FRANCOIS Pauline Promotion 2013-2016 Travail Ecrit, Mémoire de Fin d’Etudes UE 3.4 S6 : Initiation à la démarche de recherche UE 5.6 S6 : Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et professionnelles L’amputation, le deuil d’un membre Institut de Formation aux Métiers de la Santé Centre Hospitalier de Valenciennes Reproduction interdite SOMMAIRE I. Introduction Page 1 II. De la situation d’appel à la question de départ Page 2 1. Description de la situation d’appel Page 2 2. Ma question de départ Page 4 III. Le cadre de référence 1. Diabète de type 2 1.1. Ce que dit la loi 1.2. Définition et épidémiologie 1.3. Les symptômes 1.4. Les facteurs de risque 1.5. Les traitements 1.6. Les complications 2. L’amputation d’un membre, de l’annonce à l’acte 2.1. Ce que dit la loi 2.2. Définition et épidémiologie 2.3. L’annonce de l’amputation 2.4. Niveaux d’amputation des membres inférieurs 3. L’amputation, quelles répercussions ? Page 5 Page 5 Page 5 Page 5 Page 7 Page 8 Page 8 Page 9 Page 10 Page 10 Page 10 Page 11 Page 11 Page 13 3.1. Conséquences physiques Page 13 3.1.1. Du schéma corporel à l’image du corps : les concepts Page 13 3.1.2. Le membre fantôme Page 15 3.2. Conséquences psychologiques Page 16 Page 16 3.2.1. Le deuil d’un membre 3.2.2. Le concept de résilience, une capacité à surmonter les épreuves Page 19 4. La prise en charge infirmière 4.1. Ce que dit la loi 4.2. L’infirmièr(e) face à l’amputation 4.3. La relation d’aide, un soin à part entière 4.4. L’intérêt d’un travail en équipe Page 20 Page 20 Page 20 Page 22 Page 25 IV. Synthèse de l’analyse du cadre de référence Page 26 V. Méthodologie de recherche Page 29 1. La problématique Page 29 2. L’hypothèse Page 29 3. Choix de l’outil d’enquête Page 30 4. Choix du lieu et des personnes interrogées Page 30 5. Résultats d’analyse argumentés Page 31 VI. Discussion Page 49 VII. Conclusion Page 50 Bibliographie Annexes I. INTRODUCTION Le travail de fin d'études est la concrétisation de l’enseignement reçu dans le cadre de l’obtention du diplôme d’état d’infirmier. Il permet d’exposer son opinion concernant un sujet choisi en s’appuyant sur une série de faits pour aboutir à une ouverture ou une conclusion. Ce travail résulte de recherches et d’analyses, et le choix du thème ne doit pas être anodin. C’est pourquoi il est primordial d’allier sérieux, motivations et réflexions pour réaliser ce projet. Au fil de ma formation professionnelle, j’ai pu découvrir différentes pathologies dans différents services. Ayant toujours eu un fort intérêt pour les pathologies traumatiques, c’est dans le service d’endocrinologie et diabétologie que mon intérêt s’est renforcé sur les amputations. En effet selon l’OMS, en France, on dénombre près de 10000 amputations dues aux complications du diabète. Cet handicap pose un grand problème, où le patient est face à une altération physique importante, se caractérisant par la perte d’un membre. Cependant, j’ai pu également remarquer l’impact de cet handicap physique sur l’image corporelle du patient. C’est donc au regard de cet impact que mon questionnement professionnel s’est porté sur la prise en charge infirmière globale, me menant à la problématique suivante : Comment l’infirmière peut-elle accompagner le patient à s’adapter à sa nouvelle image corporelle ? La première partie de mon travail débutera par les deux situations qui m’ont interpellées, dégageant ma question de départ. Suivra ensuite, le cheminement du cadre de référence avec le cadre théorique, conceptuel et la problématique. La seconde partie traitera des résultats de mon enquête sous forme d’analyse. Enfin, la conclusion de mon écrit sera l’aboutissement de mon travail de fin d’études. ! ! 1 II. DE LA SITUATION D’APPEL A LA QUESTION DE DEPART 1. Description de la situation d’appel : Etudiante en soins infirmiers, j’ai eu l’occasion d’effectuer un stage dans un service d’endocrinologie/diabétologie lors du semestre 4. J’ai pu alors découvrir les différentes pathologies reliées à ce service et les différentes prises en charge adaptées. Je me suis plus particulièrement intéressée à la pathologie du diabète, et j’ai pu constater l’importance de cette pathologie chronique. Dans le service, une grande majorité de patients étaient hospitalisés pour un diabète de type 2 déséquilibré. J’ai pu remarquer la difficulté des personnes à suivre leur traitement, provoquant alors de multiples complications du diabète, amenant à l’amputation. Monsieur V, âgé de 71 ans est diabétique de type 2 depuis 25 ans. Il est sous insuline, plus précisément sous Levémir® et Novorapid®. Mr présente un diabète souvent déséquilibré, et est de ce fait hospitalisé régulièrement dans le service. Ces derniers temps, le diabète de Monsieur V a entraîné de multiples complications, notamment sur son pied gauche. Monsieur V, étant atteint d’une neuropathie périphérique ; celle-ci a provoqué une hyperkératose favorisant des saignements en profondeur et laissant place à des ulcérations de la peau. Ne ressentant plus la douleur, Monsieur V ne s’est pas inquiété des différentes lésions apparues à la surface de son membre. La cicatrisation ne pouvant alors s’effectuer, le pied s’est infecté de plus en plus rapidement. Cette infection est devenue irréversible et a dû mener à l’amputation jusqu’au genou afin d’éviter une progression de l’infection sur le reste du membre. Quand je suis entrée dans la chambre de Monsieur V afin de le préparer au bloc, le patient m’a parlé de sa crainte de l’opération, m’a dit qu’il ne réalisait pas que trois heures plus tard il lui manquerait une jambe. Je lui ai alors demandé si on l’avait informé de l’opération. ! 2 Le patient m’a répondu que toutes les informations lui avaient bien été transmises mais qu’il n’était pas en capacité de les recevoir, comme-ci, je cite, « mon cerveau ne voulait pas me laisser entendre la vérité, comme-ci les informations que l’on me donnait ne m’étaient pas adressées ». J’ai tenté de réexpliquer au patient le but de l’opération, mais en vain car Monsieur V me répétait qu’il avait très bien compris mais qu’il ne voulait pas l’entendre. J’ai également été confrontée à cette situation avec Monsieur B, 66 ans, atteint d’un diabète de type 2 depuis 12 ans, étant à J2 post opératoire d’une amputation trans-tibiale. Je me rends dans sa chambre afin de l’aider dans ses auto-soins. Monsieur me confie que sa vie est foutue, qu’il n’est et ne sera plus jamais le même homme, qu’il « préfère crever plutôt que de rester toute sa vie dans un fauteuil roulant ». En effet, Monsieur a toujours été un sportif régulier, pratiquant la randonnée chaque week-end. ! 3 2. Ma question de départ : J’ai pu alors constater que le soutien d’un soignant, que ce soit juste l’écoute ou une présence, facilitait la verbalisation du patient et instaurait une relation de confiance. Cela m’a amené à la question suivante : Pourquoi l’accompagnement de l’infirmier est-il important dans la prise en charge globale d’une personne atteinte d’un handicap physique, plus précisément l’amputation d’un membre ? ! 4 III. LE CADRE DE REFERENCE Cette partie fera l’objet d’un apport législatif et théorique, avec l’association de différents concepts. A l’aide des différents ouvrages et articles, mon cadre de référence sera porté sur le diabète de type 2 amenant sur l’amputation pour enfin étudier les conséquences et le prise en charge de l’infirmière. 1. Diabète de type 2 1.1. Ce que dit la loi D’après le décret n°2004 - 1049 du 4 octobre 2004, le diabète fait partie des Affections de Longue Durée (ALD). Les ALD sont des affections nécessitant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse. D’après l’article L. 324-1 du Code de la Sécurité Sociale, « le médecin traitant détermine le traitement que le bénéficiaire de l'assurance maladie doit suivre si les soins sont dispensés sans interruption ». Les personnes diabétiques bénéficient alors de l’exonération du ticket modérateur, pour une durée de 5 ans et renouvelable. De plus, les articles L. 322-3, R 322-5 et D. 322-1 du Code de la Sécurité Sociale stipulent que peuvent être pris en charge à 100% du tarif de la Sécurité Sociale les soins attachés aux affections de longue durée. 1.2. Définition et épidémiologie Les principaux aliments que nous mangeons sont composés de lipides (= graisses), de protéines (= viandes, poissons) et de glucides (= sucres lents et rapides). Ces aliments vont alors fournir, à notre corps, l’énergie nécessaire dont il a besoin pour fonctionner. Les glucides, se trouvant généralement à chacun de nos repas, rejoignent la circulation sanguine, se transforment en glucose et provoquent alors une augmentation du taux de sucre dans le sang, également appelé glycémie. ! 5 Le pancréas, viscère situé dans l’abdomen, va détecter l’augmentation de cette glycémie et va alors sécréter de l’insuline par l’intermédiaire des cellules bêta du pancréas, appelées « îlots de Langerhans », en fonction de la concentration de glucose. Grâce à l’insuline, le glucose pénètre dans les différentes cellules de l’organisme : les tissus périphériques (muscles, le foie, tissus adipeux) où il va être transformé et stocké comme source d’énergie. Ainsi la glycémie est régularisée par l’insuline afin d’éviter un taux élevé de glucose dans le sang. Seulement, chez les personnes atteintes d’un diabète, l’organisme va agir différemment. En effet, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), « le diabète est une maladie chronique qui survient lorsque le pancréas ne produit pas assez d'insuline ou lorsque l'organisme n'est pas capable d'utiliser efficacement l'insuline qu'il produit. Il en résulte une concentration accrue de glucose dans le sang (hyperglycémie). » Cet état d’hyperglycémie se définit, biologiquement, « par une glycémie à jeun supérieure à 1,26 g/L, à 2 reprises, ou une glycémie supérieur à 2 g/L n’importe quand dans la journée. » Il existe différents types de diabète, les deux diabètes les plus rencontrés étant : - Le diabète de type 1 - Le diabète de type 2 Pour mon sujet sur l’amputation, c’est le diabète de type 2 qui sera étudié. Le diabète de type 2, ou diabète non insulino-dépendant, est « une maladie non auto-immune qui se caractérise par une insulino-résistance au niveau des tissus périphériques et une anomalie des cellules bêta pancréatiques ne pouvant plus contrer au bout d’un moment cette insulino-résistance. » ! 6 Cependant, la sécrétion d’insuline étant insuffisante du fait du dysfonctionnement des cellules bêta pancréatiques, l’insuline ne va pas réussir à agir complètement (= insulino-résistance) et va entrainer une augmentation des glycémies au-delà de la valeur seuil. (Annexe 1) Selon l’OMS, le diabète de type 2 représente 90% des diabètes rencontrés dans le monde. Il est en grande partie le résultat d’une surcharge pondérale et de la sédentarité. En 2012, l’OMS estimait que le diabète avait été la cause directe de 1,5 million de décès, au niveau mondial. Selon la Haute Autorité de la Santé (HAS), en France, en 2011, la prévalence globale du diabète était estimée à 4,6% de la population, soit plus de 3 millions de personnes. Selon les données de l’étude Entred (Echantillon national témoin représentatif des personnes diabétiques traitées) 2007-2010, 92% des personnes traitées pour un diabète avaient un diabète de type 2. Seulement, ce chiffre est sous-estimé puisqu’il ne tient pas compte des personnes non traitées ou non diagnostiquées. Selon l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM), « environ 20% des personnes diabétiques âgées de 18 et 74 ans ne sont pas diagnostiquées. » 1.3. Les symptômes Le plus souvent, le diabète de type 2 est asymptomatique. Les patients peuvent ne présenter aucun symptôme ou des symptômes très discrets pendant des années avant d’être diagnostiqués. On peut observer, cependant, un syndrome polyuro-polydipsique, une sensation de faim et une perte de poids inexpliquée. Le test HbA1C ou hémoglobine glyquée se fait par prise de sang et permet de confirmer le diagnostic en renseignant sur la qualité de l’équilibre glycémique au cours des 3 derniers mois. (Annexe 2) ! 