les aspects politiques du G20, que des
pays comme la France ou les Etats-Unis parmi les
pays développés mais aussi le Brésil ou le Mexique
parmi les pays émergents s’efforcent d’introduire au
G20, ont en revanche peu de chances de déboucher
sur un consensus avec la puissance chinoise,
alliée sur cette question avec la Russie. Il convient
en outre de prendre en compte deux caractéristiques
non-négociables, propres aux diplomaties émergentes:
la primauté absolue qu’elles accordent au principe de
non-ingérence, et leur sensibilité à la notion de dialogue
inclusif, renforcée par le fait que les émergents tendent à
considérer qu’ils occupent au G20 le rôle de porte-voix
de leurs régions respectives.
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