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rentabilité de l’entreprise sauf en ce qui concerne une fraction des effectifs, les profils qualifiés,
techniciens ou managers, supposés apporter une valeur ajoutée décisive.
Cette relative absence de prise en compte de la gestion sociale par l’analyse financière apparaît tout à
fait contradictoire avec les pratiques très élaborées de gestion des ressources humaines (RH) que les
DRH ont mises en place au cours des années 1990 : les modifications d’organisation du travail, les
réductions d’effectifs, l’utilisation optimisée des différentes formes de contrat de travail constituent
une préoccupation permanente de l’entreprise pour accroître son résultat opérationnel. Face à cette
politique d’entreprise, les analystes sont effectivement directement intéressés par les conséquences de
ces opérations de gestion de RH sur la concurrence, les parts de marché, les coûts mais ils ne se
placent pas en position d’évaluer la pertinence d’une gestion de RH et font “ confiance ” aux
dirigeants. Ils jugent qualitativement les actions en matière de RH selon un référentiel général diffus
et mesurent seulement leurs conséquences chiffrées. Cette apparente contradiction peut s’interpréter
soit en supposant que le risque social est complètement diversifié (et seule sa composante macro-
économique est observable au niveau du cours), soit en arguant d’un coût élevé de traitement des
données sociales, du fait de leur grande complexité.
2. Les comportements des investisseurs institutionnels américains
Dans un second temps, nous nous sommes efforcés de mettre en évidence les comportements des deux
types d’acteurs le plus massivement présents au capital des grandes entreprises françaises, les fonds
de pension (FP) et les mutual funds (MF) d’origine américaine. On montre que les situations
institutionnelles et concurrentielles respectives de ces deux types d’institutions financières les
conduisent à adopter des styles de gestion d’actif spécifiques et des stratégies distinctes en matière de
contrôle des performances des entreprises, donc à exercer une pression différente sur les entreprises.
Les FP américains n’ont pas tous la même contrainte de passif : certains sont tenus de verser des
retraites aux bénéficiaires des régimes lorsque leurs salariés partent en retraite et supportent en
conséquence le risque de placement de l’épargne accumulée dans le fonds (les fonds à prestations
définies). Ils peuvent soit gérer directement cette épargne, soit en déléguer la gestion à des
gestionnaires de fonds spécialisés, filiales de banques ou de compagnies d’assurance, etc. Les autres
(les fonds à cotisations définies), de plus en plus nombreux, ont choisi de se libérer de cette contrainte
et de reporter sur le salarié le risque financier. Ceux-là délèguent en général à des gestionnaires de
MF (ou à des gestionnaires indépendants). En conséquence, les FP à prestations définies ont des
objectifs de long terme et pratiquent plus volontiers une gestion indexée (notamment les FP du secteur
public). En revanche, les gestionnaires de MF ont des horizons de gestion plus courts et recherchent la
performance financière pure sans autre considération. Sous la pression de la concurrence interne au
secteur et à la réglementation de la Securities Exchange Commission (SEC), ces derniers cherchent
souvent à « battre le marché » et montrent des taux de rotation de leur portefeuille plus élevés que les