7 1.4. Les facteurs de risque Le diabète de type 2 résulte de différents facteurs : - Le facteur génétique : il existe une prédisposition génétique certaine, mais sans que l’on connaisse précisément les gènes en cause. Les DT2 ont très souvent des antécédents familiaux de diabète. - Le facteur métabolique : hypertension, dyslipidémie, un diabète gestationnel chez la femme - Le facteur alimentaire : repas trop riche en calories, en graisses saturées et en sucres d'absorption rapide résultant d’une surcharge pondérale essentiellement abdominale. - Le facteur environnemental : sédentarité, absence d'activité physique. - L’âge : > 45 ans En France, le dépistage du diabète sera alors surtout recommandé pour les personnes âgés de plus de 45 ans présentant ces facteurs de risque, notamment un surpoids ou une obésité. Selon l’INSERM, la maladie se manifeste généralement après 40 ans et elle est diagnostiquée à un âge moyen proche de 65 ans. Cependant, le diabète de type 2 touche aussi des sujets plus jeunes, y compris des adolescents, voire des enfants. 1.5. Les traitements Le traitement a pour objectif général d’apaiser les symptômes et d’éviter ou de retarder les complications en visant le retour à une glycémie normale. Une alimentation ainsi qu’une activité physique régulière sont les principaux traitements non médicamenteux permettant de prévenir ou de retarder l’apparition du diabète de type 2. En seconde intention, un traitement médicamenteux est mis en place : des antidiabétiques oraux sont prescrits pour contrôler la glycémie. Après plusieurs années, une insulinopénie peut s’installer, c’est à dire que la quantité d’insuline produite par le pancréas est inférieure à la normale. ! 8 Le diabète de type 2 devient alors un diabète insulino-réquérant et nécessite l’association d’une insulinothérapie car le traitement par antidiabétiques oraux ne suffit plus. Le but de cette insulinothérapie va de reproduire au mieux la sécrétion insulinique avec une « base » et des « pics prandiaux ». La base est représentée par des insulines dites lentes avec une durée d’action de 12h à 24h et les pics prandiaux par des insulines dites rapides avec une durée d’action de 2h à 6h. Malgré un traitement sous antidiabétiques oraux et/ou insuline, si les deux traitements non médicamenteux, c’est-à-dire une alimentation équilibrée et une activité physique régulière, ne sont pas respectés, le diabète ne peut pas être équilibré. 1.6. Les complications L’hyperglycémie non traitée va entrainer à long terme des complications plus précoces et plus nombreuses touchant différentes parties du corps, comme les yeux (rétinopathie), les reins (néphropathie), le cœur (coronarite), les artères (HTA) et les pieds. La complication ciblée dans mon mémoire est le pied diabétique. Selon la Fédération Française des Diabétiques, « le pied diabétique se caractérise par une ulcération ou une destruction du tissu du pied, due à la neuropathie périphérique. » De ce fait, le patient a une perte de sensibilité au niveau des pieds, due à l’atteinte des nerfs, une diminution de l’hydratation naturelle du pied engendrant sécheresse, fissures et callosités ; amenant par la suite à des déformations osseuses du pied. Le pied diabétique, mal traité ou négligé peut alors mener à l’amputation. Malgré les différentes préventions mises en action et les différents traitements instaurés, l’HAS indique que « 85 % des amputations sont précédées d'une ulcération du pied et 1 patient sur 5 présentant un ulcère du pied devra être amputé. » ! 9 2. L’amputation d’un membre, de l’annonce à l’acte 2.1. Ce que dit la loi ! L’article L.114 de la loi n°2005-102 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, caractérise le handicap selon la définition suivante : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. » Grâce à cette loi, les personnes handicapées ont droit : - à un accueil, notamment dans les Maisons Départementales des Personnes handicapées (MDPH), crées également par cette loi. - à une compensation : la Prestation de Compensation du Handicap (PCH), étant une aide personnalisée destinée à financer les besoins liés à la perte d’autonomie des personnes handicapées. - à des ressources, comme l’Allocation Adulte Handicapé (AAH), permettant de garantir un revenu minimum aux personnes handicapées pour qu’elles puissent faire face aux dépenses de la vie courante. - à la scolarité - à l’emploi - à l’accessibilité, notamment pour les établissements publics. - à la citoyenneté et la participation à la vie sociale, concernant l’obligation d’accessibilité aux opérations de vote des personnes en situation d’handicap. 2.2. Définition et épidémiologie Selon le Larousse médical, « l’amputation est l’ablation chirurgicale d'un membre ou d'un segment de membre. » L'amputation s'oppose à la désarticulation, consistant en l’ablation d’un segment de membre ou d’un membre entier à la hauteur d’une articulation. Lors de l'amputation, la partie atteinte du membre est sectionnée, de façon à ce que les muscles et la peau forment un lambeau de recouvrement afin de ! 10 constituer le moignon. L’amputation va permettre de stopper le foyer infectieux, d’éliminer les tissus nécrosés, et de ce fait soulager les symptômes. Selon l’HAS, « dans le monde, une amputation des membres inférieurs est réalisée toutes les 30 secondes chez un patient diabétique. » Chaque année, en France, près de 10 000 amputations dues aux complications du diabète sont réalisées. 2.3. L’annonce de l’amputation Il n’y a pas de technique particulière pour faire une annonce difficile, mais des règles de bon sens sont à respecter. L’équipe soignante va expliquer au patient la raison de l’amputation (dans ce cas, pour éviter la propagation d’une infection gangréneuse, et dans l’impossibilité de revascularisation), de façon à l’aider à prendre cette décision. Pour le Dr Fritz Minger de la Clinique de la Source à Lausanne en Suisse, « C'est toujours une décision douloureuse, psychologiquement, pour le patient. Perdre un membre, c'est comme perdre un organe : c'est le processus de perdre une partie importante du corps, de soi.» Il est expliqué au patient que, malgré la douleur de la perte d’un membre, l’amputation va lui permettre de lui sauver la vie en enlevant la partie malade, améliorant ainsi son état général et sa qualité de vie. L’important est de discuter avec le patient afin de lui expliquer qu’il n’existe pas d’autre solution, tout en l’informant du changement que cela implique par la suite. Cette étape est donc très importante, puisque l’acte chirurgical ne sera pas réalisé sans le consentement du patient. En effet selon l’article R.4127-41 du code de la Santé Publique : « Aucune intervention mutilante ne peut être pratiquée sans motif médical très sérieux et, sauf urgence ou impossibilité, sans information de l’intéressé et sans son consentement ». 2.4. Les niveaux d’amputation des membres inférieurs Jusqu’au début du 20 ème siècle, les amputations étaient pratiquées dans un contexte de risque vital pour sauver la vie du blessé. Le sacrifice du membre était la seule solution pour conserver la vie, sans que l’on se préoccupe par la suite de la qualité de vie de la personne. ! 11 Aujourd’hui, les progrès de la médecine et de la chirurgie ont permis de limiter les amputations, notamment en urgence. La décision d’amputation n’est plus toujours le fait d’une nécessité absolue mais parfois la solution qui pourra apporter le meilleur résultat fonctionnel pour le patient. L’amputation va alors dépendre de différents éléments : - de la qualité des artères du membre. En effet si la circulation sanguine arrive difficilement jusqu’au niveau d’amputation, alors la cicatrisation ne se fera pas correctement. - de la sévérité de l’infection et de l’étendue de la destruction des tissus - du degré d’autonomie du patient afin d’analyser sa capacité d’adaptation à sa nouvelle image corporelle et à utiliser une prothèse. Dans cette optique, une meilleure connaissance des progrès importants, réalisées récemment en matière de technologie prothétique, est indispensable à la prise de décision du chirurgien et à l’information du patient. Le geste d’amputation peut permettre au patient amputé de tirer le meilleur bénéfice possible d’un appareillage performant. Pour cela, il est nécessaire de ne pas amputer trop bas si cela risque d’être incompatible avec l’appareillage. En effet, la meilleure solution n’est pas toujours de garder la plus grande longueur. Il est également important que le chirurgien évite de placer des cicatrices au niveau des zones d’appui, enfouir les extrémités nerveuses dans les tissus mous afin d’éviter le développement ultérieur de névromes très douloureux. Les différents niveaux d’amputations concernant le membre inférieur sont : - L’hémipelvectomie : l’amputation touche l’intégralité de la jambe et une partie du bassin et du sacrum. - L’amputation au niveau de la hanche et du bassin : l’amputation s’effectue au niveau de l’articulation de la hanche - L’amputation trans-fémorale : l’amputation débute à partir du fémur et peut intervenir sur l’ensemble de la longueur de la cuisse. - L’amputation de Gritti : Amputation au niveau de l’articulation du genou qui consiste à fixer la rotule à l’extrémité du fémur. ! 12 - L’amputation trans-tibiale : l’amputation débute en-dessous du genou, au niveau du tibia et du péroné. - L’amputation de Syme : l’amputation est effectuée à la cheville, plus précisément au niveau de l’articulation tibio-tarsienne. - L’amputation de Chopart : Ablation de la partie à l’avant du talus (os du pied situé entre le talon et le tibia) et du calcanéus (os situé au niveau du talon, à l’arrière du pied) - L’amputation de Lisfranc : Ablation complète des orteils et des métatarsiens - L’amputation trans-métatarsienne : Amputation de l’avant-pied - L’amputation d’un ou plusieurs orteils A chaque niveau d’amputation correspond un retentissement fonctionnel et psychologique différent. Le niveau d’amputation joue alors un rôle important dans l’adaptation du patient vis-à-vis de sa nouvelle image corporelle car il influencera sur les solutions que l’individu saura plus ou moins trouver à cette nouvelle situation. Les amputations qui conservent le talon, le genou sont mieux tolérées que les amputations de la cuisse. (Annexe 3) ! 3. L’amputation, quelles répercussions ? 3.1. Conséquences physiques 3.1.1. Du schéma corporel à l’image du corps : les concepts « Le corps est le véhicule de l'être au monde, et avoir un corps c'est pour un vivant se joindre à un milieu défini, se joindre à certains objets et s'y engager continuellement. » Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception (1945). Le schéma corporel est un concept interdisciplinaire et se définit comme étant la représentation que chaque individu se fait de son corps, de ses différentes parties, de sa position afin de lui permettre de se situer dans l’espace. Le schéma corporel est donc un automatisme physique qui nous permet d'agir au quotidien. Il se construit tout au long de l’enfance notamment par le stade du miroir : entre 4 et 6 mois, un enfant ne se reconnait pas devant un miroir, son reflet n’est pour lui qu’une autre personne ; entre 6 et 8 mois, il découvre que ! 13 l’être vu dans le miroir est une image, sans savoir qu’elle lui correspond ; enfin à 1 an, l’enfant comprend que c’est son propre corps qu’il voit dans le miroir, il arrive alors à identifier son corps. Le schéma corporel n’est considéré comme acquis que vers l’âge de 11 ans. L’acquisition de ce schéma corporel permet d’établir les frontières du corps et de mieux en situer les limites L’image corporelle diffère du schéma corporel, tout en étant un concept lié. Elle se réfère à des échelles de valeurs, esthétiques ou sociales. Elle est la représentation mentale que nous avons de notre propre corps, de notre personnalité, liée à nos expériences, nos valeurs, nos jugements. Elle est façonnée par nos perceptions, nos souvenirs et nos émotions que l’on éprouve à l’égard de notre corps et à l’estime que nous avons de nous-même. Pour Mave Salter, infirmière et auteur de « Altération de l’image corporelle : le rôle de l’infirmière » : « Nous avons tous une certaine image de notre corps. Cette image se forme à la naissance et se développe au fur et à mesure que nous grandissons. A l’adolescence, nous traversons une crise, car l’image de l’enfant est remplacée par celle de l’adulte. Notre image est renforcée par les comportements sociaux et notre environnement. Nous aspirons tous à la perfection qui se révèle impossible à atteindre (...) l’image du corps a été conceptualisée comme une image mentale de son propre corps, c’est-à-dire la façon dont le corps apparaît au moi ». Selon Françoise Dolto, pédiatre et psychanalyste française, le corps est une réalité somatique tandis que l’image une réalité psychique. Lors d’une amputation, le schéma corporel et l’image du corps sont altérés, chacun de façon différente. La perte du membre modifie le schéma corporel que le patient s’était construit pendant l’enfance. Vivre avec le manque d’un orteil, d’un pied, ou encore d’une jambe n’étant pas inscrit dans les mœurs, le patient peut alors être amené à négliger cette partie blessée puisqu’elle est vécue comme néfaste. Seulement, cette modification du schéma corporel peut être atténuée par l’utilisation de prothèses bien adaptées permettant un retour proche de la normalité visuellement, c’est-a-dire que le sujet pourra se déplacer verticalement et ! 14 s’intégrer plus naturellement dans la vie sociale, sans occulter les autres difficultés liées à son handicap, assurément. Concernant l’image corporelle, le sujet dépossédé d’une partie de son corps ne se reconnaît plus et se perçoit d’une façon négative, pour une période indéterminée. Un jugement défavorable envers lui-même peut alors le mener à une dévalorisation de son identité. Puisque le patient est privé d’une image satisfaisante, il ne porte plus d’intérêt positif sur son corps, ne veut plus s’admirer et donc s’aimer. L’idéal corporel, qu’il s’était fixé au fil du temps, est alors atteint. 3.1.2. Le membre fantôme ! ! L’amputation entraînant une altération de l’image corporelle, et amenant le patient dans une difficulté d’adaptation, des perceptions corporelles fantômes peuvent êtres constatées. En effet, après l’amputation d’un membre, la perception de ce dernier persiste avec des propriétés sensibles dégradées : contours flous, forme incomplète, taille raccourcie, etc. Le sujet peut alors ressentir des sensations anormales au niveau du membre amputé comme une crampe, une brûlure, un serrement, parfois des sensations électriques. Ce phénomène intriguant tient à la persistance du schéma corporel qui correspond à l’intégralité du corps avant l’amputation. Ce syndrome du membre fantôme, appelé plus scientifiquement l’algohallucinose, correspond à l'interprétation erronée par le cerveau de sensations nerveuses venant du moignon comme si elles provenaient du membre amputé. L’algohallucinose affecte près de 72 % des patients en post-opératoire. ! 15 3.2. Conséquences psychologiques 3.2.1. Le deuil d’un membre ! Faute de ne pouvoir conserver la totalité de son corps, le sujet s’estime anéanti. Un travail de deuil sera donc nécessaire afin de reconnaître progressivement que, même privé d’une partie de son corps, le sujet reste une totalité vivante. Selon Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre et psychologue en soins palliatifs, « le deuil est causé par la séparation brutale ou la mort d’un être cher. » Seulement, il peut s’appliquer également à d’autres situations telles qu’un divorce, une perte physiologique ou physique. C’est le deuil d’une perte physique qui sera étudié dans cette partie. Le deuil du membre se définit par l’acceptation du handicap et de la modification de l’image corporelle. Cette phase a pour but de permettre à l’individu de retrouver ses habitudes de vie se rapprochant au maximum de celles présentes avant l’intervention. Elle est différente pour chacun, peut varier dans le temps voir même ne jamais se réaliser entièrement chez certains patients. Cette évolution psychologique nécessite une prise en charge par un psychothérapeute et si besoin un psychiatre en collaboration avec l’équipe soignante (médecins, infirmiers, kinés). D’après le modèle d’Elizabeth Kübler-Ross, ces cinq phases sont : - Le déni : « Ce n’est pas possible... », le patient, venant d’être amputé, refuse de voir la réalité en face. Il est dans l’impossibilité de trouver des solutions futures face à la situation actuelle, comme l’utilisation de moyens prothétiques. Cette étape est généralement de courte durée. - L’agressivité et la révolte : « C’est de la faute de... », « Pourquoi moi et pas un autre... », après la dénégation de l’amputation, le patient se confronte à la réalité et réalise son nouvel état physique. Il porte sa révolte sur l’injustice représentée par l’amputation et aux conséquences qui en découlent, c’est-àdire une incapacité qui n’est plus récupérable, mais seulement compensable.! ! 16 Cette phase peut être pénible à vivre autant pour le patient que pour son entourage, la colère pouvant se diriger contre les proches, le personnel soignant, le patient lui-même. ! De plus, l’amputation étant due aux complications d’une maladie chronique, dans ce cas le diabète de type 2, le patient peut ressentir un sentiment de culpabilité « Qu’aurai-je dû faire, ou ne pas faire, pour que cela n’arrive pas ? » - Le marchandage : Lors de cette phase, le patient commence à se projeter dans l’avenir en tentant d’appréhender sa nouvelle situation, avec l’objectif de vivre « comme avant ». Il rentre en négociation avec son entourage et le personnel soignant : « Comment trouver un arrangement avec le changement ? ». - La dépression : le terme « dépression » n’est pas définie dans ce cas comme une maladie psychosomatique mais plutôt comme un fort sentiment de tristesse causé par le constat de la perte définitive du membre. La réaction à la perte d’une partie de soi se marque par une sorte de sentiment d’anéantissement : « je ne suis plus rien... ». La personne prend conscience de sa nouvelle image mais s’interroge sur l’intégration de son amputation dans la vie de tous les jours.! Il se rend alors compte qu’il ne pourra pas « vivre comme avant », mais plutôt apprendre à revivre avec son amputation. Cette phase aboutit à une phase d’espoir où le patient espère parvenir à intégrer son handicap à sa « nouvelle vie ». Le patient peut désormais entendre les informations qui lui sont transmises au sujet de son amputation, les appareillages, les différents changements, etc. - L’acceptation : La personne s’habitue progressivement à sa modification corporelle. Elle désire aller de l’avant et reprendre goût à la vie. Le travail d’acceptation est une démarche sans laquelle il n’est pas possible d’accéder à l’autonomie permettant d’intégrer l’amputation dans la vie quotidienne ; l’autonomie étant définie comme « l’ensemble des habiletés permettant à une ! 17 personne de gérer ses actes de la vie quotidienne, par ses propres moyens, de subvenir à ses besoins personnels ». Cependant, cette étape n’est pas définitivement acquise puisque plusieurs facteurs peuvent influencer sur la vie du patient, et donc jouer sur le contexte psychologique. D’un point de vue personnel, sans remettre en cause les dires d’Elizabeth Kübler-Ross le terme « acceptation » me paraît mal employé, puisque le patient amputé ne sera jamais dans la phase d’acceptation mais plutôt dans celle d’adaptation. En effet, la personne amputée va continuer à vivre avec son amputation mais va devoir s’adapter aux différents changements encourus par la perte du membre. La personne n’accepte pas, elle vit avec. De plus, il est évident, que le travail de deuil commence bien plut tôt que lors de l’amputation elle-même. En effet, c’est lorsque l’amputation sera effectuée que le patient se rendra réellement compte de sa nouvelle image corporelle, cependant le travail de deuil débute dès l’annonce de l’amputation où le patient est dans une phase de choc psychologique puisque ses projets de vie sont figés et remis en cause. Dans ce cas, le patient ayant connaissance d’une future amputation et donnant son consentement, il peut débuter ou du moins concevoir le processus d’acceptation. Le patient est donc « préparé » à l’acte et peut en discuter avec l’équipe soignante, contrairement aux amputations d’urgence où la personne ne peut pas l’anticiper car il faut agir assez rapidement afin de pouvoir sauver le patient. L’aboutissement de ce travail va permettre au patient de faire le deuil de ce qu’il était avant et d’envisager l’avenir comme il est maintenant, permettant ainsi l’élaboration d’une nouvelle image corporelle. ! 18 3.2.2. Le concept de résilience, une capacité à surmonter les épreuves Boris Cyrulnik, éthologue, neuropsychiatre et psychanalyste définit le concept de résilience comme « la capacité pour un individu à faire face à une situation difficile ou génératrice de stress, à apprendre à vivre avec et à rebondir en changeant de perspective, voire même à se délivrer d’un passé empoisonnant pour en sortir grandi ». Le fonctionnement de résilience s’élabore par plusieurs processus défensifs d’ordre intrapsychique et de facteurs de protection internes et externes. Ces différentes phases de défenses sont : - Une révolte avec un refus de se sentir condamné au malheur : l’amputation a fait naître pour le patient une certaine agressivité, il considère ce qu’il lui arrive comme une injustice. - Le rêve et le défi : le patient va être dans un état de vengeance, il va vouloir « prouver » à son amputation qu’elle ne l’a pas abattu, qu’il peut continuer de vivre. - Le déni : le patient va se créer une image de personne forte afin de se protéger de la pitié de l’entourage, même s’il reste fragile intérieurement. - L’humour : le patient ne voulant pas s’abattre sur son propre sort, il va développer une forme d’autodérision face à son traumatisme. Cet humour va lui permettre de ne pas se morfonde dans la tristesse et de pouvoir avancer. La résilience ne consiste donc pas à apprendre à fuir l’épreuve mais à l’affronter, ce qui la développe. Cependant, est-elle possible pour tous ? Face à la souffrance, un individu va soit se laisser abattre ou se battre. Ce choix va dépendre du vécu de la personne, de sa construction psychique et culturelle, qui influencera sur le processus de résilience. Ce processus va donc être possible ou non en fonction de l’histoire personnelle de chacun avec la confiance développée au fil du temps. En conclusion, le retentissement des amputations va varier en fonction de l’âge du sujet, de son état général (physique et psychologique), de son niveau d’amputation, et de ses habitudes de vie. Chaque individu est unique, et nous ne ! 19 pouvons pas anticiper la réaction de chacun, l’accompagnement de l’infirmière sera alors très important pour aider le patient à s’adapter à sa nouvelle image corporelle. 4. Le rôle de l’infirmièr(e) 4.1. Ce que dit la loi Être infirmièr(e) impose des responsabilités professionnelles, des devoirs, des attitudes qui sont inscrites dans des textes officiels. - Selon l’article L.4311-1 du code de la santé publique, « Est considérée comme exerçant la profession d’infirmière ou d’infirmier toute personne qui donne habituellement des soins infirmiers sur prescription ou conseil médical, ou en application du rôle propre qui lui est dévolu. L’infirmière ou l’infirmier participe à différentes actions, notamment en matière de prévention, d’éducation de la santé et de formation ou d’encadrement ». - Selon l’article R.4311-1 du décret n°2004-802 du 29 juillet 2004 du code de la santé publique, « L'exercice de la profession d'infirmier ou d'infirmière comporte l'analyse, l'organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au recueil de données cliniques et épidémiologiques et la participation à des actions de prévention, de dépistage, de formation et d'éducation à la santé. » 4.2. L’infirmièr(e) face à l’amputation Les soins d’un patient ayant subi une amputation visent à la prévention des complications et à une cicatrisation optimale du membre amputé. Le premier pansement est réalisé 24h après l’opération, puis tous les 2 à 3 jours si l’évolution est favorable. Le but du bandage de moignon est de protéger la cicatrice et le moignon, diminuer l’hématome, favoriser la cicatrisation ainsi que le retour veineux, modeler le moignon et lui donner une forme conique afin de favoriser la mise en place de la prothèse. ! 20 Il est donc important que les pansements soient réalisés avec bienveillance, afin d’obtenir une bonne cicatrisation. La particularité des soins est de veiller au confort et au bien-être du patient. En effet, une évolution positive de la plaie permettra une rééducation plus rapide et donc la réinsertion du patient dans la vie sociale. Il aura alors un regard plus positif sur sa situation. Pendant la réalisation des pansements, le patient est mis au cœur des soins. L’infirmièr(e) lui explique les différents temps du bandage afin qu’il puisse, par la suite, les réaliser lui-même au domicile. L’infirmière investit le patient et évalue son implication, son regard face à son membre amputé. Un accompagnement s’instaure avec l’équipe soignante pour aider la personne soignée à accepter cette situation, à s’adapter au changement de son image corporelle. Le soin infirmier est défini par Walter Hesbeen, infirmier et docteur en santé publique de l’Université Catholique de Louvain, comme étant « l’attention particulière portée par une infirmière ou un infirmier à une personne ou à ses proches en vue de leur venir en aide dans la situation qui est la leur. Il comprend tout ce que ces professionnels font, dans les limites de leurs compétences, pour prendre soin des personnes. Au regard de sa nature, il permet de toujours faire quelque chose pour quelqu’un afin de contribuer à son bien-être quel que soit son état. » Le soin n’est donc pas seulement un acte technique mais il est également relationnel. Il est alors important d’allier ces deux domaines, technique et relationnel afin d’accompagner le patient dans son processus d’acceptation. Prendre soin du patient, c’est s’enquérir de son environnement direct et contribuer à son bien-être. C’est également le rôle des soins relationnels, qui sont des interventions verbales et/ou non verbales, fondés sur des techniques de communication visant à apporter une aide ou un soutien psychologique. D’ailleurs, la notion de « prise en charge » est occultée et privilégiée par la notion de « prendre soin », respectant davantage la personne comme sujet de soins, et non d’objet. ! 21 En effet, le livre « Relation d’aide en soins infirmiers » indique que le « prendre soin » nécessite compétence, attention, écoute, tact et discrétion afin de préserver le sens et la justesse des décisions adoptées dans la concertation. 4.3. La relation d’aide, un soin à part entière Selon Carl Rogers, psychothérapeute américain du XX ème siècle, la relation d’aide est définit comme étant « une interaction entre deux personnes où l’une s’appuyant sur sa formation et ses compétences, va chercher à offrir à l’autre les conditions lui permettant de trouver ses propres solutions face au problème qu’elle rencontre. C’est un comportement professionnel qui va au-delà de la volonté d’être à l’écoute. » La relation d’aide est, certes, définie, mais est unique pour chacun. Elle n’est pas forcément possible avec tous et évolue selon la situation et selon les besoins manifestés. Elle peut varier selon le lieu, les circonstances, la nature du travail de l’aidant ou encore son degré d’habileté. Grâce à cette relation, la personne est prise en compte dans sa globalité. Que diffère la relation d’aide infirmière ? L’infirmière dans cette relation va permettre à la personne de chercher du sens, de trouver ses ressources. Pour cela, la relation d’aide infirmière se situe dans la réflexion clinique infirmière, la mise en évidence d’un problème, l’analyse de celuici afin de comprendre les besoins du patient. Ainsi l’infirmière va pouvoir accompagner la personne à trouver elle-même ses propres solutions en mobilisant ses ressources. ! La relation d’aide repose sur un ensemble de principe et d’attitudes avec lesquelles le soignant doit se familiariser. En effet, cette relation, sans jugement de valeur, ne peut se développer que si la personne soignée se sent en sécurité et en confiance. Adaptée à chaque situation, l’infirmièr(e) adoptera des techniques non-verbales constituées de gestes, d’attitudes (se mettre à la même hauteur que le patient, ne pas lui tourner le dos), d’expressions faciales (le sourire) et de mouvements ! 22 corporels (le toucher) ; et/ou des techniques verbales avec l’utilisation de différents types de reformulation : - La reformulation écho : consiste à répéter ou paraphraser les mots du patients afin de mettre l’accent sur certaines paroles et de l’inviter à développer sa pensée « Ainsi, selon vous... », « En d’autres termes... ». - La reformulation résumée : elle résume l’essentiel de ce que le patient vient de dire. - La reformulation clarification : elle consiste à mettre en lumière et à renvoyer au sujet le sens même de ce qu'il dit. - La reformulation reflet de sentiment : Mise en évidence de l’émotion dominante ressenti par l’écouté. Grâce à ces différents moyens, le sujet se sent réellement écouté et accueilli dans ce qu’il peut exprimer de lui-même. Cela va lui permettre également de s’ouvrir davantage et de confier des choses qu’il ne pensait pas livrer dans un premier temps. De plus, l’infirmière va adopter une attitude empathique, une écoute active ainsi qu’une authenticité. L’empathie permet de s’ouvrir à l’autre pour comprendre la situation qu’il vit sans avoir besoin de se mettre à sa place. L’écoute active, elle, implique la faculté d’entendre dans le sens d’une compréhension intellectuelle et affective de l’autre ; elle demande de prendre le temps, d’être disponible, bienveillant, respectueux, sincère, discret et d’être capable de faire silence. En effet, le silence n’est pas seulement une absence de parole, il est fait d’intérêt et d’attention afin de laisser la place à l’autre. Olivier Cotinaud, auteur de « Psychologie et soins infirmiers », cite « Toute situation de communication implique une part de silence : à l’écoute silencieuse répond une parole pleine ; et la parole elle-même ne se constitue que par une certaine capacité de silence ». Enfin, l’authenticité est la faculté d’être en accord avec ce que le soignant pense, ressent, et exprime. L’infirmièr(e), s’implique avec sincérité dans la relation et peut être amené à introduire ses émotions s’il/elle pense que cela peut être une aide ! 23 pour la personne soignée. Ce partage va alors renforcer le lien de confiance soignant-soigné. De ce fait la personne soignée s’impliquera davantage dans ses soins et ses traitements. Pour Carl Rogers, « la relation d’aide n’est pas une relation amicale, sans rapport autoritaire mais a pour essence des échanges constructifs, une réciprocité qui sous-entend une compréhension mutuelle, donner et recevoir ». Cependant, cette relation peut parfois rencontrer des limites liées à la personne aidée. En effet, le patient peut transférer son histoire sur l’aidant, l’amenant à ressentir des sentiments positifs ou négatifs selon la situation. Ces sentiments peuvent alors constituer une limite dans le cas où l’infirmière pourra être investie d’un rôle qui n’est pas le sien et dans un deuxième cas où la relation de confiance peut être mise en difficulté. Parfois, la personne aidée peut aussi attendre que l’aidant lui donne les solutions aux problèmes, qu’il lui apporte les réponses, sans que le patient ne s’implique, l’empêchant alors de mobiliser lui-même ses ressources et la volonté de s’en sortir. De plus, la relation d’aide sera dans l’impossibilité d’être réalisée lorsque le patient est non-coopérant à l’entretien, totalement passif. Il est alors important de revoir avec le patient ce qu’il attend vraiment puisqu’une relation d’aide ne doit pas être imposée. Il ne faut pas pour autant abandonner l’idée de cette relation car le comportement du patient pourra être totalement différent lors de l’entretien suivant. ! Pour qu’une relation d’aide soit de qualité, le soignant doit connaître ses propres limites afin de ne pas s’épuiser et éviter que les rôles soignant-soigné ne s’inversent. Seulement, l’infirmièr(e) peut également rencontrer des limites dans la relation. Le soignant peut faire preuve d’un manque d’engagement par manque de disponibilité, après la fin d’un suivi difficile et éprouvant. A l’inverse, il peut faire preuve d’un trop-plein d’engagement où l’infirmièr(e) se surinvestie dans la relation dépassant alors la limite du rôle professionnel et de leur vie privée. ! 24 Le manque de formation ou d’expériences peut déstabiliser l’aidant. L’infirmièr(e) peut être maladroite, vouloir à tout prix trouver une réponse, des solutions. Au contraire, un trop plein de formations peut amener le soignant à trop se centrer sur ce qu’il a à dire ou à faire, omettant la chose la plus importante : l’écoute. Enfin, l’infirmièr(e) doit savoir faire la part des choses entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. En effet, l’histoire d’autrui peut la renvoyer à sa propre histoire et la mettre en difficulté puisqu’elle peut être troublée par ses propres émotions. Quelque soit la difficulté, il est important que d’en parler en équipe pour éviter l’épuisement professionnel et afin d’optimiser au mieux le « prendre soin ». 4.4. L’intérêt d’un travail en équipe Selon l’HAS « une équipe est un groupe de professionnels qui s’engagent à travailler ensemble autour d’un projet commun centré sur le patient. L’équipe se compose de professionnels avec des compétences complémentaires dont le patient a besoin. » Le travail en équipe, ou interdisciplinarité, recherche une complémentarité par la collaboration de professionnel possédant des compétences différentes dont l’association créé une dynamique positive pour le patient. Prendre soin de la personne malade fait appel à un travail interdisciplinaire. L’infirmièr(e) n’est pas le seul intervenant pour le patient : les aides-soignants, psychologues, psychiatres, médecins, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, prothésistes, assistants sociaux, ont aussi un rôle bien défini dans la prise en charge du patient. En effet, toutes les dimensions de la personne sont sources d’attention dans la démarche de l’équipe soignante et de chacun de ses membres. Prendre en compte et répondre à l’ensemble de ses besoins en santé, fait appel à des compétences différentes qui impliquent un travail en synergie entre différentes disciplines, en interactions coordonnées pour donner sens au projet de soins personnalisé du patient. ! 25 En plus d’être un intérêt pour le patient, cette interdisciplinarité en est un pour l’équipe soignante. En effet, cette collaboration permet aux soignants de pouvoir faire face et discuter avec l’équipe si l’un d’entre eux se sent en difficulté face à une situation, permettant ainsi de pouvoir prendre du recul et de ne pas altérer la prise en charge du patient IV. SYNTHESE DE L’ANALYSE DU CADRE DE REFERENCE D’après la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, et selon l’article L.6111-1, une délivrance des soins envers tous les patients est obligatoire et indispensable. Concernant ma situation, une personne hospitalisée pour une découverte de diabète de type 2 est directement prise en charge dans le service d’endocrinologie. Selon l’article L.1161-1 du code de Santé Publique, les infirmiers assurent une éducation thérapeutique au patient. Le rôle de l’éducation thérapeutique est de donner un niveau de compétences aux patients pour leur permettre d’être autonomes dans leurs soins. Les professionnels de santé évaluent ainsi le patient et identifient avec lui ses besoins et ses attentes afin de définir un programme personnalisé. Le patient va être suivi à l’aide d’outils pédagogiques afin de suivre l’évolution de son apprentissage. De plus, les patients sont informés des risques et des complications encourues par la maladie, relevant de la prévention secondaire. Selon l’OMS, en France, on dénombre près de 10 000 amputations dues aux complications du diabète. Comment expliquer ce fait, alors que l’éducation thérapeutique vise à améliorer la qualité de vie des personnes diabétiques et d’en limiter les complications ? Le diabète de type 2 est une maladie chronique qui évolue avec le temps. Malgré une éducation thérapeutique mise en place entre les professionnels de santé et le patient, le diabète peut devenir déséquilibré. Le diabète est une maladie demandant beaucoup de surveillance et d’adaptation notamment sur les habitudes de vie du patient où il va devoir associer une ! 26 alimentation saine à une activité physique régulière, étant les principaux traitements non médicamenteux avant la mise en place de thérapeutiques médicamenteuses, les antidiabétiques oraux. Seulement, plusieurs facteurs, comme le travail, le manque de temps, la lassitude peuvent amener le patient à délaisser la prise en charge de son diabète. Selon la charte du patient hospitalisé, le patient n’est pas dans l’obligation de consentir aux soins qui lui sont prescrits. Cela peut donc amener à une non observance des traitements thérapeutiques et des soins, résultant à une mauvaise prise en charge médicosociale. Cette non observance du traitement encourt alors à des complications. En effet, un diabète mal soigné peut générer des complications à long terme touchant différentes parties du corps comme les yeux (rétinopathie diabétique), les reins (néphropathie diabétique), le cœur (coronarite), les artères (HTA) et les pieds. Un pied diabétique mal soigné encourt alors à l’amputation. Celle-ci sera localisée à l’endroit dévascularisé et nécrosé. Cet handicap pose un grand problème, où le patient est face à une altération physique importante, se caractérisant par la perte d’un membre. Cet handicap physique va alors impacter sur l’image corporelle du patient et va l’amener à faire le deuil de son membre en passant par cinq phases différentes. Le retentissement des amputations va varier en fonction de l’âge du sujet, de son état général (physique et psychologique), de son niveau d’amputation, et de ses habitudes de vie. Chaque individu est unique, et nous ne pouvons pas anticiper la réaction de chacun, l’accompagnement de l’infirmière sera alors très important pour aider le patient dans les différentes étapes du deuil de son membre. C’est donc au regard de cet impact que mon questionnement professionnel s’est orienté sur le rôle de l’infirmière face à l’amputation. ! 27 Le code de déontologie du Conseil International des Infirmières précise dans son préambule, les « quatre responsabilités essentielles des infirmières : promouvoir la vie, prévenir la maladie, restaurer la santé et soulager la souffrance ». Face à l’amputation, l’infirmière va soulage le patient sur le plan physique comme sur le plan psychologique. Il est, en effet, indispensable d’allier les deux puisqu’une bonne cicatrisation amènera plus rapidement le patient à débuter sa rééducation. La rééducation permettra ainsi au patient de retrouver de l’autonomie puisqu’il pourra remarcher, petit à petit, grâce à l’utilisation d’une prothèse. Cette prise d’autonomie favorisera alors la réinsertion professionnelle et sociale. Tous ces facteurs joueront donc évidemment sur la vision du patient face à sa nouvelle image corporelle. De plus, selon l’article L.4311-1 du code de Santé Publique, « l’infirmière participe à différentes actions, notamment en matière de prévention, d’éducation de la santé et de formation ou d’encadrement. » Dans ce cas, il s’agit de prévention tertiaire : « Elle comprend tous les actes destinés à diminuer la prévalence des incapacités chroniques ou des récidives dans une population, donc à réduire au maximum les invalidités fonctionnelles consécutives à la maladie ». Ce n’est qu’une fois que le patient s’adaptera à sa nouvelle image corporelle, et qu’il sera alors plus réceptif, que l’infirmière pourra le prévenir des risques de récidives des complications du diabète en l’informant des différentes conduites à tenir. L’infirmière a donc un rôle important dans l’adaptation du patient à sa nouvelle image corporelle. ! 28 V. METHODOLOGIE DE RECHERCHE 1. La problématique Après avoir établi mon cadre de référence et au vu de cette analyse, j’ai pu établir la problématique suivante : Comment l’infirmière peut-elle accompagner le patient à s’adapter à sa nouvelle image corporelle ? ! 2. L’hypothèse Au vu de la problématique énoncée précédemment, j’ai formulé deux hypothèses : - Si les infirmiers participent à des formations sur la prise en charge du handicap, alors celle-ci serait mieux adaptée pour les patients amputés. - Si le patient gagne en autonomie alors il s’adaptera plus facilement et plus rapidement à sa nouvelle image corporelle. ! Les formations permettent d’acquérir, de développer et de réactualiser les compétences de l’infirmière. En ayant une bonne connaissance sur la prise en charge du handicap, l’infirmièr(e) pourra alors apporter une aide appropriée aux besoins de la personne, au niveau physique comme au niveau psychologique, puis pallier au manque d’autonomie. Intégrer l’autonomie du patient, dans son handicap, est une chose très importante puisqu’elle permet une réinsertion sociale. Le but étant que le patient soit capable de gérer seul sa vie quotidiennement. Cette prise d’autonomie influencera alors sur l’image corporelle du patient puisqu’il pourra, au fur et à mesure, reprendre ses habitudes J’ai alors retenu l’hypothèse suivante : Si le patient gagne en autonomie alors il s’adaptera plus facilement et plus rapidement à sa nouvelle image corporelle. ! ! ! ! 29 3. Choix de l’outil d’enquête Afin de concevoir ma partie exploratoire et de vérifier mon hypothèse, un choix rigoureux a dû être fait sur l’utilisation de mon outil d’enquête. Voulant rencontrer les différentes personnes interrogées et établir des questions ouvertes, c’est donc l’entretien semi-directif (annexe 4) qui me correspondait le plus. En effet, l’entretien semi-directif permet un recueil d’informations grâce à différentes questions établies au préalable avec pour chaque un objectif précis, permettant au répondant de s’exprimer librement. De plus, contrairement à un questionnaire, il est possible de pouvoir reformuler sa question lorsque l’intervenant n’a pas compris ou de demander plus d’informations si il n’a pas été assez précis selon nous. 4. Choix du lieu et des personnes interrogées Mon choix s’est ensuite centré sur le lieu et sur les personnes que j’allais interroger lors de mon entretien. Le lieu choisi a été un service de diabétologie, lieu où il est récurrent de prendre en charge des patients diabétiques amputés. J’ai alors contacté par téléphone le cadre du service, afin de pouvoir rencontrer entre trois et cinq infirmiers, qui m’a autorisé à réaliser ces entretiens. Après m’être entretenue avec la première infirmière, celle-ci m’a proposé de rencontrer d’autres professionnels de santé, soit une deuxième infirmière, un médecin endocrinologue et un podologue. J’ai également pu interroger un patient ayant subi récemment une amputation trans-métatarsienne, plus précisément une amputation de l’avant-pied. ! 30 5. Résultats d’analyse argumentés : Afin d’éviter de me répéter dans mon analyse, mes questions seront rassemblées par thématique permettant alors une analyse globale de chaque thème. L’annonce Question 1 : « L’infirmière est-elle en présence du médecin lors de l’annonce de l’amputation au patient ? Comment l’annonce-t-il ? » Mon objectif étant de connaître les conditions du patient lors de l’annonce. Infirmière (IDE) 1 : « Nous ne sommes pas en présence du médecin lors de l’annonce. Le médecin ne demande pas la présence de l’infirmière si ce n’est pas dans les habitudes du service. Personnellement, je n’ai jamais assisté à une annonce. Néanmoins je pense que le médecin est direct, dans le sens où c’est la seule solution pour sauver la vie du patient. » IDE 2 : « Malheureusement nous ne sommes pas en présence du médecin. C’est vrai que ce serait intéressant dans le sens où nous pourrions déjà aborder le patient et voir comment il réagit, pour envisager par la suite la prise en charge adaptée. » Médecin endocrinologue : « Nous l’annonçons comme nous pouvons. En général, lorsqu’ils arrivent et que nous connaissons déjà le pronostic du membre, il faut y aller progressivement. Je pense que c’est bien que ce soit les médecins qui préparent l’annonce en amont car je trouve que le chirurgien va l’annoncer cash sans prendre de pincettes ». Au niveau des termes employés, je ne prononce pas le mot « amputation » pour la première fois mais plutôt « d’enlever, retirer l’orteil » puis au fur et à mesure j’emploie le terme d’amputation. » ! 31 Podologue : « Il faut savoir que le geste chirurgical, donc l’amputation, signifie « la sanction » dans le milieu médical. Lorsqu’elle a lieu c’est parce que c’est la seule alternative, qu’il n’y a pas d’autre choix. L’annonce va donc être différente que lorsque l’on annonce une opération pour une prothèse de hanche ou une prothèse de genou. Pour nous l’amputation signifie un échec puisque nous n’avons pas pu sauver le membre. Il est donc important de ne pas le faire ressentir lors de l’annonce au patient. » Question 2 : « Vous êtes-vous déjà senti en difficulté ? » Mon objectif étant de connaître l’attitude du soignant face au patient IDE 1 : « N’ayant jamais assisté à l’annonce d’une amputation avec le médecin, il est difficile pour moi de répondre à cette question. Mais ce qui est difficile pour nous, c’est de voir l’évolution défavorable d’une plaie menant à l’amputation. Notre but est de soigner, et voir que notre travail n’aura servi à « rien », cela nous fait de la peine, c’est un sentiment d’échec. Notre nouveau but, dans ce cas, est d’éviter la récidive en prodiguant les différents soins au membre amputé, ainsi qu’à l’autre jambe afin d’améliorer la qualité de vie du patient. » IDE 2 : « L’annonce étant établie au préalable par le médecin, je ne me suis jamais sentie en difficulté. » Médecin endocrinologue : « Lorsque l’on arrive à une amputation majeure, c’est considéré comme un échec. Nous sommes là pour guérir les plaies. Pour nous l’amputation n’est pas une option thérapeutique, c’est la dernière alternative quand on ne peut plus rien faire d’autre. On essaye au minimum d’amputer lorsque l’on peut sauver le membre. Personnellement, je ne me suis jamais sentie en grande difficulté. Dans le sens, où l’annonce de l’amputation n’est pas brutale, nous pouvons déjà effectuer un travail avec le patient et le mettre en conditions. Heureusement, nous guérissons plus que nous amputons. » ! 32 Podologue : « Pour nous l’amputation signifie un échec puisque nous n’avons pas pu sauver le membre. Il est donc important de ne pas le faire ressentir lors de l’annonce au patient. » Question 3 : « Quelles ont été les différentes réactions des patients ? » Mon objectif étant de connaître les différentes réactions des patients afin de voir les différentes prises en charge adaptées. IDE 1 : « Nous ce que l’on voit dans le service, en général, l’annonce se passe « bien » dans le sens où les patients n’ont pas le « choix » pour continuer de vivre. » IDE 2 : « L’annonce n’étant pas faite du jour au lendemain, le patient a plus de temps de se faire une raison. Je pense que c’est après l’acte que le patient prend vraiment conscience de la perte de son membre. » Médecin endocrinologue : « C’est exceptionnel que l’amputation soit brutale. Sinon la plupart de nos patients, on les prépare au fur et à mesure. Surtout sur les patients qui ont des terrains vasculaires sévères ». Question 4 : « Avez-vous été confronté au refus d’amputation d’un patient ? » Mon objectif étant de savoir les moyens mis en place lorsqu’il y a un refus IDE 1 : « Récemment, on a eu un patient chez qui une amputation sousgonale était organisée et où il a refusé l’amputation à la dernière minute. » IDE 2 : « Oui, nous avons eu le cas avec un patient du service, qui ne voulait pas être amputé. On a alors essayé de lui faire comprendre que vis-à-vis de son état de santé, ce serait mieux d’amputer car sinon il peut mourir d’une gangrène et d’un risque infectieux, mais nous respectons toujours le choix du patient. » ! 33 Médecin endocrinologue : « C’est arrivé une fois pour une dame arrivée avec une gangrène sévère au niveau du pied et c’était normalement une amputation de sauvetage. Afin de récupérer la fonctionnalité du pied, c’était une amputation sous-gonale qui était prévue. Madame s’y est refusée, donc comme elle était en sepsis sévère on a fait une amputation de sauvetage courte qui n’est donc pas fonctionnelle. Madame ne remarche pas, elle est en fauteuil roulant mais ca lui a sauvé la vie et un VAC a été posé afin de cicatriser. » Lors de l’annonce de l’amputation au patient, l’infirmière n’est donc pas en présence du médecin. Néanmoins les infirmières interrogées pensent qu’il serait intéressant pour elles de pouvoir y participer car cela permettrait d’avoir un premier abord/première approche avec le patient. De plus il serait intéressant que l’infirmière, ayant assisté à l’annonce, participe par la suite à la prise en charge de ce même patient. En effet, la rencontre au préalable entre le soigné et l’infirmière instaurerait peut-être plus rapidement une relation de confiance. Concernant l’annonce, celle-ci n’est pas brutale. Au cours des différentes rencontres avec le médecin ainsi que lors des différentes hospitalisations, en restant dans le contexte d’un diabétique de type 2, le patient est prévenu par le personnel soignant des risques et complications encourus. Lorsque le patient est face à un pied diabétique avec une évolution défavorable de la plaie, c’est-à-dire que le processus de cicatrisation est très retardé et que la peau tend à se nécroser, l’amputation est alors envisagée s’il n’y a pas d’autres recours. C’est au cours de cette évolution défavorable que le médecin va commencer à anticiper l’annonce afin qu’elle ne soit pas brutale. Comme l’a cité le podologue, l’amputation signifie « la sanction ». L’amputation est donc un échec pour l’équipe soignante puisque le membre n’a pu être sauvé. Cependant c’est « grâce » à cet acte chirurgical, que la vie du patient pourra l’être. L’intervention va alors reposer sur la balance bénéfices-risques. ! 34 Est-il plus important d’amputer le patient mais de lui sauver la vie ? Ou est-il plus important de conserver, certes, la jambe du patient risquant l’évolution de la gangrène et amenant dans un cas de sepsis sévère avec d’atroces souffrances ? Bien évidemment la réponse est tout à fait évidente pour les professionnels de santé. Cependant le patient va avoir un avis différent à ce sujet. Il est important d’expliquer l’intérêt pour lui d’accepter l’amputation. C’est donc, bien entendu, toujours difficile d’annoncer une amputation à un patient. Malheureusement c’est aussi notre métier, nous ne pouvons pas nous permettre de montrer nos sentiments envers le patient. C’est lui qui est en droit d’aller mal, au vu de l’annonce, pas nous. Les soins Question 5 : « Comment réagit le patient amputé lors des soins ? Comment réagissez-vous ? » Mon objectif étant de connaître les réactions du patient lors des soins ainsi que celles des soignants IDE 1 : « Les patients verbalisent très peu sur l’amputation elle-même. Si je vois que le patient n’est pas affecté, je ne vais pas aller plus loin. Après un patient qui ne va pas bien, j’essaye de savoir ce qu’il pense, savoir pourquoi il n’accepte pas l’amputation. Je lui réexplique que c’était la seule solution, que cela lui a sauvé la vie. J’essaye de l’écouter, d’avoir de l’empathie, lui montrer qu’il se sent compris. » IDE 2 : « Au niveau physique, le patient a le syndrome du membre fantôme. Il ressent des sensations anormales au niveau de son membre amputé, comme des fourmillements, des démangeaisons. Des antalgiques peuvent être donnés afin de palier la douleur. Après lorsque le patient voit que la plaie cicatrise positivement, il est content. ! 35 Lorsqu’il réagit mal face à son amputation, je lui explique que c’est la seule solution et que c’était un bénéfice-risque pour qu’il vive plus longtemps, avec une meilleure qualité de vie. Je lui dis qu’il pourra être appareillé, que lorsqu’il sortira il pourra aller en convalescence pour l’aider à remarcher. » Podologue : « Lors des soins, je trouve que les patients réagissent plus sur la douleur, l’évolution de leur plaie, plutôt que sur leur ressenti psychologique. Ils ne verbalisent pas ce qu’ils pensent. Selon la personne, je vois si je peux aborder le sujet et essaye d’en discuter avec elle. Si le patient ne veut pas en parler, je préfère ne pas insister afin de ne pas le brusquer et de casser la relation créée.» Nous pouvons remarquer que le patient va principalement verbaliser sa souffrance physique que celle psychologique, comme la sensation fantôme où le patient est face à une douleur dans son membre disparu. Il va également être attentif sur l’évolution de sa plaie. Cependant, le patient va moins verbaliser ses émotions, ses ressentis face à la situation. Or, ce n’est pas parce qu’un patient ne verbalise pas qu’il va forcément bien. Il est important de repérer les signes non-verbaux. Le soignant pourra juger s’il est possible d’approfondir le sujet avec le patient ou non. Lorsqu’il verbalise, les professionnels de santé ont un rôle d’écoute et d’empathie. Ils tentent de rassurer le patient en lui expliquant que cet acte lui a sauvé la vie et qu’aujourd’hui beaucoup de moyens sont mis en œuvre, notamment les prothèses, afin de récupérer une verticalité totale. Si le patient ne veut pas l’entendre, qu’il n’est pas d’accord, il est important de ne pas insister afin de ne pas créer des sentiments négatifs entre le soignant et le soigné. Il sera alors certainement possible d’évoquer le sujet lors des prochains soins. ! 36 L’autonomie Question 6 : « Pensez-vous que si le patient gagne en autonomie, alors il s’adaptera plus facilement et rapidement à sa nouvelle image corporelle ? » L’objectif étant de vérifier mon hypothèse. IDE 1 : « Je pense plutôt que si le patient s’adapte à sa nouvelle image corporelle, alors il pourra gagner de l’autonomie. » IDE 2 : « L’autonomie ne se fait pas tout de suite. Mais je pense qu’effectivement, l’autonomie favorisera l’adaptation du patient à sa nouvelle image corporelle » Podologue : « Dans la mesure où la personne est capable de vraiment se débrouiller, elle passe un nouveau cap. C’est-à-dire que la personne qui ne peut pas se débrouiller tout de suite du fait de son amputation, elle va le vivre beaucoup plus difficilement, cela va être plus long. Si le patient voit qu’il arrive à se gérer, cela lui donne plus de courage, il se dit « bon bah tout compte fait je suis amputé certes, cela m’a sauvé le reste de mon membre mais la vie continue, j’arrive à gérer correctement » Il y a un retour à la vie dite normale, il s’adapte à son amputation, il se réadapte. Même si ce n’est pas notre rôle direct, pour la bonne marche et pour éviter la récidive il faut faire en sorte que tout soit mis en œuvre pour que cela ne se reproduise pas et que cela se passe le mieux possible pour le patient. Cependant, certains patients prennent trop confiance, par exemple si on leur dit que c’est en bonne voie de cicatrisation, la semaine d’après la plaie est « défavorable » car le patient a voulu marcher dessus pensant que c’était complètement cicatrisé. » ! 37 Question 7 : « Comment aidez-vous le patient à gagner de l’autonomie ? » L’objectif étant de voir les moyens mis en œuvre pour favoriser cette autonomie. IDE 1 : « Grâce à l’éducation thérapeutique. Il est important que le patient ait une bonne hygiène de vie pour favoriser la cicatrisation. On lui apprend également la technique de réalisation du bandage du moignon lorsque c’est possible. En plus de la cicatrisation, il faut aussi prévenir les positions vicieuses, en installant confortablement le patient dans son fauteuil ou dans le lit. » IDE 2 : « Je l’informe qu’il est important de soigner son membre amputé ainsi que l’autre membre. Pour retrouver une autonomie complète, le patient aura besoin d’une prothèse. Pour la mettre en place, il faut que le moignon soit en parfait « état ». Mon but sera également de faire de la prévention au sujet de son deuxième membre afin d’éviter la récidive. » Podologue : « D’abord il faut l’aider à ce qu’il comprenne l’intérêt médical d’avoir subi une amputation. La première étape est de voir comment il est dans sa tête, comment il vit cette situation, comment il voit ce nouveau corps. Voir les freins et leviers qui permettent d’accepter et de vivre avec. La deuxième étape est de reformuler le but de l’amputation. Enfin la troisième étape est de voir comment il évolue, l’évaluer sur son autonomie, la cicatrisation. Des photos de la cicatrice sont d’ailleurs réalisées pour voir l’évolution. Une bonne cicatrisation rassurera le patient puisqu’il y aura une évolution favorable, ce qu’il n’est pas toujours évident, loin de là. L’approche est différente d’une personne à l’autre. Notre objectif est de faire en sorte à ce que la plaie cicatrise le mieux possible dans les conditions les plus favorables. Après c’est le rôle d’une équipe. Nous on fait les soins mais il y a aussi l’orientation vers un ergothérapeute, un kinésithérapeute, si il y a besoin d’une prothèse, faire en sorte qu’elle soit adaptée. ! 38 Cette autonomie s’acquiert au cours du temps. Elle ne se fait pas comme ca du jour au lendemain. Il y a différentes phases. » L’autonomie est une étape importante pour le retour à la vie quotidienne du patient. Elle va lui permettre de redevenir indépendant malgré son handicap. Cependant, cette autonomie se fait étape par étape, avec l’aide des professionnels de santé ainsi que la volonté du patient. Si la personne voit qu’elle arrive à se gérer seul, qu’elle retrouve certaines habitudes, elle aura forcément un regard plus positif sur son amputation. Mais cette autonomie se fait-elle une fois que le patient s’est adapté à son image corporelle? Ou permet-elle que le patient s’adapte à cette nouvelle image ? L’avis des professionnels est mitigé : une infirmière trouve que le patient devra d’abord s’adapter à son image corporelle pour ensuite gagner en autonomie, tandis que la deuxième infirmière et le podologue pensent que cette autonomie permettra l’adaptation du patient à sa nouvelle image corporelle. Le podologue argumente en expliquant que si le patient voit qu’il arrive, dans un premier temps, à réaliser ses soins d’hygiène seul, cela sera un « cap » de passé pour lui. Ainsi, le patient se rendra compte qu’il n’est pas « foutu », qu’un retour à la vie « normale » est envisageable, malgré une jambe en moins. Il reprendra alors une certaine confiance en lui et de l’espoir pour la suite. En effet, avant l’opération, les patients ont certainement une vision différente du post-opératoire. Pour eux, ils ne vont plus pouvoir marcher et vont devoir passer leur vie dans un fauteuil roulant avec un besoin d’aide partielle chaque jour. Même s’il est expliqué, en pré-opératoire, au patient qu’il pourra retrouver son autonomie grâce à une rééducation et l’utilisation de prothèses, le sujet ne veut pas l’entendre car il reste fixé sur l’amputation elle-même et ne veut pas voir plus loin, ne veut pas trouver de solutions tout de suite. Lorsque le patient est amputé, et qu’il voit qu’il arrive à se débrouiller seul, il a alors un nouveau regard sur la situation. Bien entendu, cette reprise d’autonomie va prendre un certain temps. Le facteur principal pour un retour à l’autonomie est la cicatrisation afin de permettre par la suite une rééducation. ! 39 Infirmiers, podologues, médecins veillent à une bonne cicatrisation de la plaie. Celle-ci est évaluée lors des pansements et des photos sont prises afin de voir si l’évolution est positive ou négative. Les professionnels informent le patient qu’avec une bonne cicatrisation, la rééducation pourra se faire plus rapidement. En voyant une évolution positive de la plaie, le patient aura un sentiment de satisfaction puisque visuellement la plaie sera plus « belle ». En effet, si le patient constate qu’en plus d’avoir perdu son membre, la plaie cicatrise mal et que des douleurs y sont associées, il pourra se sentir encore plus démotivé. La cicatrisation est donc la première et principale étape pour favoriser l’autonomie du patient ; de plus, les quatre professionnels interrogés le confirment. Lors des soins, les infirmières investissent le patient dans le bandage du moignon, s’il le souhaite et si c’est possible. Cela permet au patient de porter entièrement son regard vers son membre mutilé, de savoir le regarder, le toucher et d’en prendre soin. Enfin, afin que l’autonomie soit retrouvée au maximum, les soignants jugent important que le patient prenne soin de son deuxième membre en vue d’éviter la récidive. En effet, en gardant un membre sain, le patient pourra garder une autonomie à long terme. ! 40 Les transmissions Question 8 : « Parlez-vous de l’état psychologique du patient lors des transmissions ? » L’objectif de cette question étant de savoir si l’état psychologique du patient est transmis à l’équipe afin d’y travailler si le patient est en difficulté. IDE 1 : « Pas systématiquement. Si il y a vraiment un gros problème avec le patient, par exemple si il refuse les soins car il n’accepte pas son amputation, nous en parlons aux transmissions pour que les collègues soient au courant et qu’ils savent comment « prendre » le patient. » IDE 2 : « Si le patient verbalise un problème particulier, il peut nous arriver d’en parler lors des transmissions. Mais nous avons une psychologue qui est rattaché à notre service donc quand l’on sent un patient qui ne va pas bien du tout, qui a besoin d’être vu, nous lui en parlons et elle vient le voir. » Endocrinologue : « Si un patient n’est pas bien, c’est à la psychologue que nous le transmettons. » Question 9 : « En cas de difficultés, parlez-vous en avec l’équipe ? » L’objectif étant de savoir si les soignants verbalisent leurs difficultés. IDE 1 : « Personnellement, je n’ai jamais rencontré de difficultés en particulier. Si nous en avons, nous pouvons en parler à la psychologue qui intervient également pour l’équipe soignante. » IDE 2 : « Oui si j’ai un problème, un questionnement, que ce soit d’un point de vue technique ou théorique, il m’arrive d’en parler avec des collègues ». ! 41 Lorsque le patient est en grande difficulté, les infirmières préfèrent faire intervenir directement à la psychologue rattachée au service. L’état psychologique du patient n’est pas forcément discuté lors des soins sauf si celui-ci interfère sur les soins. Les transmissions sont donc plus basées sur les pathologies, les changements de traitements, l’évolution de la maladie, des plaies des patients, plutôt que sur l’état psychique. Du côté des soignants, ils travaillent en collaboration et n’hésitent pas discuter avec l’équipe s’ils ont des interrogations, difficultés sur des soins ou des apports théoriques. Cependant pour les difficultés personnelles, elles peuvent se référer à la psychologue rattachée au service. ! 42 Formation : Question 10 : « Avez-vous des formations particulières au sujet de la prise en charge d’une personne amputée ? » Cette question va me permettre de savoir si le personnel infirmier est livré à luimême lors de la prise en charge d’une personne amputée, ou s’il a un support théorique et pratique sur la prise en charge. IDE 1 : « Non, je me base sur mes acquis et mon expérience. » IDE 2 : « Je n’en ai jamais eu » Question 11 : « Est-ce que cela vous intéresserait ? » IDE 1 : « Etant donné que je n’ai jamais eu difficultés particulières face à la prise en charge du handicap, je n’en ressens pas le besoin. » IDE 2 : « Pourquoi pas, ce serait un enrichissement personnel. » Les infirmières disent ne pas avoir de formation sur la prise en charge du handicap mais l’une d’entre elles ne verrait pas d’opposition à y participer pour un « enrichissement personnel ». Cependant, elles peuvent toujours discuter avec les médecins endocrinologues du service si elles ont des difficultés dans la prise en charge d’une personne amputée. Ces formations ne sont pas imposées par l’hôpital, c’est au personnel de faire les démarches s’il souhaite y participer. Ce serait intéressant que les soignants, travaillant dans des services où sont pris en charge les différents handicaps, soient sollicités à participer à des formations de « remise à niveau » où les difficultés rencontrées. Ainsi des solutions à celles-ci pourraient être discutées. ! 43 J’ai ensuite eu l’occasion d’avoir le témoignage d’un patient diabétique, Monsieur S, amputé récemment de l’avant-pied. Mes questions destinées aux professionnels de santé ont donc été adaptées au patient. ! Question 1 : « Depuis quand êtes-vous amputé ? » Patient : « Depuis le 15 décembre. » Question 2 : « Comment s’est passée l’annonce de votre amputation ? » Cette question ayant pour objectif d’avoir l’avis du patient sur l’annonce de l’amputation par le médecin. Patient : « Comment s’est passé mon amputation ? Bien, dans un premier temps j’ai d’abord vu le docteur pour lui montrer la plaie que j’avais à mon pied et qui s’était fortement amplifiée. Pendant 2 mois, d’octobre à décembre 2015, ils ont tenté le tout pour le tout mais cela n’a pas été suffisant. Un mois avant je savais, enfin je me doutais déjà un peu de l’amputation. Le médecin m’en parlait un peu à la fois pour me préparer. Il ne me l’a pas annoncé comme ça du jour au lendemain. » Question 3 : « Quelle a été votre réaction face à cette annonce ? » Cette question va me permettre de connaître le ressenti du patient face à l’annonce. Patient : « Comme j’étais déjà préparé depuis un mois ca ne m’a pas vraiment fait un choc et puis au vu de l’état de mon pied je m’en doutais un peu. Ca fait surtout bizarre une fois que l’opération est faite et que l’on se rend compte que les orteils ont été « coupés ». Car je ne m’attendais pas à ce qu’ils coupent aussi loin. Quand on m’a parlé des orteils, je pensais que c’était le bout des orteils et pas la moitié du pied. ! 44 Pendant un mois cela m’a fait bizarre mais de toute façon on ne va pas les remettre, il faut bien s’y faire, je n’ai pas le choix. » Question 4 : « Au bout de combien de temps avez-vous été autonome, après l’amputation ? » L’objectif est de connaître le délai entre l’amputation et la prise d’autonomie. Patient : « Cela a été vite pour récupérer de l’autonomie; c’est assez grand chez moi alors j’ai l’avantage que le fauteuil passe dans toutes les pièces. De plus, lorsque j’aurais une décharge, je pourrais poser totalement le pied par terre et donc me déplacer sans fauteuil. » Question 5 : « Cette prise d’autonomie vous a-t-elle permis de vous adapter à ce membre amputé ? » Patient : « Je peux me débrouiller seul chez moi, je suis indépendant. Donc oui effectivement, comme je vois que mes habitudes de vies n’ont pas « changées », je m’adapte à mon membre. Je me dis que cette amputation n’a rien changé à mes habitudes. Malheureusement j’ai pris de l’autonomie trop rapidement. Les médecins m’autorisaient à pouvoir poser le talon par terre après l’amputation en me disant que c’était en bonne voie de cicatrisation, mais petit à petit je posais le pied complet. J’ai donc marché sur la cicatrice de l’amputation trop rapidement et j’ai créé une nouvelle plaie. Pour l’instant j’ai un VAC pour aider à la cicatrisation. » Question 6 : « Envisagez-vous la rééducation ? » Patient : « Oui bien sûr mais pour l’instant je dois attendre que la plaie cicatrise pour après être appareillé. » ! ! ! 45 ! Monsieur S a subi une amputation trans-métatarsienne en décembre 2015. C’est deux mois auparavant, en octobre 2015, que monsieur a présenté une plaie sur un pied diabétique. La neuropathie périphérique (diminution de la sensibilité des nerfs) ayant empêché la perception de cette blessure, monsieur ne s’est pas inquiété et a laissé la plaie s’aggraver et s’infecter. Les médecins et infirmiers ont essayé au maximum de soigner la plaie afin de pouvoir conserver l’avant-pied, en vain. Voyant que la plaie s’amplifiait et n’était pas guérissable, une amputation transmétatarsienne était alors inévitable afin que la plaie n’évolue sur l’ensemble de la jambe et se termine en gangrène. Au vu de l’état de son avant-pied, Monsieur S se doutait déjà qu’il y aurait un risque d’amputation. Pendant un mois, le médecin a préparé le patient progressivement afin que l’annonce ne soit pas brutale. Pour le patient, ce n’est pas l’annonce qui a été la plus choquante mais la vue de son membre après l’opération. En effet, il ne s’attendait pas à ce que le chirurgien « coupe aussi loin ». Il lui a fallu environ un mois pour s’y adapter. « Je n’ai pas le choix de toute façon, on ne va pas me les remettre » indique le patient, montrant alors une certaine résilience puisqu’il affronte cette épreuve sous forme d’humour. Le retour à domicile s’est effectué environ un mois après l’amputation. Aujourd’hui, monsieur se déplace en fauteuil roulant et se débrouille seul chez lui. Ayant marché trop vite sur son talon, une plaie s’est créée ; il est alors en attente de la cicatrisation de cette plaie afin d’être appareillé pour pouvoir se déplacer verticalement. La plaie étant trop large pour être suturée ou pour cicatriser elle-même, un VAC a été posé. Son but est de créer une pression négative sur le lit d’une plaie afin d’accélérer son bourgeonnement et réduire ainsi son temps de cicatrisation. ! ! 46 Pour résumer, lors de l’annonce de l’amputation au patient, l’infirmière n’est pas en présence du médecin. Cette annonce n’est pas faite brutalement mais elle est anticipée progressivement par le médecin au cours des différents entretiens avec le patient. Pour les soignants, le recours à l’amputation est vu comme un échec et non comme une option thérapeutique puisque le membre n’a pu être sauvé. En effet, leur but principal est de soigner au maximum la plaie afin de conserver le membre. L’amputation n’est donc envisagée que s’il n’y a pas d’autre recours, afin de sauver la vie du patient. Bien sûr, le patient est en droit de refuser l’acte. Il est alors important de discuter avec lui afin d’expliquer la nécessité de l’amputation. Généralement, les patients consentent à l’amputation lorsque l’annonce a été faite progressivement. L’étape la plus difficile étant la vue du membre amputé pour la première fois, puisque le patient se trouve face à la réalité, comme l’annonce Monsieur S. Lors des soins, le patient amputé verbalise plus sa souffrance physique que sa souffrance psychologique. Il est important que les soignants soient attentifs aux signes non-verbaux afin de porter une attention au patient et d’essayer de discuter avec lui pour lui apporter une aide. Comme le confirment la théorie ainsi que mon enquête sur le terrain, les professionnels de santé auront une attitude empathique liant écoute et authenticité renforçant alors le lien de confiance soignant-soigné. Afin de ne pas altérer cette relation d’aide, si les soignants se sentent en difficultés, ils ont l’occasion de pouvoir en parler avec la psychologue rattachée au service ainsi qu’à l’équipe soignante. Lors des transmissions, nous pouvons remarquer que l’état psychologique du patient est peu abordé, sauf si cet état rend les soins compliqués ou que le patient n’y adhère pas. Lorsque le patient est en grande difficulté, les soignants préfèrent laisser intervenir directement la psychologue. ! 47 Si la relation d’aide est importante, la prise d’autonomie l’est tout autant. En effet, l’utilisation de moyens prothétiques va pouvoir rendre le patient autonome et indépendant. Cette autonomie s’acquiert au fil du temps avec l’aide des soignants et la volonté du patient, passant par une autogestion de ses soins d’hygiène, de ses transferts jusqu’à la verticalisation grâce à l’utilisation d’une prothèse. Une bonne cicatrisation va permettre cette rééducation ; en effet une évolution positive de la plaie va conduire à une rééducation plus rapide et donc favoriser l’autonomie du patient. Afin de favoriser la cicatrisation, l’important est de respecter l’hygiène et l’asepsie lors de la réfection des pansements, ce que nous pouvons également retrouver dans le cadre de référence. Une évaluation de la plaie sera aussi faite lors des soins. Le patient pourra alors reprendre espoir pour un retour à une vie « normale » avec la reprise de ses différentes habitudes. Pour un retour à une autonomie complète, il est également important qu’il prenne soin de son deuxième membre afin d’éviter une récidive. Monsieur S l’explique d’ailleurs très bien, en disant qu’aujourd’hui il peut être à son domicile, en étant indépendant. Pour lui, ce membre amputé ne l’handicape pas puisqu’il peut continuer à vivre pratiquement comme avant en attendant la cicatrisation totale pour pouvoir être appareillé. ! 48 VI. Discussion Etant partie de l’hypothèse suivante : « Si le patient gagne en autonomie alors il s’adaptera plus facilement et plus rapidement à sa nouvelle image corporelle. », je constate que celle-ci est partiellement validée puisque sur les trois professionnels de santé à qui cette question a été posé, une infirmière trouve que l’autonomie du patient ne pourra être gagnée que si celui-ci s’est adapté à sa nouvelle image corporelle. Cependant les deux autres professionnels estiment qu’un patient autonome s’adaptera plus rapidement à sa nouvelle image corporelle. Il est vrai que ces deux hypothèses s’expliquent car chaque personne réagit différemment. Néanmoins, pour gagner cette autonomie, les professionnels ont un rôle important comme favoriser une bonne cicatrisation de la plaie. Tout est mis en œuvre pour que le patient récupère une autonomie assez rapidement. Ne pouvant confirmer l’hypothèse, nous pouvons quand même affirmer qu’autonomie et image corporelle sont liées. En effet, si le patient dénigre son membre, l’évolution de la plaie pourra se dégrader et donc influencer sur l’autonomie puisque la rééducation sera retardée. À l’inverse, si le patient ne réussit pas à être autonome, il ne voudra pas accepter son nouvel état général puisque celui-ci causera un frein à son indépendance. ! 49 VII. Conclusion De nos jours, grâce aux progrès de la médecine et de la chirurgie, le geste chirurgical d’amputation est en nette évolution et mène, dans le plus souvent des cas, à une réadaptation fonctionnelle pour un retour à l’autonomie. Bien que le respect des bonnes pratiques pour cet acte chirurgical soit fondamental, l’accompagnement post-opératoire l’est tout autant. La prise en charge d’un patient amputé n’est pas une prise en charge anodine, elle doit être interdisciplinaire et adaptée à chacun. Mon travail de recherche a pu démontrer qu’un accompagnement était instauré durant le parcours de soin du patient, de l’annonce jusqu’à la rééducation. En effet, c’est lors de l’annonce que la prise en charge du patient va débuter puisque le patient aura besoin de soutien et d’écoute. Afin que cette annonce ne soit brutale, c’est au cours de plusieurs rencontres avec le patient, que le médecin va amener progressivement le sujet d’amputation. L’adaptation du patient à sa nouvelle image corporelle va prendre un certain temps, durant lequel le patient passera par différentes phases du deuil de son membre permettant par la suite le processus d’acceptation. Plusieurs facteurs vont jouer sur cette adaptation, comme l’entretien d’une relation d’aide entre l’infirmière et le patient ainsi qu’un gain en autonomie. Il est, de plus, important que l’infirmière ne reste pas axée sur ses soins et entretienne la relation avec le patient, qu’elle l’observe et qu’elle l’écoute. Le travail de fin d’études est l’aboutissement à l’obtention du diplôme d’état d’infirmier. Ce travail m’a donc permis de mobiliser mes connaissances, d’affiner des recherches et d’apporter une analyse réflexive. Pour conclure la fin de ces trois années d’études en soins infirmiers, j’ai l’occasion d’effectuer un stage en chirurgie thoracique et vasculaire. Ce stage est une continuité pour moi puisqu’il met en lien mon travail de recherches avec la pratique du service, me permettant de mieux comprendre les patients et donc d’adapter une meilleure prise en charge. ! 50 Bibliographie Ouvrages : DAYDE, MC., PASCAL, C., CLERGUES, E. Relation d’aide en soins infirmiers. 3e ed. Issy-Les-Moulineaux : Elsevier Masson, 2014. 158 p. (Savoir et pratique infirmière). HESBEEN, W. Prendre soin à l’hôpital. Paris : Masson, 1997. 196 p. BOISSIER, C., CARPENTIER, PH., MOLLARD, JM., Médecine vasculaire. Paris : John Libbey Eurotext, 1995. 146 p. PAILLARD, C. Dictionnaire des concepts en soins infirmiers. 2e ed. Noisy-Le-Grand : Setes, 2015. 525 p. MINK, V. Endocrinologie Diabétologie. 2e ed. Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson, 2011. 102 p. (Mémo stage infirmier). Article de périodique OUHARZOUNE, Y., DEBERTRAND N., WARNET S. L’amputation en contexte posttraumatique. In La revue de l’infirmière. Mars 2015, n°209, p.22-29. Textes législatifs : Le Premier ministre. Décret n°2004-1049 du 4 octobre 2004 relatif à la liste des affections comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse. [En ligne] Journal Officiel, 5 octobre 2004. Disponible sur <https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000628065> (Consulté le 20/12/15) Loi n°2005-102 du 11 février 2005 – art.2 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. [En ligne] Journal Officiel, 11 février 2005. Disponible sur <https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=3ADA8ADD33A21E6 15F1F39FFBF82D62B.tpdila18v_3?idArticle=LEGIARTI000006796446&cidTexte=LE GITEXT000006074069&dateTexte=20160502> (Consulté le 20/12/15) Loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé – art 52. [En ligne] Journal Officiel, 18 décembre 2012. 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Disponible sur <http://www.hassante.fr/portail/jcms/c_1601003/fr/travailler-en-equipe> (Consulté le 22/04/2016) Sommaire des annexes I. Annexe 1 : Schéma du fonctionnement d’un pancréas sains et d’un pancréas atteint Page 1 II. Annexe 2 : Tableau de correspondante de la valeur HbA1C avec la glycémie moyenne Page 2 III. Annexe 3 : Les différents niveaux d’amputation du membre inférieur Page 3 IV. Annexe 4 : Demande d’autorisation pour les entretiens Page 4 V. Annexe 5 : Guide d’entretien semi-directif auprès de professionnels de santé Page 5 VI. Annexe 6 : Quatrième page de couverture : l’abstract Page 7 Annexes ! I. Annexe 1 : Schéma du fonctionnement d’un pancréas sain et d’un pancréas atteint ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! 1 II. Annexe 2 : Tableau de correspondante de la valeur HbA1C avec la glycémie moyenne ! Valeur HbA1c Glycémie moyenne 6% 1.2 g/l 7% 1.5 g/l 8% 1.8 g/l 9% 2.10 g/l 10 % 2.40 g/l ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! 2 III. Annexe 3 : Les différents niveaux d’amputation du membre inférieur ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! 3 IV. Annexe 4 : Demande d’autorisation pour les entretiens ! 4 V. Annexe 5 : Guide d’entretien semi-directif auprès de professionnels de santé ! Entretien infirmier Etudiante en 3 ème année de soins infirmiers et dans le cadre de mon sujet de travail de fin d’étude, portant sur « l’accompagnement infirmier de la personne atteinte d’un handicap physique, plus précisément l’amputation », je souhaite réaliser un entretien afin d’affiner mes recherches. L’infirmière est-elle en présence du médecin lors de l’annonce de l’amputation au patient ? Comment l’annonce-t-il ? Objectif : Connaître les conditions du patient lors de l’annonce Vous êtes-vous déjà senti en difficulté ? Objectif : Connaître l’attitude du soignant face au patient Quelles ont été les différentes réactions des patients ? Objectif : Connaître les différentes réactions des patients afin de voir les différentes prises en charge adaptées Avez-vous été confronté au refus d’amputation d’un patient ? Objectif : Connaître les moyens mis en place lorsqu’il y a un refus Comment réagit le patient amputé lors des soins ? Comment réagissez-vous ? Objectif : Connaître les réactions du patient lors des soins ainsi que celles des soignants ! 5 Pensez-vous que si le patient gagne en autonomie, alors il s’adaptera plus facilement et rapidement à sa nouvelle image corporelle ? Objectif : Vérification de mon hypothèse Comment aidez-vous le patient à gagner de l’autonomie ? Objectif : Voir les moyens mis en œuvre pour favoriser cette autonomie Avez-vous des formations particulières au sujet de la prise en charge d’une personne amputée ? Objectif : Va me permettre de savoir si le personnel infirmier est livré à lui-même lors de la prise en charge d’une personne amputée, ou si il a un support théorique et pratique sur la prise en charge. Si non, est-ce que cela vous intéresserait ? Avez-vous quelque chose à rajouter ? ! 6 VI. Annexe 6 : Quatrième page de couverture : l’abstrac « L’amputation, le deuil d’un membre » Mots clés : diabète, amputation, deuil, image corporelle, accompagnement Résumé : De nos jours, le diabète de type 2 est une maladie chronique qui ne cesse de se répandre dans le monde. Malgré les nombreux traitements, beaucoup de patients présentent un diabète déséquilibré, entraînant à long terme de multiples complications, notamment l’amputation. L’amputation va alors avoir des conséquences physiques se justifiant par la perte d’un membre mais également psychologiques mettant le patient face à une altération de son image corporelle. Cette problématique m’a amené à la question suivante : Comment l’infirmière peut-elle accompagner le patient à s’adapter à sa nouvelle image corporelle ? Au regard de mes différentes recherches et entretiens auprès de professionnels de santé, j’ai pu constater qu’il est important que l’infirmière soulage le patient sur le plan physique comme sur le plan psychologique, en mettant en place une relation d’aide. De plus, un gain en autonomie influencerait sur l’adaptation du patient envers son image corporelle. Que pourrait-on envisager pour une meilleure prise en charge psychologique du patient amputé ? Que faire si l’infirmière se sent en difficulté ? « amputation, the grief of the limb » Keywords: diabete, amputation, grief, body image, care Summary : Nowadays, the type 2 diabetes is a chronic disease which spreads very quickly worldwide. Despite numerous treatments, many patients present an unbalanced diabetes in the long term, leading to numerous complications, especially amputation. ! Amputation will then carry to: ! physical consequences linked to the loss of a limb ! psychological issues since the patient must face an alteration of his body image. Facing that situation, I wondered: how can the nurse care for the patient to face his new altered body image? Given my various researches and interviews with health professionals, I noticed that the nurse has an essential role to relieve the patients both on physical and psychological aspects, mainly through an assistance and respectful relationship. Moreover, a self-care autonomy would also stimulate the patient in the acceptance of his new body image. What kind of therapy could we implement for a better psychological support of amputated patient? What can we do if the nurse feels helpless facing that kind of situation? ! 7 Quatrième page de couverture : L’abstract